SÉANCE
du mardi 12 novembre 2019
17e séance de la session ordinaire 2019-2020
présidence de M. David Assouline, vice-président
Secrétaires : Mme Jacky Deromedi, M. Joël Guerriau.
La séance est ouverte à 9 h 30.
Le procès-verbal de la précédente séance est adopté.
Questions orales
M. le président. - L'ordre du jour appelle 35 questions orales.
Prolifération des éoliennes dans les Hauts-de-France
M. Antoine Lefèvre . - Le développement des éoliennes est devenu un sujet de mécontentement, en particulier dans les Hauts-de-France. Outre les passages en force malgré les avis négatifs des communes, les utilisations sans autorisation de chemins communaux ou encore l'accaparement de parcelles communales, la multiplication anarchique des éoliennes mite inexorablement les paysages de cette région et exaspère les populations.
À ce jour, les Hauts-de-France remplissent déjà les objectifs fixés pour 2020. Début 2019, 1 500 éoliennes sont installées, dont 540 dans l'Aisne, 800 sont autorisées et non encore construites, et 733 dossiers sont en cours d'instruction... Sans rationalisation ni gestion des paysages, ces machines atteignent des hauteurs supérieures à 200 mètres, implantées à 500 mètres des habitations.
Le triplement du parc éolien terrestre pour porter le nombre de machines à 15 000 en 2028 et le droit à déroger aux dispositions relatives à l'enquête publique suscitent de grandes et fortes inquiétudes.
La Cour des comptes, en avril 2018, s'inquiétait du coût prohibitif pour les finances publiques : les contrats de l'éolien vont coûter « 40,7 milliards d'euros en vingt ans », ceci pour « 2 % de la production française ».
Dans les campagnes, les éoliennes séparent ceux qui touchent de l'argent, propriétaires et collectivités, et ceux qui subissent les nuisances.
Il faut donc faire un état des lieux général des avantages et inconvénients des nouvelles productions d'énergie que ce soit l'éolien, le photovoltaïque, ou la méthanisation - ceci en associant les collectivités locales, les élus et les habitants aux projets ayant une incidence évidente sur leur quotidien.
M. Jean-Baptiste Djebbari, secrétaire d'État auprès de la ministre de la transition écologique et solidaire, chargé des transports . - Mme Borne, qui ne peut être parmi vous ce matin, m'a chargé de vous répondre.
La France veut porter à 40 % les énergies renouvelables en 2030. Le programme pluriannuel de l'énergie (PPE) confirme cette ambition. Les objectifs fixés à 2028 ne portent pas le nombre d'éoliennes en France à 24 000 mâts, mais à environ 15 000, soit moins d'un doublement par rapport à 2018. Les nouvelles installations sont plus efficaces et permettent de produire la même énergie que les anciennes avec un nombre plus réduit de mâts. Elles sont également moins coûteuses que dans le passé.
Le développement des projets éoliens est par ailleurs encadré par l'État. L'autorisation des projets relève du préfet ; une étude d'impact est effectuée, sous l'égide de la Commission nationale du débat public (CNDP). Cette étude ne peut être remplacée par l'enquête électronique qu'à certaines conditions strictes.
Les projets d'implantation d'éoliennes sont différents selon les territoires. Le Gouvernement veut accompagner la filière éolienne, dans un dialogue avec les régions.
M. Antoine Lefèvre. - Xavier Bertrand, président de la région Hauts-de-France, a demandé la fin de ces implantations et a récemment rencontré Emmanuelle Wargon sur ce sujet. J'espère qu'on pourra mieux prendre en compte cette problématique pour les Hauts-de-France et associer les populations aux projets.
Réalisation d'un réseau express métropolitain dans le département d'Indre-et-Loire
M. Serge Babary . - J'attire votre attention sur la réalisation d'un réseau express métropolitain dans le département d'Indre-et-Loire, en particulier pour le noeud ferroviaire de Tours-Saint-Pierre-des-Corps.
Le projet de loi d'orientation des mobilités (LOM) confirme la priorité donnée à la désaturation des villes et de leurs accès et à l'amélioration des liaisons entre les territoires ruraux ou périurbains et les pôles urbains. Aussi, l'un des cinq programmes d'investissement porte sur « la résorption de la saturation des grands noeuds ferroviaires, afin de doubler la part modale du transport ferroviaire dans les grands pôles urbains ». Pour le traitement des noeuds urbains saturés, le rapport annexé au projet prévoit d'engager « 2,6 milliards dans les dix années à venir - hors Île-de-France -, associant État, collectivités locales ou SNCF ». L'État y contribuerait à hauteur de 1,3 milliard d'euros.
Avant le 1er janvier 2020, SNCF Réseau doit présenter à l'approbation du Gouvernement un plan d'ensemble explicitant les objectifs poursuivis, les zones du réseau concernées par ce plan, les délais et les principales étapes de réalisation.
De par sa position centrale et sa densité de lignes - dix branches ferroviaires, dont deux lignes à grande vitesse -, le noeud ferroviaire de Tours-Saint-Pierre-des-Corps est un point stratégique au niveau national et représente l'occasion de promouvoir des mobilités du quotidien décarbonées. Les onze intercommunalités du département sont innervées par les huit branches de l'étoile ferroviaire tourangelle et offrent 33 points d'arrêt. Le ferroviaire peut donc être une alternative sérieuse à l'automobile et un lien entre les territoires.
Le 11 septembre 2019, les présidents des onze intercommunalités du département ont sollicité la ministre de la Transition écologique et solidaire afin que le bassin de vie tourangeau puisse devenir un terrain d'expérimentation du réseau express métropolitain.
Dans quelle mesure le bassin tourangeau pourra être intégré au plan d'ensemble de désaturation des grands noeuds ferroviaires ?
M. Jean-Baptiste Djebbari, secrétaire d'État auprès de la ministre de la transition écologique et solidaire, chargé des transports . - La LOM vise à améliorer les transports du quotidien, notamment dans les métropoles, par des liaisons rapides, fréquentes et interconnectées, organisées selon un schéma directeur, à l'instar du réseau express d'Île-de-France.
Nous voulons doubler la part du ferroviaire grâce aux autorités organisatrices de transport (AOT) régionales et locales, comme dans les noeuds de Bordeaux, Toulouse, Marseille ou Lyon.
Le Gouvernement accompagne les 20 noeuds ferroviaires majeurs de France, dont Tours-Saint-Pierre-des-Corps. Malgré une moyenne de 2,7 millions de voyageurs par an sur 8 branches ferroviaires, le mode ferroviaire est encore sous-utilisé dans l'aire urbaine de Tours.
Début 2020, le plan d'ensemble de SNCF Réseau identifiera le contexte et les ambitions poursuivies. J'appelle les élus à se rapprocher de SNCF Réseau pour un travail partenarial.
M. Serge Babary. - Les infrastructures, rayonnantes et denses, existent et les dix intercommunalités et la métropole ont signé ensemble un document, témoin de leur volonté politique commune.
Pollution liée à Metaleurop
Mme Sabine Van Heghe . - La pollution générée par l'usine Metaleurop Nord pose problème. Pendant plus d'un siècle, cette usine a fourni l'industrie française en zinc et en plomb ; elle faisait vivre des centaines de familles dans le Pas-de-Calais jusqu'à sa fermeture en 2003, mais elle a également pollué les sols avec des métaux lourds. Des centaines d'habitants ne peuvent disposer de leurs propriétés, certaines cultures sont impossibles et chaque projet d'urbanisme nécessite un décapage des sols très onéreux. Les élus de la communauté d'agglomération d'Hénin-Carvin ont demandé à l'État la réparation du préjudice écologique subi. L'État s'est contenté de constater les dégâts. Les élus locaux demandent donc la dépollution par l'État de tous les sols pollués. En décidant de ne pas compenser l'exonération de taxe foncière, le Gouvernement a décidé de ne pas honorer la parole de l'État, ce qui occasionne pour ces communes un manque à gagner d'un million d'euros. Quelle est la position du Gouvernement ?
M. Jean-Baptiste Djebbari, secrétaire d'État auprès de la ministre de la transition écologique et solidaire, chargé des transports . - Le ministère de la Transition écologique et solidaire est actif sur ce dossier complexe et sensible de la pollution générée par l'ancienne usine de Metaleurop. Avant la fermeture de l'usine, les émissions de plomb dans l'air et l'eau ont été divisées par 30 à la suite de la réglementation sur les installations classées.
En 2003, un contrat de reconversion industrielle du site a été signé par l'État et les acteurs locaux : sur 66 millions d'euros de coût, les financements publics se sont élevés à 14,1 millions d'euros.
La zone autour de l'usine a été déclarée périmètre d'intérêt général et a fait l'objet de restrictions d'urbanisme par différents arrêtés préfectoraux ; 2 millions d'euros ont été versés à l'Ademe pour dépolluer les sols environnants, y compris chez des particuliers.
Le 21 novembre 2018, Olivier Dussopt avait répondu sur la non-compensation financière de la taxe foncière.
Mme Sabine Van Heghe. - La pollution demeure importante, votre réponse ne me satisfait pas et ne saurait constituer un solde de tout compte. L'État est responsable et doit l'assumer.
Réforme du code minier
M. Georges Patient . - Chaque année, 10 tonnes d'or sont extraites illégalement des sols guyanais et 400 millions d'euros volatilisés, volés à un territoire en retard en matière d'équipement, qui en aurait besoin.
Face à cette situation, une obstruction administrative arbitraire bloque l'exportation légale des gisements d'or.
Les projets de réforme du code minier mettent en émoi le secteur minier, qui doit se battre pour exister.
La future procédure de demande d'instruction des titres miniers sera complexifiée, elle durera de quatre à six ans. Pourquoi ne pas obliger l'administration à répondre plus rapidement, en faisant valoir que son silence tacite vaut autorisation, comme dans d'autres secteurs ?
Souhaitez-vous éteindre cette filière ? Sera-t-il possible d'exploiter légalement des mines d'or en Guyane ?
M. Jean-Baptiste Djebbari, secrétaire d'État auprès de la ministre de la transition écologique et solidaire, chargé des transports . - La réforme du code minier s'inscrit dans la continuité des travaux et des concertations antérieures, avec la volonté que les projets miniers autorisés soient à la hauteur de nos ambitions en matière d'environnement.
Ce projet prend en compte les enjeux environnementaux, économiques et sociaux des territoires dès les premières autorisations. L'objectif est d'aboutir à des procédures plus transparentes, des décisions plus protectrices de l'environnement et des modalités de participation du public renforcées tout particulièrement pour les titres de recherches et préalablement aux premières demandes de travaux. Par ailleurs, cette révision des procédures d'autorisation ne sera pas nécessairement plus longue si l'ensemble des parties prenantes sont concertées bien en amont des décisions.
Monsieur le sénateur, je ne doute pas que la ministre ait à coeur d'associer les parlementaires dans les concertations sur ce projet de réforme tant attendu et je sais que vous avez d'ailleurs été reçu par le cabinet de la ministre le 22 octobre dernier sur ce sujet.
