TRAVAUX DE LA COMMISSION
I. AUDITION DU MINISTRE
Réunie le mardi 26 octobre 2004 sous la présidence de M Nicolas About, président, la commission a procédé à l'audition de M. Hamlaoui Mékachéra, ministre délégué aux anciens combattants sur le projet de budget de son ministère pour 2005.
M. Hamlaoui Mékachéra, ministre délégué aux anciens combattants, a d'abord souligné l'augmentation significative des crédits du projet de budget des anciens combattants pour 2005, après une décennie de baisse, preuve de l'attention que le Gouvernement porte au monde combattant, dans un contexte financier pourtant difficile. La Nation consacrera, en 2005, 3,39 milliards d'euros aux anciens combattants, soit une hausse des crédits par ressortissant de près de + 4 %.
Cette tendance résulte d'abord des mesures de justice, de solidarité et d'équité décidées par le Gouvernement, plusieurs des dispositions prises en 2004 produisant, pour la première fois, leur effet en année pleine. Il a ainsi évoqué l'harmonisation des conditions d'attribution de la carte du combattant en Afrique du Nord, désormais attribuée, pour l'ensemble des appelés d'Algérie, Tunisie et Maroc, à partir de quatre mois de séjour avant le 2 juillet 1962, ainsi que l'augmentation de 15 points des pensions des veuves.
Il a observé, en outre, que l'augmentation du budget en 2005 s'explique par une raison démographique, de nombreux anciens combattants de la guerre d'Algérie atteignant 65 ans, âge à partir duquel ils commencent à percevoir la retraite du combattant.
Il a précisé, par ailleurs, que le projet de budget pour 2005 porte la marque de la priorité sociale retenue par le Gouvernement : en témoigne l'augmentation de près de 4 % des crédits sociaux de l'ONAC, qui atteindront 12,6 millions d'euros, alors qu'ils étaient, jusqu'en 2003, partiellement financés par la réserve parlementaire. Cette hausse a été décidée à la suite des conclusions du rapport consacré aux anciens combattants et leurs veuves dont les revenus sont inférieurs au SMIC, établi en application de l'article 122 de la loi de finances pour 2004.
Abordant la question de l'indemnisation des orphelins des victimes d'actes de barbarie pendant la deuxième guerre mondiale, M. Hamlaoui Mékachéra, ministre délégué aux anciens combattants, a indiqué que ceux-ci bénéficieront d'une indemnisation identique à celle accordée aux orphelins des déportés de la Shoah par le décret du 13 juillet 2000. 500 dossiers d'orphelins de déportés, de fusillés et de massacrés sont d'ores et déjà en instance de réponse auprès du secrétariat général du Gouvernement. Les crédits nécessaires au financement de cette nouvelle indemnisation sont inscrits au budget du Premier ministre et s'ajoutent donc aux crédits du budget des anciens combattants.
Il a ensuite évoqué la question du « rapport constant », que le Gouvernement a décidé de rendre plus lisible. Le débat récurrent sur l'évolution de la valeur du point de pension va trouver son issue grâce à un mécanisme d'ajustement identique, en niveau et en rythme, à celui applicable au point « Fonction publique ».
Il a également souhaité mettre en perspective son action avec le mouvement, plus large, de réforme de l'État : l'exécution du contrat d'objectifs et de moyens de l'ONAC, qui entre dans sa troisième année, est conforme aux objectifs fixés en 2002 et approuvés par le monde combattant ; l'Institution nationale des Invalides (INI) devrait conclure un contrat du même ordre avant la fin de l'année 2004 et une « démarche qualité » a été engagée dans le domaine des pensions afin de réduire les délais de gestion des dossiers.
M. Hamlaoui Mékachéra, ministre délégué aux anciens combattants, a constaté que le projet de budget pour 2005 répond à la volonté affirmée par le Gouvernement, dès sa nomination, de répondre aux attentes légitimes des anciens combattants. S'il est impossible, pour 2005, de revaloriser la retraite du combattant, des avancées ont été réalisées depuis lors : la décristallisation des pensions des anciens combattants des pays anciennement sous souveraineté française, l'indemnisation des orphelins des victimes de la barbarie pendant la deuxième guerre mondiale, l'harmonisation des conditions d'attribution de la carte du combattant AFN, l'augmentation des pensions des veuves et celle des crédits sociaux de l'ONAC, le rétablissement du remboursement des cures thermales, la revalorisation de 7,5 points du plafond majorable des rentes mutualistes, la sauvegarde de l'ONAC, la modernisation de l'INI, la création d'un bilan médical gratuit pour les névroses traumatiques de guerre et d'un observatoire de la santé des vétérans et, dans le domaine de la mémoire, la création d'une journée d'hommage aux Harkis et d'une journée nationale d'hommage aux morts pour la France en Afrique du nord.
