Lutte contre la fraude sociale
Mme la présidente. - L'ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi visant à améliorer l'accès aux droits et à lutter contre la fraude sociale, présentée par M. Éric Doligé et plusieurs de ses collègues, à la demande du groupe Les Républicains.
Discussion générale
M. Jean-Noël Cardoux, auteur de la proposition de loi . - Nous n'avons pas le don d'ubiquité dans le Loiret. Éric Doligé, qui m'a téléphoné il y a une heure, a dû renoncer au train qu'il comptait prendre parce que l'A10 est inondée. Le suivant, qu'il a attrapé est tombé en panne. Il a fait marche arrière pour prendre sa voiture. Malheureusement, la N20 est bloquée par les poids lourds.
M. Philippe Dallier. - « Ça va mieux ! »
M. Jean-Noël Cardoux, auteur de la proposition de loi. - Il y a cinq minutes, il se trouvait porte d'Orléans. Peut-être parviendra-t-il à nous rejoindre pour la fin de ce débat.
M. Charles Revet. - Envoyez-lui un hélicoptère !
M. Jean-Noël Cardoux, auteur de la proposition de loi. - Je me substitue à lui en dernière minute.
Le texte a pour objectif d'améliorer l'accès aux droits et la lutte contre la fraude sociale. La commission a su conserver ses points forts, son texte correspond à l'esprit de notre travail. Certains de nos collègues en commission des affaires sociales trouvent surprenant, voire indécent que nous évoquions la fraude sociale. Depuis des mois pourtant, nous luttons contre la fraude quelle qu'en soit la forme : fraude à la TVA, fraude fiscale, fraude dans les transports. Plus il y a de fraude, plus il faut compenser fiscalement, avec les effets pervers qui s'ensuivent pour nos concitoyens.
Depuis quelque temps, la mission d'évaluation et de contrôle de la sécurité sociale (Mecss) que je préside travaille sur la lutte contre la fraude, aux prestations comme aux cotisations. Dans quelques semaines, il sera temps de présenter un texte global.
Dans nos collectivités, nous mesurons aisément les difficultés de lutter contre la fraude. Les outils de contrôle sont inexistants ; les délais empêchent de récupérer les sommes. On parle de 636 millions d'euros de fraude aux prestations en 2013, la réalité avoisine plutôt 2 à 3 milliards par an sur un total de 20 milliards, selon le rapport Tian.
M. François Marc. - D'où viennent ces chiffres ?
M. Jean-Noël Cardoux, auteur de la proposition de loi. - Les départements sont pris en tenaille par la hausse des allocations individuelles de solidarité et la baisse des dotations de l'État. En 2016, de nombreux conseils départementaux seront proches de la faillite, certains ne serviront le RSA que onze mois. Lutter contre la fraude, c'est les aider à maintenir les prestations versées à ceux de nos concitoyens qui sont en grande difficulté.
La courbe des dépenses de RSA suivant celle du chômage avec un décalage d'environ deux ans, nous pouvons être sûrs qu'elles vont encore augmenter. Or, comme l'indique Mme la rapporteure, le RSA est la plus fraudée des prestations sociales. Il nous revient de trouver des solutions pour réduire le montant des fraudes et indus.
Les conditions d'accès doivent être sécurisées : nous proposons que les droits ne soient ouverts que lorsque le dossier est complet. La période de résidence pour les étrangers communautaires sera portée à douze mois. Les bénéficiaires devront signer un contrat d'engagement. Les moyens de contrôle seront renforcés, et les conseils départementaux se verront reconnaître le même droit à l'information que les caisses d'allocations familiales (CAF).
La solidarité nationale est un élément constitutif de notre pacte républicain, mais elle implique des devoirs en contrepartie. Ce texte de justice et d'équité, qui apportera un peu d'air aux départements, devrait transcender les clivages politiciens : ceux qui pourfendaient naguère les propositions de M. Doligé de reporter l'application de la loi handicap ou de rendre les normes adaptables ne s'y sont-ils pas ralliés depuis ? (Applaudissements à droite)
M. François Marc. - L'ennemi, pour vous, c'est les pauvres !
Mme Corinne Imbert, rapporteure de la commission des affaires sociales . - Avec le RSA, notre pays revendique sa volonté de ne laisser personne au bord du chemin. Ce filet de sécurité, ce pilier de notre pacte républicain a été préservé pendant la crise, il faut s'en féliciter. Mais pour assurer sa soutenabilité, il nous faut relever deux défis. Celui de la crise des finances départementales, d'abord : entre baisse des dotations et hausse du reste à charge, le RSA pourrait ne plus être financé à la fin de l'année. La crise de la solidarité ensuite, qui met en péril la cohésion sociale. Il faut le réaffirmer, accompagner les plus fragiles est aussi important que de travailler au développement et au rayonnement de notre pays.
Ces deux défis, Éric Doligé les a relevés. Quand la ressource se fait rare, il faut dépenser mieux et dépenser juste. Car la solidarité nationale est un droit soumis à des conditions. Pour mieux lutter contre la fraude - à l'impôt, aux cotisations, aux prestations - nous devons adapter les moyens de contrôle et connecter les acteurs entre eux. Il ne s'agit nullement de stigmatiser (on le conteste à gauche) ou de faire la « chasse aux pauvres ».
