LA JUSTICE MILITAIRE
SERVICE DES AFFAIRES EUROPEENNES (décembre 2000)
Disponible
au format Acrobat ( 72 Ko )
Table des matières
- NOTE DE SYNTHÈSE
- ALLEMAGNE
- ESPAGNE
- ITALIE
- ROYAUME-UNI
- SUISSE
NOTE DE SYNTHÈSE
En
France,
la loi 82-261 du 21 juillet 1982
relative à
l'instruction et au jugement des infractions en matière militaire et de
sûreté de l'Etat et modifiant les codes de procédure
pénale et de justice militaire
a supprimé, en temps de paix,
les tribunaux permanents des forces armées ainsi que le Haut tribunal
permanent des forces armées
. En revanche, elle a maintenu, pour le
temps de guerre, des juridictions militaires.
Depuis l'entrée en vigueur de cette loi, les infractions au code de
justice militaire ainsi que les crimes et délits de droit commun commis
par les militaires dans l'exécution du service ne relèvent donc
plus de la compétence des juridictions militaires, mais de celles des
juridictions de droit commun.
Dans le ressort de chaque cour d'appel, il existe un tribunal de grande
instance et une cour d'appel spécialisés.
Le tribunal de
grande instance est chargé de l'instruction de toutes les affaires et du
jugement des délits, tandis que la cour d'assises juge les crimes.
L'accusation est assurée par le procureur de la République
territorialement compétent, l'instruction se déroule selon les
règles du code de procédure pénale et des magistrats
civils sont affectés au tribunal de grande instance. Quant à la
cour d'assises, elle est composée d'un président et de
six assesseurs, mais elle ne comporte pas de jurés.
Dans notre pays, les juridictions militaires ne se réunissent plus
qu'exceptionnellement en temps de paix : lorsque des armées
stationnent ou opèrent hors du territoire de la République et, le
cas échéant, lorsque l'état de siège ou
l'état d'urgence a été déclaré. En revanche,
en temps de guerre, il est établi des tribunaux territoriaux des forces
armées et un Haut tribunal des forces armées.
L'examen de l'organisation des juridictions militaires de cinq pays voisins,
l'Allemagne, l'Espagne, l'Italie, le Royaume-Uni et la Suisse montre le large
éventail des relations que la justice militaire peut entretenir avec la
justice civile.
Plus précisément,
- l'Allemagne a, comme la France, supprimé la justice militaire en
temps de paix ;
- à l'opposé, la Suisse dispose d'une justice militaire
totalement indépendante de la justice pénale ordinaire, mais qui
fonctionne selon les mêmes principes ;
- les justices militaires anglaise, espagnole et italienne sont plus ou moins
intégrées à la justice pénale ordinaire, mais sans
fonctionner nécessairement comme cette dernière.
1) L'Allemagne a supprimé les juridictions militaires en temps de
paix
En Allemagne,
les auteurs d'infractions pénales militaires sont
jugés, en temps de paix, par les juridictions pénales de droit
commun.
En revanche,
la Loi fondamentale prévoit l'institution de tribunaux
pénaux militaires en temps de guerre.
Elle précise que les
juges qui y siègent doivent "
satisfaire aux conditions requises
pour l'exercice des fonctions de
juge
" et que la Cour
fédérale de justice, c'est-à-dire l'équivalent de
notre Cour de cassation, fait fonction de cour militaire suprême.
2) La Suisse dispose d'une justice militaire totalement indépendante
de la justice pénale ordinaire, mais qui fonctionne selon les
mêmes principes
a) La justice militaire suisse est uniquement composée de
militaires
L'armée suisse est presque exclusivement composée
d'appelés, qui effectuent leur service militaire en plusieurs
périodes jusqu'à l'âge de cinquante-deux ou de
quarante-deux ans, selon qu'ils sont officiers ou non.
La justice
militaire est rendue par des militaires, pendant la durée
d'accomplissement de leurs périodes.
Les fonctions considérées comme spécialisées
,
c'est-à-dire celles de président de tribunal, procureur, juge
d'instruction et greffier,
sont confiées à des militaires
qui, après avoir acquis une certaine expérience de
l'armée dans des unités opérationnelles,
justifient de
leur compétence juridique
. Si leur demande d'incorporation dans la
justice militaire, qui constitue l'une des formations de l'armée suisse,
est agréée, ils y accomplissent le reste de leurs
périodes.
En revanche,
les juges des tribunaux militaires sont choisis parmi les
officiers et les sous-officiers des unités opérationnelles.
L'ensemble du système est administré par " l'auditeur en
chef ", qui est placé sous l'autorité du ministère de
la Défense.
b) La justice militaire suisse fonctionne selon les mêmes principes
que la justice pénale ordinaire
Si les juridictions militaires sont des juridictions spéciales, la loi
de procédure pénale pose, dès l'article premier, le
principe de l'indépendance de la justice militaire.
Les juridictions militaires sont permanentes. Comme les juridictions
ordinaires, elles se subdivisent en juridictions du premier degré, qui
jugent tous les accusés indépendamment de leur grade,
juridictions d'appel et juridiction de cassation.
En outre, l'instruction est assurée par un magistrat instructeur
militaire, que la loi de procédure pénale militaire
protège de toute immixtion de la part des supérieurs de
l'inculpé. Devant tous les tribunaux, les fonctions de procureur sont
assurées par un auditeur, c'est-à-dire par un officier qui a
été incorporé à la justice militaire.
Quant à l'accusé, il peut être assisté par un avocat
du barreau à tous les stades de la procédure. Lors des
débats, l'assistance d'un avocat est même obligatoire.
