II. QUELLES ÉVOLUTIONS POUR LE CADRE LÉGISLATIF ET RÉGLEMENTAIRE DE L'AUDIOVISUEL EN 2008 ?
Les auditions menées par votre rapporteur dans le cadre de l'élaboration de son rapport conduisent à penser que l'audiovisuel français se trouve incontestablement à la croisée des chemins.
Au plan technologique d'abord, la numérisation des réseaux et la multiplication des supports de diffusion entrainent des charges croissantes pour les éditeurs . La double diffusion temporaire des programmes hertziens en analogique et en numérique, le financement des réseaux de télévision numérique terrestre et de télévision mobile personnelle, l'achat de programmes et de matériels labélisés « haute définition » vont pour un temps peser lourdement sur les comptes des sociétés sans garantir de retour sur investissement immédiat.
Au plan concurrentiel ensuite, l'irruption dans le secteur de nouveaux acteurs aux moyens financiers considérables tels que les opérateurs de télécommunications ou les agrégateurs de contenus bouleverse les équilibres établis et remet en perspective la puissance de nos champions nationaux . Le tableau ci-dessous permet ainsi de prendre la mesure de l'écart existant entre un des opérateurs dominants des télécommunications sur la scène européenne et les trois principaux groupes audiovisuels français.
DONNÉES FINANCIÈRES RELATIVES AUX
PRINCIPAUX GROUPES
DU SECTEUR DE L'AUDIOVISUEL ET DES
TÉLÉCOMMUNICATIONS
Chiffres d'affaires 2006
|
Résultat Net 2006
|
|
France Télécom |
51,7 |
4,7 |
TF1 |
2,65 |
0,452 |
Metropole TV |
1,28 |
0,408 |
Canal+ |
1,6 |
0,042 |
Devant ces évolutions majeures, votre rapporteur estime que la législation et la réglementation relatives au secteur de l'audiovisuel doivent aujourd'hui être assouplies, afin de donner aux éditeurs les moyens de s'adapter à ce nouveau contexte technologique et concurrentiel.
A. LA LOI « TÉLÉVISION DU FUTUR » : LA MISE EN PLACE D'UN CADRE LÉGISLATIF POUR LES SERVICES DE DEMAIN
Au cours de l'année 2007, une première réforme législative d'envergure a permis de modifier substantiellement le cadre réglementaire relatif au secteur de l'audiovisuel. La loi n° 2007-309 du 5 mars 2007 relative à la modernisation de la diffusion audiovisuelle et à la télévision du futur a ainsi fixé le cadre juridique nécessaire pour atteindre trois objectifs principaux :
- l'extension de la couverture de la télévision numérique terrestre (TNT) ;
- la fixation des modalités d'extinction de la diffusion hertzienne terrestre analogique, sujet initié par votre commission au moment de la discussion de la loi « paquet télécom » ;
- le développement des nouveaux modes de diffusion que sont la télévision en haute définition et la télévision mobile personnelle.
Depuis la promulgation de cette loi, d'importantes étapes ont été franchies au regard de ces objectifs grâce à la collaboration du Conseil supérieur de l'audiovisuel et des opérateurs audiovisuels.
1. Vers la fin de la diffusion hertzienne analogique
Malgré le scepticisme exprimé par certains lors de son lancement et les manoeuvres quelque peu dilatoires mises en oeuvre au départ par les principaux groupes de télévision privés, la télévision numérique terrestre a rencontré un véritable engouement populaire sur le territoire métropolitain. Le cap des quatre millions de récepteurs de télévision numérique terrestre a ainsi été franchi cet été, portant à 13 % le taux d'équipement des foyers français.
Ce succès permet certes de faire taire les critiques contre un mode de diffusion que certains qualifiaient de « dépassé » au moment même de son lancement. Il n'est pourtant pas certain qu'il garantisse une extinction de la diffusion analogique dans les délais prévus par la loi.
a) Le développement de la couverture TNT
L'extension de la couverture de la télévision numérique se décline en deux actions essentielles :
- l'extension de la couverture des chaînes nationales numériques (par voie hertzienne et par satellite) ;
- la migration des chaînes locales analogiques.
Ces actions s'inscrivent désormais dans un cadre juridique clair et complet pour le territoire métropolitain. S'agissant de l'outre-mer, le Gouvernement devrait remettre prochainement au Parlement un rapport sur les modalités de développement de la télévision numérique dans les départements, régions et collectivités d'outre-mer et en Nouvelle-Calédonie, conformément à l'article 105 de la loi du 30 septembre 1986 modifiée.
