SÉANCE

du mercredi 31 janvier 2024

58e séance de la session ordinaire 2023-2024

Présidence de M. Gérard Larcher

Secrétaires : M. Jean-Michel Arnaud, Mme Catherine Conconne.

La séance est ouverte à 15 heures.

Le procès-verbal de la précédente séance, constitué par le compte rendu analytique, est adopté sous les réserves d'usage.

Déclaration du Gouvernement, suivie d'un débat, en application de l'article 50-1 de la Constitution

M. le président.  - L'ordre du jour appelle une déclaration du Gouvernement, suivie d'un débat, en application de l'article 50-1 de la Constitution.

M. Gabriel Attal, Premier ministre .  - (Applaudissements sur les travées du RDPI, du groupe INDEP et sur plusieurs travées du RDSE et du groupe UC) « Lorsque le Sénat est faible, la République est faible. Lorsque le Sénat est fort, la République est forte. » (Applaudissements sur les travées du RDPI, du groupe INDEP, du RDSE, du groupe UC et sur quelques travées du groupe Les Républicains)

M. Roger Karoutchi.  - Arrêtez !

M. Gabriel Attal, Premier ministre.  - « Et lorsqu'il n'y a pas de Sénat, il n'y a plus de République. » (Exclamations au centre ; applaudissements sur les travées du RDPI, des groupes INDEP, UC et du RDSE)

Ces mots ne sont pas les miens (« Ah ! » sur de nombreuses travées), mais je les fais miens ! Ce sont ceux du recteur Prélot, sénateur des premières années de notre Ve République. Le Sénat est la chambre du long terme, du débat d'idées et du compromis, du respect de nos institutions, la voix des territoires, des élus et des préoccupations du quotidien. Pas de République sans bicamérisme ! En période de crise, nous avons besoin du Sénat, de sa capacité d'incarner hauteur de vue et proximité avec les Français.

M'adresser à vous, c'est m'adresser aux territoires, notamment d'outre-mer, dans leur singularité. C'est adresser la volonté de construire en commun.

Mon équipe, la plus resserrée de la Ve République...

M. Jean-François Husson.  - Cela ne va pas durer !

M. Gabriel Attal, Premier ministre.  - ... comprend un ancien sénateur, Christophe Béchu (M. Emmanuel Capus applaudit), et un actuel, Sébastien Lecornu. (On ironise à droite.) J'ai aussi avec moi des élus municipaux, avec Catherine Vautrin et Rachida Dati ; je compte des élus locaux - je le suis moi-même depuis dix ans -, qui aiment leur territoire comme leur pays. (Quelques exclamations à gauche)

Ensemble, avec mon équipe, je m'engage devant vous à travailler sur tous les textes. J'y ai tenu comme ministre des comptes publics et de l'éducation nationale, j'y tiendrai comme Premier ministre.

Je m'engage à suivre le cap fixé par le Président de la République. C'est au contact des élus que j'ai construit ma déclaration de politique générale et avec eux que je veux gouverner. Je serai un Premier ministre de terrain à la tête d'un gouvernement de terrain.

Je m'engage pour la simplification et le bon sens. (M. Jean-François Husson ironise.) Élus, citoyens et agriculteurs nous disent crouler sous les normes. Ma méthode : dialoguer, écouter, décider de mesures claires pour que les choses changent.

Le cri de colère de nos agriculteurs est le reflet des doutes et exaspérations, mais aussi des espoirs et opportunités. (Exclamations sur plusieurs travées du groupe Les Républicains)

M. Jean-François Husson.  - Espoirs déçus !

M. Gabriel Attal, Premier ministre.  - La France est une grande patrie agricole. L'agriculture fait partie de nos racines, chaque territoire en a son emblème. Pays, paysan : l'un ne va pas sans l'autre ! La France ne serait pas la France sans ses agriculteurs.

Pourtant, nos agriculteurs souffrent. Ils incarnent les défis de la France qui doute. Dévoués, ils ne connaissent pas le repos - sans que leur rémunération soit à la hauteur de leur engagement. Les Français des classes moyennes se reconnaissent en eux, qui ne peuvent compter que sur leur travail, mais doivent compter chaque euro.

Les agriculteurs sont les premières victimes du réchauffement climatique. Ils croulent sous les normes, chacune de leurs initiatives est surréglementée. Les Français partagent leur volonté de se libérer de la bureaucratie.

M. François Bonhomme.  - Et après ?

M. Gabriel Attal, Premier ministre.  - Les agriculteurs savent ce qu'apporte la PAC, mais n'acceptent pas ses lourdeurs. De même, nos compatriotes savent la force qu'apporte l'Europe, mais veulent une Union européenne plus protectrice.

Il faut prendre notre part. J'en prends l'engagement.

M. Jean-François Husson.  - Heureusement !

M. Gabriel Attal, Premier ministre.  - Nous ne surtransposerons pas les normes européennes ! (Applaudissements sur des travées du RDPI, du groupe INDEP, du RDSE et du groupe UC) Nous ne pouvons mettre nous-mêmes des boulets aux pieds de nos agriculteurs, qui aspirent, à raison, à construire notre indépendance agricole et alimentaire.

Nous entendons cet appel, qui rejoint celui des 68 millions de Français qui veulent une France plus indépendante.

Ce cri des agriculteurs appelle la reconnaissance. Boucs émissaires, ils ont été traités de pollueurs, de bandits, de bourreaux. (On le déplore sur plusieurs travées du groupe Les Républicains.)

M. André Reichardt.  - Par qui ?

M. Gabriel Attal, Premier ministre.  - Comme eux, nos compatriotes refusent de se résigner au déclin promis par des oiseaux de mauvais augure. (M. Yannick Jadot ironise.) Ils veulent défendre notre identité.

Sous l'égide du Président de la République, je veux restaurer la fierté française. Je veux que le travail paie plus et mieux, notamment pour les classes moyennes, en débureaucratisant le pays. Je porte une souveraineté nationale et européenne : une France plus libre dans une Europe plus forte.

Je veux que chaque Français soit fier de son pays. Cette aspiration a été portée par les gouvernements depuis 2017, ceux d'Édouard Philippe, de Jean Castex et d'Élisabeth Borne, et le mien n'y dérogera pas.

Comme le veut la coutume républicaine, vous avez entendu hier la lecture de ma déclaration de politique générale à l'Assemblée nationale, lue par Bruno Le Maire dans ses moindres détails. Je l'en remercie. (Applaudissements sur quelques travées du RDPI ; sourires)

M. Jean-François Husson.  - Excellent !

M. Hussein Bourgi.  - C'est ce qu'il fait de mieux !

M. Gabriel Attal, Premier ministre.  - Je souhaite revenir sur les grands combats à venir du Gouvernement.

À l'écoute des Français, des forces politiques, des partenaires sociaux, des élus locaux, j'ai bâti de premières réponses.

J'ai entendu l'exaspération des classes moyennes, trop aisées pour toucher des aides, pas assez pour être à l'aise, et qui demandent que le travail paie plus que l'inactivité. J'ai entendu leurs doutes, sur nos services publics, sur le respect de l'autorité dans notre société. Leurs craintes pour la santé, l'éducation, la sécurité. Leur crainte du déclin de services publics pourtant financés par l'impôt ; d'une France à deux vitesses, où les classes moyennes et modestes n'auraient plus accès à des services de qualité ; où ils n'en auraient pas pour leurs impôts. (M. Hervé Gillé proteste.)

Parler aux Français, c'est parler de transition écologique. Les jeunes qui s'engagent pour la planète, les victimes d'inondations du Pas-de-Calais, les agriculteurs que j'ai rencontrés dans le Rhône ou en Haute-Garonne, tous m'ont interpellé sur le dérèglement climatique.

Mme Cécile Cukierman.  - Et la sécheresse ?

M. Gabriel Attal, Premier ministre.  - Depuis 2017, nous avons mené des réformes fortes pour libérer le marché du travail.

M. Pascal Savoldelli.  - Le marché ! Ça, c'est vrai...

M. Gabriel Attal, Premier ministre.  - Assurance chômage, retraites... Le chômage est à son plus bas niveau depuis vingt-cinq ans, deux millions d'emplois ont été créés, on crée plus d'emplois industriels qu'on n'en perd. C'est un début !

Nous amplifions notre action sur l'apprentissage : nous partions de moins de 300 000 apprentis en 2017, nous approchons le million.

M. Jean-François Husson.  - Il y a des économies à faire !

M. Gabriel Attal, Premier ministre.  - Depuis 2017, nous avons entamé le redressement de nos services publics. Nous avons investi des montants historiques pour l'hôpital, engagé des réformes fortes pour l'éducation, revalorisé les professeurs. Nous avons renforcé notre État régalien, avec des investissements sans précédent pour notre sécurité, notre justice et nos armées.

M. Jean-François Husson.  - Qui paiera ?

M. Gabriel Attal, Premier ministre.  - Nous avons agi pour les services publics de proximité, en maillant le territoire d'espaces France Services. (Protestations à gauche)

M. Michel Savin.  - Tout va bien !

M. Gabriel Attal, Premier ministre.  - Nos émissions de gaz à effet de serre ont baissé comme jamais : 1 % de baisse annuelle avant 2017, 2 % lors du premier quinquennat, 5 % l'an dernier ! En investissant et en accompagnant les industries (applaudissements sur les travées du RDPI), nous obtenons des résultats plus rapides qu'en taxant et en punissant.

M. Jacques Grosperrin.  - Les JO !

M. Gabriel Attal, Premier ministre.  - Cela se fera avec les territoires.

Cela dit, je suis lucide sur les difficultés de notre pays. Il y a des Français qui souffrent, doutent, attendent, voire n'attendent plus rien. (Murmures de protestation à gauche) Il reste du chemin à parcourir pour restaurer la confiance, pour arriver au dernier kilomètre : ce moment où les annonces se traduisent dans leur quotidien.

Agir pour le travail sera le premier de mes combats. (M. Jean-François Husson s'exclame.) Agir pour le travail, c'est veiller à ce que ceux qui travaillent gagnent toujours plus que ceux qui ne travaillent pas. C'est offrir des perspectives d'évolution à chacun. C'est résoudre ce paradoxe d'un chômage autour de 7 %, avec des centaines de milliers d'emplois non pourvus.

« Désmicardiser », déverrouiller, débureaucratiser : voilà mes trois priorités.

Tout d'abord, il ne doit plus y avoir de minimum de branche inférieur au Smic. Nous y travaillons.

De nombreux Français sont au Smic ou légèrement au-dessus. Mais avec la prime d'activité et les exonérations concentrées autour du Smic, personne n'a intérêt à augmenter les salaires : l'employeur paiera des cotisations, le salarié, souvent, devient imposable sur le revenu. Il faut sortir de ce coin fiscalo-social.

Notre Smic est plus élevé que chez nos voisins, ce qui est une chance, mais nous avons aussi plus de salariés qui en sont proches du fait de cette trappe, dont nous devons sortir.

M. Jean-François Husson.  - Ce n'est pas nouveau !

M. Gabriel Attal, Premier ministre.  - Des travaux ont été engagés, des propositions ont été faites, je veux que nous amorcions cette évolution dans les prochains textes financiers.

Je veux également avancer sur la rémunération des fonctionnaires en favorisant l'engagement et le mérite, et la seule ancienneté. Un projet de loi sera présenté dès le second semestre.

Je veux réformer l'assiette sociale pour les artisans, agriculteurs et professions libérales, afin qu'ils acquièrent davantage de droits sociaux, notamment à la retraite, sans cotiser davantage. (Mme Solanges Nadille applaudit.)

