ANNEXE
Rapport d'activité pour l'année 2009 de la Délégation du Sénat aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes
(Extrait)
LES ACTIVITÉS INTERNATIONALES DE LA DÉLÉGATION
Les activités internationales de la délégation répondent à deux objectifs :
- recueillir des éléments d'information sur la politique en faveur du droit des femmes conduite dans des pays étrangers, principalement européens ;
- représenter la délégation au sein des réunions internationales relevant des Nations-Unies, de l'Union européenne, ou de l'Assemblée parlementaire de la Francophonie.
Mission conjointe en Norvège (du 25 au 27 mai 2009)
La loi du 12 juillet 1999 qui a institué la délégation aux droits des femmes du Sénat et de l'Assemblée nationale prévoit qu'elles peuvent organiser des réunions communes.
Sur ce fondement, la délégation a accepté de participer à une mission commune avec la délégation aux droits des femmes de l'Assemblée nationale en Norvège.
Cette mission, qui s'est déroulée sur trois jours, entre le 25 et le 27 mai 2009, avait pour objet d'étudier la politique conduite par la Norvège en matière d'égalité professionnelle entre les hommes et les femmes.
Ce pays conduit en effet dans ce domaine une politique très volontaire, souvent citée en exemple, et qui mérite d'être examinée.
La délégation parlementaire était composée, côté Sénat, de Mme Michèle André, présidente, et de Mme Jacqueline Panis, premier vice-présidente ; côté Assemblée nationale, Mme Marie-Jo Zimmermann, présidente, était accompagnée de deux vice-présidentes, Mme Danielle Bousquet et Mme Claude Greff.
Mme Brigitte Grésy, inspectrice générale des affaires sociales et M. François Fatoux, délégué général de l'Observatoire sur la responsabilité sociale des entreprises, se sont joints à ces entretiens organisés par l'ambassade de France.
Au cours de ce déplacement, la délégation parlementaire a pu s'entretenir avec le président du Stortinget, M. Thorbjørn Jagland, les responsables des principales formations politiques en charge de la politique de l'égalité entre les sexes, M. Angran Gabrielsen, ancien ministre du commerce et de l'industrie, qui est à l'origine de la loi imposant un quota de femmes dans les conseils d'administration des principales sociétés norvégiennes, Mme Knutsen, secrétaire d'Etat à l'enfance et à l'égalité, les responsables administratifs du département des affaires familiales et de l'égalité, ainsi que plusieurs femmes qui sont entrées dans le conseil d'administration de sociétés à la faveur de la loi.
a) La Norvège : un pays avancé en matière de parité
La Norvège est un pays de 4,8 millions d'habitants qui dispose d'importantes réserves d'hydrocarbures. Elle était, en 2007, le cinquième exportateur mondial de pétrole et le troisième exportateur mondial de gaz naturel.
C'est un pays qui se montre assez en pointe en matière d'égalité :
- Les femmes ont obtenu le droit de vote dès 1913 ;
- La loi a imposé une forme de parité politique dès 1993 dans les conseils municipaux et dans les comités qui en dépendent, en disposant que la proportion de l'un ou l'autre sexe ne pouvait descendre en dessous de 40 % ;
- Ces « quotas » n'ont en revanche pas été imposés à l'échelon national ; mais certains partis - le parti travailliste notamment - se sont cependant imposés eux-mêmes cette règle ; ainsi, le Parlement monocaméral compte-t-il 38 % de femmes, et ce pourcentage est stable depuis plusieurs années. Le gouvernement actuel est composé de façon paritaire : 18 ministres, 9 hommes et 9 femmes.
Envisagé sous l'angle de l'égalité professionnelle, le marché du travail présente, au départ, des caractéristiques comparables à la situation française :
- 80 % des femmes sont actives mais le marché est segmenté suivant le genre : les hommes sont surreprésentés dans l'industrie, les femmes se tournent massivement vers le secteur tertiaire et les services ;
- alors que les femmes sont plus nombreuses que les hommes à être diplômées de l'enseignement supérieur, et qu'elles devraient fournir aux sociétés autant, sinon davantage, de hauts potentiels que les hommes, leur déroulement de carrière prend du retard dès 35 ans, et elles n'occupent qu'une faible proportion des emplois de direction ;
- enfin, les femmes sont souvent employées sur des postes à temps partiel.
Les autorités norvégiennes s'efforcent cependant d'y remédier, et mettent en avant deux mesures particulièrement énergiques.
b) Des congés parentaux généreux en faveur de la mère et du père
Les congés parentaux garantis par la loi sont généreux. Leur originalité est de mettre l'accent sur le rôle des pères de façon à faire évoluer la répartition des charges familiales dont la rigidité constitue un frein à l'égalité professionnelle.
La loi garantit un congé indemnisé de :
- 9 semaines à la mère ;
- 8 semaines au père, durée qui devrait prochainement être portée à 10 semaines ;
- 29 semaines supplémentaires, à partager à volonté, entre les deux parents.
Ces congés sont effectivement pris. De l'aveu général, les pères sont heureux de les prendre et il est socialement mal vu d'y renoncer.
Même les députés, qui deviennent père en cours de mandat, n'hésitent pas à les prendre. Ils sont alors remplacés par leur suppléant pour la durée de leur absence.
c) La loi imposant un quota de 40 % de femmes dans les conseils d'administration
Une loi, adoptée en 2003, a progressivement imposé aux entreprises publiques, puis, à compter du 1er janvier 2006, aux entreprises cotées en bourse, de compter au moins 40 % de femmes dans leurs conseils d'administration. Les sociétés disposent d'un délai de 2 ans pour se mettre en conformité avec la loi.
La sanction du non-respect de cette disposition peut aller jusqu'à la dissolution de la société. Elle peut cependant être commuée en lourde amende si la preuve est apportée que cette dissolution affecterait gravement l'économie nationale.
Cette disposition est semble-t-il bien respectée par les entreprises concernées et ses effets ont été rapides.
Le patronat, d'abord réticent à l'égard d'une réforme qui pouvait apparaître comme une restriction au droit de propriété des sociétaires, a finalement accepté une mesure qui avait d'ailleurs été présentée par un ministre conservateur, en charge du commerce et de l'industrie, et que celui-ci défendait au nom de l'efficacité économique.
De sa propre initiative, le patronat a lancé un programme intitulé « female future » qui se propose à la fois d'identifier les candidates ayant un bon profil pour siéger dans un conseil d'administration, et de leur dispenser une formation.
Cette mesure, bien respectée par les entreprises, s'est traduite à la fois par une féminisation et par un rajeunissement des conseils d'administration : les femmes ainsi recrutées sont en effet plus jeunes que les hommes qui y siégeaient habituellement. Cette évolution sociologique tendrait à renforcer une tendance à la professionnalisation des conseils d'administration qu'encourage actuellement toute une réflexion sur la corporate governance.
Cette féminisation se borne, cependant, aux seuls conseils d'administration. Ce n'est que par contagion qu'elle facilitera ultérieurement l'accès des femmes aux fonctions de direction des entreprises.