(1) L'extension de la couverture des chaînes nationales de la TNT
• L'achèvement du déploiement initialement prévu
Au printemps 2007, conformément au calendrier adopté le 4 janvier 2007, la cinquième phase de déploiement du réseau de diffusion de la télévision numérique terrestre a commencé avec l'ouverture d'une vingtaine de nouveaux sites, portant à plus de 70 % la couverture par la TNT de la population métropolitaine en juillet 2007.
D'ici à la fin de l'année, l'objectif de 85 % de couverture de la TNT devrait ainsi être atteint grâce à la mise en service :
- fin octobre, des émetteurs de Mulhouse, Strasbourg, Forbach, Metz, Nancy, Sarrebourg et Verdun ;
- avant la fin décembre, des émetteurs d'Abbeville, Amiens, Boulogne-sur-Mer, Cluses, Dunkerque, Gex-Vesancy, Hirson, Lille-Bouvigny, Longwy, Maubeuge, Mézières et Valenciennes.
• La couverture de 95 % de la population par les chaînes nationales « historiques »
S'agissant des chaînes nationales actuellement diffusées en clair en mode analogique (TF1, France 2, France 3, France 5, Arte et M6), l'article 96-2 de la loi du 30 septembre 1986 fixe une obligation de couverture de 95 % de la population française, « selon des modalités et un calendrier établis par le Conseil supérieur de l'audiovisuel dans les quatre mois suivant la promulgation de la loi n° 2007-309 du 5 mars 2007 relative à la modernisation de la diffusion audiovisuelle et à la télévision du futur ».
Le 10 juillet 2007, le Conseil a ainsi fixé des objectifs annuels de couverture pour ces chaînes, non seulement pour l'ensemble du territoire métropolitain mais aussi par département, afin de promouvoir un développement territorial équilibré et équitable de la TNT :
- fin 2008, l'objectif est de 89 % de la population métropolitaine, avec un minimum de couverture par département de 75 % ;
- fin 2009, l'objectif est de 92 % de la population métropolitaine, avec un minimum de couverture par département de 85 % ;
- fin 2010, l'objectif est de 93 % de la population métropolitaine, avec un minimum de couverture par département de 89 % ;
- fin 2011, l'objectif est de 95 % de la population métropolitaine, avec un minimum de couverture par département de 91 %.
Le plan et la liste des émetteurs mis en service seront précisés chaque année, en concertation avec les opérateurs de multiplex. Ce plan prendra en compte le schéma national d'arrêt de la diffusion analogique, les zones d'extinction devenant prioritaires pour l'extension.
Aux termes du deuxième alinéa de l'article 96-2 de la loi, si les chaînes nationales privées concernées (TF1 et M6) respectent ces objectifs de couverture, leurs autorisations de diffusion par voie hertzienne terrestre en mode numérique seront prorogées de cinq ans.
• La couverture de 95 % de la population par les chaînes privées nationales de la TNT autres que TF1 et M6 6 ( * )
L'article 97 de la loi du 30 septembre 1986 incite les chaînes privées nationales de la TNT autres que TF1 et M6 à souscrire des engagements complémentaires en termes de couverture, ces engagements entraînant la prorogation de leurs autorisations, dans des conditions fixées par décret et dans la limite de cinq ans.
Aux termes du même article, les éditeurs devaient informer le CSA de leurs engagements dans un délai de deux mois à compter de l'entrée en vigueur de ce décret (décret n° 2007-789 du 10 mai 2007). À cette date, tous les éditeurs avaient pris des engagements de couverture au moins égaux à 95 % de la population métropolitaine. Ils pourront donc bénéficier d'une prorogation de leur autorisation d'émettre de cinq ans.
Il appartenait ensuite au CSA de définir « le calendrier et les modalités de mise en oeuvre de ces engagements », ce qu'il a fait au cours de son assemblée plénière du 24 juillet 2007 : le taux minimum de population métropolitaine couverte par ces chaînes sera de :
- 88 % au 31 décembre 2008 ;
- 90 % au 31 décembre 2009 ;
- 93 % au 31 décembre 2010 ;
- 95 % au 30 novembre 2011.
• La recomposition des multiplexes
Le 19 décembre 2006, le CSA a décidé une recomposition des multiplexes, sur le fondement de l'article 25 de la loi de 1986 lui permettant de regrouper les chaînes gratuites.
