2. Mieux préparer l'entrée en apprentissage, dans le cadre de l'objectif de « 500 000 apprentis »

a) L'apprentissage, une voie de réussite et un tremplin vers l'emploi

Dans le cadre du plan de cohésion sociale, le Gouvernement a fixé un objectif ambitieux : porter le nombre d'apprentis à 500 000 d'ici 2009 , soit une augmentation de près de 140 000 en cinq ans.

L'exposé des motifs du projet de loi de programmation pour la cohésion sociale avance ainsi que « de l'avis unanime, l'apprentissage apporte une réponse très adaptée, d'une part, au besoin de qualification puis d'insertion des jeunes, d'autre part, à la demande des entreprises de recruter des salariés qualifiés et rapidement employables ».

En effet, l'apprentissage constitue une filière de formation initiale à part entière, qui offre aux jeunes âgés de 16 à 25 ans la possibilité d'acquérir une qualification dans le cadre d'une formation alternée.

Cette voie alternative de formation permet tout d'abord de « raccrocher » des jeunes auxquels le cursus général ne convient pas. Au contact direct du monde du travail et de ses exigences, certains retrouvent goût et motivation pour les enseignements théoriques de base.

L'apprentissage offre parfois une « seconde chance ». Nous pouvons tous rapporter des expériences et témoignages, dans notre entourage, de tels parcours de réussite.

En outre, l'apprentissage constitue une arme efficace contre le chômage des jeunes, dont le niveau est plus élevé dans notre pays que chez nos voisins européens où l'alternance est beaucoup plus répandue, comme l'Allemagne ou l'Autriche.

LES EXPÉRIENCES DE DÉVELOPPEMENT DE L'ALTERNANCE
ET DE L'APPRENTISSAGE CHEZ NOS VOISINS EUROPÉENS


Allemagne

Environ 1,8 million d'élèves bénéficient du statut d'apprenti dans le cadre d'une formation en alternance dans le système dit « dual », soit 70 % d'une classe d'âge.

En 2003, les entreprises allemandes ont proposé 546 000 contrats d'apprentissage dans 45 secteurs professionnels.

La part « scolaire » de la formation revient à chaque Land. Elle comporte en général 12 h par semaine. Les deux tiers des cours doivent avoir un caractère professionnel et un tiers un caractère général.

L'apprenti passe deux tiers de son temps de formation en entreprise et un tiers à l'école professionnelle sur une durée de formation de trois ans ou trois ans et demi selon les branches professionnelles. Le diplôme obtenu au terme de cette formation est comparable au Bac professionnel français.


Autriche

Environ 75 % des jeunes suivent le système en alternance ou dual.

La formation se déroule dans une entreprise formatrice (pour 80 % du temps) et à l'école professionnelle (pour 20 % du temps). Elle dure en moyenne 3 ans.

Les trois cinquièmes des cours en école sont consacrés à l'enseignement professionnel, et le reste à la gestion d'entreprise et à l'enseignement général. La responsabilité de la formation est partagée entre entreprise et école, y compris au niveau des programmes ; les deux parties du diplôme sont indépendantes.

Pour valoriser l'apprentissage, qui ne permettait pas de poursuite d'études, un baccalauréat professionnel pour apprentis a été instauré en 1997.

Particularité autrichienne : les titulaires du diplôme du système dual peuvent passer un examen spécial leur permettant d'accéder à des études universitaires, dans certains cas à des écoles d'art et aux écoles de formation des enseignants.


Italie

Le nombre d'apprentis est passé de 6 108 à 31 567 entre les rentrées scolaires 1999 et 2000. En outre, la loi du 11 mars 2003, dite « loi Moratti », prévoit, pour tous les élèves âgés de 15 à 18 ans, la possibilité d'alterner école et travail à partir de la deuxième année du second cycle, à compter de la rentrée 2007.

Les périodes d'étude et de travail seront réalisées, contrôlées et évaluées sous la responsabilité des établissements scolaires sur la base de conventions avec les entreprises.


Royaume-Uni

Afin de moderniser l'image de l'apprentissage, est créée en 2001 une agence gouvernementale, le Learning and Skills Council (LSC).

En 2003, le ministère de l'éducation a mis en place la « Stratégie pour les élèves de 14 à 19 ans » : de nouvelles qualifications à caractère professionnel sont créées, afin d'encourager les jeunes à suivre des formations en alternance.

En outre, un « droit à l'apprentissage » est introduit en septembre 2004, pour tout jeune faisant la preuve du niveau requis, et des mesures sont prises en octobre 2005 afin de favoriser les passerelles vers l'enseignement supérieur.

Depuis 1997, le nombre d'apprentis a été multiplié par trois : on en compte aujourd'hui plus de 250 000.

L'apprentissage apporte une valeur ajoutée en termes d'insertion professionnelle par rapport à la formation sous statut scolaire, notamment pour les titulaires de CAP ou de BEP, comme le montre le tableau suivant.

EMPLOI ET SALAIRE DES APPRENTIS AU BOUT DE 3 ANS DE VIE ACTIVE

Proportion de jeunes
ayant un emploi

Salaire mensuel brut médian
(en euros)

BAC + 3 ET PLUS

BAC + 2

BAC

CAP/BEP

BAC + 3 ET PLUS

BAC + 2

BAC

CAP/BEP

Ø Apprentis

96

92

90

85

1 930

1 270

1 070

990

Ø Scolaires

94

90

82

75

1 980

1 160

1 040

990

Source : enquête « Génération 98 », Céreq 2005

La politique de relance de l'apprentissage vise à améliorer l'adéquation entre les formations proposées et les besoins économiques de notre pays : en effet, près de 500 000 chefs d'entreprise cesseront leur activité dans les 15 années à venir, principalement dans les très petites entreprises artisanales, dans les secteurs de l'hôtellerie-restauration, de la coiffure, des métiers de bouche ou encore du commerce de détail.

