N°316
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 1998-1999
Rattaché pour ordre au procès-verbal de la séance du 15 avril 1999 Enregistré à la Présidence du Sénat le 22 avril 1999
PROPOSITION DE LOI
relative à l 'audiovisuel,
PRESENTEE
Par M. Jack RALITE,
Sénateur.
(Renvoyée à la commission des Affaires culturelles sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le Règlemen
Audiovisuel.
EXPOSE DES MOTIFS
Mesdames, Messieurs,
En présentant cette proposition de loi relative à l'audiovisuel et plus généralement à la communication, son auteur veut que la France en amitié constructive avec tous les peuples du monde soit dans la démocratie, à l'heure de notre temps et de notre avenir dans ce secteur devenu si décisif de la vie sociale, culturelle et humaine.
Il s'agit en effet d'un besoin essentiel, d'un droit universel, d'un rapport social entre une société et son imaginaire.
Or, aujourd'hui cette belle invention humaine qu'est la télévision en croissance exponentielle et connaissant avec les nouvelles techniques numériques une diversification de ses moyens de création, de réception, a une pratique généralisée relevant de la consommation et subit une insatiable mercantilisation notamment avec l'omniprésence de la publicité et la montée du péage. De plus, bien loin d'être maîtrisée par les autorités publiques, la télévision est pilotée par de grandes sociétés privées qui se transnationalisent et vampirisent ou marginalisent le secteur public, tout cela conduisant à une standardisation des programmes.
Cette situation de déréglementation appauvrissant le pluralisme n'est pas fatale. D'autres pays ont fait autrement mais surtout un mouvement social international a bloqué la première tentative de l'accord multilatéral sur l'investissement (AMI) d'accroître et de légaliser ces tendances notamment dans l'audiovisuel. Il faut confirmer et garantir ce
succès.
Il est donc temps de mettre à jour et en oeuvre dans un audiovisuel en mutation, une responsabilité publique et sociale à tous les niveaux, local, régional, national, européen et international avec en son coeur les enjeux de civilisation que sont le pluralisme des idées, des expressions, des esthétiques, l'exception culturelle, la liberté de création et de recherche, l'indépendance de l'information et l'égalité de tous les citoyens.
L'enjeu social et culturel de la télévision mérite un véritable « code de la route de l'imaginaire des peuples ». L'objet de cette proposition de loi est avant tout d'enclencher :
1 - un processus multiforme de construction d'un nouvel «espace public » de la communication habité par le débat public notamment entre ceux qui font la télévision et ceux qui la regardent.
2 - la formation d'un levier industriel de la production audiovisuelle et logicielle impliquant des investissements massifs (1 % du PIB) et des coopérations diverses en Europe et dans le monde.
Cette démarche nouvelle nécessite une extension du service public entendu comme des missions spécifiques au secteur public et comme des responsabilités d'intérêt général concernant tous les acteurs publics et privés, un renforcement du « pôle public » respectueux de ses personnels et de ses usagers et ayant un bon financement mixte, des règles anticoncentration s'attaquant notamment à la logique publicitaire et libérant l'audiovisuel des forces du court terme dont la comptabilité refroidit tout, des initiatives nouvelles en faveur de la production cinématographique, des articulations novatrices entre les télévisions publiques européennes sans oublier les pays de l'Est et du Sud, la décision nationale d'entrer dans l'ère numérique, toutes ces mesures étant applicables aux nouveaux services.