Cette recomposition permet notamment de dégager sur le multiplex R1 une place pour les télévisions locales. Elle a pris effet le 13 septembre et a entraîné le changement de multiplex de France 4, TMC et TPS Star, qui conservent néanmoins la même numérotation.
A cet égard, votre rapporteur regrette l'absence d'une campagne d'information de grande ampleur concernant cette recomposition et les nombreux problèmes techniques constatés au niveau de certains matériels de réception (décodeurs, téléviseurs ...). Au total, cette opération a gravement perturbé les audiences des chaînes concernées, notamment celles de France 4 et semé le trouble dans l'esprit des téléspectateurs auxquels les pouvoirs publics ont promis une technologie adaptable et facile d'accès.
Dans ces conditions, il souhaite qu'à l'avenir, une véritable campagne d'information soit lancée sur l'ensemble des antennes hertziennes quinze jours avant la recomposition des multiplexes afin de sensibiliser efficacement les téléspectateurs sur les manipulations à réaliser pour retrouver les canaux correspondants.
• La création d'un « service antenne » par satellite
A l'initiative de votre rapporteur, l'article 98-1 de la loi de 1986 prévoyait l'instauration, dans un délai de trois mois à compter de la promulgation de la loi du 5 mars 2007, d'un « service antenne » par satellite, garantissant l'accès aux chaînes en clair de la TNT sur l'ensemble du territoire métropolitain.
Depuis juin 2007, ce bouquet est diffusé sur le satellite Astra 19°2 Est. Sa réception nécessite une parabole orientée sur la position satellitaire correspondante ainsi que le « pack » TNTSAT comprenant un terminal et sa carte d'accès dont les droits sont valides pour 4 ans. Il permet d'accéder, dans les territoires non couverts par le réseau TNT terrestre (voir carte ci-dessous) aux services suivants :
- les 18 chaînes gratuites de la TNT ;
- France Ô ;
- les 24 programmes régionaux de France 3.
• Une nouvelle chance pour le développement des chaînes locales
Si la TNT est une opportunité considérable pour les « nouveaux entrants » de la TNT, elle l'est également pour les chaînes locales dont votre rapporteur a régulièrement dénoncé le sous-développement manifeste dans notre pays.
La TNT offre ainsi en premier lieu un véritable relais de croissance pour les chaînes analogiques existantes . L'article 96 de la loi de 1986 prévoit en effet un droit à la reprise en numérique de ces chaînes, « sous réserve du respect des articles 1 er , 3-1 et 26 » et « dès lors que cette reprise s'effectue selon un principe identique en ce qui concerne le recours ou non à une rémunération de la part des usagers et qu'elle n'a pas pour effet de faire passer la population de la zone desservie en mode numérique par le service à vocation locale à plus de dix millions d'habitants ».
Sur la base de cette disposition, au cours de son assemblée plénière du 24 juillet 2007, le Conseil a autorisé les 18 télévisions locales figurant dans le tableau ci-dessous à diffuser en mode numérique 7 ( * ) à partir de la mi-septembre 2007, simultanément à leur diffusion en mode analogique.
LES 18 CHAÎNES LOCALES AUTORISÉES À DIFFUSER EN NUMÉRIQUE
TLM à Lyon |
Nantes 7 |
Télénantes |
TLT à Toulouse |
7L à Montpellier ; |
Cityzen TV à Caen |
TV7 Bordeaux, |
TV Rennes |
Angers 7 |
LCM à Marseille |
Orléans TV |
BIP TV à Issoudun |
Clermont Première |
Canal 8 Le Mans |
Canal 32 à Troyes |
TV8 Mont-Blanc |
TéléGrenoble |
TV Tours |
Conformément au dernier alinéa de l'article 99 de la loi de 1986, lorsque le terme des autorisations en cours de ces chaînes était antérieur au 31 mars 2015, il a été prorogé jusqu'à cette date.
Le Conseil supérieur de l'audiovisuel statuera ultérieurement, au fur et à mesure du déploiement de la TNT, sur la situation des autres chaînes locales analogiques : Télé 102 aux Sables-d'Olonne ; Télé Sud Vendée à Luçon ; LTL dans la plaine du Forez ; TLP Lubéron en Provence ; Télé Miroir à Nîmes ; Télé Paese à Calvi et l'Île-Rousse.
