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PROJET DE LOI

autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française

et le Gouvernement de la République libanaise relatif à la coopération en matière

de sécurité intérieure, de sécurité civile et d'administration

NOR : MAEJ1200610L/Bleue-1

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ÉTUDE D'IMPACT

I. - SITUATION DE RÉFÉRENCE ET OBJECTIFS DE L'ACCORD OU CONVENTION :

Le présent accord vise à renforcer la coopération bilatérale entre la France et le Liban en matière de sécurité intérieure, de sécurité civile et d'administration.

Depuis 1994, dans le cadre du protocole de coopération signé à Paris entre la France et le Liban le 14 octobre 1993 1 ( * ) , les unités concourant à la sécurité intérieure des deux pays coopèrent à travers notamment la représentation de la direction de la coopération internationale (DCI) à Beyrouth. Mais, ce protocole est très général et, jusqu'à présent, aucune convention spécifique à la sécurité intérieure et la sécurité civile n'encadrait ni n'encourageait ces échanges.

Cet accord traduit donc la volonté des deux parties de conférer une assise juridique solide à la coopération franco-libanaise dans le domaine de la sécurité intérieure et de la sécurité civile.

Ainsi, la France et le Liban :

- s'engagent à approfondir leur coopération sur des axes thématiques clairement définis ;

- fixent les moyens et procédures de cette coopération ;

- s'engagent à s'informer de toute action criminelle susceptible de menacer les intérêts de l'une ou l'autre des parties.

Les échanges et la coopération prévus par cet accord ainsi que les incitations qui en découleront devraient permettre le renforcement de l'Etat de droit au Liban. A titre d'exemples, il est d'ores et déjà prévu que des échanges ou des actions de coopération soient menés dans les domaines suivants : lutte contre le terrorisme, lutte contre la criminalité organisée (trafic de stupéfiants, infractions à caractère économique et financier, traite des êtres humains, immigration clandestine, faux et contrefaçon, trafic d'armes, trafic de biens culturels, cybercriminalité), la sûreté du transport aérien, maritime et ferroviaire, la sécurité routière, le maintien de l'ordre, les technologies de sécurité, la sécurité civile et la gestion des crises, l'administration territoriale et la gestion décentralisée.

Les objectifs thématiques de l'accord s'articulent parfaitement avec la politique de l'Union européenne en la matière : la délégation de la Commission Européenne à Beyrouth propose, pour la tranche 2011 - 2013, des programmes de coopération dans trois domaines : police judiciaire, police de proximité et maintien de l'ordre.

Cet accord est par ailleurs conforme au modèle type d'accord de sécurité intérieure proposé par la France aux Etats n'offrant pas des conditions de protection des données individuelles équivalentes à celles exigées par la législation française et européenne.

II. - CONSÉQUENCES ESTIMÉES DE LA MISE EN oeUVRE DE L'ACCORD OU CONVENTION :

- Conséquences économiques :

La lutte contre les infractions à caractère économique et financier, dont le blanchiment d'argent, constitue un volet majeur de la coopération définie par le présent accord. Sa mise en oeuvre devrait donner des résultats importants. En effet, le dispositif libanais de lutte contre la délinquance financière demeure fragile : son cadre juridique mérite d'être modernisé et la spécialisation des magistrats et des policiers renforcée. Concernant la lutte contre le blanchiment, la protection du secret bancaire et le rôle, quasi exclusif en la matière, dévolu à un « Comité des Enquêtes Spéciales » de la Banque du Liban rendent difficile la répression des fraudes, alors que, parallèlement, la majorité des commissions rogatoires internationales transmises à l'Ambassade de France à Beyrouth par les autorités françaises (une dizaine par an, en moyenne) concernent des affaires financières.

- Conséquences financières :

L'accord précise que le financement de la coopération est assuré par les Parties contractantes, dans le respect et la limite de leurs disponibilités budgétaires.

