Groupe interparlementaire d'amitié
France - Hongrie
Les réformes du gouvernement Orbán : la Hongrie à l'heure du bilan |
Compte rendu
du déplacement effectué par une délégation du groupe
en Hongrie
du 3 au 7 septembre 2013
La délégation était composée de :
• M. Michel BILLOUT, Sénateur de Seine-et-Marne, Président du groupe d'amitié
• M. Michel BERSON, Sénateur de l'Essonne, Vice-président du groupe d'amitié
• M. Joël GUERRIAU, Sénateur de la Loire-Atlantique, Vice-président du groupe d'amitié
N° GA 113 - Décembre 2013
HONGRIE DONNÉES GÉNÉRALES Superficie : 93 029 km² Population (estimation 2011) : 9 937 600 habitants Capitale : Budapest, 1 733 700 habitants environ (17,5 % de la population du pays) Villes principales : Debrecen (208 000 hab.), Szeged (170 000 hab.), Miskolc (168 000 hab.), Pécs (158 000 hab.), Györ (131 000 hab.) Langue officielle : hongrois
Monnaie
: forint (HUF)
Indice de développement humain
(classement ONU 2011)
: 0,831
PIB (2012) : 97,67 milliards d'euros PIB par habitant (2012) : 9 800 € Taux de croissance (2012) : - 1,7 % (prév. + 0,2 % en 2013) Taux de chômage (2012) : 10,8 % Taux d'inflation annuel ( juin 2013 ) : 2 % Espérance de vie (2011) : 74,5 ans
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LE GROUPE INTERPARLEMENTAIRE D'AMITIÉ FRANCE-HONGRIE Créé en décembre 1975, le groupe d'amitié comprenait à l'origine, sous la présidence de René Chazelle (Soc - Haute-Loire), 59 membres. La réunion constitutive du groupe mentionne des centres d'intérêt portant « plus particulièrement sur deux aspects des relations franco-hongroises, à savoir les liens culturels et les échanges commerciaux ». Le premier déplacement du groupe en Hongrie, dont le nom officiel était alors République populaire hongroise, date de 1977. Sa composition est actuellement la suivante : Président : - M. Michel Billout (CRC - Seine-et-Marne) Vice-Présidents : - Mme Leila Aïchi (Ecolo - Paris) - M. Michel Berson (Apparenté Soc - Essonne) - M. Pierre-Yves Collombat (RDSE - Var) - M. Joël Guerriau (UDI-UC - Loire-Atlantique) - M. Michel Le Scouarnec (CRC - Morbihan) - M. Rémy Pointereau (UMP - Cher) Membres : - M. Bertrand Auban (Soc - Haute-Garonne) - M. Christophe Béchu (UMP - Maine-et-Loire) - Mme Cécile Cukierman (CRC - Loire) - Mme Annie David (CRC - Isère) - M. Patrice Gélard (UMP - Seine-Maritime) - Mme Brigitte Gonthier-Maurin (CRC - Hauts-de-Seine) - M. Gérard Le Cam (CRC - Côtes-d'Armor) - M. Jean-Yves Leconte (Soc - Français établis hors de France) - M. Pierre Martin (UMP - Somme) - M. Dominique Watrin (CRC - Pas-de-Calais)
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INTRODUCTION
Une délégation du groupe interparlementaire d'amitié France-Hongrie constituée de M. Michel Billout, Président et de MM. Michel Berson et Joël Guerriau, Vice-présidents, a effectué un déplacement en Hongrie du 3 au 7 septembre 2013.
L'objectif de ce déplacement était, à la suite du colloque organisé le 30 mai 2013 au Sénat 1 ( * ) par le groupe d'amitié en partenariat avec l'Ambassade de Hongrie à Paris, de mieux comprendre les enjeux des réformes entreprises à un rythme soutenu par le gouvernement hongrois depuis 2010 et qui n'ont pas manqué d'inquiéter les autres pays européens. Après avoir reçu à Paris d'éminents connaisseurs, critiques et amis de la Hongrie, le groupe d'amitié a souhaité recueillir l'opinion des Hongrois et se faire une idée in situ .
La délégation s'est entretenue avec différents responsables politiques gouvernementaux et locaux, ainsi que des représentants de la société civile. La délégation a porté un intérêt tout particulier aux questions du financement des collectivités territoriales et de la gestion des fonds européens, ainsi qu'à la problématique énergétique propre à ce pays. Les questions constitutionnelles, et notamment celle du respect des droits de l'opposition, ont aussi retenu toute son attention.