Votre rapporteur tient surtout à souligner que le CSA poursuit l'élargissement de l'offre de chaînes locales numériques : après la délivrance de sept autorisations sur quatre positions ouvertes sur le canal 23 en Ile-de-France (Côté Seine, IDF 1, LTF, Demain IDF, BDM TV, Cinaps TV et Télé Bocal), il a lancé une consultation publique préalable au lancement d'appels à candidatures pour de nouvelles télévisions locales diffusées en numérique sur une vingtaine de zones.
L'offre locale numérique est également étendue par l'octroi d'un droit d'usage de la ressource radioélectrique pour France Ô sur sept zones, en vue de la diffusion de ce service sur la région parisienne, et pour un second programme local de France 3 sur onze zones.
Ainsi, certaines éditions régionales de France 3 sont diffusées, parallèlement à l'édition locale, dans les zones de grandes agglomérations :
- France 3 Montpellier dans la zone d'Avignon ;
- France 3 Dijon dans la zone de Bourges et dans la zone de Troyes ;
- France 3 Toulouse dans la zone de Carcassonne ;
- France 3 Caen dans la zone de Chartres et dans la zone du Havre ;
- France 3 Besançon dans la zone de Dijon ;
- France 3 Grenoble dans la zone de Lyon (Mont Pilat) ;
- France 3 Nantes dans la zone de Niort ;
- France 3 Bordeaux dans la zone de Toulouse (Pic du Midi) ;
- France 3 Reims dans la zone de Sens.
Enfin, la date du 13 septembre 2007, à compter de laquelle les 18 premières chaînes locales exerceront leur droit à la reprise en numérique, constitue le point de départ du délai de trois mois donné au CSA pour procéder à la consultation contradictoire prévue au III de l'article 96 de la loi de 1986, « en vue de planifier un nombre suffisant de canaux pour assurer la couverture en mode numérique hertzien des bassins de vie et la diversité des éditeurs de services à vocation locale ».
(2) L'extinction de la diffusion analogique
S'inscrivant dans la droite ligne de l'article 127 de la loi n° 2004-669 du 9 juillet 2004 relative aux communications électroniques et aux services de communication audiovisuelle introduit par voie d'amendement à l'initiative de votre rapporteur et disposant que « [...] la diffusion des services de télévision par voie hertzienne terrestre en mode analogique, prendra fin cinq ans après le début effectif des émissions en mode numérique, sous réserve du constat par le Conseil supérieur de l'audiovisuel de la couverture du territoire par ce mode de diffusion, de la pertinence des choix technologiques, de l'information appropriée du public et de l'équipement des foyers pour ce mode de réception », le nouvel article 99 de la loi du 30 septembre 1986 détermine les modalités pratiques de l'extinction de la diffusion analogique.
• Le schéma national d'arrêt de la diffusion analogique et du basculement vers le numérique
L'article 99 de la loi du 30 septembre 1986 prévoit l'extinction progressive de l'analogique, entre le 31 mars 2008 et le 30 novembre 2011, dans le cadre des orientations déterminées par un schéma national d'arrêt de la diffusion analogique et du basculement vers le numérique approuvé par arrêté du Premier ministre, après consultation publique organisée par le CSA.
Dans cette perspective, le Conseil travaille actuellement à l'élaboration d'un document méthodologique qui fera l'objet, à l'automne, d'une consultation publique. Il précisera l'enchaînement des opérations nécessaires à l'arrêt des fréquences analogiques. Il abordera aussi la question du passage au plan-cible pour la diffusion numérique en France, qui est celui défini en juin 2006 par la conférence régionale des radiocommunications de Genève.
Une fois le schéma national approuvé par le Premier ministre, en principe au premier semestre 2008, il appartiendra au CSA de fixer « neuf mois à l'avance, pour chaque zone géographique, service par service et émetteur par émetteur, une date d'arrêt de la diffusion analogique en veillant à réduire les différences des dates d'arrêt des services diffusés sur une même zone géographique aux nécessités opérationnelles techniques ou juridiques de cette extinction et en tenant compte de l'équipement des foyers pour la réception de la télévision numérique terrestre et de la disponibilité effective en mode numérique des services de télévision en cause, ainsi que des spécificités des zones frontalières et des zones de montagne ».
Votre rapporteur, comme il l'avait déjà fait au moment de la discussion de la loi « télévision du futur », tient à souligner le caractère extrêmement « serré » du calendrier imposé par la loi au Conseil supérieur de l'audiovisuel.
D'ores et déjà, la date du 31 mars 2008, début théorique des opérations d'extinction, ne sera pas tenue. Dans la mesure où le schéma national d'arrêt de la diffusion analogique et du basculement vers le numérique n'a toujours pas été formalisé et où le CSA est tenu d'annoncer neuf mois à l'avance la date d'arrêt de chaque zone, le début des opérations ne pourra débuter au plus tôt que le 31 août 2008.
