INTRODUCTION
Mesdames, Messieurs,
Votre commission avait renoncé, l'an passé, à examiner les crédits des autorités administratives indépendantes figurant dans le programme « Coordination du travail gouvernemental » tout en procédant au cours de l'année à une série d'auditions des représentants des autorités administratives indépendantes relevant de sa compétence 1 ( * ) .
Le gouvernement ayant accepté, à la demande persistante de votre commission des lois, de créer un programme spécifique regroupant les autorités en charge de la protection des droits et libertés, votre commission a décidé de se saisir des crédits affectés à ce programme.
Cette démarche se justifiait d'autant plus que, d'une part, le Gouvernement y a opportunément rattaché les crédits de la Commission nationale de l'informatique et des libertés 2 ( * ) ainsi que ceux du Contrôleur général des lieux de privation de liberté , d'autre part, qu'elle offrait l'occasion pour votre rapporteur de s'interroger sur le périmètre d'intervention du futur Défenseur des droits , créé par la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008.
Votre rapporteur a ainsi interrogé toutes les autorités administratives indépendantes relevant du programme ainsi que le Défenseur des enfants, afin de recueillir leurs attentes et leurs craintes au sujet du champ de compétence du futur Défenseur des droits. Cette consultation paraissait d'autant plus nécessaire que le Parlement devrait se prononcer, dans quelques mois, sur le projet de loi organique définissant ses attributions et ses modalités d'intervention, ainsi que, ultérieurement, sur le choix du titulaire de la fonction.
Votre rapporteur a également adressé un questionnaire à ces mêmes autorités afin de réaliser une étude sur le rapport efficacité/coût des correspondants locaux des autorités administratives indépendantes, étude qui fait apparaître la pertinence d'une telle organisation territoriale.
I. LA CRÉATION D'UN NOUVEAU PROGRAMME À L'INITIATIVE DU SÉNAT
A. LA GENÈSE DU PROGRAMME
1. La volonté renouvelée du Sénat de sanctuariser les crédits des autorités administratives indépendantes
a) Le projet de loi de finances pour 2006
Lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2006, Mme Jacqueline Gourault, rapporteur pour avis, au nom de votre commission, des crédits de la mission « Direction de l'action du Gouvernement » avait estimé nécessaire de protéger les crédits des autorités administratives indépendantes , en créant, au sein de cette mission, un programme spécifique regroupant les sept autorités administratives indépendantes (AAI) du programme « Coordination du travail gouvernemental » 3 ( * ) .
L'amendement présenté en ce sens avait été adopté à l'unanimité par notre assemblée, après un avis favorable de la commission des finances, mais contre l'avis du Gouvernement. M. Christian Jacob, ministre de la fonction publique, avait en effet indiqué que l'initiative de Mme Jacqueline Gourault n'était pas conforme à l'article 7 de la LOLF en vertu duquel un programme « concourt à une politique publique définie », la défense des droits et libertés ne pouvant être regardée comme une politique publique.
L'Assemblée nationale s'est rangée à cet argument et l'amendement n'a finalement pas été retenu par la commission mixte paritaire.
b) Le rapport de l'Office parlementaire d'évaluation de la législation
Le 15 juin 2006, l'Office parlementaire d'évaluation de la législation, organe commun aux deux assemblées, a adopté un rapport de notre collègue M. Patrice Gélard, qui réaffirmait la nécessité de « sanctuariser » les crédits des AAI en charge de la protection des droits et libertés afin de neutraliser le principe de fongibilité asymétrique des crédits, institué par la LOLF, de nature à fragiliser ces autorités 4 ( * ) .
En conséquence, l'Office préconisait :
- soit de créer une mission « Régulation et protection des libertés », qui comprendrait un programme « Régulation économique », regroupant les AAI chargées d'une mission de régulation, et un programme « Défense et protection des libertés », rassemblant les autorités exerçant principalement une mission de protection des droits et libertés fondamentaux ;
- soit que certaines AAI exerçant des missions de protection des droits et libertés, et dont le budget atteint un montant suffisant, fassent l'objet d'un programme spécifique au sein des missions ministérielles où elles figurent déjà. Les budgets du CSA, du Médiateur de la République, de la CNIL et de la HALDE pourraient ainsi constituer des programmes.
c) Le projet de loi de finances pour 2007
Fort des recommandations du rapport de l'Office, le Sénat a de nouveau adopté, lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2007, toujours contre l'avis du Gouvernement, deux amendements identiques (l'un de votre commission des lois, l'autre de la commission des finances) tendant à identifier les crédits des AAI dans un programme spécifique de la mission « Direction de l'action du Gouvernement ».
L'amendement a, une nouvelle fois, été rejeté en commission mixte paritaire.
d) Le projet de loi de finances pour 2008
Lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2008, à l'initiative des seuls rapporteurs spéciaux de la mission « Direction de l'action du Gouvernement », MM. François Marc et Michel Moreigne 5 ( * ) , le Sénat a, pour la troisième fois, adopté ce même amendement.
* 1 Voir le rapport d'information n° 353 (2007-2008) du 27 mai 2008 de M. Jean-Jacques Hyest, fait au nom de la commission des lois : « La protection du droit et des libertés fondamentales en France. Un cycle d'auditions de la commission des lois (2007-2008) » ; rapport disponible sur Internet : http://www.senat.fr/noticerap/2007/r07-353-notice.html .
* 2 Relevant jusqu'à présent de la mission Justice que la commission des lois examine par ailleurs.
* 3 Ces sept AAI était le Médiateur de la République, le Conseil supérieur de l'audiovisuel, le Comité consultatif national d'éthique, la Commission nationale de contrôle des interceptions de sécurité, la Commission d'accès aux documents administratifs, la Commission nationale de déontologie de la sécurité et la Commission consultative du secret de la défense nationale.
* 4 Rapport d'information n° 404 (2005-2006) « Les autorités administratives indépendantes : évaluation d'un objet juridique non identifié », au nom de l'Office parlementaire d'évaluation de la législation ; rapport disponible sur Internet : http://www.senat.fr/rap/r05-404-1/r05-404-1.html .
* 5 La commission des lois avait décidé de ne plus examiner les crédits de la mission « Direction de l'action du Gouvernement » pour se consacrer à ceux du programme « Modernisation de l'Etat ».