Questions orales
M. le président. - L'ordre du jour appelle dix-huit questions orales.
Documents d'urbanisme
M. Dominique Bailly . - J'attire l'attention du Gouvernement sur la validité du plan local d'urbanisme (PLU) après un changement de schéma de cohérence territoriale (SCOT) -lequel est opposable au premier. Or, du fait de la réforme territoriale, des communes ont quitté le syndicat du Grand-Douaisis, que je connais bien, pour rejoindre Lille-Métropole, dont le schéma n'est pas formalisé à ce jour. Quid de la validité des PLU de ces communes ?
Mme Sylvia Pinel, ministre du logement, de l'égalité des territoires et de la ruralité . - Le Scot, qui a remplacé le schéma directeur depuis la loi SRU, assure la cohérence des documents sectoriels dont le PLU. L'adhésion à une collectivité couverte par un Scot ne remet pas en cause ce dernier ; la commune concernée se trouve alors dans une zone dite « blanche » et le syndicat qui porte le Scot devra faire évoluer son document dans les six ans après l'adhésion.
Si un Scot existe, la commune, même en zone « blanche », sera soumise à la règle d'urbanisation limitée, sauf dérogation du préfet après avis du président de l'établissement public du Scot. À l'inverse, si la commune rejoint un territoire sans Scot, elle n'y est pas soumise.
Dans le cas que vous évoquez, le fait que le Scot soit en cours d'élaboration n'a pas de conséquence sur le PLU des communes. Mais, dès lors que l'élaboration du Scot de Lille-Métropole est lancée, une nouvelle délibération propre à couvrir toutes les communes concernées paraît opportune.
M. Dominique Bailly. - Merci pour ces précisions qui doivent être apportées aux élus, je m'en chargerai.
M. le président. - Cela a l'air compliqué !
M. Dominique Bailly. - La vie est compliquée...
Avenir des Conseils d'architecture d'urbanisme et de l'environnement (CAUE)
M. Jean-Jacques Filleul . - Je m'interroge sur l'avenir des CAUE au regard de la nouvelle taxation des opérations d'aménagement et de construction, entrée en vigueur le 1er mars 2012. Celle-ci a remplacé plusieurs taxes d'urbanisme antérieures, dont la taxe départementale des espaces naturels sensibles (TDENS) et la taxe départementale destinée au financement des conseils d'architecture, d'urbanisme et de l'environnement (TDCAUE).
Les départements ont voté un taux pour cette nouvelle taxe, celle-ci étant assortie d'une nouvelle clé de répartition de son produit entre actions en faveur des espaces naturels sensibles, d'une part, et activité des CAUE d'autre part. Dans l'Indre-et-Loire, la part départementale de la taxe d'aménagement s'élève à 1,6 %.
Le recouvrement de cette taxe souffre de graves dysfonctionnements. Les sommes réellement encaissées ne sont pas en rapport avec les prévisions de la direction départementale des territoires. Le circuit est complexe et le logiciel assurant le calcul de la taxe ne fonctionne pas correctement.
Cette situation fait obstacle à l'élaboration des budgets prévisionnels et à la gestion quotidienne des structures. Le rôle économique et le lien institutionnel fort entre les CAUE et les territoires ne sont plus à prouver, ses outils ont montré leur efficacité.
Le président du CAUE 37 voit ses ressources diminuer et ses charges sont difficilement compressibles. Comment le ministère analyse-t-il la situation des CAUE et particulièrement celle d'Indre-et-Loire ? Quelles mesures seront prises afin de compenser le retard important du recouvrement de la taxe d'aménagement ?
Mme Sylvia Pinel, ministre du logement, de l'égalité des territoires et de la ruralité . - Cette réforme, entrée en vigueur le 1er mars 2012, s'est accompagnée du rapprochement de deux plates-formes. Malgré notre anticipation, des difficultés techniques sont apparues. Depuis juillet 2013, elles ont été levées et les premiers titres ont été émis ; plus de 660 000 factures et avoirs ont été traités pour 1 milliard d'euros. Au 15 octobre 2014, plus d'1 million d'euros ont été recouvrés par le conseil général d'Indre-et-Loire au titre de la part départementale.