La délégation tient à exprimer sa sincère reconnaissance à Son Exc. M. Roland Galharague, ambassadeur de France en Hongrie, à Mme Laurence Haguenauer, première conseillère, et à Mme Anne-Marie Maskay, qui lui a succédée, ainsi qu'à toute l'équipe de l'ambassade pour la qualité de leur accueil et l'aide qui lui a été apportée pour l'organisation et le bon déroulement de la mission.
I. LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES HONGROISES ET L'ÉTAT : LE CHOIX DE LA RECENTRALISATION
Le gouvernement de Viktor Orbán, issu des élections législatives de 2010, fort de la majorité des deux tiers au Parlement, a entrepris dès son arrivée au pouvoir une profonde transformation de l'organisation des collectivités territoriales, tant en ce qui concerne leur nombre et leur structure que leur relation avec l'État central.
Avec ses 3 177 communes et autant de conseils municipaux, le système hongrois d'organisation des collectivités territoriales était resté quasiment inchangé depuis 1990. A partir de 2010, ce schéma territorial a été complètement revu, officiellement en vue de générer des économies par la diminution du nombre de structures administratives locales et par le regroupement des charges de centralité. Force est de constater que cela a surtout été l'occasion d'accroître le contrôle de l'État sur les missions dont les communes ont ou avaient la charge.
A. LA REFONTE TERRITORIALE : VERS UNE RECENTRALISATION ASSUMÉE DES COMPÉTENCES LOCALES
La loi sur les collectivités territoriales, entrée en vigueur le 1 er janvier 2013, modifie profondément leurs compétences ainsi que la répartition de leurs ressources et dépenses. Les communes sont notamment déchargées des missions d'éducation qu'elles détenaient auparavant et perdent les compétences qu'elles exerçaient en lieu et place de l'État 2 ( * ) au profit des « Offices du gouvernement » ( Járási kormányablakok ), agissant à l'échelon du district ( járás ), création territoriale de la loi susmentionnée.
La Hongrie compte à ce jour 175 districts qui s'ajoutent aux 23 arrondissements de Budapest ( kerület ). A la tête de chacun de ces offices est placé un chargé de mission désigné par le Premier ministre, assisté dans ses fonctions par un directeur technique qui s'occupe des questions administratives. Les interlocuteurs de la délégation n'ont pas manqué d'observer que ce nouveau système était proche de celui des sous-préfectures françaises. Ces offices exercent ainsi un contrôle de légalité sur les actes administratifs des collectivités territoriales.
Outre ce changement dans leur champ de compétences, la structure même du pouvoir communal a changé : la loi permettait auparavant aux communes de plus de 1 000 habitants de constituer un office du conseil municipal et à celles n'atteignant pas ce seuil démographique de financer un directeur général ayant les compétences nécessaires.
Désormais, seules les communes de plus de 2 000 habitants ont cette faculté. Les petites communes doivent se regrouper pour atteindre cette taille critique et constituer un office du conseil municipal. Leur nombre a, par conséquent, fortement décru : 3 177 en 1990, 1 798 en 2012 et 1 270 aujourd'hui, soit une diminution de 60 %. En 2013, seules 40 % des communes ont leur propre office, alors que ce chiffre était encore de 57 % il y a un an.
Cette réforme de structure n'a pas manqué de faire sentir ses effets au niveau des moyens et du personnel. Une partie importante du personnel qui travaillait pour les communes a été repris au sein des offices du gouvernement, mais désormais c'est l'État qui fixe le nombre de fonctionnaires municipaux en fonction de la taille des communes. M. Gábor Zongor, secrétaire général de la TÖOSZ ( Fédération nationale des collectivités territoriales ), a indiqué à la délégation que le nombre d'agents transférés a été plus important que celui qui s'occupait auparavant de ces tâches. Autre changement fondamental, le financement des compétences territoriales n'est plus forfaitaire, mais lié aux missions réellement exercées.
Le déplacement du groupe d'amitié à Szeged a permis de rencontrer les autorités municipales de la seule grande ville hongroise à être dirigée par un maire de l'opposition gouvernementale, M. Botka László, du parti socialiste ( Magyar Szocialista Párt ). Représenté par le maire-adjoint chargé de la politique de la ville, M. László Solymos, celui-ci a déploré le transfert des compétences qui prive, au fil des années, les communes de leurs attributions fondamentales, les subventions qui ne suffisent plus pour mettre en oeuvre leurs compétences obligatoires et le besoin de sécurité juridique pour exercer leurs fonctions dans un cadre moins fluctuant.
* 1 Rapport Sénat GA 109 - juillet 2013.
* 2 Délivrance de papiers officiels, du permis de conduire et de certains actes administratifs.