SÉANCE

du mardi 3 février 2015

58e séance de la session ordinaire 2014-2015

présidence de M. Jean-Claude Gaudin, vice-président

Secrétaires : M. Jean Desessard, Mme Valérie Létard.

La séance est ouverte à 09 h 30.

Le procès-verbal de la précédente séance, constitué par le compte rendu intégral publié sur le site internet du Sénat, est adopté sous les réserves d'usage.

Questions orales

M. le président.  - L'ordre du jour appelle dix-neuf questions orales.

Couverture mobile du territoire (I)

M. Pierre Médevielle .  - Ma question n'est pas très originale mais récurrente. La couverture en téléphonie mobile est très insuffisante dans le sud du département de Haute-Garonne, comme dans les Hautes Pyrénées, les Pyrénées orientales ou les Pyrénées atlantiques.

Il est souhaitable que le gouvernement fasse pression sur les opérateurs de téléphonie mobile, afin que l'on raisonne en pourcentage du territoire couvert et non en pourcentage de la population. Les territoires enclavés et éloignés des pôles d'activités sont pénalisés : l'accès aux télécommunications est un facteur indispensable à leur développement économique et touristique.

Cette carence, inadmissible, pose de sérieux problèmes pour l'organisation des secours et les soins médicaux d'urgence, notamment en montagne.

Quelles sont les mesures que peut prendre le gouvernement, afin de mettre en place une couverture sinon intégrale, du moins meilleure du territoire ?

Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique, chargée du numérique .  - Avec France Très Haut Débit, le gouvernement a lancé un plan ambitieux pour déployer de nouveaux réseaux fixes d'accès à internet. Ce déploiement rend encore plus criant les défauts de couverture du réseau de téléphonie mobile. La colère de nos concitoyens est légitime.

Aucun territoire ne doit être oublié, afin que les territoires ruraux ne soient pas pénalisés. Notre couverture mobile est plutôt meilleure que celle de nos voisins : fin 2013, les opérateurs couvraient 99,9 % de la population en 2 G et plus de 99 % en 3 G. Mais ces chiffres ne correspondent pas au ressenti, les usagers étant sensibles aux coupures et aux pannes. Le président de l'Arcep entend travailler à de nouveaux indicateurs, plus représentatifs de la réalité.

Rien n'avait été fait depuis 2008. J'ai relancé l'action du gouvernement avec l'objectif de couvrir les 170 communes sans aucune couverture mobile ; répondre aux besoins non seulement des centres bourgs mais aussi des zones rurales ; offrir un accès à l'internet mobile en 3 G dans les territoires ruraux. Nous travaillons avec l'Arcep, les collectivités territoriales et les opérateurs pour couvrir les zones grises en 3 G.

M. Pierre Médevielle.  - Je suis ravi que le gouvernement ait pris la mesure du problème, du décalage entre le taux de couverture affiché par les opérateurs et la réalité vécue par nos concitoyens.

Couverture mobile du territoire (II)

Mme Gisèle Jourda .  - Ma question porte sur le même sujet. Depuis 2004, de nombreuses initiatives départementales, régionales et intercommunales ont permis de résorber la majorité des zones blanches dans l'Aude. Je salue l'investissement du conseil général dans le programme national. Le premier rapport du comité interrégional pour le développement et l'aménagement des Pyrénées a identifié dix-sept communes en zone blanche en 2012. Mais, en vérité, une quarantaine, sinon plus, de communes sont concernées.

Le syndicat audois d'énergies a été chargé d'achever le programme départemental de résorption des zones blanches. La réalisation des infrastructures de téléphonie mobile est suspendue à l'acceptation des opérateurs. À Marquein, les travaux d'alimentation électrique du site ont été engagés et permettront de couvrir treize autres communes, mais, à ce jour, les négociations avec SFR n'ont pas abouti.

Le défaut de couverture en téléphonie mobile est d'autant plus problématique que la distribution de la téléphonie fixe est régulièrement déficiente, surtout dans l'arrière-pays rural. L'absence d'entretien des lignes, pour ne pas dire leur abandon, provoque très régulièrement des coupures prolongées, parfois de trois semaines, qui, dans les secteurs ruraux, peut mettre en danger la vie d'autrui, notamment en cas d'accident, ou pour les personnes âgées maintenues à domicile. Disposer de moyens élémentaires de communication est devenue un facteur incontournable de développement et de sécurité.

Quelles mesures entendez-vous prendre pour que les opérateurs téléphoniques mettent un terme à ces situations et répondent enfin à leurs obligations ?

Lors des Assises de la ruralité, Mme Pinel a annoncé un plan pour la résorption des zones blanches et grises, dont le détail doit être connu courant février. Nos attentes sont grandes.

Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique, chargée du numérique .  - Le gouvernement entend les attentes des citoyens et a fait du numérique une de ses priorités. Le plan France Très Haut Débit a été engagé. Il faut aussi entretenir le réseau fixe et s'interroger sur la qualité du réseau mobile, alors que le ressenti des citoyens ne correspond pas aux statistiques des opérateurs.

Orange, prestataire du service universel, doit respecter un cahier des charges, qui induit l'entretien du réseau. Le réseau se dégrade, le gouvernement comme l'Arcep ont été alertés. Le régulateur a lancé deux enquêtes administratives en mai 2014 ; à leur suite, Orange s'est engagé le 28 novembre à respecter un plan d'amélioration de la qualité de service sur le réseau fixe, avec des moyens supplémentaires pour les unités d'intervention, une anticipation des dégradations futures et un renforcement de l'information des collectivités territoriales en cas de défaillance, notamment en période de crise. Des lignes dédiées pour les élus locaux ont été mises en place - encore faut-il qu'elles fonctionnent... Je serai vigilante pour que ce plan d'amélioration de la qualité se mette en oeuvre.

En parallèle, un nouveau programme de couverture en téléphonie mobile est en cours d'élaboration. Je souligne l'engagement de votre département mais il ne peut agir seul. Mon programme vise à couvrir les 170 communes non couvertes en 2 G, à répondre aux manques évidents du précédent programme de résorption des zones blanches et à faire en sorte que l'objectif de couverture en 3 G de 3 900 communes, qui devait être atteint fin 2013, le soit le plus rapidement possible. Le gouvernement et l'Arcep seront attentifs à ce que les opérateurs respectent leurs engagements, notamment dans l'Aude.