Or ce décalage du calendrier n'est pas totalement anodin pour l'équilibre économique des éditeurs concernés. En augmentant la durée de la double diffusion des signaux analogiques et numériques pour l'ensemble des chaînes « historiques » et plus particulièrement pour les chaînes publiques, il alourdit le besoin de financement lié aux opérations d'extinction.
• Les extinctions ponctuelles
Aux termes de l'article 98 de la loi de 1986, l'extinction de l'analogique peut intervenir avant le 31 mars 2008, dans les zones où elle est nécessaire au déploiement du numérique.
Les modalités de ces extinctions ponctuelles sont précisées par le décret n° 2007-871 du 14 mai 2007. L'assemblée plénière du 24 juillet 2007 a décidé une première application de cet article pour l'émetteur de Gex-Vesancy.
• La création du GIP France Télé numérique
L'article 100 de la loi de 1986 prévoit la création d'un groupement d'intérêt public (GIP), constitué entre l'État et les éditeurs de services de télévision analogiques et chargé « de mettre en oeuvre les mesures propres à permettre l'extinction de la diffusion des services de télévision par voie hertzienne terrestre en mode analogique et la continuité de la réception de ces services par les téléspectateurs ».
L'arrêté approuvant la convention constitutive du GIP France Télé numérique a été publié au Journal officiel du 27 avril 2007. Le GIP a notamment pour mission de gérer le fonds d'aide prévu à l'article 102 de la loi de 1986 en faveur « des foyers exonérés de redevance audiovisuelle et ne recevant les services de télévision en clair que par la voie hertzienne en mode analogique [...] sous condition de ressources du foyer fiscal ». Ce fonds est « destiné à contribuer à la continuité de la réception gratuite de ces services après l'extinction de leur diffusion en mode analogique ». Le décret d'application de cet article n'a pas encore été publié.
2. Les « télévisions du futur » : Haute définition et télévision mobile personnelle
Le cadre juridique permettant le développement de la télévision en « haute définition » et de la télévision mobile personnelle a été introduit par la loi du 5 mars 2007, principalement par modification de l'article 30-1 de la loi de 1986.
Ces deux nouvelles catégories de services constituent en fait les deuxième et troisième volets du développement de la diffusion numérique après l'accroissement du nombre de chaînes permis par le lancement de la télévision numérique terrestre.
a) La télévision en « haute définition »
Le Conseil a décidé le 12 juin 2007 de lancer un appel à candidatures pour la diffusion de deux services de télévision par voie hertzienne terrestre en mode numérique et en « haute définition » sur le multiplex R5 de la TNT, une troisième place étant réservée pour la diffusion d'une chaîne publique, conformément au droit d'usage prioritaire établi par la loi en faveur du service public.
Il a voulu favoriser la diffusion de programmes répondant à des caractéristiques techniques précises et correspondant à des émissions réalisées entièrement en « haute définition ». Il a également imposé un minimum de quotas de programmes haute définition lors des premières années : 25 % des programmes entre 16 et 24 heures en 2008, en moyenne hebdomadaire, et 30 % à partir de 2009.
Le calendrier prévisionnel de cet appel à candidatures était le suivant :
- 20 août 2007 : date limite de remise des dossiers de candidature ;
- début novembre 2007 : présélection et publication de la liste des dossiers présélectionnés ;
- début décembre 2007 : délivrance des autorisations.
Quatre groupes (TF1, M6, AB et Canal +) avaient déposé une candidature pour l'obtention d'un des deux canaux disponibles (les trois premiers proposant une chaîne « haute définition » gratuite tandis que Canal + présentait un projet de chaîne payante).
Le Conseil supérieur de l'audiovisuel, réuni le mardi 20 novembre 2007, a retenu les projets de TF1 et M6.
Le Conseil a sélectionné deux chaînes gratuites, dont les programmes en haute définition seront ainsi accessibles au plus grand nombre.
Il a également pris en compte les engagements de ces éditeurs en matière de haute définition réelle. En effet, TF1 et M6 s'engagent à diffuser respectivement 100 % et 80 % de leurs programmes en haute définition entre 16 heures et minuit au plus tard en 2012.
Une troisième place a été réservée pour France 2, le Gouvernement ayant fait le choix de cette chaîne, de préférence à Arte pour occuper le canal réservé au service public.
