Convention de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales (PPRE) - Tableau de montage - Sénat

N° 67

SÉNAT

                  

SESSION ORDINAIRE DE 2022-2023

7 mars 2023

                                                                                                                                             

RÉSOLUTION EUROPÉENNE

sur le volet relatif à la politique étrangère et de sécurité commune des négociations d’adhésion de l’Union européenne à la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales







Est devenue résolution du Sénat, conformément à l'article 73 quinquies, alinéas 2 et 3, du Règlement du Sénat, la résolution adoptée par la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées dont la teneur suit :

                                                                                                                                             

Voir les numéros :

Sénat : 296, 308 et 309 (2022-2023).




Résolution européenne sur le volet relatif à la politique étrangère et de sécurité commune des négociations d’adhésion de l’Union européenne à la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales

Le Sénat,

Vu les articles 53 et 88-4 de la Constitution,

Vu les articles 2, 3, 6, 19, 24 et 48 du traité sur l’Union européenne (TUE),

Vu l’article 275 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE),

Vu le protocole  8 relatif à l’article 6, paragraphe 2, du traité sur l’Union européenne sur l’adhésion de l’Union à la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, annexé aux traités sur l’Union européenne et sur le fonctionnement de l’Union européenne,

Vu la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales,

Vu l’avis 2/13 rendu par la Cour de justice de l’Union européenne le 18 décembre 2014,

Vu l’arrêt de la Cour de justice de l’Union européenne (cinquième chambre) du 12 novembre 2015, Elitaliana SpA contre Eulex Kosovo,

Vu le rapport  562 (2019-2020) déposé le 25 juin 2020 de MM. Philippe Bonnecarrère et Jean-Yves Leconte, fait au nom de la commission des affaires européennes du Sénat, sur l’adhésion de l’Union européenne à la Convention européenne des droits de l’homme et des libertés fondamentales,



Vu les négociations en cours au Conseil de l’Union européenne et dans le cadre du groupe de négociation ad hoc du Comité directeur pour les droits de l’homme du Conseil de l’Europe (46 + 1) sur l’adhésion de l’Union européenne à la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales,



Vu la recommandation 2226 et la résolution 2430, intitulées « Au-delà du Traité de Lisbonne : renforcer le partenariat stratégique entre le Conseil de l’Europe et l’Union européenne », adoptées par l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe (APCE) le 26 avril 2022,



Vu la communication de Mme Gisèle Jourda et M. Dominique de Legge devant la commission des affaires européennes du Sénat, le 20 octobre 2022,



Vu la décision du Comité des ministres du Conseil de l’Europe, adoptée le 7 novembre 2022, convoquant un quatrième sommet des chefs d’État et de Gouvernement du Conseil de l’Europe les 16 et 17 mai 2023,



Vu la réponse à la recommandation 2226 précitée de l’APCE, adoptée par le Comité des ministres du Conseil de l’Europe lors de la 1452e réunion des délégués des ministres, le 14 décembre 2022,



Considérant que le respect des traités est un élément essentiel de l’État de droit, lequel figure au nombre des valeurs fondamentales de l’Union aux termes de l’article 2 du traité sur l’Union européenne ;



Considérant que l’article 6, paragraphe 2, du traité sur l’Union européenne stipule, depuis le traité de Lisbonne, que « l’Union adhère à la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales » et que « cette adhésion ne modifie pas les compétences de l’Union telles qu’elles sont définies dans les traités » ;



Considérant que l’article 6, paragraphe 3, du traité sur l’Union européenne stipule que « les droits fondamentaux, tels qu’ils sont garantis par la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales et tels qu’ils résultent des traditions constitutionnelles communes aux États membres, font partie du droit de l’Union en tant que principes généraux » ;



Considérant que l’article 1er du protocole  8 annexé aux traités précise que « l’accord relatif à l’adhésion […] doit refléter la nécessité de préserver les caractéristiques spécifiques de l’Union et du droit de l’Union, notamment en ce qui concerne : a) les modalités particulières de l’éventuelle participation de l’Union aux instances de contrôle de la Convention européenne ; b) les mécanismes nécessaires pour garantir que les recours formés par des États non membres et les recours individuels soient dirigés correctement contre les États membres et/ou l’Union, selon le cas » ;