Mme Laurence Cohen. - Si !
M. Éric Doligé. - Mais non !
Mme Corinne Imbert, rapporteure. - Il ne doit y avoir ni amalgame ni tabou. Les premiers à stigmatiser les bénéficiaires sont les fraudeurs, par leur comportement irresponsable et antirépublicain. Examinons ce texte pour ce qu'il est, non par ce qu'on veut lui faire dire.
M. Yves Rome. - C'est Marine Le Pen qui a écrit ce texte ! (Vives protestations à droite)
Mme Corinne Imbert, rapporteure. - Retirez vos propos.
Mme la présidente. - Poursuivez, madame la rapporteure.
Mme Corinne Imbert, rapporteure. - Je vous demande de prendre note des propos qui m'ont été adressés, madame la présidente.
Malgré quelques modifications substantielles, la commission a tenu à préserver l'esprit du texte. J'ai eu trois fils conducteurs. Garantir un juste accès au RSA, d'abord. La commission a souscrit au principe d'une demande complète pour l'ouverture des droits, de même qu'à l'élargissement des revenus pris en compte aux revenus du patrimoine détenu en France ou à l'étranger. En revanche, la commission n'a pas retenu la limitation du bénéfice du RSA à la première année d'activité pour les travailleurs indépendants, en raison des fortes variations auxquelles peuvent être soumis leurs revenus. La condition de résidence de douze mois nous a paru concilier de façon équilibrée le principe de libre circulation et celui selon lequel les personnes doivent s'assumer financièrement. Sans préjudice des possibilités de recours, les radiations prendront désormais effet immédiatement, et un délai de carence de six mois est créé avant toute nouvelle demande.
Deuxième fil conducteur : renforcer les moyens de contrôle des acteurs de terrain. Avec les bénéficiaires, les départements sont les premières victimes de la fraude sociale. Ils doivent être représentés au sein des comités opérationnels départementaux de lutte antifraude (Codaf) - c'est cependant du domaine réglementaire. La proposition de loi réaffirme la possibilité pour le conseil départemental de mettre en place une cellule de contrôle avec des agents aux pouvoirs renforcés. Elle ajoute ses agents de contrôle à la liste des personnes déliées du secret professionnel et leur étend le droit de communication.
Troisième axe : les contreparties, symboliques ou concrètes, à l'allocation versée. Au nombre des obligations des bénéficiaires du RSA figurera le respect d'une Charte des valeurs et principes de la République : la solidarité nationale ne doit pas être soumise qu'à des conditions de ressources ou de résidence, elle suppose que ses bénéficiaires s'engagent à respecter ces valeurs fondamentales.
La proposition de loi initiale prévoyait de soumettre le bénéfice du RSA à l'accomplissement de quelques heures de travail au service de la collectivité. J'y verrais plusieurs avantages : faire en sorte que le RSA ne soit plus considérée comme une charité mais une rétribution, faciliter la réinsertion, changer le regard de la société sur les bénéficiaires. Toutefois, la commission a relevé que l'on risquait de manquer de structures d'accueil, et que les départements pourraient se trouver débordés. Nous proposons donc que cette contrepartie citoyenne soit plutôt adossée aux aides facultatives du programme départemental de réinsertion. Le débat reste ouvert sur ce point.
La lutte contre la fraude sociale est un levier pour assurer la pérennité des allocations et continuer d'aider les plus fragiles. On est loin de la stigmatisation. (Applaudissements sur les bancs à droite ; M. Gérard Roche applaudit aussi)
Mme Ségolène Neuville, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l'exclusion . - Notre ordre social repose sur le respect de la loi, et la fraude doit être combattue. Mais ce n'est pas ce que propose ce texte qui, en l'état, pose de mauvaises questions et stigmatise ceux qui traversent une période difficile. (On le conteste à droite, on renchérit à gauche)
Cette proposition de loi, dans son titre, laisse croire qu'elle vise à améliorer l'accès aux droits et à lutter contre la fraude sociale. Il n'y est pourtant pas question d'accès au droit. Depuis 2012, le Gouvernement, lui, s'est attelé à cette question pour assurer dignité et protection aux plus démunis.
M. Philippe Dallier. - Ça se voit dans les sondages.
Mme Ségolène Neuville, secrétaire d'État. - Prenez l'exemple de la prime d'activité. Le RSA activité était demandé par moins d'un tiers de ceux qui y avaient droit. Nous avons simplifié le dispositif, modernisé les procédures puisque la demande peut désormais être déposée en ligne. Résultat, depuis le début de l'année, 2,5 millions de foyers bénéficient de la prime.
Vous, au contraire, faites le choix de stigmatiser les plus pauvres. (Protestations à droite) Sur plus de 715 milliards d'euros de dépenses sociales en 2013, 10 milliards étaient consacrés au RSA. Autrement dit, vous ciblez 1,4 % des dépenses sociales, c'est-à-dire les plus fragiles, par pure idéologie.
