ANNEXE -
AUDITIONS DE LA COMMISSION
Amiral Alain Oudot de Dainville
Chef
d'état-major de la marine
Le 19 octobre 2005
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Evoquant tout d'abord les mesures conservatoires prises à l'encontre de trois militaires de l'armée de terre et dont la presse s'est fait l'écho, l'amiral Alain Oudot de Dainville, chef d'état-major de la marine, a indiqué qu'elles suscitaient, au-delà de la seule armée de terre, l'émotion de l'ensemble de la communauté militaire, qui mettait tout en oeuvre pour mériter la confiance des autorités politiques.
L'amiral Alain Oudot de Dainville, chef d'état-major de la marine, a souligné que le projet de loi de finances pour 2006 s'inscrivait dans un contexte nouveau marqué par l'entrée en vigueur de la loi organique relative aux lois de finances, la mise en oeuvre de la stratégie ministérielle de réforme et l'évolution des attributions du chef d'état-major des armées. L'ensemble des acteurs sont donc en phase d'« apprentissage ».
Il a dressé le bilan des actions de la marine en 2005, soulignant que le moral des marins, conscients de la reconnaissance attachée à leur action et sensibles à l'évolution de leur pouvoir d'achat, était bon.
En 2005, la marine a poursuivi l'exercice de la mission de dissuasion qu'elle assure depuis 1972. Elle a participé à la lutte contre le terrorisme, au sein de la « Task Force 150 », actuellement placée sous commandement de l'Amiral Jacques Mazars, qui commande également l'Euromarfor, déployée sur zone. Elle a maintenu le déploiement d'un bâtiment et d'un avion de patrouille maritime au large des côtes occidentales de l'Afrique, en soutien à l'opération « Licorne ». Des missions de surveillance ont également été menées en Méditerranée et dans l'Atlantique.
Le niveau d' « inter-opérabilité » avec les marines alliées a pu être vérifié et certifié au cours de l'année 2005 lors de l'exercice Trident d'Or qui a rassemblé les marines de huit pays en Méditerranée. Le centre de commandement à terre des opérations maritimes, installé à Toulon, a ainsi été certifié par l'OTAN, l'Union européenne pouvant également y avoir recours. Quelque 6.500 marins, soit 15 % des effectifs de la marine, sont déployés en permanence hors de métropole.
Les activités de sauvegarde maritime se sont poursuivies et la marine s'efforce de promouvoir ce concept à l'échelon européen.
En matière de lutte contre le trafic de stupéfiants, la marine a saisi quelque onze tonnes de substances illicites ; elle poursuit ses activités de lutte contre l'immigration clandestine, notamment à Mayotte et en Guadeloupe. En matière de lutte contre la pêche illicite, la mise en oeuvre de radars, conjuguée à la coopération internationale et à la multiplication des patrouilles, porte ses fruits dans les terres australes et antarctiques françaises où aucun contrevenant n'a été détecté en 2005. Des actions de lutte anti-pollution semblent également dissuasives et ont permis de diminuer significativement le nombre de contraventions constatées.
La marine a également mené deux actions humanitaires en 2005, lors de la crise qui a suivi le tsunami en Asie ainsi que dans le soutien aux autorités américaines après le passage du cyclone Katrina.
Evoquant la disponibilité des bâtiments, le chef d'état-major a indiqué que le redressement du taux de disponibilité se poursuivait et qu'il devrait atteindre 70 % en 2005 contre 65 % en 2004, sous l'effet de la modernisation des pratiques du service de soutien de la flotte et d'un début de mise en concurrence de DCN pour l'entretien de bâtiments faiblement armés.
Abordant le projet de loi de finances pour 2006, l'amiral Alain Oudot de Dainville, chef d'état-major de la marine, a tout d'abord rappelé qu'il n'existait plus à proprement parler de « budget de la marine » mais qu'en tant que responsable de la cohérence organique de la marine, il lui revenait de mettre en oeuvre des crédits issus de trois programmes différents : « préparation et emploi des forces », « équipement des forces » et « soutien de la politique de défense ».
L'action « préparation des forces navales » rassemble l'essentiel du personnel civil et militaire, les crédits de fonctionnement ainsi que les crédits d'entretien du matériel. Un budget opérationnel de programme, qui regroupe les crédits de l'action, est placé sous la responsabilité du major général de la marine. La masse salariale représente 2,8 milliards d'euros, dont 1,1 milliard au titre des cotisations et prestations sociales, pensions incluses, ce qui représente 50.612 emplois dont 8.958 civils.
