N° 110
SÉNAT
le 29 juin 1993
SECONDE SESSION ORDINAIRE DE 1992-1993
RÉSOLUTION
sur la proposition de décision du Conseil sur la participation de la Communauté au Fonds européen d'investissement (n° E-53).
Est devenue résolution du Sénat, conformément à l'article 73 bis alinéa 8 du Règlement du Sénat, la résolution adoptée par la commission des finances dont la teneur suit :
Voir les numéros :
Sénat : E-53, 287, 330 et 369 (1992-1993).
Le Sénat,
Considérant que la proposition d'acte communautaire n° E-53 déposée le 4 mars 1993 sur le bureau du Président du Sénat tend à prévoir la participation de la Communauté à un organisme financier entièrement nouveau, le Fonds européen d'investissement ;
Considérant que les statuts du nouveau Fonds européen d'investissement n'étaient pas annexés à la proposition d'acte communautaire, sinon sous la forme d'une page vierge,
- qu'alors même que ces statuts ont été approuvés par le conseil d'administration de la Banque européenne d'investissement dès le 29 avril 1993, ceux-ci n'ont été transmis au Parlement que le 25 mai 1993, de façon officieuse,
- que, ainsi transmis, ces projets de statuts ne comportaient toujours pas les deux annexes fondamentales, s'agissant de l'identité et de la répartition des actionnaires de ce nouveau Fonds,
- et que, en dernier lieu, entre la décision arrêtée par les chefs d'État et de Gouvernement réunis à Edimbourg les 11 et 12 décembre 1992, et les projets de statuts du Fonds européen d'investissement, est apparue une novation majeure dans la mission confiée à cet organisme : la prise de participation au capital d'entreprises, notamment de P.M.E. ;
Considérant que, de ce fait, l'un des premiers exemples d'application concrète du nouvel article 88-4 de la Constitution se trouve entaché par un grave défaut de l'information due à la représentation nationale, que ce défaut s'inscrit en outre dans le cadre d'une procédure d'examen et d'adoption particulièrement rapide, qui ne peut que le souligner davantage ;
Considérant que, s'agissant de l' initiative européenne de croissance dans laquelle s'inscrit la création du Fonds européen d'investissement, le simple énoncé de principes qui ne peuvent qu'emporter l'adhésion « renforcer la cohésion sociale » , « améliorer la situation de l'emploi » , « contribuer à la reprise de la croissance » , « conforter la construction européenne » , ne saurait justifier à lui seul que soit donné un quitus de principe à tout organisme communautaire nouveau censé y contribuer ;
Considérant qu'il ne paraît pas souhaitable de procéder, à l'occasion de la mise en place accélérée d'un mécanisme lié à la situation conjoncturelle, à un changement important de la philosophie même qui a jusqu'à présent fondé et guidé la politique économique de la Communauté, moins encore de risquer de porter atteinte au respect du principe de subsidiarité ;
Considérant que la gravité de la situation des petites et moyennes entreprises résulte, au premier chef, de conditions de concurrence qui sont loin d'être équitables, notamment du fait de l'absence de préférences communautaires clairement affirmées,
- que, s'il est exact que l'insuffisance de fonds propres reste un problème essentiel, la prise de participation au capital des P.M.E. par un organisme financier de nature communautaire constitue une novation telle qu'elle nécessite un examen approfondi et à part entière, et doit, en tout état de cause, faire l'objet d'une décision explicite de la part des chefs d'État et de Gouvernement ;
Considérant enfin que la dégradation de la situation économique qui préside au lancement de l'Initiative européenne de croissance, appelle justement une vigilance, une rigueur et, sans doute, une sélectivité accrue dans le maniement des instruments de politique économique et la gestion des ressources, .tant communautaires que nationales ;
Invite le Gouvernement à s'opposer à l'adoption par le Conseil de la décision sur la participation de la Communauté au Fonds européen d'investissement incluse dans la proposition d'acte communautaire E-53,
- tant que ne sont pas identifiées les institutions financières appelées à participer à 30 % du capital de ce nouvel organisme,
- et tant que ne sera pas exclue de son champ d'application la prise de participation au capital des petites et moyennes entreprises, dans l'attente d'un examen global, clair et objectif des moyens d'intervention de la Communauté dans ce secteur, et ce conformément au respect absolu du principe de subsidiarité.
Devenue résolution du Sénat le 29 juin 1993.
Le Président,
Signé : René MONORY.