M. Éric Doligé. - Quelle tristesse !
Mme Ségolène Neuville, secrétaire d'État. - Vous ne vous attaquez d'ailleurs qu'à la fraude aux prestations, soit 747 millions d'euros en 2014, oubliant les 6,2 milliards de fraudes aux prélèvements obligatoires, les 18,5 à 22,9 milliards d'euros de pertes dues au travail dissimulé - ce sont les chiffres de la Cour des comptes pour 2012. C'est beaucoup plus que ce que coûtent le RSA, la CMUC et l'AME réunis, sur lesquels vous aimez tant vous acharner.
Mme Catherine Troendlé. - Qu'avez-vous fait contre cette fraude ?
Mme Ségolène Neuville, secrétaire d'État. - Quelles sont donc les propositions de votre famille politique sur le travail dissimulé ?
M. Daniel Chasseing. - Le travail au noir, c'est tout de même du travail !
Mme Ségolène Neuville, secrétaire d'État. - Le président du parti Les Républicains proposait récemment de supprimer les contrôles inopinés dans les entreprises ! C'est fermer les yeux sur cette fraude. Voilà votre programme...
Mme Catherine Troendlé. - C'est vous qui êtes au pouvoir !
Mme Ségolène Neuville, secrétaire d'État. - Depuis 2012, avec le plan pluriannuel de lutte contre la pauvreté, le Gouvernement soutient les plus démunis. 2,6 milliards d'euros de plus sont reversés chaque année aux 2,7 millions de ménages les plus modestes. Le taux de pauvreté a cessé d'augmenter en France depuis 2013, fait exceptionnel en Europe.
Ce texte laisse entendre que les bénéficiaires du RSA se complaisent dans leur situation. Vous voulez renforcer les sanctions, faciliter les suspensions, contraindre les allocataires à exercer une activité dite joliment « d'intérêt général ». Plusieurs départements ont déjà pris de telles initiatives, illégales. Quel est donc le but recherché ? S'agit-il de réinsertion par la contrainte ? De sous-emplois non payés au juste prix ? Votre proposition de loi prévoit la « possibilité » d'imposer cette contrainte. Comment les départements choisiront-ils ? Y a-t-il de bons et de mauvais bénéficiaires du RSA ? Cette logique est révoltante.
L'insertion est essentielle, le rapport Sirugue le montrait. Vous répondez par la sanction là où nous devrions nous unir pour ramener à l'emploi ceux qui en sont sortis.
Quant à votre charte, quoi de plus stigmatisant ? Pourquoi contraindre ceux qui ont connu un accident de la vie, et eux seuls, à proclamer leur attachement aux principes républicains ? La République nous unit tous, que nous soyons pauvres ou riches ! Votre approche favorise une société fragmentée. Si l'on devait retirer leurs droits à tous ceux qui ne respectent pas l'égalité entre hommes et femmes, par exemple...
La proposition de loi accorde de nouvelles compétences aux agents des conseils départementaux alors que les organismes de sécurité sociale assurent déjà une mission de contrôle. Pourquoi ces doublons, facteur d'inefficacité ? Je suis une fervente défenseure de la décentralisation, mais certaines règles doivent être définies au niveau national. Nous préférons, pour notre part, renforcer des organismes sociaux. En 2011, ont été détectées 10 milliards de fraudes ; en 2013, 141 milliards ; en 2015, 247 milliards. Ce n'est pas parce que nous sommes un Gouvernement de gauche que nous ne luttons pas contre la fraude ! C'est en améliorant nos stratégies, en croisant les fichiers, en recourant à des techniques modernes que nous obtenons ces résultats.
Vous l'aurez compris, le Gouvernement n'est favorable ni au contenu, ni à l'esprit de ce texte. On voit bien ici que la droite et la gauche, ce n'est pas pareil ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain ; rires à droite)
M. Philippe Dallier. - Tout ça pour ça !
M. Éric Doligé. - Il n'y a que M. Macron qui pense que c'est pareil.
Mme Ségolène Neuville, secrétaire d'État. - Vous dressez les citoyens les uns contre les autres. La gauche, elle, rassemble et défend la solidarité afin de donner à tous les moyens de s'émanciper. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain ; M. Alain Bertrand applaudit aussi ; rires à droite)
M. Philippe Dallier. - C'est de l'exorcisme !
Rappel au Règlement
M. Alain Milon, président de la commission des affaires sociales . - Rappel au Règlement. Selon l'article 36, alinéa 10 de notre Règlement, les interpellations de collègue à collègue sont interdites. J'en appellerai à M. le président du Sénat au sujet de la mise en cause personnelle dont Mme Imbert a fait l'objet tout à l'heure. (Applaudissements à droite)
Discussion générale (Suite)
Mme Laurence Cohen . - Cette proposition de loi repose sur deux postulats : les collectivités territoriales n'auraient plus les moyens de mener leur politique sociale, et les bénéficiaires du RSA seraient, pour beaucoup sinon tous, des fraudeurs. Qui donc ici a voté la loi NOTRe, qui a mis à mal les territoires !
Plusieurs voix à droite. - Pas nous !
Mme Laurence Cohen. - Qui donc a voté les baisses de dotations ?
Plusieurs voix à droite. - Pas nous !
Mme Laurence Cohen. - Seul le groupe CRC a voté contre avec une partie des écologistes.
