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Table des matières
Projet de loi de finances pour 2017
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances
Mme Michèle André, présidente de la commission des finances
M. Gérard César, vice-président de la commission des affaires économiques
M. Jean-Pierre Raffarin, président de la commission des affaires étrangères
Mme Caroline Cayeux, vice-présidente de la commission des affaires sociales
Mme Catherine Troendlé, vice-présidente de la commission des lois
M. Jean Bizet, président de la commission des affaires européennes
M. Christian Eckert, secrétaire d'État
Ordre du jour du mardi 29 novembre 2016
SÉANCE
du jeudi 24 novembre 2016
25e séance de la session ordinaire 2016-2017
présidence de M. Gérard Larcher
Secrétaires : M. Philippe Adnot, M. Jackie Pierre.
La séance est ouverte à 15 heures.
Le procès-verbal de la précédente séance, constitué par le compte rendu analytique, est adopté sous les réserves d'usage.
Projet de loi de finances pour 2017
M. le président. - L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi de finances pour 2017, adopté par l'Assemblée nationale.
Discussion générale
M. Christian Eckert, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances, chargé du budget et des comptes publics . - (Applaudissements nourris à gauche) Depuis un mois, le Parlement examine les textes budgétaires sur lesquels repose la politique du Gouvernement : redresser les comptes publics tout en prenant les mesures nécessaires pour une société plus juste et plus solidaire.
À l'heure où certains voudraient saper les fondements de notre République, il n'est pas inutile de rappeler que, depuis cinq ans, le Gouvernement est à pied d'oeuvre pour que la Nation tout entière bénéficie de services publics de qualité car meilleure sera la redistribution, plus grande sera l'adhésion de nos concitoyens au projet commun qui fait notre vie sociale. Encore faudrait-il que les deux chambres du Parlement acceptent de débattre...
M. Didier Guillaume. - Eh oui !
M. Jean Bizet. - Sur des bases saines !
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. - En 2012, l'état de nos comptes publics était alarmant. Le Premier ministre M. Fillon s'était déclaré à la tête d'un État en faillite.
M. Vincent Delahaye. - Il l'est toujours !
M. Philippe Dallier. - La situation s'est même aggravée !
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. - La France, après la Grèce, l'Italie et le Portugal, était pointée du doigt comme un maillon faible de la zone euro. Les agences de notation nous alertaient ; aujourd'hui, on ne les entend plus. Nous mesurons les effets positifs des mesures que nous avons prises.
Mme Catherine Troendlé. - Tiens donc !
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. - Notre déficit public repassera l'an prochain sous la barre des 3 % alors qu'il s'élevait à 6,8 % en 2010.
Le déficit de la sécurité sociale est proche de zéro, les comptes du régime général seront proches de l'équilibre en 2017 alors qu'ils présentaient un déficit record de 24 milliards en 2010 !
M. Francis Delattre. - Non, la dette de la Cades explose !
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. - Curieusement, vous avez accepté d'examiner le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2017 mais en refusant de voter une trajectoire et de définir le niveau de l'Ondam. Selon vous, faut-il l'abaisser ? Faut-il le relever ? Êtes-vous pour ou contre la consultation de médecine générale à 25 euros ? Pour ou contre la hausse du point d'indice dans la fonction publique hospitalière ? On ne le sait pas...
Il était urgent de reprendre le contrôle de nos finances publiques pour stabiliser la dette. Pour la première fois, le programme d'émission à moyen et long termes de l'État baissera en 2017. C'est un succès de cette législature. Si les comptes en désordre sont le signe d'une Nation qui s'abandonne, ce quinquennat est celui d'une France qui se reprend en main.
Dans le même temps, le Gouvernement s'est attelé à la lutte contre les inégalités par la réforme de l'impôt. Certains l'auraient souhaité plus brutale, nous avons procédé par touches successives : rétablissement du barème progressif de l'ISF, tranche d'impôt sur le revenu à 45 %, réduction des niches fiscales, alignement de l'imposition des revenus du capital sur celle des revenus du travail, plafonnement du quotient familial. On l'oublie trop souvent : grâce à ces mesures, le niveau de vie des classes populaires et moyennes s'en est trouvé préservé, voire amélioré pour les plus démunis. J'entends dire que cette amélioration s'est faite aux dépens des plus aisés. Nous ne rougissons pas de ce parti pris, conforme à nos engagements et à nos valeurs.
S'agissant des entreprises, nous avons dans un premier temps pris des mesures pour lutter contre l'optimisation fiscale pratiquée par les plus grands, via la non déductibilité d'une partie des charges financières, et soutenir l'investissement plutôt que les dividendes, taxées à 3 %.
Dans un second temps, nous avons, avec pragmatisme, réduit le coût du travail grâce au CICE et au pacte de responsabilité.
Le projet de loi de finances pour 2017 s'inscrit dans le sillage de cette politique. Pour les ménages, nous avons prévu une nouvelle baisse d'impôt sur le revenu qui bénéficiera aux classes moyennes couplée à des mesures de lutte contre l'optimisation de l'ISF ainsi que la transformation de la réduction d'impôt pour les services à domicile et la garde d'enfants en un crédit d'impôt qui profitera à tous. Les entreprises, elles, verront le CICE passer de 6 à 7 % et leur impôt sur les sociétés diminué ; l'économie sociale et solidaire aura son crédit d'impôt, le crédit d'impôt de taxe sur les salaires (CITS).
M. François Marc. - Excellent !
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. - Point d'aboutissement de cette réforme, la refonte du mode de recouvrement de l'impôt sur le revenu. Annoncée de longue date, elle a toujours été repoussée. Nous avons travaillé d'arrache-pied pour mettre en oeuvre le prélèvement à la source. Il n'y aurait pas eu de concertation ? Mensonge ! J'ai rencontré toutes les organisations syndicales de Bercy et celles des salariés, la CGPME, l'UPA, l'UNPI la FNSEA, les représentants de l'économie sociale et solidaire. Mes services ont même rencontré six fois, mon cabinet deux fois et moi-même deux fois le Medef. (Exclamations à droite)
M. Philippe Dallier. - Quelle audace !
M. Francis Delattre. - Transgression !
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. - Le numéro 2 du Medef a déclaré à l'Assemblée nationale qu'il n'avait pas été consulté... Nous l'avons rencontré dix fois ! J'ai rencontré aussi les représentants de la FEPEM, de France Générosité, des Restos du coeur, de la Fondation Abbé Pierre, ceux des assistantes maternelles, des professions libérales... Durant mes déplacements à Tours, à Metz, à Montpellier et ailleurs, j'ai vu des agriculteurs mais aussi des experts comptables, des avocats fiscalistes, des directeurs de ressources humaines sans oublier les notaires. Précipitation ? Mais cette réforme est annoncée depuis plus d'un an, nous y travaillons depuis janvier. Nous avons encore un an pour la rendre opérationnelle.
L'essentiel, au reste, n'est pas là. Pour les contribuables, le prélèvement à la source est la garantie de voir ses changements de situation, des moments-clés dans la vie, parfois douloureux, plus rapidement pris en compte par l'administration fiscale. Ceux qui disent que le prélèvement à la source ne changera rien par rapport à la mensualisation obligatoire n'ont jamais pris leur retraite, ils n'ont pas connu le chômage ou des difficultés à payer des dépenses pour leurs enfants. Désormais, tous les changements de situation entraîneront un alignement quasiment immédiat de l'impôt. C'est une avancée dans un monde où les situations professionnelles et familiales sont devenues volatiles, une protection pour nos concitoyens connaissant une période de fragilité.
Certes, les difficultés techniques sont grandes : garantie de la confidentialité des informations fiscales, diligence des entreprises... À cet égard, il suffira à l'employeur de remplir une ligne supplémentaire sur la feuille de paie. Une ligne de plus, et ce serait terrifiant ? Visiblement, cela n'a pas paru insupportable en 1993, en 2003, en 2015 ou encore en 2016.
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général. - Ce n'était pas une ligne individualisée !
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. - Que je sache, jamais un employeur ne s'est plaint d'ajouter une ligne intitulée « Allègement de cotisations sociales ». (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain et du groupe écologiste)
Autre constante de cette législature, dégager des moyens pour ceux qui en ont le plus besoin. Dans le cadre du plan pluriannuel de lutte contre la pauvreté, nous avons revalorisé le RSA de 10 %. Pour les jeunes, nous avons augmenté les bourses, créer des postes d'enseignants et créé la garantie Jeunes. Les dépenses pour l'insertion ont augmenté de 1,9 milliard entre 2013 et 2017, et celles pour le retour à l'emploi et la formation de 2,3 milliards d'euros. Dans le même temps, nous avons dû relever des défis que personne ne prévoyait en 2012 en consacrant à la sécurité des Français 2,7 milliards d'euros supplémentaires.
Dans le même temps, nous avons réduit des dépenses inutiles. Résultat, les dépenses de l'État auraient baissé en cinq ans de 6,5 milliards d'euros !
M. Didier Guillaume. - Très bien !
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. - Et c'est une baisse en euros sonnants et trébuchants, pas en tendanciel !
L'effort se poursuivra en 2017, y compris de la part des collectivités territoriales avec la baisse des dotations, même si, conformément aux engagements du président de la République, leur effort a été réduit de 1 milliard d'euros par rapport aux deux années précédentes.
Nous tiendrons nos engagements européens, en dépit de toutes les Cassandre de la primaire. La Commission européenne l'a confirmé : le déficit sera inférieur à 3 %, à 69,3 milliards.
