SUISSE
L'article 30-1 de la Constitution fédérale
énonce : "
Toute personne dont la cause doit être
jugée dans une procédure judiciaire a droit à ce que sa
cause soit portée devant un tribunal établi par la loi,
compétent, indépendant et impartial. Les tribunaux d'exception
sont interdits.
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I. LES JURIDICTIONS MILITAIRES
1. Les caractéristiques des juridictions militaires
Les
juridictions militaires sont des
juridictions spéciales
. La loi
de procédure pénale militaire du 23 mars 1979
pose,
dans son article premier, le principe de
l'indépendance de la justice
militaire
. Elle garantit par ailleurs aux militaires un jugement par leurs
propres juges.
Les juridictions militaires sont
permanentes
, le Conseil
fédéral a fixé le nombre de tribunaux du premier et second
degré.
Les juridictions militaires sont les mêmes en temps de paix et en temps
de guerre. Cependant en temps de paix, en principe, seules les infractions
militaires commises par les militaires en service relèvent de leur
juridiction. En temps de guerre, en revanche, leur compétence est
élargie.
La justice militaire est exclusivement rendue par des militaires, pendant la
durée d'accomplissement de leurs périodes
(3(
*
))
.
Les fonctions considérées comme spécialisées,
greffier, juge d'instruction, procureur et président de tribunal, sont
confiées à des militaires qui
, après avoir acquis une
certaine expérience de l'armée dans des unités
opérationnelles,
justifient de leur compétence juridique
(soit en présentant un diplôme, soit en attestant de leur
expérience professionnelle)
et demandent à accomplir le reste
de leurs périodes dans la justice militaire.
Ils sont alors
incorporés dans la justice militaire, qui constitue l'une des formations
de l'armée suisse. Les officiers peuvent occuper n'importe laquelle des
fonctions spécialisées de la justice militaire, tandis que les
sous-officiers et les hommes de troupe ne peuvent être que greffiers.
En revanche,
les juges qui siègent dans les juridictions militaires
sont choisis parmi les officiers et les sous-officiers des unités
opérationnelles
.
Aucun des acteurs de la justice militaire n'exerce donc ses fonctions
à titre principal, à l'exception de l'auditeur en chef
qui
administre la justice militaire sous la surveillance du ministère de la
Défense et qui est nommé par l'exécutif pour quatre ans.
A ce titre, c'est lui qui décide de l'affectation des militaires
incorporés dans la justice militaire. Dès leur affectation, les
officiers doivent se tenir constamment prêts à accomplir leur
service, qu'ils effectuent selon les besoins pendant toute la durée de
leurs obligations militaires. Les sous-officiers et les hommes de troupe, quant
à eux, peuvent être convoqués pour au plus vingt-quatre
jours de service par an pendant toute la durée de leurs obligations
militaires.
Les présidents de tribunaux ont rang de lieutenant-colonel ou de
colonel, les juges d'instruction de capitaine et les auditeurs de major.
2. L'organisation des juridictions militaires en temps de paix
a) Les juridictions du premier degré
Les
tribunaux militaires du premier degré ou
tribunaux de division
sont au nombre de quatorze. Leur compétence s'établit en fonction
de l'unité de l'inculpé, indépendamment du lieu de
l'infraction. Ils sont composés d'un président, qui a le grade de
colonel ou de lieutenant colonel, de quatre juges (deux officiers et deux
sous-officiers) et de leurs suppléants.
Les présidents, les juges et leurs suppléants sont nommés
par l'exécutif pour quatre ans. Les juges et juges suppléants
sont des officiers et sous-officiers provenant des unités
opérationnelles qui relèvent de la juridiction du tribunal.
b) Les juridictions du second degré
Les tribunaux militaires d'appel , au nombre de cinq (deux de langue française, deux de langue allemande et un de langue italienne) ont la même composition que les tribunaux de division. Toutefois, la loi de procédure pénale militaire précise que les juges et juges suppléants doivent posséder des connaissances juridiques.
c) La juridiction de cassation
Le Tribunal militaire de cassation est composé d'un président du grade de colonel, de quatre juges (deux officiers et deux sous-officiers) et de leurs suppléants. Le président désigne également son suppléant parmi les juges. Le président, les juges et leurs suppléants sont élus par l'Assemblée fédérale pour une période de quatre ans. Les juges et juges suppléants doivent avoir fait des études de droit complètes ou posséder un brevet cantonal d'avocat.