Mme Gisèle Jourda.  - Merci. Il faut prendre en compte non seulement les communes identifiées par l'Arcep, mais toutes les communes non couvertes.

Chancre coloré

M. Roland Courteau .  - Le chancre coloré a déjà touché plusieurs milliers de platanes parmi les 40 000 qui longent le canal du Midi entre Toulouse et Sète. Cette maladie étant très contagieuse, près de 4 000 arbres ont été abattus en 2014, 10 000 depuis 2011. Dès lors, en de nombreux endroits, la voûte végétale du canal du Midi, inscrit par l'Unesco au patrimoine de l'humanité, a disparu, tandis que le champignon continue de progresser ailleurs.

Depuis plusieurs mois, une solution alternative à l'abattage est étudiée, la micro-injection de fongicide dans les troncs. La DGAL est favorable au principe. Un protocole a été soumis à l'Anses le 20 octobre 2014. Nous attendons toujours le feu vert du ministère de l'agriculture... Il devient urgent de lancer cette expérimentation sinon il n'y aura plus d'arbres à sauver... Oui ou non, le ministère de l'agriculture donnera-t-il rapidement son feu vert ?

Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique, chargée du numérique .  - Je vous prie d'excuser M. Le Foll, retenu à l'Assemblée nationale.

Le chancre coloré est une maladie grave présente dans tout le sud de la France contre laquelle la lutte est obligatoire. Elle continue de progresser. Le ministère de l'agriculture est attentif à des solutions alternatives à l'abattage. Une méthode d'injection de produits phytosanitaires fongicides dans le tronc est en cours d'examen. Les résultats sont encourageants mais si le traitement freine la propagation de la maladie, il ne tue pas le ravageur. L'expérimentation va se poursuivre. En attendant, la poursuite des abattages est malheureusement la seule mesure propre à ralentir la progression du chancre.

M. Roland Courteau.  - Cette réponse ne me satisfait pas. Depuis plus d'un an, nous attendons le feu vert du gouvernement pour lancer l'expérimentation. Pourquoi ce délai, alors que nous sommes engagés dans une course de vitesse pour sauver les 40 000 platanes du canal du Midi, classé par l'Unesco ? Cela ne mérite-t-il pas plus d'attention et de réactivité ?

Situation des chantiers STX de Lorient

M. Michel Le Scouarnec .  - La situation des chantiers STX de Lorient est délicate. La direction a engagé un plan de licenciement collectif de 47 personnes, soit 50 % des effectifs. Le carnet de commandes est insuffisant, alors que les personnels ont fait la preuve de leur grande compétence. Ils ont proposé un projet alternatif au plan social, moins coûteux que celui-ci, centré sur la formation professionnelle et la construction de panneaux armés pour paquebots et de barges. La région Bretagne est prête à accompagner ce plan.

Comment l'État peut-il venir en aide à STX et à toutes les entreprises du secteur ? Après la rencontre avec une délégation du personnel à Matignon et au ministère de la défense le 8 janvier, quels engagements concrets pouvez-vous prendre pour leur apporter un peu d'espoir ?

Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique, chargée du numérique .  - STX Lorient est une filiale de STX France SA, spécialisée dans la construction de patrouilleurs militaires et de prototypes ; elle emploie 94 salariés.

Depuis 1994, elle a construit trente navires et le savoir-faire de ses salariés est reconnu. Mais aucune commande n'a été enregistrée depuis juillet 2013. Une adaptation de l'outil industriel semble donc nécessaire. La chaudronnerie pourrait être une piste. La maison mère a injecté dix-huit millions d'euros l'an dernier. Ce plan implique malheureusement la suppression de 47 postes. Tout sera mis en oeuvre pour en limiter les effets. Il faudra veiller à privilégier les reclassements internes pour limiter au maximum les licenciements.

La société est candidate après l'appel d'offres lancé par le conseil général pour un navire de desserte de l'île de Groix. L'État ne peut intervenir dans pareil processus, mais le gouvernement sait les élus particulièrement impliqués.

M. Michel Le Scouarnec.  - Rien ne garantit que la société STX Lorient remportera l'appel d'offres... Les salariés, dont la compétence est reconnue, sont inquiets. Vous ne leur avez apporté aucune assurance. L'État doit soutenir STX Lorient.

Devenir de l'entreprise Sanofi

M. Pierre Laurent .  - Sanofi représente 30 à 40 % du potentiel national de l'industrie pharmaceutique française. Son résultat net a été de 6,8 milliards d'euros en 2013 et devrait progresser de 5 % en 2014. Sa rentabilité est parmi les meilleures de l'industrie pharmaceutique dans le monde. Elle est parmi les premières capitalisations boursières au CAC 40.

Or elle a reçu, en 2013, 136 millions d'aides publiques, CICE et crédit d'impôt recherche (CIR) ... Dans le même temps, Sanofi redistribue une grande part de ses bénéfices aux actionnaires... et a supprimé plus de 5 000 emplois depuis 2008. Ces licenciements ont été grandement facilités par la loi du 14 juin 2013 prétendument relative à la sécurisation de l'emploi. La direction ferme et cède des sites et des activités sans se soucier ni des salariés, ni de la sécurité sanitaire, ni même de l'indépendance thérapeutique du pays et du maintien de son potentiel scientifique et industriel. Nombre de salariés et leurs représentants exigent un véritable contrôle des fonds publics versés à l'entreprise, CICE et CIR. Les pouvoirs publics doivent s'opposer aux suppressions d'emploi décidées par la direction.

Voilà longtemps que nous prônons l'abrogation de la loi dite de sécurisation de l'emploi et l'interdiction des licenciements boursiers, c'est-à-dire les suppressions d'emploi dans les entreprises bénéficiaires qui distribuent largement leurs profits à leurs actionnaires. Que compte faire le gouvernement pour mettre fin à cette situation, qui plus est dans un secteur stratégique pour le pays ?

Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique, chargée du numérique .  - Sanofi est le troisième groupe mondial dans son secteur. 80 % de la production de ses sites français sont tournés vers l'exportation ; un tiers de sa production a lieu en France, 40 % de la recherche et développement.