3) Les justices militaires anglaise, espagnole et italienne sont plus ou
moins intégrées à la justice ordinaire, mais ne
fonctionnent pas nécessairement selon les mêmes principes que
cette dernière
a) L'intégration des justices militaires anglaise, espagnole et
italienne à la justice ordinaire
Dans les trois pays,
la juridiction suprême ordinaire constitue le
tribunal militaire de cassation
: au Royaume-Uni, c'est la Chambre des
lords ; en Italie, depuis 1981, les recours en cassation ne sont plus
attribués au Tribunal suprême militaire, mais à la Cour de
cassation ; en Espagne, la loi organique de 1987 qui a
réorganisé la justice militaire a créé, au sein du
Tribunal suprême, une cinquième chambre, la chambre militaire.
Au Royaume-Uni, la justice militaire est, à partir du deuxième
degré, rendue par des magistrats professionnels issus des juridictions
ordinaires
. Par ailleurs, les juridictions militaires anglaises du premier
degré comportent un magistrat professionnel, qui ne participe pas aux
délibérations sur la culpabilité de l'accusé, mais
qui éclaire les militaires membres du tribunal sur la procédure.
En revanche,
en Espagne et en Italie, les juridictions militaires ne
comportent pas de magistrats professionnels issus des juridictions ordinaires,
car elles ont,
à l'image des cours d'assises,
une composition
mixte
. Elles se composent en effet à la fois de magistrats
militaires, c'est-à-dire de juristes spécialement recrutés
pour assurer la justice militaire, et de militaires tirés au sort, tels
les jurés de cour d'assises.
En Espagne, le parquet militaire fait partie du parquet
général
, et le procureur général près la
chambre militaire du Tribunal suprême ne peut être nommé
sans que le procureur général du royaume soit avisé. De
même,
en Espagne, le Conseil supérieur de la magistrature
,
bien qu'il ne joue aucun rôle dans la nomination des magistrats
militaires,
dispose d'un pouvoir général d'inspection des
juridictions militaires.
En Italie, il n'existe pas de code de procédure pénale
militaire
, c'est le code de procédure pénale qui s'applique.
En particulier, toutes les procédures simplifiées de la
procédure pénale ordinaire s'appliquent devant les juridictions
militaires.
b) Si l'organisation et le fonctionnement des justices militaires italienne
et anglaise sont plus ou moins calqués sur ceux de la justice
pénale ordinaire, il n'en va pas de même en Espagne
L'organisation et le fonctionnement des justices militaires italienne et
anglaises sont plus ou moins calqués sur ceux de la justice
pénale ordinaire
En Italie, la justice militaire est organisée par un décret royal
de 1941, qui a été profondément modifié par une loi
de 1981. Or, cette dernière précise que
le statut juridique
des magistrats militaires est régi par les dispositions en vigueur pour
les magistrats militaires
. De plus, une loi de 1988 a créé le
Conseil de la magistrature militaire
, sur le modèle du Conseil
supérieur de la magistrature. Disposant à l'égard des
magistrats militaires des mêmes attributions que le Conseil
supérieur de la magistrature à l'égard des magistrats
ordinaires, le Conseil de la magistrature militaire est présidé
par le premier président de la Cour de cassation.
Par ailleurs, tout comme les juridictions pénales ordinaires, les
juridictions militaires italiennes se subdivisent en juridictions du premier
degré, juridictions d'appel et juridiction de cassation. Le personnel de
ces juridictions est organisé de la même façon que celui
des juridictions pénales ordinaires.
Au Royaume-Uni, on observe également de grandes similitudes entre la
procédure pénale militaire et la procédure pénale
ordinaire : la gravité de l'infraction détermine la
juridiction compétente (sauf pour les officiers), l'instauration d'un
parquet est récente, l'appel et la cassation sont soumis à
l'autorisation de la juridiction d'appel...
A l'opposé, la justice militaire espagnole n'est pas
organisée comme la justice pénale ordinaire
Ainsi,
en première instance, le grade de l'accusé
détermine la juridiction compétente
. En effet, toutes les
juridictions militaires espagnoles peuvent être amenées à
trancher en première instance, y compris la chambre militaire du
Tribunal suprême, qui est la juridiction de cassation : les
tribunaux militaires territoriaux jugent les infractions militaires commises
par les hommes de troupe, les sous-officiers et les officiers subalternes, le
Tribunal militaire central celles commises par les officiers supérieurs,
et la chambre militaire du Tribunal suprême celles commises par les
officiers généraux. De plus,
il n'existe pas de juridiction
militaire d'appel
.
Par ailleurs, les magistrats militaires espagnols sont nommés par le
ministre de la Défense.
*
* *
Malgré leur diversité, les différents systèmes étudiés se caractérisent à la fois par leur intégration croissante à la justice pénale ordinaire et par leur fonctionnement de plus en plus proche de celui de la justice pénale ordinaire, ainsi que par la professionnalisation de leurs acteurs.
ALLEMAGNE
En
temps de paix,
les auteurs d'infractions pénales militaires sont
jugés
par les
juridictions pénales de droit commun
.
Les infractions pénales militaires sont décrites par
la loi
pénale militaire du 24 mai 1974
, modifiée par la loi du 26
janvier 1998.
|
ESPAGNE
L'article 117-5 de la Constitution
précise que
"
la loi réglementera l'exercice de la juridiction militaire
dans le domaine strictement limité à l'armée et dans le
cas d'un état de siège, conformément aux principes de la
Constitution.
"
|
I. LES JURIDICTIONS MILITAIRES
1. Les caractéristiques des juridictions militaires
Les
juridictions militaires sont des
juridictions spéciales
.
Cependant, l'article 117-5 de la Constitution, qui leur est consacré,
soumet la loi qui les organise au respect des
principes
constitutionnels
. Ceci signifie notamment que les juridictions militaires
doivent être indépendantes et que les droits de la défense
doivent y être respectés. De plus, l'article 1
er
de la loi 4/1987 énonce que la
justice militaire fait partie
intégrante du pouvoir judiciaire
. Cette intégration se
manifeste notamment par le fait que le Tribunal suprême, juridiction
ordinaire la plus haute, est également la juridiction suprême de
la justice militaire.