Ce texte cible les bénéficiaires du RSA, ceux qui doivent vivre avec 500 euros par mois. Qui d'entre nous dans l'hémicycle y parviendrait ? Combien de personnes fraudent au RSA et pour quelle somme ? Le taux de recours au RSA est de 50 % seulement. Combien d'économies réalisées sur le dos des plus fragiles ! Pourquoi ne pas proposer une simplification du dispositif ? Les fraudes prétendues sont souvent dues à des erreurs ou des omissions... Pourquoi ne pas cibler aussi la fraude patronale ? Cette proposition de loi fait la chasse aux pauvres... au nom des principes du Comité national de la Résistance. Revoyez votre histoire ! Les caisses de l'État n'ont jamais été plus vides qu'après la deuxième guerre mondiale. Mais l'État-providence, porté par la croissance, est moteur de la croissance.
Mélangeant droit social, pénal et de la nationalité, vous stigmatisez nos concitoyens démunis pour donner des gages à la droite la plus extrême. (Marques de lassitude à droite) Votre démonstration, d'ailleurs, est pour le moins chancelante : le rapport Tian parlait tantôt de 540 à 800 millions d'euros de fraude aux allocations, tantôt de 4 milliards.... Les chiffres sont fantaisistes. La fraude aux cotisations pratiquée par les entreprises coûte, elle, entre 8,4 et 14,4 milliards d'euros selon le Conseil des prélèvements obligatoires. Les entreprises en font un élément de la concurrence déloyale. Mais vous n'avez pas voulu de notre proposition de loi qui imposait la publicité de leurs comptes pays par pays, vous n'avez pas voulu demander à la justice d'examiner s'il y avait lieu de poursuivre le PDG d'une grande banque pour avoir dissimulé ses activités dans un paradis fiscal... Vous préférez poursuivre des gens qui perçoivent 460 millions d'euros par mois.
Cette proposition de loi est scandaleuse. Nous nous y opposons avec vigueur. Ce n'est pas rassembler que de faire de telles propositions. (Applaudissements sur les bancs des groupes communiste républicain et citoyen, socialiste et républicain et écologiste)
M. Yves Rome. - Un mot, madame la présidente, en réponse au rappel au Règlement de M. le président de la commission. Mes propos ne s'adressaient pas à la rapporteure, ils portaient sur le contenu du texte. (On en doute à droite)
M. Patrick Chaize. - Un peu facile...
Mme Evelyne Yonnet . - Nous sommes fermement opposés à ce texte. Même si son titre a changé, nous contestons son fondement. Vous partez du principe que tous les allocataires sont des fraudeurs. La fraude au RSA représente 160 millions d'euros contre vingt fois plus pour la fraude fiscale.
La fraude augmenterait ? Les CAF disent que la hausse des chiffres est due à l'amélioration de leurs outils de détection. D'ailleurs, 7 % seulement des fraudes au RSA sont liées à une fausse déclaration ou à une escroquerie : la plupart du temps, elles s'expliquent par les difficultés extrêmes que rencontrent les allocataires.
Bien sûr, nous devons lutter contre la fraude, mais remettre les conseils départementaux au centre des contrôles est difficile à mettre en oeuvre. Vous dites vous-mêmes qu'ils manquent de moyens ! La CAF exerce déjà son contrôle, en coopération avec d'autres administrations dans le cadre des Codaf. Mieux vaudrait renationaliser le RSA.
Il n'y a rien dans ce texte pour lutter contre le non-recours, alors que 30 à 35 % des bénéficiaires potentiels ne demandent pas le RSA, faute d'informations.
Avec ce texte stigmatisant, inquisiteur, vous faites la chasse aux plus démunis et le jeu des extrêmes, qui contestent les valeurs de solidarité de notre société républicaine. Pour nous, il n'est pas question d'y renoncer : le groupe socialiste et républicain votera contre. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain)
Mme Aline Archimbaud . - La lutte contre la fraude est un sujet récurrent. De fait, la fraude contourne la loi et réduit le budget de l'État. Cependant, elle donne souvent lieu à des fantasmes. Sous l'appellation de « fraude sociale », on confond le non-paiement des cotisations et la fraude aux prestations. Selon un rapport de la Cour des comptes, le premier a coûté 20 milliards d'euros en 2013, la seconde 141 millions... La « fraude des pauvres est une pauvre fraude », dit le Conseil d'État. À l'inverse, le taux de recouvrement de la fraude fiscale est faible, 50 %, celui de la fraude aux cotisations extrêmement faible, entre 5,9 et 7,3 % en 2012, alors que 95 % des prestations versées indûment sont recouvrées.
La proposition de loi se donne aussi pour objectif d'améliorer l'accès aux droits... sans comporter aucune mesure à cet effet. C'est pourtant un problème préoccupant : en 2011, 35 % des personnes éligibles au RSA ne le percevaient pas, et François Chérèque, dans son rapport de 2014, chiffrait ce non-recours à 5,4 milliards d'euros par an. Ce texte ne ferait qu'aggraver les choses, les associations nous le disent. Il ne prévoit rien non plus pour améliorer l'accompagnement des allocataires.
En cette période d'épreuves, notre pays a besoin de paroles, de propositions et d'actions de rassemblement. Nous voterons contre. (Applaudissements à gauche)
M. Michel Amiel . - Alors que les journaux nationaux rapportent que certains conseils départementaux demandent aux allocataires du RSA de leur fournir leurs relevés bancaires, je m'interroge sur cette proposition de loi, non par angélisme : loin de moi l'idée de ne pas vouloir lutter contre la fraude.