Nous voulons déverrouiller le travail en accompagnant vers l'emploi ceux qui en sont exclus. C'est le sens de l'expérimentation du RSA accompagné de 15 heures d'activité pour l'insertion, dans 18 départements. Ils seront 47 le mois prochain, avant une généralisation au 1er janvier 2025. (Applaudissements sur plusieurs travées du RDPI)

Nous voulons aller plus loin dans la réforme de l'assurance chômage en supprimant les trappes à inactivité. L'allocation de solidarité spécifique (ASS) sera progressivement supprimée, car la retraite doit toujours être le fruit de trimestres de travail et non d'allocations sociales. (Protestations à gauche)

M. Rachid Temal.  - Salauds de pauvres !

M. Gabriel Attal, Premier ministre.  - Déverrouiller le travail passe par la solidarité à la source.

Mme Cécile Cukierman.  - Augmentez les salaires !

M. Gabriel Attal, Premier ministre.  - Déverrouiller le travail, c'est s'assurer que chacun touche ce à quoi il a droit, avec la solidarité à la source.

C'est aussi s'adapter aux aspirations. Équilibre entre vie professionnelle et personnelle, télétravail, horaires : l'État doit être exemplaire et proposera d'expérimenter, comme je l'ai fait à Bercy.

Déverrouiller le travail, c'est libérer notre économie. Au printemps, nous examinerons un projet de loi en ce sens, pour déverrouiller certaines professions comme, en son temps, la fameuse loi Macron.

Enfin, déverrouiller le travail, c'est permettre l'accès au logement, clé de l'emploi. Le logement est une matrice de notre société ; pour les classes moyennes, être propriétaire de son logement est la garantie d'une retraite sereine.

Nous voulons créer un choc d'offre grâce à la simplification des normes, notamment sur les diagnostics de performance énergétique (DPE) et les zonages. Nous désignerons vingt territoires engagés pour le logement et y créerons 30 000 nouveaux logements d'ici trois ans. (Exclamations à gauche et sur les travées du groupe Les Républicains) Nous réquisitionnerons les bâtiments vides, notamment de bureaux. (Mme Sophie Primas proteste ; M. François Bonhomme ironise.) La Banque des territoires mobilisera 2 milliards d'euros pour acheter du foncier pour le logement social.

Ce n'est qu'un début, pour construire, permettre l'accès à la propriété, loger prioritairement les agents publics qui assurent notre sécurité, notre santé et l'éducation de nos enfants. (Applaudissements sur les travées du RDPI ; Mme Véronique Guillotin applaudit également.)

Nous proposerons de faire évoluer la loi SRU pour répondre aux attentes des élus locaux. (Applaudissements sur les travées du RDPI, du groupe INDEP, du RDSE, ainsi que sur des travées des groupes UC et Les Républicains)

Mme Audrey Linkenheld.  - Il n'y a aucune attente !

M. Gabriel Attal, Premier ministre.  - Les maires auront la main pour la première attribution des logements sociaux, et les logements intermédiaires seront désormais inclus dans la part de logement social. (Mêmes applaudissements ; protestations à gauche)

Mme Marie-Pierre de La Gontrie.  - C'est honteux !

M. Gabriel Attal, Premier ministre.  - Nous maintiendrons bien sûr l'exigence d'un nombre minimal de logements très sociaux. À la veille des 70 ans de l'appel de l'abbé Pierre (vives protestations à gauche), je veux rappeler notre engagement contre le mal-logement. Un logement digne est la condition d'une vie digne.

M. Mickaël Vallet.  - Quand ce n'est pas de Gaulle, c'est l'abbé Pierre !

M. Gabriel Attal, Premier ministre.  - Nous travaillerons ensemble au Sénat sur le projet de loi contre les propriétés dégradées, adopté à la quasi-unanimité à l'Assemblée nationale.

Nous travaillerons sur l'hébergement d'urgence. En 2017, il y avait à peine 100 000 places : leur nombre a doublé ! (Applaudissements sur les travées du RDPI ; protestations à gauche) Nous n'avons pas de leçons à recevoir !

Mme Marie-Pierre de La Gontrie.  - À l'époque, vous étiez de gauche !

M. Gabriel Attal, Premier ministre.  - À l'Assemblée nationale, ils ont crié très fort, j'ai tout de même déroulé mon discours... (Applaudissements sur les travées du RDPI, du groupe INDEP, ainsi que sur quelques travées du groupe UC)

Notre troisième priorité est de débureaucratiser. Il y a trop de règles, de normes qui briment, qui brident les initiatives. Il faut donc simplifier. Nous engagerons à l'automne une réforme du droit du travail pour simplifier la vie des PME et TPE. Nous avons déjà avancé avec la loi Industrie verte, mais il faut aller plus loin encore. En France, on met deux fois plus de temps pour lancer un projet industriel qu'en Allemagne ! (M. Jean-François Husson le confirme.) La deuxième loi Industrie verte centrera le travail de la Commission nationale du débat public (CNDP) sur les grands projets et libérera les plus petits de la procédure. (Mme Sophie Primas acquiesce.)

M. Thomas Dossus.  - Et la démocratie ?

M. Gabriel Attal, Premier ministre.  - La débureaucratisation doit toucher tous les secteurs. Elle sera faite d'abord avec les maires, premiers témoins de toutes ces complexités. Ils sont les plus lucides sur ces contraintes qui pèsent sur nos entrepreneurs, nos agriculteurs. C'est donc avec eux que nous construirons des solutions. (MM. Guillaume Gontard et Akli Mellouli s'exclament.)

Mme Pascale Gruny.  - Vous avez eu sept ans...

M. Gabriel Attal, Premier ministre.  - Ils seront les porte-voix de nos citoyens.

Déverrouiller, « désmicardiser », débureaucratiser, avec pour objectif de réarmer notre pays (on ironise à gauche ; M. Patrick Kanner mime un soldat qui marche), assurer sa souveraineté. Pour cela, il faut faire preuve de responsabilité budgétaire. La dette publique est une épée de Damoclès au-dessus de notre modèle social, des classes moyennes qui seraient les premières victimes d'une cure d'austérité. Grâce à l'activité et au travail, à la maîtrise des dépenses, à des réformes structurelles, nous tiendrons notre cap pour repasser sous les 3 % de déficit d'ici 2027.

M. Jean-François Husson.  - En 2040 ? Plaisanterie !

M. Gabriel Attal, Premier ministre.  - Sans augmenter les impôts, par une revue de dépenses ambitieuses, avec des premières mesures d'économie annoncées fin mars. Je souhaite que la représentation nationale s'en saisisse bien en amont du projet de loi de finances. (MM. Jean-François Husson et Michel Savin marquent leur scepticisme.)

Nous renforcerons encore la lutte contre la fraude, fiscale, sociale ou douanière. Je vous y sais attentifs, notamment Mme Goulet. (Sourires ; Mme Nathalie Goulet apprécie.)

Grâce à ces réformes, nous réarmerons les services publics. (« Ah ! » à gauche)

M. André Reichardt.  - Que fait la police ?

M. Gabriel Attal, Premier ministre.  - Pour que les Français en soient fiers. Plus vite, plus fort : nous le devons aux soignants. Ces derniers attendent des actes : nous agirons. (Mme Silvana Silvani ironise.) Il faut plus de médecins et de soignants, d'où la suppression du numerus clausus, dont les effets sont en cours. (M. Guy Benarroche s'exclame.) Il faut former davantage. Je ne me résous pas à ce que nos jeunes soient contraints d'aller étudier la médecine à l'étranger. (Applaudissements sur des travées du RDPI, du RDSE et du groupe UC)

Il faut des médecins tout de suite, aussi nous régulariserons les médecins étrangers sur notre territoire. (« Ah ! » à gauche ; Mme Anne Souyris fait un moulinet avec ses mains.) Nous reprendrons la proposition des députés Les Républicains qui crée des passerelles : une infirmière anesthésiste à Bac+5 doit pouvoir entrer en troisième année de médecine. (Applaudissements sur les travées du RDPI, ainsi que sur plusieurs travées des groupes INDEP et UC)

Nous libérerons du temps médical en doublant le nombre des assistants médicaux. Si l'on ne se présente pas à un rendez-vous médical, on doit payer la consultation : chaque année, des millions de consultations se perdent. (Applaudissements sur les travées du RDPI, ainsi que sur plusieurs travées du groupe UC ; protestations sur les travées du GEST et du groupe SER) Il faut responsabiliser. Les droits et devoirs sont pour tout le monde.

M. Hussein Bourgi.  - Ils sont aussi pour vous !

M. Gabriel Attal, Premier ministre.  - Nous continuerons de lutter contre les déserts médicaux, préoccupation forte du Sénat. C'est une de mes priorités. Le service d'accès aux soins (SAS) permet d'améliorer l'accès à la santé. J'étais à Dijon avec certains d'entre vous (M. François Patriat le confirme.) : le système fonctionne et désengorge les urgences.

D'ici à l'été, chaque département doit être doté d'un SAS. Je n'ai pas de tabou, même s'il faut décider d'obligations de gardes pour les médecins libéraux. (Mouvements sur quelques travées à droite)

Nous avons besoin de plus d'infirmières scolaires.

Mme Cécile Cukierman.  - Eh oui !

Mme Silvana Silvani.  - Augmentez les salaires !

M. Gabriel Attal, Premier ministre.  - Dès mai, elles recevront une prime de 800 euros et leur salaire net augmentera de 200 euros par mois. (Applaudissements sur les travées du RDPI et sur quelques travées du groupe UC ; Mme Nathalie Delattre applaudit également.)

Nous reverrons le dispositif MonSoutienPsy pour que les jeunes puissent être soignés. Je sais que le Sénat s'était engagé - je pense aux travaux de Mme Delattre.

Mme Cécile Cukierman.  - Elle va entrer au Gouvernement ! (Sourires)

M. Gabriel Attal, Premier ministre.  - Je peux aussi citer la sénatrice Schillinger ! (Applaudissements sur plusieurs travées du RDPI ; M. Rachid Temal applaudit également ; Mme Patricia Schillinger apprécie.)

Le réarmement de nos services publics, c'est aussi celui de notre école. Les parents s'inquiètent du niveau et les enseignants ont le sentiment de ne plus faire progresser leurs élèves. La réponse, c'est d'abord le choc des savoirs. (On ironise sur plusieurs travées du groupe SER.)

M. Hussein Bourgi.  - Et l'université ?

M. Gabriel Attal, Premier ministre.  - L'école ne doit pas être un escalator qui permettrait de passer de classe en classe automatiquement (Applaudissements sur les travées du RDPI et sur quelques travées du groupe UC) C'est pourquoi nous avons redonné aux enseignants le pouvoir de décider des redoublements. C'est pourquoi nous assumons de relever le niveau du brevet. Nous supprimerons le correctif académique qui conduisait à gonfler artificiellement les notes.

M. Olivier Paccaud.  - Bravo !

Mme Cécile Cukierman.  - Cela fait vingt ans qu'on le fait !

M. Rachid Temal.  - Où est Blanquer ?

M. Gabriel Attal, Premier ministre.  - Mentir aux élèves sur leur niveau, c'est manquer d'exigence, et ne pas respecter notre objectif d'égalité des chances. Un diplôme sans conséquence, c'est un diplôme qui n'a pas de sens.

Pour apprendre, chacun doit pouvoir aller à son rythme - d'où les groupes de niveau, en français et en mathématiques. (Protestations à gauche)

M. Rachid Temal.  - Il manque des profs !

M. Gabriel Attal, Premier ministre.  - Les écrans sont une catastrophe éducative et sanitaire en puissance. Nous avons banni les téléphones portables au collège et régulerons mieux l'usage des écrans, à l'école et en dehors.

M. Rachid Temal.  - Et le théâtre ?

M. Gabriel Attal, Premier ministre.  - Pour apprendre, nos élèves doivent avoir des enseignants devant eux. Nous avons déjà triplé les remplacements, mais nous n'y sommes pas encore.

Nous évaluerons le pacte enseignant et en tirerons les leçons.