Les juridictions militaires sont les mêmes en temps de paix et en temps
de guerre, mais leurs compétences diffèrent selon les
circonstances.
En temps de paix, la justice militaire est essentiellement
compétente pour juger des infractions au code pénal militaire
(trahison, espionnage, divulgation de secret...). En temps de paix, si des
troupes espagnoles stationnent à l'étranger, la compétence
de la justice militaire est élargie aux infractions
déterminées par les accords passés avec les pays en
question.
En temps de guerre, sa compétence s'étend aux infractions
prévues par le droit pénal ordinaire, à celles qui sont
déterminées par des traités avec les puissances ou
organisations alliées, à celles qui sont commises hors du sol
national par un militaire, ainsi qu'à celles qui sont commises par des
prisonniers de guerre.
Les juridictions militaires sont également compétentes pour
trancher les
recours contentieux relatifs aux sanctions disciplinaires.
A l'image des cours d'assises, les juridictions militaires ont une
composition mixte
. Elles comportent des militaires professionnels,
tirés au sort pour chaque affaire, et des magistrats militaires,
c'est-à-dire des membres du " corps juridique des
armées ".
En effet, l'armée espagnole se subdivise en plusieurs corps, chaque
corps regroupant les militaires appartenant à la même
spécialité. Le corps juridique, au même titre que le corps
sanitaire, constitue un
corps commun à toutes les armes
. On y
accède par promotion interne ou par recrutement externe. Dans les deux
cas, il faut être
licencié en droit
et réussir des
épreuves de sélection. Ce corps est, comme tous les autres,
divisé en plusieurs grades (de lieutenant à général
de division). Les magistrats qui appartiennent aux grades situés entre
ceux de lieutenant et ceux de colonel sont " auditeurs ". Les
généraux de brigade sont " généraux
auditeurs " et les généraux de division
" généraux conseillers ".
2. L'organisation des juridictions militaires en temps de paix
a) Les juridictions du premier degré
Le
grade de l'accusé détermine la juridiction compétente.
Les tribunaux militaires territoriaux
, au nombre de cinq,
constituent les juridictions pénales militaires du premier
degré pour les hommes de troupe, les sous-officiers et les officiers
subalternes
.
Chaque tribunal militaire territorial comprend cinq magistrats militaires
nommés par le ministre de la Défense, sur proposition de la
chambre militaire du Tribunal suprême :
- le président, qui doit avoir le grade de colonel ;
- un lieutenant-colonel ;
- trois commandants.
Lorsqu'ils jugent les infractions militaires commises dans leur ressort
géographique
(1(
*
))
, les tribunaux militaires
territoriaux se composent de :
- trois magistrats militaires, dont le président ;
- deux militaires tirés au sort avant le procès à partir
d'une liste établie annuellement. Ces militaires doivent, dans la mesure
du possible, appartenir à la même arme que l'inculpé.
Par ailleurs, les tribunaux militaires territoriaux tranchent les recours
contentieux contre les sanctions disciplinaires imposées par les
militaires ayant un grade inférieur à celui de
général.
Les infractions pénales militaires commises par les
officiers
supérieurs
sont jugées en première instance par le
Tribunal militaire central
.
Sa composition est similaire à celle des tribunaux militaires
territoriaux, mais les membres du Tribunal militaire central, qu'il s'agisse
des magistrats militaires ou des militaires tirés au sort, ont des
grades plus élevés.
En matière disciplinaire, le Tribunal militaire central tranche les
recours relatifs aux décisions prises par les officiers
généraux et par le sous-secrétaire de défense,
c'est-à-dire le principal collaborateur du ministre dans le domaine du
personnel.
Les
infractions pénales militaires commises par les
officiers généraux sont jugées par la chambre militaire
du Tribunal suprême
.
La chambre militaire du Tribunal suprême constitue
la cinquième
chambre du Tribunal suprême
, après la chambre civile, la
chambre criminelle, la chambre administrative et la chambre sociale. Elle a
été créée par la loi 4/1987.
La chambre militaire du Tribunal suprême est composée de
huit juges, dont l'un préside. Quatre d'entre eux sont des
magistrats professionnels issus des juridictions ordinaires et les quatre
autres sont des magistrats militaires. Le président est
nécessairement un magistrat professionnel issu des juridictions
ordinaires.
Les magistrats professionnels issus des juridictions ordinaires qui
siègent à la chambre militaire du Tribunal suprême sont
nommés selon la même procédure que les autres magistrats du
Tribunal suprême. Quant aux magistrats militaires, ils sont nommés
par décret en conseil des ministres contresigné par le
ministère de la Justice, sur proposition du Conseil
général du pouvoir judiciaire, le ministre de la Défense
devant, pour chaque poste vacant, proposer au Conseil général du
pouvoir judiciaire
(2(
*
))
trois candidats parmi
les généraux de brigade et les généraux de
division.
Après leur
nomination à la chambre militaire
du Tribunal suprême, ces quatre magistrats militaires deviennent membres
à part entière du Tribunal suprême
: ils sont mis
à la retraite de l'armée (ou dans une position statutaire
similaire), et ne peuvent plus réintégrer les forces
armées.
Lorsqu'elle ne réunit pas la totalité de ses membres, la chambre
militaire du Tribunal suprême doit comporter autant de magistrats
militaires que de magistrats civils, compte non tenu du président. Quand
elle juge en première et dernière instance un officier
général, la chambre militaire du Tribunal suprême compte
cinq membres.
En matière disciplinaire, la cinquième chambre du Tribunal
suprême tranche les recours portant sur les sanctions prises par le
ministre de la Défense.
b) La juridiction de cassation
C'est la chambre militaire du Tribunal suprême .