Depuis 2012, un plan de réorganisation a été lancé. Nous resterons attentifs à l'évolution des engagements pris par Sanofi sur la pérennité de deux sites touchés. A Toulouse, le gouvernement a été très pro-actif, de sorte que le plan a été revu dans une logique de départs volontaires, de mobilités internes et de contre parties pour les salariés et les territoires. Sanofi a annoncé récemment être en négociation exclusive avec la société allemande Evotec pour la reprise des plateformes de recherche et technologie et la création d'un bioparc ; Sanofi s'engage à hauteur de 250 millions sur cinq ans. Le ministère suit le dossier avec attention. Le site de Quetigny a été cédé au façonnier Delpharm. Un programme d'investissement significatif est prévu par cette société et Sanofi s'engage par un contrat de commandes sur sept ans. Ce transfert permet de garantir l'emploi des 350 salariés employés directement sur le site.

Nous souhaitons que Sanofi prépare son avenir en France. Elle a annoncé que dix-huit produits seront lancés d'ici à 2020, soit 30 milliards de ventes potentielles. Le gouvernement veillera à ce que le « site France » contribue de manière significative à la réussite de ce beau groupe français.

Faut-il abroger la loi de sécurisation de l'emploi ? L'ANI du 11 janvier 2013 a réformé la procédure de licenciement collectif en donnant la priorité au dialogue social. Les nouvelles règles, qui ont été soutenues par les partenaires sociaux, visent à prévenir les conflits et à créer un nouvel espace de négociation : 75 % des plans de sauvegarde de l'emploi sont négociés ; 61 % des décisions administratives concernent des accords majoritaires, seuls 7 % des plans de sauvegarde de l'emploi font l'objet d'un contentieux.

M. Pierre Laurent.  - Derrière les chiffres officiels, la réalité est plus complexe. Vous n'avez pas répondu sur le contrôle des aides publiques. Le rôle de l'État est-il simplement d'accompagner la vente par Sanofi de ses sites à des entreprises étrangères et d'aider au reclassement des salariés ? Ce que nous voulons, c'est sauver notre potentiel industriel et les emplois.

Quid de l'efficacité des fonds publics, CICE et CIR ? A notre demande une commission d'enquête sur l'utilisation du CIR, que présidera Mme Gonthier-Maurin, a été créée au Sénat.

Le bilan de la loi de 2013 est loin d'être convaincant. Elle a accéléré les procédures et privé les salariés de moyens de contre-expertise. Nous ne demandons pas que les plans de sauvegarde de l'emploi soient mieux organisés mais que l'hémorragie industrielle soit arrêtée. Autant dire que votre réponse est très loin de me rassurer...

Le burn-out, maladie professionnelle ?

M. Yannick Vaugrenard .  - L'épuisement professionnel ou burn-out concerne potentiellement trois millions de salariés. Il faut le reconnaître comme maladie professionnelle. Une proposition de résolution du groupe socialiste à l'Assemblée nationale a été déposée en ce sens. Le groupe de travail sur les risques psycho-sociaux rendra bientôt son rapport. Quelles sont les orientations du gouvernement ? Quand sera lancée l'enquête qu'il a annoncée ?

M. Jean-Marie Le Guen, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement .  - Je vous prie d'excuser l'absence de M. Rebsamen.

Le gouvernement est sensible au sujet et à l'écho qu'il suscite dans l'opinion. Les interpellations portent sur la reconnaissance du caractère professionnel du burn-out, et plus précisément de certaines pathologies, comme la dépression. Des travaux sont en cours avec les partenaires sociaux pour élaborer une typologie qui permette cette reconnaissance. La priorité doit toutefois être la prévention. Une réflexion est en cours dans le cadre du troisième plan de santé au travail.

M. Yannick Vaugrenard.  - Merci. Le burn-out est la maladie des temps modernes. Il faut en traiter à la fois les effets et les causes. À quelle échéance le burn-out pourra-t-il être reconnu comme maladie professionnelle ? Il faut prévenir mais aussi guérir, il est important que cette maladie soit reconnue.

Trains d'équilibre du territoire

M. Alain Joyandet .  - Les trains d'équilibre du territoire (TET) sont une alternative intéressante aux lignes à grande vitesse ; pour les usagers, les tarifs varient du simple au double. Ils sont 100 000 chaque jour à emprunter les 40 lignes existantes.

La ligne ferroviaire n°4 Paris-Belfort, qui relie plusieurs départements de l'est de la France, importante pour l'aménagement du territoire, est menacée. Plus généralement l'avenir des TET est incertain. La commission présidée par Philippe Duron a été chargée d'y réfléchir. La volonté de l'État de transférer leur gestion aux régions inquiète usagers et élus. En outre, l'ouverture de nouvelles lignes de transport en autocar risque d'accroître leur fragilité.

En 2016, une nouvelle convention d'exploitations des trains d'équilibre du territoire sera proposée. Quelles sont les intentions du gouvernement à l'égard des lignes TET, et de la ligne n°4 en particulier ?

M. Jean-Marie Le Guen, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement .  - Je vous prie d'excuser M. Vidalies.

Depuis 2010, l'État est l'autorité organisatrice des TET. L'offre est très hétérogène ; la forte imbrication avec le réseau TER exige une clarification des services dans un contexte de ressources contraintes. Une commission comprenant des parlementaires, des élus régionaux et des experts a été mise en place, sous la houlette de Philippe Duron ; elle se penchera sur l'articulation des TET avec les autres services de transport ferroviaire et les nouvelles formes de mobilité. Elle rendra ses conclusions en mai, qui pourront contribuer à l'élaboration du schéma national des services de transport. Le gouvernement s'est engagé à financer 34 rames Régiolis, qui seront notamment déployées sur la ligne n°4. Nous ferons le point régulièrement de la qualité de service sur les lignes.

M. Alain Joyandet.  - La disparition des 800 millions d'euros de l'Écotaxe nous inquiète, l'avenir des lignes TET passe par leur modernisation.

Ce matin, un billet Vesoul-Paris en TET coûte 50 euros ; en TGV, le double... Il est indispensable pour nos concitoyens de préserver ces lignes.