Enfin, M. Hamlaoui Mékachéra, ministre délégué aux anciens combattants, a insisté sur le fait que la politique de mémoire est une priorité de son action, dont témoignent les 845 commémorations organisées en 2004 en Normandie, en Provence et à Paris, et qui trouveront leur prolongement en 2005 pour le 60 e anniversaire de la victoire sur le nazisme, de la libération des camps de concentration, du retour des prisonniers de guerre et des victimes du service du travail obligatoire et, enfin, de la victoire dans le Pacifique.
M. Marcel Lesbros, rapporteur pour avis des crédits affectés aux anciens combattants , s'est félicité des progrès enregistrés depuis 2002 en faveur du monde combattant. Il a souhaité connaître le coût des mesures prévues au titre du budget des anciens combattants pour 2005. Revenant sur la publication, le 27 juillet 2004, d'un décret instituant l'indemnisation des orphelins de victimes de la barbarie nazie, il s'est interrogé sur l'impact budgétaire et le calendrier de mise en oeuvre de cette mesure. Il a rappelé la revendication des anciens combattants d'Afrique du Nord pour obtenir le bénéfice de la « campagne double ». Il s'est ensuite enquis des principaux axes du projet d'établissement de l'INI. Il a enfin voulu savoir si le Gouvernement envisage, à moyen terme, une revalorisation de la retraite du combattant.
M. Hamlaoui Mékachéra, ministre délégué aux anciens combattants, a rappelé que le budget des anciens combattants pour 2005 s'élève à 3,39 milliards d'euros, soit une augmentation globale de 0,14 % et une hausse par ancien combattant de 4 % par rapport à 2004. Cette augmentation des crédits résulte d'une évolution démographique contrastée, l'arrivée à l'âge de la retraite de contingents importants d'anciens combattants d'Afrique du Nord compensant la diminution inéluctable du nombre de pensionnés pour invalidité.
Concernant l'indemnisation des orphelins de victimes de la barbarie nazie, il a indiqué que l'inscription d'une provision de 20 millions d'euros au budget du Premier ministre a été calibrée en fonction de sa montée en charge, sept à huit mille personnes devant bénéficier de cette nouvelle mesure d'indemnisation.
Il a ensuite expliqué qu'une mission d'études a été confiée à un inspecteur général des affaires sociales sur la question de la « campagne double » pour les anciens combattants d'Afrique du Nord et qu'un rapport d'étape est attendu pour la fin du mois de novembre 2004.
Abordant ensuite la question de la modernisation de l'INI, il a souligné la nécessité de prévoir des exigences adaptées au type de prestation, hospitalière ou hôtelière, fournie par l'institution. Le projet hospitalier de l'INI a fait l'objet d'une démarche d'accréditation auprès de l'Agence nationale d'accréditation et d'évaluation en santé (ANAES), dont les conclusions ont été positives. L'INI s'engage désormais dans l'élaboration d'un contrat d'objectifs et de moyens global, prévoyant notamment le recrutement de professionnels de qualité.
S'agissant enfin de la retraite du combattant, il a précisé que ses services travaillent en concertation avec les associations d'anciens combattants pour déterminer les priorités de chaque exercice budgétaire et que la revalorisation de la retraite n'avait pas été retenue à ce titre pour 2005.
M. Jacques Baudot, rapporteur spécial de la commission des finances, a souligné l'adoption de ce budget à l'unanimité par la commission des finances. L'augmentation des crédits consacrés aux anciens combattants en 2005 contraste avec les dix années précédentes marquées par une baisse moyenne de 2,41 %. Il s'est déclaré, en outre, satisfait de la montée en charge de la mise en oeuvre de la loi organique relative aux lois de finances.
Revenant sur la publication du décret du 27 juillet 2004, il a fait état des réclamations de certains orphelins pour que le décalage de quatre ans entre l'indemnisation des orphelins de confession juive et celle des autres catégories d'orphelins soit compensé, tout en les estimant peu fondées. Il a enfin regretté qu'aucune revalorisation, même symbolique, de la retraite du combattant ne soit prévue en 2005.
M. Hamlaoui Mékachéra, ministre délégué aux anciens combattants, a expliqué que la mise en oeuvre rétroactive de l'indemnisation des orphelins de victimes de la barbarie nazie n'est pas envisageable car la nouvelle indemnisation n'a ni les mêmes causes, ni le même périmètre d'éligibilité, que celle prévue par le décret du 13 juillet 2000.