Voilà le sens profond de cette proposition de loi qui ose se libérer des seules règles d'un jeu qui ne serait qu'économiquement profitable et socialement tolérable, qui se nourrit de valeurs à l'heure exacte de la conscience, qui ne laisse aucun problème sur la touche, qui va au devant des désirs et plaisirs, des savoirs et vouloirs des citoyens et des créateurs. Elle veut que la pensée et l'imaginaire ne restent pas à quai mais gagnent la haute mer là où le vent est favorable à l'aventure humaine dont la télévision est partie prenante dès qu'elle n'a pas l'imprudence de mépriser les rêves, qu'elle choisit autre chose que la morale du présent asservissante de l'énergie d'avenir, qu'elle refuse d'ignorer que la pensée avant d'être oeuvre est trajet et que l'universel, c'est le local sans les murs. Cette proposition de loi veut contribuer à donner un départ nouveau pour la télévision à l'image de ce qu'Arthur Rimbaud disait : «j'ai tendu des cordes de clocher à clocher, des guirlandes de fenêtre à fenêtre, des chaînes d'or d'étoile à étoile et je danse ».
PROPOSITION DE LOI
Article 1 er
DES PRINCIPES FONDATEURS
La présente loi abroge la loi antécédente du 30 septembre 1986. Elle y substitue les dispositions suivantes.
La communication audiovisuelle est un droit reconnu à tous les citoyens en continuité avec la déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789.
Elle est organisée dans le cadre d'une responsabilité publique et sociale aux niveaux national et local.
Cette responsabilité publique et sociale signifie que des missions d'intérêt général sont fixées à tous les opérateurs publics et privés utilisant toutes techniques de radiodiffusion.
Le secteur public rénové et renforcé joue un rôle moteur dans l'exercice de cette responsabilité.
La finalité de cette responsabilité est de garantir le pluralisme, la démocratie, l'indépendance de l'information et le renforcement de la création et de la production audiovisuelle.
La France prend une initiative de négociation permettant la mise en oeuvre d'une telle responsabilité à l'échelle européenne et internationale.
La convergence technique de l'audiovisuel, de l'informatique et des télécommunications ne doit pas conduire à assimiler le statut de la communication audiovisuelle caractérisée notamment par le contenu culturel de ses oeuvres au statut juridique des services informatiques et des télécommunications. Par ailleurs, le développement des techniques numériques appelle une extension des missions de service public.
Le droit économique de la concurrence qui s'applique aux opérateurs du secteur audiovisuel est borné par le principe supérieur d'exception culturelle. Chaque fois que le pluralisme et la création sont concernés par des décisions ou des arbitrages soumis aux autorités surveillant la concurrence, la décision finale reviendra au CSA, au Gouvernement ou au Parlement.
Article 2
DU PÔLE PUBLIC DE L'AUDIOVISUEL
Pour l'accomplissement de leurs missions, France Télévision, La Sept/Arte, La Cinquième, la SFP, l'INA, Radio-France, RFI, RFO et TDF sont associés au sein d'un pôle public de communication audiovisuelle et de production multimédia.
Les missions de service public de l'audiovisuel sont confiées à l'ensemble des organismes publics associés au sein de ce pôle selon des modalités spécifiques à chacune des sociétés et telles qu'elles résultent de l'application de leurs nouveaux cahiers des charges respectifs définis par le CSA, conformément aux principes de la présente loi.
Les organismes publics de l'audiovisuel assurent l'indépendance des personnels dans le respect des conventions collectives existantes, et l'autonomie des rédactions dont elles ont la charge notamment par la création de sociétés de rédacteurs.
Des parlementaires désignés par l'Assemblée nationale et le Sénat, des représentants de l'Etat, des personnalités qualifiées, des représentants élus du personnel, des représentants des associations des usagers du service public de l'audiovisuel, des représentants du secteur de la création audiovisuelle sont membres de droit de chacun des Conseils d'administration des sociétés de programmes nationales. Les modalités de désignation sont précisées par décret.
Article 3
DES MISSIONS DE SERVICE PUBLIC
La garantie et le renforcement du pluralisme de l'information et de la création est la mission première du service public de l'audiovisuel, mission renforcée avec le développement des technologies numériques de production et de distribution des programmes.
La concertation entre les organismes publics de l'audiovisuel doit permettre à chacun d'accomplir sa mission en synergie avec les autres, de manière complémentaire et à l'exclusion de toute concurrence interne. La programmation de l'ensemble des sociétés publiques de programmes audiovisuels doit rassembler un large public autour d'un ensemble de programmes et de services diversifiés, pluralistes, innovants, créatifs et respectueux des droits fondamentaux de la personne et de la démocratie.
