Questions d'actualité
M. le président. - L'ordre du jour appelle les questions d'actualité au Gouvernement.
Livraison des Mistral à la Russie
M. Jean-Claude Requier . - Ma question s'adresse aux ministres de la défense et des affaires étrangères.
La situation est connue de tous mais personne ne peut dire quelle en sera l'issue ni quand elle interviendra. Et pourtant il faudra bien en sortir tant les enjeux sont importants, y compris pour notre pays. Mardi, le président de la République a donc décidé «jusqu'à nouvel ordre» de suspendre la livraison à la Russie du porte-hélicoptères d'assaut Vladivostok de type Mistral en invoquant un cas de «force majeure » qui serait la dégradation de la situation en Ukraine. Le navire est terminé, les marins russes ont achevé leur formation à Saint-Nazaire, ils sont prêts à rejoindre la base navale russe.
Le second bâtiment, le Sébastopol vient d'être mis à l'eau et sera aménagé en 2015 ; il doit être livré en 2016. Si la France décide que les conditions de la livraison ne sont pas réunies, un nouvel ajournement nous exposerait à un contentieux long et coûteux avec la Russie, à un risque financier pour les entreprises concernées, et fragilise la parole de la France, sans parler des conséquences sur nos exportations agricoles vers la Russie. (« Très bien » à droite) Jusqu'à quand ajournera-t-on ces livraisons ?
M. Éric Doligé. - Deux ans et demi encore !
M. Jean-Claude Requier. - Quelle est la situation en Ukraine ? Qu'est ce qui pourrait débloquer les choses ? (Applaudissements sur les bancs RDSE, au centre et à droite)
M. Harlem Désir, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargé des affaires européennes . - Ce dossier n'appelle aucune polémique. Le contrat a été signé en 2011, il convient de prendre en compte toute la situation. La décision prise par le président de la République de reporter sine die cette livraison est une décision forte et exceptionnelle devant la situation qui se détériore en Ukraine : 1 000 morts depuis le cessez-le-feu du 5 septembre.
À ceux qui nous pressent de vendre ces bateaux, nous demandons s'il serait responsable de procéder à la livraison avant que l'accord de Minsk ne soit respecté. Tout doit être fait pour parvenir à une solution négociée de ce conflit : c'est la ligne de la France et de l'Europe. (Applaudissements sur les bancs socialistes)
Pollution de l'air
Mme Leila Aïchi . - Un fois n'est pas coutume, je m'adresse non à la ministre de l'écologie mais à son collègue des finances pour évoquer la pollution de l'air car celle-ci représente aussi un préjudice grave pour notre économie et nos finances. Tous ici reconnaissent le drame sanitaire que constitue la pollution de l'air et pourtant, très peu de sénateurs ont eu le courage de voter notre amendement concernant le gazole.
Il faut pourtant compter 42 à 50 000 morts prématurés chaque année en France ; une explosion des risques d'infarctus, d'AVC, d'infections respiratoires, et même de cancers des voies aériennes ; des centaines de milliers d'hospitalisations liées à des problèmes cardiaques et respiratoires. Il y a bien là urgence sanitaire.
Le Gouvernement ne prend pas ses responsabilités. Il est si facile, il est vrai, de céder aux lobbies. L'an dernier encore, la France a subventionné les constructeurs automobiles Peugeot et Renault pour développer des moteurs diesel hybrides. Décidément, seuls le Gouvernement et les industriels ne comprennent pas que cette motorisation est une impasse. Ce conservatisme empêche l'innovation et des emplois de demain.
Que dire des 650 000 journées d'arrêt de travail par an du fait de la pollution de l'air ; des 50 milliards d'euros qu'elle coûte à l'économie française chaque année ; des 7 milliards d'euros d'exonération fiscale par an pour le diesel. L'État a-t-il estimé de manière certaine le coût global de la pollution ? Sinon, un audit indépendant sera-t-il diligenté ? Monsieur Sapin, prendrez-vous vos responsabilités ? (Applaudissements sur les bancs écologistes, socialistes et sur quelques bancs UDI-UC)
M. Jean-Marie Le Guen, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement . - Oui, la qualité de l'air est un enjeu majeur. Le coût de la pollution de l'air a été évalué à 30 milliards d'euros, dont 1 milliard pour la seule sécurité sociale.