Nos élèves ont besoin d'être heureux, c'est pourquoi nous luttons pied à pied contre le harcèlement scolaire. Je suis fier d'avoir lancé une nouvelle stratégie, et que ce soit désormais à l'élève harceleur de quitter l'établissement. (Applaudissements sur les travées du RDPI et sur quelques travées des groupes INDEP, UC et du RDSE)

Une voix à droite.  - C'est grâce à nous !

M. Gabriel Attal, Premier ministre.  - Nous bâtissons une école inclusive. L'État prendra en charge le salaire des accompagnants d'élèves en situation de handicap (AESH) sur la pause de midi, et soutiendra la proposition de loi de Cédric Vial. (Applaudissements sur plusieurs travées du RDPI, du RDSE, des groupes INDEP, UC et Les Républicains ; Mme Marie-Arlette Carlotti applaudit également.)

Nous continuerons à agir pour nos étudiants, en tournant notre enseignement supérieur vers des filières d'avenir.

M. Rachid Temal.  - Tous à Stan' !

M. Gabriel Attal, Premier ministre.  - Nous avons maintenu le repas à 1 euro pour les étudiants boursiers qui en ont besoin, et revalorisé les bourses : 127 euros supplémentaires dans l'Hexagone, 157 euros dans les outre-mer.

Le réarmement de l'école (« Ah ! » à gauche) sera vain si nos valeurs, si l'autorité n'y sont pas respectées. Comme ministre, j'ai toujours été aux côtés des professeurs ; je le reste et le resterai. L'autorité, c'est respecter les professeurs et nos valeurs républicaines. Entre le professeur et l'élève, il y a celui qui a l'autorité du savoir, et celui qui apprend. (Applaudissements sur les travées du RDPI, ainsi que sur plusieurs travées du RDSE et des groupes UC et Les Républicains)

L'autorité, c'est pouvoir enseigner tout le programme, sans exception, et sanctionner les élèves qui ne l'accepteraient pas. C'est veiller à ce que tous les élèves respectent nos valeurs républicaines : liberté, égalité, fraternité, laïcité. Nous assumons de la défendre avec l'interdiction de l'abaya. (MM. Roger Karoutchi et Emmanuel Capus acquiescent.) C'est apprendre partout les paroles de la Marseillaise, doubler les heures d'instruction civique dès le collège.

L'autorité, c'est aussi dans la famille. Lors des émeutes de juillet, la France a été sidérée par la jeunesse des émeutiers - 15, voire 13 ans ! - pour qui la violence est un passe-temps, qui n'ont plus de repères. Nous devons les accompagner, mais aussi mieux les sanctionner, avec des peines adaptées.

M. André Reichardt.  - Très bien !

M. Gabriel Attal, Premier ministre.  - Nous créerons les travaux d'intérêt éducatif pour les moins de 16 ans.

M. Olivier Paccaud.  - Très bien !

M. Gabriel Attal, Premier ministre.  - Nous proposons qu'à la demande des parents, les jeunes à la dérive puissent être placés en internat, où 50 000 places sont vacantes.

Nous devons aussi responsabiliser les parents des jeunes délinquants qui se seraient volontairement soustraits à leur autorité parentale, avec éventuellement des travaux d'intérêt général (TIG).

L'autorité, c'est aussi dans la rue. La délinquance mine la confiance dans le pacte républicain. Nous devons veiller à la sécurité de tous, partout sur le territoire, y compris dans la ruralité. Nous installerons ainsi 238 nouvelles brigades de gendarmerie. Nous amplifierons la lutte contre la drogue, matrice de tous les vices, et pilonnerons les points de deal. Les premiers résultats sont là. Nous voulons taper les trafiquants au porte-monnaie en gelant leurs avoirs. (Mme Nathalie Goulet applaudit.)

Nous voulons agir contre la délinquance du quotidien, notamment les cambriolages.

Pour être efficace, nous avons besoin d'une réponse pénale à la hauteur. Nous voulons une justice plus rapide et plus efficace. Nous lui en donnons les moyens, avec une hausse historique de son budget.

M. Pascal Savoldelli.  - C'est une déclaration de déstockage !

M. Jean-François Husson.  - Ce n'est pas le budget qui compte.

M. Gabriel Attal, Premier ministre.  - Je pense aussi à nos territoires d'outre-mer, qui sont une chance pour la France, mais où tous les défis se concentrent : vie chère, emploi, santé, école, sécurité, immigration illégale, transition écologique. (M. Michel Savin acquiesce.) Il y aura un projet de loi spécifique pour Mayotte. (M. Saïd Omar Oili apprécie.)

Il existe un lien particulier entre Matignon et la Nouvelle-Calédonie, un écho au dialogue, à l'espoir de paix et d'avenir. Par trois fois, la Nouvelle-Calédonie a choisi la République. Il faut que le processus politique aboutisse. Un projet de loi constitutionnel sur l'avenir de la Nouvelle-Calédonie sera déposé prochainement.

Le troisième combat de mon Gouvernement, c'est la transition écologique. Nous nous sommes dotés d'une planification écologique unique au monde pour réduire de 55 % nos émissions de gaz à effet de serre d'ici 2030, pour nous adapter au changement climatique, pour restaurer notre biodiversité et préserver nos ressources.

M. Mathieu Darnaud.  - Pas un mot sur la décentralisation...

M. Gabriel Attal, Premier ministre.  - Le préalable, c'est de faire bloc. Nous voulons faire la transition avec le peuple, avec les élus, sans invectives, sans décroissance. Nous voulons rassembler tous ceux qui veulent agir. Nous défendons une écologie des solutions.

Un seul exemple, les transports : impossible de priver nos concitoyens de leur voiture dans la ruralité.

M. Jean-François Husson.  - Cela fait des années qu'on vous le dit. (Mme Sophie Primas renchérit.)

M. Gabriel Attal, Premier ministre.  - D'où l'offre de location de véhicules électriques pour moins de 100 euros par mois, un succès.

Mme Cécile Cukierman.  - Voilà qui va tout changer...

M. Gabriel Attal, Premier ministre.  - Nous proposons de soutenir les alternatives là où c'est possible - ce qui n'est pas toujours le cas.

Nous agissons pour les transports métropolitains et régionaux. Les engagements sur le ferroviaire seront tenus.

La transition écologique doit s'ancrer dans les territoires. Les négociations se sont intensifiées avec les COP territoriales. C'est ensemble que nous pourrons mener les diagnostics sur chaque territoire, bâtir les solutions et disposer des financements les plus adaptés. Je souhaite que tous les plans locaux de financement de la transition écologique soient conclus d'ici l'été.

Enfin, c'est ensemble que nous pourrons bâtir la résilience des territoires face au dérèglement climatique. Je pense aux victimes des inondations du Pas-de-Calais. (Mme Cathy Apourceau-Poly s'exclame.) Comme je m'y étais engagé, j'y retournerai très prochainement pour faire un point sur les aides d'urgence, mais aussi pour préparer l'avenir.

La transition écologique, c'est aussi réussir la transition énergétique, chère au Sénat. (Mme Sophie Primas le confirme.) Notre stratégie repose sur trois piliers : sobriété, nucléaire, renouvelable. C'est la clé de notre indépendance énergétique et d'une énergie décarbonée et abordable. Nous assumons pleinement le choix du nucléaire.

M. Yannick Jadot.  - Ah, ça !

M. Gabriel Attal, Premier ministre.  - L'année 2024 verra la mise en service de l'EPR de Flamanville. (On se gausse sur les travées du GEST.)

M. Yannick Jadot.  - Nous verrons !

M. Gabriel Attal, Premier ministre.  - Pour mener le combat de l'écologie à la française, nous devons aussi poursuivre notre réarmement agricole. (« Ah ! » sur plusieurs travées à gauche) Je me suis engagé à protéger l'exception agricole française. C'est notre combat depuis 2017, avec les lois Égalim, l'assurance récolte, le Varenne de l'eau. (Exclamations à gauche) Nous nous battons au niveau européen. Nous voulons libérer les agriculteurs des démarches chronophages, les aider à produire plus, les protéger contre les crises et contre la concurrence déloyale de ceux qui ne respectent pas les mêmes normes.

La crise actuelle vient de loin, et tout ne peut pas se régler de suite. Nous sommes déterminés à changer les choses. J'ai annoncé de premières réponses pour une juste rémunération, plus de contrôles dans les négociations commerciales, des mesures de simplification. J'ai demandé aux préfets de réunir les représentants des agriculteurs. En Haute-Garonne, quatre arrêtés préfectoraux ont été abrogés en une semaine : la méthode fonctionne.

M. Mathieu Darnaud.  - Cela fait trois ans qu'on vous le dit !

M. Gabriel Attal, Premier ministre.  - J'ai demandé qu'elle soit généralisée. Nous avons annulé la hausse de la taxe sur le gazole non routier (GNR) agricole, demandé que les aides de la PAC arrivent avant le 15 mars. Dès lundi, ouverture du guichet de prise en charge du fonds pour la maladie hémorragique épizootique (MHE) et doublement du fonds d'urgence pour la Bretagne. Ce matin encore, j'ai vu les représentants agricoles. Nous continuerons à agir, notamment pour faciliter l'installation et la transmission des exploitations. Je ne crois pas à la crise des vocations en agriculture.

Mme Sophie Primas.  - Cela fait deux ans.

M. Gabriel Attal, Premier ministre.  - Des jeunes veulent s'installer.

Mme Cécile Cukierman.  - Ils n'en ont pas les moyens.

M. Gabriel Attal, Premier ministre.  - Il faut avancer sur le revenu et l'application d'Égalim.

Mme Sophie Primas.  - Il faut l'appliquer ! (MM. Mathieu Darnaud et Michel Savin renchérissent.)

M. Gabriel Attal, Premier ministre.  - Avant Égalim, la loi de modernisation de l'économie (LME) de 2009 donnait les pleins pouvoirs à la grande distribution. (Applaudissements sur les travées du RDPI ; Mme Vanina Paoli-Gagin applaudit également.) Aucun agriculteur ne veut revenir à la situation antérieure. (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains ; Mme Cécile Cukierman proteste également.)

Nous continuerons à avancer sur la simplification, avec des mesures concrètes ; sur la relation entre les agriculteurs et l'Office français de la biodiversité (OFB). (Protestations à droite)

Une voix au centre.  - Et sur le loup ?

M. Gabriel Attal, Premier ministre.  - Nous avancerons sur la concurrence équitable, en renforçant les contrôles sur les produits importés. Nous combattons la concurrence déloyale. (Applaudissements sur les travées du RDPI ; Mme Sophie Primas proteste.) C'est notre majorité, soutenue d'ailleurs par le Sénat, qui a réautorisé l'utilisation des néonicotinoïdes pour la betterave, après l'interdiction, sans solution, sous François Hollande. Sans cela, il n'y aurait plus de filière betterave.

M. Yannick Jadot.  - C'est faux !

M. Gabriel Attal, Premier ministre.  - Nous agissons au niveau européen, avec trois priorités : les importations ukrainiennes, le Mercosur et les jachères. Ce matin, un paquet de mesures a été adopté par la Commission, dont des dérogations sur les jachères. La France a coalisé 22 États autour d'elle.

M. Olivier Paccaud.  - Qu'avaient voté les députés européens de Renew ?

M. Gabriel Attal, Premier ministre.  - Sur les mécanismes de sauvegarde sur les importations ukrainiennes, les choses avancent.

Sur le Mercosur, le compte n'y est pas. Nous avons bloqué sa conclusion.

M. Patrick Kanner.  - C'est le Sénat !

M. Christian Redon-Sarrazy.  - Et le Ceta ?

M. Gabriel Attal, Premier ministre.  - Je prendrai des mesures pour éviter toute surtransposition du droit européen.

J'étais ce matin sur le terrain avec les représentants des agriculteurs.

Mme Sophie Primas.  - Nous aussi !