Cette offre diversifiée des programmes du service public concerne l'ensemble des domaines de l'information, de la culture, de la création, de la connaissance, du savoir, du divertissement, du sport, et des champs d'exercice de la citoyenneté.
Un rôle spécifique d'innovation est conféré au service public visant à explorer les nouvelles formes de production et les nouveaux modes d'accès aux programmes rendus possibles par les avancées des technologies numériques.
Article 4
DES EXIGENCES SPÉCIFIQUES EN MATIÈRE DE PLURALISME
a) En matière d'information, les sociétés publiques de programmes audiovisuels mettent en oeuvre le pluralisme sur l'ensemble des dossiers d'actualité et des journaux télévisés.
Les modalités de répartition du temps d'antenne des différentes composantes politiques nationales sont fixées par le CSA en fonction de la représentativité de chacune d'entre elles telle qu'elle résulte de la représentation parlementaire nationale et de leur représentation au sein des assemblées délibératives des collectivités locales.
Les modalités de répartition du temps d'antenne dont disposent les différentes composantes syndicales nationales sont fixées par le CSA en fonction de la représentativité de chacune telle qu'elle résulte des élections professionnelles.
b) Afin de favoriser la diversité de la création artistique en matière de programmes et particulièrement de divertissements et de variétés, les sociétés publiques de programmes audiovisuels doivent promouvoir une diversité d'artistes, de courants artistiques et de jeunes talents émancipée de la logique de l'audimat.
c) Le pluralisme est également au coeur des missions des sociétés publiques de programmes audiovisuels en matière de programmation de fictions nationales et européennes. Ce pluralisme s'apprécie dans le choix des auteurs-réalisateurs, dans le choix des artistes-interprètes indépendamment des logiques économiques fondées sur le « star-
system » et l'audimat.
d) Les sociétés publiques de programmes audiovisuels participent à l'élargissement des pratiques culturelles des usagers du service public de l'audiovisuel notamment, en oeuvrant au rayonnement de l'ensemble des formes du spectacle vivant, du patrimoine du cinéma, des arts plastiques, de 1 'architecture...
e) Les sociétés publiques de programmes audiovisuels participent à la diffusion du savoir et de la connaissance, à la formation de l'esprit critique en développant notamment l'apprentissage à la lecture de l'image et à l'appropriation des nouveaux médias.
f) Le pluralisme et la qualité des créations et des productions requièrent un développement du volume et de la diversité des emplois artistiques. Le CSA y veillera en concertation avec l'ensemble des parties concernées et dans le cadre du dispositif prévu par l'article 13 de la présente loi.
Les modalités de mise en oeuvre de ces différentes formes de pluralisme sont précisées par décret.
Article 5
DU PLURALISME INTERNE AU PÔLE PUBLIC
Le pluralisme résulte également des missions spécifiques de chacune des sociétés publiques de programmes de télévision.
La société de programme France2 est chargée de concevoir et de mettre en oeuvre une programmation généraliste et diversifiée à l'intention d'un large public.
La société de programme France 3 est chargée de concevoir et de programmer des émissions de télévision à caractère national, régional et local. Cette société assure des missions audiovisuelles de proximité en direction notamment de bassins de populations significatifs au regard de leur spécificité et de leur expression singulière. Dans le cadre de l'accomplissement de ses missions, France3 peut conclure des conventions permettant l'ouverture d'une fenêtre de diffusion à des groupes associatifs. Le choix de ces groupes s'appuie sur les principes du pluralisme inhérent au service public et ayant pour souci le respect des règles déontologiques et démocratiques propres à ce champ d'expression.
La société de programme la Sept/Arte, dans le respect du traité franco-allemand, et «la cinquième» participent au rayonnement de l'ensemble des cultures européennes par la programmation de créations originales dans l'ensemble des champs de la culture, de l'éducation et du savoir.
