II. EXAMEN DE L'AVIS
Réunie le mercredi 14 novembre 2007 , sous la présidence de M. Nicolas About, président , la commission a procédé à l'examen du rapport pour avis de M. Gilbert Barbier , sur le projet de loi de finances pour 2008 (programme « Veille et sécurité sanitaires » de la mission « Sécurité sanitaire »).
M. Gilbert Barbier, rapporteur pour avis, a indiqué que le programme « veille et sécurité sanitaires » regroupe les moyens destinés à la prévention des crises sanitaires touchant la santé humaine, au sein de la mission interministérielle « Sécurité sanitaire ». Ce programme sera doté, en 2008, de 166,3 millions d'euros, soit une augmentation de près de 60 % des crédits par rapport à 2007, qui résulte en fait non pas d'un effort budgétaire accru mais d'un nouveau mode de financement des urgences et de la création de l'établissement de préparation et de réponses aux urgences sanitaires (Eprus).
L'année 2008 sera une année de transition pour la politique de sécurité sanitaire, pendant laquelle les projets en cours seront poursuivis et les initiatives nouvelles menées à moyens constants. En 2009, en revanche, l'Etat devra renforcer sa participation au budget des agences sanitaires dont les fonds de roulement seront épuisés.
Le programme « veille et sécurité sanitaires » ne représente toutefois pas la totalité des moyens engagés par les pouvoirs publics dans ce domaine : d'une part, l'assurance maladie participe largement à son financement, d'autre part, les dépenses de personnels attachées au programme sont inscrites sur la mission « Solidarité et Intégration ».
Le système français de prévention des crises sanitaires fonctionne avec plusieurs agences spécialisées. C'est la raison pour laquelle l'essentiel des crédits du programme, soit 140,3 millions d'euros, correspond à des subventions de fonctionnement à ces agences, dont elles constituent une partie plus ou moins importante du budget. Ces subventions sont ventilées entre les quatre actions du programme, en fonction des activités de chaque agence.
M. Gilbert Barbier, rapporteur pour avis, a d'abord présenté l'action « veille, surveillance, expertise et alerte », qui a pour finalité d'identifier, d'évaluer et de gérer les risques sanitaires susceptibles de menacer la population. Les actions menées dans ce cadre, sensiblement renforcées après la canicule de l'été 2003 et l'épidémie de chikungunya en 2005, concernent la collecte et l'exploitation des données existantes sur les risques sanitaires, les signalements de vigilance auprès de l'association française de sécurité sanitaire et des produits de santé (Afssaps), la détection des signaux et le déclenchement des alertes par l'institut de veille sanitaire (InVS) et la promotion de la recherche dans le domaine de la sécurité sanitaire.
Cette action bénéficie d'un tiers des crédits du programme, en hausse de 13,5 %, destinés notamment à la surveillance des arboviroses, dans l'éventualité d'une épidémie de chikungunya dans le sud-est de la France et outre-mer, où sévit également la dengue. Seront ainsi financés, aux Antilles, à la Réunion et en Corse, des campagnes de prévention, la préparation de systèmes d'alerte, l'équipement des laboratoires, l'achat de répulsifs, ainsi que des études sur les conséquences environnementales et sanitaires de l'utilisation de ces produits. Il est d'ailleurs nécessaire de développer ce type d'études, compte tenu du débat actuel sur l'usage des pesticides aux Antilles et de la crise de confiance dans les autorités sanitaires qui en résulte.
M. Gilbert Barbier, rapporteur pour avis, a ensuite abordé la deuxième action du programme, consacrée à la « gestion des urgences, des situations exceptionnelles et des crises », qui a pour objet de garantir la pertinence des décisions des autorités en cas de crise grâce, notamment, à la mise en oeuvre de plans de réponse aux situations d'urgence sanitaire : « pandémie grippale », « canicule » et « Biotox ».
Cette politique a d'abord été financée, conformément à la loi de financement pour 2002, par un fonds de concours commun à l'Etat et à l'assurance maladie, initialement destiné à l'achat, au stockage et la livraison de traitements pour les pathologies résultant d'actes terroristes. La loi de financement pour 2005 en a étendu la mission à l'ensemble des menaces sanitaires graves. Progressivement l'assurance maladie est devenue l'unique contributeur régulier de ce fonds alors que sa participation devait, à l'origine, rester exceptionnelle. De fait, le Conseil constitutionnel, dans sa décision du 15 décembre 2005, a contesté ce dispositif au motif que, conformément à la loi organique relative aux lois de finances, les versements aux fonds de concours doivent avoir un caractère volontaire et non pas obligatoire.
En réponse à cette critique, la loi de financement pour 2007 a créé le fonds de prévention des risques sanitaires (Fopris), dont les recettes étaient constituées d'une contribution annuelle à la charge de l'assurance maladie et d'une subvention équivalente de l'Etat. Le Fopris a été mis en place le 24 avril 2007 par le conseil d'administration du fonds de solidarité vieillesse (FSV), chargé d'en assurer la gestion.
Cette solution transitoire a été définitivement réglée par la loi 5 mars 2007, qui a crée l'Eprus et lui a confié une triple mission : la gestion administrative et financière de la réserve sanitaire, l'organisation d'exercices pour valider ou améliorer les plans de réponse aux risques sanitaires ainsi que l'acquisition, le stockage et la distribution des produits nécessaires à la protection de la population face à des menaces sanitaires graves.