Services publics en zone rurale

M. Bernard Fournier .  - Il faut maintenir une véritable offre de services publics et de services au public en zone rurale. L'accès aux services publics est un aspect déterminant de la politique d'aménagement du territoire. Il faut arrêter le délitement et l'éloignement des services publics qui sont l'armature de nos territoires. Les regroupements à l'échelon supérieur se font systématiquement au détriment de la qualité du service rendu, sans pour autant réduire les coûts.

Les politiques successives ont détricoté toujours un peu plus les services publics. Dans la Loire, les trésoreries qui constituaient le réseau de proximité ont fermé, à Belmont-de-la-Loire, ou sont menacées, à Saint-Jean-Soleymieux. Les bureaux de poste sont également concernés -  celui de Sail-sous-Couzan a disparu -, certes remplacés parfois par des agences postales communales, mais les conditions des services changent. Les antennes locales des CAF ne sont pas épargnées.

En outre, la désertification médicale est particulièrement inquiétante. Enfin, il convient de promouvoir une école rurale de qualité. C'est un critère déterminant dans l'installation des familles.

Repensons la proximité et l'accessibilité des services publics avant de toucher au maillage territorial. C'est l'équilibre trouvé localement qui garantira un service efficace et de qualité pour les habitants des communes rurales. Quelles sont les intentions du gouvernement en la matière ?

M. Jean-Marie Le Guen, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement .  - Je vous prie d'excuser Mme Pinel, retenue à l'Élysée.

L'accès aux services publics est déterminant pour la politique d'aménagement du territoire. Les maisons des services au public (MSAP) rassemblent en un lieu unique des agents qualifiés, des outils de visio-conférence, qui permettent d'abolir les distances. On compte désormais 363 sites, l'objectif étant de 1 000 en 2017. Une fois la loi NOTRe adoptée, le financement viendra d'un fonds de développement alimenté par l'État et les opérateurs.

La lutte contre la désertification médicale passe par le développement des maisons de santé pluridisciplinaire. Plus de 300 ont été financées entre 2010 et 2013 à hauteur de 30 millions d'euros. En outre, le pacte Territoire-Santé met en oeuvre des contrats de praticien salarié de médecine générale et des bourses pour les internes qui s'engagent à exercer en zone rurale. De nouvelles mesures seront annoncées lors du prochain comité interministériel à l'égalité des territoires.

M. Bernard Fournier.  - Réponse décevante... Le monde rural devrait être au coeur des préoccupations de l'État : ce sont des millions de Français qui sont concernés. La ruralité peut être une chance pour notre pays.

Le règlement Reach et la production de plantes à parfum françaises

M. Jean-Yves Roux .  - La filière lavandicole est inquiète pour sa production et son avenir. Dans les Alpes de haute Provence, les acteurs sont en grande difficulté. Une pétition nationale a déjà été signée par 20 000 personnes.

Le projet de règlement européen Reach prévoit que chaque substance chimique soit enregistrée et que les producteurs en fournissent les données toxicologiques. L'objectif de réduire la présence de produits allergènes est légitime mais qualifier les huiles essentielles issues des plantes de produits chimiques, c'est inconcevable. Il faut distinguer le linalol artificiel, incorporé dans les lessives, et celui contenu naturellement dans l'huile essentielle de lavande. Comment peut-on appliquer un label « toxique » sur un produit tel que l'huile essentielle de lavande. Et exiger des données pour chaque huile est une aberration, elles varient selon le sol et l'ensoleillement...

Les pieds de lavandin sont en outre menacés par une bactérie véhiculée par un insecte, la cicadelle ; des champs entiers ont été ravagés. La sélection variétale peut être une solution, mais cela prendra plusieurs années.

Phare de la Provence, la lavande génère deux milliards d'euros en consommation touristique. En l'état, le règlement Reach peut porter à la filière un coup fatal. Que compte faire le gouvernement pour sauvegarder un secteur si précieux ?

M. Jean-Marie Le Guen, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement .  - Veuillez excuser Mme Royal. Merci de vous mobiliser pour les producteurs français d'huile essentielle de lavande. Ces productions sont très importantes, pour les paysages du sud tout comme pour l'industrie du luxe. Elles peuvent toutefois être allergènes. Reach prévoit donc l'évaluation et un enregistrement de ces huiles d'ici 2018. Cela peut poser problème à certaines PME. C'est pourquoi nous avons mis en place un help desk, qui assure une hotline quotidienne...

M. le président.  - Ce n'est pas du provençal, tout ça...

M. Jean-Marie Le Guen, secrétaire d'État.  - Oui, quel jargon !

Nous sensibilisons les instances européennes aux difficultés du secteur. Avec une aide financière et une capacité de pilotage associant tous les acteurs, Reach devrait aider les producteurs à valoriser le caractère naturel de leur produit.

M. Jean-Yves Roux.  - Merci. Il est vrai que les producteurs de lavande sont très inquiets.

Situation de l'hôpital d'Apt

Mme Delphine Bataille, en remplacement de M. Claude Haut .  - M. Haut, retenu au Conseil constitutionnel, m'a demandé de le suppléer.

L'agence régionale de santé de Provence-Alpes-Côte d'Azur veut transformer la maternité de l'hôpital d'Apt en centre de périnatalité et en fermer la chirurgie. C'est incohérent et infondé, tant du point du vue économique, géographique qu'humain. Cet établissement a pu rester en équilibre financier malgré les incertitudes qui pèsent sur lui et qui sont responsables des fuites vers d'autres établissements. Dans une région où le coût du transport est de 26 % supérieur à la moyenne nationale, cette décision ne fera qu'accentuer ce différentiel.

Géographiquement ensuite : il est impossible que les 300 accouchements du centre hospitalier puissent être assurés ailleurs dans les mêmes conditions de sécurité. Le centre hospitalier d'Apt reste le dernier hôpital de l'est du département et de l'ouest des Alpes-de-Haute-Provence, avec la maternité de Manosque, elle-même menacée de fermeture. Tout autre choix porterait le temps d'accès pour les parturientes à plus de trente minutes.

Au moment où l'on cherche à combattre la désertification médicale, cette fermeture risque de porter un coup très sérieux à la médecine de ville et un coup fatal au dynamisme de ce territoire. À court terme, c'est le service de maternité qui apparaît le plus menacé de fermeture, alors que des solutions de coopération interhospitalière, entre Avignon, Cavaillon et Apt, sont en train d'être mises en place qui pourraient être étendues aux médecins-obstétriciens.

