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N° 10
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 2007-2008
Annexe au procès-verbal de la séance du 3 octobre 2007 |
PROJET DE LOI
relatif au parc naturel régional de Camargue ,
PRÉSENTÉ
au nom de M. FRANÇOIS FILLON,
Premier ministre,
par M. JEAN-LOUIS BORLOO,
ministre d'État, ministre de l'écologie, du
développement
et de l'aménagement durables
( Renvoyé à la commission des Affaires économiques, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le Règlement).
EXPOSÉ DES MOTIFS
Mesdames, Messieurs,
Le territoire du parc naturel régional (PNR) de Camargue, avec près de 100 000 hectares, est la plus vaste zone humide de France, ainsi qu'une des zones humides les plus célèbres et les plus emblématiques du continent européen. Il s'agit d'un milieu remarquable fragile, très dépendant, notamment, d'une gestion coordonnée des ressources en eau, conciliant protection de la nature et activités économiques. C'est pourquoi il est aussi important, d'un point de vue environnemental, de formaliser un projet de territoire partagé et de disposer d'une structure opérationnelle de concertation, d'animation, d'aménagement et de gestion. La Camargue accueille des activités diversifiées et de grande qualité : élevage de chevaux et de taureaux, riziculture, saliculture, viticulture, pêche, chasse et tourisme, permettant d'assurer le maintien des milieux et des espèces, indispensables pour garantir ce qui fait la spécificité de ce territoire.
La Camargue a été classée comme Parc naturel régional dès 1972. Les actions du PNR jouent un rôle essentiel sur la durabilité économique et écologique des activités de la Camargue.
Près de 40 personnes sont employées par la structure de gestion du parc, avec en outre plus de 200 emplois associés dans les domaines de la protection de la nature et de la recherche scientifique. Parallèlement, plus de 20 millions d'euros de projets sont actuellement programmés par le parc sur ce territoire dans des domaines divers et complémentaires, notamment le contrat de delta (14 millions d'euros), la gestion intégrée des zones côtières (2 millions d'euros), la protection contre les crues du Rhône (2 millions d'euros), ou les mesures agro-environnementales pour l'élevage et la riziculture (1,5 million d'euros).
Le classement du parc naturel régional de Camargue vient à échéance le 18 février 2008. Pour que le parc soit à nouveau classé, une révision de la charte est nécessaire, en application des dispositions du code de l'environnement.
Or, le parc naturel régional de Camargue connaît une situation juridique très complexe depuis plusieurs années, situation qui porte gravement préjudice à ce territoire emblématique.
La charte prévoit que le parc est géré par une fondation. Cette structure de gestion s'est révélée inadéquate et s'est trouvée confrontée à d'importants dysfonctionnements d'ordre statutaire, financier et comptable.
Il avait été décidé en 2001 de confier à un groupement d'intérêt public (GIP) la charge de mener à bien les travaux de révision de la charte du parc de Camargue afin notamment de permettre aux propriétaires privés de participer à la structure de gestion du parc. Toutefois, le Conseil d'État, par une décision du 23 juin 2004, a estimé que seul un syndicat mixte, et non un GIP, pouvait gérer le Parc naturel régional de Camargue, en application de la loi n° 95-101 du 2 février 1995.
En vertu de cette loi, la structure de gestion des nouveaux parcs doit être un syndicat mixte, structure qui s'est révélée tout à fait adaptée pour tous les parcs créés après la loi.
À ce jour, tous les parcs naturels régionaux sont gérés par cette structure de gestion qui permet d'associer collectivités territoriales et partenaires locaux regroupés au sein des chambres consulaires et établissements publics. Les parcs créés avant la loi de 1995 se sont progressivement transformés : depuis 1995, à l'occasion des différentes révisions des chartes des parcs naturels régionaux, les collectivités territoriales concernées ont transféré la gestion de leur parc à un syndicat mixte. La loi du 14 avril 2006 est venue entériner cette situation : le Parlement a ainsi signifié que tout parc naturel régional dont la structure de gestion serait autre qu'un syndicat mixte ne serait plus conforme à la loi.