M. Georges Patient. - Ne laissons pas le champ libre aux pilleurs d'or qui polluent la Guyane avec leur mercure : pour dix tonnes d'or, ils répandent dix tonnes de mercure dans notre sol...
Organisation territoriale de la distribution publique d'énergie
M. Marc Laménie . - Ma question porte sur l'organisation territoriale de la distribution d'énergie.
Depuis 1965, la fédération départementale d'énergies des Ardennes (FDEA), syndicat intercommunal à vocations multiples, est l'autorité organisatrice de la distribution publique d'énergie (AODE) dans le département.
À ce titre la FDEA, qui regroupe l'ensemble des communes ardennaises, assure le maintien et le développement d'un réseau électrique de qualité et participe également au déploiement des bornes de recharge pour les véhicules électriques ainsi qu'à la réalisation de la cartographie numérique du territoire.
Son assise géographique et son antériorité en font un interlocuteur fiable des communes et intercommunalités et un organisme de conseil et de mutualisation.
L'article 3 bis B du projet de loi relatif à l'énergie et au climat prévoit d'ailleurs la possibilité pour les AODE de recevoir des aides financières pour leur action en faveur du développement des énergies renouvelables au sein des communes ainsi que pour les opérations visant à faciliter la transition énergétique.
Dans ces conditions, la menace d'un démantèlement de ces organismes au profit d'un éclatement de leurs compétences entre des groupements de communes se révélerait contre-productive. Les maires des Ardennes sont inquiets.
Quelles assurances pouvez-vous nous donner quant au maintien des AODE dans leur configuration actuelle ?
M. Jean-Baptiste Djebbari, secrétaire d'État auprès de la ministre de la transition écologique et solidaire, chargé des transports . - Les syndicats d'énergie jouent un rôle déterminant, avec leurs investissements pour la qualité de la distribution d'énergie et l'accompagnement du département pour le développement des énergies renouvelables.
Nous ne voulons pas du tout les affaiblir. Le projet de loi Engagement et proximité ne comporte aucune mesure concernant les syndicats d'énergie, le Gouvernement a réaffirmé leur importance et confirmé leur rôle dans le projet de loi Énergie-Climat.
En particulier, les syndicats pourront prendre en charge, pour le compte de leurs membres, tout ou partie des travaux nécessaires à l'amélioration de la performance énergétique des bâtiments dont ils sont propriétaires.
Le Gouvernement a également souhaité étendre le champ d'intervention du financement des aides aux collectivités territoriales pour l'électrification rurale (Facé), outil de péréquation indispensable dont bénéficient de nombreux syndicats.
M. Marc Laménie. - Merci de cette réponse rassurante pour nos élus. La FDEA a beaucoup oeuvré dans les Ardennes, nous tenons à son avenir.
Représentation des entreprises du secteur éolien au sein de l'Ofate
Mme Sylvie Vermeillet, en remplacement de Mme Anne-Catherine Loisier . - Mme Anne-Catherine Loisier attire l'attention de Mme la ministre de la Transition écologique et solidaire, sur la représentation des entreprises du secteur éolien au sein de l'Office franco-allemand pour la transition énergétique (Ofate). Cet organisme qui coordonne les politiques franco-allemandes, a ses bureaux dans les locaux même du ministère et est financé pour plus d'un tiers par celui-ci. Son comité de pilotage est composé des quatre syndicats d'énergie renouvelable franco-allemands et nombre des autres membres ont des intérêts particuliers dans ce secteur. Il semblerait donc que le « lobby » éolien soit financé par le ministère lui-même.
Selon le rapport franco-allemand de l'agora Energiewende et de l'institut du développement durable et des relations internationales Energiewende et la transition énergétique à l'horizon 2030, « [...] si des capacités nucléaires sont retirées du mix français, la compétitivité des centrales à charbon maintenues dans le système en Allemagne est améliorée. »
L'Allemagne aurait donc doublement intérêt à ce que la France renforce ses capacités de production d'énergie éolienne car elle compte de nombreuses entreprises dans ce secteur et la baisse des capacités nucléaires françaises rendrait plus compétitives les centrales à charbon et donc leur maintien en Allemagne.
Qu'en pensez-vous au regard des intérêts de la France en matière de politique énergétique ?
M. Jean-Baptiste Djebbari, secrétaire d'État auprès de la ministre de la transition écologique et solidaire, chargé des transports . - Je vais vous rassurer. L'Ofate, créé en 2006, promeut l'information et la coopération entre la France et l'Allemagne sur les énergies renouvelables. Association, il n'a pas d'objectif politique, et couvre toutes les énergies renouvelables, pas seulement l'éolien. De format mixte public-privé, il est financé par les États et les professionnels de l'énergie. Ses rapports sont publics. La coopération franco-allemande est un atout pour la transition énergétique. L'Ofate n'a pas participé au rapport que vous critiquez, qui prend comme hypothèse un marché sur-capacitaire, qui n'est plus d'actualité, avec la fermeture des centrales à charbon allemandes.
Mme Sylvie Vermeillet. - Merci de votre réponse. Mme Loisier était perplexe quant au choix français de réduire ses capacités nucléaires, incitant dès lors l'Allemagne à maintenir ses centrales à charbon, ce qui n'est pas bon pour l'environnement.
Avenir de la ligne ferroviaire Grenoble-Veynes
Mme Patricia Morhet-Richaud . - Le 27 mai, monsieur le secrétaire d'État, vous avez effectué le trajet Grenoble-Veynes en train. La SNCF fermera la ligne pour travaux. Vous avez annoncé en septembre dans le Dauphiné Libéré votre engagement à faire réaliser des travaux par l'État sur cette ligne, pour sauver l'étoile de Veynes. Pour autant, rien ne s'est passé. Les élus locaux et les habitants ne se sont pas entendus, faute d'investissement, les travaux de modernisation et de sécurisation des voies prévus sur la section Livron Veynes privent tout simplement les Hautes-Alpes - 140 000 habitants, 387 586 lits touristiques, 20 millions de nuitées par an -, d'une desserte ferroviaire via Valence.
Quelle est la position de l'État sur le dossier ? Quel sera le montant des travaux et quel sera le calendrier prévisionnel ?
M. Jean-Baptiste Djebbari, secrétaire d'État auprès de la ministre de la transition écologique et solidaire, chargé des transports . - Cette ligne est indispensable à la vitalité du territoire. Des travaux sont prévus en 2020, sauf sur la section Vif-Lus-la-Croix-Haute-Veynes, faute d'entretien lourd depuis des décennies.
Toutefois, je vous confirme qu'une étude de la remise en état de la ligne, financée à 50% par l'État, est en cours. Les résultats sont attendus de manière imminente.
De mars à décembre 2021, la branche Livron-Veynes sera fermée pour travaux, afin d'assurer pour l'avenir la pérennité de l'axe ferroviaire de Valence à Briançon et ainsi, le maintien des circulations du train de nuit Paris-Briançon.
Une offre de substitution au train de nuit sera également mise en place en 2021 pendant les travaux.
Le Gouvernement a demandé au préfet de région Provence-Alpes-Côte-D'azur d'organiser un nouveau comité de pilotage d'ici la mi-décembre 2019 afin d'étudier avec les collectivités locales les propositions actualisées de SNCF Réseaux et d'arrêter un tour de table financier.
En tout état de cause, soyez assurée que l'État veillera à ce que les solutions pour pérenniser la desserte des Hautes-Alpes soient mises en oeuvre dans les meilleures conditions pour les usagers du train.
Mme Patricia Morhet-Richaud. - Merci. Il y a urgence pour notre territoire. Nous attendons le rapport Philizot. (M. Marc Laménie applaudit.)
Situation des lycéens sportifs de haut niveau et nouveau baccalauréat
M. Michel Savin . - Ma question porte sur la situation des lycéens actuellement engagés dans un parcours spécifique aménagé visant l'obtention du baccalauréat tout en pratiquant intensément une discipline sportive à haut niveau, par exemple les skieurs de haut niveau dans mon département. La promotion inscrite depuis 2018, qui n'est pas concernée par la réforme du baccalauréat, passera ce diplôme en juin 2021, soit la même année que le premier nouveau baccalauréat réformé. Depuis un an, ces élèves sont donc préparés au baccalauréat actuel, et certains ont même d'ores et déjà passé des épreuves mais la décision concernant leurs conditions d'obtention finale de leur baccalauréat n'est toujours pas définie.
Le double projet, éducatif et sportif, est une politique sportive et éducative ambitieuse, largement portée par le Gouvernement.
Aussi, il apparaît nécessaire de sécuriser le parcours de ces jeunes sportifs, en leur permettant de passer l'examen auquel leurs professeurs les préparent actuellement. Cette solution apparaît comme la plus raisonnable pour nos espoirs sportifs de demain, et répond avant toute chose à une question d'égalité. Une proposition a été soumise par le rectorat de Grenoble, mais elle est restée sans réponse.
Quelle est votre opinion ? Comment rassurer ces jeunes et leurs familles ?
M. Jean-Michel Blanquer, ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse . - Ces jeunes ne devront pas être lésés par la réforme, c'est une évidence. La rectrice de Grenoble a pris en main la situation des 143 élèves concernés. Les trimestres de première et de terminale ont été répartis sur deux années scolaires, ainsi l'examen final sera passé in fine en 2021. Ce cas a été prévu par la réforme et notamment l'article 10 de l'arrêté du 10 juillet 2018 sur les modalités du contrôle continu. Celui-ci peut être validé par des épreuves sportives ponctuelles à la fin de la terminale, pour les sportifs de haut niveau.
Au titre du contrôle continu, les élèves doivent certes se présenter à une épreuve commune pour l'ensemble de la spécialité, la philosophie et le grand oral, mais il ne le permet pas. Un arrêté prévoira prochainement une dispense pour cette épreuve de spécialité non suivie en terminale. La réforme s'adapte donc à ces cas particuliers.
M. Michel Savin. - J'espère que votre réponse rassurera les parents d'élèves. Nous resterons vigilants. Il faut éviter de multiplier les rattrapages d'épreuves, difficilement compatibles avec les compétitions.
Accompagnants d'élèves handicapés
M. Didier Marie . - Ma question porte sur la situation que vivent de nombreux accompagnants d'élèves en situation de handicap (AESH), dans l'académie de Rouen comme ailleurs.
Sur les 12,4 millions d'élèves scolarisés, 400 000 sont en situation de handicap - troubles autistiques, dyspraxie, dyslexie, hyperactivité - et doivent avoir un AESH. Tel n'est cependant pas le cas. À Rouen, depuis septembre, plus de 200 AESH travaillent sans contrat voire sans salaire. Cette précarité est incompréhensible au regard de l'importance de leur rôle pour la scolarité des élèves handicapés. Cela nuit à l'inclusion scolaire.
Comment expliquer une telle situation ? Est-ce lié à la mise en place des pôles inclusifs d'accompagnement localisés (PIAL) ? Comment comptez-vous y remédier ?