Pourriez-vous intervenir auprès de l'ARS pour assurer la pérennisation de la maternité et du service de chirurgie de l'hôpital d'Apt ?

Mme Laurence Rossignol, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, chargée de la famille, des personnes âgées et de l'autonomie .  - Je comprends votre inquiétude sur le maintien d'une offre de proximité. La question du temps d'accès à une maternité est centrale, mais elle n'est pas la seule : la sécurité doit primer. C'est au cas par cas que nous devons articuler ces deux exigences. Mme Touraine a confié une mission d'expertise à deux professeurs en médecine, qui remettront leurs conclusions au deuxième trimestre.

Mme Delphine Bataille.  - Merci de ces précisions. Un rapport de la Cour des comptes préconise une recomposition du réseau des maternités, qui cible les structures les plus petites et les plus isolées. N'allons pas pour autant aggraver les inégalités territoriales en matière d'accès aux soins. Le temps d'accès à une maternité pourrait atteindre quarante-cinq minutes dans certains points de la région. Si ce n'est pas le seul critère, ce doit tout de même être un élément déterminant pour une démographie dynamique. C'est pourquoi les petites structures doivent rester une composante essentielle de l'offre de soins.

Formation des masseurs-kinésithérapeutes

Mme Delphine Bataille .  - Depuis plusieurs années, a été engagée la réforme de la formation des masseurs-kinésithérapeutes, accessible sur concours, soit directement après le baccalauréat, soit après une année d'étude universitaire, et qui se déroule sur trois années dans l'un des 42 centres de formation. En février 2013, les ministres de la santé et de l'enseignement supérieur se sont engagés à une réingénierie de la formation initiale de kinésithérapeute sur les bases d'un cursus de quatre ans, reconnu master 1, dont une première année préparatoire qui serait, à terme, universitaire, tout en laissant les universités proposer une offre de formation complémentaire de niveau master 2.

La profession ainsi que les étudiants souhaitent un niveau master 2 pour le métier socle, comprenant quatre ans de formation précédés d'une année de préparation universitaire. Il s'agit de valoriser les années d'études afin que la profession dispose d'une recherche universitaire spécifique, tout en améliorant le statut de la profession au regard de l'harmonisation européenne des formations.

Début décembre, un nouvel arbitrage interministériel a été rendu, qui améliore considérablement les choses. Reste néanmoins le souhait d'atteindre le niveau de master 2.

Mme Laurence Rossignol, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, chargée de la famille, des personnes âgées et de l'autonomie .  - Dès 2012, le gouvernement s'est engagé à intégrer les formations de santé dans le système licence-master-doctorat. Il n'était de fait pas possible de faire tenir en trois ans la formation de masseur-kinésithérapeute. Une formation en quatre ans sera en place dès la rentrée 2015 avec une première année universitaire, soit en santé, soit en sciences et techniques des activités physiques et sportives, soit en biologie. Le concours physique-chimie-biologie sera supprimé au plus tard en 2016.

Mme Delphine Bataille.  - Merci pour cette réponse détaillée et très claire. Cette réforme de la formation présente des avancées notables. Cet arbitrage a effectivement constitué une réelle avancée. Nous restons toutefois vigilants sur les équivalences de diplôme au niveau européen.

Situation de l'hôpital Foch de Suresnes

M. Philippe Kaltenbach .  - Ma question porte sur la situation de l'hôpital Foch de Suresnes. Cette structure privée à but non lucratif participe largement au service public hospitalier dans les Hauts-de-Seine. Les usagers en sont très satisfaits.

En septembre 2012, une mission a été confiée à l'inspection générale des affaires sociales ainsi qu'à l'inspection générale de l'administration sur les rapports entretenus par la fondation Foch, propriétaire de l'hôpital, avec l'association Foch, en charge de sa gestion. Ces deux structures ont été dirigées, durant quinze ans, par le même président. Suite à ces rapports, un administrateur provisoire a été nommé en février 2013 à la tête de l'association, dans l'attente d'une réorganisation et d'une refonte de ses statuts, comme l'a préconisé le ministre de l'intérieur de l'époque. Depuis, les agents de l'hôpital sont dans l'expectative.

La réorganisation institutionnelle de cette structure interviendra-t-elle prochainement ? Il convient d'apporter des réponses aux inquiétudes des agents de l'hôpital, pénalisés par la situation en cours. Derrière la gouvernance, il y a aussi des enjeux financiers.

Mme Laurence Rossignol, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, chargée de la famille, des personnes âgées et de l'autonomie .  - Le gouvernement est attentif au bon fonctionnement de l'hôpital Foch. Le rapport des deux inspections générales préconise une refonte de la gouvernance. Les nouveaux statuts doivent éviter tout conflit d'intérêt entre la fondation et l'hôpital. Ce travail est long et nécessite de nombreux échanges. Nous veillons à l'aboutissement de ce dossier. Maintenant qu'elle a apuré sa dette auprès de l'association, il appartient à la fondation de prendre rapidement position sur les nouveaux statuts. À défaut, l'autorité publique prendra ses responsabilités, afin d'assurer la pérennité de l'hôpital Foch.

M. Philippe Kaltenbach.  - Merci. La position du gouvernement est très claire et très ferme. Les salariés l'auront entendue. La balle est donc dans le camp de la fondation.

Financement des Ehpad

M. Jacques Genest .  - Ma question porte sur le retard - de un à trois ans - dans la signature des conventions tripartites liant les établissements d'hébergement des personnes âgées dépendantes (Ehpad), les conseils généraux et l'État via les agences régionales de santé.

Ces trois parties signent une convention fixant des objectifs à chacun des signataires, qui attribue des moyens aux Ehpad. Les départements financent une partie des dépenses d'aide médico-sociale, et rémunèrent les salariés à 30 %, l'État à 70 %.

Le retard actuel met en difficulté les établissements : les personnes prises en charge entrent plus tard dans les Ehpad, avec un niveau de dépendance supérieur et des besoins de soins plus importants. Les conditions d'accueil sont dégradées et les Ehpad sont contraints de recourir à des postes non financés, ce qui déséquilibre leurs comptes ou les oblige à facturer les frais aux résidents.

