EXPOSÉ DES MOTIFS
Mesdames, Messieurs,
Emmanuel MACRON et sa majorité parlementaire ont d'entrée marqué le quinquennat du sceau du libéralisme en supprimant, dès la première loi de finances, l'impôt de solidarité sur la fortune (ISF) appliqué aux biens mobiliers, c'est-à-dire, pour l'essentiel, les patrimoines financiers. Seule la fortune immobilière demeurait taxée.
Ce cadeau aux plus riches, de près de 4 milliards d'euros, qui relève d'un dogmatisme étroit, a pu étonner par son aspect provocateur.
Par cette mesure, environ 350 000 contribuables échappent à l'imposition sur la fortune. Les 0,1 % les plus riches dont le patrimoine est composé à 90 % de revenus financiers ont été ainsi pleinement satisfaits.
Le « nouveau monde » s'affirma d'entrée comme celui du capital opposé à celui du travail.
Cette mesure imposée par un Président trop sûr de son fait a d'autant plus choqué que, « en même temps », étaient proposées et adoptées des mesures comme la baisse de l'aide personnalisée au logement (APL) et l'augmentation de la contribution sociale généralisée (CSG) pour les retraités.
Aujourd'hui, 77 % de nos concitoyens souhaitent le rétablissement de l'ISF dans sa totalité et Emmanuel MACRON a gagné au passage ses galons de « Président des riches ».
Ainsi, après 18 mois, cette décision se paye « cash » pour le pouvoir actuel.
Le rétablissement de l'ISF que les auteurs ainsi que leurs collègues députés du groupe de la Gauche démocrate et républicaine (GDR) proposent depuis l'automne 2017 avec de nombreux acteurs politiques et du mouvement social et syndical est également l'une des toutes premières revendications du mouvement dit des « Gilets jaunes » en cours depuis la fin octobre.
Ces femmes et ces hommes au quotidien si difficile et à la colère si vive ont, pour la très grande majorité d'entre eux, vu clair : pour augmenter le pouvoir d'achat, développer le service public, en un mot, assurer la justice sociale, il faut une justice fiscale fondée sur une nouvelle répartition des richesses créées par le travail, dont l'ISF est un symbole.
Bien entendu, cet impôt devrait être accompagné d'autres mesures d'envergure : taxation des hauts revenus par un nouveau barème de l'impôt sur les revenus, lutte déterminée contre l'évasion fiscale, abrogation de la Flat Tax, juste contribution à l'impôt des multinationales actives sur notre territoire...
Cependant, le bras de fer autour de l'ISF revêt une grande importance.
Si Emmanuel MACRON repousse d'emblée dans sa « lettre aux Français » suite à l'ouverture du « grand débat national », rendue publique le 13 janvier dernier, le retour à l'ISF, c'est qu'il sent bien que l'avenir de sa politique libérale dévouée au marché financier est en jeu.
Le changement de politique se joue en partie sur ce symbole fort du retour de l'ISF.
Les sénatrices et sénateurs du groupe communiste républicain citoyen et écologiste (CRCE) qui ont toujours préconisé un fort développement de la solidarité fiscale, en s'opposant par exemple au relèvement du plancher de l'ISF sous la présidence de Nicolas Sarkozy de 800 000 euros de patrimoine à 1,3 million d'euros, mesure jamais remise en cause depuis, proposent à nouveau de rétablir l'ISF après l'avoir fait durant les débats relatifs au projet de loi de finances pour 2019.
Ils proposent de le faire, dans la version supprimée malgré ses insuffisances, par le vote de l'article unique de la présente proposition de loi.
Ils estiment nécessaire de faire céder le pouvoir sur ce point.
Une fois cette bataille gagnée, des voies nouvelles vers ce progrès social pourront s'ouvrir.