De plus, cette réforme, modifiant les délais d'émission des titres de recettes, a eu pour effet de diminuer les sommes reçues par les CAUE en 2013. Cela ne devrait pas se reproduire.
M. Jean-Jacques Filleul. - Merci pour cette réponse. Les CAUE doivent continuer à assurer leurs missions, en particulier sur les projets d'urbanisme individuels. On voit tant d'horreurs... J'espère que votre réponse satisfera le président du CAUE d'Indre-et-Loire.
Embargo russe sur les produits alimentaires
M. Antoine Lefèvre . - L'embargo d'un an, pris au début août par la Russie en réaction aux décisions politiques de l'Union européenne, touche particulièrement les filières françaises porcines et bovines mais aussi celles de la pomme de terre et des fruits et légumes frais.
La filière porcine était déjà fortement concernée par la décision de la Russie de suspendre, dès janvier 2014, ses importations de viande de porc en provenance de l'Union européenne, en raison de deux cas de peste porcine africaine détectés sur des sangliers en Lituanie. Cela s'est traduit, selon l'interprofession nationale porcine, par une perte de plus de 10 millions d'euros par semaine.
La filière laitière est touchée et les producteurs de fruits et légumes doivent faire face, depuis quelques jours, à des importations massives, notamment espagnoles et polonaises, à prix bradés.
Déjà durement touchés par la crise et par des perturbations climatiques fortes, les agriculteurs sont en droit d'obtenir une compensation.
Une enveloppe totale de 365 millions d'euros a été débloquée. Quelle part recevront les agriculteurs français ? A-t-elle été ponctionnée sur la réserve de crise de la PAC ? Sur l'enveloppe dite des « recettes additionnelles » ? Le budget de la PAC ne doit pas servir de variable d'ajustement.
M. Stéphane Le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement . - Oui, l'embargo russe a des effets importants sur les productions agricoles et alimentaires en Europe. Dès l'été, j'avais contacté mes collègues espagnol, allemand et polonais pour définir une politique commune. On voyait déjà les conséquences sur les pêches et les nectarines... Il fallait régler le problème de manière cohérente, globale, sans quoi la décision d'un pays pouvait mettre les autres pays en difficulté, on l'a vu avec les pommes de Pologne. Retrait de la production en cas d'excédent, soutien à la promotion commerciale et promotion des exportations, voici les trois piliers de notre stratégie commune.
Ce que je souhaite, c'est plus de souplesse sur la gestion des retraits et de leurs prix : la situation d'une filière -porcine, bovine, fruits et légumes- diffère de celle des autres, les interprofessions doivent prendre une plus grande part à la décision.
Enfin, la question budgétaire. Oui, la discussion est en cours. Faut-il prendre l'argent sur les marges de gestion ? Sur le fonds de gestion de crise alors que se pose le problème d'Ebola, voire, comme je l'ai entendu et suis en train de le vérifier, sur les fonds de cohésion ? Samedi, j'irai en Espagne pour en discuter. Ma ligne, c'est plus de cohérence et de subsidiarité. J'ajoute que seule une solution politique à la situation ukrainienne permettra de trouver une issue à la crise.
M. Antoine Lefèvre. - Merci, monsieur le ministre. Je reste néanmoins inquiet sur l'affectation du budget de la PAC. Nous devons régler cette question pour les agriculteurs.
Directive « Nitrates »
Mme Anne Emery-Dumas . - La Commission européenne prévoit d'étendre les zones vulnérables définies par la directive « Nitrates ». Dans celles-ci, des pratiques agricoles particulières sont imposées pour éviter les risques de pollution. Cette révision impactera durement la Nièvre, dans un contexte économique et social déjà très dégradé.