M. Gabriel Attal, Premier ministre.  - Je ferai très prochainement des annonces.

M. Jean-François Husson.  - Vous n'avez pas le choix !

M. Gabriel Attal, Premier ministre.  - Je veillerai au respect de notre souveraineté nationale, portée par des armées remarquables dont nous aurons doublé le budget en deux quinquennats. Nous respecterons les engagements de la loi de programmation militaire (LPM). Je rends hommage à tous les militaires qui défendent et protègent la France et nos valeurs, et m'incline devant ceux qui sont tombés pour elle. (Applaudissements sur les travées du RDPI et sur quelques travées du groupe Les Républicains ; M. Patrick Kanner applaudit également.)

Notre souveraineté nationale, c'est aussi le respect de nos frontières. J'ai posé un principe simple : accueillir moins pour accueillir mieux.

Mme Audrey Linkenheld.  - Surtout accueillir moins...

M. Gabriel Attal, Premier ministre.  - Grâce à la loi Immigration et au pacte asile-immigration, nous pouvons décider qui entre dans Schengen. Nous réformerons l'aide médicale de l'État (AME) sur la base du rapport Evin-Stefanini. (On proteste à droite.)

M. Jean-François Husson.  - Et le débat parlementaire ?

M. Gabriel Attal, Premier ministre.  - Nous entrons dans une année cruciale pour l'Europe, il faudra choisir entre la faiblesse de l'isolement et la force du collectif. Depuis 2017, l'Europe est devenue plus forte, plus politique. Elle apporte des améliorations concrètes : vaccin contre le covid, plan de relance, soutien à notre industrie, lutte contre le dérèglement climatique, avancées face aux géants du numérique.

Assumer notre souveraineté, c'est aussi défendre notre exception culturelle. Notre patrimoine, symbole de notre histoire, doit être préservé. Notre création fait notre rayonnement. Nous devons la rendre plus accessible dans la ruralité.

Nos valeurs, c'est aussi l'égalité femme-homme, avec le futur congé de naissance, mieux rémunéré et réparti entre les parents, alors que le congé parental éloignait durablement les femmes de l'emploi. C'est également le droit des femmes à disposer de leur corps. Hier, l'Assemblée nationale a adopté un projet de loi constitutionnelle pour inscrire la liberté du recours à l'IVG dans la Constitution. (Applaudissements sur les travées du RDPI et sur plusieurs travées du groupe UC et du GEST ; M. Pierre-Alain Roiron applaudit également.) C'est une protection nécessaire. Je suis sûr que vous parviendrez à une rédaction commune avec l'Assemblée, comme vous l'avez déjà fait.

Nos valeurs, c'est permettre à chacun de mourir dans la dignité. La fin de vie renvoie à l'intime, à l'histoire de chacun. Beaucoup de familles, de malades, lancent un appel pressant. Nous devons y répondre, avec gravité et prudence, dans le respect des convictions de chacun. Nous déploierons au moins une unité de soins palliatifs par département, et examinerons avant l'été un projet de loi sur l'aide active à mourir.

Pour chacune de nos politiques publiques, nous agirons main dans la main avec les élus locaux.

M. Mathieu Darnaud.  - Mais bien sûr...

M. Gabriel Attal, Premier ministre.  - Je connais le mandat d'élu local, étant conseiller municipal d'opposition depuis dix ans. (M. Roger Karoutchi sourit.)

M. André Reichardt.  - Cela va vite...

M. Gabriel Attal, Premier ministre.  - Je connais leur engagement absolu, pour des projets, pour leurs concitoyens, leur territoire. Être élu local, c'est répondre à nos concitoyens, tous les jours, agir pour eux, croire en eux, déplacer les montagnes pour eux, tous les jours. Je veux leur rendre hommage, leur dire notre gratitude, notre confiance, notre volonté de faciliter leur vie, leur mandat.

M. Mathieu Darnaud.  - Pour l'instant, ce n'est pas le cas !

M. Gabriel Attal, Premier ministre.  - Nous sommes prêts à accélérer avec les territoires qui le souhaitent, à expérimenter, à différencier, à adapter nos règles. Je sais que les élus locaux demandent des clarifications sur les compétences, le statut, les financements.

M. Mathieu Darnaud.  - C'est sûr !

Mme Sophie Primas.  - Le pouvoir d'agir !

M. Gabriel Attal, Premier ministre.  - Les compétences s'enchevêtrent. C'est inefficace et dangereux démocratiquement. Nos concitoyens ne savent plus vers qui se tourner, ce qui fait le lit des populistes. (M. Jean-Jacques Lozach proteste.) La France a besoin d'une clarification forte. C'est le sens de la mission confiée à Éric Woerth.

Mme Sophie Primas.  - Comme si personne n'y avait travaillé avant...

M. Gabriel Attal, Premier ministre.  - Il s'appuie sur des travaux conduits, notamment, par le Sénat (M. Mathieu Darnaud le confirme) et rendra ses conclusions au printemps.

Il faut se concentrer sur les moyens d'améliorer vraiment l'action publique locale. La règle doit être simple : pour une compétence, un responsable et un financement. Je souhaite qu'une loi, construite avec les associations d'élus, soit présentée avant la fin 2024.

L'État prend sa part en simplifiant les normes applicables aux collectivités pour redonner du pouvoir d'agir aux élus, notamment en réformant le droit de dérogation. Nous briserons les carcans. Le préfet doit avoir autorité sur les opérateurs du département pour coordonner leur action. (Applaudissements sur les travées du RDPI, ainsi que sur plusieurs travées du groupe INDEP, du RDSE et des groupes UC et Les Républicains) Je souhaite des décisions fortes d'ici six mois.

M. André Reichardt.  - Cela fait six ans...

M. Gabriel Attal, Premier ministre.  - Nous avons beaucoup fait, notamment financièrement, en augmentant la DGF pour la première fois en treize ans. (Vives protestations sur les travées des groupes Les Républicains et SER) Nous avons porté des dispositifs pour soutenir les collectivités fragilisées par l'inflation et la hausse des prix de l'énergie. (Protestations sur plusieurs travées)

M. Olivier Paccaud.  - Elles ont dû rendre l'argent !

M. Mathieu Darnaud.  - Ce n'est pas sérieux !

M. Gabriel Attal, Premier ministre.  - La DGF augmente pour la quasi-totalité des communes. Naguère, sous une autre majorité, elle avait beaucoup baissé.

M. Olivier Paccaud.  - Elle n'a toujours pas retrouvé son niveau !

M. Gabriel Attal, Premier ministre.  - Je souhaite que les préfets aient une vision pluriannuelle des dotations d'investissement jusqu'en 2027, afin de donner de la visibilité aux collectivités.

La lutte contre le dérèglement climatique ne doit pas être un frein au développement des territoires - je pense au zéro artificialisation nette (ZAN), notamment, et salue votre travail pour l'assouplir.

Il faut aussi protéger les élus, qui répondent présent partout. Tous sont passionnés, mais beaucoup sont découragés face à l'explosion des incivilités, des menaces et des attaques. Ils sont les premières victimes d'une société qui se brutalise. Qui attaque un élu attaque la République, attaque les fondements mêmes de notre société. Avec le Président de la République, nous serons toujours aux côtés des élus.

Nous alourdirons les peines encourues. La réponse pénale doit bien sûr être au rendez-vous, mais c'est dans le coeur de la société qu'il faut agir. Évidemment, il faut punir ceux qui s'en prennent aux élus, aux professeurs, aux policiers, mais n'oublions jamais de nous demander : comment en est-on arrivé là ? (Mme Cécile Cukierman s'exclame ; murmures sur plusieurs travées à droite.)

L'école a un rôle fondamental. Voilà pourquoi nous renforçons l'instruction civique et revenons au bon vieux principe de la sanction immédiate. Je n'ai pas peur de le dire : même si ce n'est pas son rôle premier, l'école doit aussi éduquer. (Applaudissements sur les travées du RDPI et sur quelques travées du groupe INDEP)

Face à la lourdeur du mandat, certains élus locaux baissent parfois les bras. Je veux un statut de l'élu local.

M. Olivier Paccaud.  - Il est prêt.

M. Gabriel Attal, Premier ministre.  - Je m'appuierai sur les travaux de Françoise Gatel  Ah ! » sur toutes les travées et applaudissements sur les travées du groupe UC), et des députés Violette Spillebout et Sébastien Jumel, que vous pouvez applaudir aussi... (Applaudissements sur quelques travées du RDPI)

Je souhaite que nous trouvions un accord, au-delà des clivages partisans, pour faciliter l'engagement et la reconversion des élus, d'ici à la fin du premier trimestre.

Je souhaite améliorer notre démocratie locale. Nous réformerons le mode de scrutin à Paris, Lyon et Marseille, selon le principe « un habitant, une voix ». Un texte sera déposé avant la fin de l'année. (Mme Cécile Cukierman et M. Yannick Jadot s'exclament.)

Nous poursuivrons le déploiement du plan France Ruralités, pour la revitalisation des centres-villes et des centres-bourgs. La dotation d'aménité rurale a été doublée cette année.

Cette feuille de route a été construite pour répondre aux attentes des élus, mais elle ne doit pas être mise en oeuvre depuis Paris. Je continuerai à aller sur le terrain, à prendre le pouls des territoires, à agir en lien étroit avec les élus locaux, leurs associations et le Sénat.

Tel sera le cap de mon gouvernement : bâtir notre souveraineté, restaurer la fierté française, reprendre le contrôle de notre destin. Je le ferai avec toutes les bonnes volontés - élus locaux, Français -, en portant la voix de la France au niveau européen.

Cet après-midi, au Sénat, le « grand conseil des communes de France » de Gambetta, j'ai confiance, car je sais que nous avons l'amour de la France en commun et l'envie d'agir en partage. Ici, vous savez dépasser les clivages pour agir au service de l'intérêt général. Je vous propose de relever ensemble ces grands défis et de faire briller la fierté française. (Applaudissements sur les travées du RDPI, du RDSE et des groupes INDEP et UC)

M. Bruno Retailleau .  - (Applaudissements nourris sur les travées du groupe Les Républicains) Votre nomination est symbolique, monsieur le Premier ministre : votre jeunesse et votre audace évoquent les premiers matins ensoleillés d'un macronisme triomphant, lorsqu'il fallait « penser printemps »... (Sourires sur quelques travées du groupe Les Républicains) Mais ces jours-là sont loin. Nous sommes en hiver et les crises se multiplient.

Les Français s'intéressent à la politique qui sera conduite, non aux symboles. L'engouement dont vous bénéficiez encore est un atout, pas un acquis. (M. Gabriel Attal le confirme de la tête.) Vous savez plaire, mais saurez-vous faire ?

Point de bonne politique sans bons constats. Le 31 décembre, le Président de la République se satisfaisait d'un réarmement économique. Vraiment ? On est pourtant loin du plein emploi : le taux de chômage approchera les 8 % à la fin de l'année et nous sommes à la traîne de l'Europe - en Allemagne, c'est 3 %.

Nous sommes aussi loin de la réindustrialisation. Certes, la désindustrialisation est stoppée, mais regardez le commerce extérieur : nous sommes l'avant-dernier pays européen ; seule l'Espagne fait pire !

Vous avez perdu le contrôle des finances publiques - seule la Belgique est derrière nous. Vous ne maîtrisez pas la dépense, elle continue d'augmenter ! (M. Xavier Iacovelli ironise.) Nous cumulons des records de prélèvements obligatoires, alors que nos services publics s'effondrent. S'il existait une corrélation entre dépense et qualité du service public, nous serions à l'avant-garde du bonheur universel ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

En matière de dette publique, seules la Grèce et l'Italie font moins bien que nous. Résultat : une situation périlleuse, car la croissance est molle et les taux d'intérêt remontent.

Quelles marges de manoeuvre pour faire face au choc démographique - alors que vous avez très peu parlé du vieillissement -, aux chocs géopolitiques, au réchauffement climatique ? L'écologie ne doit pas se faire sur le dos des plus modestes.