Le Gouvernement agit : dans le projet de loi de transition énergétique, il est prévu un bonus écologique porté à 10 000 euros, un développement des recharges, un renouvellement de la flotte automobile publique. Plusieurs dispositifs de soutien ont été déployés par l'État, dont les prêts verts de la BPI. L'Ademe contribue à des incitations multiples. Les particuliers peuvent bénéficier d'un crédit d'impôt de transition énergétique.
Comme parlementaire, si vous avez besoin d'un audit supplémentaire, vous pouvez saisir la Cour des comptes. (Applaudissements sur certains bancs socialistes)
Collectivités territoriales (I)
Mme Marie-France Beaufils . - Vous avez fait le choix de réduire la dépense publique pour retrouver la croissance. Les économistes de l'OCDE dénoncent les conséquences de cette politique d'austérité. La dotation pour les collectivités territoriales diminue d'1,5 milliard d'euros
M. Philippe Dallier. - Eh oui !
Mme Marie-France Beaufils. - Après le gel des dotations durant quatre ans de suite, elles ont pourtant fait des efforts pour maîtriser leurs dépenses de fonctionnement et limiter leurs travaux. Elles réduisent leur investissement au détriment du BTP. Ces nouvelles ponctions qu'elles subiront vont frapper directement la population via la baisse des subventions à la vie associative, entraînant des chômeurs supplémentaires, une dégradation de la vie des habitants, de leur pouvoir d'achat.
Quand allez-vous prendre conscience des effets négatifs de ces choix et rétablir les dotations aux collectivités territoriales ? (Applaudissements sur les bancs CRC)
M. Michel Sapin, ministre des finances et des comptes publics . - Question légitime, à l'heure où le Sénat examine le projet de loi de finances et où les maires tiennent leur congrès. Nous avons trouvé un déficit public considérable ; il faut le réduire. Nous le faisons à un rythme compatible avec le retour de la croissance. Des efforts doivent être demandés à tous, et d'abord à l'État dont le budget baisse en euros, à la sécurité sociale et aux collectivités territoriales. Ces 11 milliards sur trois ans manifestent l'effort demandé aux collectivités territoriales. (Exclamations à droite)
La difficulté tient à la grande hétérogénéité des collectivités. Les dispositifs de péréquation doivent être améliorés : le Fonds de péréquation communal et intercommunal va progresser en 2015. (Exclamations sur les bancs UMP) De 2002 à 2015, il est passé de 150 à 780 millions ! (Même mouvement) Idem pour la DSR-cible et la DSU-cible. Le Gouvernement est ouvert, il demande votre collaboration pour mener une réforme de la DGF afin de la rendre plus juste. Il n'y a pas de raison que Neuilly touche plus par habitant que Guéret ! (Applaudissements sur les bancs socialistes)
Violences faites aux femmes
Mme Claudine Lepage . - L'existence même de la journée de lutte contre les violences faites aux femmes, célébrée il y a deux jours, marque l'importance de ce fléau. Des avancées ont eu lieu en France, je le dis le jour du quarantième anniversaire des débuts de la discussion parlementaire de la loi Veil. Reste que 216 000 femmes sont victimes de violences chaque année, que tous les trois jours, une femme meurt sous les coups de son compagnon ou ex-compagnon, que 86 000 femmes déclarent avoir été victimes de viol par leur compagnon ou de tentative de viol, même si seulement 10 % portent plainte.
Je suis fière de soutenir ce Gouvernement (M. Alain Gournac s'exclame) qui a pris des mesures volontaristes pour lutter contre les inégalités entre les hommes et les femmes, avec le quatrième plan interministériel et la loi du 4 août 2014. Doublement des moyens, plateforme d'écoute, ordonnance de protection, téléphone grand danger : autant de mesures efficaces. Le Gouvernement lutte également contre les mariages forcés qui concernent 400 millions de femmes et d'enfants dans le monde et 70 000 femmes potentiellement en France. Je pense aussi aux mutilations sexuelles. Il reste tant à faire.