Le Conseil s'attachera à ce que les trois chaînes soient en mesure d'émettre au printemps 2008.
En matière de « haute définition », votre rapporteur regrette toutefois le maintien d'un certain nombre d'ambigüités au niveau des terminaux de réception.
D'une part, la coexistence des labels « HD ready » et « Full HD » demeure un élément de perplexité considérable pour le consommateur.
D'autre part, il est regrettable que le consommateur ne puisse bénéficier d'informations claires quant au modèle de démodulateurs intégrés dans les écrans. Lors du lancement des premières chaînes hertziennes en « haute définition », la majorité des téléspectateurs se verront ainsi privés des qualités de ce nouveau format dans la mesure où leur récepteur « HD ready » sera dans l'incapacité de prendre en charge les signaux encodés en Mpeg 4. Ils devront donc se contenter d'une définition standard encodée en Mpeg 2.
b) La télévision mobile personnelle
Le Conseil supérieur de l'audiovisuel a engagé le 19 janvier 2007, conformément à l'article 31 de la loi de 1986, une consultation publique relative aux modalités de lancement de la télévision mobile personnelle (TMP) dans la bande UHF. Réuni en assemblée plénière le mardi 12 juin 2007, il a adopté un document de synthèse des contributions.
Compte tenu de l'ampleur des innovations apportées par la TMP, dont les exigences techniques diffèrent sensiblement de celles de la TNT, une concertation complémentaire a été menée afin de clarifier préalablement à l'appel à candidatures les modalités techniques et opérationnelles du déploiement des futurs services. Pour parvenir le plus rapidement possible à des positions communes permettant un appel à candidatures, le Conseil a mis en place des groupes de travail chargés de proposer des solutions sur les questions aujourd'hui ouvertes.
Finalement, le 6 novembre 2007, le Conseil a lancé un appel à candidatures concernant la diffusion par voie hertzienne numérique de treize services de télévision mobile personnelle à vocation nationale, sur le réseau M7.
Votre rapporteur tient à souligner que certaines incertitudes planent encore sur le modèle économique propre à ce type de services : les points de vue divergent toujours notamment sur les modalités de financement du service (modèle gratuit ou modèle payant) et sur la répartition du coût d'installation du réseau entre les éditeurs de services et les autres partenaires de la TMP.
Concernant le choix entre gratuit et payant, certains opérateurs soutiennent la première option. Auditionné par votre rapporteur, Nextradio s'inspire ainsi de l'exemple de la Corée du Sud, pays dans lequel la TMP gratuite a rapidement dépassé son concurrent payant. D'autres, comme M6, estiment qu'il est plus raisonnable de demander une contribution à l'utilisateur, le chiffre de 7 euros pour une quinzaine de chaînes étant même avancé. S'agissant de la mise en place du réseau, Canal + souhaite que ce rôle incombe aux éditeurs des chaînes diffusées tandis que d'autres estiment qu'il vaut mieux s'adresser à un opérateur qualifié comme TDF ou à un opérateur de télécom.
Votre rapporteur souhaite rappeler que ces questions sont essentielles pour l'équilibre économique de ce nouveau mode de diffusion. Il tient à cet égard à indiquer que le choix du tout gratuit serait, comme au Japon ou en Corée du Sud, extrêmement long à amortir pour l'ensemble des acteurs de la filière, qui devront supporter les coûts de diffusion des programmes et subventionner les récepteurs dédiés. De la même façon, la construction de plusieurs réseaux concurrents fragiliserait la viabilité de l'ensemble du projet.
Il en appelle donc à la vigilance des pouvoirs publics afin que les choix stratégiques qui seront réalisés au cours des prochains mois n'obèrent pas le succès d'un support d'avenir.
3. La radio numérique : une naissance programmée
A l'heure où la numérisation des services de télévision se généralise, votre rapporteur tient à rappeler que celle de la diffusion de la radio représente également un enjeu de premier ordre pour un média écouté chaque jour par plus de 80 % des Français. Les éditeurs ont d'ailleurs fait part, dans leur grande majorité, de leur vif intérêt pour le lancement rapide de services de radio numérique pour deux raisons évidentes :
- le numérique offrira une meilleure couverture du territoire, qu'elle soit nationale, régionale ou locale, pour un plus grand nombre de services. En effet, dans la mesure où les appels à candidatures s'effectuent en bande FM, pour des raisons historiques, fréquence par fréquence, les radios, y compris celles qualifiées de nationales, ne disposent, à l'exception de certaines antennes de Radio France, que d'une couverture fragmentée et sont parfois absentes de bassins d'audience importants. La radio numérique permettra donc d'accroître localement le nombre de programmes disponibles ;
- le numérique permet en outre de moderniser le média radio par la diffusion de données associées ou non aux programmes, telles que par exemple des informations relatives aux oeuvres diffusées, des services de proximité, trafic routier, météo, etc.