En pratique, il apparaît que la part du financement assurée par la partie libanaise pour les actions de coopération menées à son profit, est en augmentation constante depuis 2007. Elle devrait continuer à se renforcer, les Libanais ayant de plus en plus tendance à financer eux-mêmes les formations qu'ils souhaitent. Ainsi, en 2009, sur les 1,5 million d'euros d'actions de coopération menées avec la France, 50% ont été pris en charge par la partie libanaise qui a par ailleurs assuré près de 100% du financement supplémentaire nécessaire en cours d'année pour la conduite d'actions complémentaires.

Par ailleurs, le service de sécurité intérieure, service français en charge des actions de coopération, adapte sa stratégie au contenu de la programmation européenne qui propose au Liban, pour la période 2011-2013, des programmes de coopération sur la base d'un financement de 12 millions d'euros (projet « SAROL II ») dont la coopération technique bilatérale pourrait profiter. La mise en oeuvre de l'accord pourrait donc notamment avoir pour conséquence de diminuer l'importance de la participation financière de la France aux actions de coopération policière avec le Liban.

- Conséquences environnementales :

L'impact environnemental de cet accord est indirect, mais cependant non négligeable. La formation des policiers et des autres acteurs de la sécurité intérieure (magistrats notamment) à la protection de l'environnement, le renforcement du droit interne et de ses moyens d'application ainsi que la création de services spécialisés (le Liban a participé à l'initiative européenne sur les pollutions maritimes « Polmar ») contribueront à inciter les services policiers et judiciaires à réprimer les atteintes à l'environnement.

- Conséquences juridiques :

Cet accord permettra de faciliter les échanges entre les deux Etats dans le domaine de la coopération en matière de sécurité intérieure et de sécurité civile. Il n'entraînera pas de modification de la législation nationale avec laquelle il s'articule. L'article V de l'Accord relatif aux échanges d'informations entre les deux parties précise en effet qu'ils ne peuvent être réalisés que « dans  le respect des législations nationales ». L'article VII de l'Accord comprend en outre une clause de sauvegarde qui permet à l'une des deux parties de rejeter une demande de coopération si elle estime que cette dernière « est susceptible de porter atteinte à la souveraineté, à la sécurité, à l'ordre public, aux règles d'organisation et de fonctionnement de l'autorité judiciaire ou à d'autres intérêts essentiels de son Etat ».

Le traitement et la protection des données à caractère personnel et des autres informations fournies par les Parties sont, pour la France, assurés conformément à :

- l'article 24 de la loi n°2003-239 du 18 mars 2003 pour la sécurité intérieure ;

- l'article 68 de la loi n°78-17 modifiée du 6 janvier 1978 dite « Informatique et Libertés » ;

- la directive 95/46/CE du Parlement Européen et du Conseil de l'Union européenne du 24 octobre 1995 relative à la protection des personnes physiques à l'égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données ;

- la décision-cadre 2008/977/JAI du Conseil de l'Union européenne du 27 novembre 2008 relative à la protection des données à caractère personnel traitées dans le cadre de la coopération policière et judiciaire en matière pénale ;

- et la Convention du Conseil de l'Europe pour la protection des personnes à l'égard du traitement automatisé des données à caractère personnel, adoptée à Strasbourg le 28 janvier 1981

Le Liban n'étant pas membre de l'Union européenne, il ne peut se voir transférer des données à caractère personnel que s'il assure un niveau de protection suffisant de la vie privée et des libertés et droits fondamentaux des personnes à l'égard du traitement dont ces données font l'objet, comme le prévoit l'article 68 de la loi n° 78-17 précitée. Par ailleurs, la CNIL (Commission Nationale de l'Informatique et des Libertés) estime que le Liban ne dispose pas d'une législation adéquate en matière de protection des données à caractère personnel 2 ( * ) . A ce jour le Liban n'a de plus pas fait l'objet d'une reconnaissance de protection adéquate par la Commission européenne 3 ( * ) .

Dans l'attente, et sous réserve de l'application de l'article 69 de la loi « Informatique et Libertés » qui permet sous certaines conditions 4 ( * ) le transfert de données à caractère personnel par exception à l'interdiction prévue à l'article 68 précité, l'Accord permettra de développer l'échange d'informations autres que les données à caractère personnel.

