B. LA PERMANENCE DE LA QUESTION DE L'INTERMITTENCE ET L'EMPLOI ARTISTIQUE

Depuis la crise survenue à l'été 2003, l'Etat a mis en place des dispositifs successifs afin que le régime d'assurance chômage cesse d'être le principal régulateur de l'activité artistique. En outre, des actions ont été conduites pour améliorer les conditions d'emploi des professionnels du spectacle.

1. Les évolutions récentes du régime de l'intermittence : la conjugaison de dispositifs complémentaires

a) Une double solidarité interprofessionnelle et nationale

Rappelons que le régime des intermittents du spectacle recouvre désormais deux dispositifs distincts et complémentaires :

- le premier, géré par l'Unedic, fait l'objet de deux annexes à la convention générale d'assurance chômage dont l'une (l'annexe 8) couvre les techniciens et l'autre (l'annexe 10) les artistes du spectacle vivant (théâtre, cirque, ...) ; à cet égard, les partenaires sociaux ont conclu le 21 décembre 2006 un accord qui s'inscrit dans la logique de celui signé en 2003, mais intègre un certain nombre de modifications dans le mode d'évaluation des droits ;

- le second est un régime financé par l'Etat, qui est venu s'ajouter à celui de l'assurance chômage à partir de 2004. Créé à la suite des nombreuses manifestations et grèves d'intermittents suscitées par le durcissement, en 2003, des conditions d'admission dans les annexes 8 et 10, ce dispositif a d'abord été organisé sous la forme d'un « fonds spécifique provisoire », puis d'un « fonds transitoire ». Ces fonds successifs, alimentés par des crédits du ministère chargé de l'emploi ont eu pour objet essentiel de maintenir une indemnisation pour les personnes que les nouvelles règles excluaient du bénéfice des annexes 8 et 10. Plus récemment, l'Etat a mis en place un fonds de solidarité et de professionnalisation, dont les modalités sont précisées dans un développement ultérieur. Il prend le relais du fonds transitoire, dont les allocations ont continué cependant à être versées aux artistes et aux techniciens qui ont été admis à en bénéficier avant le 1 er avril 2007.

Les annexes 8 et 10, redéfinies par le nouveau protocole, et le nouveau fonds de professionnalisation et de solidarité ont vocation à constituer, ensemble, avec les conventions collectives, un système pérenne de protection sociale et d'organisation de l'emploi pour les artistes et les techniciens. Dans le respect des responsabilités des partenaires sociaux, ce système conjugue et articule la solidarité professionnelle, la solidarité interprofessionnelle et la solidarité nationale en faveur des artistes et des techniciens du spectacle

Dans son dernier rapport annuel, la Cour des comptes a procédé à une analyse de la gestion du régime d'indemnisation des intermittents du spectacle et votre commission souhaite connaître les suites que le Gouvernement envisage de donner à ses recommandations , rappelées ci-dessous.

LES CONCLUSIONS ET RECOMMANDATIONS DE LA COUR DES COMPTES SUR LA GESTION DU RÉGIME D'INDEMNISATION DES INTERMITTENTS DU SPECTACLE (Extraits du rapport annuel de février 2007)

Le régime d'assurance chômage des intermittents apporte au financement du spectacle et de l'audiovisuel, dans des conditions peu transparentes, une contribution déterminante. Ce régime met ainsi en cause des problématiques qui dépassent le seul cadre de l'indemnisation du chômage et renvoient à la fois au mode de financement de l'activité culturelle dans notre pays et à la structure économique du secteur du spectacle et de l'audiovisuel et aux règles d'aide régissant l'emploi dans ces secteurs. Dans ces conditions, la Cour ne peut que recommander aux autorités responsables de l'Etat et aux partenaires sociaux de poursuivre, au-delà de l'accord auquel ces derniers sont parvenus le 21 décembre 2006, une réflexion d'ensemble sur ce sujet. D'autre part, la juridiction formule les quelques recommandations particulières ci-après.

Concernant la transparence du régime :

Afin de poursuivre la démarche engagée tendant à une meilleure responsabilisation des acteurs ainsi qu'au développement d'un débat public informé sur la question de l'intermittence, il est nécessaire d'améliorer les conditions dans lesquelles les données financières concernant le fonctionnement du régime d'indemnisation sont rendues accessibles. Ceci suppose de :

- faire établir par les ministères concernés, avec l'appui de l'Unédic, un rapport annuel public retraçant l'évolution des principales caractéristiques de l'emploi et de l'indemnisation des intermittents (ressources des salariés, contribution des employeurs, ressources et charges du régime, contribution de l'État, etc.) ;

- créer et rendre accessible une base de données tenue par l'Unédic, dont l'objet serait de dresser pour chaque employeur un compte faisant apparaître les cotisations versées ainsi que les dépenses correspondantes d'indemnisation des salariés ayant travaillé pour cet employeur (ces dépenses étant calculées au prorata des heures travaillées pour l'employeur concerné par rapport au total des heures déclarées par le salarié).

Concernant les annexes 8 et 10 :

La Cour est amenée à rappeler certaines des orientations qu'elle avait suggérées lors de sa précédente intervention de 2003 et à les augmenter de pistes nouvelles tendant à :

- redéfinir de façon plus stricte le champ d'application des annexes 8 et 10 ;

- revoir les conditions dans lesquelles les employeurs peuvent avoir recours à l'emploi intermittent et notamment au CDD d'usage ;

- poursuivre la démarche engagée de différenciation du traitement des bénéficiaires des annexes 8 et 10, notamment de la formule de calcul de leurs indemnités, afin de mieux tenir compte des conditions d'emploi respectives de ces deux catégories de salariés ;

- responsabiliser davantage les employeurs en rendant leurs taux de cotisation variables en fonction du nombre de journées d'indemnisation induites par chacun d'entre eux ; cette mesure aurait pour avantage de lutter contre d'éventuels comportements de collusion entre salariés et employeurs en rendant coûteux pour ces derniers un recours abusif à des emplois intermittents, comme cela est notamment le cas dans le cadre de la « permittence » ;

- intensifier les efforts de lutte contre la fraude, en développant le dispositif actuellement en cours de mise en place et en développant les échanges d'informations avec les organismes tiers, y compris les sociétés de droits d'auteurs.

Concernant enfin le fonds transitoire :

- mettre fin aussi rapidement que possible à la situation provisoire qui prévaut depuis plus de deux ans et qui s'est accompagnée de conditions de gestion inadaptées ;

- un fonds pérennisé devrait être doté de structures permettant un pilotage satisfaisant, notamment en identifiant clairement les responsabilités respectives des différentes administrations concernées par sa gestion.

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