Dans ces conditions, la loi « télévision du futur » est venue compléter utilement le cadre juridique mis en place par la loi n° 2004-669 du 9 juillet 2004 relative aux communications électroniques et aux services de communication audiovisuelle.
a) Un cadre juridique défini par la loi « paquet télécom » de 2004, complété par la loi du 5 mars 2007
Le cadre législatif de la radio numérique a été défini par la loi n° 2004-669 du 9 juillet 2004 relative aux communications électroniques et aux services de communication audiovisuelle. Il définit des procédures d'autorisation adaptées aux caractéristiques des différentes technologies existantes.
En raison de la grande variété des technologies de diffusion disponibles sur le marché, le cadre législatif est évolutif et souple afin de ne pas préjuger d'une part, de la mise en oeuvre des technologies et fréquences et de permettre, d'autre part, les différents scénarios de mise en oeuvre qui avaient alors été identifiés, à savoir l'extension des zones de couverture des services existants, un enrichissement de l'offre de services par des données associées et des nouveaux programmes et, à long terme, la migration généralisée de l'analogique vers le numérique.
Venue compléter ce cadre, la loi n° 2007-309 du 5 mars 2007 relative à la modernisation de la diffusion audiovisuelle et à la télévision du futur consacre les bandes de fréquences VHF (aujourd'hui occupée par Canal+) et L pour la radio numérique, puisqu'elle dispose qu'une part significative des fréquences disponibles ou libérées par l'extinction de la télévision analogique dans ces bandes de fréquences est destinée aux services de radio numérique. Elle dispose en outre que, lors des appels à candidatures pour la télévision mobile personnelle, une part de la ressource de fréquences, fixée après consultation publique relative à la TMP, est réservée par le Conseil supérieur de l'audiovisuel notamment à des services de radio.
Enfin, la loi institue un label « Prêt pour la radio numérique » destiné à être apposé sur les terminaux de TMP permettant la réception de services de radio numérique dans les bandes VHF et L.
b) Le choix des normes de diffusion fait débat
Le ministre de la culture et de la communication et le ministre délégué à l'industrie ont lancé le 2 octobre 2006 une consultation publique conjointe afin de recueillir l'avis des acteurs sur les normes et caractéristiques techniques qu'il convenait d'arrêter. La centaine de contributions reçues a permis de dégager une base consensuelle :
- un réseau dédié exclusivement à la radio numérique dans les bandes de fréquences III et L ;
- la numérisation de la bande AM en complément à la mise en place de ce réseau dédié ;
- le souhait de diffuser des programmes de radio sur la TMP et la télévision numérique terrestre de façon complémentaire au réseau principal.
Concernant le réseau terrestre dédié à la radio numérique dans les bandes VHF et L, deux normes sont susceptibles de cohabiter :
- le DAB +, nouvelle génération du DAB ;
- le T-DMB, qui présente l'avantage, par rapport au premier, d'offrir d'une part des services plus riches, et d'autre part d'être déjà industrialisé.
Le choix entre les deux normes a suscité l'opposition des éditeurs. Les grands groupes de radio, regroupés au sein du Groupement pour la Radio Numérique 8 ( * ) (GRN) et qui représente 90 % de l'audience, ont demandé l'utilisation exclusive dans ces bandes de la norme T-DMB dans les bandes VHF et L, alors que les radios associatives ont souhaité la possibilité d'utiliser également le DAB +. Interrogé sur le sujet, le CSA a confirmé dans son avis rendu en avril dernier qu'il serait prématuré d'adjoindre une norme supplémentaire au T-DMB déjà retenu dans les projets d'arrêtés.
