B. UN EFFORT SPÉCIFIQUE EN FAVEUR DU SPECTACLE VIVANT

a) Des moyens budgétaires significatifs...

En 2002, les crédits de la direction de la musique, de la danse, du théâtre et des spectacles , s'élèvent à 663,32 millions d'euros (4 351,18 millions de francs), en progression de 3,25 % à structure constante, soit une dotation qui représente le quart du montant total du budget de la culture.

• Les dépenses ordinaires

Les établissements publics nationaux relevant de sa tutelle 2( * ) apparaissent comme modestement servis.

Leurs subventions de fonctionnement, qui s'élève à 242,96 millions d'euros (1 609,15 millions de francs) augmentent de 1,47 % , soit un rythme inférieur à celui de la progression des dépenses du budget de l'Etat (2 %) tandis que leurs subventions d'équipement courant diminuent de 2,03 %.

La restauration des marges artistiques des théâtres nationaux ne s'effectue qu'au prix de la suppression du tarif à 50 francs le jeudi.

Parmi les établissements publics bénéficiant de mesures nouvelles significatives, on relèvera la poursuite de la montée en puissance du Centre national de la danse dont la subvention de fonctionnement au titre du chapitre 36-60 progresse de 14 %, ce qui traduit l'attention particulière en 2002 portée à la danse.

Les dépenses d'intervention progressent de 7,07 % à structure constante pour s'établir à 368,23 millions d'euros (2 415,48 millions de francs), avec 25 millions d'euros (160 millions de francs) de mesures nouvelles.

D'après les indications fournies par le ministère, ces moyens nouveaux seront affectés en fonction de quatre objectifs :

- le soutien aux disciplines en développement, aux nouveaux lieux d'expression artistique et à la production indépendante ;

- la restauration des marges artistiques des institutions du spectacle vivant ;

- le développement de l'éducation artistique ;

- la valorisation du patrimoine et la formation aux milieux du spectacle vivant.

Votre rapporteur, s'il a pris connaissance avec intérêt de ces différents objectifs, ne dispose pas des moyens lui permettant d'analyser d'une manière approfondie les crédits qui leur sont affectés, et cela pour plusieurs raisons.

Cette difficulté trouve, en premier lieu, son origine dans la nomenclature budgétaire qui, après avoir été modifiée à plusieurs reprises au cours des exercices précédents, interdit toute mise en perspective sur plusieurs années. Articulée en chapitres et en articles trop globaux ou trop disparates, elle ne permet pas non plus de vérifier les informations fournies par le ministère. Par ailleurs, la déconcentration de la gestion des crédits ralentit les remontées d'information sur l'exécution de la loi de finances en cours d'exécution et rend extrêmement délicate toute comparaison d'une année sur l'autre. Enfin, pour des raisons aisément compréhensibles, la présentation par le ministère de la culture des crédits du spectacle vivant elle-même ne retient pas les mêmes agrégats de référence d'une année sur l'autre.

Une fois ces réserves méthodologiques exprimées, votre rapporteur ne pourra que s'en tenir aux indications fournies par les réponses sur l'affectation des mesures nouvelles.

La moitié de ces mesures nouvelles, soit 13,2 millions d'euros (86,6 millions de francs) sera consacrée au soutien aux « disciplines en développement, aux nouveaux lieux d'expression artistique et à la production indépendante ». Au sein de cette enveloppe, 3,5 millions d'euros (22,95 millions de francs) seront consacrés à la danse, à travers un renforcement des crédits accordés aux équipes (centres chorégraphiques, compagnies) mais également aux conditions de création (résidences d'artistes, aides à l'écriture).

Dans le cadre de l'année du cirque, 2 millions d'euros (13,11 millions de francs) seront affectés à des « actions structurantes » en faveur de cette discipline qui a, au cours des années récentes, connu un incontestable renouveau.

Si les arts de la rue et les musiques actuelles constituent également des priorités, votre rapporteur ne pourra indiquer le montant des moyens nouveaux qui leur seront destinés, les documents communiqués par le ministère ne faisant état que de leur rythme de progression, respectivement 25 % et 400 % pour ces deux disciplines.

Par ailleurs, une part importante des mesures nouvelles (6 millions d'euros soit 39,35 millions de francs) sera consacrée à la restauration des marges artistiques des réseaux institutionnels. Ainsi, devraient notamment être renforcées les capacités de production, de création et de diffusion des centres dramatiques nationaux, des scènes nationales, des formations permanentes musicales (orchestres et centres de création), des opéras en région, de l'Opéra comique et des théâtres privés parisiens.

Votre rapporteur ne pourra que souligner le paradoxe du budget 2002, dont les augmentations de crédits les plus significatives ne peuvent être analysées.

• Les dépenses d'investissement

En ce qui concerne les crédits d'investissement , l'effort n'est pas aussi manifeste que pour les dépenses ordinaires.