Le léger ajustement de la prévision de croissance, ramenée à 1,4 %, ne met pas en péril nos objectifs. Même le Haut conseil des finances publiques (HCFP), traditionnellement peu complaisant, a utilisé deux fois dans son avis publié vendredi matin, l'adjectif « réaliste ».
À l'inverse, les propositions du principal parti d'opposition suscitent l'inquiétude...
M. Francis Delattre. - L'admiration !
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. - ...et la colère ! Des candidats de droite proposent de dilapider le fruit des efforts des Français : dette supérieur à 100 % du PIB...
M. Philippe Dallier. - C'est déjà le cas !
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. - ...explosion du déficit à 4,7 %, même si l'on ne sait plus si c'est pour 2017 ou 2018. Ils arguent de l'insincérité des comptes. C'est trop facile ! Pourquoi refuser un débat argumenté ? Au reste, prévoir un déficit de 4,7 %, c'est déjà admettre le coût des cadeaux fiscaux promis à ceux qui vous soutiennent. À qui profitera la suppression de l'ISF, la baisse des droits de succession, la baisse proportionnelle de 10 % de l'impôt sur le revenu ?
M. Jacques Chiron. - Aux plus aisés !
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. - Pour financer tout cela, il faudra faire des économies sur le dos des retraités, des fonctionnaires, de la sécurité sociale... En somme, vous voulez donner plus à ceux qui n'en ont pas besoin ! Et certains croient que la gauche et la droite n'existent plus...
M. Roger Karoutchi. - Pour la gauche, c'est sûr ! (Rires à droite)
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. - Vous comptiez, à droite, supprimer 600 000 postes de fonctionnaires... L'expression est devenue plus prudente, on évoque un chiffre « jusqu'à 500 000 fonctionnaires ». Où les prendrez-vous ? J'aimerais bien voir la liste... En réalité, cela revient à ne plus recruter quand 100 000 agents des trois fonctions publiques partent en retraite chaque année. Quel programme ! Vous décrédibiliser la parole politique.
M. Ladislas Poniatowski. - Je croyais qu'on parlait du budget !
M. Didier Guillaume. - Il n'y pas plus de budget !
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. - Si j'ai bien compris, la majorité sénatoriale m'oppose la question préalable. Déjà l'an dernier, vous aviez refusé de voter les crédits de dépenses, l'article d'équilibre... Votre budget était inapplicable. Cette année, vous vous défaussez encore, sans dire si vous voulez plus ou moins de dépenses, sans faire une proposition alternative.
Vous donnez une piètre image d'une institution qui se veut sage, mais qui se révèle lâche. (Protestations à droite)
À gauche, nous nous battrons pour nos principes et pour nos valeurs (Applaudissements sur les bancs des groupes socialiste et républicain, écologiste et RDSE)
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances . - Votre propos ne m'a guère convaincu... Le 16 juillet 2012, le ministre des finances Pierre Moscovici déclarait que son objectif était de ramener le déficit sous la barre des 3 % en 2013, et les comptes à l'équilibre en 2017. Aujourd'hui, il n'est plus question d'équilibre et l'objectif est de repasser sous la barre des 3 % en 2017...
Nous ne croyions pas en 2012 à vos promesses, nous n'y croyons pas plus aujourd'hui. Le HCFP a jugé que vos hypothèses étaient « optimistes » ; certains objectifs seraient même irréalistes. Vendredi, il a estimé que la nouvelle prévision de croissance pour 2016 ne serait peut-être pas atteinte.
Les recettes sont surestimées et les dépenses sous-estimées. Selon nos projections, le déficit atteindra 3,2 % en 2017. Les sous-budgétisations atteignent en moyenne 2,5 milliards d'euros entre 2011 et 2015 : Opex, opérations intérieures hébergement d'urgence, contrats aidés, aide médicale d'État... Cette année, il faut y ajouter les participations financières de l'État.
Le Sénat n'a pas refusé de faire son travail : 43 heures de discussion en commission des finances, élaboration de rapports budgétaires et de rapports pour avis...
M. Didier Guillaume. - Pour amuser la galerie !
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général. - Faire son travail ne signifie pas voter automatiquement le budget du Gouvernement !
Ce quinquennat restera celui du choc fiscal : la charge pesant sur les ménages s'est accrue de 31 milliards d'euros entre 2012 et 2016 ; ce projet de loi de finances ne la réduit que de 1 milliard, petit cadeau électoral non financé, pour faire oublier l'errance fiscale du Gouvernement.
Seuls 43,8 % des Français paient désormais l'impôt sur le revenu en 2016, contre 50 % en 2012. La concentration de l'impôt sur les classes aisées n'est pas tout ; la hausse des prélèvements indirects - TVA, CSPE et autres - qui pèsent davantage sur les ménages modestes a été de 6 % entre 2011 et 2015.
Votre politique fiscale a défavorisé les actifs et les familles, c'est la direction générale du Trésor qui l'écrit dans un rapport. Les prélèvements sur les ménages sont passés de 14,5 % du PIB en 2011 à 16 % entre 2011 et 2016.
Quant au prélèvement à la source, c'est un véritable choc de complexité. Les aménagements techniques apportés restent insuffisants. Tous les acteurs que vous avez auditionnés y sont défavorables. Cette mesure n'est pas neutre. Elle menace la confidentialité des données fiscales. L'impôt familialisé tel que le nôtre n'est pas compatible avec le prélèvement à la source individuel. Nous avons fait une proposition plus simple : la mensualisation obligatoire, que les députés ont reprise (M. Christian Eckert, secrétaire d'État, le conteste.) puis hélas abandonnée.
Concernant la fiscalité des entreprises, le Gouvernement annule malheureusement 5 milliards d'euros de baisses d'impôts sur les entreprises prévus par le CICE. Seule subsiste la création d'une nouvelle tranche de bénéfices imposés à 28 % pour les PME. Dans le même temps, vous demandez aux entreprises de verser par anticipation à l'État, en 2017, l'acompte sur l'impôt sur les sociétés, la Tascom, la C3S. Il s'agit bien d'un prélèvement supplémentaire de 1 milliard d'euros, qui gonfle artificiellement les recettes de 2017 car, dès 2018, les effets s'annuleront.
Il est aussi regrettable d'augmenter la taxe sur les transactions financières, signal négatif à l'heure du Brexit. Le Gouvernement reconnaît lui-même que le taux de prélèvements obligatoires ne diminue pas, à 44,5 % du PIB en 2017.
Le plafond de dépenses fixé par la loi de programmation est dépassé de 9,1 milliards dès le projet de loi de finances initial. Le président de la République avait annoncé 50 milliards d'euros d'économie. Cet objectif a été abandonné. Heureusement, la charge de la dette baisse ainsi que le prélèvement pour le budget européen. Les économies de constatation servent de support au budget du Gouvernement.
Il faut retourner en 2002 pour voir une telle hausse des dépenses de personnel, celles du titre II : 4 %. Elles auront crû de 5,1 % au cours du quinquennat, quand la masse salariale de l'État avait diminué de 6,6 % au cours de la mandature précédente.
Cette hausse n'est pas due à la lutte contre le terrorisme ou à l'actualisation de la loi de programmation militaire dont l'effet est marginal, mais au recrutement dans d'autres ministères comme l'Éducation nationale.
M. Didier Guillaume. - Nous le revendiquons !
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général. - ...et à la multiplication des mesures catégorielles : GVT, dégel du point d'indice, protocole Lebranchu... Un décret d'avance entérine déjà en 2016 un dérapage de la masse salariale de 887 millions d'euros !
Pourtant, il est possible de maîtriser la masse salariale : rationalisation des missions, efforts des opérateurs, hausse du temps de travail. Si le temps de travail était de 37,5 heures par service, temps moyen du privé, les économies seraient de 2,2 milliards pour la fonction publique d'État et de 5 milliards pour les trois fonctions publiques !
M. Didier Guillaume. - Allez voir à l'hôpital !
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général. - La dépense publique a augmenté de 2 % par an, contre 1 % en moyenne dans la zone euro.
Au total, le déficit de l'État attendu est de 69,3 milliards en 2017 mais au prix d'une présentation artificielle : la trésorerie dont l'État disposait sur le compte de la Coface a été versée sur le nouveau compte de commerce « soutien au commerce extérieur ». Ce versement ne correspond pas à une nouvelle recette, c'est un mouvement de périmètre. Ainsi notre commission des finances estime que ce budget n'est pas acceptable au regard des choix faits pour 2017 mais aussi parce qu'il engage la politique des années à venir.
En effet, ce budget crée de nouvelles charges qui grèveront nos finances. Ainsi la hausse du CICE de 6 à 7 %, sans effet l'an prochain, représentera 1,6 milliard d'euros de moindres recettes en 2018, 3,1 milliards d'euros en 2021. La baisse de l'impôt sur les sociétés à 28 % ne coûtera rien en 2017 mais 1,45 milliard en 2018 et 7 milliards en 2021 ! L'extension du crédit d'impôt pour les particuliers employeurs ne coûtera rien en 2017 mais 1,1 milliard d'euros en 2018.
Le crédit d'impôt au profit des établissements sociaux coûte lui aussi 600 millions d'euros. Nous n'en avons pas les moyens.
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. - À croire que vous lisez la fameuse note de Gilles Carrez !
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général. - Heureusement que nous avons des convergences !
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. - Avez-vous lu Le Monde ?
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général. - Vous disiez l'an dernier, contre nos propositions, que vous n'en aviez pas les moyens...
Ces pertes de recettes à effet différé - nous en sommes à 12 milliards - s'accompagnent-elles de réductions de dépenses ? Il n'en est rien. Pire, le Gouvernement ajoute des dépenses nouvelles. Le PIA ? Des milliards annoncés pour les années suivantes, aucun crédit de paiement dans le projet de loi de finances pour 2017.