Votre réarmement économique est une hallucination : la France est désarmée.

J'en viens à l'autorité de l'État : chaque jour, 1 000 faits de coups et blessures, 240 violences sexuelles. Ces statistiques sont froides, mais les Français les subissent dans leur chair. Pas moins de 70 % des Français trouvent la justice trop laxiste. Ce n'est pas une question de moyens, mais de courage. Êtes-vous prêt à renverser la table ? Peines minimales, places de prison, réforme du régime pénal des mineurs...

M. Mickaël Vallet.  - C'est Sarkozy ?

M. Bruno Retailleau.  - Ce n'est pas à l'école de s'occuper des nouveaux ensauvagés, mais à la justice pénale. Là non plus, nul réarmement.

La souveraineté budgétaire, enfin : la moitié de notre dette est détenue par des étrangers. Napoléon disait : la main qui donne est au-dessus de la main qui reçoit. Cela explique l'affaiblissement de la voix de la France dans le concert européen, car un pays qui ne tient pas ses comptes ne saurait tenir son rang.

Les agriculteurs sont pris en tenaille : toujours plus d'ultralibéralisme à l'extérieur et toujours plus de dirigisme à l'intérieur. Ces noces barbares créent du mal-être. La seule exception agricole que connaissent nos agriculteurs, c'est l'exception normative, qui les tue à petit feu. On importe des produits qu'on interdit à nos agriculteurs de produire. Vous avez parlé de surtransposition : alors autorisez les molécules acceptées dans les autres pays européens ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

Au Parlement européen, votre groupe a voté toutes les mesures contraignant nos agriculteurs. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; MM. Yannick Jadot et Rachid Temal s'exclament.)

D'un côté, Emmanuel Macron plaide pour le fédéralisme, mais de l'autre, il voudrait s'opposer, seul, au traité avec le Mercosur. Mais l'Europe avance sans lui. Ici, nous sommes contre l'Accord économique et commercial global avec le Canada (Ceta), car nous voulons préserver la souveraineté de la France. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; Mme Nadia Sollogoub applaudit également.)

Quant à votre bilan politique, jamais le RN n'a été aussi haut dans les sondages, jamais il n'a été aussi proche d'une prise du pouvoir. (Marques d'ironie à gauche) Emmanuel Macron se voulait un rempart contre l'extrême droite, il n'en a été que le marchepied. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; M. Xavier Iacovelli proteste.)

Mme Marie-Pierre de La Gontrie.  - Et vous ?

M. Bruno Retailleau.  - Vous voulez réarmer la France, soit. Mais n'attendez pas de nous que nous devenions macronistes !

Mme Marie-Pierre de La Gontrie.  - Ça dépend lesquels...

M. Bruno Retailleau.  - Nous ne serons jamais macronistes, car nous sommes les héritiers du général de Gaulle. Or le macronisme est un anti-gaullisme : le Gouvernement ne détermine et ne conduit plus la politique de la Nation ; le Parlement est anémié : la version promulguée de la loi Immigration n'aurait pu être approuvée par aucune des deux chambres. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Sur l'AME, vous contournerez encore le Parlement par le règlement. Ordonnances non ratifiées, lois non appliquées, 49.3 : le Parlement est diminué.

Bien sûr, ces instruments sont constitutionnels, mais le général de Gaulle et Michel Debré croyaient à la collaboration des pouvoirs. Emmanuel Macron use de ces instruments coercitifs, sans leur contrepartie - le référendum.

De Gaulle disait : la politique, « c'est une action pour un idéal à travers des réalités ». Mais la surcommunication supplante l'action : à force de vouloir crever l'écran, la politique en crève. L'opportunisme et le débauchage ne font de bien ni à la démocratie ni à la politique. Si tout se vaut - droite, gauche, fidélité, revirements -, alors rien ne vaut. (Applaudissements sur quelques travées du groupe Les Républicains)

Je m'honore que des sénateurs de gauche et de droite placent toujours leurs convictions au-dessus des ambitions. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; MM. Hervé Maurey et Jean-Marc Vayssouze-Faure applaudissent aussi.)

Les Français n'ont pas compris que le Président de la République explique les émeutes par l'oisiveté des jeunes...

Votre tâche est herculéenne, Monsieur le Premier ministre. Mais nous traversons un moment tellurique : nous ne pouvons nous contenter d'ajustements ou de mesurettes. Il faut des principes nouveaux.

Vous voulez vous adresser aux Français : pourquoi pas ? Mais alors n'utilisez pas la langue du marketing, parlez-leur la langue de l'unité ! Abandonnez le « en même temps », rompez avec le macronisme ! (On s'en amuse à gauche, M. Xavier Iacovelli ironise.) 

Rendez aux Français ordinaires la liberté, une école qui instruise et ne déconstruise pas, le travail, la souveraineté ! Rendez aux maires la liberté ! Ils ne demandent pas l'aumône et souffrent d'une overdose de normes. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

Rendez aux Français ordinaires des raisons d'espérer en cette France que nous aimons et que nous voulons servir de tout notre coeur (Mmes et MM. les sénateurs du groupe Les Républicains se lèvent et applaudissent longuement ; MM. Hervé Maurey et Philippe Bonnecarrère applaudissent également.)

M. Patrick Kanner .  - (Applaudissements sur les travées du groupe SER) Monsieur le Premier ministre, le 9 janvier, vous avez accepté la mission confiée par Emmanuel Macron, endossant un lourd passif - la politique libérale et réactionnaire menée depuis sept ans - et une lourde responsabilité - faire passer le rouleau compresseur de l'injustice et de la casse sociale.

Vos premières semaines en témoignent : blindés sur les autoroutes, école publique insultée, explosion de la facture d'électricité, doublement de la franchise médicale...

Rien ne semble vous arrêter, mais les Français sont déjà à bout. Je pense à ces Français qui ne peuvent compter que sur leur travail pour vivre - pas aux riches qui continuent de s'enrichir... Les Français qui galèrent sont épuisés par la politique que vous menez depuis 2017. Mais ils n'ont élu Emmanuel Macron que pour faire barrage à l'extrême droite ! Les élections législatives et sénatoriales vous ont déjà sanctionnés, prochaine étape : les européennes.

Plutôt que la concertation, vous avez choisi le passage en force avec le 49.3. Pis : vous êtes prêts à fragiliser notre État de droit, en vous défaussant cyniquement sur le Conseil constitutionnel à l'occasion de la loi Immigration. Les propos de la droite dite républicaine sont indignes, mais le Président de la République est aussi responsable de cette dérive.

M. Mickaël Vallet.  - Bravo !

M. Patrick Kanner.  - Nous sommes tous perdants à ce jeu dangereux, sauf l'extrême droite, qui se réjouit de votre bilan et n'a plus qu'à déambuler sur le tapis rouge que vous lui déroulez. Les valeurs républicaines, on n'en a rien à faire quand on n'arrive pas à nourrir ses enfants. Alors, retirez vos oeillères et cessez d'alimenter les populistes !

Nous sommes en contact permanent avec les élus locaux, qui sont en colère. Leurs attentes étaient fortes, mais que reste-t-il de la nouvelle donne territoriale annoncée par le Président de la République ? Les collectivités territoriales sont une simple variable d'ajustement des comptes publics. La suppression de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) en est le dernier exemple. Toujours plus de compétences, toujours moins de moyens.

Rien sur la décentralisation : la loi 3DS a été un rendez-vous manqué. Pourtant, l'excès de centralisation a montré ses limites, de la crise des gilets jaunes à la crise sanitaire. Si l'État est garant des principes d'unité et d'égalité, il ne peut à lui seul en garantir l'efficacité.

Alors voilà nos idées : indexation de la DGF sur l'inflation, augmentation des dotations, loi de financement des collectivités, statut de l'élu. Les révoltes urbaines ont montré qu'il faut des réponses fortes.

Il faut remettre la justice au coeur des politiques publiques, car aujourd'hui, les droits, c'est pour les nantis, et les devoirs, pour les petits. (Applaudissements sur quelques travées du groupe SER)

En tant qu'élu du Nord, je sais que le déclassement conduit au désespoir. Comment comprendre que des multinationales enregistrent des bénéfices records sans contribuer à la solidarité nationale ? Comment comprendre que vous augmentiez de 10 % la facture d'électricité des Français ? Vos seules réponses ? Des primes, un bricolage dans l'urgence. Mais on ne gouverne pas un pays avec des rustines. Pourquoi ne pas créer une taxe sur les superprofits, un ISF climatique et rétablir des impôts de production ?

M. Xavier Iacovelli.  - Des taxes, des taxes, encore des taxes !

M. Patrick Kanner.  - Non les classes moyennes n'ont pas à supporter tous les efforts ! Les Français ne demandent pas l'aumône : ils veulent vivre dignement de leur travail. Le taux de chômage a baissé, mais le nombre de travailleurs pauvres a augmenté. Le marché du travail est au service des entreprises, sans contrepartie pour les salariés. La baisse du chômage ne dit rien des difficultés croissantes des Français. Vous dites vouloir « désmicardiser » la France ! Mais quel aveu ! Nul ne peut se prévaloir de sa propre turpitude...

Nous proposons une politique de revalorisation salariale, pour que chaque citoyen soit justement rémunéré, pour mieux vivre et mieux se loger. Une politique du logement ne saurait résumer à de la dérégulation, Monsieur le Premier ministre ; vous avez sapé le modèle économique du logement social et vous détricotez désormais la loi SRU : c'est inacceptable ! (Applaudissements sur les travées des groupes SER, GEST et CRCE-K)

Nous proposons de réhabiliter la construction, en ville comme en milieu rural. Le ZAN doit être coconstruit avec les élus locaux. Il faut favoriser la reprise de la construction de logements, en maîtrisant l'envolée des prix du foncier et en généralisant l'encadrement des loyers, au moins en zone tendue. Et il faut réévaluer les aides personnelles au logement (APL).

Notre pays s'enfonce et la société se fracture. Dans le monde agricole, la colère gronde. Face à cette crise structurelle, il faut une réforme d'ampleur qui permette la transition de notre modèle agricole vers plus de durabilité et une meilleure reconnaissance du travail accompli.

Nous réclamons une commission d'enquête sur le revenu agricole et les relations commerciales agroalimentaires, pour mettre fin à un système qui tue notre agriculture à petit feu. Vos annonces d'hier et aujourd'hui ne sont pas au niveau.

Demain, des dizaines de milliers de personnes seront dans la rue pour défendre notre école publique, laïque et gratuite, que vous continuez à fragiliser avec 650 suppressions de postes d'enseignants cette année ! Pis, votre ministre accuse l'école d'être responsable d'une fragilité que vous-même avez créée.

Quelle est votre vision ? Le choc des savoirs ne fait pas une politique publique. Ce qui ronge l'école, c'est l'absence de mixité sociale et le séparatisme dès le plus jeune âge. (Applaudissements sur les travées des groupes SER, CRCE-K et du GEST) Or que proposez-vous ? L'uniforme à l'école, l'internat, une vision étriquée et vieillotte, mâtinée d'autoritarisme plutôt que de pédagogie !

Vous avez dit hier : « Nous voyons davantage de raisons d'espérer que de douter. » Et pourtant, nous doutons... Nous doutons de la place de la France dans le monde, de votre attachement à la démocratie, de votre capacité à défendre notre souveraineté, de votre gouvernement macroniste !

L'illusion macroniste d'un social-libéralisme n'aura duré qu'un printemps. Aucun enseignement n'a été tiré des multiples crises sociales de ces deux quinquennats. Le libéralisme antisocial du Président de la République ne trompe plus personne. Vous avez semé les graines de la colère, qui germent sur le terreau de vos choix de société. Votre vocabulaire guerrier n'est que le signe d'une grande faiblesse.