Comment comptez-vous faire respecter les échéances tripartites et assurer une réelle prise en charge du cinquième risque ?

Mme Laurence Rossignol, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, chargée de la famille, des personnes âgées et de l'autonomie .  - Plus de 7 000 Ehpad accompagnent près de 600 000 personnes âgées. Les ressources publiques consacrées à ce dispositif représentent 11,5 milliards d'euros dont 7,5 au titre des crédits d'assurance maladie. Grâce à la médicalisation de ces établissements, les 400 000 agents intervenant en Ehpad représentent un taux d'encadrement de 61 ETP pour 100 places. Ce processus, financé par la caisse nationale de solidarité pour l'autonomie, se poursuit : 100 millions d'euros sont budgétés en 2015 dans la loi de financement de la sécurité sociale.

Le co-financement avec les conseils généraux est indispensable pour pouvoir renouveler la convention tripartite. J'ai installé en décembre un groupe de travail en anticipant l'adoption du texte sur le vieillissement. Il a pour but de simplifier la gestion et de moderniser le pilotage des Ehpad, en leur donnant plus d'autonomie. Les dispositions législatives nécessaires seront intégrées dans le projet de loi sur l'adaptation de la société au vieillissement, que vous examinerez en mars.

M. Jacques Genest.  - Les difficultés sont aussi dues à un manque de personnel au niveau de l'ARS. Et, en reculant l'échéance, l'État gagne un peu d'argent.

Sécurité sociale des travailleurs frontaliers

M. Cyril Pellevat .  - La Haute-Savoie compte 70 000 travailleurs qui, chaque jour, traversent la frontière pour occuper un emploi en Suisse. Avec les accords bilatéraux entre l'Union européenne et la Suisse dans les années 2000, les frontaliers français actifs en Suisse bénéficiaient de trois options pour être assurés : l'affiliation au régime d'assurance-maladie suisse, l'affiliation volontaire à la sécurité sociale, ou le recours aux assurances privées. Le droit d'option entre une assurance privée française et le régime général de l'assurance-maladie française, introduit en 2002, a été prorogé en 2006. En effet, l'affiliation à une assurance privée était plébiscitée par 90 % des travailleurs frontaliers. Ce droit d'option a pris fin le 1er juin 2014, et l'affiliation en France se fait désormais uniquement auprès de l'assurance-maladie. Depuis cette date, ce sont 163 000 frontaliers qui basculent dans le système de sécurité sociale français, à la date d'échéance de leur contrat annuel, ou au plus tard le 31 mai 2015.

L'afflux de ces nouveaux inscrits sature les caisses primaires d'assurance-maladie et mobilise un nombre important d'agents : le délai de carence atteint quatre mois dans l'agglomération d'Annemasse. Quelles sont les mesures et les garanties qu'envisage de prendre le gouvernement pour assurer l'inscription des demandeurs frontaliers dans les temps et la délivrance de leurs cartes Vitale dans des délais raisonnables ? Un nouveau sursis à la date du 31 mai serait bienvenu.

Et pour l'accès aux soins de ces nouveaux assurés auprès des médecins traitants français, eux-mêmes saturés dans une zone de désert médical ? Mon épouse a appelé en octobre pour un rendez-vous gynécologique : on lui a répondu de rappeler en décembre, pour un rendez-vous en mars. Six mois d'attente !

Enfin l'article 65 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2015 prévoit des sanctions pour les personnes qui ne seraient pas affiliées à un régime de sécurité sociale au 1er janvier 2015. Quels aménagements seront prévus pour que ces sanctions ne touchent pas les travailleurs frontaliers ?

Mme Laurence Rossignol, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, chargée de la famille, des personnes âgées et de l'autonomie .  - À l'issue d'un long processus de concertation, le gouvernement a organisé l'extinction du régime spécifique applicable à ces frontaliers. Toutes les garanties leur sont apportées pour que la transition soit facilitée. L'affiliation à la sécurité sociale française est progressive. Des assouplissements sont prévus : le médecin traitant peut ainsi être choisi en Suisse. La validité de la carte européenne d'assurance est de deux ans. L'article 65 de la loi de financement de la sécurité sociale vise les personnes cherchant à se soustraire délibérément à leurs obligations, il ne concerne donc pas les frontaliers, qui doivent prendre attache avec leur caisse primaire.

M. Cyril Pellevat.  - J'ai voulu insister sur la traduction concrète de ces dispositions...

J'ajoute que je m'inquiète de voir les hauts revenus opter pour une installation en Suisse, avant de revenir exercer leur droit d'option en France. J'attire aussi l'attention sur le mode de calcul de la cotisation sur le revenu fiscal de référence.

Fermeture de la trésorerie de Mourmelon-le-Grand

M. Yves Détraigne .  - La décision - encore non officielle - de fermer la trésorerie de Mourmelon-le-Grand, dixième ville de la Marne, n'a pas fait l'objet de concertation. Un an auparavant, la question d'une restructuration des services avait simplement été évoquée par le directeur régional des finances publiques et différentes hypothèses de regroupement avaient été évoquées, sans aller plus avant. Prévoir une fermeture d'ici la fin de l'année paraît déraisonnable puisque les élus n'en ont pas été officiellement informés et qu'il va falloir tenir compte de la carte de l'intercommunalité.

Le transfert du personnel de Mourmelon-le-Grand à la trésorerie de Suippes pose des problèmes d'aménagement, puisqu'il n'y aurait pas d'espace autre que les sous-sols de la maison des associations de la commune pour les accueillir.

En tout état de cause, il faudrait que l'on en reste à la demi-mesure actuelle et que la fermeture de la trésorerie de Mourmelon-le-Grand reste partielle.

M. Christian Eckert, secrétaire d'État auprès du ministre des finances et des comptes publics, chargé du budget .  - La fermeture de cette trésorerie a été précédée de deux ans de concertation menée par le directeur régional des finances publiques. Si l'objectif d'une présence locale est au coeur des choix du gouvernement, la direction générale des finances publiques peut être conduite à adapter son réseau, dans un souci d'aménagement du territoire, quitte d'ailleurs à ouvrir de nouveaux centres. Les élus locaux et nationaux sont systématiquement consultés.