Outre les réseaux dédiés évoqués précédemment, les projets d'arrêtés prévoient la présence de services de radio sur des réseaux déployés par d'autres services, tels que les réseaux TNT et de TMP, conformément à la loi du 5 mars 2007. De même, ils autorisent la numérisation de la radio en ondes longues et courtes, ou encore la couverture du territoire par une solution hybride satellitaire et terrestre.
c) La notification à la Commission européenne des arrêtés techniques de la radio numérique
Par application de la directive 98/34/CE 9 ( * ) , les projets d'arrêtés « signal » et « terminal » ont été notifiés le 15 mai 2007 à la Commission européenne. Au cours du délai de statu quo de trois mois prévu par les dispositions de ladite directive, le projet d'arrêté « signal » de la radio numérique a fait l'objet d'observations allemandes et d'un avis circonstancié du Royaume-Uni, selon lequel il présenterait des aspects pouvant éventuellement créer des obstacles à la libre circulation des marchandises sur le marché intérieur. L'arrêté « terminal » a vu émettre à son encontre un avis circonstancié de la Commission européenne aux mêmes fins.
Du fait de ces avis circonstanciés, l'adoption des projets d'arrêtés est reportée d'un nouveau délai de trois mois (soit jusqu'au 16 novembre dernier), dans lequel la France devra faire rapport à la Commission de la suite qu'elle entend donner aux avis circonstanciés. Ce n'est qu'après avoir épuisé cette procédure de réponse et à l'expiration du second délai de trois mois que la France pourra, le cas échéant, adopter les arrêtés de la radio numérique.
L'avis circonstancié du Royaume-Uni et les observations allemandes sur le projet d'arrêté « signal » pour la radio numérique ont relancé le débat au niveau national entre les partisans du DAB+ et ceux du T-DMB.
d) Les expérimentations lancées par le CSA dans le cadre des travaux préparatoires au lancement des appels à candidatures
Les travaux préparatoires au lancement des appels à candidatures pour les services de radio numérique ont été initiés le 8 mars 2007 par le CSA, et devraient se terminer à l'automne prochain. Deux groupes de travail ont ainsi été mis en place : l'un technique, relatif à la planification et à la signalisation, l'autre administratif, relatif à l'organisation des appels.
Le Conseil réfléchit notamment aux adaptations susceptibles d'être apportées à la définition des catégories de services de radio et à l'opportunité de lancer des appels aux niveaux national et local. Concernant le groupe technique, relatif à la planification et à la signalisation, le CSA a concentré son action sur le déploiement de services en T-DMB, se fixant pour objectif de lancer les premiers appels à candidatures vers la fin de l'année 2007. Il faut toutefois noter que les représentants des radios associatives ont rappelé à plusieurs reprises leur position en faveur du DAB+ et ont lancé le 2 août dernier une expérimentation à Nantes visant à comparer les normes DAB+ et T-DMB.
Lors des réunions de ce groupe, des expérimentations se sont révélées nécessaires pour préparer le lancement de la radio numérique. Huit demandes, portant sur des normes et des bandes de fréquences variées, ont ainsi été autorisées le 30 mai 2007 par le Conseil.
Ces expérimentations qui ont démarré au cours du mois d'août 2007 ont pour objectifs :
- de préciser les paramètres techniques et fonctionnels nécessaires au déploiement de la radio numérique, avec la mise en place en grandeur réelle d'une plate-forme de diffusion pilotée par le GRN sur Paris en T-DMB dans les bandes III et L ;
- de considérer les spécificités d'un déploiement régional transitoire à Lyon en bande III ;
- de tester la continuité de service sur des parcours autoroutiers en T-DMB dans la bande III (axe Lyon-Valence) et dans la bande L (axe Tours-Poitiers) ;
- de comparer les normes T-DMB et DAB+, à Paris et Nantes ; cette expérimentation est pilotée par les radios associatives ;
- de tester la norme DRM en ondes moyennes à Paris, ainsi que dans la bande des 26 MHz (ondes courtes) à Rennes.
* 6 Il s'agit des chaînes en clair Direct 8, W9, TMC, NT1, NRJ 12, I-Télé, Europe 2 TV, Gulli, BFM TV et des chaînes payantes Canal+, TPS Star, Paris Première, Canal+ Sport, Canal+ Cinéma, AB1, Planète, TF6, Canal J, LCI et Eurosport.
* 7 Ces chaînes seront diffusées sur le R1, à l'exception de Bip TV et de Canal 32, car la position sur le multiplex R1 est occupée par un second décrochage local de France 3.
* 8 Le GRN regroupe Radio France, RTL, Lagardère, NRJ Group et le Syndicat interprofessionnel des radios et télévisions indépendantes (SIRTI).
* 9 Directive 98/34/CE du Parlement européen et du Conseil du 22 juin 1998 prévoyant une procédure d'information dans le domaine des normes et réglementations techniques, modifiée par la directive 98/48/CE du 20 juillet 1998.