N° 48

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2008-2009

Annexe au procès-verbal de la séance du 22 octobre 2008

AVIS

PRÉSENTÉ

au nom de la commission des Finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la Nation (1) sur le projet de loi , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE APRÈS DÉCLARATION D'URGENCE , en faveur des revenus du travail ,

Par M. Serge DASSAULT,

Sénateur

(1) Cette commission est composée de : M. Jean Arthuis , président ; M. Yann Gaillard, Mme Nicole Bricq, MM. Jean-Jacques Jégou, Thierry Foucaud, Aymeri de Montesquiou, Joël Bourdin, François Marc, Alain Lambert , vice-présidents ; MM. Philippe Adnot, Jean-Claude Frécon, Mme Fabienne Keller, MM. Michel Sergent, François Trucy , secrétaires ; M. Philippe Marini, rapporteur général ; Mme Michèle André, MM. Bernard Angels, Bertrand Auban, Denis Badré, Mme Marie-France Beaufils, MM. Claude Belot, Pierre Bernard-Reymond, Auguste Cazalet, Michel Charasse, Yvon Collin, Philippe Dallier, Serge Dassault, Jean-Pierre Demerliat, Éric Doligé, André Ferrand, Jean-Pierre Fourcade, Christian Gaudin, Adrien Gouteyron, Charles Guené, Claude Haut, Edmond Hervé, Pierre Jarlier, Yves Krattinger, Gérard Longuet, Roland du Luart, Jean-Pierre Masseret, Marc Massion, Gérard Miquel, Albéric de Montgolfier, Henri de Raincourt, François Rebsamen, Jean-Marc Todeschini, Bernard Vera.

Voir le(s) numéro(s) :

Assemblée nationale ( 13 ème législ.) :

1096 , 1106 , 1107 , 1108 et T.A. 187

Sénat :

502 (2007-2008) et 43 (2008-2009)

AVANT-PROPOS

Mesdames, Messieurs,

Le Sénat est saisi du projet de loi en faveur des revenus du travail 1 ( * ) , adopté par l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence.

Celui-ci a été renvoyé au fond à la commission des affaires sociales. Votre commission des finances s'est saisie pour avis des dispositions suivantes afin d'en examiner l'impact éventuel sur l'équilibre des finances publiques :

- l'article 1 er met en oeuvre un crédit d'impôt en faveur de l'intéressement et l' article 2 modifie les règles de blocage de la participation ; notre commission des finances s'était déjà saisie pour avis des dispositions relatives à l'épargne salariale dans le cadre de l'examen du projet de loi pour le pouvoir d'achat 2 ( * ) ;

- les articles 4 et 5 modifient les conditions d' exonérations générales de cotisations sociales pour les entreprises qui ne respecteraient pas l'obligation de négociation annuelle obligatoire (NAO) et pour les branches professionnelles dont le premier niveau de la grille salariale demeure inférieur au SMIC ;

- s'agissant par ailleurs des dispositions adoptées par l'Assemblée nationale, l' article 2 quater (nouveau) relatif à l'épargne salariale dans les entreprises publiques consolide et tend à élargir les mécanismes de participation et d'intéressement dans les entreprises publiques.

Ce projet de loi s'inscrit dans le programme du Président de la République de revalorisation de la valeur travail et d'amélioration du pouvoir d'achat des Français. Il vient compléter une série de réformes initiée par la loi n° 2007-1223 du 21 août 2007 en faveur du travail, de l'emploi et du pouvoir d'achat, qui s'est poursuivie par l'adoption de la loi n° 2008-111 du 8 février 2008 pour le pouvoir d'achat, puis de la loi n° 2008-789 du 20 août 2008 portant rénovation de la démocratie sociale et réforme du temps de travail.

Il s'agit, par un ensemble de leviers s'appuyant sur le développement de l'intéressement et de la participation mais aussi sur la hausse des salaires , d'apporter une réponse supplémentaire aux Français pour revaloriser les revenus de leur travail.

Toutefois, si ce projet de loi n'engage pas de dépenses budgétaires directes , dans la mesure où l'effort demandé par le gouvernement relève de la politique salariale des entreprises, l'incitation fiscale attachée au crédit d'impôt en faveur de l'intéressement représente une perte de recettes pour l'Etat évaluée entre 800 millions d'euros et 1,2 milliard d'euros .

En outre, un nouvel élan doit être donné à la participation, pour donner plus de substance au présent projet de loi . Tel est le sens de l'amendement proposé par votre commission des finances portant article additionnel après l'article 2, tendant à retenir comme base de calcul de la réserve spéciale de participation la règle « des trois tiers » (un tiers du bénéfice aux salariés sous forme de participation, un tiers aux actionnaires percevant des dividendes de l'entreprise, et un tiers pour les investissements). Une telle formule est plus simple et plus lisible.

Enfin, les dispositions qui tendent à encourager une revalorisation des salaires font peser des contraintes supplémentaires sur la compétitivité des entreprises sans que, à son appui, un chiffrage ne soit présenté quant aux gains espérés en termes de pouvoir d'achat pour les salariés.

*

* *

Dans un contexte économique fortement marqué par la crise financière et les incertitudes pesant sur les perspectives de croissance, votre commission des finances examine donc avec la plus grande vigilance toute mesure nouvelle qui aggraverait encore le déficit et la dette publics .