Par ailleurs, l'apprentissage ouvre désormais des perspectives de poursuite d'études, au-delà des diplômes de niveau V (CAP et BEP). Le niveau des diplômes préparés s'est élevé :

- un peu plus de 6 apprentis sur 10 préparent un CAP ou un BEP en 2003, alors qu'ils étaient 8 sur 10 en 1995 ;

- de 1995 à 2003, la part des jeunes préparant le baccalauréat ou un diplôme équivalent est passée de 14 à 21 % et la part des apprentis dans l'enseignement supérieur s'est fortement accrue, passant de 6 à 17 % 1 ( * ) .

RÉPARTITION ET ÉVOLUTION DES EFFECTIFS D'APPRENTIS
SELON LE NIVEAU DE FORMATION

CAP et BEP

Bac

Bac + 2

Bac +3 et plus

Total

Effectifs en 2003

225 100

77 300

38 100

21 000

361 500

Évolution 1995-2003

- 7 000

+ 35 900

+ 22 800

+ 16 200

+ 67 900

Source : « Enquête 51 », Ministère de l'éducation nationale - Céreq 2005

Afin de développer l'apprentissage à tous les niveaux de formation, la loi de programmation pour la cohésion sociale a introduit un certain nombre de mesures, retracées dans l'encart suivant, qui visent à rendre l'apprentissage plus attractif, tant pour les jeunes que pour les entreprises.

LES PRINCIPALES MESURES DE LA LOI DU 18 JANVIER 2005
VISANT À ACCOMPAGNER LA RELANCE DE L'APPRENTISSAGE

En parallèle de l'affichage de l'objectif de « 500 000 apprentis », la loi de programmation pour la cohésion sociale a consacré plusieurs avancées visant à valoriser, développer et moderniser l'apprentissage :


Une amélioration du statut de l'apprenti , qui se traduit par :

- l'institution d'une « carte de l'apprenti » qui, sur le modèle de la carte d'étudiant, ouvrira droit à des avantages et réductions tarifaires pour ses titulaires ;

- la revalorisation de la grille de rémunération des apprentis ;

- la formalisation d'un entretien pour un premier bilan dans les deux mois suivant la conclusion du contrat ;

- un assouplissement du statut de l'apprenti, par la possibilité de moduler la durée du contrat ou de déroger à la limite d'âge supérieure ;

- d'autres mesures, législatives ou réglementaires, contribuent à davantage « sécuriser » les contrats et à renforcer la qualité de la formation : une plus grande personnalisation du parcours, le développement de la mobilité européenne, la mise en place d'une charte de qualité, l'instauration de formations destinées aux nouveaux maîtres d'apprentissage, l'organisation de stages en entreprise pour les formateurs assurant les enseignements professionnels.


Des mesures fiscales visant à inciter les entreprises à accueillir des apprentis (crédit d'impôt de 1 600 euros par apprenti et par an).

Ces incitations fiscales sont prolongées, avec la création de l'apprentissage junior, par les dispositions prévues à l'article 3 du présent projet de loi.


Une réforme du système de financement de l'apprentissage (collecte et répartition de la taxe d'apprentissage), dans le sens d'une simplification, d'une meilleure traçabilité des flux et d'une plus grande transparence ; à cet effet, est institué un Fonds national de développement et de modernisation de l'apprentissage (FNDMA).

b) La nécessité de mieux préparer l'entrée en apprentissage

La création de la formation d'apprenti junior prolonge et approfondit la politique de développement de l'apprentissage à tous les niveaux de formation, en permettant de mieux préparer l'entrée dans cette voie.

En effet, l'un des points faibles de notre système de formation par apprentissage réside dans le niveau élevé de ruptures de contrats , intervenant notamment dans les premiers mois du contrat. Ce taux atteint 25 %, alors qu'il n'est que de l'ordre de 7 à 8 % en Allemagne par exemple.

Dans un récent rapport relatif aux sorties sans qualification 2 ( * ) , les inspecteurs généraux de l'éducation nationale ont analysé les facteurs les plus fréquents de rupture de contrat, voire d'abandon de formation :

- la prise de conscience par le jeune d'une mauvaise orientation vers un métier ou dans une voie de formation dont il avait une image erronée et qui ne lui conviennent pas ;

- le constat par le maître d'apprentissage de l'absence, chez l'apprenti, de compétences nécessaires à l'exercice du métier ; il peut s'agir de difficultés comportementales ou de lacunes dans la maîtrise des savoirs de base ;

- des conditions de travail parfois difficiles.

Afin de prévenir ces ruptures de contrat, le développement du préapprentissage a été inscrit dans les axes prioritaires des contrats d'objectifs et de moyens, institués par la loi de programmation pour la cohésion sociale.

La création de la formation d'apprenti junior s'inscrit dans le prolongement de cette démarche.

* 1 Données issues du bulletin du Céreq, Bref n° 217, mars 2005 : « 1995-2003, l'apprentissage aspiré par le haut ».

* 2 « Sorties sans qualification. Analyse des causes, des évolutions, des solutions pour y remédier ». Rapport n° 2005-074 de l'Inspection générale de l'éducation nationale et de l'Inspection générale de l'administration de l'éducation nationale et de la recherche, juin 2005.

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