Article 6
DU FINANCEMENT DES SOCIÉTÉS DE SERVICE PUBLIC
Conformément au droit communautaire, les missions spécifiques du service public constituent le fondement d'un financement mixte dont bénéficie le service public de l'audiovisuel.
Le financement public et pluriannuel du service public de l'audiovisuel est assis sur la redevance et des aides publiques décidées en fonction de contrats d'objectifs conclus entre l'Etat et le service public de l'audiovisuel. Les exonérations de la redevance sont intégralement compensées par l'Etat.
Les contrats d'objectifs et les sommes allouées au service public de l'audiovisuel sont l'objet d'un débat parlementaire lors de la discussion de la loi de finances. Les budgets des sociétés publiques votés annuellement doivent être présentés dans des perspectives et un cadre pluriannuels.
Le financement privé du service public de l'audiovisuel repose sur les ressources publicitaires et la création de nouveaux services.
Afin de garantir l'indépendance et le respect des missions du service public de l'audiovisuel, l'organisme collecteur de ressources publicitaires est séparé des services de programmation selon des modalités définies par décret.
Les clauses contractuelles des contrats de publicité ne peuvent être fondées sur l'audience des émissions mais seulement sur des critères prenant en compte l'heure de diffusion.
Pour l'ensemble des sociétés de programmes du service public de l'audiovisuel, le temps consacré à la diffusion de messages publicitaires ne peut être supérieur à 5 minutes par période de 60 minutes. La perte de recettes est intégralement compensée par l'Etat.
Afin de conforter le service public de l'audiovisuel, des aides de l'Etat peuvent être consenties pour le développement de nouveaux services utilisant les techniques numériques.
Dans un délai de deux ans après la promulgation de la présente loi, le Gouvernement présentera un rapport au Parlement afin de permettre l'accroissement significatif des recettes du service public de l'audiovisuel.
Article 7
DES RÈGLES D'INTÉRÊT GÉNÉRAL
L'ensemble des opérateurs publics et privés respectent des règles d'intérêt général fondées sur la sauvegarde des enjeux culturels propres aux oeuvres audiovisuelles et des enjeux économiques représentés par la production nationale.
a) A ce titre, ils doivent consacrer une part de diffusion réservée aux oeuvres d'expression originale française représentant 60 % du temps total de diffusion des oeuvres. Sur ces 60 %, 10 % doivent être réservés à des oeuvres européennes non nationales.
Ces quotas s'appliquent aux programmes ayant la nature d'oeuvres (fictions, animations, documentaires de création) et durant les heures d'écoute significatives déterminées par le CSA.
Ils s'appliquent à l'ensemble des chaînes quels que soient leur mode de diffusion et le caractère de leur programmation, sous la seule réserve des chaînes thématiques dont la programmation exclut par nature les oeuvres telles que précédemment définies (chaîne du sport ou du téléachat, par exemple).
S'agissant des nouveaux modes d'accès aux oeuvres, sur demande individuelle, ces quotas sont appréciés au regard de l'offre de programme.
b) Pour les sociétés privées de programmes, les coupures publicitaires ne peuvent intervenir durant la diffusion d'une oeuvre originale. La durée du temps maximal consacré à la diffusion de messages publicitaires pour ces mêmes sociétés privées ne peut être supérieur à 10 minutes par période de 60 minutes.
Pour les télévisions commerciales financées majoritairement par des recettes d'abonnement, elles doivent affecter dans une proportion définie par décret, leurs éventuelles recettes publicitaires au compte de soutien de l'industrie des programmes.
c) Afin de sauvegarder l'exploitation cinématographique en salles, les principes de la chronologie des médias sont maintenus. L'Etat veille à ce que, contractuellement, les diffuseurs et les ayant droits respectent un délai de droit commun de diffusion de trois ans après la sortie en salle, de deux ans en cas de coproduction, d'un an, à titre dérogatoire, en cas d'engagement spécifique en terme de volume de production.
