N° 295
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 1998-1999
Annexe au procès verbal de la séance du 6 avril 1999
PROPOSITION DE RESOLUTION
tendant à modifier l'article 73 bis du Règlement du Sénat,
PRÉSENTÉE
Par MM. Michel BARNIER, James BORDAS, Pierre FAUCHON, Lucien LANIER et Aymeri de MONTESQUIOU,
Sénateurs.
(Renvoyée à la commission des Lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le Règlement).
Union européenne.
Mesdames, Messieurs,
Depuis la révision constitutionnelle de 1992, préalable à la ratification du Traité de Maastricht, le Gouvernement a l'obligation de soumettre au Parlement les propositions d ' actes communautaires comportant des dispositions de nature législative ; le Sénat, comme l'Assemblée, peut, s'il y a lieu, voter des résolutions pour faire connaître au Gouvernement sa position sur ces propositions, avant qu'elles ne soient adoptées définitivement à Bruxelles.
Tel est le dispositif prévu par l'article 88-4 de la Constitution, dont la rédaction est due au Sénat, qui a notamment introduit le vote de résolutions par chaque Assemblée.
La dernière révision constitutionnelle nécessitée par le Traité d'Amsterdam, telle qu'elle résulte de la loi n° 99-49 du 25 janvier 1999, a fourni l'occasion au Parlement de compléter l'article 88-4 en vue d'une double extension des pouvoirs d'intervention du Parlement dans le processus européen de décision.
Tout d'abord, le Gouvernement est désormais dans l'obligation de « soumettre » au Parlement non seulement les propositions d'actes communautaires, mais aussi les projets et propositions relevant des deuxièmes et troisième piliers de l'Union européenne (affaires étrangères, justice et police), pour peu que ces textes comportent des dispositions de nature législative.
Ensuite, la nouvelle rédaction de l'article 88-4 consacre la possibilité pour le Gouvernement de « soumettre » aux Assemblées les autres projets ou propositions d'acte, ainsi que tout document émanant d'une institution de l'Union européenne.
Certes, la portée pratique de cette nouvelle disposition sera suspendue à la bonne volonté du Gouvernement, encore que, comme l'a souligné la commission des lois du Sénat, la transmission des documents de consultation publiés par la commission européenne soit explicitement prescrite par un protocole annexé au Traité d'Amsterdam. Le Gouvernement s'est d'ailleurs engagé à soumettre ces documents aux deux assemblées et c'est au vu de cet engagement que le Sénat a adopté conforme le projet de révision constitutionnelle.
Mais, même lorsqu'elle est simplement facultative, la soumission d'un texte ouvre ipso jure le droit pour le Sénat de voter des résolutions. C'est là une innovation dont l'importance ne doit pas être a priori sous-estimée.
D'un simple point de vue technique, le nouvel article 88-4, tel qu'il résulte de la loi constitutionnelle de janvier 1999, appelle une actualisation du Règlement du Sénat et plus précisément de son chapitre XI bis comprenant l'article 73 bis consacré aux résolutions sur les propositions d'actes communautaires.
La présente proposition de modification du règlement a ainsi pour premier objet d'adapter la terminologie du Règlement à la nouvelle rédaction de l'article 88-4 lequel vise désormais non plus seulement les propositions d'actes communautaires, mais l'ensemble des projets ou propositions comportant des dispositions de nature législative, ainsi que les documents susceptibles d'être soumis par le Gouvernement.
Plus précisément, l'article premier modifie l'intitulé du Chapitre XI bis du Règlement du Sénat qui utiliserait la notion plus générale de « résolutions européennes ».
L'article 2 harmonise l'alinéa 1 de l'article 73 bis pour y intégrer l'énumération mentionnée par le second alinéa de l'article 88-4, dans la mesure où le Gouvernement devra ou pourra soumettre au Parlement des projets, des propositions ou des documents.
L'article 3 fait de même pour les alinéas 2 et 4 de l'article 73 bis, sur le devoir de «veille» européenne dévolu à la Délégation pour l'Union européenne.
Par delà ces aménagements d'ordre purement rédactionnel, force est de relever que la mise en oeuvre du nouvel article 88-4 entraînera une augmentation du nombre des documents soumis au Sénat et, selon toute vraisemblance, un accroissement du nombre des résolutions.
Cette perspective doit conduire à une nouvelle réflexion sur la répartition des tâches entre les commissions permanentes et la délégation pour l'Union européenne d'une part, et, d'autre part, sur la procédure de discussion en amont de la séance publique des propositions de résolution.
A l'heure actuelle, l'examen préparatoire des propositions de résolutions demeure l'apanage des commissions permanentes, même si elles peuvent demander à la Délégation pour 1'Union européenne son avis sur une proposition.
A l'évidence, les commissions permanentes consacrent l'essentiel de leurs réunions à l'examen des projets ou propositions de loi inscrites à l'ordre du jour du Sénat et à des travaux de contrôle.
Le risque est donc grand qu'elles ne puissent avoir le temps suffisant pour rapporter, parfois dans l'urgence, des propositions de résolution en nombre croissant.
