III. LA VIEILLESSE

La branche vieillesse a connu un très net redressement depuis 1998 grâce principalement à la bonne tenue des recettes. Celles-ci progressent en effet à un rythme compris entre 2,9 et 5,2 % depuis 1998, alors que les dépenses augmentent entre 3,1 et 3,8 %.

Comptes de la branche vieillesse
en encaissements/décaissements

(en milliards de francs)

1998

1999

2000

2001

Recettes

385,4

403,5

415,2

430,6

Evolution

+ 5,2 %

+ 4,7 %

+ 2,9 %

+ 3,7 %

Dépenses

385,6

399,8

414,6

427,2

Evolution

+ 3,8 %

+ 3,7 %

+ 3,7 %

+ 3,1 %

Solde

- 0,2

+ 3,7

+ 0,6

+ 3,4

Source : CCSS 09 2000

Le dynamisme des recettes pour 2001 se lit surtout sur les cotisations sociales (+ 5,2 %), liées à la croissance de la masse salariale, et sur les cotisations prises en charge (+ 16,8 %), avec le FOREC.

Par rapport aux prévisions de la commission des comptes de la sécurité sociale de mai 2000, la situation s'est améliorée en termes de recettes (2,4 milliards de francs de supplémentaires pour les trois quarts en raison de rentrées de cotisations supérieures aux prévisions) et dégradée en termes de dépenses (1,9 milliard de francs de dépenses en plus). Le solde positif s'élève donc à un peu plus de 500 millions de francs, soit le montant de l'excédent total pour 2000. Comme la loi de financement de la sécurité sociale pour 2000 avait entièrement consommé l'excédent prévisionnel en affectant 2,9 milliards de francs au fonds de réserve pour les retraites et 950 millions de francs à une revalorisation supplémentaire de 0,3 % des retraites, l'excédent de 2000 ne s'explique que par les bonnes surprises constatées en gestion.

Les mesures proposées dans le présent projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001 vont dans le même sens, ce qui relativise grandement le redressement de la branche, et nourrit les inquiétudes quant à son avenir puisque la prévision de déficit cumulé en 2020 s'élèvait à 474 milliards de francs 43 ( * ) . Il ne faut pas oublier par exemple que la prévision d'excédent de la CNAVTS pour 2001 se fonde sur une revalorisation des pensions de 1,7 point alors qu'elle sera de 2,2 points, soit un coût supplémentaire de 1,7 milliard de francs, et néglige la prise en charge par le Fonds de solidarité vieillesse de 300 millions de francs de dépenses supplémentaires correspondant à la validation des périodes de perception des allocations de cessation anticipée d'activité comme périodes d'assurance pour l'ouverture du droit à pension.

En droits constatés, l'écart est très important puisqu'il s'élève à 3,05 milliards de francs pour l'année 2001.

Comparaison des comptes en encaissements/décaissements (ED)
et en droits constatés (DC) de la branche vieillesse

(en milliards de francs)

1998

1999

2000

2001

ED

DC

ED

DC

ED

DC

ED

DC

Recettes

385,4

389,7

403,5

407,1

415,2

417

430,6

434,1

Dépenses

385,6

386,8

399,8

402,1

414,6

415,6

427,2

429,7

Solde

- 0,2

+ 2,9

+ 3,7

+ 5

+ 0,6

+ 1,4

+ 3,4

+ 6,4

Source : CCSS 09 2000

A. A LA RECHERCHE DU FONDS DE RÉSERVE DES RETRAITES

1. Un fonds toujours virtuel

Créé par l'article 2 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 1999, le fonds de réserve pour les retraites avait comme objectif de consolider l'avenir des régimes de répartition, CNAVTS, ORGANIC, CANCAVA et salariés agricoles. Il prenait alors la forme d'une seconde section au sein du Fonds de solidarité vieillesse.

Le décret n° 99-898 du 22 octobre 1999, pris plus de dix mois après la création du fonds, lui a donné une première existence formelle en fixant quelques principes transitoires de gestion : le fonds de réserve fait l'objet d'une gestion budgétaire et comparable à celle des autres opérations du FSV. La trésorerie se trouve dans un compte distinct ouvert auprès du Trésor public et placée en titres du marché monétaire et obligations de moins de deux ans. Le fonds de réserve possède ainsi un budget, sous la forme d'un budget annexe au FSV, d'un bilan et d'un compte de résultat. Le conseil de surveillance du FSV a été ouvert aux partenaires sociaux pour tenir compte de la création du fonds de réserve.

Tout cela relève d'une simple politique d'attentisme. Votre rapporteur pour avis, ainsi que la majorité des observateurs, est convaincu qu'il convient de décider rapidement de la forme du fonds de réserve, de ses objectifs précis et de ses modes de gestion.

A l'évidence, la situation ne peut rester en l'état. Le premier débat à trancher est celui de l'objectif précis qui est assigné au fonds : s'agit-il d'aider simplement les caisses de retraite par répartition à passer le moment difficile de l'arrivée de l'âge de la retraite des classes d'âge correspondant au baby-boom par un complément de ressources ou bien d'apporter durablement un complément de ressources à ces régimes ? Les deux solutions ne sont pas incompatibles mais emportent des choix stratégiques différents. Il semble ainsi acquis que le fonds de réserve aura une fonction de lissage, c'est-à-dire qu'il lui reviendra de lisser sur une assez longue période les hausses de cotisations rendues nécessaires et, ainsi éviter de surtaxer les actifs au moment où des générations nombreuses arrivent à l'âge de la retraite. Dans ce cas, le fonds est destiné à être alimenté par une accumulation d'épargne, puis à être complètement dépensé. Ce lissage permet d'établir un calendrier prévisionnel des hausses de cotisations, d'en atténuer le niveau et de répartir de manière plus harmonieuse la charge supplémentaire : les actifs d'aujourd'hui comme ceux de demain se partagent ainsi le fardeau. La question suivante sera de savoir si le fonds doit survivre au passage des classes d'âge nombreuses. En ce cas, les produits du fonds servent de troisième cotisant comme le fait le Canada qui cherche à constituer un fonds à même de prendre en charge le quart des charges de pension. De ces choix découlent plusieurs données indispensables à connaître : quelle durée de période de lissage ? quels modes de financement ? quel niveau de réserve souhaité en fin de période ?