Le budget pour 2006 comprend des mesures à caractère statutaire et indemnitaire en faveur du personnel civil pour un montant de 818.000 euros. Pour les militaires, 6,9 millions d'euros sont consacrés au plan d'amélioration de la condition militaire et au fonds de consolidation de la professionnalisation. L'augmentation des crédits de la réserve, à hauteur de 1,2 million d'euros, devrait permettre de porter le nombre d'engagements à servir dans la réserve de 5.500 à 5.800. La réalisation des effectifs restera cependant placée, comme les années précédentes, sous forte contrainte.
Les crédits de fonctionnement concentrent l'essentiel des efforts de recherche d'économies. 14 millions d'euros supplémentaires sont dévolus à l'achat de combustibles et carburants, ce qui ne permettra pas de reconstituer les stocks. Si le niveau des prix du pétrole continue à augmenter, d'autres mesures seront nécessaires pour soutenir le niveau d'activité. Les crédits destinés aux affrètements des moyens de sauvegarde maritime augmentent de 7 millions d'euros pour faire face à la mise en oeuvre des mesures décidées par le Comité interministériel de la mer.
Les crédits destinés à l'entretien des matériels sont stables, à hauteur de 920 millions d'euros. La disponibilité est un sujet de satisfaction mais aussi de préoccupation pour l'avenir. Un travail avec l'industrie est nécessaire pour prendre en considération l'entretien des matériels dès la phase de conception.
L'amiral Alain Oudot de Dainville, chef d'état-major de la marine, a ensuite indiqué que les crédits destinés à l'équipement des forces navales représentaient 2,4 milliards d'euros, en conformité avec la loi de programmation militaire. Ces crédits permettront d'achever le renouvellement de la composante amphibie avec la livraison des deux bâtiments de projection et de commandement. La cellule de commandement des activités maritimes pourra ainsi être certifiée à la mer selon les normes de l'OTAN. La marine attend prochainement le dénouement des péripéties qui accompagnent la signature du mémorandum d'accords franco-italiens permettant de passer commande des frégates multimissions. Les commandes porteront également sur le deuxième porte-avions, le missile de croisière naval, ainsi que sur les sous-marins nucléaires d'attaque Barracuda dont le contrat est en phase de discussion avec l'industriel.
Le programme « soutien de la politique de défense » comporte 311 millions d'euros de crédits de paiement, dont 96 millions sont consacrés au fonds d'adaptation industrielle de DCN et 207 millions aux investissements en infrastructures. Ces derniers portent sur l'adaptation des installations de l'Ile Longue aux missiles M51, à celle de la base de Landivisiau aux Rafale F2, ainsi que sur la modernisation et la sécurisation des différentes installations de la Marine.
En conclusion, l'amiral Alain Oudot de Dainville, chef d'état-major de la marine, a considéré que, sous un aspect « ésotérique », le budget permettait la poursuite de la modernisation de l'outil naval tout en traduisant la nécessité d'économies importantes sur le fonctionnement, la marine devant d'ores et déjà envisager la perspective de « l'après pétrole ».
M. Serge Vinçon, président, s'est interrogé sur la signature annoncée du mémorandum d'accord sur les frégates multimissions qui, prévue pour le 13 octobre, n'a finalement pas eu lieu.
L'amiral Alain Oudot de Dainville, chef d'état-major de la marine, a indiqué que cette signature avait été envisagée en marge du sommet des ministres de la défense de l'Union européenne auquel le ministre de la défense italien n'avait pas assisté.
M. André Boyer, rapporteur sur les « forces navales », soulignant l'importance de la qualité du moral des marins, s'est félicité de l'efficacité de l'action de la marine dans ses différents domaines d'intervention. Il a souhaité connaître le coût lié à la restructuration de DCN ainsi que les programmes directement affectés par cette ponction sur les crédits d'équipement. Pour ce qui concerne les frégates multimissions, il a souhaité savoir quel était le montage financier retenu par l'Italie ainsi que le calendrier de livraison des bâtiments français. Il s'est interrogé sur le point de savoir si la gestion des rechanges, reprise à son compte par la marine, pouvait désormais être externalisée. Evoquant les retards prévisibles dans la mise en oeuvre du modèle 2015, il a souhaité connaître les principales échéances d'équipement au-delà de l'actuelle programmation.
