EXPOSÉ DES MOTIFS
Mesdames, Messieurs,
En 2018, on a enregistré 5,6 millions de ventes de voitures particulières d'occasion. Les ventes de ce type de véhicules dépassent les 5 millions d'unités par an depuis 2000.
Lors de la vente ou de la cession à titre gratuit d'un véhicule d'occasion, le vendeur doit remettre à l'acheteur le certificat d'immatriculation (ex : carte grise), un exemplaire rempli du certificat de cession, le certificat de situation administrative datant de moins de 15 jours qui atteste que le véhicule ne fait pas l'objet d'un gage ou d'une opposition et qu'il peut être vendu et immatriculé au nom de son nouveau propriétaire. Si le véhicule a plus de 4 ans et n'est pas dispensé du contrôle technique, il doit également remettre la preuve du contrôle technique qui doit dater de moins de 6 mois ainsi que le code de cession délivré par le site ANTS qui sécurise et facilite les démarches administratives du futur propriétaire du véhicule.
L'acheteur dispose d'un délai d'un mois pour faire immatriculer le véhicule à son nom. Dans les 15 jours suivant la cession, le vendeur doit effectuer la déclaration de cession en utilisant un des 3 exemplaires du formulaire cerfa n° 15776*01.
Un acheteur peut se retourner contre son vendeur, même particulier, au titre de la garantie légale des vices cachés. Cependant, plusieurs conditions doivent être remplies pour engager la responsabilité du vendeur. L'article 1641 du code civil prévoit que « le vendeur est tenu de la garantie à raison des défauts cachés de la chose vendue qui la rendent impropre à l'usage auquel on la destine, ou qui diminuent tellement cet usage que l'acheteur ne l'aurait pas acquise ou n'en aurait donné qu'un moindre prix, s'il les avait connus » .
Le vice doit être suffisamment important pour affecter l'usage du véhicule. Il doit trouver son origine antérieurement à la vente et ne doit pas être apparent. Enfin, il doit s'agir d'un vice dont l'acheteur n'avait pas, et ne pouvait pas raisonnablement avoir connaissance. La charge de la preuve du vice caché incombe à l'acheteur, et se rapporte notamment par voie d'expertise contradictoire du véhicule qu'il doit organiser et payer. Si le vice caché est démontré, l'acheteur peut demander la prise en charge de la panne ou demander l'annulation de la vente.
En principe, il n'est pas obligatoire que le contrat soit écrit. Le contrat de vente n'oblige en effet pas de forme particulière, sauf exception législative (par exemple, la vente d'une maison, ou la souscription d'une assurance).
Si l'article 1359 du code civil et le décret n° 80-533 du 15 juillet 1980 imposent la rédaction d'un écrit pour tout acte juridique portant sur une somme ou une valeur excédant 1 500 euros, cette disposition méconnue du grand public est insuffisante. D'une part, le contenu de cet écrit n'est pas précisé. D'autre part, elle ne s'applique pas aux ventes de véhicules d'occasion pour une somme inférieure à 1 500 euros, véhicules par hypothèse anciens et pour lesquels la parfaite information de l'acheteur est indispensable.
Compte tenu de l'augmentation du nombre de fraudes à l'occasion de la vente d'un véhicule d'occasion, il est devenu nécessaire non seulement de s'assurer de la parfaite information du vendeur, mais de l'assister dans la conclusion de cette vente en rendant obligatoire la conclusion d'un contrat de vente écrit.
C'est l'objet de l'article 1 er de la présente proposition de loi. La rédaction de ce contrat permettra d'apporter la preuve de la réalité du consentement et de l'objet des obligations consenties. Il pourra être l'occasion également de faire intervenir, au titre de sa mission de service public de sécurité publique consacrée par le législateur dans le cadre de la procédure dite « véhicules gravement endommagés » (articles L. 327-1 à L. 327-5 du code de la route) et selon des modalités financières forfaitaires négociées, un expert automobile qui pourra oeuvrer à la construction du dossier et confirmer l'état global du véhicule, ainsi que son kilométrage.
Dans un contexte où la moitié des ventes de véhicules d'occasion comporterait des fraudes mineures ou graves, le ministère de l'intérieur a, au mois de janvier 2019, mis en service la plateforme histovec . Ce service public gratuit et officiel permet de consulter l'historique d'un véhicule avant de l'acheter et en particulier la date de la première mise en circulation du véhicule, les changements successifs de propriétaire, s'il a subi des sinistres qui ont donné lieu à une procédure « véhicule à réparation contrôlée par un expert automobile », la situation administrative du véhicule, mais aussi ses caractéristiques techniques.
Si la mise en service de cette plateforme permet assurément d'un peu plus sécuriser la vente de véhicules d'occasion, elle ne comporte cependant que les seules informations dont dispose le service d'immatriculation des véhicules. Il ne retrace pas l'historique du kilométrage du véhicule vendu. Or, si en droit français la fraude au kilométrage est un acte de tromperie au sens de l'article L. 441-1 du code de la consommation sanctionné par une peine de 2 ans de prison et de 300 000 euros d'amende, ce type de fraude ne cesse pourtant d'augmenter. Aussi, l'article 1 er de la présente proposition de loi a également pour objet de prévoir, comme cela existe en Belgique et aux Pays-Bas, la remise d'un certificat retraçant l'historique du kilométrage des véhicules, tel qu'il est notamment relevé à l'occasion d'un passage dans un centre de contrôle technique (ces données sont en effet déjà collectées par l'UTAC, désigné en tant qu'Organisme technique central) et plus généralement par tout professionnel qui intervient sur le véhicule.
Dans cet esprit, il prévoit enfin la création d'un registre national qui rassemble l'ensemble des données se rapportant à un véhicule. Il s'agit de donner une existence légale à la plateforme histovec et d'aller encore plus loin en constituant une véritable carte d'identité du véhicule. Ce registre devra notamment comporter l'historique du kilométrage des véhicules, tel qu'il est notamment relevé à l'occasion d'un passage dans un centre de contrôle technique ou par tout professionnel qui intervient sur le véhicule, la date de la première mise en circulation du véhicule, les changements successifs de propriétaire, s'il a subi des sinistres qui ont donné lieu à une procédure « véhicule à réparation contrôlée par un expert automobile », la situation administrative du véhicule, ainsi que ses caractéristiques techniques.
L'article 2 renvoie à un décret en Conseil d'État le soin de préciser les conditions de création de ce registre et de délivrance de ce certificat. Il devra également prévoir les conditions de mutualisation des données rassemblées dans le registre national avec celles d'autres États comme la Belgique.
Enfin, l'article 3 prévoit, pour plus de simplicité , l'élaboration, sous l'égide des pouvoirs publics, d'un contrat de vente type, élaboré après consultation des principales associations de consommateurs concernées et des représentants des experts en automobile. Il est important que ce contrat reprenne les informations importantes, et à ce titre notamment, la marque et le modèle du véhicule, le kilométrage affiché au compteur au moment de la vente, le prix de vente, la date de la vente, et enfin l'identité, l'adresse et la signature de l'acheteur et du vendeur.
Tel est le sens de la proposition de loi, que nous vous demandons, Mesdames, Messieurs, de bien vouloir adopter.