Différents scenarii techniques montrent l'importance financière des ces données 44 ( * ) : la période d'accumulation peut être inférieure à celle d'utilisation des ressources accumulées ; plus l'abondement est régulier, moins les cotisations futures auront besoin d'être relevées ; un point de rendement financier pour le fonds fait gagner un an sans hausse de cotisations pour les actifs ; plus la période de lissage est longue, plus celle d'accumulation augmente mais aussi plus l'amplitude des hausses de cotisations se réduit.

Il semble donc évident, au-delà des polémiques politiques, qu'il faut abonder le plus vite et le plus régulièrement possible. Or deux ans après la création du fonds, alors que seulement dix ans s'offrent à nous, le fonds n'est doté d'aucune règle de gestion d'avenir, et de seulement 23 milliards de francs !

Ces études montrent aussi l'importance du schéma de gestion retenu. Il faudra mettre en place un cadre certes sécurisé et contrôlé mais surtout géré par de vrais professionnels du long terme. Cela ne s'improvise pas et l'architecture provisoire est loin du compte en cette matière. Il semble désormais urgent de sortir le fonds de réserve du FSV et de le doter d'une architecture de gestion adaptée à sa tâche particulière.

Ainsi, les tâches de contrôle et de gestion devront être strictement séparées, la gestion devant être déléguée à un ou plusieurs professionnels, avec des règles précises sur la nature des actifs, leur dispersion, leur maturité, mais aussi des contraintes fortes de reporting et de contrôle. Le fonds pourra s'adjoindre une structure d'étude et d'évaluation, chargée notamment d'actualiser des scenarii actuariels et d'établir des comparaisons, le tout dans la plus grande transparence. Le fonds devrait être doté d'une très grande indépendance et rendre compte au Parlement de sa gestion.

Le régime des pensions du Canada

La réforme intervenue en 1997 dans le régime en répartition du Canada a modifié le régime des pensions et le rôle dévolu au fonds de réserve déjà existant, en transformant ce dernier d'un simple rôle d'épargne de précaution en un fonds permanent destiné à couvrir partiellement les engagements de retraite, donc à atténuer les hausses de cotisations futures nécessaires en visant un niveau équivalent à environ cinq années de prestations.

L'environnement de la réforme

Il est important de noter que cette réforme a été facilitée par le fait que tous les trois ans un organisme indépendant (le Bureau du surintendant des institutions financières) procède, conformément à la loi, à un examen actuariel du régime, analysant les conditions de l'équilibre à très long terme. Ce rapport est publié.

Le gouvernement fédéral et les provinces assurent conjointement la gestion du régime ; ils ont l'obligation de se réunir tous les cinq ans afin de fixer le calendrier des taux de cotisations des vingt-cinq ans à venir. Toute modification importante du régime (prestations, taux et assiette des cotisations, placements du fonds de réserve) doit être acceptée par le Parlement du Canada et les deux tiers des provinces.

C'est lors de l'examen quinquennal de 1996 que les tendances à long terme ont montré la nécessité d'augmenter fortement à terme les taux de cotisation.

Le rythme de la montée en charge du fonds

Le gouvernement a adopté une série de mesures visant d'une part à resserrer les conditions d'octroi des pensions et d'autre part à agir sur les recettes en recherchant simultanément un calendrier d'augmentation des taux de cotisation pendant une période relativement courte démographiquement favorable, et un niveau de fonds de réserve tel que le taux de cotisation soit ultérieurement stable sur une longue période en régime permanent (sous la contrainte que ce taux de régime permanent soit significativement inférieur au taux projeté avant la réforme).

Le calendrier et l'amplitude des hausses ont été les suivants :

1977 + 0,15 %

1998 + 0,40 %

1999 + 0,60 %

2000 + 0,80 % }Soit un niveau de cotisation en 2003 de 9.90 % de la fraction de salaire

2001 + 0,80 % soumise à cotisation, pour un taux maximum de remplacement de 25 %.

2002 + 0,80 %

2003 + 0,50 %

Après 2010, le fonds de réserve représentera entre quatre et cinq années de cotisations et les produits financiers qu'il dégage représenteront environ 25 % des cotisations.

La gestion financière

Afin d'optimiser les recettes financières, une nouvelle politique de placement est définie et un office d'investissements est créé afin de contrôler et de réguler ces placements. Cet organisme est doté de la personnalité morale et il a pour objectif de gérer, dans l'intérêt des déposants, les sommes transférées et de placer pour un rendement maximal compte tenu des risques acceptés. Il est assisté d'un Comité de placement et d'un Comité de vérification.

Source : Caisse des dépôts et consignations

Votre rapporteur pour avis, sans revenir sur le principe ou la justification économique du fonds de réserve, avoue ne pas comprendre l'attentisme du gouvernement en la matière : quel enjeu politique justifie que l'on diffère pendant plus de deux ans ainsi des décisions techniques à l'incidence financière lourde ?

* 43 Audition de M. Jean-Luc Cazettes, président du conseil d'administration de la CNAVTS devant la commission des affaires sociales du Sénat, le 24 octobre 2000.

* 44 Source : étude de la Caisse des dépôts et consignations.

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