Le 27 octobre, le président de la République annonçait un milliard d'euros dans le cadre de la lutte contre les violences urbaines... dont 15 millions seulement en 2017... Idem pour le plan de lutte contre la surpopulation carcérale : 1,7 milliard, aucun décaissement cette année. Soit 12 milliards d'euros qui pèseront sur les exercices ultérieurs, et un total de 25 milliards...
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. - Les mêmes chiffres que Gilles Carrez, et dans le même ordre !
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général. - C'est un détournement de principe de l'annualité budgétaire.
S'agissant des finances locales, la continuité prévaut : des rustines. La baisse des dotations a entraîné une telle chute de l'investissement local que le Gouvernement doit éteindre l'incendie qu'il a lui-même allumé avec un fonds de soutien... La réforme de la DGF ? Abandonnée. Même les mécanismes d'ajustement ne fonctionnent plus. Vous financez la hausse de la péréquation par des ponctions sur les territoires les plus fragiles. Où est la solution pérenne pour le financement des allocations de solidarité promise par le président de la République ?
Bref, un grand nombre d'articles de ce projet de loi de finances ne peuvent recevoir notre assentiment. C'est un budget de campagne, dont la sincérité est plus que contestable. Ces deux dernières années, nous avions adopté un projet de loi de finances considérablement modifié....
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. - Vous ne laissiez pas de quoi payer les fonctionnaires !
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général. - Cette année, le Sénat refuse d'examiner un projet de loi de finances insincère, contraire au principe de l'annualité budgétaire, qui obère les marges de manoeuvre de la prochaine majorité. C'est pourquoi la commission des finances vous proposera d'adopter une question préalable sur l'ensemble du projet de loi. (Applaudissements au centre et à droite)
M. Didier Guillaume. - Le Sénat va parler, mais pas débattre !
Mme Michèle André, présidente de la commission des finances . - (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain) Ainsi donc, le Sénat se prépare à opposer la question préalable à ce projet de loi de finances, renonçant à sa fonction de législateur. Certes, pareille motion est prévue par notre Règlement et a été utilisée par nous en février 2012 sur le projet de loi de finances rectificative. Mais refuser d'examiner le budget de l'État est singulier. Les limites imposées au Parlement en matière budgétaire sont réelles mais si telle est sa volonté, rien n'empêche la majorité sénatoriale de baisser les impôts davantage ou de prévoir de nouvelles économies...
L'an dernier, l'Assemblée nationale avait repris nombre de modifications apportées par le Sénat, sur 70 articles, malgré l'échec de la commission mixte paritaire. La majorité a cette année choisi de ne rien proposer.
Je refuse tout ce qui contribue à l'abaissement du Parlement, à placer le Sénat sur un strapontin institutionnel. Cette année encore, 82 rapporteurs pour avis ont travaillé, sans parler des rapporteurs spéciaux et du rapporteur général de la commission des finances : ce sera donc en vain.
Nous n'examinerons donc pas le plan d'urgence pour l'emploi, la généralisation de la garantie Jeunes, la montée en puissance du service civique, les baisses de prélèvement pour 7 millions de foyers des classes moyennes, les particuliers employeurs, les agriculteurs... Pas davantage, l'amélioration de la situation des retraités modestes, la revalorisation de celle des anciens combattants, les allégements de cotisations des agriculteurs, les moyens supplémentaires pour les territoires ruraux, la rénovation urbaine, le financement record de l'aide au développement, les mesures de soutien à la transition énergétique, les recrutements dans l'éducation nationale - 11 802 postes nouveaux, la promesse de 55 000 emplois nouveaux sur le quinquennat sera tenue -, le triplement de l'indemnité du suivi et d'hébergement des élèves. Nous n'examinons pas davantage la hausse de 8 % des crédits de l'ANR ni celle du budget de la culture, - qui franchit l'étape historique du 1 % du budget de l'État -, ni la nouvelle tranche du CICE, qui apportera 3 milliards d'euros aux entreprises, ni encore la baisse de l'impôt sur les sociétés pour les PME... Nous n'examinons pas les moyens supplémentaires pour la police et la gendarmerie, les 600 millions prévus pour nos armées au-delà de la loi de programmation militaire révisée.
Nous n'examinons pas le prélèvement à la source, ni la question de la place de la compétitivité de Paris via la taxation des transactions financières. La majorité sénatoriale renonce aussi à dire son mot sur les finances locales...
Le budget manquerait de sincérité ? Les prévisions macro-économiques du Gouvernement sont pourtant très proches du consensus des économistes. Rappelez-vous : le projet de loi de finances pour 2012 évaluait la croissance à 1,3 %, elle ne fut que de 0,2 % ! C'est bien pour cela que nous avons créé le HCFP...
Pour atteindre le seuil de 3 % de déficit, il suffit d'un effort de 0,3 point en un an, peut-être moins : c'est accessible. Pourquoi douter d'objectifs situés dans la prolongation des résultats passés ? C'est vrai pour l'État comme pour les comptes sociaux. Il eut été utile que la majorité présente sa propre trajectoire...
La politique menée depuis 2012 se caractérise par sa cohérence : redressement des comptes conjugué au soutien résolu à l'activité économique. La France fait d'ailleurs partie des huit pays dont les prévisions budgétaires ne font pas l'objet de « doutes sérieux » de la part de la Commission européenne - et celle-ci a incité les États de la zone euro à soutenir par le levier budgétaire la politique de la BCE. La France a pris sa part en s'interdisant toute politique récessive et en soutenant l'investissement.
Les collectivités territoriales ont pris leurs responsabilités et contenu leurs dépenses de fonctionnement. À présent, toutes les analyses escomptent une reprise de l'investissement local.
Les recettes... Proposerez-vous de revenir sur les baisses de l'impôt sur le revenu, la prorogation du CICE, les mesures pour les particuliers employeurs, le crédit d'impôt pour les associations ? Je ne le crois pas.
Paradoxe, la majorité du Sénat déplore l'insuffisance des économies mais ne dit pas où elle en ferait. On ne sait d'ailleurs pas si elle trouve qu'il y a trop de crédits ou pas assez... Et la commission des finances a proposé l'adoption de 36 missions sur 52...
Les dépenses de l'État n'ont pas dérapé, au contraire : 5 milliards de moins depuis 2012, hors pensions et charge de la dette. Le Gouvernement a fait des choix et préparé l'avenir : recrutement dans l'éducation nationale, la police et la gendarmerie, la magistrature - 600 magistrats de plus en trois ans. La fiscalité a été « verdie » et rendue plus progressive. La prime d'activité a remplacé la PPE et les baisses d'impôt sur le revenu ciblées sur les foyers modestes et les classes moyennes atteindront 6 milliards d'euros l'an prochain.
D'un côté les paroles, de l'autre les actes... Nous irons donc en CMP avec une copie blanche... Parce que je soutiens le Gouvernement et ne me résous pas à ce que le Sénat ne tienne pas sa place dans nos institutions, je m'oppose à la question préalable. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain)
Mme Éliane Assassi . - Cette longue discussion générale est paradoxale. Nous acceptons bien entendu l'usage de motions de procédure pour exprimer une position politique. Mais combien de fois ne nous a-t-on pas dit qu'il fallait « faire vivre le débat », « donner toute sa place au bicamérisme » ? Vous avez été plus complaisants sur les lois Macron ou El Khomri !
Pourquoi ce raidissement ? Le projet de loi de finances est dans la continuité des précédents. Tout serait-il donc réécrit cet été ? Pari osé... Nous réprouvons la démarche de la majorité sénatoriale qui est de pure posture.
Ce projet de loi de finances conclut un quinquennat marqué par un changement qui n'est pas celui qui avait été promis. François Hollande a d'emblée renié sa promesse de renégocier le traité budgétaire européen Merkel-Sarkozy. La majorité dépose une question préalable sur un budget validé par la très libérale Commission européenne... C'est une posture qui masque mal un accord de fond sur les orientations politiques.
Entre 2012 et 2015, le produit de l'impôt sur le revenu a bondi de 59,5 milliards à 73,4 milliards, tandis que celui de l'impôt sur les sociétés passait de 40,8 milliards à 29,4 milliards et la TVA, impôt injuste par nature, de 133,4 à 149,4 milliards... Les plus riches n'ont guère été touchés par les hausses d'impôts, qui ont frappé de plein fouet les classes moyennes, et les consommateurs pauvres doivent payer l'addition d'un budget d'austérité... Comment comprendre qu'avec le CICE, qui coute au total 60 milliards, Auchan reçoive 88 millions d'euros tout en augmentant ses dirigeants de 12,5 % ? Que La Poste reçoive 341 millions de CICE, en même temps qu'elle supprime 6 284 emplois et ferme de nombreux bureaux de poste ? Et MM. Juppé et Fillon renchérissent... La gourmandise est un vilain défaut, que le patronat n'a jamais su réfréner...
L'impôt sur le revenu baissera pour les contribuables relativement modestes ; mais les impôts locaux ont explosé. L'article 13 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen vaut-il encore, qui impose que la contribution commune soit répartie entre les citoyens « à raison de leurs facultés » ?
La réforme fiscale a été enterrée. Le budget est toujours un budget d'austérité. L'investissement public a été ramené de 86 à 67 milliards d'euros en cinq ans : un boulevard pour ceux qui veulent mettre à bas ce qui subsiste du modèle social français - à l'image de M. Fillon, qui annonce tranquillement vouloir faire exploser la durée légale du travail. Vous et vos candidats voulez supprimer 250 000 à 500 000 postes de fonctionnaires : pensez-vous à ceux pour qui les services publics sont le dernier rempart contre la violence sociale ?