II. LA PROCÉDURE
1. L'instruction
Lorsque
l'infraction a été commise pendant le service, c'est le
commandant (du régiment, ou de la troupe, ou de l'état-major, ou
de l'école) qui est compétent pour ordonner l'enquête.
Lorsque l'infraction a été commise hors service, c'est l'auditeur
en chef qui a cette compétence.
L'enquête ordinaire
, qui a pour objet de déterminer si une
infraction pénale a été commise, est
dirigée par
un juge d'instruction du tribunal de division compétent
. Toutefois,
lorsque l'enquête est dirigée contre un officier supérieur,
l'auditeur en chef la confie à un officier supérieur de la
justice militaire.
L'article 107 de la procédure pénale militaire garantit
l'indépendance du juge d'instruction en interdisant toute
"
immixtion des supérieurs militaires de l'inculpé ou du
suspect
" dans la conduite de l'enquête. L'enquête n'est
pas publique.
Lorsque le juge d'instruction a terminé l'enquête, il en informe
les parties et transmet le dossier à l'auditeur. L'auditeur et les
parties peuvent requérir un complément d'enquête dans un
délai imparti par le juge d'instruction.
2. L'accusation
Devant
tous les tribunaux,
un auditeur
, c'est-à-dire un officier qui a
été incorporé à la justice militaire, soutient
l'accusation.
Devant les tribunaux militaires d'appel, tout comme devant le Tribunal
militaire de cassation, l'accusation doit être soutenue par un auditeur
du tribunal de division qui a rendu le premier jugement.
L'activité des auditeurs est contrôlée par l'auditeur en
chef, qui veille au bon déroulement des procédures pénales
militaires et qui peut donner des instructions.
3. Les droits de la défense
La
défense est assurée par un "
un citoyen suisse
autorisé à pratiquer le barreau dans un canton
".
Pendant l'instruction, la défense est autorisée
:
l'inculpé doit être informé, dès le premier
interrogatoire, qu'il peut faire appel à un avocat du barreau. En outre,
en cas d'inculpation grave et dans les affaires compliquées, le
président du tribunal de division désigne un avocat si
l'inculpé le demande ou si le juge d'instruction le propose.
Lors des débats
, en revanche,
l'assistance d'un avocat est
obligatoire
. Un système de défense d'office est
organisé et les tribunaux de division établissent chaque
année une liste des avocats commis d'office.
4. Les procédures simplifiées
L'auditeur peut remplir les fonctions de juge unique
et
rendre une ordonnance de condamnation :
- lorsqu'il estime que l'infraction est passible d'une sanction limitée
(peine privative de liberté d'au plus un mois et/ou amende de
1 000 francs suisses, c'est-à-dire environ
4 000 francs français) ;
- lorsque l'accusé reconnaît les faits et plaide coupable.
L'ordonnance de condamnation est rendue par écrit, donc sans
débat, et n'est que sommairement motivée. Cependant, dans les dix
jours qui suivent sa notification, le condamné et l'auditeur en chef
peuvent y faire opposition afin d'obtenir que la procédure ordinaire
soit suivie.
5. Les recours
La voie
de l'
appel
est ouverte contre les jugements des tribunaux de division,
à l'exception de ceux rendus par défaut.
La voie de la
cassation
est ouverte contre les jugements des tribunaux
militaires d'appel, contre les décisions pour lesquelles ils se
déclarent incompétents, contre les jugements rendus par
défaut par les tribunaux de division. Le Tribunal militaire de cassation
examine également les recours en
révision
.
En outre, lorsqu'une décision d'un tribunal militaire n'est susceptible
d'être attaquée ni en appel, ni en cassation, il existe un recours
spécifique auprès du Tribunal militaire de cassation.
III. LE STATUT DES MAGISTRATS MILITAIRES
Tous les acteurs de la justice militaire sont des militaires . Ils ne bénéficient d'aucun statut particulier. Cependant, du point de vue administratif, ils sont subordonnés à l'auditeur en chef, qui détient le pouvoir disciplinaire.