Les ministres Cazeneuve, Taubira et Touraine viennent de passer une convention pour la réception des plaintes. Pouvez-vous donner des précisions ? Quelle formation pour les agents des postes consulaires dans la lutte contre les mariages forcés ? (Applaudissements sur les bancs socialistes)
Mme Pascale Boistard, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, chargée des droits des femmes . - Madame Lepage, vous avez rappelé les chiffres terribles de ce fléau. Nous consacrons 66 millions d'euros pour le combattre, des moyens pour former le personnel. Des protocoles ont été signés dans 36 départements pour coordonner tous les acteurs : police, associations, services sociaux. Il s'agit d'augmenter le dépôt de plainte, de mieux accueillir les victimes.
Depuis 2013, 600 logements d'urgence ont été créés et 1 050 devraient encore l'être d'ici 2017. Nous avons signé une convention avec Mme Fioraso pour les étudiants. Aux femmes qui n'osent toujours pas franchir les portes du commissariat ou de l'hôpital, je dis : appelez le 3919, une équipe sera aussitôt mobilisée pour vous aider à passer ce cap. (Applaudissements sur les bancs socialistes ; Mme Chantal Jouanno applaudit aussi)
Essais nucléaires en Polynésie
Mme Teura Iriti . - Ma question s'adresse à la ministre de l'outre-mer, au moment où l'Assemblée de la Polynésie française a pris une résolution relative aux essais nucléaires dans le territoire, à la veille de la Conférence environnementale sur le dérèglement climatique. Il s'agit d'attirer l'attention sur la gravité des conséquences de ces essais, menés pendant vingt ans, qui doivent être compensés. Je rappelle que le principe du préjudice écologique a fait l'objet d'un vote unanime du Sénat en juillet 2013. À Papeete comme à Paris, tous les efforts convergent en ce sens.
Quelles sont les garanties que donne le Gouvernement pour que soit enfin indemnisé l'un des pires préjudices écologiques jamais causés ? (Applaudissements sur les bancs socialistes, écologistes et quelques bancs au centre et à droite)
Mme George Pau-Langevin, ministre des outre-mer . - Nous avons été nombreux à souhaiter que les essais nucléaires s'arrêtent, puis que le préjudice écologique soit réparé. Il n'y a donc pas de problème de principe entre nous. La Polynésie a bien sûr la faculté du territoire à se prononcer par une résolution.
C'est avant 2012 que les fonds destinés à l'outre-mer ont été réduits, sous l'autorité du ministre Jégo. Depuis lors, nous travaillons de près avec les députés polynésiens pour essayer de réparer certains préjudices, du fait que le financement de l'État ait été stoppé. Nous travaillons afin de les rétablir.
Ce sont des problèmes de fond importants. L'État assure la sécurité des deux atolls où ont eu lieu les essais. Ma porte est toujours ouverte, vous le savez. Quand cette résolution sera votée, nous verrons les conclusions à en tirer. (Applaudissements sur les bancs socialistes)
Soutien au BTP
M. Jacques Genest . - Dans quelques heures les chiffres du chômage seront annoncés. Triste moment pour les 3,4 millions de chômeurs. Le secteur du BTP est particulièrement touché. L'emploi intérimaire y a baissé de 20 % pour le seul mois d'octobre.
La conjoncture ne peut expliquer seule cette situation. Les normes, les règles d'urbanisme, toujours plus nombreuses, toujours plus rigides, entravent la construction, notamment en milieu rural, et se heurtent à l'incompréhension de nos concitoyens. De plus en plus de terrains sont déclarés inconstructibles, ce qui tire vers le haut le prix des terrains à bâtir. La loi Alur, véritable usine à gaz dont même le Gouvernement a reconnu les erreurs, a entamé la confiance des investisseurs. S'y ajoute la baisse des dotations aux collectivités territoriales.
Aujourd'hui, le Gouvernement veut frapper encore plus leurs ressources, malgré les propositions équilibrées du Sénat. Les quelques avancées du projet de loi de finances auront un effet très différé et ne suffiront pas à faire redémarrer le secteur. Quand allez-vous prendre les mesures qui s'imposent pour faire repartir l'activité et l'emploi dans la construction ? (Applaudissements sur les bancs UMP)
Mme Carole Delga, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique, chargée du commerce, de l'artisanat, de la consommation et de l'économie sociale et solidaire . - La crise du logement pèse lourdement sur le pouvoir d'achat. L'urgence est de donner un logement à tous les Français.