M. Vincent Delahaye. - Nous pensons aux chômeurs !
Mme Éliane Assassi. - Supprimer des postes d'infirmiers, d'enseignants, de policiers, est-ce un progrès pour la France ? Une rengaine chère à Mme Thatcher, qui a produit un désastre social dans les banlieues anglaises... Que MM. Fillon et Juppé aillent voir le dernier film de Ken Loach, ils seront peut-être ébranlés dans leurs certitudes ultralibérales !
L'heure est à la mobilisation politique contre la pauvreté et pour l'emploi, mobilisation pour la santé et un logement digne pour tous, pour l'éducation, pour le droit à vieillir dans la dignité. Regrettant les renoncements de François Hollande, nous sommes aussi inquiets de ce que prépare une droite à l'affût, et que nous combattrons de toutes nos forces. Nous voterons contre la question préalable. (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste républicain et citoyen)
M. Jean-Claude Requier . - Le Sénat mérite un débat complet et transparent sur le budget. Nous, parlementaires, avons des propositions à faire. Le dernier budget du quinquennat est l'occasion de dresser un bilan sans complaisance ni critique excessive. Entre 2012 et 2017, les comptes publics ont été rééquilibrés - l'assurance-vieillesse sera même légèrement excédentaire l'an prochain. Le déficit passera sous la barre des 3 % en 2017.
Beaucoup d'incertitudes demeurent pourtant. Les prévisions de croissance ont été revues à la baisse depuis le vote sur le Brexit et l'élection de Donald Trump. Une hausse des taux d'intérêt se profile.
Le Gouvernement poursuit la baisse de l'impôt sur les revenus modérés. Un célibataire gagnant jusqu'à 20 500 euros par an verra son impôt reculer de 20 %. Malheureusement, cela réduit d'autant l'assiette de l'impôt sur le revenu. Pour nous, un impôt juste doit être payé par tous, même symboliquement : c'était le projet de l'impôt progressif de Joseph Caillaux, que nous reprenons chaque année par amendement, en conformité avec l'article 13 de la déclaration des droits de l'homme et du citoyen....
Je salue les efforts faits pour les membres des forces de l'ordre décédés en mission comme pour les victimes d'attentats. La baisse de l'impôt sur les sociétés est un facteur d'attractivité. Il est bon que la France poursuive ses efforts en faveur de l'harmonisation fiscale et contre le dumping fiscal. Je m'inquiète en revanche de la refonte du régime d'imposition des indemnités des élus locaux. Une réforme technique comme le prélèvement à la source ne peut dissimuler un durcissement fiscal.
S'agissant de l'évolution des dotations aux collectivités territoriales, le résultat est moins mauvais qu'attendu pour le bloc communal. Les régions et les départements, eux, sont les grands perdants des arbitrages présidentiels, alors que leurs dépenses contraintes augmentent.
Si la question préalable est votée, nous ne pourrons que nous prononcer sur le prélèvement à la source, la réforme de la propagande électorale, les dotations aux collectivités territoriales.
Le groupe RDSE, qui approuve les grandes lignes de la politique gouvernementale, émet donc cependant des réserves sur le budget. Il faut prendre des mesures volontaristes pour les territoires ruraux - agriculture, transports, communications, services au public... Nous sommes particulièrement attentifs à préserver le tissu économique local. La crise agricole frappe, et les mesures d'urgence ne suffiront pas - même si le Gouvernement n'a pas toutes les cartes en main.
Le soutien à l'investissement local est un enjeu majeur. Outre la dotation de un milliard du fonds de soutien, le projet de loi de finances prévoit 200 millions de plus pour la dotation d'équipement des territoires ruraux (DETR), ainsi que 600 millions pour la rénovation thermique, les énergies renouvelables, les infrastructures...
Le groupe RDSE regrette profondément ce débat écourté, occasion manquée d'un examen précis et constructif. (Applaudissements sur les bancs du groupe RDSE ; MM. Jean-Claude Gaudin, Michel Canevet et Jean Bizet applaudissent aussi)
M. Vincent Delahaye . - M. le ministre a fait un bilan bien enjolivé d'un quinquennat qui, pour le groupe UDI-UC, est celui des promesses non tenues. François Hollande avait promis le retour à l'équilibre budgétaire en cinq ans. Nous en sommes encore à 70 milliards de déficit... Jean-Marc Ayrault promettait que les hausses d'impôt ne toucheraient pas neuf Français sur dix, on voit ce qu'il en est, le produit de l'impôt sur le revenu a augmenté de 14 milliards...
On nous annonçait « le grand soir final »... Rien n'est venu, sinon bricolage et improvisation finale. Enfin, en 2014, François Hollande et Manuel Valls annonçaient 50 milliards d'économies... toujours reportées. Or nous en avons besoin, comme nous avons besoin de réformes de fond. Maîtriser les dépenses de l'État, ce serait faire qu'elles n'augmentent pas plus que l'inflation.
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. - Elles ont baissé !
M. Vincent Delahaye. - Vous parlez de maîtrise mais vous ne le faites pas. Si elles avaient ne serait-ce que suivi l'inflation, le déficit serait de 35 milliards d'euros inférieur à ce qu'il est aujourd'hui ! Et si l'État s'était appliqué la même rigueur que les collectivités territoriales, son budget serait à l'équilibre...
Beaucoup de cadeaux électoraux dans ce budget, pour les fonctionnaires, les jeunes, les agriculteurs, les intermittents... C'est de bonne guerre, me direz-vous... mais plus les caisses sont vides, plus on distribue... Et à crédit !
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. - N'importe quoi !
M. Vincent Delahaye. - Les sous-budgétisations s'élèvent de 1,5 à 2,5 milliards d'euros selon la commission des finances. Beaucoup d'artifices comptables aussi - PIA, crédit d'impôt pour la transition énergétique... - pour 10 milliards d'euros de dépenses reportées aux années suivantes.
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. - Mais arrêtez, c'est complètement faux !
M. Vincent Delahaye. - Quant aux collectivités territoriales, elles sont ponctionnées de 27 milliards d'euros.
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. - Combien pour elles dans votre plan à 100 milliards d'économies ?
M. Vincent Delahaye. - Si l'État s'était imposé les mêmes efforts, nous serions à l'équilibre budgétaire. L'équilibre en cinq ans, c'est trop rapide, certes. Il faut dix ans.
Quant aux recettes, elles sont gonflées par vos prévisions hyper-optimistes. Le HCFP est très sévère sur le projet de loi de finances. (M. Christian Eckert s'impatiente) La surévaluation des recettes atteint 5 à 7 milliards d'euros.
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. - Vous répétez la même chose tous les ans !
M. Vincent Delahaye. - Au total, le déficit est de 16 à 20 milliards d'euros supérieur à ce qui est affiché... (M. Christian Eckert s'esclaffe)
La Commission européenne ne peut évidemment prendre position à quelques mois des élections, d'autant que le commissaire français à l'économie est l'ancien porte-parole de François Hollande... Nous, nous dénonçons un budget insincère et électoraliste. Nous serions prêts à discuter (exclamations et rires sur les bancs du groupe socialiste et républicain) si nous n'avions pas l'habitude de votre comportement, monsieur le ministre : « Circulez, il n'y a rien à voir ! » Nos propositions, par exemple sur les jours de carence, ont toujours été balayées. Le Sénat n'a pas envie de perdre son temps. Les sénateurs, la commission des finances ont travaillé pendant des centaines d'heures...
Mme Éliane Assassi. - Pourquoi s'arrêter maintenant ?
M. Vincent Delahaye. - ...mais nous ne pourrons pas continuer. Le groupe UDI-UC votera la question préalable. (Applaudissements sur les bancs au centre et à droite)
M. André Gattolin . - La discussion budgétaire est une clé de voûte de l'équilibre entre les pouvoirs exécutif et législatif. Le pouvoir politique des assemblées, selon les historiens, s'est affirmé en même temps que le principe d'annualité budgétaire. Le projet de loi de finances est d'ailleurs le seul où, selon le Règlement du Sénat, un scrutin à la tribune est de droit.
Et pourtant, la majorité refuse de l'examiner cette année. Le budget serait électoraliste ? Oui, il l'est ! (Exclamations à droite) L'électoralisme est la chose au monde la mieux partagée ! Les prévisions de croissance du Gouvernement sont certes supérieures de 0,3 point au consensus des économistes. En 2012, lors du dernier projet de loi de finances du Gouvernement Fillon, l'écart était de 0,55 point... Le HCFP n'existait pas, mais ne doutons pas qu'il aurait tiqué... Et la croissance pour 2012 a été nulle : alors ne taxons personne d'irréalisme et souvenons-nous du passé.
L'impact différé de mesures, ensuite, tenait aussi aux modalités de sa perception ; peut-être le Gouvernement utilise-t-il les arcanes des règles s'appliquant des finances publiques au mieux de ses intérêts ? Certes, mais il le combine aussi avec le prélèvement à la source, réforme utile. Le Gouvernement Fillon avait, lui, laissé 13 milliards de prélèvements différés... au 1er octobre suivant l'élection présidentielle de 2012 : la TVA sociale n'était d'ailleurs qu'une coquille vide.
Le dernier budget du quinquennat contient donc toujours une part électoraliste ; l'opposition est dans son rôle en le dénonçant et elle doit tenir son rôle.
Rien ne justifie pour autant que la majorité dépossède le Sénat de sa compétence et de sa faculté de débattre. En 2014, nous avions pris un nouveau budget... Sans savoir que ce serait le dernier.