M. Jean-Michel Blanquer, ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse . - À la rentrée 2019, 365 000 élèves handicapés ont été accueillis et le nombre d'AESH recrutés a augmenté, avec des contrats plus stables qu'auparavant. Il y a eu effectivement quelques lacunes à Rouen. Nous avons recruté plus d'AESH pour prendre en compte les recommandations des maisons départementales des personnes handicapées (MDPH). Mais la paie de septembre n'a parfois pas été versée en raison de problèmes administratifs.
Fin septembre et fin octobre, des acomptes ont cependant été versés. Certains cas, toutefois, n'ont pas été réglés, notamment à Rouen. Le ministère veille à une régularisation rapide de ces situations.
M. Didier Marie. - Espérons que cela se fasse rapidement. Des contrats de trois ans sont un progrès, mais il faudrait, à terme, offrir des CDI aux AESH pour accompagner leur professionnalisation.
Centre d'action médico-social du Mans
Mme Nadine Grelet-Certenais . - Je souhaite attirer votre attention sur la situation critique du centre d'action médico-social précoce du Mans (CAMSP).
Le CAMSP du Mans accueille plus de deux cent soixante enfants en situation de handicap dans le but que ceux-ci puissent vivre sereinement et s'intégrer en société. Or, depuis 1993, son personnel exerce dans des locaux préfabriqués inadaptés. Cela ne peut plus durer. Les locaux, devenus de surcroît insalubres, ne sont pas aux normes. Ainsi, les entrées ne sont même pas accessibles aux fauteuils roulants. Un comble pour un établissement d'accueil de personnes en situation de handicap ! Par ailleurs, le nombre de demandes de prise en charge par le CAMSP ne cesse d'augmenter chaque année.
Face à ces difficultés, les professionnels du CAMSP, très investis et motivés, trouvent des expédients : le personnel n'hésite pas à partager son bureau à chaque nouvelle intervention pour pouvoir recevoir un enfant supplémentaire. En mai 2018, il a monté un projet d'achat de nouveaux locaux avec un plan d'investissement à l'attention de l'ARS des Pays-de-la-Loire. Cela fait maintenant un an et demi qu'il attend une réponse, alors que la situation presse.
La ministre des Solidarités et de la Santé ainsi que la secrétaire d'État chargée des personnes handicapées ont insisté sur l'importance de la prévention et ont réitéré cette priorité dans le cadre du plan autisme 2018-2022 afin de favoriser le diagnostic précoce.
Il faut urgemment trouver une solution à la demande des équipes et leur apporter toute la reconnaissance qu'elles méritent. Quelles mesures peuvent être mises en place dans les meilleurs délais pour accueillir ces enfants dans des conditions dignes ?
Mme Christelle Dubos, secrétaire d'État auprès de la ministre des solidarités et de la santé . - Les conditions d'installation de cette structure sont effectivement précaires. L'agence régionale de santé (ARS) et le département de la Sarthe travaillent à une amélioration. L'ARS a réuni le 2 octobre les acteurs concernés. Une méthode de travail a été retenue. Le CAMSP sera implanté en septembre 2021 à l'hôpital du Mans. Le projet architectural doit désormais être précisé, l'association gestionnaire doit finaliser l'expression de ses besoins. Dans cette attente, des travaux de rénovation seront réalisés sur les locaux actuels.
Mme Nadine Grelet-Certenais. - Je communiquerai votre réponse à une équipe motivée mais un peu désespérée par les reports et délais successifs.
Conditions de travail du personnel hospitalier
M. Patrice Joly . - Les conditions de travail des personnels hospitaliers dans la stratégie nationale « Ma Santé 2022 » relèvent d'un enjeu de santé publique, parce qu'elles concernent la préservation de la santé de ces personnels dans un environnement de travail particulièrement pathogène, à fort taux de pénibilité et dont les contraintes sur les organismes sont lourdes de conséquences. Le secteur hospitalier pâtit d'un manque notoire de personnel. L'hôpital n'attire plus les étudiants. Des études démontrent clairement que le manque durable de personnel engendre des désorganisations importantes au sein de la majorité des hôpitaux français. Des effets délétères sur la santé sont prouvés par les épidémiologistes.
Comment maintenir la qualité des soins dans un environnement de travail de plus en plus difficile et un contexte de manque d'effectifs problématique ?
Depuis plusieurs mois, les établissements publics de santé sont secoués par des mouvements sociaux sans précédent, au sein des services des urgences, de maternité, de la protection de l'enfance, des structures pour personnes âgées, et dans les secteurs de la psychiatrie. Tous dénoncent le manque de moyens humains, matériels, budgétaires et la souffrance au travail.
Quelles sont les mesures envisagées à court et moyen termes ?
Mme Christelle Dubos, secrétaire d'État auprès de la ministre des solidarités et de la santé . - L'amélioration des conditions de travail des hospitaliers est indispensable pour préserver la qualité des soins et l'attractivité de l'hôpital. Nous la devons à ceux qui soignent tous les jours nos concitoyens.
Les tensions sociales dans les établissements de santé ne datent pas d'hier. Nous avons lancé une stratégie nationale de la qualité de vie au travail, dont certaines mesures sont déjà en place. Un observatoire national de la qualité de vie au travail doit exploiter les données existantes pour formuler des recommandations. Un dispositif de médiation à l'échelle nationale et inter-régionale est en cours de déploiement, qui interviendra notamment pour des conflits liés aux conditions de travail.
Enfin, le Gouvernement a pris depuis deux ans des mesures concrètes : tarifs hospitaliers augmentés en 2018, pour la première fois depuis dix ans, plan « Ma Santé 2022 » qui accompagne l'évolution des carrières des professionnels de santé, ou bien encore réforme des études médicales pour éviter le gâchis de la sélection en fin de première année. Des travaux sont en cours pour adapter les parcours professionnels des hospitaliers et leur permettre de diversifier leur mode d'exercice. Des mesures sont prévues pour soutenir le management dans les hôpitaux. Mme la ministre s'est engagée à prendre de nouvelles décisions dans les jours prochains.
M. Patrice Joly. - Les sondages montrent que la santé est la première préoccupation des Français. Il y a urgence à agir, d'autant plus que les hôpitaux sont souvent le premier et le dernier recours dans les territoires.
Avenir de la télémédecine
Mme Catherine Procaccia . - Depuis septembre 2018, l'assurance maladie rembourse les téléconsultations faites via un ordinateur, un smartphone ou une tablette, mais limite ce remboursement à celles qui sont réalisées auprès du médecin traitant ou d'un médecin ayant une connaissance préalable du patient.
Si ce dispositif se développe, sa progression est beaucoup plus lente que prévu. Pour des prévisions annoncées par le Gouvernement à 500 000 actes en 2019, et un million en 2020, à peine 60 000 utilisations ont été constatées après un an d'application, alors que 350 millions de consultations physiques sont réalisées chaque année en France.
La pratique concerne presque majoritairement l'Île-de-France. Seulement 1 600 médecins libéraux ont facturé des actes de télémédecine cette année. Certaines plateformes n'arrivent pas à obtenir le remboursement des actes de la Caisse nationale d'assurance maladie (CNAM). La téléconsultation permet de désengorger les services médicaux d'urgence, et d'avoir accès plus facilement à un médecin. Il n'y a pas de raison de pénaliser les malades qui font l'effort de ne pas se déplacer aux urgences en ne les remboursant pas.
Compte tenu de la nécessité pour les médecins et les utilisateurs de disposer d'une connexion internet suffisamment puissante pour obtenir une image nette, les téléconsultations peuvent être difficiles à pratiquer dans certaines parties du territoire.
Que compte faire le Gouvernement pour aider au développement de cette médecine que vous souhaitez médecine des temps modernes ?
Mme Christelle Dubos, secrétaire d'État auprès de la ministre des solidarités et de la santé . - La pratique de la médecine à distance est une opportunité majeure pour améliorer l'accès aux soins. Avec la tarification des actes de téléconsultation dans le plan « Ma Santé 2022 », le Gouvernement a cherché à favoriser une accélération sans précédent de son déploiement. On parle de 60 000 actes de téléconsultation. Il ne s'agit là que d'un indicateur, et les études sur le terrain révèlent un passage de 1 000 à 10 000 téléconsultations mensuelles entre décembre 2018 et juillet 2019 : la dynamique est bel et bien enclenchée. En sus de la téléconsultation, il existe aussi 33 000 patients en télésurveillance.
La répartition géographique des téléconsultations varie en fonction des besoins locaux et de la démographie régionale.
Les barrières à la télémédecine peuvent être surmontées, grâce à une évolution culturelle que nous favorisons. La Haute Autorité de santé a édité un guide des bonnes pratiques en télémédecine. Des formations sont mises en place dans le cadre du développement professionnel continu, qui pourront aussi être intégrées dans la formation initiale des professionnels de santé. Les infirmiers pourront pratiquer un acte d'accompagnement du patient à la téléconsultation. Les pharmaciens en officine seront aussi susceptibles d'oeuvrer en ce sens. L'application de ces mesures sera effective dès janvier 2020.
Quant au numérique, le Gouvernement s'est donné pour objectif un bon débit pour tous et la généralisation d'une couverture mobile de qualité dès 2020, et le très haut débit pour tous en 2022.
Mme Catherine Procaccia. - Vous mentionnez 60 000 téléconsultations sans aborder le non-remboursement par la CNAM lorsque le médecin exerce dans un département différent de celui du patient. Il n'y a rien sur ce sujet dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale.
Campagnes des industries de l'alcool auprès des jeunes
M. Bernard Jomier . - Selon les chiffres rapportés par la mission interministérielle de lutte contre les drogues et les conduites addictives, 85 % des adolescents de moins de 17 ans ont déjà consommé de l'alcool, 44 % ont déclaré une alcoolisation ponctuelle importante dans le mois, et près de 9 % en consomment régulièrement.
Notre socle législatif est bien en peine de protéger la jeunesse, car les alcooliers débordent d'imagination pour contourner la loi Évin : marques alibis pour parrainer des événements destinés aux jeunes, publicité directe via des influenceurs sur les réseaux sociaux, les exemples sont nombreux.
Vous avez préféré confier la prévention aux alcooliers eux- mêmes, de sorte que nous avons vu apparaître des campagnes d'apprentissage du goût, conduites auprès de très jeunes enfants et d'adolescents, les alcooliers faisant valoir qu'une bonne éducation dans l'enfance protège de tous les excès de consommation à l'âge adulte.
D'importants moyens de communication sont déployés dont le but est de développer une « culture du goût » dès le plus jeune âge, et de créer des « consommateurs avertis ». « Vins et Société », par exemple, présente des kits pédagogiques et des jeux s'adressant à des enfants entre 4 et 14 ans qui leur font découvrir l'univers de la vigne, les goûts et les terroirs. Cet apprentissage du goût dès le plus jeune âge est censé favoriser un comportement responsable chez les adultes « avertis » de demain. Or la santé n'est pas une affaire d'opinion ou de goût mais de science. La justification scientifique de ces programmes « d'éducation » est inexistante car les arguments pour les soutenir sont d'ordre culturel ou se réfèrent à la tradition. La science montre que cette prétendue « éducation à bien boire » est une incitation à boire.
Comment allez-vous mettre un terme à des pratiques en contradiction avec les objectifs de santé publique et promouvoir une réelle prévention contre les méfaits de l'alcool chez les jeunes ?