M. Philippe Dallier. - Belle déclaration !
M. Alain Gournac. - Incantation !
Mme Carole Delga, secrétaire d'État. - Nous avons agi, en fluidifiant les parcours résidentiels. Nous avons simplifié les règles en matière d'urbanisme. (Tollé à droite)
M. Éric Doligé. - C'est un gag !
M. Jean-Pierre Raffarin. - Bravo !
Mme Carole Delga, secrétaire d'État. - Nous favorisons la rénovation des logements, avec le crédit d'impôt développement durable, le renforcement de l'éco-prêt à taux zéro, les aides de l'Anah. (Vives exclamations à droite) Je pense aussi aux mesures en faveur du logement adapté et du logement intermédiaire. Le plan du Gouvernement pour le logement bénéficiera à tous les Français. (Même mouvement) Le « Pinel » peut s'appliquer sur trois, six ou neuf ans et sera adapté aux réalités du marché. D'autres mesures entreront en application dès le vote du projet de loi de finances pour 2015. (Applaudissements sur les bancs socialistes ; exclamations à droite)
Réindustrialisation de la France
M. Daniel Raoul . - La visite du président de la République à Florange, courageuse... (marques d'ironie à droite) et le bilan des accords passés en novembre 2012 nous montrent que la réindustrialisation de notre pays est possible ; 146 des 180 millions d'euros prévus ont d'ores et déjà été engagés et, à terme, ce sera 240 millions. La mutation technologique s'est faite sans licenciement ni plan social. On annonce même des créations d'emplois : 30 CDI pour 2015, autant ensuite.
La fermeture des derniers hauts fourneaux est un symbole, dont je ne mésestime pas le choc culturel. Mais regardons les succès de la filière froide après la fermeture de la filière liquide. Le carnet de commandes est plein. Après dix ans de désindustrialisation, la part de l'industrie était de 12 % du PIB. Pour prétendre être une puissance économique, il faut le porter à 20 %. Quelle est la part de l'industrie dans le plan Juncker ? Quels sont les projets que le Gouvernement a sélectionnés ? (Applaudissements sur les bancs socialistes)
Mme Carole Delga, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique, chargée du commerce, de l'artisanat, de la consommation et de l'économie sociale et solidaire . - Quand nous sommes arrivés aux responsabilités, nous avons trouvé une industrie en crise. (Vives protestations à droite) Le Gouvernement, les commissaires au redressement productif n'ont rien lâché ; les 10 milliards déjà versés du CICE et les 30 milliards du pacte de responsabilité redonneront des marges de manoeuvre aux entreprises.
Le bilan de l'accord de 2012 à Florange est positif ; le site est devenu majeur dans le dispositif d'Arcelor-Mittal. Le reclassement est terminé et s'est fait sans licenciement. Le groupe a annoncé 30 CDD d'ici la fin de l'année et 30 CDI en 2015. Il a respecté ses engagements en termes de recherche et développement, notamment pour développer une technologie de production faiblement émettrice de CO2. Cela démontre que la France reste une grande nation industrielle (Exclamations à droite) La France n'a pas à rougir de son industrie. L'aéronautique, le luxe, les objets connectés sont autant de domaines d'excellence ; avec Mme Lemaire, nous développons le french tech.
Comme tous les pays, nous préparons des projets éligibles au plan Juncker, dans les secteurs de la transition énergétique, de la formation, du numérique et, bien entendu, des infrastructures. Une belle part sera réservée à l'industrie.
Vous le voyez, le Gouvernement ne manque ni de courage, ni de conviction, ni de détermination ! (Applaudissements sur les bancs socialistes et exclamations à droite)
Asia Bibi
M. Pierre Charon . - (Applaudissements à droite) Ma question s'adresse à M. le ministre des affaires étrangères.
Asia Bibi est une jeune chrétienne pakistanaise condamnée à mort pour blasphème contre le Prophète, ce qu'elle a toujours nié. Son seul crime est sa foi chrétienne, et rien d'autre. Son cas témoigne des persécutions dont sont victimes les chrétiens et les minorités religieuses dans certains pays, boucs émissaires de sociétés livrées aux démons de l'intolérance et où sévit la nouvelle barbarie, en Irak, en Syrie, au Pakistan.