Contrairement à la TVA sociale, le CICE renforce l'attractivité de notre économie ; le bilan en est cependant médiocre, à peine 100 000 emplois pour 42 milliards d'euros distribués en 2015. La baisse de l'impôt sur le revenu est bienvenue, mais sans compenser les hausses antérieures ni le déséquilibre avec les baisses de l'impôt sur les sociétés.
Le prélèvement à la source, nouvelle mouture, est meilleure qu'initialement. De même, nous nous réjouissons de l'embryon d'une taxation sur les transactions financières, des avancées sur les carburants les plus sales et des crédits d'impôt pour soutenir l'emploi associatif ou à domicile.
Cependant, ce budget ne nous donne guère satisfaction : l'écotaxe reste abandonnée, pour un coût de dédit d'un milliard d'euros.
Le Gouvernement n'a pas saisi l'occasion de ressouder sa majorité, c'est dommage. Nulle légitimité, donc, à censurer le débat ! (Applaudissements sur les bancs du groupe écologiste)
M. Bruno Retailleau . - (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains) Ce projet de loi de finances a été examiné minutieusement par notre Haute Assemblée et en particulier par notre commission des finances.
M. Michel Berson. - Mieux vaut entendre cela que d'être sourd !
M. Bruno Retailleau. - Nos commissions sectorielles ont multiplié les auditions. Les rapporteurs spéciaux ont effectué de très nombreux déplacements, tout au long de l'année. Depuis des mois, chaque article a été pesé, soupesé, fait l'objet d'un examen méticuleux. J'en remercie notre présidente, notre rapporteur général et l'ensemble des rapporteurs. Au terme du quinquennat, l'heure des comptes a sonné.
Nous formulons trois critiques majeures. Le prélèvement à la source, seule réforme de ce projet de loi de finances, est mal ficelé et mort-né. L'idée est séduisante, il est vrai, celle de la concordance des temps ; mais à l'arrivée, une usine à gaz, qui pose trois problèmes : le premier, la confidentialité pour le salarié, la lourdeur administrative pour l'employeur. Le deuxième, c'est la fausse contemporanéité : le taux de prélèvement et les crédits d'impôt seront décalés.
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. - Ils l'ont toujours été.
M. Bruno Retailleau. - Enfin, une mise en oeuvre irréaliste pour 2018, la commission des finances l'a montré.
Si vous y croyiez, monsieur le ministre, pourquoi avoir attendu la fin du quinquennat ? Le Sénat a fait des propositions inspirées du Conseil des prélèvements obligatoires, pour une réforme plus juste, plus efficace, qui réalise une vraie contemporanéité.
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. - Débattons-en alors ! (On renchérit sur les bancs du groupe socialiste et républicain)
M. François Marc. - Serait-ce qu'une telle réforme n'est pas si mauvaise, alors ?
M. Bruno Retailleau. - Deuxième critique : ce budget, comme celui de la protection sociale, est insincère, vous avez préempté l'avenir : il sous-estime les dépenses, surestime les recettes comme jamais. Il réalise une véritable synthèse de toutes les promesses électorales non financées ou seulement à crédit. Jamais un budget n'a été autant en trompe-l'oeil !
Trois chiffres : 12 milliards d'euros de sous-estimations de dépenses, 20 milliards de sous-estimation de déficit, 25 milliards de dépenses remises ou reportées sur d'autres exercices budgétaires ! Ces trois chiffres sont dramatiques !
Le Haut-Conseil des finances publiques a reconnu que les risques de dérapage étaient plus importants qu'avant. Il le dit aussi pour les comptes sociaux. (Applaudissements au centre et à droite)
J'en viens à une autre critique : un budget n'est pas uniquement un exercice comptable. C'est votre dernier budget. Il exprime aussi un bilan, le vôtre montre qu'aucune promesse de François Hollande n'a été tenue.
M. François Marc. - N'importe quoi !
M. Bruno Retailleau. - La France fait systématiquement moins bien que ses voisins européens. Le chômage ?
M. Didier Guillaume. - L'orientation à la baisse se confirme. (Protestations à droite)
M. Bruno Retailleau. - Ce sont 600 000 chômeurs de plus, (Marques d'approbation au centre et à droite) malgré les centaines de milliers d'emplois aidés qui coûtent 10 milliards d'euros, preuve que ces expédients ne règlent pas le problème - la France était au 14e rang sur 28 en 2012, nous en sommes au 22e rang ! La dette, qui n'a cessé d'augmenter, dépasse 98 % du PIB.
Sous le quinquennat précédent, elle avait connu la plus grande crise depuis 1929. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste et républicain) L'Allemagne fait beaucoup mieux que nous. Sous votre quinquennat, la dette de la France a augmenté de 7 %, contre une hausse de 1 % pour les autres pays européens en moyenne ! (Applaudissements au centre et à droite)
Voilà où nous en sommes, après que vous avez augmenté les impôts sans précédent, tout en alourdissant le déficit.
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. - Quel déficit ?
M. Bruno Retailleau. - Vous avez accru de 31 milliards d'euros les impôts sur les ménages, en plus et particulièrement sur les familles. Finalement, la seule courbe que François Hollande aura inversée, c'est celle de la natalité ! (Applaudissements à droite)
Quant aux dépenses publiques, seule la Finlande dépense plus que nous. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et républicain) Seuls quatre pays - Croatie, Grèce, Portugal et Italie - font moins bien que la France sur la dette !
Le président de la République, jamais avare de confidences, surtout envers les journalistes, (Sourires à droite) se plaint qu'il n'a pas eu de « bol » ?
M. François Marc. - Et alors ? N'est-ce pas vrai ?
M. Bruno Retailleau. - Voici donc que François Hollande, après avoir failli comme météorologue, devient astrologue. Or précisément, l'exceptionnel alignement des astres, qui a pu avoir lieu durant son quinquennat, grâce à l'assouplissement monétaire de la BCE, vous l'avez gâché ! (Applaudissements au centre et à droite) Il faut rendre à César, à François Hollande, c'est qu'il a assumé l'économie de l'offre, ce qui a permis, y compris dans ma famille politique, de diffuser le libéralisme. Le Sénat aurait refusé d'examiner ce texte ? Non, c'est parce que nous l'avons examiné que nous allons le rejeter ! (Applaudissements à droite et au centre ; exclamations sur les bancs du groupe socialiste et républicain)
M. Richard Yung . - Je me demande ce que nous faisons ici : ce qui devait être le débat le plus important de l'année, se déroule dans un hémicycle aux trois quarts vide - les sénateurs ont voté avec les pieds !
Le vote de l'impôt, c'est le coeur de la démocratie - depuis le XVIIe siècle ! Votre question préalable fait démissionner le Parlement, du jamais vu depuis vingt-cinq ans. (Exclamations à droite)
Pourtant, le 28 septembre, monsieur le président, vous disiez préparer l'alternance et que vous examineriez ce budget ; il y a un mois, le rapporteur général disait que la majorité sénatoriale présenterait un budget d'alternance : où est-il ? On ne l'a pas vu !
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. - Pas vu, pas pris !
M. Richard Yung. - En effet ! Refuser le débat, c'est laisser l'Assemblée nationale décider seule, donc refuser le bicamérisme, c'est nous empêcher de faire notre travail ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain) Cet abandon de poste démontre que vous n'avez pas de projet ou que vous cherchez à masquer vos divergences.
La commission des finances a adopté 36 missions, 70 % des dépenses : est-ce le signe d'un budget insincère ? Vos collègues de l'Assemblée nationale, eux, ont fait leur travail jusqu'au bout.
Ce budget est un budget de justice fiscale et sociale ; baisse de l'impôt sur le revenu, crédit d'impôt de 50 % pour les services à la personne ; amélioration de la compétitivité des entreprises, avec un impôt sur les sociétés à 28 %, 15 % pour les PME ; extension du CICE, suramortissement pour les PME, crédit d'impôt pour les associations, très attendu... Ce faisant, nous maitrisons la dépense publique tout en maintenant les services publics (protestations à droite) : 1,8 million d'euros en plus pour l'emploi, 3 millions d'euros pour l'éducation, 1,6 milliard d'euros pour la sécurité.
Nos concitoyens savent ce que c'est ; l'an prochain, nous serons sous la barre des 3 % de déficit (vives exclamations à droite), comme la Commission européenne l'a reconnu...
M. Francis Delattre. - Votre copain !
M. Richard Yung. - Non, il y a vingt-sept commissaires qui prennent la décision. Nous verrons ce qu'il en sera l'an prochain.
M. Philippe Dallier. - Eh oui, on verra !
M. Richard Yung. - Vous auriez pu profiter des dix heures de notre débat pour nous parler de vos propositions de supprimer l'ISF, d'augmenter la TVA, de supprimer 300 000 à 500 000 postes de fonctionnaires...
M. Francis Delattre. - Ce n'est pas le débat !
M. Richard Yung. - Vous refusez le débat ! Fillon parlait de faillite en 2007...
M. Bruno Retailleau. - C'est pire aujourd'hui !
M. Richard Yung. - Vous nous avez demandé de graver la règle d'or dans la Constitution.
M. Francis Delattre. - Vous n'en avez rien voulu.
M. Richard Yung. - Mais vous êtes aujourd'hui, dans votre programme, à 4 % ou 4,1 % !
Ce budget ressemblerait à une voiture volée et maquillée : vous ne voulez rien faire pour elle ! Nous ne voterons pas la question préalable. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain)
M. Gérard César, vice-président de la commission des affaires économiques . - Le budget est un outil de politique économique, ce projet de loi de finances ne correspond pas à la réalité : il faut le sanctionner.