Dans cette logique, en se conformant aux dispositions du code de l'environnement et à la décision du Conseil d'État du 23 juin 2004, la région Provence-Alpes-Côte-d'Azur, le département des Bouches-du-Rhône, les communes d'Arles et des Saintes-Maries-de-la-Mer ont constitué un syndicat mixte à l'instar de tous les autres parcs.
Toutefois, dans un arrêt du 19 février 2007, le Conseil d'État a considéré que ce changement d'organisme gestionnaire du parc nécessitait la révision de la charte du parc dans son intégralité et que cette révision aurait dû être conduite par le précédent gestionnaire, c'est à dire par la fondation. Il a en conséquence annulé le décret du 9 novembre 2004 qui transférait la gestion du parc de la fondation vers le syndicat mixte créé à cet effet.
Face à cette seconde annulation, il devient indispensable de stabiliser et conforter la situation juridique du parc.
L'État, conformément aux dispositions du code de l'environnement et à la volonté clairement exprimée des collectivités territoriales concernées, entend confier la gestion du parc à un syndicat mixte. Toutefois, il est nécessaire de prévoir que le syndicat mixte compte des représentants des propriétaires privés : en effet, les circonstances particulières locales, notamment historiques, hydro-morphologiques et foncières, font que les propriétaires fonciers privés concernés par le parc naturel régional de Camargue ont vocation à faire partie du syndicat mixte « ouvert » de gestion du parc.
Dans ce contexte, seul le recours à la loi permet de trouver une issue rapide et juridiquement satisfaisante ainsi que l'a suggéré la section du rapport et des études du Conseil d'État.
Le présent projet de loi vise ainsi à concilier le droit commun qui veut qu'un parc naturel régional soit aménagé et géré par un syndicat mixte, le souci de ne pas remettre en cause le syndicat de gestion constitué par les collectivités territoriales et enfin, le souhait, exprimé par l'ensemble des acteurs locaux le 2 août 2007, de sauver le parc et de voir des représentants des propriétaires fonciers participer aux instances délibérantes de ce syndicat mixte.
L' article 1 er vise à garantir la stabilité juridique de tous les actes pris par le syndicat mixte de gestion du parc naturel de Camargue (qu'il s'agisse d'actes unilatéraux ou de contrats), en les validant, sous réserve des décisions de justice passées en force de chose jugée, à raison de l'irrégularité de la création du syndicat mixte ou de l'irrégularité du transfert de gestion du parc de la fondation au syndicat mixte. L'intérêt général impérieux qui s'attache à la sauvegarde du PNR de Camargue autorise cette validation.
L'article 2 tend, en premier lieu, à confirmer que le parc naturel régional de Camargue ne peut être géré que par un syndicat mixte dit « ouvert » en application de l'article L. 333-3 du code de l'environnement modifié par la loi du 14 avril 2006 et répute non écrite toute mention contraire. Par détermination de la loi, toute mention contraire est réputée non écrite. Ceci revient à dire notamment que, s'agissant de la charte du parc de Camargue adoptée par le décret n° 98-97 du 18 février 1998, il conviendra désormais de lire : « syndicat mixte » au lieu et place de : « fondation ».
En second lieu, il modifie et stabilise pour l'avenir le syndicat mixte existant, constitué en 2004 entre les communes d'Arles et des Saintes-Maries-de-la-Mer, la région de Provence-Alpes-Côte-d'Azur, le département des Bouches du Rhône, la chambre de commerce et d'industrie du Pays d'Arles, la chambre de métiers et de l'artisanat des Bouches-du-Rhône et la chambre d'agriculture des Bouches-du-Rhône. Il prévoit par ailleurs l'adhésion, conformément à l'accord intervenu le 2 août 2007, du syndicat mixte de gestion des associations syndicales du Pays d'Arles, par dérogation à l'article L. 5721-2 du code général des collectivités locales. Ce nouveau membre, qui regroupe depuis 1995 les associations syndicales de propriétaires concernées par le parc, a pour objet la préparation de tous les actes de gestion administrative et financière et de toutes les affaires contentieuses des associations syndicales autorisées. Cet établissement disposera, au comité syndical, de trois délégués dotés chacun d'une voix et, au bureau, d'un représentant.