La fermeture de la trésorerie de Mourmelon a été discutée, notamment lors de la dernière réunion avec les élus le 28 novembre 2014, à Suippes. Cette trésorerie ne comptait que deux agents ; ses missions sont désormais assurées à Suippes et à Verzy. Des permanences bihebdomadaires seront mises en place en mairie de Mourmelon-le-Grand pour les personnes qui ne pourraient se déplacer. Quant aux difficultés d'aménagement que vous avez évoquées, elles sont provisoires.

M. Yves Détraigne.  - Le service minimum mis en place doit être maintenu. Il y a une réelle activité autour de cette petite ville. Le territoire concerné est vaste. Ne fermons pas totalement les services de la trésorerie de Mourmelon.

Désamiantage dans les logements sociaux

Mme Dominique Estrosi Sassone .  - Ma question porte sur le surcoût lié aux opérations de désamiantage dans le parc des HLM. Depuis le 1er juillet 1997, la législation interdit toute construction de logement contenant de l'amiante. Mais 80 % des permis de construire de logements sociaux ont été délivrés avant cette date. Quelque 3,1 millions de logements collectifs sont donc susceptibles de contenir des traces d'amiante. Les codes de la santé et du travail protègent les habitants et les professionnels du bâtiment mais, en contrepartie, les organismes HLM doivent faire face à une forte hausse du prix des travaux de rénovation. L'Union sociale pour l'habitat chiffre ce surcoût à 2,3 milliards d'euros par an, soit l'équivalent de 120 000 constructions ou 400 000 rénovations.

Depuis 2001 jusqu'à la loi Alur, la législation a été renforcée. Le seuil d'exposition passif aux poussières d'amiante a été abaissé, les règles d'information des habitants et des intervenants ont été élargies. Un décret du 4 mai 2012 a changé la méthode de mesure de l'empoussièrement.

Lors du congrès des HLM de septembre 2014, la ministre a annoncé une enveloppe de 10 000 euros par logement, via un prêt de la Caisse des dépôts et consignations, à hauteur de 40 000 logements par an. Comment mettre en pratique ces prêts ? Existera-t-il des critères d'éligibilité ou des conditions d'attribution pour les organismes HLM ? Le gouvernement entend-il créer une structure interministérielle pour harmoniser les actions de désamiantage des logements, sachant que les inspecteurs du travail n'ont pas tous la même interprétation ?

M. Christian Eckert, secrétaire d'État auprès du ministre des finances et des comptes publics, chargé du budget .  - Le gouvernement a la volonté d'engager la rénovation énergétique des bâtiments, ce qui implique des désamiantages. Les surcoûts sont estimés à 2,3 milliards d'euros, vous l'avez dit. La ministre du logement a annoncé la création d'un prêt pour les opérations de désamiantage, à un taux très avantageux, inférieur au taux du livret A. Ce prêt sera plafonné à 10 000 euros pour bénéficier à 50 000 logements. La convention entre l'État et la Caisse des dépôts est en cours de finalisation.

Le gouvernement mobilisera aussi 20 millions d'euros du fonds de compensation assurance-construction pour la recherche et le développement de nouveaux procédés d'extraction robotisée de l'amiante. Un appel à manifestations d'intérêt sera bientôt lancé. Il s'agit de développer des technologies fiables pour réduire les coûts. Une réflexion interministérielle est aussi en cours pour élaborer un programme d'action pérenne.

Mme Dominique Estrosi Sassone.  - . Les opérations sont de plus en plus difficiles à mener dans des sites occupés. Imaginez la réaction des locataires qui voient arriver une équipe de désamiantage équipée en scaphandriers pour retirer le mastic des fenêtres : ils habitent dans ces logements depuis longtemps et ce serait donc si malsain !

Femmes et jeunes enfants ayant besoin de soutien

Mme Dominique Gillot .  - Ma question porte sur la continuité et la sécurisation des politiques publiques en direction des femmes avec enfants de moins de trois ans qui ont besoin d'un soutien matériel et psychologique. Par courrier du 27 octobre 2014, le conseil général du Val-d'Oise informait les associations à caractère social - dont Espérer 95 - de son désengagement du dispositif d'allocation de logement temporaire. Cette perte de 122 428 euros prive les associations partenaires des financements nécessaires à la continuité de leur action. En plein hiver, elles devront assumer leur mission sans avoir le temps de trouver un autre financement.

L'allocation de logement temporaire est une subvention qui permet d'accueillir des personnes éprouvant, en raison de leurs faibles ressources ou de leurs conditions d'existence, des difficultés particulières pour accéder à un logement ou s'y maintenir.

Le conseil général a décidé de se retirer unilatéralement. Aucune concertation, aucune solution transitoire ou d'attente n'a été proposée. Cette annonce risque de mettre - rien que pour l'association Espérer 95 - plus de 72 adultes et 68 enfants à la rue. Elle ajoute donc de la précarité à la précarité et, en bout de chaîne, du malheur au malheur.

Que compte faire l'État ? Il ne faudrait pas que se radicalise le sentiment d'être abandonné par la République.

M. Christian Eckert, secrétaire d'État auprès du ministre des finances et des comptes publics, chargé du budget .  - La ministre du logement est retenue ce matin par la présentation du rapport annuel de la Fondation Abbé Pierre.

La priorité accordée aux femmes avec enfants de moins de trois ans repose sur une articulation très claire des compétences entre l'État et les conseils généraux. Si l'État assume la charge, au titre de l'aide sociale, des familles sollicitant un accueil dans un centre d'hébergement et de réinsertion sociale, le département a des compétences spécifiques de droit commun au titre de l'aide sociale à l'enfance.

À ce titre, sont prises en charge les femmes enceintes isolées ou avec des enfants de moins de 3 ans sans domicile. Le département doit en outre disposer de structures d'accueil.

Depuis quelques mois, nous constatons un désengagement de certains conseils généraux dans la prise en charge de ce public vulnérable. Dans le cadre du contrôle de légalité, le préfet du Val-d'Oise a engagé un recours devant le tribunal administratif à l'encontre de la décision du Conseil général de ne pas appliquer la loi relative à l'hébergement des femmes enceintes et des mères isolées avec leurs enfants de moins de trois ans.

