INTRODUCTION
Mesdames, Messieurs,
L'examen des crédits consacrés à l'administration pénitentiaire pour 2006 doit conjuguer deux grilles de lecture complémentaires.
En premier lieu, l'exercice budgétaire correspond à la première année de mise en oeuvre de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF). L'administration pénitentiaire constitue l'un des cinq programmes de la mission Justice 1 ( * ) qui se décline lui-même en quatre actions . Cette nouvelle présentation renouvelle les critères d'analyse du budget de l'administration pénitentiaire et, conformément à la logique de la réforme, invite à débattre autant de l'évolution des crédits que de la pertinence des objectifs et des politiques adoptés dans ce domaine. Elle ne peut que conforter la démarche adoptée par votre commission des lois à l'occasion de la discussion budgétaire fondée sur une analyse des orientations de la politique pénitentiaire et de ses résultats, étayée par un travail d'information conduit tout au long de l'année à travers des visites de prisons et des rencontres avec les acteurs concernés. Dans le cadre de ces déplacements, ouverts à l'ensemble des membres de votre commission, votre rapporteur s'est ainsi rendu au cours de cette année dans les établissements de Liancourt, Paris-la Santé, Lille-Loos-Sequedin, Marseille (Les Baumettes).
En second lieu, le projet de budget pour 2006 correspond aussi à la quatrième année de mise en oeuvre de la loi d'orientation et de programmation pour la justice (LOPJ) ; aussi, convient-il de rester attentif, dans un cadre budgétaire renouvelé, au suivi des engagements adoptés dans le cadre de cette loi.
LE PROGRAMME ADMINISTRATION PÉNITENTIAIRE |
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Cinq actions |
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Action n° 1 Garde et contrôle des personnes placées sous main de justice |
Action n° 2
Accueil des personnes
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Action n° 3 Accompagnement et réinsertion des personnes placées sous main de justice |
Action n° 4 Soutien |
Action n° 5 Formation |
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68 % |
18 % |
8 % |
4 % |
2 % |
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Sept objectifs |
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Objectif n° 1
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Objectif n° 2
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- ... -
Objectif n° 3
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Sept objectifs (suite) |
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Objectif n° 4
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Objectif n° 5
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Objectif n° 6
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Objectif n° 7
- ... -
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I. UN BUDGET DE TRANSITION
Aux termes du projet de loi de finances pour 2006, les crédits consacrés à l'administration pénitentiaire s'élèvent à 2.135 milliards d'euros. La progression des crédits constatée par rapport à l'an passé (+ 14,3 %) s'explique pour une large part par l'affectation sur le programme pénitentiaire des dotations correspondant, d'une part, aux pensions versées aux personnels et, d'autre part, aux traitements des personnels de la direction de l'administration générale et de l'équipement travaillant pour l'administration pénitentiaire.
Compte tenu de ces évolutions, la part dévolue à l'administration pénitentiaire représente 36 % du projet de budget pour le ministère de la justice (contre 30 % en 2005).
2006 |
2005 |
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Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
Dépenses ordinaires + Crédits de paiement |
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- Titre II Rémunérations |
1.357 M€ |
1.357 M€ |
1.144 M€ |
- Titre III Fonctionnement |
1.054 M€ |
492,90 M€ |
459 M€ |
- Titre V Immobilier |
371 M€ |
245,48 M€ |
213,7 M€ |
- Titre VI Intervention |
40,3 M€ |
39,50 M€ |
50,9 M€ |
En milliards d'euros |
2.822,3 M€ |
2.134,88 M€ |
1.867,60 M€ |
A structure constante, les crédits de l'administration pénitentiaire progressent de 4,5 %. Le niveau très satisfaisant d'exécution de la loi d'orientation et de programmation pour la justice justifie en partie l'infléchissement des créations d'emplois et de l'évolution des moyens de fonctionnement. Cependant, dans la perspective de la livraison de nouveaux établissements à l'horizon 2007, un redressement de l'effort budgétaire s'imposera.
A. UNE PROGRESSION MESURÉE DES EMPLOIS ACCOMPAGNÉE D'UN EFFORT IMPORTANT DE REVALORISATION STATUTAIRE
Les emplois
Dans le cadre de la LOLF, l'analyse de l'évolution des effectifs se fonde désormais sur la notion de plafond d'emplois (évalué en équivalent temps plein travaillé).
Le plafond d'autorisation d'emplois a été fixé en 2006 à 29.960 pour les personnels titulaires et à 31.020 si l'on prend également en compte les contractuels et personnels d'administration centrale. Il autorise la création de 220 emplois nouveaux financés sur six mois.
Ces emplois se répartissent de la manière suivante :
- 120 personnels de surveillance ;
- 20 personnels administratifs ;
- 80 personnels d'insertion et de probation.