Face à vos relents réactionnaires et votre course folle aux alliances opportunistes, notre groupe présentera des solutions pour un avenir solidaire et durable. (Applaudissements sur les travées du groupe SER et du GEST, ainsi que sur quelques travées du groupe CRCE-K)

M. Hervé Marseille .  - (Applaudissements sur les travées du groupe UC) Nous avons écouté hier votre discours, lu avec beaucoup de conviction et de tonicité par M. le ministre de l'économie... (Rires sur les travées du groupe UC) Exercice sacrificiel auquel nous compatissons. Monsieur le Premier ministre, vous avez bien fait de venir ici pour clarifier les choses.

Vous avez dit : « En France, tout est possible ». Oui, la France est capable du meilleur, mais aussi de moins bonnes performances.

Vous avez abordé tous les sujets, même ceux qui fâchent, notamment le sentiment d'impuissance de l'action publique, poison de notre démocratie.

« Désmicardiser », déverrouiller, débureaucratiser : comment ne pas y souscrire ? Mais plutôt que le « réarmement », permettez à un vieux matou, né en 1954 (rires), de vous proposer le terme, plus classique, mais préférable, de justice.

Car c'est le sentiment d'injustice qui fragilise notre société. La colère agricole en est la caricature, carrefour d'une quadruple injustice : territoriale, économique - les agriculteurs sont les parents pauvres du partage de la valeur -, sociale et culturelle, normative.

L'injustice commence dès la naissance, selon le milieu et le lieu où l'on vient au monde. Naître à la campagne, c'est déjà naître dans un désert médical... Nous ne pouvons pas attendre gentiment que la fin du numerus clausus produise ses effets, et la régularisation des médecins étrangers ne suffira pas. Il faut élargir les délégations d'actes.

Pour remédier à cette injustice territoriale, le Sénat plaide pour une décentralisation régénérée, grâce à la différenciation.

Mme Françoise Gatel.  - Très bien !

M. Hervé Marseille.  - Gageons que vos propositions permettront d'avancer vers plus de décentralisation.

L'école est aussi le lieu d'injustices persistantes. Certes, on a réduit le nombre d'élèves par classe dans les zones d'éducation prioritaire, mais il reste tant à faire ! Nous sommes favorables au retour de l'uniforme, mais surtout au retour du mérite, de l'excellence et du respect des enseignants.

Il faut un cap clair, car, vous l'avez dit, tout n'est pas question de moyens. Il n'y en avait pas besoin pour abandonner la méthode globale, prônée pendant des décennies par des idéologues... (M. Claude Malhuret applaudit.)

Les classes moyennes contribuent sans recevoir : cela ne peut plus durer. La fiscalité de l'immobilier et des successions doit évoluer et une lutte sans merci doit être menée contre la fraude sociale et fiscale. (Applaudissements sur les travées du groupe UC)

Vous avez déclaré vouloir prendre à bras-le-corps la crise du logement, mais vos annonces, certes attendues, sont insuffisantes : des centaines de milliers de logements sont manquants. Comment dégager du foncier avec le ZAN ? Il faudra l'adapter, car tout ne pourra reposer sur la seule densification.

La transition écologique soulève aussi un enjeu majeur de justice et d'équité, car elle fera des perdants, à commencer par les petits propriétaires et les artisans.

L'injustice se niche jusque dans les derniers jours de la vie. La société doit se réinventer pour faire face au vieillissement. Arrêtons de procrastiner : c'est maintenant qu'il faut agir !

Les injustices sont aussi intergénérationnelles, alors que le pays ne maîtrise toujours pas ses finances publiques. Nous emprunterons 285 milliards d'euros cette année, plus que le PIB du Portugal ! Il faut des réformes structurelles, sans attendre le retour des vaches grasses.

Un jeune chef de Gouvernement devrait nous ouvrir vers le futur, l'intelligence artificielle, l'hydrogène vert, la génétique... Nous n'en avons pas parlé, car nous sommes rattrapés par les problèmes non résolus du passé.

Notre avenir sera européen, ou ne sera pas - ce qui ne nous interdit pas d'être critiques à l'égard d'une Europe trop technocratique.

Depuis les législatives, c'est ici, au Sénat, que se fabriquent les principales lois : sans le Sénat, pas de réforme des retraites, pas de loi Immigration. (M. Mickaël Vallet s'exclame.)

Dès votre nomination, vous êtes venu au Sénat assister à la Conférence des présidents. Nous y avons été sensibles. Nous sommes ouverts au dialogue, mais hostiles à la coconstruction qui associe les parlementaires à l'élaboration du texte avant son dépôt : nous sommes favorables à la construction parlementaire lors de l'examen des textes. (Applaudissements sur les travées des groupes UC et Les Républicains)

M. Jean-François Husson.  - Tout à fait !

M. Hervé Marseille.  - Si des textes ont été votés depuis deux ans, c'est parce que des compromis ont permis d'aboutir.

Nous n'avons plus les moyens de chercher des responsables : Conseil constitutionnel, Bruxelles. Nous devons supporter 3 000 milliards d'euros de dette, les agriculteurs bloquent les routes, l'inflation ronge le pouvoir d'achat, l'Arménie est progressivement effacée de la carte, la guerre sévit en Europe... Nous devons trouver des solutions collectives.

Cette responsabilité pèse sur vos épaules, monsieur le Premier ministre, mais aussi sur les nôtres. Si nous échouons, nous savons qui arbitrera nos différends en 2027, et il sera alors trop tard pour pleurer sur le lait renversé. (Applaudissements sur les travées des groupes UC et INDEP, du RDPI et sur quelques travées du groupe Les Républicains)

M. François Patriat .  - (Applaudissements sur les travées du RDPI) Permettez à ceux qui ont des convictions, placées bien au-dessus de leurs ambitions, de dire qu'ils n'ont pas la même vision.

M. Bruno Retailleau.  - C'est vrai !

M. François Patriat.  - La politique, c'est construire un projet collectif. Le Président de la République en a posé les jalons dès 2017. Les Français lui ont renouvelé leur confiance en 2022. Lors des élections législatives, ils ont envoyé un message, appelant à un dialogue avec la majorité présidentielle. Malheureusement, nous nous sommes trop souvent heurtés au refus du dialogue. L'Assemblée nationale n'a pas cultivé cet état d'esprit, pourtant présent au Sénat, et a refusé toute main tendue. La minorité plurielle agit comme une majorité d'empêchement.

Notre devoir est de poursuivre les réformes. Le pays ne peut rester statique, quand les crises se multiplient partout sur la planète.

Monsieur le Premier ministre, vous nous avez appelés à agir plutôt qu'à réagir. Je partage votre analyse et la fierté du chemin parcouru depuis sept ans. Votre nomination est une nouvelle étape, pour libérer, transformer et unir. Votre tâche est de concrétiser la volonté réformatrice du Président de la République. Non, la France ne subit pas.

Vous souhaitez agir vite en faisant preuve de lucidité, de pragmatisme, d'efficacité et d'audace, avec une méthode simple et efficace. Vous l'avez montré vendredi dernier.

La crise agricole est symptomatique des maux français. La bureaucratisation et l'empilement des normes ont entretenu le mal-être d'une profession mal comprise, et qui en souffre. Les maux dépassent nos frontières : mêmes causes, mêmes effets ailleurs en Europe.

Vos annonces, depuis vendredi, vont dans le sens de notre objectif de souveraineté agricole. Allier transition écologique et souveraineté alimentaire et agricole, c'est ça la défense de l'exception agricole française. Mais cette transition doit être supportable pour les producteurs comme pour les consommateurs.

Reconquérir notre souveraineté perdue, c'est notre devoir depuis 2017 : souveraineté industrielle, en rouvrant des usines ; souveraineté énergétique, par le soutien au nucléaire ; souveraineté militaire, avec la LPM ; souveraineté à nos frontières - j'ai une pensée pour le territoire de Mayotte, confronté à une crise migratoire sans précédent.

Les outre-mer sont trop souvent les parents pauvres de nos politiques publiques, alors qu'ils sont confrontés aux mêmes problèmes que l'Hexagone, souvent décuplés : en Guyane, la protection de la biodiversité, qui coûte des vies ; aux Antilles, la crise des sargasses et de la chlordécone (applaudissements sur les travées du RDPI) ; à Wallis-et-Futuna, la préservation du contrat social ; en Polynésie, la montée des océans et la lutte contre l'influence chinoise ; à La Réunion, les conséquences du récent cyclone.

On ne fera pas d'écologie sans le peuple : l'écologie doit être populaire - et non punitive - et réconcilier climat et croissance.

Monsieur le Premier ministre, notre majorité a toujours oeuvré pour que le travail paie.

Mme Cécile Cukierman.  - Dites ça aux salariés !

M. François Patriat.  - La baisse des cotisations salariales en 2017 était une idée de bon sens - à prolonger.

Travail, souveraineté, autorité : voilà ce qu'il nous faut construire avec les élus locaux pour que nos concitoyens gardent confiance et espoir.

Monsieur le Premier ministre, votre feuille de route est pragmatique, concise et structurée, tout en prenant racine dans l'oeuvre de vos prédécesseurs, Édouard Philippe, Jean Castex et Élisabeth Borne.

Tous les territoires ont été concernés par nos réformes : la ruralité n'a pas été oubliée, contrairement à ce que d'aucuns prétendent ! Nous avons investi dans l'école, la santé, la justice, la sécurité. Il faut maintenant accélérer.

Le mot « réarmer » a pu faire sourire : il souligne notre détermination à oeuvrer pour notre indépendance et notre souveraineté, dans un souci de solidarité et d'attention aux autres. Une France plus forte, c'est aussi une France plus juste.

Nous avons en partage l'amour de notre pays. Pour réussir, nous devons travailler avec le Parlement, les partenaires sociaux et les forces vives du pays. Face aux crises, il nous faudra de l'audace, de l'action, de l'efficacité : or nul n'en a le monopole. J'en appelle à l'esprit de responsabilité qui nous anime pour trouver ensemble des voies d'accord.

Monsieur le Premier ministre, vous avez indiqué votre cap, rappelé votre méthode. Vous connaissez notre fidélité au projet présidentiel. Vous serez un Premier ministre de terrain, et nous serons à vos côtés. (Applaudissements sur les travées du RDPI ; Mme Nathalie Delattre et M. Louis Vogel applaudissent également.)

Mme Cécile Cukierman .  - Monsieur le Premier ministre, malgré votre jeunesse, vous n'êtes pas un nouveau-né dans l'entourage du Président de la République. (Mme Françoise Gatel rit.) Les crises sont là et angoissent nos compatriotes.

La peur qui marque les peuples, c'est la guerre. Nous savons qu'il ne peut y avoir de progrès social ou de justice en temps de guerre. Ce grand désordre du monde s'exprime en Ukraine, en Israël, en Palestine, mais aussi en Arménie, au Yémen, au Kurdistan. Nous devons toujours nous efforcer de faire prévaloir la diplomatie.

À l'intérieur du pays, notre peuple souffre : inégalités croissantes, baisse du pouvoir d'achat, défaillances des services publics... Nos concitoyens ne croient plus en l'avenir pour eux ou pour leurs enfants.

Près de 46 milliards d'euros ont été versés aux actionnaires du CAC 40 en 2023, alors que quelque 11 millions de personnes ne mangent pas à leur faim. L'inflation, de 10 % en deux ans, accélère l'appauvrissement. La hausse des prix alimentaires accentue la crise : plus 12 %, voire 20 % pour certains produits de base. Et les salaires ne suivent pas.

Monsieur le Premier ministre, vous voulez « désmicardiser » la France, mais vous ne proposez rien pour augmenter les salaires ! Vous culpabilisez les salariés et les chômeurs, sans pointer les responsabilités des plus riches...