Frauder, c'est voler la société ; déchirer le pacte social. Mais c'est faire preuve d'amnésie que de lutter contre la fraude aux allocations alors que la fraude aux cotisations patronales explose, selon la Cour des comptes, pour représenter un manque à gagner jusqu'à 20 milliards d'euros par an...
M. Hubert Falco. - Que fait le Gouvernement ?
M. Michel Amiel. - La proportion réelle de fraudeurs aux aides sociales est estimée entre 2,9 % et 3,7 %, mais varie fortement d'une allocation à une autre.
La part exacte du RSA dans le montant de la fraude aux allocations sociales par rapport aux autres allocations (allocation équivalent retraite, allocation adulte handicapé, allocation de veuvage...) n'est pas précisée mais le coût total du RSA est estimé à 9,3 milliards d'euros en 2014...
Je m'interroge donc : pourquoi pas un texte global sur la fraude plutôt que de faire la chasse aux bénéficiaires du RSA, d'autant que 35 % des personnes éligibles au RSA socle n'y ont pas recours ? La fraude au RSA tiendrait d'abord à son caractère déclaratif. Dans ce cas, pourquoi pas un guichet unique ? Ce serait dans l'esprit libéral - c'est loin d'être péjoratif dans ma bouche - du revenu de base que certains appellent le revenu d'existence. Des pays modernes comme la Suède l'appliquent.
Pourquoi pas une renationalisation du RSA, l'ordonnateur (la CAF), n'étant pas le payeur (le département) ? Ou encore un imprimé unique, comme l'a proposé M. Cardoux en commission ?
Avons-nous si peur de la pauvreté que vous avez peur des pauvres ? Les travaux d'intérêt général sont d'essence pénale. Condamnons-nous les gens pour leur pauvreté ?
M. Rémy Pointereau. - Les faire travailler...
Mme Catherine Troendlé. - ... ce n'est pas les condamner !
M. Michel Amiel. - C'est bien le pauvre que l'on stigmatise (on le conteste à droite), chose impensable selon Pierre-Yves Madignier, ancien président d'ATD Quart Monde : ces personnes, les plus pauvres souhaitent contribuer à l'effort national, mais via l'emploi ! Les gens veulent qu'on les aide à travailler. (Applaudissements sur les bancs des groupes RDSE et socialiste et républicain) Les « sans-dents », passez-moi l'expression, ont les crocs. (On apprécie la formule, notamment à droite) Ne nous trompons pas de combat, ne divisons pas davantage la société française ! (Applaudissements sur les bancs des groupes RDSE, socialiste et républicain, écologiste, communiste républicain et citoyen, ainsi que sur la plupart des bancs du groupe UDI-UC)
M. Gérard Roche . - Ma première réaction à la lecture de ce texte a été contrastée. Je connais trop M. Doligé pour supposer qu'il veuille stigmatiser les bénéficiaires du RSA et Mme Imbert a fourni un travail de qualité.
Certes, la fraude existe. Président de la commission du RMI, j'ai vu des bénéficiaires arriver en décapotable sportive de luxe, vraisemblablement financée avec de l'argent de l'économie souterraine. Mais ces cas sont loin d'être la majorité, et ce n'est pas parce que le métro tombe en panne qu'on supprime le métro ! (On apprécie, particulièrement à gauche)
Ne confondons pas le RSA et l'assistanat, fustigé par certains comme « le cancer de notre société » - je suis sénateur de Haute-Loire (Même mouvement). Que deviendraient ces femmes divorcées, ces femmes seules, ces gens sans travail sans le RSA ? Personne ne choisit d'être pauvre. Leur demander un travail d'intérêt général, c'est vouloir leur faire rembourser une dette envers la société. Or ces gens-là sont des exclus. Nul ne sait ce qui se passe dans une maison quand les volets sont fermés. Médecin puis président de conseil départemental, je sais qu'il existe un fossé entre le monde du travail et l'exclusion. À nous de construire des passerelles, des ponts.
Je ne nie pas qu'il existe des fraudeurs. Nous devons les sanctionner car ils discréditent les prestations sociales. En revanche, demander à tous les bénéficiaires de signer une charte, c'est les stigmatiser.
Le conseil départemental doit avoir accès aux informations mais n'en faisons pas un juge d'instruction. Il doit être chef de file et pourvu des moyens adéquats. Depuis longtemps, je me bats avec M. Doligé, contre les gouvernements de deux majorités successives au moins, pour un mode de financement pérenne. Espérons que l'Association des départements de France (ADF) arrive à un accord.
Ne voulant abandonner personne sur le bord de la route, la plupart de mes amis du groupe UDI-UC et moi-même ne voterons pas cette proposition de loi. (Applaudissements sur la plupart des bancs des groupes UDI-UC, RDSE, écologiste, socialiste et républicain et communiste républicain et citoyen)
M. René-Paul Savary . - (Vifs applaudissements à droite) Cette proposition de loi a donné lieu à des postures caricaturales. (Marques d'amusement à gauche) M. Doligé veut lutter contre la fraude fiscale... (Rires et interruptions à gauche) Je voulais dire contre la fraude sociale ! Le temps viendra bientôt où nous parlerons de la fraude fiscale.