M. Didier Boulaud s'est associé aux propos du rapporteur quant à la qualité des actions de la marine. Il a exprimé sa conviction que la loi de programmation ne serait pas respectée, estimant que la « bosse » de financement représenterait entre 5 et 10 milliards d'euros en 2008-2009. Il a considéré que les engagements actuels liés aux différents programmes de la marine s'élevaient à 12 milliards d'euros, auxquels il conviendrait d'ajouter quelque 15 milliards d'euros supplémentaires dans les années à venir, soit un total équivalent à 11 années de crédits de paiement pour la marine. Il s'est interrogé sur la réalité du programme du second porte-avions, considérant que la perspective d'une coopération franco-britannique était limitée par le choix d'un avion à décollage court pour l'équipement du porte-avions britannique. Il a souhaité savoir quelles étaient les perspectives de financement pour ce programme et s'est interrogé sur le point de savoir s'il ne s'effectuerait pas au détriment du nécessaire renouvellement de la flotte de surface.
M. Jean-Pierre Fourcade s'est déclaré confiant quant à l'exécution de la loi de programmation ; en effet, désormais c'est le rythme des commandes qu'il convient d'adapter aux choix arrêtés et non la nature des programmes eux-mêmes comme cela a pu être précédemment le cas. Il a évoqué les difficultés liées aux programmes en coopération, indiquant que les principales inconnues du budget portaient sur le prix du pétrole, sur l'articulation entre personnels civils et personnels militaires et sur les évolutions industrielles entre DCN et Thalès.
M. André Trillard, soulignant l'incompatibilité des systèmes informatiques de DCN avec ceux de ses principaux partenaires industriels, a exprimé des craintes quant aux possibilités d'un travail en coopération efficace.
L'amiral Alain Oudot de Dainville, chef d'état-major de la marine, a apporté les éléments de réponse suivants :
- le coût de la restructuration de DCN pour la marine s'élève à 1,3 milliard d'euros sur la durée de la loi de programmation et l'actuel contrat d'entreprise arrivera à échéance en 2008. A cette date, le paysage industriel européen devrait avoir évolué sous l'effet d'un premier rapprochement franco-français entre DCN et Thalès mais aussi d'une recomposition européenne plus large incluant l'Espagne, l'Italie ou l'Allemagne, avec laquelle un rapprochement représente un véritable enjeu. Actuellement, les discussions portent sur le montant de la soulte dont doit s'acquitter Thalès pour entrer au capital de DCN. En tout état de cause, la marine souhaite pouvoir s'appuyer sur une industrie forte permettant de réduire les coûts ;
- pour ce qui concerne le volet industriel de DCN, deux aspects doivent être distingués : les dotations payées à DCN pour entretenir les installations et la rénovation des infrastructures portuaires de la marine, dont certaines ont plus de cinquante ans ;
- les programmes affectés par la restructuration industrielle de DCN correspondent à la « respiration budgétaire » de la loi de programmation, c'est-à-dire aux programmes décalés pour des raisons réglementaires ou techniques, comme les sous-marins Barracuda ou l'hélicoptère NH 90. Ces décalages ont permis à la marine de financer sa part du surcoût lié à DCN ;
- l'incompatibilité des langages informatiques entre DCN et ses principaux partenaires est effectivement source de difficulté pour les programmes en coopération et les industriels devront s'employer à améliorer ce point ;
- la TVA supportée par la marine, suite au changement de statut de DCN, est compensée pendant toute la durée de la loi de programmation. Le ministère de la défense travaille avec les autres ministères concernés à l'harmonisation des règles de TVA sur la construction militaire navale en Europe, où seuls deux Etats, la France et l'Allemagne, assujettissent ces constructions à cet impôt indirect ;
- en Italie, le financement des frégates multimissions est pris sur les crédits du ministère de la production industrielle. La presse italienne se fait cependant l'écho d'un recours éventuel à l'emprunt. L'implication de l'opinion publique et de la presse italiennes est très forte en faveur de ce programme, en raison du nombre très important d'emplois qu'il induit. La France doit envisager tous les scénarios pour ce programme qui, au-delà de la coopération, présente des atouts certains pour l'exportation ;
- en matière de maintien en condition opérationnelle, la marine a internalisé deux fonctions, les pyrotechnies et les rechanges, avec l'objectif d'en moderniser la gestion. Pour ce qui concerne les rechanges, la marine a mis au point une gestion informatisée et a modifié ses pratiques pour privilégier l'achat de disponibilités auprès des industriels avec des contrats comprenant les pièces et la main-d'oeuvre. Un troisième axe d'effort consisterait à confier la gestion des rechanges réparables à un logisticien professionnel ;
- le modèle 2015 doit être entendu dans une perspective dynamique. La marine cherche à réduire les coûts en réalisant des séries plus longues. Il convient de souligner que les lois de programmation ont toujours suscité des « bosses » budgétaires qu'il faudra surmonter par la baisse des coûts et par l'actualisation des programmes en fonction du contexte stratégique ;
- la part commune des projets français et britannique de porte-avions est d'environ 80 %. La principale modification pour la version française du bâtiment est qu'un pont situé sous le pont d'envol devra être aménagé pour l'installation de catapultes et brins d'arrêt. 926 millions d'euros d'autorisations d'engagements sont inscrits au projet de loi de finances 2006 pour passer les premières commandes. Le partage industriel entre Français et Britanniques reste à préciser, même s'il est acquis que le porte-avions français sera construit en France et les deux bâtiments britanniques au Royaume-Uni.