Plus de la moitié des enfants bénéficient de la cantine à un euro là où le dispositif est déployé. C'est dire combien la France s'appauvrit ! Or Bruno Le Maire annonce qu'il faut augmenter de 10 % les tarifs de l'électricité pour plaire aux agences de notation ! Mais ouvrez les yeux : plus de 44 % d'augmentation en deux ans, 70 % en dix ans, ce n'est pas supportable ! L'énergie, c'est un droit et une question de dignité.

Le réarmement démographique ne se décrète pas, il passe par de meilleurs salaires, et une meilleure politique familiale, ainsi que par une politique de logement efficace. Il passe aussi par une école publique de qualité. Que répondez-vous aux enseignants qui demandent des moyens pour l'école publique ?

Les grands groupes étouffent les agriculteurs. Il faut simplifier, mais aussi s'attaquer au libre-échange qui permet de livrer par cargos entiers de la viande de Nouvelle-Zélande et du Brésil.

Il faut des prêts bonifiés pour l'installation de nos jeunes agriculteurs. La loi Égalim doit être respectée par les requins de la grande distribution. Les agriculteurs doivent pouvoir vivre de leur travail et les consommateurs se nourrir correctement : c'est un choix politique.

Le Sénat représente les collectivités territoriales, dernière digue face aux crises. Alors que la demande explose, les élus agissent chaque jour, avec des moyens décroissants. Qu'allez-vous faire face à la perte d'autonomie financière des collectivités ? Allez-vous indexer la DGF sur l'inflation et rétablir la CVAE ?

La commune, c'est la proximité. Menacer cette institution clé de la République, c'est menacer notre édifice institutionnel, déjà vacillant. Il faut renforcer l'État territorial et la démocratie locale. Il ne peut y avoir de décentralisation qu'avec un État fort, qui assume ses missions régaliennes et garantit l'égalité entre les territoires.

Pas d'hypocrisie entre nous ! Les élus ne pourront tout supporter : décentraliser ne veut pas dire absorber les défaillances de l'État.

Le terrain perdu est celui de la démocratie : vous avez refusé de vous soumettre au vote de confiance au motif absurde de votre absence de majorité. La clé de voûte de la Ve République est pourtant la responsabilité du Gouvernement devant l'Assemblée nationale. C'est le vote de confiance originel. Les choix politiques ne se font plus dans les hémicycles, mais dans les couloirs, sur les plateaux télé, les réseaux sociaux ou en CMP...

Écoutez nos citoyens de tous horizons. Depuis 2017, votre politique ne mérite pas notre confiance. Mais, en l'absence de vote, votre évaluation sera médiatique, alors qu'elle aurait dû être démocratique. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE-K, ainsi que sur quelques travées du groupe SER)

M. Claude Malhuret .  - (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP) Comme tout chef de gouvernement, vous allez affronter de nombreux défis, tels que l'absence de majorité parlementaire ou la pression déprimante des extrêmes.

Ailleurs, le populisme est d'extrême droite ; chez nous, où l'on apprend à l'école qu'il faut préférer Robespierre à Tocqueville, il est aussi d'extrême gauche - mais la fin de cette exception est proche.

Parce qu'il faisait le plus de bruit et transformait l'Assemblée en zone à délirer, le danger d'extrême gauche paraissait le plus dangereux, confirmant que rien n'est plus sonore que ce qui est creux. (Sourires)

M. Emmanuel Capus.  - Bravo !

M. Claude Malhuret.  - Mais la Nupes, attelage improbable des gauches woke, Vélib', Caviar, stalinienne, trotskiste et Hamas, s'est effondrée sous le poids de ses incohérences. Le Che Guevara des calanques, cédant la direction à des comparses, a compris tardivement qu'il avait pris le train dans la mauvaise direction. Il court depuis en sens inverse dans le couloir, à grands gestes des bras et du menton, lançant ses imprécations, mais ne parvenant qu'à démontrer que sa vie est devenue une interminable rage de dents. (Sourires au centre et à droite ; M. Emmanuel Capus rit de bon coeur.)

LFI, c'était une surprise-partie ; la surprise, c'est qu'il n'y avait pas de parti - juste une secte gérée par un couple omnipotent, comme les Thénardier tenaient le bouge de Montfermeil... (Murmures désapprobateurs à gauche)

Mme Marie-Pierre de La Gontrie.  - C'est quoi le rapport ?

M. Éric Bocquet.  - On est au Sénat !

M. Claude Malhuret.  - Le mouvement s'est fait hara-kiri le 7 octobre avec l'ignominie de trop.

M. Loïc Hervé.  - Très bien !

Mme Marie-Pierre de La Gontrie.  - Mélenchon n'est pas Premier ministre !

M. Claude Malhuret.  - Ses partenaires ont filé à l'anglaise... après avoir bradé à un apprenti dictateur les valeurs de la gauche pour un plat de lentilles électorales...

Mme Marie-Pierre de La Gontrie.  - Vous en savez quelque chose.

M. Claude Malhuret.  - Mais l'extrême droite se renforce en proportion du déclin de sa rivale - preuve que ce qui les rapproche est infiniment plus fort que ce qui les sépare : Orban ami de Poutine, extrême gauche italienne votant pour Meloni, RN réalisant ses meilleurs scores dans les anciens bastions du PC...

Les gauchistes sont bruyants, débraillés et réclament tout, tout de suite ; les marinistes sont silencieux, cravatés et attendent leur heure - en face des autres, il leur suffit de se taire pour paraître intelligents. (Rires au centre et à droite)

Ils n'ont aucun programme, changent d'opinion, affirment que nous dansons sur le pont du Titanic - mais c'est eux l'iceberg ! Ils ont enfourché tous les délires complotistes. Ils font le sale boulot de chiens de garde de Poutine - pas étonnant pour un parti fondé largement par d'anciens collabos. C'est une traboule - arrière-cour obscure des immeubles lyonnais à la façade bien propre. Les anciens du GUD sont toujours là dans l'ombre, comme les comptes anonymes racistes sur les réseaux sociaux. Marine Poutine, arrivée à son poste comme Kim Jong-un, par népotisme, est inapte, mais le reflux du populisme d'extrême gauche lui ouvre un boulevard.

L'image, en 2027, d'un Emmanuel Macron raccompagné par elle sur le perron de l'Élysée n'est plus invraisemblable. Monsieur le Premier ministre, vous devez y faire obstacle.

M. Yannick Jadot.  - Enfin !

M. Claude Malhuret.  - À cela, deux conditions. D'abord, réussir les douze travaux d'Hercule qui vous attendent : relever le niveau de l'école, guérir le système de santé, redonner l'espoir aux agriculteurs, poursuivre la baisse du chômage, réindustrialiser le pays, réduire le déficit, construire l'Europe puissance, réformer l'État, restaurer l'autorité au sein de la société, maîtriser l'immigration, assurer le développement durable à la française. Le douzième est capital, mais le moins compris : au-delà du réarmement moral, économique, civique, le réarmement au sens propre.

Nous sommes en guerre. C'est une très mauvaise idée européenne d'affirmer chaque jour qu'on n'est pas en guerre lorsque vos ennemis le sont. L'internationale des dictateurs - Russie, Chine, Iran, Corée du Nord - proclame qu'ils veulent abattre l'Otan, l'Europe et l'Occident, et ils font ce qu'ils disent. La guerre qu'ils nous livrent est moins visible qu'en Ukraine : cyberattaques, désinformation, milliers de comptes sur les réseaux antisociaux, abrutissement de nos enfants sur TikTok pendant que la Chine protège les siens...

La Russie s'est mise en économie de guerre, mais aucun pays d'Europe n'est capable de livrer à l'Ukraine les munitions promises. Si l'Ukraine perd la guerre, c'est l'Europe qui la perd. Lorsque j'écoute certains gouvernants, j'ai l'impression d'entendre le toc-toc du parapluie de Daladier sur les pavés de Munich...

Monsieur le Premier ministre, vous serez certes jugé sur vos résultats, mais à l'échelle de l'histoire, vous le serez à l'aune de la victoire ou de la défaite des démocraties face à l'internationale reconstituée des dictateurs.

La deuxième condition pour qu'en 2027, le visage qui apparaisse ne nous fasse pas honte, ne dépend pas seulement de vous. Il est grand temps que ceux qui se revendiquent du camp de la raison comprennent que le temps leur est compté. Il ne faudra pas qu'ils se plaignent d'une défaite qu'ils n'auront su empêcher. Il est temps que les raisonnables construisent une majorité ou des alliances, seule façon de gouverner la France avec succès.

Ce souhait sera peut-être aujourd'hui considéré avec indifférence ou avec ironie. Mais dans quelques mois, après les élections européennes, ceux qui se complaisent dans des querelles de cours d'école comprendront, je l'espère, que le temps des anathèmes est terminé. Pour MacArthur, les batailles perdues se résument en deux mots : trop tard. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP, du RDPI, ainsi que sur plusieurs travées du RDSE, du groupe UC et sur quelques travées du groupe Les Républicains)

Mme Maryse Carrère .  - (Applaudissements sur les travées du RDSE) Si nous avons un devoir de vérité sur la France, nous devons aussi cultiver l'espoir. Il nous faut faire preuve de responsabilité pour réparer, enrichir et préserver notre modèle social et républicain. Notre pays est versé dans la nostalgie d'une douce France disparue ; sans tout promettre, il faut trouver les voies pour que nos enfants vivent mieux que nous.

Un nouveau cap pour l'emploi, le logement et la sécurité ? Le RDSE est prêt à soutenir toutes les propositions de progrès. Nous espérons que l'uniforme n'est pas un cache-misère pour notre école, mais signifie bien le retour aux fondamentaux, au premier rang desquels l'égalité des chances. Le RDSE est attaché aux manifestations de l'attachement à la République et à la laïcité. Nous espérons que vous continuerez à être ferme sur ce sujet, monsieur le Premier ministre.

Nous sommes attachés à une citoyenneté « réarmée ». Regardez nos propositions !

Nous sommes au rendez-vous de l'écologie non punitive, mais intelligente, cohérente et soutenable pour les forces vives et les plus modestes. Il faut une large planification et des innovations. Ce défi est l'un des plus difficiles, comme le montre la crise agricole. L'agriculture doit être durable, mais pas au prix du sacrifice de milliers d'exploitants. Trop de normes, de concurrence déloyale, de pression des distributeurs rendent leur revenu indécent.

Il est regrettable que le travail de contrôle des parlementaires ne soit pas regardé : voyez nos 63 propositions sur le partage de la valeur.

Atteindrez-vous le plein emploi ? Nous le souhaitons. Baisser les charges, expérimenter la semaine de quatre jours dans l'administration... nous regarderons ces projets avec vigilance.

Nous saluons votre volonté de revaloriser les travailleurs de l'ombre. Le RDSE souhaite des mesures fortes pour la pénibilité : soyez au rendez-vous de cette légitime contrepartie du recul de l'âge de la retraite.

Il faut renforcer et non colmater notre système de santé qui se fissure, avec des moyens supplémentaires, notamment pour les déserts médicaux.

Une voix à gauche.  - Oui !

Mme Maryse Carrère.  - Nous sommes heureux que notre résolution sur la santé mentale des jeunes adoptée en début d'année trouve un écho.

Vous souhaitez le réarmement démographique ? Le secteur périnatal est en danger, comme le montre la mission d'information demandée par mon groupe. Sans logement, pas de projets parentaux. Des sans-abri dorment sous les fenêtres des Airbnb : c'est intolérable !

On ne peut ignorer le coût de ces politiques ; aussi je m'inquiète de la cible des 12 milliards d'euros d'économies que vous annoncez.

Oui au redressement des comptes, mais attention au rythme ! S'il est trop rapide, il pèsera sur la croissance et donc sur la dette. Le dernier défaut de paiement français remonte à 1797, heureusement ! (Mme Françoise Gatel s'en amuse.)

