EXAMEN EN COMMISSION
Au cours
d'une séance tenue le
mercredi 14 novembre 2001
, sous la
présidence de M. Jacques Valade, président, la commission a
procédé à l'examen du rapport pour avis
de
M.
Jacques Legendre sur les crédits de la francophonie inscrits au projet
de loi de finances pour 2002
.
Un débat a suivi l'exposé du rapporteur pour avis.
M. Louis Duvernois
a déclaré partager l'analyse du
rapporteur pour avis et a indiqué qu'il s'associait à sa
proposition de refuser de voter les crédits de la francophonie. Il a
estimé que le Gouvernement n'avait pas su arrêter une position
claire, qu'il s'agisse de la rectification des missions de la
délégation générale à la langue
française et des langues de France, ou de l'action en faveur de
l'audiovisuel extérieur.
Même si la francophonie ne rencontre officiellement que des soutiens, il
a cependant douté que sa défense, pourtant vitale, soit
réellement prise en considération. Jugeant substantiel l'effort
financier consenti par la France, à travers le fonds multilatéral
unique, il a cependant déploré que la définition des
programmes et l'utilisation de ces crédits restent dans un certain flou.
Il a également regretté la fréquence des discordances de
vues dans la définition des orientations de la francophonie, et la
difficulté que rencontre celle-ci à articuler ses actions
nationales et son action multilatérale.
Il a déploré enfin que, malgré la volonté,
exprimée au sommet de Moncton, de procéder à la
rénovation du fonctionnement des opérateurs de la francophonie,
et malgré les efforts accomplis par le service des affaires
francophones, l'utilisation des crédits soit toujours aussi mal
appréhendée et a jugé urgent d'adresser un rappel à
l'ordre.
M. Bernard Fournier
a déclaré s'associer aux conclusions
du rapporteur pour avis, et a déploré qu'à
l'aéroport Charles-de-Gaulle certaines compagnies aériennes ne
diffusent pas d'annonces en français.
M. Serge Lagauche
a regretté la proposition formulée par
le rapporteur pour avis de rejeter les crédits de la francophonie, qu'il
a attribuée à une réaction d'humeur. Il a estimé
que les difficultés rencontrées par la langue française
pour défendre sa place s'expliquaient essentiellement par la
primauté économique d'une autre sphère linguistique et ne
pouvaient être imputées au Gouvernement, que l'on ne peut tenir
responsable que de crédits qu'il affecte à la défense du
cinéma ou au réseau des écoles françaises à
l'étranger. Refusant de croire que la proposition du rapporteur pour
avis pouvait se rattacher au prochain contexte électoral, il l'a
appelé à renoncer à cette attitude de rejet.
M. René-Pierre Signé
a jugé excessives et
contradictoires les critiques formulées par le rapporteur pour avis,
s'étonnant de ce qu'il puisse se féliciter des discours positifs
tenus par le Gouvernement et du caractère non négligeable des
crédits consacrés à la francophonie, et, dans le
même temps dénoncer un abandon de la défense de la langue
française.
Il a estimé qu'un rejet des crédits de la francophonie
traduirait, plus qu'une réaction d'humeur, une prise de position
politique et polémique à laquelle le groupe socialiste ne
s'associerait pas. Il s'est en outre étonné de ce que les
libéraux, qui sont les plus prompts à se rallier à la
mondialisation, s'étonnent du recul de la francophonie et de la langue
française.
En réponse aux différents intervenants,
M. Jacques
Legendre, rapporteur pour
avis
, après avoir indiqué
qu'il rejoignait les analyses de M. Louis Duvernois, a apporté
les précisions suivantes :
- l'usage du français n'est en effet pas toujours respecté
dans les aéroports français, et il a d'ailleurs fallu,
récemment, une démarche vigoureuse, pour mettre fin à une
règle qui imposait l'usage de l'anglais aux contrôleurs
aériens, même dans leurs échanges avec des pilotes d'avions
français ou francophones ; cet exemple, parmi d'autres, illustre
les contradictions qui existent dans l'attitude des pouvoirs publics ;
- il présente depuis neuf ans le rapport sur les crédits de
la francophonie, et, sensible à l'effort financier non
négligeable dont ceux-ci témoignent, il a toujours proposé
un avis favorable à leur adoption ; l'an dernier toutefois,
l'inquiétude que lui inspiraient certaines dérives l'ont conduit
à ne recommander qu'un avis de sagesse ; cette année,
l'aggravation d'un certain nombre de tendances, auxquelles, hélas,
n'échappe aucun gouvernement, l'incite à lancer un avertissement
plus ferme ;
- l'action menée par le ministre délégué
à la coopération et à la francophonie est digne de
respect, et la sympathie de la ministre de la culture pour la défense de
la langue française est bien connue ; il est cependant regrettable
que, dans les arbitrages gouvernementaux, le poids des arguments techniques et
économiques l'emporte trop souvent ;
- par delà le budget, c'est la contradiction, qui traverse
d'ailleurs l'ensemble du monde politique, entre l'action en faveur de la
francophonie et les abandons en matière d'utilisation de la langue
française, qui doit être sanctionnée ;
- la défense par les flamands de la langue flamande, et par les
catalans de la langue catalane, montre les résultats que peut obtenir
une volonté politique ferme ;
- une politique économique libérale n'implique pas pour
autant l'abandon de la défense de sa langue, comme le montre par exemple
le souci des Etats-Unis d'Amérique de se prémunir contre les
avancées de l'espagnol dans leurs états du sud.
Mme Danièle Pourtaud
a relevé les propos tenus par le
rapporteur pour avis sur la défense de la langue catalane et de la
langue flamande, estimant qu'ils contrastaient avec les positions
défendues au Sénat à propos de la langue corse.
Suivant les propositions de son rapporteur pour avis, la commission a
émis ensuite un
avis défavorable
à l'adoption
des crédits de la francophonie
inscrits au projet de budget pour
2002 du ministère des affaires étrangères.