M. Philippe Madrelle a interrogé le chef d'état-major de la marine sur l'avenir du site de Hourtin.
L'amiral Oudot de Dainville a précisé que le ministère de la défense avait envisagé d'installer sur ce site un centre « Défense 2e chance », mais que la négociation avec un autre repreneur était déjà très avancée et la dépollution du site, programmée. Il aura fallu près de dix années pour la reconversion de ce site, comme pour la plupart des sites de cette importance.
M. François
Lureau
Délégué général pour
l'armement
Le 10 novembre 2005
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M. François Lureau a tout d'abord rappelé que l'organisation interne de la délégation générale pour l'armement (DGA) avait récemment évolué pour tenir compte de la nouvelle architecture budgétaire instaurée par la LOLF, qui introduit notamment le copilotage du programme « équipement des forces » par le chef d'état-major des armées (CEMA) et lui-même. Il a souligné que la DGA était désormais répartie en deux grands pôles : l'un, consacré au programme 146 « Equipement des forces », l'autre dévolu à la « Préparation de l'avenir » avec une implication dans les programmes 191 (recherche duale), et 144 (environnement et prospective de la politique de défense).
S'agissant de l'équipement des forces, qui bénéficie d'environ 10 milliards d'euros d'investissement annuel, il est naturel que le CEMA soit le décideur final en termes capacitaires, du fait de sa responsabilité opérationnelle. Dans ce cadre, la DGA assure l'application des décisions ainsi arrêtées et la conduite des programmes. M. François Lureau a estimé que ce copilotage, ajouté à la récente réforme renforçant les compétences transversales du chef d'état-major des armées, simplifie les prises de décision en matière d'équipement des forces. Un mode de travail précis a été ainsi déterminé avec le CEMA, et une première réunion conjointe se tiendra d'ici la fin de l'année 2005 pour entériner les objectifs déclinés par budgets opérationnels de programmes.
M. François Lureau a ensuite évoqué les principales livraisons effectuées en 2005 grâce aux 9,5 milliards d'euros d'autorisations d'engagements. Le programme de Frégates multimissions (FREMM) en est le premier bénéficiaire, avec 4,6 milliards d'euros ; le programme de recherche dispose, quant à lui, de 600 millions d'euros d'autorisations d'engagements, en croissance de 15 % par rapport à 2004. Il subsiste néanmoins des reports de charges, d'un montant de 2 milliards d'euros pour l'ensemble des crédits d'équipement, qui pèsent pour l'essentiel sur la DGA et induisent des retards de paiement par manque de ressources financières, et qui suscitent eux-mêmes le paiement d'intérêts moratoires aux entreprises. M. François Lureau a déploré cet état de fait imposé notamment par des arbitrages budgétaires effectués sous l'impulsion du ministère des finances, et a rappelé que le Premier ministre s'était engagé à résorber l'intégralité de ces reports d'ici à 2008. Il a précisé que la DGA, pour les paiements aux entreprises, s'efforçait d'accorder un traitement prioritaire aux PME.
Puis le délégué général pour l'armement a évoqué l'évolution des grands programmes d'armement durant l'année 2005, se félicitant que le premier prototype de VBCI (véhicule blindé de combat d'infanterie) ait été livré. Il a en revanche déploré le retard, imputable à l'industriel, dans la livraison des Rafale à l'armée de l'air, qui ne disposera probablement pas de la totalité des 11 appareils prévus pour 2005, 4 Rafale ayant été effectivement livrés depuis le début de l'année. Le programme Tigre voit sa situation s'améliorer, tout comme le programme Leclerc qui enregistre des progrès, mais laisse subsister des problèmes de qualité ; 34 chars devraient être livrés en 2005 et le programme s'achèvera en 2006. Plus largement, M. François Lureau a évoqué les difficultés récurrentes des grands industriels à respecter les délais de livraison. Ces retards découlent de motifs multiples touchant à une complexité croissante des matériels, à leur réalisation éventuelle en coopération européenne, et aux relations avec les sous-traitants. Il a rappelé que « l'indicateur LOLF » appliqué à l'année 2005 laissait apparaître un délai moyen de retard supplémentaire de deux mois, ce qui est manifestement excessif. Il a cependant souligné que la DGA prenait des initiatives en direction des industriels pour améliorer les calendriers des livraisons.