Louis Gallois, président de la Fédération nationale des associations d'accueil et de réinsertion sociale (Fnars), l'a bien vu : ce texte crée des mesures de dissuasion. Aussi, en accord avec la rapporteure et M. Doligé, j'ai déposé un amendement pour modifier l'intitulé du texte et substituer « versement indus des prestations » au terme de « fraude sociale ». (Exclamations sur les bancs socialistes) Appelons un chat un chat ! Cette proposition de loi est de bon sens. Cette fraude serait due à 60 % de mauvaises déclarations, à 20 % de déclarations fausses et à 10 % d'indus gravement frauduleux. Nous demandons donc plus de contrôles, et de contrôles a priori. On est loin de la chasse aux pauvres ! (Quelques applaudissements à droite ; exclamations sur les bancs du groupe communiste républicain et citoyen)
Le pire, pour les conseils départementaux, est de ne rien pouvoir proposer aux chômeurs. Alors, ne critiquons pas trop vite ceux qui proposent des mesures. Tout le monde veut faire de l'accompagnement social, mais comment le financer ? Il paraît que « ça va mieux », profitons-en pour renforcer ses moyens et, comme je l'ai proposé dans une proposition de loi, renforcer l'allocation de rentrée scolaire et la Prestation d'accueil du jeune enfant (Paje).
Poursuivons ce débat dans la sérénité. Le système a atteint ses limites, voilà le constat que pose ce texte. Il faut améliorer les échanges d'informations. Une meilleure coordination avec le Répertoire national commun de protection sociale (RNCPS) y contribuera. Le numéro d'identifiant, non signifiant qui garantit la confidentialité, est une solution.
Madame la ministre, puisque la croissance est là, rapprochons du monde du travail ceux qui en sont loin ! (Applaudissements à droite ; Mme Françoise Férat et M. Yves Détraigne applaudissent aussi)
M. Yves Daudigny . - Ce texte serait « profondément remanié sur la forme », selon la rapporteure. De fait, il a été complètement réécrit tant il était confus. Sa philosophie demeure : réduire l'accès au RSA, soumettre le bénéficiaire à l'exécution de travaux d'intérêt général et au respect des valeurs républicaines et donner au conseil départemental le droit de suspendre l'allocation avant que l'intéressé soit entendu. Si vous aviez voulu réellement « améliorer les droits », vous vous seriez préoccupés d'augmenter le taux de recours. On sait qu'un tiers des bénéficiaires potentiels ne demande pas le RSA.
L'échange d'informations s'est amélioré avec la signature de conventions entre CNAF et police et gendarmerie, ainsi qu'avec le ministère des affaires étrangères, pour une typologie plus fine des fraudes. Vous voudriez créer une cellule départementale de plus ? En quoi cela serait-il synonyme d'économies ?
Ce texte est hors de propos, à contretemps alors qu'un rapport remis au Premier ministre le 18 mai, suivant les recommandations de la Cour des comptes, propose le regroupement des minima sociaux autour de trois grandes allocations et une harmonisation des modalités de prise en compte des ressources pour la liquidation des droits.
Au mieux contre-productive, au pire inutile, en tous les cas à contretemps et hors de propos à l'heure de la réforme d'ensemble des minima sociaux, quelles sont donc les raisons de l'auteur et des signataires de cette proposition ? On lit dans l'exposé des motifs que notre système de protection sociale serait « à bout de souffle » et que nos marges de manoeuvre financières seraient « de plus en plus réduites ». Faux ! La publication des comptes des caisses à la mi-mars démontre que nos finances sociales connaissent leur meilleur situation depuis douze ans, et ce, sans nouveau déremboursement ni réduction des prises en charge.
Quant à la « générosité » de notre système de protection sociale, hérité du Conseil national de la Résistance, invoquée pour justifier le recours à des « contreparties », je rappelle qu'en 2011, le père du RSA, Martin Hirsch, affirmait dans cet hémicycle que le RSA visait précisément à briser avec l'assistanat. De lui toujours : « on n'a pas le droit de faire croire n'importe quoi aux Français ; même en période électorale, tous les coups ne sont pas permis ».
On ne saurait mieux dire... (Applaudissements à gauche)
M. Jean-Paul Fournier . - (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains) La solidarité est le signe le plus noble de la modernité et de la maturité des sociétés occidentales.
La France peut s'enorgueillir d'avoir mis en place un système de solidarité généreux pour ceux qui sont en souffrance, depuis 1945 sous l'égide du général de Gaulle. Il énonce les fondements de notre pacte républicain. Il limite les effets néfastes de la détérioration économique, comme on l'a vu lors de la crise de 2008. Il doit cependant être réformé pour que nous fassions vraiment oeuvre de solidarité : rendons-le simple, accessible et, surtout, irréprochable. Sans cela, les ayants droit passeront pour des profiteurs. C'est ainsi que nous lutterons contre le populisme. Aussi je soutiens cette proposition de loi, dont je remercie M. Doligé, améliorée par la rapporteure, Mme Imbert.
Cette proposition de loi transpose à la fraude sociale ce qui a montré son efficacité dans la fraude fiscale, la « flagrance ».