Le CSA ouvre une négociation sur cette question pour les nouveaux modes de diffusion numérique donnant lieu à un abonnement.
Article 8
DU STATUT DES OPÉRATEURS PRIVÉS
a) Le principe de reconduction automatique des autorisations et des conventions corrélatives aux services conclus avec le CSA est abrogé. Les autorisations actuelles prennent fin au terme d'un délai de dix ans en matière de télévision et de cinq ans en matière de radio, à compter de leur dernier renouvellement.
Les autorisations d'émettre sur les fréquences du domaine public hertzien sont délivrées par le CSA moyennant le paiement d'une redevance par le bénéficiaire d'une autorisation et le respect des missions d'intérêt général telles qu'elles résultent de l'application des articles 1er et 7 de la présente loi.
Le produit de cette redevance alimente le compte de soutien à la création de programmes audiovisuels.
Le CSA fixe les modalités d'application de cet article.
b) Un même groupe ne peut détenir directement ou indirectement plus de 25 % du capital d'une entreprise du secteur audiovisuel.
Un groupe détenteur de plus de 15 % du capital d'une société de communication audiovisuelle nationale ne peut bénéficier de marchés
publics nationaux ou régionaux.
Le conseil d'administration des sociétés privées de communication audiovisuelle est ouvert aux salariés de ces sociétés dans la proportion d'un tiers.
Un décret en Conseil d'Etat fixe les règles de nature à permettre une réelle séparation des pouvoirs entre les responsabilités de l'actionnaire des sociétés privées de communication audiovisuelle d'une part, et le ou les gestionnaires de ces sociétés et le ou les équipes d'information de ces sociétés, d'autre part.
Article 9
DU SOUTIEN À LA PRODUCTION AUDIOVISUELLE
Les sociétés publiques de l'audiovisuel et les sociétés privées participent au développement de l'industrie nationale de la production audiovisuelle.
Les sociétés du service public de l'audiovisuel sont investies d'une mission spécifique au regard du développement de programmes audiovisuels originaux, de leur diversité tant dans les genres de programmes offerts que dans les thèmes abordés et dans les regards et les esthétiques des créateurs auxquels sont confiées la conception et la réalisation de ces programmes.
Afin de répondre à ces objectifs, les sociétés publiques de programmes audiovisuels en coopération avec la Société Française de Production sont autorisées à mettre en oeuvre des productions propres et des productions associant les producteurs indépendants.
Afin de permettre le pluralisme de la création audiovisuelle, son originalité, sa diversité qualitative, le CSA fixe les conditions permettant l'ouverture dans chacune des sociétés publiques de diffusion de programmes d'une multiplicité de structures d'accueil des projets audiovisuels et de pôles de décision de mise en production des programmes.
Sans préjudice de l'ouverture de règles de détention des droits exorbitants pour le service public de l'audiovisuel, un décret fixe les modalités de détention des droits des différentes sociétés de programmes aux fins de garantir l'essor de la production audiovisuelle nationale. La durée de détention des droits doit être proportionnelle au niveau de l'investissement initial.
Le CSA fixe les missions d'intérêt général applicables aux sociétés privées visant à renforcer la production audiovisuelle nationale, à assurer la diffusion de la pluralité de la production audiovisuelle nationale, européenne et internationale et à renforcer le financement de la production audiovisuelle.
Le mécanisme d'attribution du soutien automatique à la production audiovisuelle est complété par un mécanisme renforcé de soutien sélectif géré par les représentants des différentes catégories d'acteurs de la création et de la diffusion audiovisuelle selon un accord passé entre le CNC et les différentes catégories artistiques et professionnelles concernées.
Article 10
DU PATRIMOINE, DE LA RECHERCHE ET DE LA FORMATION
La mission de service public de conservation du patrimoine des programmes de radio et de télévision est réaffirmée et s'exerce dans le respect des droits d'auteur et des droits voisins.