II. LA PROCÉDURE
1. L'instruction
Elle est
confiée à des
magistrats militaires
nommés par le
ministre de la Défense, sur proposition de la chambre militaire du
Tribunal suprême. Le Tribunal militaire central en compte deux et les
tribunaux militaires territoriaux dix-huit, chaque tribunal militaire
territorial devant en compter au moins un.
Pour les officiers généraux, qui sont jugés en
première et dernière instance par la chambre militaire du
Tribunal suprême, cette dernière est à la fois juridiction
de jugement et d'instruction. L'instruction est confiée à l'un
des membres de la juridiction. Celui-ci ne peut participer aux étapes
ultérieures de la procédure.
2. L'accusation
Le
parquet militaire est composé de
magistrats militaires
. Il fait
partie du parquet général et doit respecter tous les principes
(légalité, impartialité...) qui s'imposent à ce
dernier. Cependant, le ministre de la Défense peut donner des
instructions au procureur général militaire près la
cinquième chambre du Tribunal suprême.
Il existe en effet
un parquet auprès de chacune des juridictions
militaires
. Ses membres sont plus ou moins gradés selon le niveau de
la juridiction considérée. Ils sont nommés par
décret en conseil des ministres contresigné par le ministre de la
Défense. En outre, le procureur général du royaume doit
être informé préalablement à la nomination du
procureur général militaire près la cinquième
chambre du Tribunal suprême. Ce dernier peut donner des instructions aux
autres membres du parquet militaire, de sa propre initiative ou de la part du
procureur général du royaume. Il est assisté d'un
magistrat militaire de haut rang et d'un membre du parquet civil du Tribunal
suprême.
3. Les droits de la défense
La loi 4/1987 précise que tout accusé qui comparaît devant une juridiction militaire a le droit d'être défendu . De plus, la défense est nécessairement assurée par un avocat, alors que, avant la réforme, l'accusé pouvait choisir par exemple d'être défendu par un officier. Un avocat est donc commis d'office si l'accusé n'en choisit pas un dans les délais prévus par le code de procédure pénale militaire. Si l'accusé est licencié en droit, il peut se défendre lui-même.
4. Les procédures simplifiées
Le code de procédure pénale militaire prévoit une procédure extrêmement sommaire, utilisable seulement en temps de guerre.
5. Les recours
L'appel n'existe pas, mais la cassation est possible, sauf
pour
les officiers généraux
, qui sont jugés en
première et dernière instance par la chambre militaire du
Tribunal suprême.
Par ailleurs, il est possible d'introduire un
recours en révision
devant la chambre militaire du Tribunal suprême lorsque certains
faits, connus après la condamnation, remettent en cause la
validité de la décision.
III. LE STATUT DES MAGISTRATS MILITAIRES
D'après la loi 4/1987, les magistrats militaires sont
inamovibles
. Ils ne peuvent en effet quitter leur poste que pour l'une
des raisons limitativement énumérées par la loi :
nouvelle affectation, à condition qu'elle ait été
sollicitée par l'intéressé, avancement, limite
d'âge, handicap, sanction pénale... Ils peuvent également
être suspendus pour l'une des raisons limitativement
énumérées par la loi.
Les magistrats militaires sont soumis au même régime
d'incompatibilités que les magistrats ordinaires.
Les magistrats militaires peuvent être affectés à l'un des
tribunaux militaires territoriaux ou au Tribunal militaire central, pour y
remplir les fonctions de juge, de juge d'instruction, de procureur ou de
greffier
.
Ils peuvent aussi occuper un poste d'expert juridique au sein
du ministère de la Défense ou d'un organisme dépendant de
ce dernier.
Les magistrats militaires sont nommés à leur poste
par le ministre de la Défense.
Les magistrats militaires ne sont pas assujettis au régime disciplinaire
applicable à l'ensemble des militaires. Les fautes qu'ils commettent
dans l'exercice de leurs fonctions sont examinées selon une
procédure spécifique par la chambre du conseil du Tribunal
militaire central.
Bien que les principales compétences que le Conseil
général du pouvoir judiciaire exerce à l'égard des
magistrats ordinaires (en matière de nomination et de discipline) soient
exercées par la chambre du conseil du Tribunal militaire central pour ce
qui concerne les magistrats militaires, ces derniers peuvent, s'ils s'estiment
victimes de pressions, prévenir le Conseil général du
pouvoir judiciaire.
En outre, la loi 4/1987 charge ce dernier d'une mission
d'inspection de tous les organes de la justice militaire.
ITALIE
Conformément à l'article 103 de la
Constitution,
"
les tribunaux militaires, en temps de guerre, exercent la
compétence fixée par la loi. En temps de paix, celle-ci se limite
aux délits militaires commis par les membres des forces
armées.
"
|
I. LES JURIDICTIONS MILITAIRES
1. Les caractéristiques des juridictions militaires
Les
juridictions militaires sont des
juridictions spéciales
.
Toutefois,
la loi de 1981 s'est efforcée, d'une part, de modifier
l'organisation de la justice militaire pour la calquer sur celle de la justice
ordinaire et, d'autre part, d'offrir aux magistrats militaires les mêmes
garanties,
d'indépendance notamment,
qu'aux magistrats
ordinaires.
En outre, la juridiction militaire suprême est la Cour de
cassation, c'est-à-dire la juridiction ordinaire la plus haute.
Les juridictions militaires ne sont pas les mêmes en temps de paix et
en temps de guerre
. En temps de guerre, les tribunaux militaires sont
remplacés par les tribunaux militaires de guerre. En outre, les
compétences des tribunaux militaires et celles des tribunaux militaires
de guerre diffèrent : les premiers ne jugent que des infractions au
code pénal militaire de paix, c'est-à-dire des infractions de
nature militaire, tandis que les seconds ont une compétence beaucoup
plus étendue.