Nous avons examiné attentivement les crédits en commission : nous l'avons fait en commission des affaires économiques, quand bien même la commission des finances a décidé une question préalable.
Un véritable choc fiscal a marqué les trois premières années de ce quinquennat ; mais depuis, les entreprises, tétanisées, ont arrêté les embauches, les usines ont fermé.
Or il est possible de produire en France, dans bien des secteurs ; mais les entreprises sont surchargées. Alstom l'a démontré encore à Belfort. Dans le même temps, l'État réduit les dotations des collectivités territoriales alors même qu'il renonce à l'objectif de 19 milliards d'euros pour l'État, c'est préjudiciable quand les collectivités territoriales réalisent trois quart des investissements publics. Le CICE et le pacte de responsabilité sont intervenus trop tard, mieux aurait valu abaisser les charges. Résultat : le chômage n'a pas baissé. À l'inverse du Royaume-Uni, de l'Allemagne, en plein emploi, ou encore de l'Espagne où le chômage diminue après une crise plus fortement ressentie qu'en France. La baisse des taux d'intérêt, de l'énergie, la parité euro-dollar : nos conditions étaient excellentes, le Gouvernement n'en a pas profité.
La commission des affaires économiques a donné un avis défavorable aux crédits qu'elle a examinés : il manque des moyens face aux crises agricoles, nous attendons 157 millions d'euros du fonds d'allègement des charges.
Les crédits de l'énergie ne compensent pas la hausse de la taxe carbone, - entre 196 millions et 440 millions d'euros supplémentaires - pour les consommateurs, et ne donnent pas les moyens à la transition énergétique, malgré les objectifs fixés, que nous avons toujours jugés irréalistes.
Pour Areva, 5 milliards d'euros sont prévus à la recapitalisation ; l'État renforce aussi les capitaux propres d'EDF ; au total, l'État dépensera 7,5 milliards d'euros pour la filière, sans parler du milliard nécessaire pour racheter les actions d'Alstom.
Le compte d'affectation spéciale ne compte que 6,5 milliards d'euros. C'est une impasse, qui justifie notre rejet. (Applaudissements à droite et au centre)
M. Jean-Pierre Raffarin, président de la commission des affaires étrangères . - Daech, Brexit, Trump : ces trois repères stratégiques nous propulsent dans une ère d'instabilité. Les piliers de l'ordre international issu de la seconde guerre mondiale vacillent.
Émergence de la Chine, de l'Inde, de l'Iran, de l'Afrique, à l'heure de la montée du terrorisme islamiste, qui ravage le Moyen-Orient, et menace le Maghreb, alors même que le projet européen est en panne ; y compris sa dimension euro-atlantique. Notre alliance la plus solide est fragilisée.
Avons-nous connu telle crise ? Le budget n'est pas seulement une affaire de lignes comptables, mais de projet. Pas de sécurité sans développement, pas de solution qui ne soit politique, et non seulement militaire. Nous connaissons des solutions militaires qui n'ont fait qu'amplifier les crises...
Sur la mission « Action extérieure de l'État », la gestion immobilière fait dépendre l'entretien des immeubles, des recettes exceptionnelles des ventes ; ce n'est pas raisonnable.
Et le compte d'affectation spéciale n'est disponible qu'à partir de mai, c'est un comble de malice de Bercy, une entrave au pilotage du ministère....
Les crédits de l'aide publique au développement augmentent, c'est positif ; nous souhaitons créer une facilité de prévention et de gestion des crises, dotée de 100 millions d'euros au moins.
Ce serait un complément à nos interventions, où nos victoires de terrain doivent être prolongées dans la durée. C'est bien le développement économique qui, in fine, assurera la stabilité de ces régions.
Les crédits de notre diplomatie culturelle et d'influence diminuent encore, hors sécurisation des réseaux ; or les démocraties sont en compétition sur les valeurs avec les régimes autoritaires, partout dans le monde, ce n'est pas le moment de baisser la garde, il faut mobiliser et déployer les ressources de notre enseignement français à l'étranger et de notre action culturelle !
Sur la mission défense, nous avons soutenu l'actualisation de la programmation militaire initiée en 2015 ; qui a marqué un retournement, mais cette évolution positive n'a pas été poursuivie comme il convient. Le conseil de défense du 6 avril aurait dû actualiser l'actualisation ; il semble qu'il y ait un problème entre le conseil de défense et Bercy, d'où une certaine discontinuité...
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. - Vous n'y étiez pas !
M. Jean-Pierre Raffarin, président de la commission. - Nous avons dû faire un contrôle sur pièces et sur place.
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. - Il y a un an.
M. Jean-Pierre Raffarin, président de la commission. - J'ai assisté à quelques conseils de défense...
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. - Plus que moi, c'est sûr !
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M. Jean-Pierre Raffarin, président de la commission. - Vous nous avez rendu votre rapport, pour la période 2017-2019, mais les ressources de la programmation ne sont fixées que pour 2017 : quelle pérennité ? 600 millions d'euros de plus qu'en 2016, grevés par 200 millions d'euros de cessions immobilières. Sans parler, pour plus de 200 millions d'euros, des fameuses économies dites « coût des facteurs » : que d'incertitudes, que d'aléas, pour des missions si profondément régaliennes !
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Les crédits 2017 sont « juste insuffisants » et ne permettront pas de sortir les armées de la surchauffe. Avec plus de 30 000 militaires actuellement déployés sur notre sol et à l'étranger, les capacités des contrats opérationnels devront être revues.
Quant à la fin de gestion 2016, elle est marquée par 2 milliards d'euros de crédits encore gelés, dont 1,8 milliard d'équipement des forces - soit 18 % des crédits de la DGA, en cessation de paiement depuis le 12 octobre ! Il faut exécuter les engagements.
Les revenus de la défense sur 2018-2019 ne sont pas sécurisés, pour 2 milliards d'euros au total, que vous laissez au prochain Gouvernement.
Enfin, je salue l'action salutaire du ministre de la défense pour la vente d'armes : notre industrie de défense devient une industrie phare ; mais cela souligne la dangerosité du monde. Les Australiens achètent nos sous-marins, les Égyptiens nos Rafale, mais c'est parce que le monde est menacé par les facteurs de guerre ; on ne parle que de « guerre » : guerre de monnaies, guerre de civilisations, guerre de religions... Je veux rappeler, après avoir assisté ce matin à la remise des prix de sa fondation, combien Jacques Chirac avait soutenu la paix. La France doit renouer avec cet esprit, c'est son message au monde : tout mettre en oeuvre pour la paix. Nous devons mener le budget de la défense à 2 % du PIB, nous devrons aussi, avec la dissuasion, nous renforcer, oui, mais pour faire la paix ! (Applaudissements à droite et au centre)
Mme Caroline Cayeux, vice-présidente de la commission des affaires sociales . - La commission des affaires sociales s'est exprimée sur les choix et le bilan de Gouvernement lors de l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale qui représente 600 milliards d'euros, liés évidemment au projet de loi de finances puisqu'elle en partage le cadrage.
La trajectoire pose un problème de crédibilité. Les comptes seraient à l'équilibre ? Les déficits sont réduits par des artifices comptables, des transferts, comme celui des exonérations de cotisations sociales. Sur 4 milliards d'euros de moindres dépenses de l'Ondam, 900 millions d'euros sont discutables car imputés sur d'autres périmètres ; en fait, l'Ondam progressera de 2,5 % et non de 2,1 %. Même chose pour l'assurance maladie, où le déficit est minoré et sera laissé au prochain Gouvernement.
Le niveau de prélèvements obligatoires affectés à la sécurité sociale augmentera de 0,4 point. La branche vieillesse fait certes des progrès... essentiellement dus à la réforme des retraites de 2010.
Restent aussi les 20 milliards d'euros de coût supplémentaire des retraites publiques par rapport au régime privé, couvertes par le budget de l'État dans le déficit. Le véritable effort, en fait, a été accompli sur la branche famille, avec la réduction du quotient familial et la modulation des allocations familiales.
Mais le Gouvernement rompt là un pacte avec toutes les familles, indépendamment des nombreux mécanismes de solidarité à l'égard des plus modestes. Le projet de loi de finances, comme le PLFSS, minore artificiellement les dépenses.
C'est vrai pour l'aide médicale d'État, dans la mission « Santé » : alors que ce poste budgétaire particulièrement dynamique a augmenté de 40 % depuis 2012, les crédits ne couvriront toujours pas les besoins.
La mission « Solidarité », également, connait des dépenses dynamiques avec l'AAH et surtout la prime d'activité : les 300 millions d'euros supplémentaires, en plus d'une rallonge de 370 millions d'euros en loi de finances rectificative, risquent bien d'être insuffisants face à la montée en charge de cette prime accessible dès 18 ans, par voie dématérialisée.
Idem pour le programme « Hébergement » de la mission « Logement » : le budget est inférieur de 17 millions d'euros aux crédits qui seront consommés en 2016, alors même que la précarité progresse, de même que les flux migratoires.
Quant à la mission « Travail, emploi », la commission des affaires sociales doute de la pertinence des multiples contrats aidés, qui coûtent plus de 1,5 milliard d'euros et sont concentrés dans le secteur non marchand. Moins de 20 % sont conclus dans la sphère marchande. Il faudrait plutôt donner priorité aux emplois marchands et à l'apprentissage, comme le montrent toutes les études sur l'insertion professionnelle des bénéficiaires.
