2. La Caisse d'amortissement de la dette sociale : un cantonnement efficace
a) Le bilan positif de la CADES : elle a amorti depuis sa création plus de 46 milliards d'euros
(1) Le cantonnement permet un remboursement annuel effectif de la dette
L'accumulation des déficits au milieu des années 1990 a conduit le législateur a créé une structure dédiée à leur refinancement et à leur amortissement en treize ans grâce à l'affectation d'une ressource fiscale ad hoc , la contribution pour le remboursement de la dette sociale (CRDS).
Depuis la dernière reprise de dette effectuée en 2009, une fraction de la CSG a également été affectée à la Caisse compte tenu des nouvelles contraintes qui pèsent sur son financement depuis 2005 ( cf. infra ).
Au 31 mars 2009, la CADES avait repris 134,6 milliards d'euros de déficit. Le tableau ci-dessous présente le détail de ces reprises.
Reprises de dettes par la Cades depuis l'origine
(en milliards d'euros)
Année |
Vecteur |
Nature de la dette reprise |
Montant |
1996 |
Ordonnance du 24 janvier 1996 |
Dette en trésorerie de l'ACOSS correspondant aux déficits cumulés des exercices 1994 et 1995 et déficit prévisionnel 1996 du régime général |
20,89 |
Déficits 1995 et 1996 de la Canam |
0,46 |
||
Emprunt ACOSS, repris par l'Etat en 1994 (remboursements à l'Etat jusqu'en 2005) |
23,38 |
||
1998 |
LFSS pour 1998 |
Dette en trésorerie de l'ACOSS correspondant aux déficits cumulés du régime général depuis 1996 (après déduction de la fraction déjà prise en charge en 1996) et déficit prévisionnel de 1998 |
13,26 |
2003 |
LFSS pour 2003 |
Dette du Forec (première moitié régime général et autres régimes) |
1,28 |
2004 |
LFSS pour 2004 |
Dette du Forec (deuxième moitié régime général) |
1,10 |
LAAM du 13 août 2004 |
Déficits cumulés de la branche maladie du régime général au 31 décembre 2003 et déficit prévisionnel 2004 |
35,00 |
|
2005 |
Déficit prévisionnel de la branche maladie en 2005 (Compte tenu d'une « avance » de 1,69 milliard d'euros prélevée sur la somme de 35 milliards d'euros mentionnée à la ligne précédente) |
6,61 |
|
2006 |
Déficit prévisionnel de la branche maladie en 2006 (Compte tenu d'une « avance » de 0,30 milliard d'euros prélevée sur la somme de 6,61 milliards d'euros mentionnée à la ligne précédente) |
5,70 |
|
2007 |
Régularisation du déficit définitif 2006 |
- 0,06 |
|
2008 |
LFSS pour 2009 |
Déficits cumulés au 31 décembre 2008 de la CNAM, de la CNAV et du FSV (1 ère tranche) |
10,00 |
2009 |
Déficits cumulés au 31 décembre 2008 de la CNAM, de la CNAV et du FSV (2 nde tranche) |
17,00 |
|
Total |
134,61 |
Source : Commission de suivi de la dette sociale
A fin 2010 , selon les derniers chiffres publiés par la commission des comptes de la sécurité sociale, la dette amortie par la CADES depuis sa création devrait atteindre 47,8 milliards d'euros . La dette restant à amortir s'élèverait alors à 86,8 milliards d'euros.
Votre rapporteur pour avis souhaite souligner l'importance de ces chiffres qui témoignent de l'avantage du cantonnement d'une partie de la dette sociale : l'amortissement sur une durée limitée de la dette sociale, contrairement à la dette portée par l'Etat non amortie et refinancée sans horizon déterminé a priori .