Les juridictions militaires ont une
composition mixte
: elles
comprennent, d'une part, des militaires professionnels et, d'autre part, des
magistrats militaires recrutés par concours et qui doivent
détenir une maîtrise en droit. Ces derniers se
répartissent, selon leur grade, en :
- auditeurs judiciaires militaires ;
- magistrats militaires de tribunal ;
- magistrats militaires d'appel ;
- magistrats militaires de cassation ;
- magistrats militaires de cassation nommés à des fonctions
supérieures.
Les grades des magistrats militaires correspondent à ceux des magistrats
ordinaires.
2. L'organisation des juridictions militaires en temps de paix
a) Les juridictions du premier degré
Les
tribunaux militaires
,
au nombre de neuf, constituent les
juridictions pénales militaires du premier degré.
Ils comprennent un magistrat militaire d'appel, qui assure la fonction de
président, et, en fonction de l'importance du tribunal, un ou deux
magistrats militaires de tribunal.
En formation de jugement, les tribunaux militaires sont composés du
président, d'un magistrat militaire et d'un militaire du même
grade (mais pas nécessairement de la même arme) que
l'inculpé, mais en aucun cas d'un grade inférieur à celui
d'officier. Les juges des tribunaux militaires qui ne sont pas magistrats
militaires occupent cette fonction pendant une période qui
n'excède pas deux mois. Ils sont choisis par tirage au sort.
b) Les juridictions d'appel
Les
appels contre les décisions des tribunaux militaires sont soumis
à la
Cour militaire d'appel
, création de la loi de 1981.
Elle siège à Rome. Il existe en outre deux sections
détachées, l'une à Vérone et l'autre à
Naples.
La Cour militaire d'appel comprend un magistrat militaire de cassation
nommé à des fonctions supérieures, qui assure la fonction
de président, un magistrat militaire de cassation et trois magistrats
militaires d'appel.
Chacune des deux sections détachées comprend un magistrat
militaire de cassation, qui préside, et trois magistrats militaires
d'appel.
En formation de jugement, la Cour militaire d'appel est présidée
par son président (ou par celui de la section détachée
concernée). Elle comprend en outre deux magistrats militaires d'appel et
deux militaires du même grade que celui de l'inculpé, mais en
aucun cas d'un grade inférieur à celui de lieutenant-colonel. La
désignation des juges militaires qui ne sont pas magistrats militaires
se fait de la même façon que pour les tribunaux militaires.
c) La juridiction de cassation
La loi de 1981 a attribué les recours en cassation à la Cour de cassation , alors qu'ils étaient auparavant tranchés par le Tribunal suprême militaire .
II. LA PROCÉDURE
1. L'instruction
Depuis l'entrée en vigueur, en 1989, du nouveau code de procédure pénale, qui a supprimé le juge d'instruction et la phase de l'instruction en tant que tels pour les remplacer respectivement par le juge " pour les investigations préliminaires " et par la phase d'" investigations préliminaires ", il existe auprès de chaque tribunal militaire un ou deux magistrat(s) militaire(s) de tribunal, chargé(s) des investigations préliminaires .
2. L'accusation
Il
existe un
parquet militaire
, composé de
magistrats
militaires
. Le parquet militaire est représenté auprès
de chacune des juridictions militaires. Ses membres sont plus ou moins
gradés selon le niveau de la juridiction considérée.
Ainsi, le parquet militaire près la Cour de cassation comprend un
magistrat militaire de cassation nommé à des fonctions
supérieures, qui exerce les fonctions de procureur général
militaire de la République, et trois magistrats militaires de cassation,
qui exercent les fonctions de substitut du procureur général de
la République. En revanche, le parquet militaire de chacun des tribunaux
militaires comprend un magistrat militaire d'appel, qui exerce les fonctions de
procureur militaire de la République et un nombre de magistrats
militaires compris entre deux et six en fonction de l'importance du tribunal.
Ces derniers exercent les fonctions de substitut.
3. Les droits de la défense
À tous les stades de la procédure, l'inculpé a le droit d'être assisté . La personne qui l'assiste est nécessairement un avocat inscrit à l'ordre, car la loi de 1981 a abrogé la disposition du texte de 1941 qui prévoyait qu'un officier subalterne pouvait défendre l'inculpé.
4. Les procédures simplifiées
Les
procédures abrégées sont les mêmes que pour la
procédure pénale ordinaire.
Les principales sont les suivantes :
-
le jugement abrégé
, qui permet au condamné
d'obtenir une forte réduction de sa peine s'il accepte que le
prononcé du verdict ait lieu sur la seule base des résultats de
l'instruction ;
-
l'application de la peine sur requête des parties
, qui consiste
en une transaction sur la nature de la peine et qui permet d'éviter la
phase du jugement ;
-
le jugement direct et le jugement immédiat
, qui se traduisent
par la présentation directe de l'inculpé au juge de l'instance de
jugement, procédures utilisables dans les cas de flagrant délit
ou lorsque la culpabilité ne fait aucun doute.
5. Les recours
L'appel, qui n'existait pas, a été
institué
par la loi de 1981
. L'accusé ou le parquet peuvent faire appel des
jugements de première instance. En appel, le code de procédure
pénale ordinaire s'applique.
La
révision et la cassation
sont également possibles.
III. LE STATUT DES MAGISTRATS MILITAIRES
La
loi de 1981 précise que le statut juridique des magistrats militaires et
leur avancement sont régis par les dispositions en vigueur pour les
magistrats ordinaires.
Depuis l'entrée en vigueur de cette loi, les
magistrats militaires ne sont plus soumis, comme auparavant, à
l'autorité du procureur général militaire. Selon qu'ils
appartiennent à la magistrature assise ou à la magistrature
debout, ils relèvent du président de la Cour militaire d'appel ou
du procureur général militaire près la Cour militaire
d'appel.
La loi n° 561 du 30 décembre 1988 a créé le
Conseil de la magistrature militaire
, auquel elle a confié
"
pour les magistrats militaires, les mêmes attributions que
celles prévues pour le Conseil supérieur de la
magistrature
".
