B. DES ORIENTATIONS COURAGEUSES ET FORTES POUR LUTTER EFFICACEMENT CONTRE LA DÉLINQUANCE
1. La réorganisation des forces de sécurité intérieure
a) La réforme de la répartition des zones de police et de gendarmerie
La mise en oeuvre d'une politique cohérente et efficace de lutte contre l'insécurité passe par une réorganisation des forces de police et de gendarmerie, dont on a vu que la répartition actuelle était archaïque et n'était plus adaptée aux réalités de la délinquance. Lors de la discussion générale du présent projet de loi à l'Assemblée nationale, le 16 juillet, le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales indiquait que « l'organisation des forces de sécurité doit être modernisée et elle le sera par la création de directions interrégionales, car la délinquance se moque des frontières départementales. Nous rechercherons une répartition plus rationnelle entre les zones de compétence de la police nationale et celle de la gendarmerie, chaque force exerçant l'ensemble des missions de sécurité publique sur un territoire donné. Les échanges territoriaux pourront être décidés sur proposition des autorités locales. Il y aura des communautés de brigade, si bien que la gendarmerie sera plus opérationnelle, de jour comme de nuit. Depuis combien de temps les élus se plaignent-ils d'une trop faible présence de la gendarmerie dans leur circonscription la nuit ? Ce n'est pas faute d'envie des gendarmes, mais faute de moyens, et en raison d'une organisation qui date de 1850. Elle doit, d'évidence, être revue, car la délinquance gagne à présent les zones rurales. C'est pourquoi le Gouvernement tient à concilier proximité et efficacité. Disons-le tout net : une brigade de six hommes n'a qu'une faible marge de manoeuvre ; il en va tout autrement lorsque des communautés de brigades peuvent mettre sur pied des patrouilles nocturnes.
Je tiens à le préciser : il n'y aura pas de schéma national - et c'est en cela que la réforme peut réussir là où tant d'autres ont échoué. La France est diverse : il faut en prendre acte. J'ajoute que la réforme du maillage territorial de la gendarmerie ne vise pas à masquer une réduction des effectifs. Seulement, cette fois, il ne s'agira pas d'engloutir dans un nouveau tonneau des Danaïdes argent et effectif, sans rien réformer des structures obsolètes ».
Les modalités de mise en oeuvre du redéploiement entre zones de gendarmerie nationale et zones de police nationale : Chaque force devra prendre en compte les missions de sécurité publique dans l'ensemble de sa zone de responsabilité. Cela entraînera, selon les cas, la suppression des protocoles, la mise en conformité de situations de fait avec le droit ou de droit avec les faits, ou la suppression d'unités de gendarmerie situées en zone de police nationale ; afin de rendre le dispositif d'ensemble plus cohérent, des échanges de territoires seront réalisés avec le souci de respecter globalement l'équilibre actuel ; rien ne sera programmé au niveau national, des propositions émanant des échelons locaux, sous l'égide des préfets et en concertation avec les directeurs départementaux de la sécurité publique, les commandants de groupement de gendarmerie et les élus locaux. Source : direction générale de la gendarmerie nationale |
Votre rapporteur pour avis se félicite des orientations décidées par le gouvernement. Il souligne l'importance pour les forces de sécurité d'agir en tant que service public, et de prendre en compte les évolutions de la société. Aussi, il considère que la réforme des zones de police et de gendarmerie ne pourra s'effectuer sans une concertation avec les collectivités locales et une prise en compte du développement des structures intercommunales : la méthode pragmatique retenue par le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales constitue à cet égard un gage de réussite .
La volonté de réorganisation des forces de sécurité est une réforme courageuse , prometteuse, et d'ampleur inédite si l'on considère l'ancienneté de la définition de ce zonage.