Les autorisations de programme s'élèvent à 37,43 millions d'euros (245,55 millions de francs), soit une diminution de 15,29 %, qui s'explique essentiellement par la diminution du montant des crédits affectés aux opérations de restauration du théâtre de l'Odéon.

Le montant des opérations destinées à soutenir des projets en région demeure équivalent à celui constaté en 2001, soit 27,51 millions d'euros (180,45 millions de francs), contre 28,97 millions d'euros (190,03 millions d'euros) en 2001.

Ces crédits permettront, notamment, d'engager des réalisations inscrites dans le cadre des contrats de plan Etat-régions, telles la reconstruction du théâtre d'Aurillac (Cantal), le centre régional de musiques actuelles de Nancy (Meurthe-et-Moselle), la restructuration et la mise en sécurité du théâtre national de Bretagne et de l'Opéra de Lyon.

b) ... qui doivent s'accompagner d'un effort de démocratisation

L'effort consacré au spectacle vivant ne trouvera sa pleine justification que s'il s'accompagne d'une action déterminée pour favoriser l'égal accès à la culture.

Le soutien accru à des formes nouvelles d'expression s'inscrit dans cette préoccupation et les moyens dont bénéficient les arts de la rue, le cirque ou les musiques actuelles répondent à une demande du public qui plébiscite ces formes originales d'expression.

Au-delà, votre rapporteur estime nécessaire de relancer la réflexion sur la démocratisation des pratiques culturelles.

Au cours des derniers exercices, l'accent a été porté sur les mesures tarifaires. Ainsi, en 2000, a été créé un tarif unique à 50 francs le jeudi dans les théâtres nationaux. De même, des mesures nouvelles de gratuité ont été décidées pour les musées et les monuments historiques appartenant à l'Etat un dimanche par mois.

Votre rapporteur avait alors souligné, tout en les approuvant dans leur principe, que la politique d'élargissement des publics ne devait pas se limiter à des mesures tarifaires. Il avait, à cet égard, indiqué l'effet d'aubaine qui y était attaché. Les faits ne l'ont pas démenti.

En ce qui concerne le « jeudi à 50 francs » lancé le 1 er janvier 2000 dans les théâtres nationaux 3( * ) afin de proposer un jour par semaine des places à un tarif attractif, l'objectif était de favoriser la découverte du théâtre par des personnes découragées par son prix et peu habituées à fréquenter ces lieux de spectacle.

On constate que cette mesure n'a pas significativement modifié la réticence traditionnelle du public à découvrir des pièces nouvelles ; le public ayant bénéficié de cette mesure, dans sa très grande majorité, s'est porté vers des oeuvres d'auteurs classiques ou célèbres. Par ailleurs, l'enquête réalisée par le CREDOC pour le ministère de la culture a souligné que ce tarif n'avait pas permis d'attirer un nouveau public, seuls les habitués en ayant bénéficié.

Tirant les conclusions de ce bilan peu encourageant, le ministère a supprimé ce tarif dès le début de la saison 2001-2002.

S'agissant des monuments historiques, les études font également apparaître le faible impact des mesures de gratuité. Ces dernières ont eu un effet limité sur la fréquentation, certain pour la première année et bien moindre à partir de 2001. Par ailleurs, la moitié des visiteurs ayant profité de cette mesure ignoraient son existence.

Pour les musées, les statistiques font apparaître également, certes, une augmentation de la fréquentation mais, au sein des nouveaux visiteurs, une part assez faible des « primo-visiteurs », pour reprendre la terminologie utilisée.

L'élargissement des publics exige le développement des actions de médiation conduites au sein des institutions culturelles. En ce domaine, sans disposer de données exhaustives, votre rapporteur ne peut que souligner les disparités de l'implication de ces institutions dans ces missions. A cet égard, il serait souhaitable que le ministère puisse établir un bilan des initiatives prises afin d'en évaluer l'impact. La négociation des contrats d'objectifs passés avec les établissements publics relevant de sa tutelle constitue une occasion d'y procéder, de même que la renégociation des contrats qui lient l'Etat et le réseau décentralisé du spectacle vivant. Les institutions auraient sans doute beaucoup à gagner à partager leurs expériences.

A cet égard, votre rapporteur note la volonté de la ministre de doter tout établissement public culturel ou artistique subventionné d'un service éducatif chargé de concevoir et de mettre en oeuvre des actions avec les partenaires éducatifs. Toutefois, il note que ces services doivent avoir une vocation plus large et que l'existence d'un service ne constitue pas une garantie suffisante pour que de telles actions soient conduites avec succès.

Au-delà, la sensibilisation des jeunes à la création artistique et plus généralement à la pratique culturelle apparaît comme un vecteur essentiel de réduction des inégalités d'accès à la culture, quoique difficilement quantifiable dans ses effets.

A cet égard, votre rapporteur ne pourra qu'approuver la volonté des ministres de la culture et de l'éducation nationale de renforcer l'éducation artistique.

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