L'Institut national audiovisuel est le conservatoire de tous les programmes de radio et de télévision du service public. A cette fin, il est organisé une dévolution complète des droits à l'Institut pour tous les programmes, à la fin de leur premier cycle d'exploitation commerciale par les diffuseurs publics. Ce partage dans le temps entre l'Institut et les diffuseurs publics fait l'objet d'un décret.
L'Institut est par ailleurs chargé de la mise en oeuvre du Dépôt Légal prévue par la loi de 1992 et ses textes d'application. Pour cette mission, il bénéficie d'un financement du budget général de l'Etat.
La mission de service public de recherche et de formation dans le domaine de la production et de la communication audiovisuelles est réaffirmée.
Dans le cadre de ces missions, l'Institut national de l'audiovisuel procède à des études et des expérimentations et produit des oeuvres et des documents audiovisuels pour les réseaux actuels et futurs. Il contribue à la formation continue et initiale et à renseignement supérieur dans les métiers de la communication audiovisuelle.
Article 11
POUR UNE POLITIQUE EUROPÉENNE DE LA PRODUCTION ET DE LA DIFFUSION
La France prend l'initiative de proposer une politique industrielle européenne d'investissements pour la production de programmes audiovisuels et logiciels dont le montant doit atteindre dans un délai de 5 ans, 1 % du PIB consolidé des pays membres de l'Union européenne.
Cette politique participe au soutien de l'innovation, de la création et de la recherche dans les secteurs de la communication audiovisuelle publique et privée.
La France propose que 10 % de la programmation des chaînes européennes soit réservé à des programmes européens autres que celui du pays diffuseur.
La France est à l'initiative de négociations permettant la mise en place d'un fonds de garanties européen pour la création audiovisuelle.
La France est à l'initiative de négociations afin de permettre la création d'un fonds de soutien à l'exportation et à la distribution de programmes audiovisuels européens en Europe et dans le monde et notamment en direction des pays de l'Europe Centrale et des pays en voie de développement.
Les coopérations audiovisuelles nationales et européennes seront renforcées en direction des pays de l'Europe Centrale, de l'Europe de l'Est et de l'ensemble des pays en voie de développement.
Article 12
DE L'EXPRESSION RADIOPHONIQUE
Dans chaque zone de planification radiophonique, un tiers des fréquences est réservé aux radios associatives locales, éligibles au fonds de soutien à l'expression radiophonique. La gestion de ces fréquences est assurée par le CRA, prévu à l'article 14 de la présente loi. Les décisions de celui-ci peuvent donner lieu à un recours devant le CSA.
Les fréquences sont incessibles. Toute cession directe ou indirecte donne lieu à un retrait immédiat de l'autorisation.
Tout changement substantiel des conditions d'autorisation affectant notamment la répartition du capital de l'opérateur donne lieu à restitution de la fréquence et à une nouvelle attribution de celle-ci.
Les plafonds anticoncentrations sont maintenus : aucun groupe radiophonique ne peut contrôler des réseaux au-delà de 150 millions d'auditeurs potentiels.
Comme en matière de télévision, l'attribution d'une fréquence hertzienne est subordonnée au paiement d'une redevance d'occupation de domaine public et au respect des missions d'intérêt général précisées par décret et dans les différentes conventions d'autorisation. Au nombre de celles-ci est confirmée l'obligation de programmer 40 % de chansons francophones.
Les radios publiques au titre de leur mission de service public doivent notamment mettre en oeuvre une programmation rendant compte du pluralisme des auteurs, compositeurs et des artistes interprètes conformément aux dispositions de l'article 4 de la présente loi.
Article 13
DU STATUT DES PERSONNELS DE L'AUDIOVISUEL
Il ne peut y avoir de développement de la création et de la production audiovisuelle sans que les personnels bénéficient de droits et d'une responsabilité accrus.
Ils doivent donc bénéficier d'une représentation dans les conseils d'administration et de droits identiques à ceux des salariés des autres entreprises du secteur public.