A cet égard, votre rapporteur pour avis rappelle la préconisation, qu'il émet, à titre personnel , avec constance, tendant à une refonte globale et systémique du système de financement de la sécurité sociale . Par l'introduction, dans le secteur marchand, d'un prélèvement assis sur le chiffre d'affaires diminué des rémunérations, le « coefficient emploi-activité » réduirait, voire supprimerait les charges sur salaire, favoriserait les entreprises de main d'oeuvre et apporterait un nouveau mode de financement de la sécurité sociale plus simple et soutenable, sans charge pour l'Etat.

Dans cette perspective, il continue à appeler de ses voeux un mouvement de réduction de la charge que représente pour les finances publiques les allègements généraux de cotisations sociales. Aussi, il considère que l'efficacité des allègements généraux de cotisations sociales au regard de la politique de l'emploi doit faire l'objet d'une évaluation car en quinze années de mise en oeuvre, les exonérations générales de cotisation sociales auront représenté plus de 200 milliards d'euros au total . Les dernières projections, établies dans le cadre du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2009, indiquent que ces montants devraient atteindre 22,8 milliards d'euros en 2008 et 23,4 milliards d'euros en 2009 .

I. UN NOUVEAU CHAMP POUR LE DÉVELOPPEMENT DE L'INTÉRESSEMENT ET DE LA PARTICIPATION

Le projet de loi adopté par l'Assemblée nationale propose un nouveau cadre incitatif au développement de la participation et de l'intéressement, alors que les salariés des petites et moyennes entreprises, d'une part, les agents publics, d'autre part, restent largement exclus du champ de l'épargne salariale.

Tout en approuvant les dispositifs proposés aux 2 et 2 quater , votre rapporteur pour avis estime nécessaire de compléter ces mesures par cinq amendements portant articles additionnels après les articles 2 et 2 nonies et elle propose de supprimer l'article 1 er .

A. LA CRÉATION D'UN CRÉDIT D'IMPÔT EN FAVEUR DE L'INTÉRESSEMENT (ARTICLE 1ER)

1. Une nouvelle mesure fiscale incitative au développement de l'intéressement

L'article 1 er vise à créer un nouveau dispositif fiscal incitatif au développement de l'intéressement, afin de doubler le montant des sommes distribuées à ce titre entre 2008 et 2012.

Le crédit d'impôt pour les entreprises qui mettraient en place un accord d'intéressement correspondrait à :

- 20 % des primes versées en cas de premier d'accord d'intéressement ;

- 20 % de la différence entre la moyenne des primes versées au titre de l'accord précédent et les primes versées au titre du nouvel accord.

Par ailleurs, la possibilité de bénéficier du crédit d'impôt est également prévue :

- en cas de signature d'un avenant à un accord en cours à la date de la publication de la présente loi ;

- pour les entreprises qui auront un accord, ou un avenant à un accord, entre la date de publication de la présente loi et le 1 er juin 2009, dans l'hypothèse du versement d'une prime collective de 1.500 euros.

Dans le texte initial du projet de loi, le dispositif proposé doit s'appliquer pour une durée de six ans, un rapport d'évaluation devant être présenté au Parlement en 2014, après un premier bilan d'étape en 2010.

Le coût des mesures proposées est évalué entre 800 millions et 1,2 milliard d'euros par an.

2. Les modifications adoptées par l'Assemblée nationale

Avec l'avis favorable de la commission et du gouvernement, l'Assemblée nationale a adopté neuf amendements et sous-amendements au présent article :

- six amendements rédactionnels, de conséquence ou de précision, sur l'initiative de notre collègue député Gérard Cherpion, rapporteur au nom de la commission des affaires culturelles ;

- deux amendements et un sous-amendement complétant l'évaluation du dispositif : un premier amendement, présenté par notre collègue député Louis Giscard d'Estaing, rapporteur pour avis au nom de la commission des finances, prévoit que l'évaluation soit à l'initiative du Parlement, afin de tirer les conséquences de la récente révision constitutionnelle ; à l'initiative de notre collègue député Christian Eckert, un second amendement, sous-amendé par notre collègue député Gérard Cherpion, rapporteur au nom de la commission des affaires culturelles, prévoit un rapport d'étape pour l'évaluation du dispositif avant le 30 juin de chaque année.

3. La position de votre commission des finances : supprimer cet article

L'intéressement a connu dans la période récente une croissance dynamique : entre 2002 et 2007, les sommes versées chaque année à ce titre sont passées de 4,4 milliards d'euros à 6,5 milliards d'euros.

Votre rapporteur pour avis tient toutefois à rappeler que votre commission des finances exprime par principe des réserves quant au mécanisme du crédit d'impôt, qui se cumulera avec les incitations fiscales et sociales déjà existantes, dans un contexte de situation dégradée de nos finances publiques .

Un coût évalué à environ 1 milliard d'euros est particulièrement élevé.

Votre commission des finances vous propose donc d'adopter un amendement de suppression de l'article 1 er .

* 1 Projet de loi n° 502 (2007-2008).

* 2 Avis n° 172 (2007-2008) du 22 janvier 2008, présenté par M. Serge Dassault.

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