PREMIÈRE PARTIE

LE CINÉMA

I. LA SITUATION DE L'INDUSTRIE DU CINÉMA : UN DYNAMISME TOUJOURS FRAGILE

Les résultats exceptionnels enregistrés en 2001 attestent de la capacité de l'industrie cinématographique française à attirer des spectateurs de plus en plus nombreux sans sacrifier l'objectif de diversité de la création aux impératifs de la rentabilité économique.

Il s'agit là d'un signe encourageant qui plaide en faveur de l'efficacité du système de soutien public aux différents secteurs de l'industrie cinématographique.

La progression de la fréquentation, confirmée en 2002, témoigne avec éclat de l'intérêt renouvelé des français pour le spectacle cinématographique qui a su reconquérir sa place dans une économie du loisir, pourtant marquée par la concurrence de plus en plus vive des nouveaux médias.

Incontestablement favorisé par la modernisation du parc de salles, qui, après avoir d'abord concerné les principaux centres urbains, se généralise désormais à l'ensemble du territoire, ce phénomène profite au cinéma français, dont les parts de marché ont connu en 2000 et 2001 un redressement spectaculaire.

Ce succès de la cinématographie nationale est confirmé à l'étranger. La tendance à la progression des recettes à l'exportation amorcée en 1995 se poursuit y compris sur des marchés qui semblaient encore jusqu'à une date récente hors de portée, à l'image de l'Amérique du Nord.

Cette conjoncture satisfaisante témoigne de la vitalité de la création française qui atteint en 2001 un niveau record avec une progression sensible du nombre d'oeuvres produites, principalement imputable aux films à petits budgets.

Votre rapporteur ne peut que se féliciter d'un bilan aussi exceptionnel.

Toutefois, de nombreuses inquiétudes pèsent sur l'avenir du cinéma, confronté aux mutations de son environnement financier et technologique.

Le ralentissement de la croissance du chiffre d'affaires des chaînes de télévision comme les incertitudes qui pèsent encore sur la structure du capital de Canal Plus constituent autant de menaces potentielles pour la pérennité du système de financement, qui repose aujourd'hui pour l'essentiel sur les chaînes de télévision. Force est en effet de constater que le compte de soutien ne joue désormais qu'un rôle de variable d'ajustement tandis que les chaînes de télévision contribuent à hauteur de 55 % au financement de la production nationale.

A cet égard, votre rapporteur considère comme une initiative très positive la mise en place par le Centre national de la cinématographie (CNC) d'un groupe de réflexion sur le financement du cinéma dont les conclusions ont été publiées en juillet dernier. Votre commission sera particulièrement attentive aux propositions qu'à la suite de ces conclusions, M. Jean-Pierre Leclerc sera amené à formuler à la fin de l'année au ministre de la culture et de la communication sur les perspectives d'évolution du système de soutien à la production cinématographique.

Les évolutions technologiques font également peser des incertitudes sur l'avenir.

La technologie numérique investit l'ensemble des secteurs du cinéma en modifiant les conditions de tournage et de montage mais également les modalités de distribution et d'exploitation des films.

Les conséquences d'une telle révolution sont encore peu ou mal anticipées. Ainsi par exemple, la perspective d'une réduction des coûts de diffusion des films constitue un enjeu essentiel susceptible de produire des effets contrastés selon les conditions dans lesquelles se déploie cette nouvelle technique qui peut tout à la fois encourager le mouvement de concentration, en modifiant l'équilibre économique entre distributeurs et exploitants, mais également favoriser la diversification de l'offre.

A l'évidence, un effort de prospective est nécessaire pour accompagner ces mutations. C'est notamment avec le souci d'y contribuer qu'a été constituée au sein de votre commission une mission d'information sur l'évolution du secteur de l'exploitation cinématographique.

