Protection des biens mobiliers présentant un intérêt historique ou artistique
N°
105
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 2000-2001
Annexe au procès-verbal de la séance du 24 novembre 2000
PROPOSITION DE LOI
tendant à renforcer la
protection
des
biens
mobiliers
dont
la conservation présente un
intérêt historique
ou
artistique
,
PRÉSENTÉE
par M. Pierre LAFFITTE,
Sénateur.
(Renvoyée à la commission des Affaires
culturelles sous réserve de la constitution éventuelle d'une
commission spéciale dans les conditions prévues par le
Règlement).
(1) Cette commission est composée de :
MM. Adrien Gouteyron,
président
; Jean Bernadaux, James Bordas,
Jean-Louis
Carrère, Jean-Paul Hugot, Pierre Laffitte, Ivan Renar,
vice-présidents
; Alain Dufaut, Ambroise Dupont, André
Maman, Mme Danièle Pourtaud,
secrétaires
;
MM. François Abadie, Jean Arthuis, André Bohl, Louis de
Broissia, Jean-Claude Carle, Gérard Collomb, Xavier Darcos, Fernand
Demilly, André Diligent, Jacques Donnay, Michel
Dreyfus-Schmidt,
Jean-Léonce Dupont, Daniel Eckenspieller, Jean-Pierre Fourcade, Bernard
Fournier, Jean-Noël Guérini, Marcel Henry, Roger Hesling, Pierre
Jeambrun, Roger Karoutchi, Serge Lagauche, Robert Laufoaulu, Jacques Legendre,
Serge Lepeltier, Mme Hélène Luc, MM. Pierre
Martin
,
Jean-Luc Miraux, Philippe Nachbar, Jean-François
Picheral, Guy Poirieux, Jack Ralite, Victor Reux, Philippe Richert,
Michel Rufin, Claude Saunier, René-Pierre Signé, Jacques Valade,
Albert Vecten, Marcel Vidal, Henri Weber.
Patrimoine |
EXPOSÉ DES MOTIFS
Mesdames, Messieurs,
La loi sur les monuments historiques du 31 décembre 1913 donne à
l'Etat la possibilité de protéger tout bien, meuble ou immeuble,
dont la conservation présente au point de vue de l'histoire ou de l'art,
un intérêt public.
Ces dispositions s'avèrent satisfaisantes pour les immeubles. Pour les
meubles par nature ou par destination, elles sont insuffisantes.
Si l'article 21 de la loi précitée interdit l'exportation hors de
France des objets mobiliers classés, aucune disposition n'interdit leur
déplacement sur le territoire national, bien même s'ils font
partie d'un ensemble mobilier remarquable.
L'actualité récente a présenté de multiples
exemples de dépeçage systématique d'objets faisant partie
intégrante de monuments historiques ainsi que de l'éparpillement
de collections sur le territoire national et la sortie clandestine en dehors
des frontières.
La mise en place de nouvelles mesures de protection s'impose pour éviter
le pillage des châteaux, demeures et biens culturels, en
préservant toutefois le plus possible les droits des
propriétaires sur leurs biens.
Pour atteindre ce but, il vous est proposé :
1° de réputer "classés" les biens mobiliers, immeubles par
nature ou par destination, d'un immeuble classé. La protection ainsi
accrue de ces objets mobiliers n'empêcherait pas toutefois le
propriétaire de contester l'utilité de ce classement en demandant
au ministre compétent un déclassement partiel, tel qu'il est
déjà prévu à l'article 13 de la loi
précitée ;
2° d'accorder une protection spécifique aux collections d'objets
mobiliers :
a) en organisant une information préalable du ministre compétent
quand la collection est vendue dans son entier ;
b) en exigeant l'autorisation de ce dernier en cas de ventes d'un ou plusieurs
objets détachés de cette collection et en prévoyant un
droit prioritaire d'achat pour les personnes publiques ;
c) en rendant obligatoire l'indemnisation d'un propriétaire auquel
l'autorisation de vente serait refusée.
Pour ces raisons, il vous est demandé, Mesdames, Messieurs, d'adopter la
présente proposition de loi.
PROPOSITION DE LOI
TITRE I
IMMEUBLES CLASSÉS
Article 1er
L'article 1er de la loi du 31 décembre 1913 sur les
monuments
historiques est ainsi modifié :
I - Le début du premier alinéa est ainsi rédigé :
" Les immeubles et les objets mobiliers, immeubles par nature ou par
destination qu'ils contiennent, sont ...(le reste sans changement). "
II - Après le premier alinéa, il est inséré un
alinéa ainsi rédigé :
" Sont notamment compris parmi les objets mobiliers, immeubles par nature
ou par destination visés à l'alinéa
précédent : les portes et fenêtres ; les
cheminées ; les bas-reliefs ; les fresques ; les
boiseries ; les bibliothèques. "
Article 2
L'article 14 de la loi du 31 décembre 1913
précitée est ainsi modifié :
I - Dans le premier alinéa, les mots : " ,soit meubles
proprement dits, soit immeubles par destination, " sont supprimés.
II - Le deuxième alinéa est supprimé.
Article 3
Dans le premier alinéa de l'article 24 bis de la loi du 31 décembre 1913 précitée, les mots : " ,soit meubles proprement dits, soit immeubles par destination, " sont supprimés.
Article 4
Après l'article 39 de la loi du 31 décembre 1913
précitée, il est ajouté un article 40 ainsi
rédigé :
"
Art. 40
- Les objets mobiliers, immeubles par nature ou par
destination d'un immeuble classé ou inscrit avant la promulgation de la
présente loi sont considérés comme
régulièrement classés ou inscrits.
" Tout propriétaire privé peut toutefois demander un
déclassement dans les conditions précisées à
l'article 13 de la présente loi. "
TITRE II
COLLECTIONS
Article 5
Après le premier alinéa de l'article 16 de la
loi du
31 décembre 1913 précitée, il est inséré un
alinéa ainsi rédigé :
" Quand des objets forment un ensemble présentant un
intérêt public en raison de son appartenance à une
même période historique ou en raison de son rassemblement dans un
immeuble classé dont elle partage l'histoire, le classement porte sur la
collection toute entière. "
Article 6
Après l'article 18 de la loi du 31 décembre 1913
précitée, il est inséré un article 18
bis
ainsi rédigé :
"
Art. 18
bis - I. - La décision d'aliéner l'ensemble
d'une collection classée appartenant à une personne visée
au premier alinéa de l'article 16 est notifiée par le
propriétaire au ministre chargé des Affaires culturelles, trois
mois au moins avant la mise en vente.
" II. - La décision de détacher un ou plusieurs objets
mobiliers d'une collection classée en vue de leur aliénation
séparée est soumise à l'autorisation préalable du
ministre chargé des affaires culturelles. L'autorisation
ministérielle, qui emporte classement des objets détachés,
ouvre un délai de neuf mois pendant lequel peuvent seuls se rendre
acquéreurs aux conditions fixées par le vendeur : l'Etat,
une collectivité locale, un établissement public ou un
établissement d'utilité publique. Si à l'expiration dudit
délai, aucun des acheteurs précités n'a donné son
accord, les objets peuvent être vendus à des particuliers.
" Le refus, exprès ou tacite, de l'autorisation visée
ci-dessus donne lieu à l'indemnisation du préjudice
résultant pour le propriétaire de l'interdiction de la
vente ".
TITRE III
DISPOSITIONS DIVERSES
Article 7
Les charges qui résultent pour l'Etat des dispositions de la présente loi sont compensées, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.