Mme Christelle Dubos, secrétaire d'État auprès de la ministre des solidarités et de la santé . - L'éducation au goût est effectivement brandie comme moyen de prévention des excès, sans justification scientifique. Une seule chose est sûre : l'alcool est toxique pour l'activité cérébrale des enfants et adolescents.
Le cadre scolaire doit garantir la neutralité de l'information. Jean-Michel Blanquer a eu l'occasion de rappeler aux recteurs d'académie que toutes les précautions nécessaires devaient être prises en cas d'utilisation de ces kits, du fait des risques d'incitation à la consommation d'alcool.
La promotion des comportements favorables à la santé auprès des jeunes est essentielle. Nous avons notamment lancé le service sanitaire des 48 000 étudiants en santé et nous avons inscrit le rôle prioritaire de l'école dans le plan « Priorité prévention ». Nous agissons ensemble pour que nos enfants apprennent les bons réflexes pour leur santé, dès le plus jeune âge, afin qu'ils deviennent des adultes autonomes exerçant leur choix de manière éclairée.
M. Bernard Jomier. - Si votre avis est le même que le nôtre sur ces campagnes, mettez-y fin. Mettez aussi en place, comme en Ecosse, un prix minimal de l'alcool, également envisagé en Irlande et aux Pays-Bas, et qui a montré son efficacité.
Hôpital René-Muret de Sevran
Mme Éliane Assassi . - Sans réponse à ma question écrite de juin sur les fermetures au sein de l'hôpital René-Muret de Sevran, je vais la poser à nouveau. Des salariés de l'établissement sont présents en tribune.
L'ensemble des services est touché et notamment le service longue durée, par manque de médecins. Aucune annonce n'a été faite.
Le dispositif de recrutement choisi par l'hôpital - activer le réseau - est un échec. Neuf médecins ont démissionné, il n'y a plus d'internes depuis mai 2019. Le service de médecine gériatrique a fermé huit lits ; l'unité de géronto-psy n'a plus de psychiatre depuis des mois malgré l'apport d'une plus-value pour les patients ; la pérennité de l'unité de soins palliatifs est remise en question depuis le départ d'un médecin en juin 2019 et d'un autre à la fin de cette même année ; le service d'addictologie a dû fermer six lits sur vingt-deux par manque d'un médecin. L'hôpital de jour du service nutrition obésité fonctionne au ralenti en demi-service depuis août.
Depuis le mois de septembre, il ne reste qu'un médecin pour les quatre services de longs séjours de 179 lits. La direction a décidé de réduire le nombre de patients à 90 lits.
Lorsque tous les lits sont ouverts, ils sont occupés. Dorénavant, les patients sont mis à la porte de l'hôpital.
Au regard de la démographie des personnes âgées, il faudrait plutôt augmenter le nombre de lits de gériatrie... Et que dire du projet du Gouvernement d'admettre directement les patients âgés en service de médecine gériatrique pour leur éviter les urgences ? Et cela, alors que le groupe Korian a annoncé la construction d'une structure privée de 166 lits de soins de suite à côté de l'hôpital. Comment allez-vous réagir ?
Mme Christelle Dubos, secrétaire d'État auprès de la ministre des solidarités et de la santé . - L'hôpital René-Muret de Sevran connaît des difficultés liées aux départs de médecins en gériatrie, en soins palliatifs et en addictologie. Le contexte de pénurie explique des délais incompressibles en matière de recrutement. La communauté médicale s'est mobilisée pour restreindre les fermetures et maintenir l'offre de soins.
Cet hôpital joue un rôle stratégique en Seine-Saint-Denis. Une stratégie de transformation de l'offre, notamment celle de longue durée, devrait contribuer à prendre en compte ces difficultés de recrutement. Le nombre de lits de soins de suite et de réadaptation neurologique devrait augmenter. Pour les soins de longue durée, les locaux sont trop vétustes. Il faut aussi consolider la filière gériatrique.
Des échanges ont eu lieu avec les syndicats sur l'évolution du site, dont le positionnement sera amélioré dans la chaîne de soins du territoire. L'AP-HP prévoit de proposer, dès 2020, une formation d'assistants de soins à 370 aides-soignants.
Mme Éliane Assassi. - Les faits sont têtus, et votre réponse ne calmera pas les angoisses.
Lutte contre les cancers pédiatriques
Mme Catherine Procaccia, en remplacement de Mme Jacky Deromedi . - Mme Jacky Deromedi attire l'attention de Mme la ministre des Solidarités et de la Santé sur la lutte contre les cancers pédiatriques.
Chaque année, environ 2 550 nouveaux cas de cancers sont diagnostiqués chez les enfants et les adolescents. On estime qu'un enfant sur 440 sera atteint d'un cancer avant l'âge de 15 ans. C'est la première cause de décès par maladie chez l'enfant, en France. Certains parents envoient leurs enfants à l'étranger pour participer à des essais cliniques, mais avec des risques et des coûts plus importants.
Pendant l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale, nous veillerons à ce que les montants consacrés à la lutte contre les cancers pédiatriques soient à la hauteur.
En janvier, Mme Deromedi a demandé, avec 100 sénateurs, que le cancer pédiatrique soit déclaré grande cause nationale, sans réponse du Gouvernement. Il y avait probablement d'autres priorités... Combien de petits anges devront encore mourir ? Combien de familles continueront à crier leur désespoir ? Madame la ministre, quand nous annoncerez-vous une bonne nouvelle en inscrivant le cancer pédiatrique comme grande cause nationale ?
Mme Christelle Dubos, secrétaire d'État auprès de la ministre des solidarités et de la santé . - Le Premier ministre se prononcera le moment venu sur cette labellisation. La lutte contre le cancer des enfants et des adolescents est une priorité du plan Cancer 3. L'effort de recherche français sur le cancer pédiatrique représente 10 % du financement de la recherche publique en cancérologie. En 2018, les moyens publics alloués ont été augmentés de 5 millions d'euros par an.
Le soutien aux aidants familiaux a été renforcé avec le nouveau congé de présence parentale. L'évaluation des moyens dédiés est une avancée. Autre progrès majeur, le droit à l'oubli devait être étendu aux pathologies cancéreuses subies avant 21 ans. L'accès aux solutions médicales les plus innovantes reste un enjeu majeur, qui sera intégré à notre stratégie nationale de lutte contre le cancer.
Mme Catherine Procaccia. - Mme Deromedi aurait sans doute souhaité une réponse plus ambitieuse et une mise en oeuvre plus rapide des solutions. Mourir et souffrir d'un cancer est difficile. C'est encore plus épouvantable quand un enfant est touché. L'accès aux soins thérapeutiques doit être facilité. Les parents ne devraient pas être contraints à appeler aux dons pour faire soigner leur enfant à l'étranger.
Urgences pédiatriques
M. Jean-Louis Lagourgue, en remplacement de Mme Colette Mélot . - C'est une question de Mme Mélot. Vingt-cinq hôpitaux d'Île-de-France sont menacés de fermeture, faute d'internes en nombre suffisant.
La répartition des internes de médecine générale dans les différents services de pédiatrie de la région s'est faite sans tenir compte des besoins des hôpitaux, notamment les plus éloignés du centre de Paris, dont Marne-la-Vallée et les deux services de Meaux et de Melun, en Seine-et-Marne.
Selon l'agence régionale de santé (ARS), les résultats de la procédure de choix des internes de médecine générale pour le semestre d'hiver 2019 ont conduit à une réduction du nombre d'internes ayant choisi d'effectuer leur stage dans un service de pédiatrie, mais surtout à une répartition de ces 159 internes qui n'est pas en adéquation avec les besoins de fonctionnement des services de pédiatrie et d'urgences pédiatriques. Ce sont 327 postes d'internes qui ont été ouverts mais seulement 159 internes les ont choisis. Une écrasante majorité a choisi des postes à Paris et en petite couronne, avec pour résultat, une sous-dotation des établissements de grande couronne, déjà pénalisés par la démographie défavorable des pédiatres.
L'ARS a trouvé la parade en relançant la procédure au motif d'une rupture d'égalité. Qu'allez-vous faire pour éviter ce type de situations ?
Mme Christelle Dubos, secrétaire d'État auprès de la ministre des solidarités et de la santé . - Plusieurs pistes ont été envisagées. L'ARS d'Île-de-France a relancé en urgence la procédure et, le 22 octobre, la commission de répartition a ajusté le nombre de postes et les mesures de soutien aux internes. Le 29 octobre, 182 internes ont choisi le stage de médecine générale en pédiatrie contre 159 la première fois, avec une meilleure répartition géographique.
Mais le déséquilibre persiste. Dans le nord des Yvelines notamment, d'autres solutions devront être trouvées en accord avec l'ARS. Une prime incitative mensuelle de 400 euros sera versée aux 267 internes ayant changé de lieux de stage, et cela durant toute la durée du stage.
Pêche et obligation de débarquement
M. Michel Canevet . - L'obligation de débarquement, appelée également « interdiction de rejet », est une question sensible dans un grand pays de pêche comme le nôtre. Il est difficile de sélectionner les espèces à rejeter ; cela pose des difficultés de stockage sur les bateaux ; les structures portuaires doivent être adaptées.
Le comité départemental des pêches maritimes et des élevages marins du Finistère a proposé en juin 2018 d'adapter les quotas de pêche, de fermer certaines zones et surtout de valoriser les rejets. Il est inacceptable d'obliger à pêcher puis à rejeter ! Peut-on infléchir la position de la Commission européenne sur le sujet ?
M. Didier Guillaume, ministre de l'agriculture et de l'alimentation . - La France s'est opposée à la Commission européenne sur l'obligation de débarquement, qu'elle doit désormais mettre en oeuvre au titre de la politique commune de pêche.
Notre objectif est d'améliorer la sélectivité : ajouter des contraintes aux pêcheurs n'est pas une option. La France s'est efforcée de limiter les conséquences négatives de la mesure. Ainsi, une bourse d'échanges sera mise en place pour couvrir les prises accessoires inévitables.
Une exemption de minimis, une flexibilité interzonale et inter-espèces ont aussi été obtenues grâce notamment aux propositions du comité interdépartemental des pêches du Finistère, dont nous nous sommes inspirés et j'en remercie les membres. Il est essentiel que les producteurs déclarent leurs rejets. Nous faisons tout pour répondre aux demandes des pêcheurs.
M. Michel Canevet. - Je suis heureux de votre mobilisation sur le sujet. Venez dialoguer avec les professionnels dans le Finistère, ce sera fructueux.
Pêche du saumon dans l'Adour
M. Max Brisson . - Chaque année, lors de l'ouverture de la pêche en première catégorie dans les Pyrénées-Atlantiques, se joue les mêmes scènes de tensions entre pêcheurs amateurs installés aux bords des gaves d'Oloron et pêcheurs professionnels de l'estuaire et du port de Bayonne.