Il s'est félicité que le projet de loi de finances pour 2006, en étant conforme, pour la quatrième année consécutive, aux objectifs de la LPM 2003-2008, facilite les négociations avec les industriels qui bénéficient ainsi d'une meilleure visibilité de leur plan de charge.
Evoquant ensuite les différents systèmes de force, il a rappelé que l'année 2006 serait marquée, pour la dissuasion, par le premier essai en vol du missile M51, pour les systèmes d'information et de commandement, par le lancement du satellite Syracuse 3B, pour le système « engagement et combat », par la livraison de 14 Rafale, ce qui permettra la constitution du premier escadron au standard F2 à Saint-Dizier en 2006 conformément à la loi de programmation militaire, par la livraison de 7 hélicoptères Tigre, l'achèvement du programme du char Leclerc, et la poursuite de la livraison des missiles Scalp. Les deux commandes principales de 2006 seront le deuxième porte-avions et le sous-marin nucléaire d'attaque Barracuda.
Puis M. François Lureau a décrit les principaux éléments du programme 144 visant à la préparation de l'avenir, doté de 550 millions de crédits de paiement en 2005, portés à 600 millions d'euros en 2006. L'effort de recherche total accompli par la DGA bénéficiera ainsi d'une ressource importante, portée de 1,4 à 1,5 milliard d'euros de 2005 à 2006. Ces crédits permettront, en 2006, le lancement du démonstrateur de drones d'observation Euro Male, la mise au point des nouvelles technologies pour hélicoptère avec le démonstrateur Hector, la recherche relative à l'alerte spatiale dans le cadre du système de défense anti-missiles ou encore sur les futurs missiles de croisière, enfin un renforcement de l'effort de lutte contre les armements biochimiques.
Un débat a suivi l'exposé du délégué général pour l'armement.
M. André Dulait, rapporteur pour avis « Forces terrestres », s'est interrogé sur les programmes liés à l'aéromobilité. Si la situation du programme Tigre s'améliore, la version « marine » de l'hélicoptère de transport NH 90 rencontre des difficultés. Ces problèmes seront-ils résolus pour la livraison de la version « terre » prévue en 2011 ? Il a souhaité savoir si le système FELIN d'équipement du fantassin était susceptible d'intéresser d'autres armées européennes et si des discussions étaient engagées sur ce point. De même, il a demandé si le projet de Bulle opérationnelle aéroterrestre (BOA) pourrait-il faire l'objet d'une coopération européenne élargie.
M. François Lureau, délégué général pour l'armement, a indiqué que la version « marine » du NH 90 serait effectivement livrée avec près de deux années de retard, en raison des difficultés rencontrées par les industriels. A l'horizon de la livraison de la version terrestre, ces problèmes devraient être résolus puisque cette version de l'appareil, dont la livraison à l'armée allemande est prévue plus tôt que pour les forces françaises, est actuellement en cours de qualification.
Evoquant les intérêts moratoires payés par l'Etat, M. André Dulait, rapporteur pour avis, s'est interrogé sur d'éventuelles pénalités incombant aux industriels en cas de retard de livraison.
M. François Lureau a précisé que le niveau des pénalités de retard était inscrit dans chaque contrat mais qu'en l'occurrence, pour ce qui concerne le programme NH 90, les pénalités, définies dans le cadre de l'OTAN, étaient assez modestes.
La coopération européenne sur les programmes Félin et de BOA est peu avancée. Les programmes français et britanniques d'équipement du fantassin sont comparables mais la France et la Grande-Bretagne n'ont pas choisi les mêmes industriels. Les discussions portent désormais sur les possibilités de standardisation internationale pour certains éléments afin de bénéficier d'un effet quantité pour obtenir des prix plus avantageux. Un projet de coopération pourrait déboucher, avec les Etats-Unis, sur la BOA et le système de combat aéro-terrestre. Le projet américain de FCS (futur combat system) est plus avancé mais les discussions peuvent progresser sur la standardisation, l'architecture et l'interopérabilité. Il n'existe d'ailleurs pas actuellement d'autre programme comparable en Europe.