Le Conseil de la magistrature militaire, qui est renouvelé tous les
quatre ans, comprend :
- le premier président de la Cour de cassation, qui le
préside ;
- le procureur général militaire près la Cour de
cassation ;
- cinq magistrats militaires élus, dont au moins un magistrat militaire
près la Cour de cassation ;
- deux membres extérieurs à la magistrature militaire, choisis
d'un commun accord par les présidents de la Chambre des
députés et du Sénat, parmi les professeurs de droit de
l'enseignement supérieur ou parmi les avocats ayant au moins
quinze ans d'expérience.
Les magistrats militaires peuvent non seulement exercer les fonctions de juge,
de procureur et de juge " pour les investigations
préliminaires ". Ils peuvent également être
affectés aux organes de surveillance de l'administration
pénitentiaire, créés sur le modèle de ceux qui
existent pour la justice pénale ordinaire.
ROYAUME-UNI
Chacune
des trois forces armées applique son propre code militaire. Ainsi, les
militaires de l'armée de terre sont soumis au
Army Act
1955
, ceux de l'armée de l'air au
Air Force Act
1955
et ceux de la marine au
Naval Discipline Act
1957
. Ces textes
contiennent principalement des dispositions pénales.
Révisés tous les cinq ans depuis leur adoption, ils sont
désignés sous le terme générique de
Service
Discipline Acts
. Le dernier que le Parlement a adopté est le
Armed Forces Act
1996, qui a apporté d'importantes modifications
aux trois textes précités.
|
I. LES JURIDICTIONS MILITAIRES
1. Les caractéristiques des juridictions militaires
Chaque arme dispose de ses propres juridictions militaires
du
premier degré.
Les dispositions pertinentes figurent respectivement
dans l'
Army
Act
1955
pour l'armée de terre,
l'
Air
Force Act
1955
pour l'armée de l'air et le
Naval Discipline Act
1957
pour la marine. Ces textes sont
systématiquement révisés tous les cinq ans. En revanche,
il n'y a qu'une juridiction militaire du second degré
.
Les tribunaux militaires ne sont pas des tribunaux permanents
. C'est le
service de l'administration centrale chargé de l'administration de la
justice militaire qui, en cas de besoin, c'est-à-dire lorsqu'une
infraction à l'un des
Service Discipline Acts
a été
commise, se charge de réunir le tribunal. C'est un service
indépendant qui ne dépend ni du parquet ni de la chaîne de
commandement. Il est composé uniquement de civils et fait office de
greffe.
Les juridictions militaires sont en principe les mêmes en temps de paix
et en temps de guerre. Cependant, lorsque l'urgence de la décision le
commande,
un conseil de guerre de campagne peut être
convoqué
. En effet, les
Service Discipline Acts
prévoient qu'un officier peut ordonner que l'accusation soit
portée devant un tel tribunal, lorsqu'il commande une troupe de
l'armée régulière agissant en service actif sur un
théâtre d'opérations et qu'il estime que l'accusation ne
peut être portée devant les juridictions militaires existant en
temps de paix.
Les tribunaux militaires du premier degré sont composés de
militaires
qui doivent remplir certaines conditions d'état de
service et de grade, eu égard notamment au grade de l'accusé,
ainsi que d'un magistrat professionnel
, spécialement
désigné pour siéger dans les juridictions militaires par
le magistrat responsable du service juridique du ministère de la
Défense.
Au-delà du premier degré, les juridictions militaires ne
comprennent plus de militaires
, mais uniquement des magistrats
professionnels issus des juridictions ordinaires.
2. L'organisation des juridictions militaires en temps de paix
a) Les juridictions du premier degré
Elles
sont de deux sortes. Leur compétence respective est
déterminée par le grade de l'accusé et par la
gravité de la faute.
Le
conseil de guerre régional,
composé d'un
président, d'au moins deux officiers et d'un magistrat professionnel,
est compétent sauf s'il s'agit d'un officier (avec certaines nuances
selon l'arme d'origine pour les adjudants). De plus, il ne peut pas prononcer
de peine d'emprisonnement supérieure à deux ans.
Le
conseil de guerre général
, composé d'un
président, d'au moins quatre officiers et d'un magistrat professionnel,
juge les infractions qui ont été commises par les militaires les
plus gradés, lesquels ne peuvent pas être jugés par le
conseil de guerre régional. Comme il peut prononcer la peine maximale
prévue par la loi militaire, il juge aussi les infractions les plus
graves qui ont été commises par les militaires les moins
gradés.
Dans les deux cas, le magistrat professionnel est chargé
d'éclairer le tribunal sur les points de droit et sur la
procédure. Ses instructions ont force obligatoire. Il ne participe pas
aux délibérations sur la culpabilité de l'accusé,
mais prend part au vote sur la peine applicable.
b) La juridiction du second degré
Le conseil de guerre d'appel présente de très grandes similitudes avec la chambre criminelle de la Cour d'appel ordinaire et n'est composé que de magistrats professionnels très expérimentés. Ils sont en nombre impair et sont au moins trois. C'est le président de la chambre criminelle de la Cour d'appel, en accord avec le ministre de la Justice, qui les choisit. Le président de la Cour d'appel peut en faire partie. En principe, cette juridiction siège à Londres, mais le président de la Cour d'appel peut choisir un autre lieu.
c) La juridiction de cassation
Il s'agit de la Chambre des lords.
II. LA PROCÉDURE
1. L'instruction
L'enquête est menée par le supérieur immédiat de l'accusé . Il rassemble les preuves et procède à l'audition de l'accusé.
2. L'accusation
L'
Armed
Forces Act
1996 a créé,
respectivement pour l'armée de terre, l'armée de l'air et la
marine, un parquet indépendant de la chaîne de commandement. Le
parquet militaire de chacune des trois armes est dirigé par un magistrat
possédant au moins dix ans d'expérience. Il doit s'agir d'un
officier de l'arme en question.