L'affaire est si sensible que certains n'osent plus défendre Asia Bibi ; un gouverneur de province et un ministre ont payé de leur vie leur soutien. La justice pakistanaise, face à la vindicte des foules, préfère faire profil bas, quitte à piétiner les principes fondamentaux du droit. La Haute cour de Lahore a confirmé sa condamnation à mort. Le 16 octobre 2014, la Cour suprême a été saisie d'un recours.
La diplomatie doit montrer son courage. Quand la prudence est partout, le courage n'est nulle part. N'ayons pas peur de demander au président pakistanais, comme le président Retailleau a prié le président de la République de le faire, d'intervenir pour qu'Asia Bibi, en prison depuis 2009, échappe à la mort, voie reconnu son honneur de croyante et de femme ! Comment la France envisage-t-elle de mettre fin à cette situation inique et honteuse ? (Applaudissements au centre, à droite et sur quelques bancs socialistes)
M. Harlem Désir, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargé des affaires européennes . - La condamnation à mort d'Asia Bibi est révoltante. Depuis sa première condamnation en 2010, la France a constamment rappelé que le délit de blasphème était contraire aux droits de l'homme ; elle a dit en tout lieu et toute circonstance son opposition à la peine de mort. La France est très attachée au respect des libertés fondamentales dont la liberté de religion et d'expression protégées par la Déclaration des droits de l'homme et du Pacte international sur les droits civils et politiques de l'ONU que le Pakistan a ratifié en juin 2010. La France protège les minorités religieuses et en particulier les minorités chrétiennes menacées dans certains pays.
La Haute cour de Lahore a confirmé, le 16 octobre dernier, la condamnation à mort d'Asia Bibi pour délit de blasphème. Dès le lendemain, la France a fait part de sa profonde préoccupation et le président de la République est intervenu personnellement pour plaider sa cause. La Haute représentante de l'Union a exprimé son inquiétude. Asia Bibi vient de porter un recours devant la Cour suprême. Je vous le redis sans prudence : la condamnation à mort d'Asia Bibi est révoltante, inhumaine, inacceptable. La France ne ménage pas ses efforts pour un dénouement positif aussi rapide que possible. (Applaudissements)
Lutte contre le décrochage scolaire
M. Jacques Cornano . - Un quotidien titre : Avenir des enfants, la grande inquiétude : 69 % des parents ne font plus confiance à l'Éducation nationale pour assurer l'égalité des chances. C'est pourquoi le président de la République a fait de la jeunesse et de l'éducation sa priorité, en redonnant les moyens nécessaires à l'éducation nationale après des années de désengagement de l'État.
Avec la création de 60 000 postes et la restructuration de la formation professionnelle des enseignants, c'est une politique d'avenir. Mais les chiffres du décrochage scolaire sont alarmants : 140 000 jeunes quittent, chaque année, le système sans diplôme ni qualification.
Le Gouvernement a fait des annonces fortes pour lutter contre le décrochage et déploie des moyens importants. Au-delà de ceux-ci, il faut mobiliser tous les acteurs. La Nation tout entière a la responsabilité de former ses jeunes. Pouvez-vous nous en dire plus sur ce plan ambitieux de lutte contre le décrochage scolaire : en quoi les réponses qu'il apporte sont-elles novatrices ? (Applaudissements sur les bancs socialistes)
Mme Geneviève Fioraso, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche, chargée de l'enseignement supérieur et de la recherche . - Oui, 140 000 jeunes sortent chaque année du système scolaire sans qualification, sans diplôme, sans emploi. Le plan de lutte contre le décrochage, présenté vendredi par le Premier ministre et Mme Vallaud-Belkacem -dont je vous prie d'excuser l'absence-, met en place une méthode à la fois globale et individualisée.
Alors que la majeure partie des moyens consacrés jusqu'alors étaient engagés après le décrochage, il met l'accent sur la prévention, qui a montré son efficacité au Québec ou en Finlande, territoires qui connaissent des taux de réussite scolaire particulièrement élevés. Nous nous en sommes inspirés. 300 millions d'euros sont mobilisés sur six ans : fonds européens, crédits du ministère et du plan des investissements d'avenir. Il apporte une réponse simple, coordonnée, partant des besoins du terrain, associant les jeunes et leurs familles. Il prévoit un numéro unique et gratuit opérationnel dès aujourd'hui, des outils d'échange avec les parents.