Le redéploiement entre zones de gendarmerie nationale et zones de police nationale impliquera l'échange de territoires afin de rendre le dispositif d'ensemble plus cohérent. La méthode mise en oeuvre de cette réforme privilégiera l'échelon local plutôt qu'un plan national, sa réussite reposera également sur le fait qu'elle s'effectuera dans un contexte d'augmentation des effectifs : ainsi, la prestation antérieure en matière de sécurité sera améliorée ou, au minimum, maintenue, dans chacune des zones considérée, et la concertation au niveau local permettra de prendre en compte de manière spécifique la situation des personnels concernés par les changements ainsi décidés.
b) La réorganisation de la gendarmerie
(1) Le redéploiement des forces en zone péri-urbaine
La carte d'implantation des brigades de gendarmerie date de 1850 et n'est plus adaptée à la réalité des territoires, compte tenu notamment du phénomène d'extension considérable de l'urbanisation dans notre pays. Afin de s'adapter à ce phénomène d'urbanisation, ainsi qu'au développement de la délinquance en zone péri-urbaine, la gendarmerie envisage différentes mesures :
- le renforcement des effectifs des unités dans les circonscriptions où la population a le plus augmenté au cours de la période 1990-1999 ;
- le densification des effectifs de ces brigades territoriales selon leurs charges en matière de délinquance et de violences urbaines ;
- l'augmentation des effectifs dans les unités spécialisées qui soutiennent l'action des brigades territoriales dans le domaine de la surveillance générale (pelotons de surveillance et d'intervention de la gendarmerie) et de la police judiciaire (brigades de recherches). Les effectifs des sections de recherche qui interviennent contre la criminalité organisée seront augmentés, ainsi que ceux des services de rapprochement judiciaires. Les compagnies des départements les plus sensibles de métropole et d'outre-mer seront dotées en priorité des brigades de recherches dont la création est envisagée au cours des cinq prochaines années.
Enfin, pour conserver à l'action des brigades territoriales sa proximité, les frontières des circonscriptions concernées au cours des dernières années par une forte urbanisation seront réétudiées, avec un objectif de 20.000 habitants par circonscription. En conséquence, des modifications aux limites territoriales seront proposées au cas par cas aux autorités et aux élus.
(2) La création des communautés de brigade
Pour la gendarmerie, des suppressions de brigades pourraient intervenir ponctuellement. Cependant, la création de communautés de brigades doit permettre d'éviter le recours à la suppression d'unités existantes. En effet, trop de brigades sont aujourd'hui composées de seulement quelques gendarmes (4 dans certaines brigades), ce qui ne leur permet plus de répondre efficacement aux nouvelles formes de délinquance. Le maillage territorial de la gendarmerie doit donc être réaménagé. A titre d'exemple, pour couvrir une zone non sensible en disposant de 4 militaires disponibles de nuit pour l'intervention, l'effectif total nécessaire est de 16 militaires. Or, la gendarmerie compte aujourd'hui 3.551 brigades territoriales dont 2.928 ont un effectif inférieur ou égal à 15 militaires, et parmi elles, 1.288 ont un effectif inférieur ou égal à 6 militaires. Ce chiffre souligne parfaitement combien l'amélioration de l'efficacité opérationnelle des forces de gendarmerie dépend de la réforme de leur organisation .
Le délai maximum de 30 minutes pour l'intervention de la gendarmerie ne sera pas affecté par la création des communautés de brigades, qui permettra de dégager des effectifs pouvant intervenir en plus grand nombre, en particulier la nuit.
Le fonctionnement des communautés de brigades - les effectifs de deux ou trois unités sont placés sous les ordres d'un commandement unique ; - la communauté de brigades dispose d'une bureautique commune, d'un instrument statistique et d'un cahier de circonscription uniques. Un réseau particulier lui permet de communiquer depuis les deux ou trois sites des services ; - les règles de fonctionnement et d'accueil du public sont étudiées localement et adaptées aux besoins de la population ; - un effectif cumulé permet d'orienter plus facilement le service de jour et de nuit vers la surveillance générale, la prévention et l'intervention rapide ; - dans certaines communautés, un planton fixe nocturne peut être autorisé à intervenir sur un événement, selon des modalités qui seront précisées. A tout moment, la prise en charge des plaignants est assurée ; - la circonscription d'une communauté de brigades ne devrait pas compter une population supérieure à 20.000 habitants pour préserver l'avantage de la proximité avec la population, spécialement en zone urbanisée ; - l'engagement des brigades autonomes et des communautés de brigades est soutenu par le renfort des unités spécialisées. Source : direction générale de la gendarmerie nationale |
Il convient de souligner que les brigades pouvant conserver leur autonomie ne seront pas concernées par cette nouvelle organisation, celles dont les effectifs sont trop importants pouvant même être scindées afin de densifier le maillage existant.