M. Guy Fischer a fait valoir que l'augmentation de 0,14 % du budget des anciens combattants pour 2005 est due en réalité à la montée en charge de mesures votées en 2003 et 2004. Il a déploré le fait qu'aucune mesure nouvelle ne soit envisagée pour 2005. Évoquant le rapport sur les anciens combattants et leurs veuves disposant de ressources inférieures au SMIC, il a regretté que celui-ci s'en tienne à un simple état des lieux et que la question de la création d'une allocation différentielle de solidarité soit éludée. Il s'est enfin inquiété de la diminution des effectifs de l'ONAC, susceptible de conduire à une remise en cause du service de proximité assuré par ses antennes départementales.
Mme Gisèle Printz a également souligné l'absence de mesure nouvelle dans ce projet de budget, notamment en matière de revalorisation de la retraite du combattant et du plafond majorable des rentes mutualistes du combattant. Elle a fait état de l'injustice frappant certains orphelins exclus du périmètre du décret du 27 juillet 2004. Elle a enfin souhaité connaître l'état d'avancement des négociations avec la fondation « Entente franco-allemande » concernant l'indemnisation des anciens incorporés de force dans les formations paramilitaires allemandes.
Mme Bernadette Dupont a observé que les associations locales d'anciens combattants se prévalent de leurs dépenses d'action sociale en faveur de leurs adhérents à l'appui de leurs demandes de subvention et qu'elles paraissaient donc ignorer l'existence de crédits d'action sociale intégrés dans le budget de l'ONAC.
M. Gilbert Barbier s'est fait l'écho des difficultés de mise en oeuvre de l'harmonisation à quatre mois de la durée de présence requise en Afrique du Nord pour l'obtention de la carte du combattant, insistant sur le fait que cette harmonisation place sur le même plan militaires de carrière et appelés du contingent.
M. Marcel-Pierre Cléach, président du groupe d'études des sénateurs anciens combattants , a regretté l'absence de revalorisation du plafond majorable de la rente mutualiste du combattant, estimant que cette mesure peu coûteuse recevrait l'assentiment de l'ensemble du monde combattant. Il a souhaité connaître les principales mesures envisagées dans le cadre du contrat d'objectifs et de moyens de l'ONAC.
M. Hamlaoui Mékachéra, ministre délégué aux anciens combattants , a tout d'abord rappelé que si l'objectif du rapport consacré aux anciens combattants et leurs veuves disposant de ressources inférieures au SMIC est d'établir un recensement des ressortissants de l'ONAC disposant de faibles ressources, cela ne signifie pas pour autant que le Gouvernement n'envisage pas d'améliorer leur situation.
Revenant sur le contrat d'objectifs et de moyens de l'ONAC, il a rappelé que la réduction des effectifs a été proposée par le conseil d'administration de l'Office lui-même et que les suppressions de postes se sont accompagnées de mesures de restructuration d'un certain nombre de corps de fonctionnaires.
Il a souligné la difficulté à laquelle s'est heurté le Gouvernement pour définir le périmètre d'éligibilité à la nouvelle indemnisation des orphelins de victimes de la barbarie nazie de la manière la plus large et équitable que possible mais il a reconnu, que dans un certain nombre de cas, le juge devra apprécier in concreto si les conditions d'indemnisation sont réunies.
Abordant ensuite la question de l'indemnisation des alsaciens et des mosellans incorporés de force dans le Reicharbeitsdienst (RAD) et le Krieghilfsdienst (KHD), il a rappelé les démarches entreprises par le Gouvernement auprès de la fondation « Entente franco-allemande », qui en est chargée. Il a souligné la bonne volonté du Gouvernement français, qui a proposé de prendre à sa charge la moitié de l'indemnisation, bien que celle-ci relève normalement de la responsabilité allemande. Il a regretté que la fondation, interprétant très restrictivement ses statuts, ait jusqu'à ce jour refusé toute solution de compromis.
Il a souligné que les subventions attribuées par l'ONAC aux anciens combattants sont des subventions individuelles et qu'elles ne recoupent donc pas entièrement le champ de celles qui sont versées par les collectivités territoriales aux associations locales d'anciens combattants. Il a toutefois concédé l'utilité d'une meilleure coordination de ces subventions, individuelles et collectives, afin d'améliorer l'efficacité globale de l'action sociale en faveur du monde combattant.
Revenant enfin sur les conditions d'attribution de la carte du combattant, il a rappelé que l'harmonisation à quatre mois de la durée de séjour en Afrique du nord requise pour l'obtention de la carte constitue une mesure d'équité dans la mesure où, jusqu'à présent, la durée exigée des appelés du contingent était de douze mois, mais de quatre mois pour les policiers et CRS. Le projet de budget pour 2005 prend en compte les conséquences financières de cette harmonisation sur les dépenses de retraite du combattant.