Engagement bénévole et vie associative (Conclusions de la CMP)
M. le président. - L'ordre du jour appelle l'examen des conclusions de la commission mixte paritaire (CMP) chargée d'élaborer un texte sur les dispositions restant en discussion de la proposition de loi visant à soutenir l'engagement bénévole et à simplifier la vie associative.
M. Yan Chantrel, rapporteur pour le Sénat de la CMP . - La CMP, réunie le 27 mars dernier, a établi un texte commun. Je salue l'engagement du député Quentin Bataillon, ainsi que celui des sénateurs Laurent Lafon, président de la commission, Cédric Vial, Anne Ventalon et Annick Billon.
Le compromis trouvé conserve de nombreux apports du Sénat, notamment le bénéfice du don de congés monétisés pour tous les salariés ou encore l'exonération de redevance d'occupation du domaine public pour les associations organisant des événements.
Nous avions une ligne rouge : imposer de nouvelles contraintes aux associations sous couvert d'information notamment. Nos collègues députés se sont ralliés à notre position. Nous avons conservé le texte du Sénat, qui excluait les contractuels de la fonction publique d'une mise à disposition au profit des associations.
La CMP a supprimé la possibilité pour un salarié partant à la retraite de conserver ses droits acquis à la formation professionnelle. Une telle disposition aurait ouvert une brèche dans le principe même du compte personnel de formation (CPF).
Nous avons dû faire quelques concessions, ainsi sur le réseau « Guid'Asso ». Sans remettre en cause cette politique publique, nous sommes sceptiques sur la nécessité de l'inscrire dans la loi.
Néanmoins, j'entends les craintes venues du tissu associatif, à l'heure des restrictions budgétaires : madame la ministre, à vous de faire vivre ce dispositif, y compris budgétairement !
Pour des raisons de conformité à la législation européenne, nous avons supprimé en CMP l'article 6 ter, qui aurait permis aux associations de bénéficier du régime fiscal du groupe TVA. Madame la ministre, je vous interpelle solennellement pour que votre gouvernement consulte en amont le Comité européen de la TVA, démarche nécessaire au vote de cette réforme fiscale.
Nous avons tous la volonté de mieux faire connaître l'engagement associatif. Je salue les sénateurs et sénatrices qui se sont engagés en faveur de ce texte, qui, je l'espère, sera adopté par l'ensemble des parlementaires. (Applaudissements sur les travées du groupe SER et du RDPI ; MM. Pierre Ouzoulias, Laurent Lafon et Mme Laure Darcos applaudissent également.)
Mme Prisca Thevenot, ministre déléguée chargée du renouveau démocratique, porte-parole du Gouvernement . - Quinze millions : c'est le nombre de Français bénévoles engagés dans 1,5 million d'associations. C'est une force inouïe, qui contribue à la vie démocratique de notre nation. Chaque jour, vous les voyez à l'oeuvre lors des manifestations sportives et culturelles. À l'heure où nous parlons de la crise de l'engagement, soulignons l'action de nos associations, coeur battant de nos communes, qui traduisent chaque jour en actes la promesse républicaine de liberté, d'égalité et de fraternité. Il est important de soutenir la vie associative, véritable rempart contre le repli sur soi, comme l'ont fait depuis 2017, le Gouvernement et la majorité.
En 2024, le Fonds pour le développement de la vie associative (FDVA) est passé à 70 millions d'euros, soit 20 millions d'euros supplémentaires. Il a bénéficié à 16 000 structures l'an passé. Pour les plus petites d'entre elles, le soutien de l'État est déterminant, voire vital.
Le soutien de l'État n'est pas seulement financier : nous avons consolidé la protection juridique des dirigeants d'associations ; Mon Compte Asso ou le Guid'Asso simplifient leur quotidien ; une plateforme de validation des acquis de l'expérience valorise les compétences des bénévoles.
Les avancées majeures dans le monde associatif ont été faites dans un dialogue constant avec ses acteurs. Ce texte a été forgé avec et pour les associations, avec et pour les bénévoles. Il s'inscrit dans la continuité des Assises de la simplification associative et de la consultation nationale de 2022 qui a recueilli 15 000 propositions.