Considérant que l’article 2 du protocole  8 annexé aux traités précise que l’accord relatif à l’adhésion « doit garantir que l’adhésion de l’Union n’affecte ni les compétences de l’Union ni les attributions de ses institutions » ;



Considérant qu’en application de l’article 24 du traité sur l’Union européenne et de l’article 275 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, la Cour de justice de l’Union européenne n’est pas compétente en ce qui concerne les dispositions relatives à la politique étrangère et de sécurité commune, ni en ce qui concerne les actes adoptés sur leur fondement, sauf pour contrôler le respect de l’article 40 du traité sur l’Union européenne et pour se prononcer sur les recours concernant le contrôle de la légalité des décisions prévoyant des mesures restrictives à l’encontre de personnes physiques ou morales adoptées par le Conseil, sur la base du titre V, chapitre 2, du traité sur l’Union européenne ;



Considérant la jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne, et en particulier l’arrêt Eulex Kosovo du 12 novembre 2015, par lequel la Cour a jugé que l’article 24, paragraphe 1, alinéa 2, du traité sur l’Union européenne et l’article 275 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, lesquels soustraient le domaine de la politique étrangère et de sécurité commune à sa compétence, doivent être interprétés de manière restrictive dans la mesure où ils constituent une exception à sa compétence générale prévue à l’article 19 du traité sur l’Union européenne ;



Considérant, d’une part, que tous les actes des Parties contractantes à la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales doivent pouvoir faire l’objet d’un recours effectif devant des instances internes et, d’autre part, que l’épuisement sans succès d’une telle voie de recours est une condition pour qu’une requête individuelle portée devant la Cour européenne des droits de l’homme soit recevable ;



Considérant que l’avis 2/13 du 18 décembre 2014 de la Cour de justice de l’Union européenne, selon lequel la compétence pour effectuer un contrôle juridictionnel d’actes, d’actions ou d’omissions de l’Union, y compris au regard des droits fondamentaux, ne saurait être attribuée exclusivement à une juridiction internationale qui se situe en dehors du cadre institutionnel et juridictionnel de l’Union, impose de convenir d’une voie de recours interne adaptée ;



Reste attaché à l’objectif d’adhésion de l’Union européenne à la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, consacré par l’article 6 du traité sur l’Union européenne ;



Souligne qu’en application des traités et du protocole  8 annexé, l’adhésion de l’Union européenne à la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ne doit affecter ni les compétences de l’Union, ni les attributions de ses institutions ;



Observe que les attributions des institutions seraient affectées par une déclaration intergouvernementale interprétative visant, au nom de l’effet utile de l’ensemble des stipulations des traités et afin de réconcilier des stipulations contradictoires, à conférer une compétence juridictionnelle à la Cour de justice de l’Union européenne en matière de politique étrangère et de sécurité commune dans les cas d’actions introduites, par des requérants ayant qualité à agir devant la Cour européenne des droits de l’homme, pour des violations de droits fondamentaux par l’Union européenne ;



Relève qu’une telle déclaration serait contraire aux traités qui ont été ratifiés par les États membres conformément à leurs règles constitutionnelles respectives et qu’elle s’apparenterait de fait à une révision des traités, soustraite au contrôle des parlements nationaux, selon des modalités qui ne sont pas prévues à l’article 48 du traité sur l’Union européenne, ce qui constituerait une violation des règles de l’État de droit ;



Appelle donc solennellement les États membres à rejeter avec fermeté une telle déclaration interprétative et à poursuivre les négociations en vue de trouver une solution juridique appropriée ;



Affirme que la tenue d’un quatrième sommet des chefs d’État et de gouvernement du Conseil de l’Europe en mai 2023 ne saurait constituer un élément conduisant à remettre en cause le cadre fixé par les traités et le protocole  8 annexé ;



Fait valoir que d’autres points restent ouverts dans les négociations sur l’adhésion de l’Union européenne à la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, notamment les modalités de vote au Comité des ministres du Conseil de l’Europe ;



Invite le Gouvernement à faire valoir cette position dans les négociations au Conseil de l’Union européenne.

Devenue résolution du Sénat le 7 mars 2023.

Le Président,

Signé : Gérard LARCHER

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