M. Didier Boulaud, rapporteur pour avis « Environnement et soutien de la politique de défense », a déclaré ne pas partager l'optimisme du délégué général pour l'armement sur l'exécution de la loi de programmation militaire, des difficultés étant prévisibles après 2007 ou 2008. Il s'est interrogé sur la cause principale des reports de charge, qui sont également source d'intérêts moratoires. Il a considéré qu'une « bosse » de financement existait sur les programmes engagés et a souhaité connaître l'ampleur des besoins de financement liés à ces programmes à l'horizon 2015. Evoquant le programme d'hélicoptère de combat Tigre, il a indiqué que les commandes avaient été réduites de 215 à 160 appareils. Rappelant qu'un audit de l'industriel avait été engagé sur ce programme ainsi que sur celui de l'hélicoptère NH 90, il a souhaité en connaître les principales conclusions. Abordant la question d'une éventuelle réduction du format de l'escadrille des sous-marins nucléaires d'attaque, il a sollicité des précisions sur la charge que représente le programme Barracuda pour DCN. Il a également souhaité savoir si l'Italie signerait finalement le mémorandum d'accord relatif au programme des frégates multimissions. Considérant que la politique spatiale devrait être une des priorités du budget du ministère de la défense et que l'Europe était d'ores et déjà une puissance spatiale civile, il s'est interrogé sur d'éventuelles propositions de la DGA dans ce domaine. Soulignant l'effort accompli dans le domaine de la recherche, il s'est demandé si cet effort particulier suscitait un écho auprès des partenaires européens de la France. Dans le domaine de l'export, où un plan stratégique est en cours d'élaboration, il s'est interrogé sur la possibilité de prévoir une initiative européenne pour l'harmonisation des procédures.
M. François Lureau a apporté les éléments de réponse suivants :
- les reports de charge sont liés, d'une part, à un retard initial d'environ 800 millions d'euros sur les programmes dès l'entrée en loi de programmation et, d'autre part, au souci du gouvernement de respecter ses engagements européens en matière de dépenses publiques. Si la question du financement des opérations extérieures ne devrait plus désormais avoir un impact aussi significatif, des arbitrages entre le maintien en condition opérationnelle d'une part et les acquisitions d'équipement neuf d'autre part ont également dus être effectués au profit de l'entretien des matériels. L'objectif est de résorber ces reports d'ici à 2008 ;
- au-delà de 2008, l'estimation des besoins est un exercice difficile. La question du coût du maintien en condition opérationnelle reste un sujet de préoccupation. La sophistication croissante des matériels devrait conduire à augmenter encore les besoins financiers en la matière. Le ministre de la défense a confié une mission à un ingénieur général de l'armement pour étudier les conditions d'une optimisation des coûts. La réalisation de la loi de programmation militaire accusera un léger retard mais l'atteinte du modèle d'armée 2015 ne sera pas remise en cause. En aucun cas, l'effort financier accompli actuellement ne pourra être réduit après 2008 et il faudra, au contraire, probablement l'augmenter ;
- la cible de commande des hélicoptères de combat Tigre a été révisée à 160 unités depuis plusieurs années. La commande actuelle porte sur 80 hélicoptères pour la France et 80 pour l'Allemagne. L'audit mené sur Eurocopter a fait apparaître la nécessité d'une amélioration de la maîtrise des systèmes et de la gestion des relations avec les partenaires et sous-traitants. Il produit dès à présent des effets positifs ;
- aucune réduction des quantités n'est prévue sur le programme Barracuda. En revanche, un décalage de 6 mois est intervenu dans la commande. L'objectif est de la notifier en 2006 mais, dans l'immédiat, le prix proposé par DCN ne peut être considéré comme raisonnable ;
- les péripéties du programme des frégates multimissions sont désormais connues. Au niveau politique, le problème est a priori réglé, le Président du Conseil ayant confirmé l'engagement de l'Italie, dont le financement repose sur une solution d'emprunt qui doit être approuvée prochainement par le Parlement et la commission compétente du Sénat italien a déjà donné son accord. Il reste que des modifications devront être apportées au projet de contrat passé par l'OCCAR dans la mesure où l'Italie pourrait ne s'engager que sur l'achat de deux bâtiments ;
- la mission confiée à l'ambassadeur Bujon de l'Estang sur la politique spatiale a conclu à la nécessité de l'augmentation de l'effort de recherche pour le porter à environ 100 millions d'euros par an. La France a formulé des propositions auprès de ses partenaires européens pour travailler sur « l'après Hélios », la génération actuelle des satellites d'observation. Ce thème de réflexion a été proposé à l'Agence européenne de défense avec un soutien significatif de la Commission européenne ;
- seuls deux Etats européens fournissent un effort substantiel en matière de recherche militaire, le Royaume-Uni et la France. Les échanges dans ce domaine sont nombreux et de qualité, les deux pays ayant mis en place un dispositif de pilotage conjoint de la recherche ;
- le volume actuel des exportations se situe entre 3 et 4 milliards d'euros par an et l'objectif est de le porter à 6 milliards d'euros. Une coordination européenne commence à se dessiner dans le cadre de la lettre d'intention (LOI), accord qui réunit la Suède, le Royaume-Uni, l'Italie, l'Espagne, l'Allemagne et la France, qui pourrait déboucher sur un « Schengen de la défense ». La libre circulation suppose en effet la définition préalable de règles claires sur l'exportation.