Ces tensions sont principalement liées à l'intensité de la pêche, supposée trop forte à l'embouchure et qui empêche le saumon de remonter le gave. Les associations de défense de l'environnement dénoncent un risque pour le renouvellement de l'espèce, contesté par les pêcheurs professionnels. Le 21 juin, le tribunal administratif de Pau a demandé des mesures pour faire cesser la pêche au filet dérivant dans les eaux du port de Bayonne, malgré une étude du comité interdépartemental des pêches concluant à l'absence de risque pour l'espèce.
Monsieur le ministre, vous étiez venu il y a un an au port de Saint-Jean-de- Luz / Ciboure. Il faut faire le point sur la ressource pour rétablir la sérénité. Où en est-on dans l'Adour et les gaves ?
M. Didier Guillaume, ministre de l'agriculture et de l'alimentation . - Selon le code des transports, la pêche est désormais interdite dans les ports de commerce, donc également dans celui de Bayonne, mais le gestionnaire du port, la chambre de commerce et d'industrie de la région Nouvelle-Aquitaine en l'espèce, pouvaient accorder une dérogation.
Les services de l'État se sont beaucoup impliqués dans ce dossier, et le comité de gestion des poissons migrateurs, commission administrative compétente pour régler les usages et organiser la concertation, a joué un rôle important.
Les acteurs locaux gèrent les pêcheries de saumon en fonction de contraintes incontournables, définies dans les directives internationales de l'Organisation de conservation du saumon de l'Atlantique nord, et dans la réglementation nationale. Pour apaiser les tensions, il faut objectiver les connaissances sur l'état des stocks. Il semble que la population de saumon sur l'Adour soit en voie de rétablissement. Je suis favorable à votre demande : une étude complète serait nécessaire, mais l'initiative doit venir des acteurs locaux.
Je fais confiance aux services de l'État pour mettre en place cette étude.
M. Max Brisson. - Merci d'avoir séparé ce qui relève du code des transports et de la protection de l'environnement, et merci aussi d'appuyer ma demande d'études.
Je compte sur vous pour fédérer les acteurs.
Crise de la filière forestière en Moselle et dans le Grand Est
M. Jean-Marc Todeschini . - À l'été 2019, les forêts du Grand Est, et particulièrement du massif vosgien, ont été les victimes d'attaques d'un insecte xylophage, qui prolifère lors des étés chauds et secs : le scolyte. En 2018, des milliers de mètres cubes de bois ont dû être abattus dès les premiers signes d'attaques, et mis en vente. Mais l'afflux massif de résineux a fait mécaniquement baisser des deux tiers sur les marchés le prix moyen du mètre cube. Malheureusement, l'hiver 2018-2019 a été clément et l'été 2019 encore plus chaud et sec que celui de 2018. L'Office national des forêts (ONF) parle désormais de centaines de milliers de mètres cubes de bois à traiter, c'est-à-dire de dizaines de milliers d'arbres à couper au plus vite et à commercialiser. C'est une véritable tempête silencieuse, le volume est supérieur à celui issu des tempêtes de Noël 1999.
Il n'y a aucun moyen de lutter efficacement contre cet insecte, vivant sous l'écorce des arbres, si ce n'est un hiver froid et des arbres capables de se défendre en produisant de la sève et des terpènes à haute concentration quand ils ne souffrent pas de stress hydrique. Dans l'avenir, ces conditions d'absence de sécheresse et de froid hivernal risquent d'être plus difficiles à réunir. L'ONF annonce, à court ou moyen terme, la disparition de tous les résineux dans les forêts situées à moins de 500 mètres d'altitude, ce qui entraînera une fragilisation de l'ensemble du biotope forestier. De nombreux feuillus souffrent à leur tour de l'assèchement du sol : les frênes de Moselle sont touchés par la chalarose ; les hêtres, particulièrement sensibles à la sécheresse, souffrent beaucoup et meurent également nombreux.
En Moselle, le président des communes forestières, Michaël Weber, et le président des propriétaires forestiers privés, Didier Daclin, ont alerté sur les pertes financières qui se chiffrent en centaines de milliers d'euros. Toute la filière bois est profondément touchée et 70 % des forêts du Grand Est appartiennent à l'État.
Quelles mesures prendrez-vous face à ce désastre sanitaire ? Allez-vous mettre en place un grand plan forestier avec l'aide des fonds européens, à l'instar de celui de Jean Glavany en 1999 ? Quel rôle sera joué par l'ONF, que vous comptez démanteler ?
M. le président. - 40 secondes de dépassement, vous pouvez me remercier...
M. Didier Guillaume, ministre de l'agriculture et de l'alimentation . - ... surtout pour des paroles erronées. Nous ne souhaitons absolument pas démanteler l'ONF qui doit rester le coeur du dispositif forestier de notre pays.
J'ai une pensée pour Philippe Leroy, sénateur de votre territoire et acteur incontournable de la filière bois.
Les scolytes ravagent 7 000 hectares de nos forêts. Un hiver très froid régulerait la situation, mais le réchauffement climatique ne le laisse pas espérer.
Nous n'avons encore qu'un aperçu de l'impact de la sécheresse sur les feuillus. Un récent rapport du GIEC indique que la forêt française, qui est un bijou absolu, permet de capter du carbone sans fin ; cependant, ses essences ne sont pas forcément les mieux adaptées au réchauffement climatique. J'ai récemment réuni le Conseil supérieur de la forêt et du bois (CSFB) pour prendre des mesures exceptionnelles, comme cette enveloppe de 16 millions d'euros dédiée à la forêt. J'ai également demandé la mise en place d'un plan stratégique, dès le mois de mars, qui s'appuiera sur les remontées du terrain, en concertation avec les communes forestières, et le centre national de la propriété forestière.
Le président de la République a réuni, jeudi dernier, le conseil de défense écologique. La France présentera un plan stratégique de défense de nos forêts, essentielles pour la lutte contre le changement climatique.
Prise en charge des mineurs handicapés
Mme Sylvie Vermeillet . - Les directives nationales visent à scolariser en milieu ordinaire au moins 80 % des mineurs avec troubles du comportement. Il s'agit de sortir les mineurs des établissements relevant de l'agence régionale de santé (ARS) pour les scolariser en établissement classique.
L'ARS a souhaité que les maisons départementales des personnes handicapées (MDPH) signent une convention pour mettre en oeuvre le dispositif d'interventions thérapeutiques, éducatives et pédagogiques (ITEP). Ce dispositif permet de sortir des mineurs de leur structure pour qu'ils restent à domicile avec intervention d'un service d'éducation spécialisée et de soins à domicile (Sessad). La MDPH du Jura a refusé de signer cette convention, en raison de ses conséquences financières pour les conseils départementaux.
Ces directives vont dans le bon sens. Toutefois les conseils départementaux s'inquiètent de l'augmentation des dépenses obligatoires qui en résultent. L'État a-t-il prévu des compensations financières ?
M. Didier Guillaume, ministre de l'agriculture et de l'alimentation . - Mme Cluzel, ne pouvant être présente, m'a chargé de vous répondre.
Il n'y a pas de report de charges de fonctionnement sur les collectivités territoriales pour les dépenses des ITEP. Nous devons garantir aux personnes handicapées d'être pleinement citoyennes.
La loi du 11 février 2005, annoncée par le président Chirac, a ouvert la voie à une véritable politique inclusive, - école, emploi, logement notamment - en s'appuyant sur les ressources du milieu ordinaire, et sur les opérateurs médico-sociaux.
Il faut déployer les moyens médico-sociaux au plus près des besoins, non les réduire. Les ITEP s'adressent à un public rencontrant des difficultés psychologiques mais dont les capacités cognitives sont préservées, en simplifiant leur parcours, sans rupture scolaire, et sans passer par les MDPH.
En 2018, une convention régionale a été signée en Bourgogne-Franche-Comté, avec l'ensemble des partenaires, sauf les MDPH du Jura et de la Côte-d'Or.
J'invite la MDPH du Jura à rejoindre ce dispositif, dont la réussite est unanimement saluée.
Mme Sylvie Vermeillet. - Merci d'avoir essayé de convaincre le conseil départemental du Jura, lequel m'a fait parvenir la liste des nouvelles charges induites par le dispositif. Le minimum requiert de les évaluer et, le cas échéant, de les compenser.
Inquiétudes pour Bridgestone à Béthune
Mme Cathy Apourceau-Poly . - Depuis un an, l'attitude de Bridgestone inquiète. Veut-il fermer le site de Béthune ? Le groupe japonais a développé des usines en Europe de l'Est, et met en concurrence ses sites d'Europe de l'Ouest. Le site de Béthune est privé d'investissements. La direction a ramené l'objectif de production de 18 000 pneus par jour à 9 000 en décembre 2019. Une centaine d'emplois intérimaires sont en passe d'être supprimés.
Nous savons que le président de la République a échangé avec le Premier ministre du Japon, et le ministre avec le président européen du groupe, M. Paolo Ferrari, sans que rien ne transpire de ces rencontres. Ce silence contribue à installer une psychose anxiogène chez les salariés et les élus du territoire. Le sort de Goodyear, à Amiens, est dans toutes les mémoires.
Mme Agnès Pannier-Runacher, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances . - Ce dossier a été particulièrement suivi par le Gouvernement, qui avait salué la perspective de l'accord collectif de performance de mai dernier.
L'actionnaire s'engageait à investir massivement sur le site et à conserver plus de 1 000 emplois, avec l'assurance d'un plan de charge correct de l'usine jusqu'en 2021. Les salariés ont hélas refusé, par référendum, cet accord, en raison notamment d'informations parfois erronées, au moment de sa présentation.
Nous avons bien sûr maintenu le contact avec l'actionnaire principal de Bridgestone, mais la conjoncture est délicate pour le marché du pneumatique en France et en Europe.
Les Chinois sont passés de 5 % à 30 % de parts de marché en dix ans, en raison des choix des consommateurs attirés par des prix inférieurs.
Les échanges se poursuivent entre la direction et mes équipes en lien avec la région des Hauts-de-France. À ce stade, aucun des éléments transmis ne permet d'affirmer que le groupe Bridgestone souhaite fermer l'usine. Chacun doit prendre ses responsabilités pour un climat social apaisé et une issue favorable pour l'avenir de ce site.
Mme Cathy Apourceau-Poly. - La direction n'a jamais investi dans ce site, notamment sur les pneus connectés, plus rentables.
Salariés et élus ont besoin d'avoir l'État à leurs côtés. Quels signes pouvez-vous nous donner ? J'espère que la réunion avec l'intersyndicale jeudi prochain ira en ce sens.
Distribution du courrier dans le Val-de-Marne
M. Laurent Lafon . - Depuis de trop nombreuses semaines, la distribution du courrier postal à Vincennes et à proximité s'est fortement dégradée, et aggravée ces derniers temps, avec des quartiers entiers non desservis, ce qui pénalise particuliers et entreprises, paralysées. À ce jour, ces démarches et les nombreuses sollicitations de nos concitoyens n'ont pas abouti.
Le contrat d'entreprise entre l'État et La Poste pour 2018-2022, signé en janvier 2018, lie l'État à La Poste pour la bonne exécution des quatre missions de service public confiées par la loi à celle-ci, dont le service universel postal courrier et colis fait partie.