C'est pourquoi, le moment semble venu de confier à la délégation, qui est déjà à l'origine de la plupart des propositions, le droit de les rapporter, le cas échéant en séance publique, dès lors que la commission compétente le juge souhaitable et en formule la demande.
La Délégation pour l'Union européenne exercerait alors les mêmes compétences que les commissions permanentes pour l'examen des propositions qui lui auraient été ainsi renvoyées, y compris pour l'application de l'article 44, alinéa 2, de la Constitution.
S'agissant de l'élaboration des propositions de résolution, l'expérience de sept années a mis en évidence une certaine lourdeur dans la mise en oeuvre pratique de la procédure imaginée en 1992.
Cette procédure induit en effet deux, voire trois réunions de commission, la première pour adopter la proposition de résolution, la deuxième destinée à l'examen des amendements «extérieurs», une troisième réunion étant nécessaire si la Conférence des Présidents décide l'inscription à l'ordre du jour de la séance publique de la résolution de la commission.
A l'évidence, cette procédure s'apparente à un véritable parcours d'obstacles, sans doute justifié pour des propositions d'importance, mais inutilement long et complexe dans les cas d'urgence ou lorsque la proposition de résolution rencontre le plus large consensus.
L'article 5 de la proposition va dans le sens d'une simplification de la procédure : les deux réunions actuellement prévues par le Règlement seraient fusionnées en une seule qui permettrait simultanément l'examen des conclusions du Rapporteur et des amendements extérieurs lesquels seraient soit rejetés soit intégrés dans le texte de la commission.
Dans le même esprit, il est proposé de ramener de vingt à quinze jours francs le délai pendant lequel la Conférence des Présidents, saisie d'une demande d'examen en séance plénière, peut statuer sur l'inscription de la résolution d'une commission à l'ordre du jour du Sénat. En effet, pendant les semaines de séance, la Conférence se réunit au moins une fois toutes les deux semaines.
Ce double allégement procédural devrait contribuer à faciliter l'examen des textes européens et partant, à conforter le pouvoir de contrôle du Sénat sur la production normative des institutions européennes.
C'est pourquoi il vous est demandé, Mesdames, Messieurs, d'adopter la proposition de résolution suivante :
PROPOSITIQN DE RESOLUTION
Article premier
L'intitulé du chapitre XI bis du Règlement du Sénat (avant l'article 73 bis) est rédigé comme suit :
« CHAPITRE XI bis Résolutions européennes »
Article 2
L'alinéa 1 de l'article 73 bis est ainsi rédigé :
« 1. Les projets ou propositions d'actes et les documents soumis au Sénat en application de l'article 88-4 de la Constitution sont déposés sur le Bureau du Sénat et distribués ».
Article 3
I) Les deux premières phrases de l'alinéa 2 de l'article 73 bis sont ainsi rédigées :
«La délégation du Sénat pour l'Union européenne veille au respect de l'article 88-4 de la Constitution. A cet effet, si elle constate que le Gouvernement n'a pas déposé sur le Bureau du Sénat un texte qui lui paraît devoir être soumis au Sénat, la délégation en saisit le Président du Sénat qui demande au Gouvernement de soumettre au Sénat ce texte ».
II) Dans l'alinéa 4 de l'article 73 bis, les mots « une proposition d'acte communautaire » sont remplacés par les mots « un texte soumis au Sénat en application de l'article 88-4 de la Constitution ».
Article 4
L'alinéa 4 de l'article 73 bis est complété par la phrase suivante :
« Sur la demande du président de la commission compétente, le Président du Sénat peut décider de renvoyer une proposition de résolution à la délégation pour l'Union européenne, qui exerce dans ce cas les compétences attribuées aux commissions permanentes ».
Article 5
I - Les alinéas 6 et 7 de l'article 73 bis sont remplacés par les dispositions suivantes :
« 6. Après l'expiration du délai limite qu'elle a fixé pour le dépôt des amendements, la commission compétente ou la délégation pour l'Union européenne examine la proposition de résolution ainsi que les amendements qui lui ont été présentés par le Gouvernement, les sénateurs, ainsi que, le cas échéant, par les commissions saisies pour avis ou la délégation pour l'Union européenne. Les amendements, lorsqu'ils sont signés par plusieurs sénateurs, sont présentés devant la commission ou la délégation par l'un des signataires qui en sont membres, ou, s'il n'y en a pas, par le premier des signataires. »
II - Le début de l'alinéa 8 de l'article 73 bis est rédigé comme suit :
« La résolution de la commission compétente ou de la délégation pour l'Union européenne est transmise au Président, imprimée et distribuée. Cette résolution de la commission ou de la délégation devient la résolution du Sénat................, (le reste de l'alinéa sans changement) ».
III - Dans l'alinéa 9 de l'article 73 bis, après les mots : « peut exercer » sont insérés les mots : ", s'il y a lieu, ».
IV - L'alinéa 10 de l'article, précité est rédigé comme suit :
« Si, dans les quinze jours francs qui suivent cette demande, la Conférence des Présidents ne propose pas ou le Sénat ne décide pas son inscription à Tordre du jour, la résolution de la commission ou de la délégation pour l'Union européenne devient la résolution du Sénat. »
V - Les alinéas 8 à 11 sont numérotés de 7 à 10.