2. La France en position de faiblesse au regard des exigences européennes
Force est de constater qu'un contentieux important oppose la France à la Commission Européenne s'agissant de la mise en oeuvre du réseau écologique européen " Natura 2000 ".
D'une part, la France a été condamnée le 6 avril 2000 par la Cour de Justice des Communautés pour ne pas avoir transposé certaines dispositions de l'article 6 de la directive " Habitats naturels " notamment les paragraphes 3 et 4 et elle fait l'objet, depuis le 28 juillet 2000, d'une mise en demeure d'appliquer cet arrêt.
De cette décision, il ressort que la Cour a condamné l'insuffisance du dispositif français d'évaluation écologique des plans et projets affectant les zones " Natura 2000 " ; ainsi le champ d'application de l'étude d'impact, en droit français est réservé à certains types d'opérations d'une certaine importance compte tenu de la prise en compte de seuils. De plus, il a été jugé que le contenu de l'étude impact était insuffisant car il ne prévoyait pas l'analyse et l'évaluation des incidences du projet envisagé sur l'environnement et les objectifs de conservation du site concerné.
D'autre part, le retard, pris la France dans l'envoi de ses propositions à la Commission a conduit celle-ci à engager une procédure d'infraction en manquement au titre de l'article 226 du Traité. Bien que des transmissions successives aient été faites durant la procédure précontentieuse, la Commission a estimé que la France n'avait pas satisfait à ses obligations en n'ayant pas présenté une liste nationale complète de ses propositions dans les délais impartis et comme exigé par l'article 4 de la directive. Elle a donc saisi la Cour de Justice des Communautés en juin 1999 et son arrêt est attendu.
On peut, à ce sujet, s'étonner du choix de la procédure retenue par la Commission européenne, qui n'utilise pas les moyens expressément prévus par les articles 4 et 5 de la directive pour aboutir, de manière concertée, à l'élaboration d'une liste de sites. Ainsi, l'article 5 prévoit-il, dans les cas exceptionnels où la Commission constate l'absence " d'un site abritant un type d'habitat naturel ou une espèce prioritaires " dans la liste des sites proposés par un Etat membre, une procédure de concertation bilatérale entre elle-même et ce dernier afin de rechercher un accord. Si le différend subsiste, dans un délai de six mois, la Commission transmet ses propositions au Conseil, ce dernier statuant alors à l'unanimité dans un délai de trois mois.
L'avatar de la procédure en manquement au titre de l'article 226 du Traité illustre sans doute -une fois encore et il faut le déplorer- les difficultés du Gouvernement français et de son administration à établir avec les services de la Commission européenne un dialogue constructif.
Ou bien alors, cette dernière se serait-elle lassée, face à un bilan français jugé trop faible au niveau européen ? Au 17 mars 2000, l'ensemble des propositions faites par les Etats membres portait sur 10.250 sites, pour une superficie de l'ordre de 361.000 km², soit 11,2 % de la superficie de l'Union européenne.
Ainsi, au terme des séminaires organisés par la Commission européenne pour cinq des six régions biogéographiques identifiées pour structurer le réseau écologique, il est apparu que les propositions françaises, comme d'ailleurs celles de la plupart des Etats membres -mais dans de moindres proportions-, devaient être complétées pour environ un tiers des habitats et espèces concernées.
La Commission, pour obtenir ces compléments -qu'elle juge indispensables pour la cohérence du réseau écologique européen en voie de constitution- a alors décidé, le 16 mars dernier, de lier l'approbation des programmes soutenus par les fonds structurels " FEDER objectifs 1 et 2 " et " FEOGA Garantie " à la transmission de ces listes.
Afin d'éviter la menace réelle de blocage des dossiers de subvention, le Gouvernement s'est engagé auprès de la Commission à lui faire parvenir des propositions complémentaires respectivement pour le 31 mai 2001 pour les régions alpine, atlantique et méditerranéenne et 31 juillet 2001 pour la région continentale. A cette fin, des instructions ont été adressées aux préfets de département pour préparer les propositions susceptibles de combler les insuffisances françaises. Le Gouvernement s'est également engagé sur une transposition rapide de la directive " Habitats naturels " en droit interne.