L'article L. 1 du code des postes et des communications électroniques définit les contours du service universel qui comprend notamment une levée et une distribution six jours sur sept sur l'ensemble du territoire national. Le contrat entre l'État et La Poste n'est pas respecté.
Je salue l'engagement, la mobilisation et la détermination des équipes municipales et des maires de Maisons-Alfort et Charenton, Vincennes et Saint-Mandé, notamment, à rappeler au Gouvernement les obligations du service public postal.
Ils ont mis en relation La Poste avec les entreprises locales et tous les acteurs susceptibles de résorber le déficit d'emploi. L'opérateur doit transmettre chaque semaine les chiffres sur les courriers en souffrance. La semaine passée, 40 % de ceux de Vincennes seulement étaient traités et l'on espérait un retour à la normale à la fin du mois.
Il faut poursuivre les efforts, tandis que de nouvelles difficultés apparaissent dans d'autres communes du département. C'est une évolution positive, mais nous restons mobilisés, d'autant que de nouveaux problèmes apparaissent à Villecresnes, Santeny ou Chevilly-Larue.
Quelles mesures prendrez-vous pour que La Poste respecte strictement le contrat de service public universel qui la lie à l'État dans le Val-de-Marne ?
Mme Agnès Pannier-Runacher, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances . - La loi du 9 février 2010 a confirmé le service universel postal, dont dépend la distribution du courrier. Nous veillons à la qualité de ce service.
Mais l'adaptation de l'organisation de la distribution revient à La Poste. Le transport et la distribution de courrier diminuent inexorablement : de 17,7 milliards d'objets en 2010 à 9,9 milliards d'objets en 2018, soit une réduction de 43 % en dix ans. La Poste doit s'adapter.
Elle développe de nouvelles activités pour préserver ses obligations de service. Pour ce faire, elle a choisi d'investir sur l'atout majeur que représente son réseau de factrices et de facteurs. Toutefois, elle connaît des difficultés de recrutement dans le Val-de-Marne où les grands chantiers en Île-de-France, (le Grand Paris, les Jeux Olympiques 2024, la remise à niveau de certaines infrastructures, la construction de 70 000 logements) captent une part importante du marché de l'emploi. La Poste s'efforce de trouver au plus vite des solutions en s'appuyant sur ses partenaires locaux.
La Poste a mis en place de nouvelles organisations, le 16 septembre dernier, dans les centres de Vincennes et Saint-Mandé. Dans le Val-de-Marne, comme ailleurs, elles nécessitent un temps d'adaptation et d'ajustement. Malgré des difficultés, un plan de retour à la normale est prévu rapidement. À l'échelle régionale, 45 facteurs experts seront pleinement opérationnels dès le mois de novembre, dont 15 plus particulièrement mobilisés sur le département du Val-de-Marne.
L'État veille à ce que les adaptations menées par La Poste en matière de distribution du courrier soient conçues et conduites de façon à maintenir un haut niveau de qualité de service au profit des usagers.
Dématérialisation des marchés publics
M. Laurent Duplomb . - Pouvez-vous me répondre, avec bon sens, sans lire de texte, simplement, en me livrant votre vision, après avoir bien écouté ma question, sur le seuil de dématérialisation des marchés publics, de 25 000 euros depuis le 1er octobre 2018 ?
Souvent, les maires sont obligés de répondre en urgence à des travaux nécessaires. En Haute-Loire, une commune doit ainsi aménager un bâtiment pour l'installation d'un dentiste à partir du 15 décembre.
Or, avec la règle de dématérialisation à partir de 25 000 euros de travaux, il faut un règlement de consultation, un cahier des charges, un descriptif quantitatif, une analyse des offres, une notification des offres retenues, suivie des choix des entreprises, et j'en passe, le tout dans des délais encadrés et stricts : tout cela prend trois mois !
Madame la ministre, lâchez du lest aux maires, dématérialisez à partir de 50 000 ou 70 000 euros, avec un appel d'offres simplifié, pour les petits travaux, avec trois devis, le maire choisissant le moins cher ou celui qui répond le mieux aux critères prédéfinis ! Cette technocratie nous ajoute du retard et énormément de papiers. Les entreprises n'arrivent guère à répondre pour des montants aussi faibles. Répondez-moi sans lire, donnez-moi votre vision et votre avis personnels ! (Bravos et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)
Mme Agnès Pannier-Runacher, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances . - Soit. Vous confondez dématérialisation et procédures d'appels d'offres qui s'appliquent à compter du seuil de 25 000 euros. Un décret qui sera prochainement publié et est en cours d'examen au Conseil d'État le portera à 40 000 euros, soit le niveau médian en Europe, dès début 2020.
Pour le reste, la dématérialisation est une obligation européenne, qui - faut-il le rappeler ? - simplifie tout de même la vie des administrations et des entreprises, en particulier des TPE et des PME, et réduit les coûts administratifs de 5 % à 25 %. Elle nécessite cependant un bon réseau internet...
MM. Jacques Genest et Bernard Bonne. - Oh oui !
Mme Agnès Pannier-Runacher, secrétaire d'État. - ... pour télécharger le cahier des charges, raison pour laquelle nous travaillons sur le très haut débit et la 4G. Bref, la dématérialisation est une simplification, pour les entreprises et les collectivités locales, et je m'en réjouis : voici ma réponse, sans papier !
M. Jacques Genest. - Presque !
Difficultés bancaires des « Américains accidentels »
M. Richard Yung . - Ma question concerne les difficultés bancaires et fiscales auxquelles sont confrontés les Français binationaux dits « Américains par accident » - nés sur le sol américain et qui ont de ce fait la nationalité américaine, sans être en relation avec ce pays - victimes collatérales de l'accord franco-américain du 14 novembre 2013 de mise en oeuvre de la loi américaine Foreign Account Tax Compliance Act, dite « Fatca ».
Le Gouvernement avait engagé une action diplomatique auprès des autorités américaines en vue d'obtenir un traitement dérogatoire, leur permettant, soit de renoncer à la citoyenneté américaine par une procédure simple et gratuite, soit d'être exonérés d'obligations fiscales américaines. Où en est-on ?
La question de la CSG et de la CRDS a finalement été réglée par un accord entre les deux administrations fiscales.
Depuis le 18 mars 2010, un dégrèvement est possible pour les personnes ayant renoncé à leur citoyenneté américaine.
En revanche, il semble qu'aucune avancée n'ait été enregistrée s'agissant de la transmission du numéro d'identification fiscale (NIF) américain. Craignant de faire l'objet de sanctions à compter du 1er janvier 2020, les banques françaises ont fait savoir qu'elles pourraient fermer les comptes des « personnes américaines » se trouvant dans l'impossibilité de fournir un NIF américain. Quelque 40 000 comptes bancaires seraient concernés. Les démarches entreprises par le Gouvernement auprès des autorités de Washington ont-elles des chances d'aboutir d'ici le 31 décembre 2019 ?
Mme Agnès Pannier-Runacher, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances . - Nous travaillons à ce dossier, en particulier avec les Pays-Bas.
Nous avons obtenu des avancées concernant la CSG et la CRDS. Des situations de double imposition ont ainsi été résolues.
Les difficultés rencontrées avec les établissements bancaires du fait du NIF font l'objet de discussions avec les autorités américaines car la dérogation précédemment accordée pour recueillir ce numéro d'identification arrive à échéance au 1er janvier 2020.
Pour conserver un compte en banque, les « Américains par accident » ont en effet besoin d'un Tax Identification Number (TIN) que l'administration américaine ne leur délivre pas. La situation est ubuesque.
Notre initiative a abouti à une publication par l'IRS (Internal Revenue Service), le 15 octobre, d'un complément aux instructions existantes, stipulant que l'absence du TIN transmis par les banques ne conduirait pas à une fermeture des comptes concernés.
Les négociations se poursuivent toutefois pour préciser la réglementation : avec mon homologue des Pays-Bas, nous allons cosigner un courrier afin de continuer à mettre la pression sur les autorités américaines, de telle sorte que les banques françaises puissent continuer en toute sécurité leurs relations avec ces Américains particuliers.
M. le président. - Madame la ministre, j'attire votre attention sur le fait que vous avez dépassé d'une minute votre temps de réponse.
Frais de gestion des épaves de voitures
Mme Nathalie Delattre . - La gestion par les municipalités d'épaves de voitures dont le propriétaire est injoignable ou inconnu est un problème récurrent pour nos mairies.
Il n'existe aucune définition juridique de « l'épave de véhicule ». Mais plusieurs dispositions législatives permettent aux autorités publiques, au premier rang desquelles le maire, de procéder à l'enlèvement des véhicules hors d'usage. Il dispose d'un pouvoir d'injonction lui permettant de mettre en demeure le titulaire du certificat d'immatriculation de remettre le véhicule en état de circuler ou de le transférer dans un centre de véhicules hors d'usage agréé.
Lorsque cette mise en demeure n'est pas suivie d'effet, le maire peut recourir à un expert automobile pour déterminer si le véhicule est réparable ou non. Si le véhicule est réparable, le maire procède à la mise en fourrière du véhicule mais, s'il est irréparable et constitue donc une épave, le maire peut procéder à son évacuation d'office vers un centre de véhicules hors d'usage agréé.
Mais le financement de ces opérations conduites par le maire et la municipalité lorsque le propriétaire du véhicule en question est injoignable ou inconnu n'est pas précisé. Lever ce flou juridique était le but de mon amendement, présenté dans le cadre du projet de loi Engagement et proximité, et que le Gouvernement a balayé d'un revers de la main, au motif que ce dernier était satisfait...pourtant personne ne semble l'être !
La facilitation de l'accès au système d'immatriculation des véhicules (SIV) pour la direction générale des finances publiques permettrait d'assurer le recouvrement des frais par le dernier propriétaire de la carte grise du véhicule enregistré. Actuellement, seul le maire en tant qu'officier de police judiciaire a un accès direct au SIV mais, sur le terrain, cela ne semble pas être un outil utile ou applicable. Les agents des finances publiques pourraient utilement y avoir accès pour accélérer les procédures et libérer ainsi les collectivités territoriales de cette charge qui atteint, pour Bordeaux, 226 euros par véhicule, après une procédure chronophage et décourageante. Quelles mesures comptez-vous prendre ?
Mme Agnès Pannier-Runacher, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances . - Ces frais sont en effet à la charge de la collectivité territoriale lorsque le propriétaire est introuvable. Leur coût est élevé. Pour le limiter, simplifier et moderniser les procédures, un dispositif nouveau sera mis en oeuvre, dès le 1er janvier 2020. La Délégation à la sécurité routière développe un système d'information national des fourrières qui sera opérationnel à la fin 2020.
Les ventes frauduleuses des véhicules d'occasion rendent parfois complexes le recouvrement des frais : l'accès au système d'immatriculation des véhicules, auquel les collectivités locales pourront adhérer, est, en revanche, garanti aux agents publics par l'article L. 332-7 du code de la route.
C'est pourquoi nous avions estimé que votre amendement était satisfait.