Cette opération conduit mécaniquement à une augmentation très importante des crédits de l'action, dont l'Eprus est destinataire à 85 %, soit 55 millions d'euros, auxquels s'ajoutent 75 millions d'euros en provenance de l'assurance maladie.
M. Gilbert Barbier, rapporteur pour avis, s'est ensuite intéressé à la troisième action du programme relative à la « production et mise en oeuvre de règles, de recommandations, de décisions et autres dispositifs » par les agences sanitaires. Celle-ci a pour objet la diffusion de recommandations et de bonnes pratiques de façon à éviter l'émergence d'un danger évitable, la définition d'une réglementation garantissant un niveau élevé de protection sanitaire pour la population, en encadrant certaines activités et l'utilisation des produits à risque ainsi que le suivi de l'application de ces décisions par des contrôles réguliers.
Les crédits affectés à ces mesures sont constants - 18,1 millions d'euros - et seront consacrés pour les deux tiers aux agences sanitaires chargées d'édicter les normes et de délivrer les autorisations : l'Afssaps, l'agence française de sécurité sanitaire des aliments (Afssa), l'agence française de sécurité sanitaire de l'environnement et du travail (Afsset) et l'agence de la biomédecine (ABM).
La subvention de l'Etat à ces agences devrait, en revanche, augmenter en 2009. En effet, après plusieurs années de ponction des fonds de roulement des agences pour financer leurs investissements, ce qui a permis à l'Etat de les subventionner a minima, les réserves seront réduites, à la fin de l'année 2008, à leur niveau prudentiel, équivalant à un mois de fonctionnement pour chaque agence. Cette mesure d'économie ne pourra donc plus être réitérée.
Il a enfin présenté les actions menées en matière de formation et d'information qui sont regroupées au sein de la quatrième action du programme. Elles sont destinées à assurer la diffusion d'une information au grand public en cas de crise et, plus largement, d'établir des documents informatifs sur les facteurs de risque sanitaire pour les professionnels et la population. Plusieurs formations sont également proposées aux professionnels, en lien avec l'école des hautes études en santé publique. Ces actions sont principalement menées par l'InVS et par l'ABM, ce qui explique que ces deux agences perçoivent 80 % des crédits.
M. Alain Vasselle ayant demandé si l'Etat avait effectivement participé à hauteur de 50 % aux ressources du Fopris, M. Gilbert Barbier, rapporteur pour avis, lui a confirmé que le Fopris a bénéficié de 175 millions d'euros de subvention de l'Etat et d'une dotation équivalente de l'assurance maladie.
M. Nicolas About, président, a rappelé que la loi du 5 mars 2007 prévoit un partage par moitié du financement de l'Eprus entre l'Etat et l'assurance maladie.
M. Guy Fischer a fait valoir que les dépenses relatives à la sécurité sanitaire, qui constitue une fonction régalienne de l'Etat, devraient intégralement lui revenir.
M. Nicolas About, président, en est convenu. L'assurance maladie doit prendre en charge les flux de médicaments et de dispositifs médicaux, l'Etat l'achat de stocks pour faire face à une crise sanitaire.
Après avoir rappelé les missions de l'ABM, Mme Marie-Thérèse Hermange a souhaité savoir si les crédits versés aux agences au titre de la troisième action du programme sont uniquement destinés à leur activité de production et de mise en oeuvre de règles et de recommandations ou s'il s'agit également de moyens de fonctionnement.
M. Gilbert Barbier, rapporteur pour avis, a rappelé que, pour mener à bien leurs missions, les agences sanitaires bénéficient également de ressources propres, la taxe sur les demandes d'autorisations de mise sur le marché (AMM) pour l'Afssaps par exemple.
M. François Autain a dénoncé le niveau insuffisant de la subvention de l'Etat à l'Afssaps, qui la rend dépendante du versement de la taxe due par les laboratoires pharmaceutiques pour les dossiers d'AMM des médicaments. Or, le montant de cette taxe tend à diminuer, du fait du nombre croissant de dossiers traités au niveau européen. Pour préserver cette source de revenus, l'Afssaps risque d'augmenter le nombre d'AMM, même si les laboratoires ne présentent pas de véritables innovations.
M. Gilbert Barbier, rapporteur pour avis, a fait valoir que le raisonnement inverse peut également être tenu : si l'Etat finance intégralement l'Afssaps et que la taxe est supprimée, les laboratoires présenteront autant de demandes d'AMM qui leur plaira, dès lors qu'elles seront gratuites, y compris pour des produits sans intérêt thérapeutique.
M. François Autain a estimé que le problème réside, en réalité, dans le remboursement, par la sécurité sociale, des médicaments dont le service médical rendu n'est pas avéré.
M. Gilbert Barbier, rapporteur pour avis, en est convenu mais a rappelé que la décision du remboursement ne relève pas de l'Afssaps.
Suivant l'avis de M. Gilbert Barbier, rapporteur pour avis, la commission a donné un avis favorable à l'adoption des crédits du programme « veille et sécurité sanitaires » de la mission interministérielle « Sécurité sanitaire » pour l'année 2008 .