S'agissant de salariés permanents, le ministre compétent prendra l'initiative de négociations permettant d'améliorer la convention collective de la communication et de la production audiovisuelles afin de permettre la conclusion d'une nouvelle convention collective nationale étendue à tout l'audiovisuel.
S'agissant des salariés intermittents, leur reconnaissance sera mise en oeuvre :
a) par la mise en place d'une convention collective étendue, développant et s'appuyant sur la convention collective de la production cinématographique pour les ouvriers et techniciens. La situation des réalisateurs exige la mise en oeuvre d'une convention collective nationale prenant en compte leur spécificité et applicable tant au secteur public qu'au secteur privé. En ce qui concerne les artistes interprètes qui disposent d'une convention collective étendue dans le domaine de la télévision publique et privée, la convention collective qui les lie à Radio France sera appliquée aux radios.
b) par une garantie des contrats et rémunérations privés des réalisateurs, auteurs et techniciens assurée par le fonds de soutien à l'audiovisuel à l'exemple de ce qui existe dans le cinéma.
c) par l'existence d'accords garantissant des volumes de production et des engagements de dépenses à caractère artistique telles qu'elles sont évoquées à l'article 9.
Article 14
DE L'INSTANCE DE RÉGULATION ET DE SA DÉMOCRATISATION
Le CSA comprend 15 membres. Il est composé d'un tiers de parlementaires désignés par l'Assemblée nationale et le Sénat, d'un tiers de professionnels de l'audiovisuel désignés par le Conseil économique et social sur proposition des organisations représentatives concernées et d'un tiers de personnalités qualifiées reflétant la diversité « des familles de pensée » désignées par le Président de la République. Les modalités de ces désignations sont précisées par décret.
Le CSA est compétent pour faire assurer le respect des principes formulés par la présente loi et ce décret d'application. Il dispose à cet effet d'une compétence réglementaire pour en préciser les conditions et modalités de mise en oeuvre. Conformément à ces dispositions, il négocie les cahiers des charges des chaînes de service public et les conventions d'autorisation des chaînes privées.
Il est compétent pour sanctionner le non respect de ces différentes catégories de règles. Les sanctions sont :
a) les pénalités financières pouvant atteindre 5 % du chiffre d'affaires de l'opérateur et 10 % en cas de récidive,
b) la suspension de l'autorisation d'émettre pour une durée maximale d'un mois et d'une durée minimale de 48 heures,
c) l'engagement de poursuites pénales.
Ces différentes sanctions s'exercent directement, sans mise en demeure préalable.
Des comités régionaux de l'audiovisuel (CRA) sont créés dans les 16 régions correspondant aux actuels comités techniques radiophoniques (CTR). Ils disposent d'une compétence décisionnelle de premier ressort au regard des opérateurs radiophoniques, des télévisions locales hertziennes et câblées. Le CSA constitue dans ces domaines l'instance supérieure d'appel.
Les CRA comprennent 12 membres. Ils sont composés d'un tiers d'élus locaux, d'un tiers de professionnels de l'audiovisuel et d'un tiers de personnalités qualifiées, désignés selon des modalités précisées par décret.
Le mandat des membres du CSA et des CRA est de 6 ans renouvelable par tiers tous les 2 ans. Un seul mandat est autorisé.
Auprès du CSA et de chacun des CRA est constitué un collège consultatif de 25 membres composé de représentants des auditeurs et des téléspectateurs élus pour 5 ans par l'ensemble des personnes ayant acquitté la redevance. Les candidatures émanent des associations ayant inscrit dans leur objet social leur intérêt pour la communication audiovisuelle.
Le CSA et les CRA soumettent chaque année, pour discussion, un rapport au collège consultatif précité. Ce dernier est habilité à faire toutes propositions qu'il juge opportunes à la majorité des deux tiers de ses membres.
Le rapport annuel et ces propositions donnent lieu à publication.
Article 15
Le taux de l'impôt prévu à l'article 219 du code général des impôts est relevé à dure concurrence.