EXPOSÉ DES MOTIFS
Mesdames, Messieurs,
Notre pays est champion du monde en nombre de jours de grève, 114 jours de grève en moyenne pour 1000 salariés quand le taux de syndicalisation, lui, ne cesse de baisser pour atteindre moins de 10 % en 2022 selon le ministère du travail. Aujourd'hui, les mobilisations syndicales et donc les grèves, ne sont plus suivies que par une minorité de travailleurs, prenant en otage le reste de leur profession ainsi que l'ensemble des Français. Dernier exemple en date, en décembre, l'absence d'effectivité du service public ferroviaire en pleine fête de Noël due à une minorité de grévistes a été de nature à pénaliser fortement les usagers, avec une absence de solutions alternatives. Ce qui a conduit à une exaspération légitime et compréhensible des Français. Plus de 200 000 Français ont été privés du traditionnel rassemblement familial dans le cadre des fêtes de Noël ! Ce mouvement de grève qui s'est construit à l'écart des syndicats sous une forme assez opaque dans un cadre de surenchère sociale s'apparente une nouvelle fois à une atteinte disproportionnée au principe de continuité de service public. Est-il acceptable qu'une minorité d'individus soit en mesure de priver des centaines de milliers de Français d'un réveillon en famille oubliant qu'un service public est d'abord et avant tout un service au public ? Cela apparaît en totale contradiction avec l'article 4 de la Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen, qui rappelle que « La liberté consiste à pouvoir faire tout ce qui ne nuit pas à autrui ». De la fiabilité des transports publics dépend la liberté d'aller et venir de nos compatriotes.
Loin d'être rares, ces grèves lors de la période des fêtes de fin d'année sont récurrentes. Il s'agit même d'une tradition récurrente : 14 mouvements sociaux à la SNCF ont été enregistrés sur les 20 dernières années.
Cette réalité franco-française de la gréviculture est à des années-lumière de nos voisins européens. Ainsi, l'Italie avait fait le choix d'instaurer en 1990 et en 2000, un service minimum dans les transports afin de garantir la liberté de circulation durant les jours de grèves. Nos voisins italiens sont allés plus loin en rendant impossible, pour certains secteurs d'activité stratégiques, d'exercer son droit de grève à certains moments de l'année (vacances d'été, Noël, Pâques et consultations électorales). Pourtant, le droit de grève est consacré dans leur constitution exactement de la même manière que dans notre loi fondamentale.
Force est de constater qu'il y a certaines périodes importantes de l'année où la liberté d'aller et venir de nos concitoyens doit primer sur le droit de grève. En souhaitant mieux encadrer l'exercice du droit de grève, nous ne disons rien de plus que le Préambule de la Constitution de 1946 qui déclare que le droit de grève s'exerce dans le cadre des lois qui le réglementent. En conséquence de quoi, le droit de grève n'est pas un principe absolu, des limites pouvant y être apportées. Encadrer le droit de grève relève donc de la responsabilité du législateur. Ainsi, qu'un service garanti dans les transports publics soit proposé aux Français dans des périodes les plus cruciales n'entrave en rien la recherche permanente du point d'équilibre entre deux principes à valeur constitutionnelle à savoir le droit de grève et la continuité du service public.
C'est toute l'ambition de cette proposition de loi : assurer un service de transport en commun permettant de satisfaire un besoin essentiel de la population durant des périodes cruciales de l'année, à l'image de nos voisins européens.
Ainsi, la présente proposition de loi vient compléter le code du travail en y ajoutant un nouveau chapitre au sein du titre relatif à l'exercice du droit de grève. En ne créant qu'un seul nouvel article, cette proposition de loi tend à préciser qu'il est impossible pour les personnels des transports en commun, du secteur public comme privé, d'exercer leur droit de grève la veille, le lendemain et le jour même d'un jour férié, ainsi que les deux premiers et deux derniers jours de chaque période de vacances scolaires. Elle vise volontairement l'ensemble des transports en commun, les transports publics et les transports assurés par des entreprises privées, qu'il s'agisse de transport maritime, aérien, terrestre ou ferroviaire.