M. Jean-Pierre Fourcade a souhaité savoir quels étaient les programmes prévus dans le domaine du renseignement. Il a souhaité connaître la part dévolue au nucléaire sur le milliard et demi d'euros consacré à la recherche ainsi que celle destinée à l'industrie. Il s'est également interrogé sur le point de savoir ce que recouvrait le vocable de « financement innovant ».
M. André Boyer, rapporteur pour avis « Forces navales », s'est interrogé sur le degré de communalité des besoins français et britanniques sur le deuxième porte-avions. Il a également souhaité recueillir l'appréciation du délégué général pour l'armement sur l'avenir de la société Thalès.
M. Philippe Nogrix, rapporteur pour avis « Forces aériennes », a souhaité savoir quelle économie représentait la location des avions de transport à long rayon d'action. Il s'est interrogé sur la réalité du programme Euro Male, indiquant qu'il souhaitait le voir passer du programme 144 « Environnement et prospective de la politique de défense » au programme 146 « Equipement des forces ». Il a souhaité connaître les pays qui s'étaient déjà engagés dans une coopération et sur quel financement, et savoir si ce programme pourrait à terme être transféré à l'Agence européenne de défense. Il s'est interrogé sur l'étalement de la commande de missiles de croisière Scalp. Evoquant les retards incombant aux industriels, il a demandé si les chartes de qualité évoluaient en cours de programmes et souligné que les grandes entreprises pouvaient également, comme les PME, rencontrer des problèmes de trésorerie pour cause de retards de paiement.
Mme Hélène Luc a souhaité connaître les mesures qui pouvaient être prises pour limiter les retards de livraison. Elle a rappelé sa préférence pour un porte-avions à propulsion nucléaire qui aurait permis de bénéficier de l'expérience du Charles de Gaulle, de préserver le savoir-faire de l'industrie et de limiter les besoins en pétrole face à la crise actuelle de l'énergie. Evoquant le projet européen de reprise des vols spatiaux habités, elle s'est interrogée sur les retombées possibles sur le spatial militaire. Elle a enfin considéré que la France devrait prendre une initiative internationale pour l'interdiction des bombes à sous-munitions.
M. Serge Vinçon, président, s'est interrogé sur la coopération européenne en matière spatiale et sur l'articulation entre l'Agence européenne de défense et les structures nationales.
M. François Lureau a précisé les éléments suivants :
- en matière de renseignement, les travaux portent essentiellement sur la génération de satellites d'observation qui suivra Hélios. Des propositions de coopération ont été adressées aux partenaires européens et un groupe de travail a été constitué avec l'Allemagne, l'Italie, l'Espagne et la Belgique sur les capacités à l'horizon 2015 qui devraient combiner des capteurs optiques et des radars. La Grèce devrait par ailleurs rejoindre la coopération dans Hélios ;
- la moitié de l'effort de recherche revient au nucléaire et, hors nucléaire, environ 600 millions d'euros sont destinés aux entreprises ;
- le Royaume-Uni pratique avec succès depuis quelques années les contrats de partenariat avec l'Etat ou « financement innovant ». Pour ce qui concerne l'avion de transport à long rayon d'action, le contrat global est une solution satisfaisante. Ces modes de financement sont particulièrement appropriés dans le domaine des services, comme pour le projet de formation de l'école de l'aviation légère de l'armée de terre à Dax. Un comité mixte qui réunit le ministère de la défense et celui des finances examine l'opportunité de recourir à ce mode de financement de préférence à une acquisition patrimoniale. Les simulateurs de l'armée de l'air pourraient devenir propriété d'une société privée. Les Britanniques ont cependant limité à 4 % la part de leurs investissements réalisés sous cette forme nouvelle de financement.