Le militaire chargé de l'enquête doit, lorsqu'il conclut à
la culpabilité de l'accusé, en référer à
l'officier supérieur. Celui-ci saisit alors le parquet qui décide
seul des charges retenues contre l'accusé et dirige le procès.
3. Les droits de la défense
L'accusé qui va passer en conseil de guerre doit pouvoir
préparer sa défense. Dans l'armée de l'air et de terre, le
supérieur immédiat de l'accusé, chargé de
l'enquête, désigne un "
officier chargé
de
la défense
", qui a pour mission d'aider l'accusé
à préparer et conduire sa défense, sauf si ce dernier s'y
oppose expressément. Toutefois, l'accusé peut choisir de
désigner, en plus, un avocat pour le représenter.
Dans la marine, l'accusé peut nommer quelqu'un pour le
représenter dans ses relations avec le tribunal, "
l'ami de
l'accusé
". Il peut également le représenter
valablement aux audiences, s'il est avocat.
4. Les procédures simplifiées
Le
militaire chargé de l'enquête peut proposer à
l'accusé d'opter pour la
procédure sommaire
, à
condition qu'il s'agisse d'un homme de troupe ou d'un sous-officier et que
l'infraction soit mineure.
Il doit l'informer qu'il peut demander à être jugé par un
conseil de guerre. Si le choix de la procédure sommaire est fait, ce qui
est le cas le plus fréquent, le militaire chargé de
l'enquête consigne les conclusions établissant la
culpabilité de l'accusé et prononce la peine applicable suivant
une échelle de sanctions restreinte (détention limitée
à soixante jours, amende n'excédant pas vingt-huit jours de paye,
retenue sur salaire en cas de dommage matériel, réprimande).
Jusqu'à présent, l'accusé pouvait seulement demander la
révision de cette décision auprès du supérieur de
celui qui l'avait rendue. L'
Armed Forces Discipline
Act
2000,
entré en vigueur le 2 octobre 2000, institue un appel des
décisions rendues à la suite de la procédure sommaire,
ainsi qu'une cour d'appel spécifique, qui est composée d'un
magistrat professionnel et de deux officiers ayant au moins deux années
de service.
5. Les recours
La
personne condamnée peut faire
appel
de sa condamnation ou de la
peine prononcée. Cependant, comme dans la procédure pénale
ordinaire, l'autorisation de la juridiction d'appel est nécessaire.
Comme dans la procédure pénale ordinaire également, la
personne condamnée en appel peut se pourvoir en
cassation
devant
la Chambre des lords, mais ceci n'est possible qu'avec l'autorisation du
conseil de guerre d'appel ou, si celle-ci est refusée, avec
l'autorisation de la Chambre des lords elle-même.
SUISSE
L'article 30-1 de la Constitution fédérale
énonce : "
Toute personne dont la cause doit être
jugée dans une procédure judiciaire a droit à ce que sa
cause soit portée devant un tribunal établi par la loi,
compétent, indépendant et impartial. Les tribunaux d'exception
sont interdits.
|
I. LES JURIDICTIONS MILITAIRES
1. Les caractéristiques des juridictions militaires
Les
juridictions militaires sont des
juridictions spéciales
. La loi
de procédure pénale militaire du 23 mars 1979
pose,
dans son article premier, le principe de
l'indépendance de la justice
militaire
. Elle garantit par ailleurs aux militaires un jugement par leurs
propres juges.
Les juridictions militaires sont
permanentes
, le Conseil
fédéral a fixé le nombre de tribunaux du premier et second
degré.
Les juridictions militaires sont les mêmes en temps de paix et en temps
de guerre. Cependant en temps de paix, en principe, seules les infractions
militaires commises par les militaires en service relèvent de leur
juridiction. En temps de guerre, en revanche, leur compétence est
élargie.
La justice militaire est exclusivement rendue par des militaires, pendant la
durée d'accomplissement de leurs périodes
(3(
*
))
.
Les fonctions considérées comme spécialisées,
greffier, juge d'instruction, procureur et président de tribunal, sont
confiées à des militaires qui
, après avoir acquis une
certaine expérience de l'armée dans des unités
opérationnelles,
justifient de leur compétence juridique
(soit en présentant un diplôme, soit en attestant de leur
expérience professionnelle)
et demandent à accomplir le reste
de leurs périodes dans la justice militaire.
Ils sont alors
incorporés dans la justice militaire, qui constitue l'une des formations
de l'armée suisse. Les officiers peuvent occuper n'importe laquelle des
fonctions spécialisées de la justice militaire, tandis que les
sous-officiers et les hommes de troupe ne peuvent être que greffiers.
En revanche,
les juges qui siègent dans les juridictions militaires
sont choisis parmi les officiers et les sous-officiers des unités
opérationnelles
.
Aucun des acteurs de la justice militaire n'exerce donc ses fonctions
à titre principal, à l'exception de l'auditeur en chef
qui
administre la justice militaire sous la surveillance du ministère de la
Défense et qui est nommé par l'exécutif pour quatre ans.
A ce titre, c'est lui qui décide de l'affectation des militaires
incorporés dans la justice militaire. Dès leur affectation, les
officiers doivent se tenir constamment prêts à accomplir leur
service, qu'ils effectuent selon les besoins pendant toute la durée de
leurs obligations militaires. Les sous-officiers et les hommes de troupe, quant
à eux, peuvent être convoqués pour au plus vingt-quatre
jours de service par an pendant toute la durée de leurs obligations
militaires.
Les présidents de tribunaux ont rang de lieutenant-colonel ou de
colonel, les juges d'instruction de capitaine et les auditeurs de major.