Statut des forestiers-sapeurs
M. Jacques Genest . - Les forestiers-sapeurs sont des fonctionnaires territoriaux chargés de la surveillance des massifs forestiers et de la réalisation des travaux d'entretien, pour prévenir les feux de forêt, au profit d'ouvrages classés « défense des forêts contre les incendies ». Ce sont des partenaires incontournables pour les sapeurs-pompiers.
Bien qu'ils aient obtenu des évolutions de leur statut avec la reconnaissance de leurs compétences professionnelles, le métier de forestier-sapeur n'est pas référencé par le répertoire des métiers territoriaux élaboré par le centre national de la fonction publique (CNFPT). La catégorie d'emploi retenue dans le cadre de la prise en compte de la pénibilité au travail et dans le calcul de leurs pensions de retraite est la catégorie sédentaire, qui ne correspond pas aux missions qu'ils effectuent et aux risques qu'ils encourent.
Une classification de leur métier dans la catégorie active ouvrirait droit pour les agents titulaires qui remplissent les conditions de durée de services nécessaires, à certains avantages en matière de retraite. Ce serait aussi une reconnaissance pour des professionnels dévoués.
La prise en compte de la pénibilité de certains métiers devait faire l'objet d'une réflexion d'ensemble dans le cadre de la réforme des retraites. Quelle est la position du Gouvernement concernant les voies d'amélioration du statut des forestiers sapeurs ? Faudra-t-il attendre quarante ans, qu'ils soient tous grands-pères?
Mme Agnès Pannier-Runacher, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances . - Les fonctionnaires territoriaux affiliés à la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales (CNRACL) peuvent se voir reconnaître un classement particulier, en catégorie active, en fonction des tâches réalisées.
L'arrêté du 12 novembre 1969 précise les contours de cette catégorie. Les sapeurs-pompiers professionnels et certains ouvriers professionnels y sont intégrés, ainsi que les adjoints techniques territoriaux qui occupent parfois un emploi de forestier sapeur. Le Gouvernement n'envisage pas d'étendre le champ de cet arrêté avant l'aboutissement des négociations en cours sur la pénibilité et les risques dans le cadre de la réflexion transversale et globale menée par le Haut-commissaire aux retraites. Elle doit aboutir en 2020 et pas dans quarante ans !
M. Jacques Genest. - Je vous remercie, mais je connais bien le CGCT... Je retiens surtout que le Gouvernement n'entend rien changer. À ce rythme, ce sera plutôt dans quarante ans puisque certains régimes spécifiques devraient finalement être épargnés. Pauvres sapeurs-forestiers !
Agence de gestion et de développement informatique
M. Bernard Bonne . - J'ai été saisi par des maires de petites communes rurales car l'assujettissement de l'Agence de gestion et de développement informatique (Agedi) aux impôts commerciaux entraînerait pour les communes membres une hausse insoutenable de leurs coûts informatiques.
Malgré les questions écrites adressées à vos services, ils sont restés évasifs et s'abritent derrière le secret fiscal, alors que les comptes de l'Agedi, établissement public gestionnaire de deniers publics, sont publics. Cela n'a aucun sens.
Les autres arguments invoqués par votre administration sont totalement infondés. Le Gouvernement justifie l'assujettissement de l'Agedi à l'impôt sur les sociétés, par le fait que le syndicat ne répondrait pas à un besoin fondamental des populations. Or la jurisprudence limite cette exigence aux cas où il existe une régie, ce qui n'est pas le cas de l'Agedi. Il paraît également aberrant de prétendre que doter une mairie de moyens informatiques nécessaires à son bon fonctionnement, à l'heure de la dématérialisation des services, ne répond pas à un besoin collectif des populations.
Par ailleurs, au regard de « la règle des 4P » - produit, public, prix, promotion - qui permet d'analyser les conditions dans lesquelles la concurrence s'exerce vos services ne peuvent, comme ils le font, prétendre que l'activité de l'Agedi soit lucrative et non distincte des éditeurs privés. En effet, les adhérents de l'Agedi n'acquittent à aucun moment un prix qui incorporerait une marge. La logique qui prévaut est celle d'un partage des coûts sur la base de cotisations des membres en fonction de leur population.
Les prestations, logiciels, formation et hotline sont assurés sans aucune contrepartie financière. L'Agedi fournit des matériels à ses membres. Les collectivités membres de l'Agedi sont, dans leur immense majorité, des collectivités de petite taille qui ne disposent ni du budget, ni du personnel possédant les compétences informatiques nécessaires. Enfin, l'Agedi ne procède à aucune démarche de promotion commerciale. Ce syndicat n'exerce donc en aucune façon son activité dans les mêmes conditions que les acteurs privés de l'édition de logiciels.
Cette position de l'administration fiscale ne dissimulerait-il pas la volonté politique d'une nouvelle ponction fiscale sur les collectivités, souvent parmi les plus pauvres, via leurs syndicats ?
Mme Agnès Pannier-Runacher, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances . - Du fait du secret fiscal, nous ne fournissons pas d'informations précises sur l'Agedi, pas plus que sur tout autre particulier ou entreprise ou organisation, quels qu'ils soient.
Le régime applicable résulte de la nature des activités de la structure : si elles sont lucratives, les syndicats mixtes sont assujettis à l'impôt sur les sociétés mères. Des dérogations sont possibles si leur activité est indispensable à la satisfaction des besoins collectifs. Cela réclame un examen au cas par cas. Des discussions approfondies sont en cours entre l'Agedi et la DGFiP.
M. Bernard Bonne. - Je transmettrai votre réponse aux maires concernés sur la possibilité d'obtenir une exonération.
Comptabilité des établissements pour personnes âgées dépendantes
M. Gilbert Bouchet . - Ma question porte sur l'adaptation de l'instruction comptable des établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad) rattachés aux établissements de santé, qui ne permet pas actuellement de lisser sur plusieurs années les charges afférentes aux investissements immobiliers. En effet, les départements, en leur qualité d'autorité de tarification, doivent autoriser la constitution de provisions pour immobilisation et affecter un excédent réel d'exploitation à un compte spécifique qui pourra être repris lors de la réalisation des investissements. Une modification de l'instruction comptable est nécessaire.
Dans la Drôme, six établissements sont concernés dont l'Ehpad de Beauvallon, géré par le centre hospitalier de Valence. Pour ce dernier, le plan pluriannuel, approuvé par l'agence régionale de santé (ARS) et le conseil départemental, prévoit des provisions qui ont été refusées par la Direction générale des finances publiques (DGFiP).
Dans quelle mesure peut-on modifier l'instruction comptable actuelle « M21 » pour intégrer l'application d'un dispositif de provision pour investissement similaire à celui prévu par la « M22 », afin de permettre à ces établissements de réaliser leurs investissements destinés à l'amélioration de l'accueil des séniors tout en maîtrisant l'évolution des prix de la journée pour l'usager ?
Mme Agnès Pannier-Runacher, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances . - Les Ehpad sont financés par les départements, l'assurance maladie et les usagers au titre de l'hébergement. Le tarif est déterminé par le président du conseil départemental. Lors de travaux de réhabilitation, les charges d'immobilisation peuvent conduire à augmenter le prix de journée à due concurrence.
Les arrêtés de 2008 et de 2014 sur les instructions budgétaires et comptables M21 et M22 permettent de verser des avances aux établissements pour régler ces charges sans augmenter leurs tarifs. Ce dispositif vaut pour l'ensemble des Ehpad publics.
Les instructions M21 et M22 offrent les mêmes possibilités aux Ehpad en matière de provisionnement et de financement des charges liées à des investissements. Cette analyse est partagée par la Direction générale de la cohésion sociale.
Dysfonctionnements des services postaux dans l'Essonne
Mme Jocelyne Guidez . - Je souhaite attirer votre attention sur les dysfonctionnements des services postaux dans le département de l'Essonne. En effet, depuis plusieurs mois, de nombreuses communes sont touchées par des difficultés liées à l'acheminement du courrier. Celles-ci sont régulières et exaspèrent de plus en plus la population. C'est le cas d'Igny, de Bures-sur-Yvette, des Ulis, de Vert-le-Petit, du Coudray-Montceaux, de Bouray-sur-Juine, de Saintry-sur-Seine, de Saint-Chéron notamment.
Ces difficultés s'expliquent par la gestion des ressources humaines, en particulier lorsque le personnel n'est pas remplacé pendant les vacances. À ces perturbations s'ajoutent les différents projets de modification d'horaires d'ouverture de quelques bureaux et ceux, encore plus dommageables, de fermeture définitive contre lesquels les élus locaux demeurent pleinement mobilisés.
Ces situations ne sont pas sans conséquences pour les collectivités territoriales, les particuliers et les entreprises. Malgré l'envoi de courriers officiels et le soutien de parlementaires, des maires ont décidé d'agir en justice. Cette situation ne peut plus durer. Le principe d'égalité, reconnu dans la Constitution, ne saurait être apprécié à degrés variables selon les territoires. Il appartient aux acteurs privés et publics de se mobiliser en faveur d'un service de proximité et de qualité. Quelles démarches le Gouvernement entend-il prendre avec le groupe La Poste pour mettre fin à cette situation et pour instaurer, enfin, une égalité de traitement entre les communes ?
Mme Agnès Pannier-Runacher, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances . - J'ai apporté des éléments de réponse sur les réorganisations en cours à La Poste à M. Lafon. La situation est similaire en Essonne. Depuis le début de l'année, 43 facteurs ont été recrutés dans l'Essonne, afin d'améliorer rapidement la situation : seuls trois sites sur 35 rencontrent des difficultés. Ils feront l'objet d'un soutien particulier.
En 2019, des recrutements ont été réalisés alors qu'ils étaient prévus en 2020 sur ces sites.
Mme Jocelyne Guidez. - Les horaires d'ouverture des postes sont plutôt en voie de contraction...
Prime de vie chère et aides au logement en Haute-Savoie
Mme Sylviane Noël . - Vivre et travailler en Haute-Savoie coûte cher, ce qui pose aujourd'hui de sérieux problèmes sur le marché de l'emploi de ce département, public comme privé.
Avec plus de 10 000 nouveaux habitants chaque année en Haute-Savoie, il devient difficile de maintenir certains services à la population pourtant vitaux, par manque de candidats. En effet, les agents qui arrivent du reste de la France renoncent au bout de quelques mois à rester en poste du fait du coût élevé de la vie, et notamment du logement.
Dans tous les secteurs d'activité, le taux de vacance de postes est critique, surtout dans la fonction publique hospitalière.
La proximité avec la Suisse voisine, notamment dans le Genevois et le Chablais, amplifie encore ce phénomène en particulier pour les professions du secteur de la santé, en raison de l'attractivité des salaires en Suisse.
Cet été, 150 lits d'établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad) ont été fermés dans le département, faute de personnel. L'octroi d'une prime de vie chère ou indemnité de résidence en Haute-Savoie se révèle aujourd'hui incontournable.