La loi de programme a prévu la création de 3.695 emplois (hors ceux dévolus à l'Ecole nationale de l'administration pénitentiaire) et une enveloppe globale de 266.908.916 € de crédits à répartir sur cinq ans, soit des tranches annuelles de 53 M€.
Consommation des emplois et des crédits sur les différentes tranches
Emplois |
Crédits ouverts |
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2003 |
870 |
54.726.519 € |
2004 |
1.111 |
53.994.469 € |
2005 |
533 |
64.673.587 € |
2006 |
220 |
28.720.834 € |
Totaux |
2.734 |
202.115.409 € |
La consommation des crédits au titre de la LOPJ sur les quatre premières années s'élève à 75,7 % de l'enveloppe globale.
S'il est vrai que les créations d'emplois se ralentissent, cette évolution doit cependant être nuancée par deux considérations :
- la capacité de recrutement demeure élevée (2.469 agents dont 1.700 surveillants) afin de permettre en particulier de compenser les départs en retraite et de pourvoir les vacances de postes ;
- aucun établissement pénitentiaire n'ouvrira avant 2007.
Cependant, à compter de cette date, les livraisons s'échelonneront sur plusieurs années et nécessiteront les créations d'emplois correspondantes.
Votre rapporteur souhaite donc d'ores et déjà attirer l'attention sur l'effort budgétaire conséquent qu'il faudra engager dans le cadre de la loi de finances pour 2007 afin de répondre aux besoins suscités par l'accroissement du parc pénitentiaire 2 ( * ) .
En outre, les récentes réformes législatives -renforcement du dispositif d'aménagement des peines lié à la mise en oeuvre de la loi n° 2004-204 du 9 mars 2004 portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité, mise en oeuvre du placement sous surveillance électronique mobile institué par la loi relative au traitement de la récidive des infractions pénales- suscitent de nouveaux besoins. Tel est également le cas de la mise en place des unités hospitalières sécurisées interrégionales (UHSI) et des unités hospitalières spécialement aménagées (UHSA).
Dans ces conditions, l'année 2007 devra être marquée par un net redressement des créations d'emplois.
Les mesures catégorielles
Le budget pour 2006 prévoit les dotations correspondant à la revalorisation des filières insertion et probation d'une part (803.000 euros pour le volet indemnitaire dont une augmentation de 1 % de l'indemnité de sujétions spéciales), surveillance , d'autre part (3,3 millions d'euros sur un coût total de la réforme évalué à 25 millions d'euros -3,4 millions ayant déjà été obtenus au titre des exercices budgétaires antérieurs).
En outre, une enveloppe de 1 million d'euros est prévue pour les filières administratives (création d'une indemnité de régisseurs et augmentation de l'indemnité pour sujétions spéciales).
Certains représentants syndicaux des personnels rencontrés par votre rapporteur pour avis s'étaient étonnés du différentiel de la prime de sujétions spéciales entre les catégories de personnels de l'administration pénitentiaire. Interrogé sur ce point par votre rapporteur pour avis, le garde des sceaux a rappelé, lors de son audition par votre commission le 22 novembre dernier, que le montant de cette prime est déterminé par les sujétions particulières auxquelles sont soumis les agents. Ainsi, selon le ministre, les personnels de surveillance perçoivent une prime (d'ailleurs non modifiée en 2006) de 24 % car ils exercent leur activité en milieu fermé, en horaires postés et en contact permanent avec les détenus. La prime des conseillers d'insertion et de probation appelés à travailler également en milieu ouvert a, quant à elle, été portée en 2006 de 21 % à 22 %. Les personnels de la filière administrative bénéficient, pour leur part, d'une prime de sujétion spéciale représentant 23 % de leur salaire.
Enfin, la nouvelle bonification indiciaire avait été jusqu'à présent appliquée de manière partielle et insuffisante entraînant des disparités de traitement tout à fait injustifiées entre agents.
Le projet de budget pour 2006 corrige cette situation (enveloppe prévue de 653.449 euros).
* 1 Le programme consacré à la protection judiciaire de la jeunesse est traité dans un avis présenté par M. Nicolas Alfonsi. Les trois autres programmes -justice judiciaire, accès au droit et à la justice, et conduite et pilotage de la politique de la justice et organismes rattachés- sont traités dans l'avis n° 104, Tome II (Sénat 2005-2006) M. Yves Détraigne.
* 2 Les nouveaux établissements pénitentiaires impliquent des effectifs plus importants que les structures plus anciennes. Ainsi, on a pu constater une hausse de 30 % des effectifs, tous corps et grades confondus, avec une forte prépondérance des agents de surveillance et des personnels gradés entre deux établissements de taille comparable, l'un issu du programme « 13.000 » initié à la fin des années 80, l'autre relevant du programme 4.000.