Enfin, la commission déplore les hésitations du Gouvernement sur les aides à l'embauche. Après la création en 2015 de l'aide TPE pour l'embauche d'un premier salarié, est intervenue cette année une aide temporaire pour toutes les PME qui embauchent des personnes en CDI ou en CDD de plus de 6 mois et dont la rémunération est inférieure à 1,3 Smic. La prolongation de cette aide en 2017 se traduit par près de 2 milliards d'euros dans le budget. Elle devra impérativement être évaluée. Sans méconnaître son utilité, les tâtonnements ne rassurent guère les employeurs qui préfèrent la stabilité juridique.
Pour toutes ces raisons, la commission des affaires sociales avait rejeté les objectifs de recettes et de dépenses du PLFSS et a donné un avis défavorable à quatre des huit missions budgétaires qu'elle a eu à examiner. (Applaudissements au centre et à droite)
Mme Catherine Morin-Desailly, présidente de la commission de la culture, de l'éducation et de la communication . - Un budget en hausse est-il toujours un bon budget ? Le budget de la culture doit être examiné en conservant à l'esprit la baisse des dotations de l'État aux collectivités territoriales, qui assurent deux tiers des financements du secteur. On ne saurait se satisfaire des affichages d'augmentations si les dotations baissent tellement que les structures et équipements culturels se trouvent en difficulté.
Les hausses des crédits pour 2017 compenseront-elles les baisses des années précédentes ? Je crains que le yoyo budgétaire n'ait cassé des dynamiques.
Dans un esprit de responsabilité, la commission de la culture a donné un avis favorable au projet de contrat d'objectifs et de moyens de France Médias Monde, soulignant une stratégie cohérente. De même, elle a approuvé l'adoption des crédits du programme 185, pour renforcer notre influence culturelle, même s'ils accusent une baisse inquiétante depuis plusieurs années. Aurons-nous les moyens, comme nous y a invités le président de la commission des affaires étrangères, de mener notre « nécessaire combat culturel et d'influence » ?
Pour le reste, l'évolution des crédits correspond, avant tout, à l'augmentation du point d'indice de la fonction publique qui a un impact très fort sur les crédits dévolus à l'enseignement scolaire et à l'enseignement supérieur et la recherche. Défalquée de cette progression, l'évolution s'explique par la budgétisation de la redevance d'archéologie préventive l'an dernier. D'une manière générale, les niveaux des crédits restent loin de ceux de 2012.
Alors que la priorité à la jeunesse a été clamée haut et fort par le président de la République, les financements des conservatoires ont été asséchés. Si le budget pour 2016 a marqué une inflexion, nous regrettons que ce sujet n'ait pas été traité dans la loi NOTRe.
Idem pour la recherche. Le taux d'acceptation des dossiers par l'Agence nationale de la recherche étaient devenus si bas qu'il avait perdu toute signification. Je note une heureuse prise de conscience en fin de quinquennat. Peut-on accepter que les organismes de recherche et les universités doivent se débrouiller pour financer le glissement vieillesse-technicité, quitte à ne pas pourvoir certains postes ou que les mesures de sécurisation aient été financées en continuant à appliquer le taux dérogatoire de contribution des universités au fonds d'insertion des personnes handicapées dans la fonction publique ? Bref, pas de moyens supplémentaires pour la politique en faveur des handicapés au nom de la sécurité des étudiants. Voilà qui n'est pas très glorieux !
Le renforcement des aides à la modernisation de la presse est bienvenu. Si la situation de Presstalis semble meilleure, celle des Messageries lyonnaises de presse fait craindre une nouvelle crise de la distribution. Surtout, l'AFP, à peine plus d'un an après la loi qui a clarifié son statut, se trouve dans une situation inquiétante.
Le crédit d'impôt pour relocaliser les tournages en France a été efficace. Mais l'avenir du financement du cinéma est fragilisé par la réduction de la participation de Canal Plus. La taxe sur la vidéo doit être élargie aux grands acteurs d'internet.
Surtout, l'absence de réflexion sur l'incidence fiscale de la révolution numérique pèse sur le financement de l'audiovisuel public, comme l'ont montré les travaux conjoints de la commission de la culture et de la commission des finances il y a plus d'un an. Un jour, un Gouvernement devra avoir le courage de s'attaquer à la baisse du rendement de la contribution à l'audiovisuel public.
Dans le domaine de l'enseignement scolaire et supérieur, on assiste à une fuite en avant. La réforme des rythmes scolaires a coûté beaucoup plus cher que prévu. (Mme Catherine Troendlé le confirme)
Les réformettes ne masquent pas l'absence de réformes. Le nombre d'élèves en situation d'échec reste trop élevé. De même, l'échec reste massif en licence. Grâce à Jean-Léonce Dupont, nous avons avancé sur la réforme du master.
Les hausses de crédits en fin de législature témoignent des hésitations du Gouvernement face à la nécessaire réforme, ce qui est inquiétant car, à l'heure de la mondialisation, primauté doit être donnée à la culture et à l'éducation dont on sait aussi qu'elles sont aussi les meilleures armes pour lutter contre les obscurantismes. (Applaudissements au centre et à droite)
M. Hervé Maurey, président de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable . - La commission de l'aménagement du territoire et du développement durable a examiné les crédits relatifs à l'aménagement du territoire, à l'environnement, à la prévention des risques, aux transports, à la transition énergétique. La plupart diminuent, parfois sensiblement. Ce n'est pas un défaut, certes, mais des baisses s'ajoutent aux précédentes, et les effectifs diminuent, alors même que les missions des organismes s'élargissent.
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. - Rappelez-vous : vous souhaitez 500 000 fonctionnaires en moins !
M. Hervé Maurey, président de la commission. - Voyez l'Anses, qui peine de plus en plus à accomplir sa mission.
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. - 500 000 !
M. Hervé Maurey, président de la commission. - Parviendra-t-elle à rendre son rapport très attendu sur les produits de substitution aux néonicotinoïdes ?
De même, les agences de l'eau subissent, pour la troisième année, un prélèvement « exceptionnel » ; cette fois-ci, de 175 millions d'euros.
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. - 100 milliards d'économies ! Où les trouverez-vous ?
M. Hervé Maurey, président de la commission. - L'Ademe est au bord de la cessation de paiement.
On peine à voir quelles sont les priorités du Gouvernement. La transition énergétique ? Dix-huit mois après la loi du même nom, où en est-on ? Comment les collectivités territoriales peuvent-elles mettre en oeuvre les mesures décidées si leur dotation baisse ? L'établissement des SRADDET et PCAET coûte entre 1 et 2 euros par habitant, sa mise en oeuvre entre 100 et 200 euros par habitant. Certes, il existe un fonds pour les territoires à énergie positive mais il bénéficie aux territoires qui sont déjà engagés dans la transition. Et les autres ? Enfin, cette aide sera-t-elle pérenne ?
Mme Royal n'a cessé d'annoncer le doublement du fonds chaleur depuis 2014, il reste plafonné à 200 millions d'euros. Dommage car, entre 2009 et 2015, il s'est révélé efficace : 4,7 milliards d'euros de travaux et 1 700 kilomètres de réseau de chaleur réalisés pour 1 milliard investi.
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. - 100 milliards !
M. Hervé Maurey, président de la commission. - Sur l'aménagement du territoire, les priorités n'apparaissent pas. On observe un saupoudrage : moins de moyens sur plus d'actions. Innovation de cette année : les contrats de ruralité que le groupe UDI-UC avait proposés en vain au Gouvernement l'an dernier. Mais ces contrats sont en trompe-l'oeil : 216 millions d'euros d'autorisations d'engagement, 30 millions de crédits seulement...
Nos rapporteurs sur les transports sont inquiets. Le budget de l'AFITF est insuffisant : avec 2,2 milliards en 2017, il manque au moins 400 millions d'euros. Non seulement l'écotaxe n'a pas vu le jour, mais l'AFITF doit acquitter l'indemnité versée à Ecomouv. La hausse de la fiscalité sur le gasoil a été détournée pour moitié par Bercy.
Comment dès lors financer le report modal, moderniser nos infrastructures ferroviaires vieillissantes ? Regrettant l'absence de priorités, l'accumulation des décisions contradictoires, la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable a donné un avis défavorable à la majorité des budgets qu'elle a examinés. (Applaudissements au centre et à droite)
présidence de M. Claude Bérit-Débat, vice-président
Mme Catherine Troendlé, vice-présidente de la commission des lois . - Je remplace le président Bas, par un déplacement programmé de longue date à Dijon. La question préalable, déposée à juste titre par la commission des finances, n'a pas empêché la commission des lois d'examiner de manière approfondie les crédits qui lui étaient soumis.
Sur la mission « Administration générale et territoriale », M. Collombat s'est inquiété de la création sans concertation du fichier des titres sécurisés, des difficultés pratiques posées par la réorganisation des services territoriaux de l'État et de l'absence de la réforme de la carte des sous-préfectures, annoncée de longue date. Il s'est réjoui du rejet de la dématérialisation de la propagande électorale.
S'agissant de la mission « Conseil et contrôle de l'État », Michel Delebarre a souligné le risque de dégradation des performances des juridictions administratives et financières en raison de l'extension des compétences qui leur sont confiées. La multiplication des outils de rationalisation du contentieux administratif, la procédure à juge unique ou encore la médiation, suscite des inquiétudes sur la qualité de la justice rendue.
Sur la mission « Direction de l'action du Gouvernement », Alain Anziani a relevé la contribution des services du Premier ministre à l'effort de maîtrise des dépenses publiques et souligné la croissance, non pas du nombre mais du volume des textes de loi en 2015 et 2016. M. Jean-Yves Leconte s'est demandé si le CSA pourrait garantir l'équité lors de la prochaine campagne présidentielle. Le Défenseur des droits s'inquiète de l'obligation qui lui est faite par la loi Sapin II d'apporter un secours financier aux lanceurs d'alerte.