A M. Serge Vinçon, président, qui l'interrogeait sur la possibilité de recourir à ce type de financement pour faire face au déficit capacitaire en matière d'aéromobilité entre 2008 et 2011, M. François Lureau a indiqué que cette possibilité avait été examinée mais ne s'était pas révélée convaincante sur le plan budgétaire.
Le délégué général pour l'armement a précisé que les études démontraient un avantage évident à la propulsion classique en matière de porte-avions. Le savoir-faire de l'industrie est d'ailleurs préservé grâce aux programmes de sous-marins. La communalité de besoins avec les Britanniques pour le deuxième porte-avions dépasse les 80 %. Un contrat commun pour le lancement de la phase de définition détaillée, débouchant sur des offres engageant les industriels, est en cours de négociation. Les commandes pourraient être passées en juin 2006, l'objectif étant d'obtenir une économie de 30 % par rapport à une solution nationale ;
Pour ce qui concerne le programme « Neuron », les difficultés semblent être levées en Grèce et en Espagne et devraient l'être à terme en Suède.
Le système intérimaire de drones Male (SIDM) subit des retards importants. Ce programme a été confié à EADS mais la performance de l'industriel n'est pas satisfaisante. Un engagement de livraison a été pris pour avril 2006.
L'objectif du programme Euro Male est d'aboutir à une capacité opérationnelle en 2011. La phase de prototype est financée sur le programme 144 mais aucune dotation n'a été prévue par la loi de programmation militaire. Actuellement, aucun Etat n'est véritablement engagé, la France pas davantage que ses partenaires, mais il existe un intérêt réel en Espagne, aux Pays-Bas, en Italie et peut-être en Allemagne. Les industriels français se sont accordés sur la façon de mener un éventuel projet dont le coût représente 1,5 milliard d'euros. Les besoins opérationnels existent dans des termes voisins dans de nombreux Etats, lesquels rencontrent tous par ailleurs les mêmes contraintes budgétaires. L'Agence européenne de défense interviendra après la première phase d'accord entre les Etats. Dans l'intervalle, des capacités existent sous la forme de système de drone tactique intérimaire (SDTI), actuellement en service, et des SIDM à venir.
M. Philippe Nogrix, rapporteur pour avis, a considéré que le programme Euro Male était une catastrophe et qu'il convenait d'en tirer toutes les conséquences. Il a considéré qu'un audit était indispensable afin d'éviter un investissement en pure perte.
M. François Lureau, délégué général pour l'armement, a précisé qu'un délai était nécessaire, devant les difficultés rencontrées par les industriels sur le SIDM, pour orienter convenablement le programme Euro Male. Les Britanniques ont certes investi dans le « Watchkeeper » mais il ne s'agit pas d'un drone moyenne altitude longue endurance (MALE), ses capacités étant largement inférieures. La seule autre offre disponible sur le marché est américaine, avec le drone Predator. L'élaboration d'un programme européen est délicate et de maturation lente et, sans l'action résolue de la France, il est probable que ses partenaires auraient déjà procédé à des acquisitions « sur étagères ». Il convient au préalable de disposer de la capacité SIDM dans des conditions satisfaisantes.
Plusieurs scénarios ont été examinés pour les avions de transport à long rayon d'action et dont la location s'était révélée une solution convaincante. Certes plus chère que l'acquisition patrimoniale, elle garantit cependant une bonne disponibilité et permet de lever éventuellement une option d'achat à terme.
L'Agence européenne de défense est de création récente mais elle a d'ores et déjà trouvé sa place dans l'architecture européenne. Ses difficultés majeures portent sur les moyens financiers qui lui sont accordés. La France considère que les moyens de recherche de l'Agence, actuellement de 3 millions d'euros, sont insuffisants. Des études préconisent de lui attribuer entre 300 et 400 millions d'euros sur les 2 milliards d'euros dépensés en recherche par les Européens. Pour la France, l'objectif est une dotation de 200 millions d'euros à l'horizon 2010 mais ce budget doit être précédé d'une réflexion stratégique. L'Agence a mené une réflexion de ce type sur les capacités et devrait pouvoir l'étendre à moyen terme à la recherche.
L'alliance entre DCN et Thalès est indispensable. DCN, en particulier, dépendant à 90 % de commandes étatiques, il convient de l'ancrer à un opérateur industriel important. En outre, Thalès apporte des compétences essentielles en matière de système d'armes. Un accord devrait pouvoir être trouvé. Pour ce qui concerne l'actionnariat de Thalès, il n'est pas bon pour l'entreprise d'avoir des incertitudes dans ce domaine. Peu d'engagements précis de la part d'éventuels candidats à l'entrée au capital sont cependant constatés pour le moment.