Je salue le travail du Sénat et de l'Assemblée nationale sur ce texte, tant attendu par le secteur associatif. Le travail en CMP a été exemplaire. Cette unité, en faisant de nos nuances politiques une force, loin des querelles polémiques, nous pourrions l'obtenir sur d'autres sujets, pour la grandeur de notre nation.
Ce texte prévoit l'ouverture des conditions pour abonder le CPF des bénévoles via le compte d'engagement citoyen, et l'ouverture du mécénat de compétences aux entreprises de moins de 5 000 salariés ainsi que son extension à la fonction publique, notamment hospitalière.
Le Guid'Asso se voit inscrit dans la loi. Chaque année, les crédits de ce réseau sont en hausse.
Le Gouvernement s'engage à évaluer la compatibilité avec le droit européen de la mesure visant à permettre aux associations composées de plusieurs entités de bénéficier du régime de groupe. (Applaudissements sur les travées du RDPI ; Mme Évelyne Perrot applaudit également.)
M. Joshua Hochart . - Chaque jour, soir ou week-end, 15 millions de bénévoles accompagnent, encadrent voire éduquent nos jeunes et nos moins jeunes. Sans eux, nos clubs n'existeraient pas, notre vie sociale serait bien pauvre. Ils s'engagent, qu'il pleuve, qu'il vente ou qu'il neige. Il est important de les soutenir au moment de la crise des vocations.
Je salue l'assouplissement des conditions d'acquisition de droits du compte d'engagement citoyen, celui des conditions de recours aux congés d'engagement associatif et au congé de citoyenneté, tout comme l'élargissement du mécénat de compétences. Ces avancées expliquent notre vote en faveur du texte, même si nous regrettons le rejet de nos amendements sur l'octroi de trimestres de retraite pour engagement bénévole et sur la suppression de la taxation des organes déconcentrés de structures associatives délégataires d'une mission de service public au titre des bureaux et locaux commerciaux.
Mme Laure Darcos . - (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP ; M. Martin Lévrier applaudit également.) La France est riche de ses milliers d'associations, qui oeuvrent aux côtés des citoyens. Elles sont utiles, alors que l'individualisme progresse. La solidarité, l'empathie et la générosité guident nos bénévoles.
Je salue celles et ceux qui donnent de leur temps pour animer nos territoires. Je rends un hommage appuyé aux éducateurs qui accompagnent les jeunes, aux associations de sauvegarde du patrimoine. Ensemble, ils nous font progresser collectivement. Les associations sont également des lieux d'échange. En Essonne, je salue l'Olympique Club Giffois, Cultures du Coeur Essonne, ou encore les Amis du château et du musée de Dourdan.
L'aide financière des collectivités territoriales est souvent une condition du fonctionnement de ces associations. Le tissu associatif a été durement éprouvé par le covid et l'inflation. La simplification des démarches administratives et la sécurisation de leur financement vont donc dans le bon sens.
La CMP est parvenue à un accord. Nous nous en félicitons, car ce texte compte des avancées concrètes judicieuses.
Le groupe Les Indépendants votera ce texte. Je salue le travail de Yan Chantrel. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP ; M. Yan Chantrel applaudit également.)
M. Pierre-Antoine Levi . - (Applaudissements sur les travées du groupe UC ; M. Pierre Jean Rochette applaudit également.) Nous finalisons une proposition de loi qui porte sur l'essence même de notre cohésion sociale. Notre République se distingue par la vigueur de son secteur associatif. La France a une tradition d'engagement et de solidarité qui fait notre fierté.
Je salue le travail du rapporteur Yan Chantrel et des sénateurs qui ont enrichi le texte. Celui-ci s'inscrit dans la suite de la consultation nationale et des Assises de la simplification associative.
L'ouverture de droits au CPF et la simplification des conditions de prêts entre associations renforcent le soutien à ces dernières. L'assouplissement du recours au congé associatif, l'élargissement du mécénat de compétences aux PME et son extension à trois ans montrent le soutien du Sénat aux bénévoles.