Les statuts du syndicat mixte ainsi modifiés sont approuvés par la loi.
Après avoir doté le syndicat mixte de gestion du parc naturel régional de Camargue d'une base juridique solide et en avoir légèrement modifié la composition, la loi, par son article 3 , vise à le soumettre pour l'avenir au droit commun des syndicats mixtes, pour éviter le recours à la procédure législative pour tous les actes qui concerneront son autorisation, ses membres et ses statuts.
Enfin, l'article 4 tend à permettre au syndicat mixte de mener à son terme la révision de la charte du parc et d'aboutir à un renouvellement du classement du parc. Cette opération nécessite des concertations de plusieurs mois avec les acteurs locaux et a été interrompue depuis la décision de février 2007 du Conseil d'État. L'article 4 prolonge en conséquence le classement de 3 ans, jusqu'au 18 février 2011.
PROJET DE LOI
Le Premier ministre,
Sur le rapport du ministre d'État, ministre de l'écologie, du développement et de l'aménagement durables,
Vu l'article 39 de la Constitution,
Décrète :
Le présent projet de loi relatif au parc naturel régional de Camargue, délibéré en Conseil des ministres après avis du Conseil d'État, sera présenté au Sénat par le ministre d'État, ministre de l'écologie, du développement et de l'aménagement durables, qui sera chargé d'en exposer les motifs et d'en soutenir la discussion.
Article 1 er
Sont validés, sous réserve des décisions de justice passées en force de chose jugée, les actes pris par le syndicat mixte de gestion du parc naturel régional de Camargue créé par l'arrêté du préfet des Bouches-du-Rhône du 1 er décembre 2004, en tant qu'ils seraient contestés par les moyens tirés de l'irrégularité de la création de ce syndicat ou de son incompétence pour gérer le parc naturel régional de Camargue.
Article 2
Nonobstant toute mention contraire, le syndicat mixte dénommé « Syndicat mixte de gestion du parc naturel régional de Camargue » assure l'aménagement et la gestion du parc naturel régional de Camargue ainsi que l'ensemble des missions qui s'y rattachent, à l'exclusion de tout autre organisme de gestion.
Sont membres de ce syndicat la commune d'Arles, la commune des Saintes-Maries-de-la-Mer, la région de Provence-Alpes-Côte-d'Azur, le département des Bouches-du-Rhône, la chambre de commerce et d'industrie du Pays d'Arles, la chambre d'agriculture des Bouches-du-Rhône, la chambre des métiers et de l'artisanat des Bouches-du-Rhône ainsi que, par dérogation à l'article L. 5721-2 du code général des collectivités territoriales, le syndicat mixte de gestion des associations syndicales du Pays d'Arles.
Le syndicat mixte de gestion des associations syndicales du Pays d'Arles est représenté au comité syndical du syndicat mixte de gestion du parc naturel régional de Camargue par trois délégués, qui représentent chacun par leur vote une voix, et au bureau du même syndicat par un représentant.
Le syndicat mixte de gestion du parc naturel régional de Camargue est autorisé et ses statuts, qui reprennent les dispositions annexées à l'arrêté du 1 er décembre 2004 modifiées en application des deuxième et troisième alinéas, sont approuvés par la présente loi.
Article 3
Le retrait de l'autorisation du syndicat et la dissolution de celui-ci sont décidés selon les règles de droit commun. L'adhésion et le retrait de ses membres ainsi que la modification de ses statuts s'effectuent dans les conditions prévues par lesdits statuts, ou, à défaut, dans les conditions du droit commun.
Article 4
Par dérogation à l'article L. 333-1 du code de l'environnement, la durée de validité du classement du parc naturel régional de Camargue est prolongée jusqu'au 18 février 2011.
Fait à Paris, le 3 octobre 2007
Signé : FRANÇOIS FILLON
Par le Premier ministre :
Le ministre d'État, ministre de l'écologie, du développement et de l'aménagement durables,
Signé : JEAN-LOUIS BORLOO