A. L'EXPLOITATION EN SALLES : UNE EMBELLIE CONFIRMÉE

1. La fréquentation cinématographique : la tendance à la hausse se poursuit

a) Une progression encore significative

En 2001 , avec près de 186 millions d'entrées , les salles enregistrent une nouvelle progression de la fréquentation , soit 12 % par rapport à 2000, et leurs recettes totales augmentent de 13,7 % pour atteindre 1 014 millions d'euros.

Ces chiffres s'inscrivent dans un contexte de progression continue amorcée en 1993 : entre 1992 et 2001, on constate une hausse de la fréquentation de l'ordre de 60 %.

Après avoir concerné les zones urbaines, cette tendance se généralise à l'ensemble du territoire. On relève qu'en 2001, le nombre d'entrées a progressé davantage dans les petites communes que dans les zones situées autour des grands centres urbains : ainsi, alors que les premières voient le nombre de spectateurs s'accroître de 20,7 %, la progression n'est respectivement que de 8 % pour Paris, 10 % pour sa banlieue et de 9,6 % pour les grandes agglomérations. Cette évolution doit toutefois être tempérée par le constat du poids toujours croissant de ces dernières dans la fréquentation.

A l'évidence, le cinéma apparaît bien comme une économie de l'offre.

Parallèlement, l'élargissement du public du cinéma se confirme. Le public du cinéma représente en 2001 plus de 33 millions de spectateurs. Si l'on excepte les résultats de l'année 1998 marquée par le succès de Titanic , il s'agit du chiffre le plus élevé jamais atteint. En 2001, la proportion des français qui sont allés au moins une fois au cinéma dans l'année atteint 61,4 %, contre 58,4 % en 2000.

Chaque spectateur est allé en moyenne 5,6 fois au cinéma contre 5,2 fois en 2000. Ce nombre d'entrées, l'un des plus élevés d'Europe, témoigne de la part croissante dans la fréquentation des spectateurs assidus : les Français sont, en effet, de plus en plus nombreux à aller régulièrement au cinéma puisque les « habitués du cinéma » représentent 41,2 % du public en 2001, contre 32 ,6 % en 1994.

Ces évolutions sont d'autant plus encourageantes qu'elles bénéficient aux films français.

b) Les bonnes performances des films français

En 2001, à la différence de l'exercice précédent, marqué par de faibles performances (30 %), les parts de marché des films français atteignent un niveau inégalé depuis 1986 pour représenter 41,5 % des entrées.

Parmi les cinq films ayant réalisé les meilleures entrées en 2001, quatre d'entre eux sont des productions nationales, Le fabuleux destin d'Amélie Poulain remportant la première place avec plus de 8,85 millions d'entrées.

Ce succès particulièrement bienvenu, après les résultats peu encourageants enregistrés en 2000, s'inscrit dans une tendance à l'amélioration des performances des cinématographies européennes, et en particulier britannique, dont les parts de marché atteignent 7,8 %, contre 6,3 % l'an passé.

Contrepartie mécanique de cette évolution, les films américains enregistrent un recul sans précédent depuis 1986.

On rappellera que depuis 1991, la part de marché du cinéma national oscillait entre 37,5 % pour son plus haut niveau constaté en 1996 et 27,6 % pour son niveau le plus bas enregistré en 1998. Ces chiffres demeurent largement supérieurs à la part de marché moyenne du film national dans les pays européens, qui atteignait 23 % en 2000 -dernière année pour laquelle des statistiques sont disponibles. Toutefois, les premiers chiffres pour 2001 font apparaître un renouveau de l'attrait du public pour les oeuvres nationales, confirmant ainsi la tendance constatée en France.

Les films français réussissent donc à attirer un public de plus en plus large, enjeu essentiel alors que se confirme la tendance à la concentration de la fréquentation. En 2001, on note qu'une centaine de films totalisent près de 82 % des entrées, tandis que les 30 films les plus performants en couvrent à eux seuls un peu plus de la moitié.

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