En associant les parents, en informant les enfants, on réduit le décrochage. Nous agissons aussi sur la formation des enseignants, auxquels nous avons redonné une formation professionnalisante, supprimée sous le précédent quinquennat. (Exclamations sur les bancs UMP) Nous voulons donner une seconde chance aux jeunes qui décrochent, quel que soit l'endroit où ils habitent, quelle que soit leur origine. (Applaudissements sur les bancs socialistes)
Collectivités territoriales (II)
M. François Bonhomme . - (Applaudissements sur les bancs UMP) Madame la ministre de la décentralisation, les collectivités territoriales vont subir une baisse sans précédent de leurs dotations : 11 milliards d'euros de 2015 à 2017, dont 3,7 milliards dès 2015. Prix à la gorge, les élus sont mis dans une situation intenable ; ils seront contraints soit de réduire les services à la population et les investissements, avec des conséquences pour les entreprises qui vivent de la commande publique, soit d'augmenter les impôts.
La plupart des maires sont responsables ; ils acceptent de participer à l'effort national mais la trajectoire doit être crédible et réaliste. D'après M. Baroin, dont nous saluons l'élection comme nouveau président de l'Association des maires de France (applaudissements sur les bancs UMP), cela aboutira à une réduction de 30 % de l'investissement public sur trois ans et de 10 % de l'investissement local, soit une contraction de 0,2 point de la croissance. Le président du Comité des finances locales, lui, estime que le traumatisme sera tel que le Gouvernement devra cesser de couper dans les dotations et prendre des mesures de relance.
L'effet récessif est garanti. Quand le Gouvernement va-t-il enfin écouter les élus locaux et accepter de négocier avec leurs représentants ? (Applaudissements sur les bancs UMP)
M. Jean-Marie Le Guen, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement . - (Exclamations sur les bancs UMP) Vous partagez l'objectif du Gouvernement de réduction de la dépense publique. Non seulement vous le partagez mais vous voulez faire 100 milliards, 150 milliards d'économies ! (Exclamations sur les bancs socialistes) Vous le feriez sans toucher à la DGF ? Je peine à le croire. D'ailleurs, votre candidat à l'élection présidentielle de 2012 préconisait de réduire les dotations aux collectivités territoriales de 10 milliards dès 2012. (Applaudissements sur les bancs socialistes)
M. Alain Gournac. - Faux ! (On renchérit à droite)
M. Jean-Marie Le Guen, secrétaire d'État. - L'effort demandé aux collectivités territoriales est équitable ; il correspond à leur poids dans la dépense publique, soit 21 %...
M. Philippe Dallier. - Ce n'est pas vrai !
M. Jean-Marie Le Guen, secrétaire d'État. - ... et à 1,6% de leurs recettes totales. Les collectivités les plus fragiles sont largement préservées par le renforcement de la péréquation. (Exclamations sur les bancs UMP)
Mme Marie-Hélène Des Esgaulx. - Vous n'avez rien écouté au Congrès des maires.
M. Jean-Marie Le Guen, secrétaire d'État. - Nous verrons comment les choses se passent en région parisienne, dont les départements, n'est-ce pas monsieur Karoutchi, sont très sensibles à la question de la péréquation...
Les recettes globales des collectivités territoriales vont continuer à augmenter en 2015 avec la revalorisation des bases fiscales, l'évolution favorable de la CVAE, les mesures sur le FCTVA, la revalorisation du barème de la taxe de séjour. Le Gouvernement prend des mesures pour soutenir l'investissement local. Regardons les choses de manière globale. (Applaudissements sur les bancs socialistes)
M. le président. - Je vais suspendre la séance après avoir salué la nomination de notre ancien collègue, M. Jean-Marc Todeschini, au secrétariat d'État aux anciens combattants. (Applaudissements)
La séance est suspendue à 16 heures.
présidence de M. Claude Bérit-Débat, vice-président
La séance reprend à 16 15.