2. L'organisation des juridictions militaires en temps de paix
a) Les juridictions du premier degré
Les
tribunaux militaires du premier degré ou
tribunaux de division
sont au nombre de quatorze. Leur compétence s'établit en fonction
de l'unité de l'inculpé, indépendamment du lieu de
l'infraction. Ils sont composés d'un président, qui a le grade de
colonel ou de lieutenant colonel, de quatre juges (deux officiers et deux
sous-officiers) et de leurs suppléants.
Les présidents, les juges et leurs suppléants sont nommés
par l'exécutif pour quatre ans. Les juges et juges suppléants
sont des officiers et sous-officiers provenant des unités
opérationnelles qui relèvent de la juridiction du tribunal.
b) Les juridictions du second degré
Les tribunaux militaires d'appel , au nombre de cinq (deux de langue française, deux de langue allemande et un de langue italienne) ont la même composition que les tribunaux de division. Toutefois, la loi de procédure pénale militaire précise que les juges et juges suppléants doivent posséder des connaissances juridiques.
c) La juridiction de cassation
Le Tribunal militaire de cassation est composé d'un président du grade de colonel, de quatre juges (deux officiers et deux sous-officiers) et de leurs suppléants. Le président désigne également son suppléant parmi les juges. Le président, les juges et leurs suppléants sont élus par l'Assemblée fédérale pour une période de quatre ans. Les juges et juges suppléants doivent avoir fait des études de droit complètes ou posséder un brevet cantonal d'avocat.
II. LA PROCÉDURE
1. L'instruction
Lorsque
l'infraction a été commise pendant le service, c'est le
commandant (du régiment, ou de la troupe, ou de l'état-major, ou
de l'école) qui est compétent pour ordonner l'enquête.
Lorsque l'infraction a été commise hors service, c'est l'auditeur
en chef qui a cette compétence.
L'enquête ordinaire
, qui a pour objet de déterminer si une
infraction pénale a été commise, est
dirigée par
un juge d'instruction du tribunal de division compétent
. Toutefois,
lorsque l'enquête est dirigée contre un officier supérieur,
l'auditeur en chef la confie à un officier supérieur de la
justice militaire.
L'article 107 de la procédure pénale militaire garantit
l'indépendance du juge d'instruction en interdisant toute
"
immixtion des supérieurs militaires de l'inculpé ou du
suspect
" dans la conduite de l'enquête. L'enquête n'est
pas publique.
Lorsque le juge d'instruction a terminé l'enquête, il en informe
les parties et transmet le dossier à l'auditeur. L'auditeur et les
parties peuvent requérir un complément d'enquête dans un
délai imparti par le juge d'instruction.
2. L'accusation
Devant
tous les tribunaux,
un auditeur
, c'est-à-dire un officier qui a
été incorporé à la justice militaire, soutient
l'accusation.
Devant les tribunaux militaires d'appel, tout comme devant le Tribunal
militaire de cassation, l'accusation doit être soutenue par un auditeur
du tribunal de division qui a rendu le premier jugement.
L'activité des auditeurs est contrôlée par l'auditeur en
chef, qui veille au bon déroulement des procédures pénales
militaires et qui peut donner des instructions.
3. Les droits de la défense
La
défense est assurée par un "
un citoyen suisse
autorisé à pratiquer le barreau dans un canton
".
Pendant l'instruction, la défense est autorisée
:
l'inculpé doit être informé, dès le premier
interrogatoire, qu'il peut faire appel à un avocat du barreau. En outre,
en cas d'inculpation grave et dans les affaires compliquées, le
président du tribunal de division désigne un avocat si
l'inculpé le demande ou si le juge d'instruction le propose.
Lors des débats
, en revanche,
l'assistance d'un avocat est
obligatoire
. Un système de défense d'office est
organisé et les tribunaux de division établissent chaque
année une liste des avocats commis d'office.
4. Les procédures simplifiées
L'auditeur peut remplir les fonctions de juge unique
et
rendre une ordonnance de condamnation :
- lorsqu'il estime que l'infraction est passible d'une sanction limitée
(peine privative de liberté d'au plus un mois et/ou amende de
1 000 francs suisses, c'est-à-dire environ
4 000 francs français) ;
- lorsque l'accusé reconnaît les faits et plaide coupable.
L'ordonnance de condamnation est rendue par écrit, donc sans
débat, et n'est que sommairement motivée. Cependant, dans les dix
jours qui suivent sa notification, le condamné et l'auditeur en chef
peuvent y faire opposition afin d'obtenir que la procédure ordinaire
soit suivie.
5. Les recours
La voie
de l'
appel
est ouverte contre les jugements des tribunaux de division,
à l'exception de ceux rendus par défaut.
La voie de la
cassation
est ouverte contre les jugements des tribunaux
militaires d'appel, contre les décisions pour lesquelles ils se
déclarent incompétents, contre les jugements rendus par
défaut par les tribunaux de division. Le Tribunal militaire de cassation
examine également les recours en
révision
.
En outre, lorsqu'une décision d'un tribunal militaire n'est susceptible
d'être attaquée ni en appel, ni en cassation, il existe un recours
spécifique auprès du Tribunal militaire de cassation.
III. LE STATUT DES MAGISTRATS MILITAIRES
Tous les acteurs de la justice militaire sont des militaires . Ils ne bénéficient d'aucun statut particulier. Cependant, du point de vue administratif, ils sont subordonnés à l'auditeur en chef, qui détient le pouvoir disciplinaire.
(1)
La composition des tribunaux militaires territoriaux varie en fonction du
rôle qu'ils jouent. Ils siègent en formation restreinte lorsqu'ils
tranchent des questions de procédure.
(2) L'équivalent de notre Conseil supérieur de la magistrature.
(3) L'armée suisse est en effet presque exclusivement composée
d'appelés qui, jusqu'à l'âge de quarante-deux ans,
voire de cinquante-deux pour les officiers, effectuent leur service militaire
en plusieurs périodes.