S'agissant de la mission « Économie », M. André Reichardt a étudié la mise en oeuvre par l'Autorité de la concurrence de ses nouvelles prérogatives à l'égard des professions réglementées du droit, laquelle suscite des appréciations mitigées, singulièrement de la part des notaires. Il a montré les limites de l'accompagnement des entreprises dans les territoires et plaidé pour une décentralisation. L'agence France Entrepreneur devra faire ses preuves.
Sur la mission « Gestion des finances publiques et des ressources humaines », Catherine di Folco s'est inquiété de la hausse de la masse salariale de l'État, qui aggrave le déficit et nous prive de marges de manoeuvre pour rénover la fonction publique. La situation du Fonds pour l'insertion des personnes handicapées dans la fonction publique est préoccupante, à cause d'une hausse des dépenses et d'une baisse des recettes.
Lors de l'examen de la mission « Immigration, asile et intégration », Esther Benbassa a salué les efforts de réalisme budgétaire, en particulier sur les centres d'accueil pour les demandeurs d'asile, même si l'hébergement des demandeurs en CADA est loin d'être la norme. Les prévisions budgétaires pour le financement de l'hébergement d'urgence pourraient être en retrait. Pour François-Noël Buffet, la politique d'immigration et d'intégration demeure le parent pauvre de la mission. Il déplore le manque d'indicateurs pour évaluer l'efficacité de la lutte contre l'immigration irrégulière.
S'agissant de la mission « Justice », la sous-évaluation des frais de justice, a expliqué Yves Détraigne, entraîne des dépassements ou des retards de paiement. Le taux de vacance des postes est élevé, tant pour les juges que pour les greffiers ; les créations d'emploi nettes sont trop modestes. Les conséquences de l'augmentation de la rétribution des avocats au titre de l'aide juridictionnelle sont sous-évaluées, une réforme demeure nécessaire.
Hugues Portelli déplore les vacances de postes de surveillants pénitentiaires, la prise de conscience trop tardive du Gouvernement sur la nécessité de créer des places de prison ainsi que des hésitations sur la prise en charge des détenus radicalisés.
Mme Cécile Cukiermann s'inquiète des difficultés financières du secteur associatif habilité, qui permet aux magistrats de diversifier les mesures de prise en charge des mineurs. Elle appelle de ses voeux un renforcement des partenariats entre la PJJ et les autres acteurs de la protection de l'enfance. Elle a souligné la montée en puissance du phénomène de radicalisation chez les mineurs et les hésitations de la PJJ sur les réponses à privilégier.
S'agissant de la mission « Outre-mer », Thani Mohamed Soilihi a mis en exergue une organisation atypique et différenciée des juridictions ultramarines de premier degré.
S'agissant de la mission « Pouvoirs publics », M. Sueur a constaté que toutes les autorités de l'État participent à l'effort de maîtrise budgétaire. Seul le Conseil constitutionnel voit sa dotation augmentée pour lui permettre de superviser trois élections en 2017.
Mme Jacqueline Gourault, sur la mission « Relations avec les collectivités territoriales », souhaite une refonde du fonds national de péréquation des ressources intercommunales et communales, ainsi qu'une réforme sur l'ensemble de la DGF, qui mérite un texte à part.
Le président Bas appelle à la fin de la baisse des dotations aux collectivités. Les dotations ne sont pas des libéralités, elles sont la contrepartie du financement des services publics locaux et des transferts de compétences.
Enfin, sur la mission « Sécurités », Alain Marc a évoqué les manifestations policières spontanées après l'attaque de Viry-Châtillon.
Tel est le bilan du notre travail. (Applaudissements au centre et à droite)
M. Jean Bizet, président de la commission des affaires européennes . - L'Europe des projets exige des moyens financiers. Il importe donc d'examiner avec soin son budget et les contributions des États. Je salue le travail de M. François Marc, rapporteur spécial de la commission des finances.
La contribution de la France s'élève à 20,9 milliards en 2017, ce qui fait d'elle le deuxième contributeur derrière l'Allemagne. Elle est, devant l'Espagne, le premier bénéficiaire du budget européen notamment par le biais de la PAC, avec 14,5 milliards.
Depuis trente ans, notre solde net se dégrade. Cependant, le prélèvement sur recettes est inférieur de plus de 5 % par rapport à la prévision, en raison du démarrage très lent des programmes de la politique de cohésion. Les procédures de gestion de ces fonds restent trop complexes. Un choc de simplification s'impose : les règles pour le Feder et le FSE représentent plus de 4 000 pages !
A la surréglementation européenne, s'ajoute la surréglementation des autorités de gestion, c'est-à-dire des régions qui multiplient les garde-fous face aux contrôles dont elles font l'objet.
Le budget européen s'inscrit désormais dans une perspective pluriannuelle bienvenue. La révision à mi-parcours permet de redéfinir des priorités : emploi et croissance d'une part, gestion de la crise migratoire d'autre part. Davantage de moyens financiers seront accordés aux programmes et aux instruments destinés à soutenir l'investissement, notamment au programme européen pour la compétitivité des PME.
La proposition de révision du cadre financier pluriannuel introduit plus de flexibilité et plus de réactivité. C'est indispensable pour s'adapter à une réalité changeante. Songeons par exemple à la crise des réfugiés qui a obligé l'Europe à dégager de nouveaux moyens financiers. Mais demeurons vigilants sur la hausse des contributions nationales d'ici 2020.
Les conséquences budgétaires de la sortie du Royaume-Uni, l'un des principaux contributeurs nets, restent incertaines. La dépréciation de la livre sterling a déjà entraîné une baisse de recettes de 1,8 milliard pour le budget européen. Ne faudrait-il pas instaurer, monsieur le ministre, un mécanisme de couverture du budget face au risque de change ?
Alors que le Traité de Lisbonne prévoit que le budget de l'Union européenne doit être alimenté en majorité par des ressources propres, il reste alimenté aux trois quarts par des contributions nationales, ce qui laisse la place aux marchandages et aux égoïsmes.
Résultat, le budget européen reste insuffisant, 1 % du PIB, pour faire face à la crise migratoire, à la révolution numérique, à la solidarité. Nous serons très attentifs aux propositions du groupe à haut niveau présidé par Mario Monti que nous recevrons avec la commission des finances en janvier prochain. (Applaudissements au centre et à droite)
M. Christian Eckert, secrétaire d'État . - Un mot sur la forme : le rapporteur général dit que la commission des finances a passé des heures à analyser le texte. Mais, le rôle d'un Sénat digne de ce nom est de formuler des propositions, de prendre des décisions, pas de rendre des rapports comme le CESE !
Mme Catherine Troendlé. - Le CESE appréciera !
M. Jean-Baptiste Lemoyne. - Nous ferons un projet de loi de finances rectificative cet été !
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. - Justement ! Nos concitoyens auraient aimé connaître vos propositions ! Comment ferez-vous 100 voire 110 milliards d'économie alors que les présidents de commission viennent de réclamer des crédits pour l'Anses, les agences de l'eau, l'AFITF, la Défense, la culture et j'en passe ? 500 000fonctionnaires en moins ? Mais où les prenez-vous ? Je ne vous ai guère entendu sur le prélèvement à la source...
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général. - Nous avons publié un rapport.
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. - Je l'ai lu. Les députés n'ont pas proposé la mensualisation obligatoire que vous défendiez.
J'ai entendu, avec un peu d'irritation, M. Delahaye dire que les dépenses de l'État progressaient. Nous ne nous rendons pas service avec de telles contrevérités : 303 milliards en 2013 contre 298,6 milliards en 2017, c'est une baisse de 4,4 milliards. Entre 2008 et 2012, l'augmentation moyenne des dépenses publiques a été de 3,1 % ; entre 2012 et 2017, de 1,3 % entre 2013 et 2017. Ne dites pas que le Gouvernement a fait exploser la dépense publique !
Le budget de l'État prend en charge les allègements de charges pour soutenir la sécurité sociale. En conséquence, le déficit de l'État se réduit moins vite. L'enjeu de fond est de savoir comment on assure le financement de notre sécurité sociale.
Monsieur Requier, les élus peuvent déjà opter pour le prélèvement à la source. Une année fiscale blanche serait contraire au principe d'égalité devant l'impôt.
Je partage l'analyse de Jean-Pierre Raffarin sur la situation internationale et ses dangers. Il a eu la courtoisie de souligner que les crédits de l'aide publique au développement ont augmenté de 400 millions d'euros. En revanche, j'ignore d'où il tire ses informations sur « le coût des facteurs ». La baisse du prix du pétrole est une donnée factuelle. Il se trouve que nos forces armées consomment beaucoup de kérosène et de gazole. La variation des tarifs explique la différence sur le budget de la défense.
Encore une fois, je regrette qu'une question préalable coupe court à la discussion budgétaire. On me reproche de ne pas accepter beaucoup d'amendements au Sénat. C'est la logique quand la majorité gouvernementale n'est pas identique à celle de votre assemblée... En revanche, je crois avoir toujours pris le temps de répondre à vos questions. Rendez-vous mardi ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain)
Prochaine séance, mardi 29 novembre 2016, à 14 h 30.
La séance est levée à 19 heures.
Jacques Fradkine
Direction des comptes rendus
Ordre du jour du mardi 29 novembre 2016
Séance publique
À 14 h 30
- Suite du projet de loi de finances pour 2017, adopté par l'Assemblée nationale (n° 139, 2016-2017)
Rapport de M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général, fait au nom de la commission des finances (n° 140, 2016-2017.) ;
Suite de la discussion générale.