ANNEXE 2 :
VERS UN
GRAND EMPRUNT EUROPÉEN
150 MILLIARDS POUR RELANCER LA CROISSANCE EN
EUROPE
PAR L'INNOVATION ET LA RECHERCHE
En 2004, les Etats-Unis dépenseront, en recherche et développement, 40 milliards de dollars de plus, que la totalité des pays de l'Europe des 25. Pensons aussi aux progrès du Japon et de la Chine !
En Europe, nous formons, à grand frais, des ingénieurs et des chercheurs de qualité. Il est insupportable de voir partir les plus brillants d'entre eux, parce que des conditions de travail nettement supérieures s'offrent à leur compétence. Cet exode renforce la suprématie technologique et finance largement les pays d'accueil.
Les disparités de moyens et la mondialisation croissante ont provoqué malaises et tensions dans les communautés scientifiques européennes et dans les entreprises, grandes et petites.
Les efforts nationaux, en Europe, sont en outre bridés par le Pacte de Stabilité qui limite dans divers pays la possibilité d'augmenter les efforts publics de recherche.
Il faut en sortir, et vite.
L'innovation est désormais le moteur essentiel de l'économie. Elle induit fortement la croissance.
Les Américains l'ont bien compris, eux qui négligent leur déficit public pour privilégier, avec succès, la croissance.
Quelle est donc la solution ?
Il faut un signal fort.
Un choc salutaire sous la forme d'un emprunt - massif - de la Banque Européenne d'Investissement (qui est par ailleurs l'instrument financier le plus adapté), sur les places financières mondiales, consacré à la recherche et à l'innovation européenne. Cet emprunt viendra compléter les investissements de recherche des pays membres. Ces investissements devraient, signalons le, être déduits de l'éventuel déficit public, s'agissant d'investissements prioritaires.
L'emprunt pourra être de 1,5 % du PIB européen : soit 150 Milliards d'euros.
Une faible part de l'augmentation de croissance du PIB qui serait induite, permettrait en partie de rembourser l'emprunt, par exemple sur 20 ans.
Les 150 milliards d'euros permettront de :
A - Conforter les moyens financiers affectés à la recherche fondamentale et aux grands organismes et structures afférents (CERN, ESA, EMBO, etc.). Un Conseil Scientifique Européen, une Fondation ou une structure ad hoc devrait être mis en place.
B - Abonder systématiquement, et de façon importante, les projets labellisés par les procédures Eurêka, de façon à leur donner plus d'ampleur et permettre rapidement le développement d'innovations liant industriels et centres de recherche.
C - Impliquer plus massivement le Fonds Européen d'Investissement dans les fonds d'amorçage existants - ou à créer - en vue de faciliter le financement initial des porteurs de projets. On sait que ce secteur clé est sous financé dans l'état actuel du capital risque en Europe.
D - Renforcer fortement le programme "Mobilité" de la Commission Européenne en élargissant aux techniciens et aux ingénieurs, aux entreprises et aux start-up technologiques les bénéfices du système. Cela favorisera la création d'un espace européen de l'Innovation, attractif pour tout le monde. Pour les pays nouveaux-entrants, il est, plus qu'ailleurs, nécessaire de permettre le développement des programmes mobilité des jeunes scientifiques.
E - Multiplier les politiques de rapprochement entre pôles d'excellence européens, rapprochements pilotés par la Commission Européenne. Aider à l'émergence et au confortement de campus de recherche liant divers pôles d'excellence publics et privés.
L'ensemble de ces modalités d'intervention devra être piloté et évalué par les comités spécialisés constitués de personnalités européennes désignées par les communautés scientifiques, industrielles et financières.
Il faudra veiller à ce qu'aucune procédure lourde n'entrave la rapidité d'intervention et à ce que la nécessaire évaluation s'effectue a posteriori.
Cette relance de l'Europe, par un emprunt au niveau européen, est stratégique. Elle renforcera la notion d'espace européen de la recherche et de l'innovation. Elle va de pair avec l'indispensable prise de conscience des Etats européens, qui doit être accrue.
Notre survie en tant que lieu de puissance économique, culturelle et sociale, dépend de la priorité donnée désormais aux politiques de recherche et d'innovation fondées sur l'excellence.
La révolution de l'intelligence, qui est en marche, implique un tel sursaut.
François JACOB
Prix Nobel
Pierre LAFFITTE
Sénateur