Il faut aussi corriger le zonage A, B, C qui est inadapté. Il prend comme critère de classement la tension du marché immobilier local. De nombreuses communes de la Haute-Savoie, et notamment celle de Chamonix-Mont-Blanc, mériteraient d'être classées en zone B1 au lieu de leur classement actuel en zone B2. Ainsi, un appartement à Chamonix coûte 6 454 euros du mètre carré et 8 647 euros pour une maison. Bloquée en zone B2, la commune est privée de nombreuses aides à l'investissement locatif intermédiaire, notamment la TVA à taux réduit qui s'applique aux logements intermédiaires portés par les investisseurs institutionnels en zone A et B1.
La Haute-Savoie, en raison de son caractère atypique, mérite un zonage adapté. Quelles sont les intentions du Gouvernement ?
M. Julien Denormandie, ministre auprès de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargé de la ville et du logement . - Vous avez raison, le logement empêche l'installation des agents du service public dans certains territoires. Faut-il faire évoluer le zonage ? La politique de logement doit être territorialisée ; le « Denormandie dans l'ancien » est mis en oeuvre par les communes, ainsi que je le voulais.
Le projet de loi de finances pour 2020 prévoit une expérimentation en Bretagne consistant à confier le zonage aux collectivités territoriales.
Deuxième élément, la production de logements abordables, ce qui passe par la production de logements sociaux mais aussi l'accès à des logements à loyers modérés via les organismes de foncier solidaire. La solution réside, c'est évident, dans une politique territorialisée.
M. le président. - Je suspends la séance pour la cérémonie d'hommage aux sénateurs et fonctionnaires morts pour la France.
La séance, suspendue à midi cinq, reprend à midi vingt-cinq.
Dédoublement de la réduction de loyer de solidarité
M. Alain Cazabonne . - Saisi par une maire de Gironde, également présidente de l'office HLM de la métropole, j'attire votre attention sur la politique du Gouvernement en matière de logement social. La concentration annoncée des bailleurs sociaux couplée à une baisse de leurs ressources inquiète fortement les offices publics de l'habitat. Ce mouvement a été engagé par la loi de finances pour 2018 et la loi ELAN, avec la mise en place de la réduction de loyer de solidarité (RLS), l'augmentation de la TVA, l'augmentation de la contribution à la Caisse de garantie du logement locatif social (CGLLS)... Certes, des compensations existent, comme la vente d'HLM pour créer des ressources supplémentaires, toutefois suspendues à l'accord du maire, le taux d'endettement limité à 50 % par la Caisse des dépôts et consignations (CDC), les prêts de haut de bilan bonifiés (PHBB) et les prêts dits « booster » pour favoriser la construction neuve. Cela est insuffisant, au vu de tous ces facteurs qui ont un impact lourd sur les organismes de logements sociaux. Ces derniers sont obligés de se regrouper, ce qui réduit fortement, sur les territoires, le nombre des acteurs en mesure de développer et de gérer le patrimoine locatif social. Le doublement de la réduction de loyer de solidarité, programmé pour 2020, va accélérer ce mouvement néfaste pour nos agences nationales de l'habitat. Comment pallier ces difficultés ?
M. Julien Denormandie, ministre auprès de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargé de la ville et du logement . - Je crois au modèle français du logement social, envié par nos voisins britannique et allemand. Le logement social est un véritable tremplin pour certains ménages, parfois une aide qui dure toute une vie.
Je me suis opposé à toute financiarisation des bailleurs sociaux, et face aux doutes suscités par notre réforme du secteur, nous avons instauré une clause de revoyure avec les bailleurs sociaux.
Nous avons également signé avec l'ensemble des familles de bailleurs sociaux, en avril dernier, un pacte prévoyant l'agrément de 110 000 logements par an et des objectifs tant en construction qu'en rénovation.
Les regroupements favorisés ont commencé, dans le prolongement d'une dynamique déjà engagée. Plus de huit organismes sur dix ont déjà procédé à ces regroupements. La réforme va dans le bon sens, je crois.
M. Alain Cazabonne. - Je prends acte de l'engagement du ministre et transmettrai votre réponse, mais le diable est dans les détails.
M. Julien Denormandie, ministre. - Je suis à votre disposition.
Utilisation de la cocarde par les maires
M. Jean-Marc Boyer . - L'actualité récente abonde d'agressions verbales et physiques contre les élus. Le respect dû au représentant de la démocratie locale, officier de police judiciaire (OPJ) n'existe plus. Il conviendrait que les maires puissent apposer la cocarde tricolore sur leur véhicule, ce que le décret du 30 septembre 1989 sur le sujet ne les autorise pas à faire.
Répondant à une question de Rémy Pointereau, le ministre de l'Intérieur a suggéré des signes alternatifs qui sont à disposition des maires, comme le blason ou les armoiries... Ce serait un peu ridicule de les transporter dans sa voiture ! Pourquoi ne pas autoriser la cocarde ?
M. Julien Denormandie, ministre auprès de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargé de la ville et du logement . - Veuillez excuser la ministre Jacqueline Gourault et le ministre Sébastien Lecornu, qui m'ont prié de vous répondre. Mais avant cela je tiens, à titre personnel, à adresser tout mon soutien, ma reconnaissance et ma gratitude pleine et entière aux maires. Ils sont les représentants de la République au quotidien sur nos territoires.
Le respect dû aux élus dépasse la question de la cocarde. Comment le faire vivre ? Dans une société républicaine, la singularité des élus du peuple est reconnue.
Vous avez déjà rappelé les éléments de réponse dans votre question ! Le décret de 1989 n'autorise pas, effectivement, les maires à utiliser la cocarde. La question a été débattue lors de l'examen du projet de loi Proximité et engagement. Nous avons choisi de ne pas faire évoluer la législation.
Guichet de cohésion numérique et aide à l'équipement numérique
M. Jean-Yves Roux . - Le Premier ministre a annoncé, le 22 mars 2019, l'ouverture du guichet de cohésion numérique, attendu depuis de long mois.
Les foyers situés dans des territoires où la fibre peut difficilement être installée pourront bénéficier de technologies alternatives par le satellite et la boucle locale radio, et bénéficieront à ce titre d'une aide de 150 euros. Or, quelques mois après l'annonce, la mise en oeuvre est difficile.
Le montant maximal de 150 euros par foyer semble très en deçà du coût réel de certaines infrastructures : l'achat d'une parabole, équipement très prisé en montagne, mais aussi d'un décodeur et leur installation coûtent en totalité au moins 350 euros soit 42 % du minimum vieillesse : une somme trop élevée pour les plus modestes. Certains sites nécessiteront des choix technologiques encore plus onéreux.
À La Rochelle, le satellite a été la solution retenue comme la plus pertinente... sur le plan économique uniquement, car elle n'est pas la plus adaptée ! Il s'agit pourtant d'aménagement du territoire ! Que va faire le Gouvernement ?
M. Julien Denormandie, ministre auprès de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargé de la ville et du logement . - Vous connaissez mon engagement sur le sujet. Nous avons conclu un new deal avec les opérateurs. Fin 2019, 4 millions de logements seront fibrés, soit quatre fois plus qu'en 2016-2017 ; le rythme de déploiement du très haut débit est doublé. C'est un effort sans commune mesure avec celui de nos voisins.
Toutefois, il reste des endroits où la fibre et le fil n'arriveront pas en premier. C'est alors la double peine, puisque les solutions adaptées seront plus coûteuses.
Face à cela, nous agissons sur deux fronts : renforcer les infrastructures territoriales, avec les réseaux d'initiative publique (RIP), et le guichet numérique, rouvert il y a trois semaines ; accompagner les Français qui doivent acheter un boîtier pour le satellite ou le hertzien, nous apportons une aide de 150 euros. Onze opérateurs se sont déjà engagés dans le dispositif.
Situation de France-Antilles
Mme Victoire Jasmin . - J'attire votre attention sur la situation du groupe de presse quotidienne régionale, France-Antilles, avec ses 280 salariés aux Antilles et en Guyane.
France-Antilles, le seul journal de presse écrite des Antilles-Guyane, est aujourd'hui, cinquante-cinq ans après sa création, menacé de disparition pour des difficultés financières.
Des décisions du tribunal de commerce de mai 2019 ont été suivies d'un projet de reprise et d'annonces de soutien. Mais l'angoisse demeure. Qu'allez-vous faire pour éviter les licenciements ? Que deviendra le patrimoine immobilier ? La mise en place d'un Comité interministériel des restructurations industrielles (CIRI) n'a pas rassuré.
M. Franck Riester, ministre de la culture . - La presse quotidienne régionale joue un rôle essentiel dans notre démocratie, comme le président de la République l'a rappelé, s'exprimant à l'occasion des cent ans de La Montagne. Par son tissu et son pluralisme, la presse quotidienne régionale joue un rôle de lien important.
Le CIRI est mobilisé pour accompagner France-Antilles. Une mission commune est menée par les inspections générales des affaires culturelles et de l'administration. Nous sommes mobilisés pour réduire l'impact social au minimum ; nous travaillons à un plan de filière pour ces groupes de presse. Avec ma collègue des outre-mer, nous réfléchissons aussi à des solutions spécifiques pour ces territoires.
Le pluralisme des opinions sera préservé, soyez-en assurée.
Mme Victoire Jasmin. - J'espère que le Gouvernement se saisira de ce dossier.
Entretien des églises de l'Oise
M. Max Brisson, en remplacement de M. Édouard Courtial . - Je pose cette question au nom du sénateur de l'Oise, M. Édouard Courtial. Elle porte sur l'entretien du patrimoine religieux de l'Oise.
Malgré leur engagement, les élus ne peuvent plus entretenir les églises rurales.
Un amendement de la loi de restauration de la cathédrale Notre-Dame de Paris prévoyait que les excédents reviennent aux petites églises de campagne.
Malgré un dispositif spécifique du conseil départemental de l'Oise pour aider 48 communes à restaurer leurs édifices, le reste à charge est souvent insurmontable.
C'est pourquoi l'article 24 du projet de loi Engagement et proximité a prévu un subventionnement à 100 %. Mais ceci ne sera-t-il pas défait à l'article 50 du projet de loi de finances sur le mécénat ?
Monsieur le ministre, ces églises sont le coeur battant des villages de France.
M. Franck Riester, ministre de la culture . - Sur les 320 millions d'euros consacrés aux monuments historiques, la dotation pour les édifices religieux s'élève à 127 millions d'euros, certes pour les cathédrales, mais pas seulement. Les directions régionales de l'action culturelle soutiennent les restaurations, et nous avons aussi augmenté le montant du fonds spécifique pour le patrimoine des petites communes, de 15 millions d'euros.
La dotation d'équipement des territoires ruraux (DETR) est un autre levier d'action. Le Gouvernement a aussi porté de 2 000 à 20 000 habitants le seuil de labellisation par la Fondation du patrimoine.
Vous le voyez, nous essayons de répondre de manière ciblée à cette problématique spécifique. Citons enfin le Loto du patrimoine et la mission menée par Stéphane Bern.
M. Max Brisson. - Je vous remercie de votre réponse ; mais vous n'avez pas répondu sur le mécénat et les dispositions du projet de loi de finances pour 2020 sur ce point.
La séance est suspendue à midi cinquante.
présidence de M. Gérard Larcher
La séance reprend à 16 heures.