La CMP a su conserver les objectifs de la proposition de loi et l'a complétée par des avancées majeures. Ce texte est issu d'un dialogue constructif avec toutes les parties prenantes.
Conscient de l'importance de ce texte pour le monde associatif, le groupe UC votera en sa faveur. (Applaudissements sur les travées du groupe UC et du RDPI)
Mme Annick Billon. - Très bien !
M. Michel Laugier. - Bravo !
Mme Mathilde Ollivier . - (Applaudissements sur les travées du GEST) Je salue l'introduction de l'article 7 bis et l'adoption de mon amendement pour la transparence des prêts entre associations, ainsi que le travail de Yan Chantrel.
Mais des dispositions requièrent notre vigilance, comme celles de l'article 3 bis, avec l'expérimentation de mise à disposition de fonctionnaires hospitaliers. Je reste aussi partagée sur l'encouragement au mécénat de compétences.
Le Gouvernement a choisi d'annuler 129 millions d'euros de crédits en faveur du tissu associatif. Vous préférez mettre de l'argent dans le service national universel (SNU) plutôt que dans le tissu associatif local. (M. Martin Lévrier proteste.) Ayons le courage de réduire le temps de travail : il faut du temps pour le bien commun et pour son épanouissement personnel.
Pendant que vous soutenez cette proposition de loi émanant des rangs de la majorité, le Gouvernement met en danger les associations se mobilisant pour la défense du vivant : 2,76 millions d'euros, voici le coût de la répression des opposants à l'A69. Les alertes se multiplient. Le rapporteur spécial de l'ONU s'inquiète de l'augmentation de la répression et de la criminalisation des actions pacifiques de désobéissance civile.
La solidarité bénévole est notre bien commun, aussi voterons-nous ce texte. Demain, il faudra aller plus loin. (Applaudissements sur les travées du GEST ; Mme Laure Darcos applaudit également.)
M. Gérard Lahellec . - (Mme Monique de Marco applaudit.) Sans revenir sur nos débats, je rappelle que c'est l'engagement des associations qui tient notre société debout. Cette proposition de loi le rend plus simple et moins contraignant. Nous souscrivons à ses objectifs.
L'essentiel des dispositions adoptées ici a été retenu en CMP, notamment l'autorisation donnée aux collectivités de concéder aux associations, à titre gratuit, l'utilisation temporaire du domaine public sans imposer de justification systématique de son utilité publique.
M. Pierre Ouzoulias. - Très bonne mesure !
M. Gérard Lahellec. - Nous voterons ce texte. (Applaudissements sur les travées des groupes CRCE-K et SER)
M. Ahmed Laouedj . - Nous avons la chance de bénéficier d'un tissu associatif riche : 22 millions de citoyens sont engagés. La dernière enquête de France bénévolat souligne le repli continu des plus âgés et une hausse de l'engagement des plus jeunes.
De nombreux bénévoles s'engagent occasionnellement, on parle alors de bénévolat « post-it ». Ainsi, la moitié des bénévoles s'investissent moins de 45 heures par an, ce qui contraint les associations à revoir leur mode d'organisation et à former les nouveaux bénévoles. Les associations sont aussi fragilisées, notamment par l'augmentation de leurs coûts.
La proposition de loi, qui a recueilli un large consensus des acteurs de terrain, a le mérite de proposer des solutions concrètes. La CMP n'a pas introduit de changements importants.
L'article 9, adopté par le Sénat, a été retenu par la CMP.
Le RDSE est très attaché au secteur associatif et au bénévolat, aussi votera-t-il cette proposition de loi.
M. Martin Lévrier . - (Applaudissements sur les travées du RDPI ; Mme Laure Darcos applaudit également.) En ma qualité de représentant des Yvelines, département riche de ses associations, je suis convaincu de l'importance de ce texte. Notre pays compte sur ses associations pour relever les défis sociaux, environnementaux et culturels auxquels il est confronté. Nous ne pouvons plus imaginer un monde sans électricité, nous ne pouvons pas non plus imaginer la France sans son tissu associatif. Le législateur doit donc soutenir les associations, confrontées à de nouveaux défis.