Elle porte de trois à douze mois la condition de résidence pour les étrangers communautaires.
Nos compatriotes, contribuables et cotisants, ne tolèrent pas que des individus, qui combattent le pacte social et républicain, soient bénéficiaires de la solidarité nationale qu'ils récusent et rejettent par ailleurs : qui pourrait accepter qu'elle bénéficie à ceux qui sont partis combattre sous le drapeau de Daech ? La signature de la charte renforcera la conscience de la citoyenneté. Même analyse en ce qui concerne ces militants d'extrême gauche qui s'en prennent avec une violence inouïe aux forces de l'ordre de la République...
M. Christian Favier. - Amalgame !
M. Jean-Paul Fournier. - Ainsi la suspension, de manière cadrée, par le président du conseil départemental, de cette allocation aux personnes qui ne respectent pas la charte des droits et des devoirs du citoyen, est une bonne initiative pour renforcer notre pacte républicain et redonner confiance aux citoyens.
M. Roland Courteau. - Eh bien !
M. Jean-Paul Fournier. - Le partage des données est central dans la lutte contre la fraude. Le président du conseil départemental, chef de file en matière de solidarité depuis la loi NOTRe, doit disposer des éléments pour assurer un contrôle et, pourquoi pas, bientôt un dossier unique.
Ayant été vingt ans conseiller général, je puis témoigner que les agents du département et en particulier les assistantes sociales, en première ligne sur le RSA, attendent beaucoup du législateur.
Je renouvelle mon adhésion à cette proposition de loi. (Applaudissements à droite)
La discussion générale est close.
Discussion des articles
ARTICLE PREMIER
M. Jean Louis Masson . - (Exclamations sur les bancs du groupe communiste républicain et citoyen) Cet article est tout à fait pertinent. Il n'y a aucune raison que, nous autres Français, accordions largement une aide à des Européens qui n'en offrent pas sur un plateau d'argent aux Français résidant sur leur territoire... La France ne doit pas attirer les profiteurs ! (Exclamations indignées sur les bancs du groupe communiste républicain et citoyen)
Souvenez-vous la petite Yougoslave expulsée que M. Hollande avait voulu faire revenir en téléphonant à sa famille... (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et républicain) Son père avait affirmé devant les caméras qu'il avait choisi la France parce que notre pays offrait plus d'aide que l'Italie. Un peu de bon sens !
Mme Nicole Bricq. - Oh, votre bon sens...
M. Jean-Louis Carrère. - Révisez vos cartes, la Yougoslavie n'existe plus !
Mme Laurence Cohen. - Et M. Masson serait polytechnicien...
M. François Marc . - « Le Sénat se trompe de combat », voilà les gros titres des journaux sur le débat qui nous occupe cet après-midi. Chers collègues de droite, êtes-vous certains de vouloir ainsi engager l'image de notre institution ? La Fnars, qui représente 900 000 personnes accueillies et 75 000 places d'accueil, a signé avec ATD Quart Monde, et Emmaüs France dont on connaît la philosophie, un communiqué pour nous inciter à renoncer. Il est encore temps de mettre fin à cette discussion, de retirer ce texte, pour l'image du Sénat ! (Applaudissements à gauche)
Mme Catherine Troendlé. - Cela n'a rien à voir avec l'image du Sénat !
M. Alain Milon, président de la commission . - Le Sénat ne se trompe pas de débat. Mme Yonnet a rappelé que la fraude fiscale représentait plusieurs milliards d'euros alors que la fraude sociale représente 160 millions. Les petites rivières font de grands fleuves. Ce n'est pas anodin quand les dotations aux collectivités territoriales se réduisent. La commission des affaires sociales a engagé une réflexion globale sur tous les types de fraude.
M. Michel Vergoz. - Ne nous reprochez pas vos propres turpitudes !
M. Daniel Chasseing . - Tout le monde défend le RSA et l'accompagnement social. La preuve, les travaux d'utilité visent la réinsertion par l'activité progressive. Nous sommes de bonne foi ; Mme Imbert a la fibre sociale, croyez-moi ! (Applaudissements à droite)
Mme Élisabeth Doineau . - Devons-nous donner ce spectacle de division alors que nous proclamons notre volonté commune de favoriser l'insertion ?
M. Jean-Louis Carrère. - Exactement !
Mme Élisabeth Doineau. - Le troisième alinéa de l'article premier précise que le dossier doit être complet pour que le RSA soit accordé. C'est déjà le cas dans la Mayenne ! Et si la famille en a besoin, nous effectuons une avance. Faut-il faire porter sur les demandeurs la difficulté des départements à instruire les dossiers ? Je ne le crois pas. Aussi, je voterai l'amendement de M. Roche supprimant l'article premier. (Applaudissements au centre et à gauche)
M. Michel Vergoz . - Monsieur Chasseing, on peut commettre des erreurs de bonne foi. À La Réunion, le taux de bénéficiaires du RSA est de 18 % contre 2 à 3 % en métropole. L'affaire me touche de très près. Je m'exprime avec mon coeur. Disons-le : le RMI a été un échec, le RSA aussi.
Mon sentiment : les ultralibéraux lancent les premiers coups de boutoir contre le RSA pour fragiliser les bénéficiaires du RSA jusqu'à l'auto-culpabilisation. Demain, il n'y aura ni RSA, ni allocation logement, ni allocation de rentrée scolaire...