Par ailleurs, cet accord s'inscrit dans le cadre international de la lutte contre le terrorisme, le crime organisé et le trafic illicite de stupéfiants. Il est conforme à la convention de Palerme (Résolution 55/25 de l'Assemblée Générale des Nations Unies du 15 novembre 2000 adoptant la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée), à la stratégie anti terroriste mondiale des Nations Unies adoptée par la Résolution 60/288 du 20 septembre 2006 de l'Assemblée Générale des Nations Unies et aux conventions des Nations Unies sur le trafic de stupéfiants (convention unique sur les stupéfiants du 30 mars 1961 modifiée par le protocole du 25 mars 1972, convention sur les substances psychotropes du 21 février 1972, convention de Vienne du 20 décembre 1988 contre le trafic illicite de stupéfiants et de substances psychotropes).

- Conséquences administratives :

L`accord vise expressément la coopération en matière d'administration territoriale et de gestion décentralisée. L'objectif principal de la partie libanaise est d'accroître la décentralisation au Liban. Elle a exprimé à plusieurs reprises le souhait que la France participe par des missions de conseil à la mise en oeuvre d'un plan d'action pour la décentralisation qui a été finalisé, après un an de consultations internes, fin 2009.

III. - HISTORIQUE DES NÉGOCIATIONS :

L'accord entre le gouvernement de la République française et le gouvernement de la République libanaise relatif à la coopération en matière de sécurité intérieure, de sécurité civile et d'administration est le résultat de négociations engagées en avril 2009, à l'initiative de la Partie française, à l'issue d'une rencontre entre les ministres de l'Intérieur (Beyrouth, 20 avril 2009).

L'accord vient compléter le protocole de coopération entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République libanaise signé le 14 octobre 1993 à Paris.

Il s'inscrit dans la continuité du document cadre de partenariat France-Liban 2008-2012 conclu le 20 novembre 2008 à Beyrouth.

Les négociations proprement dites, notamment sur la traduction en langue arabe de certains termes, ont duré de novembre 2009 à la signature de l'accord par les deux ministres de l'intérieur, le 21 janvier 2010 à Paris.

IV. - ETAT DES SIGNATURES ET RATIFICATIONS

L'accord a été signé le 21 janvier 2010, par Monsieur François Fillon, Premier Ministre français et par son homologue libanais, M. Saad Hariri, Premier Ministre libanais, à l'occasion de la visite de ce dernier à Paris.

V. - DÉCLARATIONS OU RÉSERVES

Aucune déclaration, aucune réserve.


* 1 http://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=LEGITEXT000005618199&dateTexte=20120221

* 2 Voir le site Internet de la CNIL : http://www.cnil.fr/pied-de-page/liens/les-autorites-de-controle-dans-le-monde/ .

* 3 Le Conseil de l'Union européenne et le Parlement européen ont donné le pouvoir à la Commission de décider sur la base de l'article 25(6) de la directive 95/46/CE qu'un pays tiers offre un niveau de protection adéquat en raison de sa législation interne ou des engagements pris au niveau international.

* 4 L'article 69 de la loi n°78-17 du 6 janvier 1978 stipule notamment que «  le responsable d'un traitement peut transférer des données à caractère personnel vers un Etat ne répondant pas aux conditions prévues à l'article 68 si la personne à laquelle se rapportent les données a consenti expressément à leur transfert ou si le transfert est nécessaire à l'une des conditions suivantes : 1° A la sauvegarde de la vie de cette personne ; 2° A la sauvegarde de l'intérêt public ; 3° Au respect d'obligations permettant d'assurer la constatation, l'exercice ou la défense d'un droit en justice ; (...). Il peut également être fait exception à l'interdiction prévue à l'article 68, par décision de la Commission nationale de l'informatique et des libertés ou, s'il s'agit d'un traitement mentionné au I ou au II de l'article 26, par décret en Conseil d'Etat pris après avis motivé et publié de la commission, lorsque le traitement garantit un niveau de protection suffisant de la vie privée ainsi que des libertés et droits fondamentaux des personnes, notamment en raison des clauses contractuelles ou règles internes dont il fait l'objet. (...) ».

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