NOTE DE SYNTHESE

Le projet de loi relatif au renforcement de la lutte contre le travail clandestin déposé sur le bureau de l'Assemblée nationale le 16 octobre 1996 définit le travail clandestin comme " la dissimulation partielle ou totale (...) d'une activité ou d'un emploi salarié ".

Il vise donc tout travail effectué en infraction à la législation sociale ou fiscale, en particulier tout travail non déclaré, et correspond à ce que la langue courante qualifie de " travail noir ".

Le travail clandestin constitue une préoccupation croissante pour tous les pays développés, notamment parce qu'il représente un manque à gagner important pour le fisc et pour les organismes de protection sociale. C'est pourquoi on a tenté de recenser les principaux moyens mis en oeuvre par nos proches voisins pour lutter contre ce phénomène. Pour cela, on a mis l'accent sur les mesures autres que l'obligation de déclaration des salariés ou les contrôles, car ces dispositions existent dans tous les pays.

On a exclu du champ de l'étude les pays méditerranéens pour retenir seulement l' Allemagne , la Belgique , le Danemark , les Pays - Bas , le Royaume - Uni et la Suisse .

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Parmi ces six pays, seules l'Allemagne et la Belgique ont adopté des lois visant explicitement à lutter contre le " travail noir " . La loi allemande, de 1982, a été modifiée en juillet 1994. Quant à la loi belge de 1994, considérée comme inefficace, elle a fait l'objet d'une vaste table ronde en mai 1996 qui devrait se traduire prochainement par le dépôt d'un projet de loi.

Dans les autres pays qui considèrent la lutte contre le travail clandestin comme importante, celle-ci constitue plutôt la conséquence indirecte de mesures tendant à empêcher la perception injustifiée de certaines prestations sociales.

1) La lutte contre le travail clandestin ne constitue pas une réelle préoccupation en Suisse.

Malgré l'importance du phénomène, révélée notamment dans un rapport publié en juillet 1996, rares sont les cas qui sont rendus publics et sanctionnés. Les syndicats en rejettent la responsabilité sur la passivité des administrations chargées du contrôle. Cependant, aucune évolution législative n'est envisagée à court terme.

2) La Belgique paraît déterminée à utiliser effectivement l'arsenal répressif dont elle dispose.

Tous les participants à la table ronde de mai 1996 ont été unanimes pour estimer que, pour lutter efficacement contre le travail clandestin, il fallait commencer par utiliser les moyens dont le pays s'est doté en adoptant la loi du 23 mars 1994 qui a beaucoup aggravé les sanctions applicables au travail clandestin.

C'est pourquoi toutes les parties prenantes sont tombées d'accord sur la nécessité de coordonner tous les services impliqués dans la lutte contre le travail clandestin, d'évaluer les procédures existantes et de simplifier le droit du travail.

3) En Belgique et au Danemark, le gouvernement s'efforce de prévenir le travail clandestin en rendant plus attractives les activités exercées dans le cadre légal.

Ces mesures concernent surtout les services de proximité .

La Belgique a adopté le système du chèque-service créé en France pour limiter les formalités relatives au règlement des charges sociales et ainsi faciliter l'embauche. Elle l'utilise sous plusieurs formes.

L'une d'elles permet aux chômeurs qui effectuent, dans la limite de 45 heures par mois, des tâches ménagères ou des activités à caractère social de ne pas perdre le bénéfice des allocations de chômage. L'employeur qui rémunère ce travail au moyen de chèques émis par les agences locales de l'emploi bénéficie en outre d'une réduction d'impôt sur le revenu. Le chômeur à qui un tel travail est proposé doit l'accepter sous peine de perdre le bénéfice de ses allocations de chômage.

De plus, le gouvernement belge étudie la possibilité de mettre en place une nouvelle forme de chèques qui constitueraient en fait des subventions versées à des personnes à faibles revenus pour leur permettre d'employer des salariés.

De la même façon, le Danemark a mis en place en 1994, à titre expérimental, un plan d'aide au secteur des services à domicile. L'aide consiste en une subvention versée à l'entreprise prestataire de services. La reconduction définitive de ce plan a été votée par le Parlement en mai 1996.

4) Aux Pays-Bas, et surtout au Royaume-Uni, la lutte contre le travail clandestin se confond avec la lutte contre la perception indue de prestations sociales.

Les Pays-Bas ont étudié, sans y donner suite, les dispositifs français et belge du chèque-service dont les organisations patronales néerlandaises demandaient la transposition. Toute mesure purement juridique, telle que le renforcement des contrôles et des sanctions, a été exclue. Les réflexions se concentrent en revanche sur des mesures d'ordre économique, comme la modulation du taux de T.V.A. Cependant, une loi sur l'abus des prestations sociales a été récemment adoptée par le Parlement. Elle doit entrer en vigueur le 1er janvier 1997 et prévoit que les bénéficiaires qui ne satisfont pas à leurs obligations pourront voir leurs prestations supprimées. C'est par exemple le cas d'un chômeur qui refuserait de suivre un stage parce qu'il a un emploi non déclaré.

Au Royaume-Uni , le travail clandestin ne présente pas les mêmes inconvénients que dans les autres pays pour le travailleur qui y est soumis du fait de l'absence de salaire minimum et du caractère universel du système de protection sociale. Dans ces conditions, la lutte contre le travail clandestin se confond avec la lutte contre la perception injustifiée de prestations sociales et elle vise beaucoup plus les travailleurs que les employeurs.

5) Comme le projet français, la loi allemande contient une définition du travail clandestin et comporte des sanctions spécifiques.

Depuis les modifications apportées en 1994, l'établissement de la preuve de l'" infraction de travail noir " est facilitée. Auparavant, il fallait prouver que le travail clandestin procurait à son bénéficiaire des avantages économiques importants. Dorénavant, il suffit de prouver que l'intéressé a fourni des prestations de services d'un volume important .

De même que le projet de loi français tend à permettre de remonter les filières du travail clandestin en recherchant les donneurs d'ordre, la loi allemande considère comme " infraction de travail noir " le fait de sous-traiter à un tiers qui emploie une personne ou exerce une profession indépendante sans l'avoir déclaré.

Par ailleurs, tout comme le projet français étend la panoplie des sanctions encourues par les employeurs (privation des droits civiques, exclusion du bénéfice des aides publiques et des marchés publics), la loi allemande exclut des marchés publics les entreprises qui se sont rendues coupables, directement ou indirectement, d'une " infraction de travail noir ".

La loi allemande punit aussi d'une amende de 10 000 marks, c'est-à-dire environ 34 000 francs, toute personne et toute entreprise qui font de la publicité pour leurs prestations sans être régulièrement inscrites à un registre professionnel. Cette sanction peut s'appliquer d'autant plus facilement que les organisations professionnelles ont la faculté d'exiger des entreprises de télécommunications la fourniture des noms et adresses de leurs abonnés qui font de la publicité en ne mentionnant que leurs numéros de téléphone.

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Les pays les plus déterminés à combattre le travail clandestin sont l'Allemagne, la Belgique et le Royaume-Uni. Dans tous les pays, et quelle que soit la nature des mesures déjà prises, le législateur a récemment modifié le dispositif de lutte contre le travail clandestin ou s'apprête à le faire.

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