M. Roland Courteau. - Ça promet !
M. Michel Vergoz. - Ce sera la prestation unique réduite à rien. Il est temps de choisir son camp : celui où l'on veut redonner sens au beau mot de solidarité et revaloriser l'autre ! (Applaudissements à gauche)
M. Jean-Louis Carrère. - L'autre se prépare pour le Congrès des maires !
M. Éric Doligé . - Il n'y a aucune intention de stigmatiser dans ce texte. En revanche, j'ai entendu des propos stigmatisants pour les auteurs de cette proposition de loi. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains)
La fraude au RSA serait réduite ? Les départements, depuis des années, se battent pour financer les allocations.
Mme Nicole Bricq. - Ce n'est pas le sujet !
M. Jean-Louis Carrère. - Grosse ficelle !
M. Éric Doligé. - Les fraudes évidentes représentent des centaines de millions pour les départements et c'est beaucoup ! (Applaudissements à droite)
M. François Fortassin . - C'est l'honneur des conseils départementaux qui ont succédé aux conseils généraux - et j'allais dire, de tous, puisque leurs élus qui mènent ces actions, ont tous du coeur - de ne pas laisser les plus démunis au bord du chemin.
M. Roland Courteau. - Très bien !
Mme Catherine Troendlé. - Tout le monde est d'accord.
M. René-Paul Savary. - Soit.
M. François Fortassin. - Soyons attentifs au choix des termes, car celui-ci, en revanche, nous distingue : la fraude est sociale, l'optimisation est fiscale... (Vifs applaudissements sur les bancs des groupes RDSE et communiste républicain et citoyen) De fait, aucun cabinet d'avocats ne propose ses services pour organiser la fraude « sociale ». (Applaudissements sur la plupart des bancs à gauche)
Mme la présidente. - Amendement n°9, présenté par Mme Cohen et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
Rédiger ainsi cet article :
Au premier alinéa de l'article L. 243-4 du code de la sécurité sociale, les mots : « un an » sont remplacés par les mots : « deux ans ».
M. Dominique Watrin. - Ramenons ici le débat aux faits, sans revenir sur les propos précédents. Selon le rapport de l'Acoss, 50 000 contrôles sur 80 000 dans les entreprises donnent lieu à un redressement. Première cause : très souvent, les allègements dits Fillon sont surestimés. Dans les branches les plus touchées (BTP, gardiennage, hébergement, nettoyage, services aux entreprises) le montant moyen du redressement est de quelque 30 000 euros et peut aller jusqu'à près de 65 000 euros. Le secteur du gardiennage et de la sécurité privée, qui a fait l'objet de 500 contrôles aléatoires, requiert une forte surveillance. Il faudrait néanmoins six ans pour contrôler toutes les entreprises concernées, le secteur connaissant un taux de fraude de 29 %. Telles sont les réalités de la lutte contre la fraude aux cotisations. (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste républicain et citoyen)
Mme Corinne Imbert, rapporteure. - Lutter contre la fraude aux cotisations sociales est un objectif louable mais la mesure ne trouve pas sa place dans ce texte. L'avis est défavorable.
Mme Laurence Cohen. - Facile !
Mme Ségolène Neuville, secrétaire d'État. - Bon objectif mais le moyen proposé - porter à deux ans la durée de recouvrement par l'Urssaf - ne sera peut-être pas efficace. Réfléchissons-y d'ici le projet de loi de financement de la sécurité sociale. Retrait ?
M. Dominique Watrin. - D'accord.
L'amendement n°9 est retiré.
Mme la présidente. - Amendement n°1, présenté par M. Roche.
Alinéa 3
Remplacer cet alinéa par quatre alinéas ainsi rédigés :
2° L'article L. 262-18 est ainsi modifié :
a) Les mots : « du dépôt de la demande » sont remplacés par les mots : « à laquelle la demande est complète » ;
b) Est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« Toutefois, le président du conseil départemental peut décider, à titre exceptionnel et sur demande de l'organisme qui a reçu la demande, que le droit est ouvert à la date de dépôt de la demande, même incomplète. »
M. Gérard Roche. - Le président du conseil départemental doit pouvoir ouvrir le droit au RSA malgré le caractère incomplet de la demande, si cela est nécessaire.
Je suis contre ce texte, je l'ai dit. Mais s'il était adopté, je préférais l'article premier dans sa version initiale.
Mme Corinne Imbert, rapporteure. - La commission des affaires sociales ne veut pas d'une dérogation qui affaiblirait la règle : rejet. L'objectif du texte est d'allouer le RSA à ceux qui en ont besoin sur le fondement de critères stricts. Quid si les pièces fournies ultérieurement excluent l'éligibilité ?
Mme Ségolène Neuville, secrétaire d'État. - J'aurais donné un avis favorable à un amendement de suppression...
L'amendement n°1 est retiré.
Après une épreuve à main levée déclarée douteuse, l'article premier, mis aux voix par assis et levé, n'est pas adopté.
(Applaudissements à gauche)
La séance est suspendue à 16 h 35.
présidence de M. Gérard Larcher
La séance reprend à 16 h 45.