Le dispositif d'aide au logement temporaire, cofinancé à parité par l'État et les organismes de protection sociale, est chargé de couvrir les frais engagés par les organismes qui mettent des logements à disposition des personnes privées de domicile stable. Il n'est aucunement remis en cause. La dépense à la charge de l'État, 39,2 millions en 2015, est maintenue tant au niveau national, que dans le Val-d'Oise. Ce dispositif doit cependant être distingué de l'allocation logement temporaire, qui est un dispositif facultatif mis en oeuvre par le Conseil général du Val d'Oise, et qui est destiné à accorder une participation financière aux associations et centres communaux d'action sociale qui gèrent des structures d'hébergement accueillant ces personnes.

Mme Dominique Gillot.  - L'allocation de logement temporaire est certes une politique facultative du département mais le retrait de son aide accroît les difficultés des plus vulnérables.

Permis de construire

M. Michel Houel .  - La loi Alur prévoit des évolutions significatives dans différents domaines du logement mais aussi sur l'instruction du droit des sols. Or l'État supprime, à partir du 1er juillet 2015, l'appui aux communes de moins de 10 000 habitants actuellement assuré par la direction départementale des territoires. Les communes vont devoir reprendre à leur compte cette instruction, soit en instruisant elles-mêmes la demande, ce qui appelle une vraie compétence technique, soit en déléguant cette compétence à une autre commune ou à un EPCI, soit en la confiant à une agence départementale, l'instruction des autorisations d'urbanisme ne pouvant être réalisée par un bureau d'études. Or les petites communes n'ont pas les moyens d'instruire elles-mêmes les demandes sur une matière très complexe. Le risque est donc d'aboutir à la délivrance de permis tacites.

Le désengagement de l'État engendre un transfert de charges financières non négligeable qui vient s'ajouter à la baisse drastique des dotations aux collectivités locales et au coût des nouveaux rythmes scolaires. Les collectivités n'ont pas de trésor caché sur lequel on peut prélever sans dommage ! Si l'État ne revient pas sur sa décision, il ne reste qu'une solution : supprimer la gratuité du permis de construire et en fixer le prix en pourcentage du coût de la construction. Cela assurerait une véritable égalité entre les territoires, et une transparence financière vis-à-vis des contribuables qui, de toute façon, auront à assumer ce transfert de charges.

M. Christian Eckert, secrétaire d'État auprès du ministre des finances et des comptes publics, chargé du budget .  - L'article 134 de la loi Alur prévoit que l'appui de l'État sera recentré, mais les communes de moins de 10 000 habitants seront toujours aidées. Il s'agit non d'un désengagement de l'État, mais d'un recentrage de ses missions.

La délivrance des permis de construire est une compétence des collectivités territoriales. Une instruction ministérielle du 3 septembre 2014 précise qu'une commune ne peut confier l'ingénierie à un prestataire privé. Une mutualisation entre communes est la meilleure solution, avec un service d'instructions au niveau intercommunal, tout en conservant la signature du maire. Enfin, il n'est pas possible de rendre la délivrance des permis de construire payante, car il s'agit d'un service public administratif.

M. Michel Houel.  - On ne règle pas tout d'un coup, il n'en demeure pas moins que la mutualisation a un coût !

Usurpation de plaques d'immatriculation

Mme Catherine Procaccia .  - Il est urgent de résorber le phénomène persistant des usurpations de plaques d'immatriculation, connu sous le terme « doublette ».

En 2012, les forces de l'ordre recensaient 17 479 délits d'usurpation de plaques d'immatriculation contre 5 079 en 2010, loin des 400 000 cas estimés par les sociétés d'assurance. La procédure de ré-immatriculation, gratuite, est de plus en plus utilisée par les victimes sans que le phénomène en soit pour autant réglé.

Une réflexion a été menée entre les directions ministérielles en charge du dossier, le Défenseur des droits et des associations de défense des conducteurs, mais ses conclusions n'ont pas été suivies d'effets. La meilleure preuve en est la facilité déconcertante avec laquelle un magazine automobile a fait reproduire le numéro d'immatriculation du véhicule officiel du président de la République auprès de plusieurs revendeurs de plaques, ainsi que celle du ministre de l'Intérieur. Plus grave, les frères Kouachi avaient utilisé une doublette parfaite.

L'Agence nationale de traitement automatisé des infractions a recruté quinze fonctionnaires à temps plein pour éviter l'envoi de procès-verbaux injustifiés mais rien n'est fait pour lutter en amont contre ces usurpations. Le gouvernement compte-t-il suivre les recommandations du Défenseur des droits pour réglementer la profession de fabricant de plaques, pour sécuriser leur fabrication et encadrer la vente libre de ces appareils de fabrication sur internet ?

M. Christian Eckert, secrétaire d'État auprès du ministre des finances et des comptes publics, chargé du budget .  - La falsification de fausses plaques est passible de sept ans de prison, 30 000 euros d'amende, le retrait de six points du permis de conduire, lequel peut même être pour trois ans.

Les victimes de doublettes sont mieux accompagnées. Le site de l'Agence nationale de traitement automatisé des infractions comporte une aide en ligne, un système de pré-plainte en ligne est également disponible. On a pu ainsi éviter de devoir recruter de nouveaux agents et le nombre des contraventions a baissé. Le nombre de plaintes en 2013 était de 22 164 ; le nombre de ré immatriculations de véhicules, de 17 840. En 2014, le nombre de falsifications a reculé. Nous n'en restons pas là. Nous réfléchissons à un marquage des plaques par l'État mais cette piste, en vigueur à l'étranger, n'est pas aisément transposable en France. Des radars double-face sont testés, et facilitent la détection des doublettes parfaites, même si, monsieur le président, il ne s'agit pas de pétanque... (Monsieur le président apprécie)

Mme Catherine Procaccia.  - Le nombre des usurpations ne cesse de croître. Vous n'avez rien dit sur le contrôle de certaines machines en vente sur internet.

La question est ancienne, et devient, avec le grand banditisme et le terrorisme, de plus en plus grave. Sans doute les règles en vigueur à l'étranger sont-elles difficilement transposables, mais la situation actuelle n'est pas satisfaisante. Il faut développer la prévention avec des puces sur les plaques par exemple. Est-il normal que nous devions attendre l'envoi d'une contravention pour constater que la plaque d'un automobiliste a été contrefaite ?