Amortissement de la dette sociale
(en milliers d'euros)
Année de reprise de dettes |
Dette reprise cumulée |
Amortissement annuel |
Amortissement cumulé |
Situation nette de l'année |
1996 |
23 249 |
2 184 |
2 184 |
-21 065 |
1997 |
25 145 |
2 907 |
5 091 |
-20 063 |
1998 |
40 323 |
2 444 |
7 535 |
-32 788 |
1999 |
42 228 |
2 980 |
10 515 |
-31 713 |
2000 |
44 134 |
3 226 |
13 741 |
-30 393 |
2001 |
45 986 |
3 021 |
16 762 |
-29 224 |
2002 |
48 986 |
3 227 |
19 989 |
-28 997 |
2003 |
53 269 |
3 296 |
23 285 |
-29 984 |
2004 |
92 366 |
3 345 |
26 630 |
-65 736 |
2005 |
101 976 |
2 633 |
29 263 |
-72 713 |
2006 |
107 676 |
2 815 |
32 078 |
-75 598 |
2007 |
107 611 |
2 578 |
34 656 |
-72 955 |
2008 |
117 611 |
2 885 |
37 541 |
-80 070 |
2009 |
134 611 |
5 260 |
42 801 |
-91 810 |
2010 |
134 611 |
4 997 |
47 798 |
-86 813 |
Source : Rapport de la commission des comptes de la sécurité sociale - juin 2010
(2) Le coût de portage de la dette sociale par la CADES
Le coût de portage de la dette sociale par la CADES mobilise une part importante de ses ressources . Ainsi, en 2010, la charge de la dette représenterait 3,2 milliards d'euros, soit 39 % de ses produits ; l'amortissement annuel s'élèverait à 5 milliards d'euros
Depuis sa création, les intérêts d'emprunt servis par la CADES auraient représenté 29,9 milliards d'euros . La charge de la dette peut enregistrer de fortes variations d'une année sur l'autre : ainsi en 2006 et en 2007, les charges d'intérêt ont représenté respectivement 48,6 % et 54,6 % des ressources de la CADES, alors même que ces dernières avaient augmenté et que le montant de dette reprise était resté inchangé.
Compte tenu du niveau actuel particulièrement bas des taux d'intérêt, votre rapporteur pour avis souhaite attirer l'attention sur l'éventuel impact d'une remontée des taux sur le calendrier d'amortissement de la dette .
Grâce à la forte baisse des taux « courts » constatée depuis le début de l'année 2009, qui s'est rapidement répercutée sur les taux variables, le coût de refinancement de la CADES a substantiellement baissé entre la fin de l'année 2008 et le 31 juillet 2009, passant de 3,89 % à 3,27 % au 31 juillet 2009.
Evolution du coût de refinancement
21/12/2008 |
31/07/2009 |
|
Taux variable |
3,68 % |
1,09 % |
Taux fixe |
3,87 % |
3,79 % |
Taux indexé |
4,28 % |
4,27 % |
Taux global de refinancement |
3,89 % |
3,27 % |
Source : Rapport de la commission des comptes de la sécurité sociale - Octobre 2009
Or, il convient de souligner qu'une part significative de la dette portée par la CADES est sensible à l'évolution des marchés. Ainsi, au 6 mars 2009, la part de la dette à taux variable atteignait 32 % en raison de l'importance des refinancements à court terme mis en place pour permettre la dernière reprise de dette décidé par la LFSS pour 2009. Avant la reprise, cette part représentait 10,9 % de l'endettement total de la Caisse.
Compte tenu des transferts envisagés ( cf. infra ) et de leur ampleur, l'exposition au risque de taux de la CADES devrait s'intensifier à moyen terme.
b) Un principe vertueux : la préservation des générations futures
Suite aux nouvelles décisions de refinancement adoptées en 1998 et 2004, qui ont remis en cause la date d'extinction de la CADES initialement prévue en 2009, le législateur a souhaité interdire autant que possible toute nouvelle prolongation de la durée de vie de la Caisse, le caractère éphémère de celle-ci ayant été particulièrement affirmé lors de sa création afin de ne pas faire supporter aux générations futures des charges indues.
Ainsi, la loi organique du 2 août 2005 relative aux lois de financement a, suite à un amendement parlementaire, modifié l'ordonnance du 24 janvier 1996 relative au remboursement de la dette sociale et prévu que « tout nouveau transfert de dette à la CADES serait accompagné d'une augmentation des recettes de la caisse permettant de ne pas accroître la durée d'amortissement de la dette sociale ». Le Conseil constitutionnel a souligné la valeur organique de cette règle dans sa décision n° 2005-519 DC du 29 juillet 2005.
La date d'extinction des missions de la CADES n'est plus mentionnée dans l'ordonnance précitée. La durée d'amortissement de la dette sociale est désormais appréciée au vu des éléments présentés par la Caisse dans ses estimations publiques. D'après l'annexe 8 au projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2010, la CADES a une chance sur deux d'avoir intégralement amorti en 2021 la dette dont le refinancement lui a été confié. La probabilité que cette dette soit déjà remboursée en 2020 est de 5 % ; le risque qu'elle ne le soit pas dans un délai supérieur à 14 ans, soit en 2023, est également de 5 %.