L'Europe est dans le titre et le coeur du RDSE, mais notre amour n'est pas inconditionnel, comme notre résolution de 2018 sur le Mercosur l'illustre. L'Europe est souvent la solution. Elle protège nos concitoyens. Il ne faut pas céder aux sirènes des populismes.

On ne tient pas seul un gouvernail : dans la tempête, il faut s'appuyer sur les vieux loups de mer. Personne ne doute de votre lucidité et de votre volontarisme, monsieur le Premier ministre ; mais les réponses viendront aussi des territoires, des corps intermédiaires et des élus locaux.

Ceux-ci doivent être protégés et libérés du poids des normes. Un nouvel acte de décentralisation, pourquoi pas ? Je pense à la compétence Eau et assainissement déléguée aux intercommunalités - objet de notre proposition de loi.

J'espère que vous trouverez la bonne méthode pour réussir. Vous le devez à la jeunesse française dont vous avez l'audace. N'oubliez pas le vivier de l'expérience. (Sourires ; applaudissements sur les travées du RDSE)

M. Guillaume Gontard .  - (Applaudissements sur les travées du GEST ; Mme Émilienne Poumirol applaudit également.) Depuis sept ans, le Président de la République impose à contretemps la potion néolibérale des années 1980. Vous signez des chèques en blanc aux entreprises, mais combattez la dépense publique, déplumez l'État et amputez les services publics. Vous enrichissez les plus riches et faites exploser les inégalités. Vous continuerez cette casse en ciblant le salaire minimum et la loi SRU. Un Premier ministre du VIIe arrondissement de Paris est un exécutant zélé du Président des riches. Il était difficile d'imaginer que le plus jeune Président de la République et le plus jeune Premier ministre soient aussi réactionnaires !

L'imposture originelle du macronisme est qu'il se voulait un libéralisme chimiquement pur à l'anglo-saxonne ; il est désormais un Trumpisme de Rotary Club. (On s'amuse sur les bancs du GEST)

Votre dogmatisme est une impasse. Vous gérez les crises de manière réactionnaire et, depuis peu, avec populisme.

Vivre de son travail, dites-vous ? Sept ans après 2017, les agriculteurs bloquent le pays. Votre idéologie est la cause de cette crise structurelle, mais vous préférez faire de la protection de l'environnement un épouvantail.

Vos mesures n'apportent aucune réponse pour notre souveraineté. Vous vous gardez de combattre le libre-échange, mais défendez une PAC qui engraisse les privilégiés. Vous ne faites rien pour que les Français aient assez de pouvoir d'achat pour se nourrir correctement avec des produits locaux et de qualité, garantie de rémunération décente pour les agriculteurs. L'installation et la transmission passeront par une réorganisation du travail agricole.

La vision du travail de 2017 s'est perdue dans le costume gris d'un comptable triste qui ne voit plus dans le travail qu'un coût. En reculant l'âge à la retraite et refusant l'indexation des salaires sur l'inflation, vous ne l'encouragez pas tout en prétendant défendre la valeur travail.

Emmanuel Macron veut être le président du renouveau démocratique, mais il nomme un Premier ministre qui ne sollicite pas la confiance du Parlement. Quel mépris du peuple ! C'est donc là votre réponse aux gilets jaunes, dont les doléances sont toujours sous scellés...

La République exemplaire ? Sept ans après, on remanie pour faire entrer au Gouvernement des ministres mis en examen !

L'éducation ? Plus de sept ans après, le métier de professeur est en crise, mais vous envoyez des écrans de fumée, comme l'abaya. Vous faites du séparatisme de l'enseignement privé catholique un modèle !

Action, réaction ! Nous voilà revenus au directeur Rachin du film Les Choristes ! (Quelques protestations à droite ; M. Joshua Hochart s'amuse.) Ce n'est même plus une politique de boomer, mais d'avant-guerre. Dans quel monde vivra la jeunesse ? Vous ne faites pas le lien avec la baisse de natalité. Il faut réarmer démographiquement : créer des soldats et des cotisants... Vous voulez faire de la jeunesse une grande cause nationale - mais la précédente a fini dans un soutien abject à Gérard Depardieu ! (Applaudissements sur les travées du GEST)

La loi Immigration restera comme une indélébile tache morale. Avant de venir vous présenter au Parlement, vous avez attendu que le Conseil constitutionnel annule l'atrocité du pacte faustien que vous avez passé avec la droite et l'extrême droite ! (Quelques huées à droite) Mais personne n'est dupe : votre dérive illibérale et votre gouvernement tacite avec les soi-disant « Républicains » demeurent. Mes chers collègues de droite, vous critiquez la Constitution du général de Gaulle, avec la même virulence que les héritiers de Pétain. (Mme Marie-Claire Carrère-Gée et M. Francis Szpiner protestent.)

Mme Agnès Evren.  - Quelle caricature !

M. Guillaume Gontard.  - Si vous refusez de l'entendre de ma bouche, entendez-le de celle de Xavier Bertrand ! (Sourires à gauche)

Je n'ai pas encore parlé d'écologie - du moins pas selon votre vision ensilotée. Pouvoir de vivre, réorganisation du travail, renouveau démocratique, renforcement des libertés publiques, ouverture au reste de l'humanité, projet pour la jeunesse - c'est ça, l'écologie ! C'est la vision qui nous manque pour recréer de l'activité économique et recouvrer notre souveraineté, grâce à une transition agricole rémunératrice, une réindustrialisation vertueuse, une transition énergétique plus compétitive et plus souveraine que le nucléaire, une production de logements biosourcés. C'est la solution pour contrôler notre dépense publique, pour enfin dépasser nos divisions, nos haines, nos égoïsmes et se mobiliser ensemble dans un objectif qui concerne l'avenir de l'humanité tout entière. L'écologie est la solution. (Vifs applaudissements et acclamations sur les travées du GEST ; applaudissements sur les travées du groupe SER)

M. Joshua Hochart .  - Monsieur le Premier ministre, vous avez surjoué le volontarisme, feignant de découvrir la situation, comme si vous n'étiez comptable de rien ! Sous couvert de jeunesse, votre logiciel est daté. La crise agricole, lancinante depuis des décennies, vous saute à la figure avec les ravages du libre-échange bruxellois en arrière-plan. Ces maux, dénoncés par le Rassemblement national depuis longtemps, vous semblez les découvrir avec ce mouvement pacifique soutenu par les Français.

Vous avez soutenu depuis dix ans tous ceux qui ont échoué. Comment vous croire ? Votre feuille de route ultralibérale continuera à être déroulée. Vous êtes comptable du malheur des paysans, voire coupable.

Vous rejetez la responsabilité des échecs. Bruxelles décide de notre politique agricole, et les Français suivent ! C'est l'impuissance consentie, comme en matière sécuritaire : l'immigration massive continue en 2023 avec la non-exécution des obligations de quitter le territoire français (OQTF), leur lot de drames et les émeutes.

Vous évoquiez hier votre satisfaction d'être Premier ministre et homosexuel en 2024. J'ai une question : avec le laxisme sécuritaire, pourrons-nous assumer notre homosexualité en 2034 ?

Sept ans de Macronie, c'est sept ans d'incapacité à se projeter.

Vous avez décrit une image idéale, mais en 2024, être français, c'est avoir des difficultés à boucler ses fins de mois de plus en plus tôt, c'est ne pas avoir de place pour faire garder son enfant en situation de handicap dans un institut spécialisé.

Votre gouvernement demeure minoritaire dans les Chambres comme dans le pays. Prenons date : dans deux ans, rien n'aura changé.

M. Gabriel Attal, Premier ministre .  - Je remercie tous les orateurs, tournés vers l'intérêt général.

Monsieur Retailleau, vous avez insisté sur la nécessité de réarmer économiquement notre pays. (M. Yannick Jadot ironise.)

Non, je ne considère pas que tout va mieux dans le meilleur des mondes. Mais quand les choses vont mieux, il faut le dire. Nous sommes deux points en dessous du niveau de chômage de 2017 et 2 millions d'emplois ont été créés dans notre pays. C'est un succès collectif de notre pays, de nos entreprises qui créent des emplois et que nous avons accompagnées, et surtout pour ces millions de familles qui vivent de nouveau dans la dignité.

C'est vrai, notre déficit est largement supérieur à celui de l'Allemagne, tout comme notre taux de chômage. Mais la dynamique n'est pas meilleure en Allemagne - ce qui n'est pas une bonne nouvelle, tant sa récession a des conséquences sur notre PIB.

Concernant l'agriculture, nous tiendrons notre engagement : pas de surtransposition à l'avenir, et pas d'interdiction sans solution.

Il y a moins de surtranspositions qu'auparavant : les molécules interdites en France avant 2017 l'ont été depuis par d'autres pays ; il faut cependant être vigilant sur le contournement de certaines interdictions en Europe... (M. Yannick Jadot s'exclame.)

Quand l'agence sanitaire française interdit un produit alors que le régulateur européen est en train de se pencher sur la situation du produit, cela pose problème. (M. Yannick Jadot écarte les bras en signe de protestation.) Il faut parler de concert.

Je crois au dépassement politique et au rassemblement - c'est pourquoi j'ai rejoint Emmanuel Macron. D'autres présidents de la République, dans une période récente, parlaient d'ouverture.

M. Bruno Retailleau.  - Ce ne furent pas les meilleures réussites...

M. Jean-Baptiste Lemoyne.  - Le gouvernement Fillon !

M. Gabriel Attal, Premier ministre.  - Mon expérience de conseiller municipal me l'a enseigné : s'il y a bien un endroit où l'on peut mettre autour de la table des hommes et femmes de différents horizons politiques pour avancer, c'est bien la commune.

Mme Cécile Cukierman.  - Personne ne remet cela en question.

M. Jean-Baptiste Lemoyne.  - Il a raison.

M. Gabriel Attal, Premier ministre.  - Le Sénat le sait bien...

M. Jean-François Husson.  - Le Gouvernement pourrait donc se rapprocher de la majorité sénatoriale !

M. Gabriel Attal, Premier ministre.  - C'est vrai.

Je remercie François Patriat d'avoir insisté sur les outre-mer et la ruralité. (Mme Solanges Nadille et M. Frédéric Buval applaudissent.) Les outre-mer ont besoin d'un investissement particulier.

La ruralité a besoin de stratégies au plus près des territoires : pactes territoriaux dans la Creuse, les Ardennes, l'Avesnois-Thiérache, le plan Marseille en Grand... (Mme Marie-Arlette Carlotti applaudit ; M. Mathieu Darnaud proteste), même si ce dernier ne concerne pas la ruralité.

M. Mathieu Darnaud.  - En effet !

M. Gabriel Attal, Premier ministre.  - Nous doublons la dotation aménités rurales.

Nous avons lancé Action coeur de ville, Petites Villes de demain. Je vois lors de mes déplacements que cela a amélioré les choses. Nous poursuivrons les actions sur les maisons de santé pluriprofessionnelles (MSP), les médicobus, les budgets pour le commerce dans nos départements ruraux.

Madame Carrère, la pénibilité est un enjeu majeur. Nous serons très attentifs à ce que les budgets prévus dans la réforme des retraites soient utilisés pour la prévenir dans les entreprises et les services publics, notamment à l'hôpital. Les partenaires sociaux négocient sur l'usure professionnelle, l'emploi des seniors et la reconversion ; j'en attends beaucoup. Nous assumons le recul de l'âge de départ à la retraite, mais nous devons agir pour réduire la pénibilité.

Je remercie les interventions constructives des présidents Hervé Marseille et Claude Malhuret, et chacune et chacun d'entre vous.

Mme Émilienne Poumirol.  - Et la gauche ?

M. Gabriel Attal, Premier ministre.  - À bientôt avec mon gouvernement pour continuer à avancer sur tous ces sujets. (Applaudissements sur les travées du RDPI, du RDSE et du groupe UC)

La séance est suspendue à 17 h 40.

Présidence de M. Mathieu Darnaud, vice-président

La séance reprend à 17 h 45.