EXPOSÉ DES MOTIFS
Mesdames, Messieurs,
La présente proposition de loi s'inscrit au carrefour de deux préoccupations politiques majeures. En premier lieu, elle répond à des enjeux de renforcement de l'égalité territoriale dans notre pays, traduisant la volonté de ses auteurs de lutter contre l'enclavement de certains territoires et le recul de leur attractivité. En deuxième lieu, elle répond à un enjeu fondamental aujourd'hui de pouvoir d'achat - voire même de pouvoir de vivre - de nos concitoyens, et notamment de ceux en situation de fragilité financière.
Pour cela, elle traite des enjeux d'accessibilité bancaire. En effet, nombreux sont nos concitoyennes et nos concitoyennes à connaître aujourd'hui un rapport dégradé à l'institution bancaire, pour des raisons tant territoriales que sociales. C'est pourquoi il est aujourd'hui nécessaire de renforcer l'inclusion bancaire, qui participe au processus d'inclusion dans la vie économique et sociale, par une régulation accrue de ce secteur d'activité.
Les Sénateurs socialistes, écologistes et républicains partagent en ce sens les préoccupations des syndicats du secteur bancaire et des associations de consommateurs, auditionnés par leurs soins et qui ont attesté de l'existence de pratiques visant à réduire la portée de la législation en vigueur et des manques de cette dernière.
Par ce texte, ils entendent aussi poser indirectement la question du maintien, dans notre société, d'un système de paiement à la fois inclusif et qui permette, en toute liberté et sans traçage, le paiement en liquide, d'achats de la vie quotidienne.
C'est l'objet de la présente proposition, divisée en trois chapitres traitant respectivement de l'accessibilité territoriale bancaire, de l'accessibilité sociale bancaire, et de l'effectivité du droit au compte garanti formellement par la législation mais dont l'application demeure perfectible.
L'article premier de cette proposition modifie la mission de service public du groupe La Poste, pour y inclure une composante territoriale : cette mission apparait de plus en plus fondamentale dans la mesure où de nombreux territoires, tant ruraux que périurbains ou populaires, connaissent un recul net de la présence bancaire. Nos concitoyennes et concitoyens sont de plus en plus nombreux à devoir parcourir parfois plusieurs kilomètres pour accéder à un distributeur automatique de billet, ce qui pose des difficultés pratiques parfois conséquentes dans leur quotidien et qui constitue une rupture de l'égalité territoriale.
En complément, l'article 2 crée un fonds de garantie de la présence bancaire territoriale alimenté par une taxation assise sur les bénéfices des établissements bancaires, qui se veut modérée, mais aussi par une contribution versée par chaque établissement bancaire pour chaque fermeture de distributeur automatique de billet dans une zone peu densément équipée. Ainsi, la loi intégrera un principe de responsabilité du secteur en la matière.
Les recettes de ce fonds seront mises à disposition du groupe La Poste qui pourra ainsi, sans impact sur ses équilibres budgétaires actuels, veiller à une présence bancaire appropriée sur l'ensemble de nos territoires.
En matière d'accessibilité sociale, parce que l'on constate le faible niveau d'information de nos concitoyennes et concitoyens en matière de droit au compte, l'article 3 prévoit un renforcement de l'information que les agences bancaires sont dans l'obligation de fournir par voie d'affichage dans les agences.
Parce que l'on constate aujourd'hui que l'essentiel des recettes générées pour les établissements bancaires proviennent des personnes les plus fragiles, l'article 4 pour sa part vise à modifier l'offre spécifique en la rendant proportionnelle aux revenus des personnes concernées pour qu'elle soit plus juste et plus efficace.
Dans la même logique, l'article 5 prévoit l'inclusion dans cette offre d'une autorisation de découvert assortie de tarifs proportionnels et appropriés.
Enfin, l'article 6 vise à intégrer dans l'offre spécifique des tarifs adaptés de frais bancaires et non seulement aux frais de gestion tels que c'est le cas actuellement, afin d'éviter des effets de transferts de tarification entre différentes lignes au détriment des clients.
Le dernier chapitre de la proposition est composé d'un unique article 7 et vise à rendre obligatoire le prononcé de sanctions pécuniaires par la commission de sanctions de l'autorité de contrôle prudentiel et de résolution en cas de non-respect de la législation en matière de droit au compte et d'offre spécifique, afin de renforcer l'effectivité de la législation en vigueur.