Je salue l'accord en CMP, qui a débouché sur des mesures concrètes et ambitieuses : assouplissement du compte d'engagement citoyen, du congé d'engagement associatif et du congé de citoyenneté ; élargissement aux entreprises de moins de 5 000 salariés du mécénat de compétences ; simplification des conditions de prêts entre associations.
Cette proposition de loi apporte un souffle nouveau aux associations.
Je regrette que certains articles aient été supprimés, mais d'autres ont été maintenus - sur le Guid'Asso ou l'exonération des redevances d'occupation du domaine public - , c'était un compromis nécessaire et la preuve de la richesse de notre bicamérisme.
Je me réjouis de la suppression de l'ouverture du CPF aux retraités, qui aurait fait peser un risque sur sa soutenabilité financière.
Merci aux rapporteurs Quentin Bataillon et Yan Chantrel.
Le RDPI votera ce texte qui envoie un message fort à ceux qui oeuvrent pour le bien commun. (Applaudissements sur les travées du RDPI)
Mme Colombe Brossel . - (Applaudissements sur les travées du groupe SER et du GEST) Nous voici au bout du chemin. C'est une satisfaction. Ce texte ne révolutionnera pas le champ associatif, mais il favorisera l'engagement bénévole et facilitera le fonctionnement quotidien des associations.
Je remercie notre rapporteur Yan Chantrel, qui a su mettre à profit ses talents de négociateur aux côtés de Marie-Pierre Monier et de son homologue de l'Assemblée nationale.
Nous nous félicitons du maintien de la possibilité pour un salarié de donner des jours de congé ou de repos. L'extension du congé de citoyenneté est également une bonne chose. Aucun moyen de valoriser l'engagement associatif ne doit être négligé.
Mais l'État doit prendre toute sa part. C'est pourquoi la rédaction d'un guide aurait été une bonne initiative. La CMP ne l'a pas retenu, mais elle a donné une base légale au Guid'Asso.
Je regrette l'impossibilité d'abonder le CPF des retraités lorsqu'ils s'investissent dans les associations.
Parce que toutes les avancées en faveur de la vie associative sont bonnes à prendre, nous voterons les conclusions de la CMP. Nous resterons néanmoins attentifs à ce que les associations ne soient pas les victimes collatérales des choix budgétaires du Gouvernement. (Applaudissements sur les travées du groupe SER et du GEST)
Mme Anne Ventalon . - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Je salue le travail commun qui a mené à cette réussite collégiale. Ce n'est pas le grand soir, mais faut-il s'en plaindre ? Au lieu d'une longue et incertaine navette parlementaire, ce texte parvient à son terme et ses mesures vont entrer en vigueur rapidement.
Nous avons plus que jamais besoin de l'investissement des bénévoles dans les associations. Je n'adhère pas au discours tendant à fonctionnariser nos concitoyens qui s'engagent, mais la nation doit les soutenir.
Dans sa rédaction initiale, le texte proposait des mesures intéressantes de simplification et de sécurisation juridique sur les loteries, le mécénat de compétences ou les prêts entre associations.
Notre rapporteur a enrichi la proposition de loi, avec notamment la déclaration unique de TVA.
Fort logiquement, ce qui crée des obligations aux bénévoles va à l'encontre de l'objectif recherché. Par cohérence, nous n'avons pas souhaité conserver les nouvelles contraintes imposées aux entreprises : c'est ainsi que le Sénat a obtenu la suppression de l'obligation relative à la déclaration de performance extra-financière.
Le Sénat a également obtenu le don de jours de congé entre salariés, demande formulée par les associations elles-mêmes. Qu'est-ce que l'engagement associatif, sinon une question de temps ? Avec un peu d'imagination et de bonne volonté, on peut toujours faire progresser la solidarité.
Les conclusions de la CMP reprennent l'essentiel des propositions des sénateurs Les Républicains, notamment de Cédric Vial. Aussi nous les voterons. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; M. Michel Laugier applaudit également.)
La proposition de loi est adoptée.
(Applaudissements sur plusieurs travées des groupes Les Républicains, UC et INDEP)