Certaines zones de mon département délaissent déjà l'élevage. Il est à craindre que les nouvelles contraintes liées à un classement en zone vulnérable ne renforcent la dynamique de reconversion vers des activités de grande culture, ce qui va à l'encontre du projet agricole départemental pour 2014-2020. De nouvelles études scientifiques sont nécessaires pour mettre la révision de la directive à l'ordre du jour de l'agenda européen. Dans cette attente, un calendrier réaliste doit être trouvé pour la mise en oeuvre des nouvelles contraintes.
M. Stéphane Le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement . - D'abord, dans l'architecture de la nouvelle PAC, tout a été fait pour préserver l'élevage -dans les limites d'une enveloppe qui est ce qu'elle est. Je rappelle que je ne suis pas le ministre de l'agriculture qui a signé la directive « Nitrates », mais que la parole de la France est engagée.
Arrêtons de dire qu'un classement en zones vulnérables suppose de lourds investissements et du béton ; il y a le stockage en plein champ, la voie de la mutualisation avec la méthanisation, le plan de modernisation à la mise aux normes des élevages.
Enfin, nous travaillons avec l'Inra sur les critères scientifiques d'évaluation du risque d'eutrophisation. Sur la base de ce travail et du retour des préfets, nous négocierons avec la Commission sur des fondements scientifiques solides. Je le répète, classement en zone vulnérable n'implique pas nécessairement de lourds investissements.
Mme Anne Emery-Dumas. - Il faut maintenir l'élevage, notamment dans le bassin allaitant, plutôt que de retourner les terres. On ne revient jamais sur les reconversions...
Avenir du marché d'intérêt national (MIN) de Rungis
Mme Laurence Cohen . - La presse s'est faite l'écho d'une éventuelle cession des parts détenues par l'État au sein de la société anonyme d'économie mixte d'aménagement et de gestion du marché d'intérêt national de Rungis (Semmaris), en charge de l'exploitation de ce marché, où plus d'1,5 million de tonnes de produits frais sont vendus chaque jour. Depuis que cette privatisation a été évoquée dans la presse, les élus et élues du Val-de-Marne, les professionnels et professionnelles des fruits, des légumes, des volailles et des fleurs sont très inquiets. Plus de 12 000 personnes travaillent au MIN, 100 000 emplois indirects sont concernés.
Hier, un voeu des groupes Front de Gauche et EELV du conseil général du Val-de-Marne a été adopté à l'unanimité contre la privatisation. Les élus se sont prononcés en faveur de la prorogation de la concession de service public jusqu'en 2050 et l'alignement de la convention de gestion de la Semmaris sur la même échéance.
L'État envisage-t-il véritablement de vendre ses parts, soit un tiers du total ? La concession de service public garantit la sécurité alimentaire, qu'il serait dangereux de mettre en péril.
Voyez les conséquences d'une telle décision de cession dans le cas des autoroutes...
M. Stéphane Le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement . - Ce ne sont, en effet, que des rumeurs de presse qui surgissent au moment où la concession arrive à échéance. Je suis très attaché au service public, il s'agit tout de même du plus grand marché alimentaire du monde où se vendent et s'échangent des produits de qualité qui font la fierté de la France. Nous trouverons la bonne formule pour que Rungis et la Semmaris continuent de rendre ce service d'intérêt général et public à l'Ile-de-France et à notre pays.
Mme Laurence Cohen. - Merci, les élus sont eux aussi très attachés au service public et s'inquiètent des pressions exercées par des lobbies, seulement intéressés par la possible récupération des terrains. Dans l'intérêt de nos concitoyens, la solution est de maintenir une participation très forte de l'État. Peut-être ne s'agit-il que de rumeurs. Mais il est important que les élus, les professionnels, les habitants soient correctement informés. C'est cela, la démocratie.
Viticulture dans l'Aude
M. Roland Courteau . - Le 6 juillet, le ciel a fait pleuvoir un véritable cataclysme sur le vignoble de l'Aude alors que notre viticulture se relevait tout juste de six ans de crise. Il y a urgence, beaucoup n'étaient pas assurés. Les conséquences sont lourdes pour 2014 mais aussi pour les années qui viennent du fait de la perte des fonds.
Pouvez-vous faire le point sur les mesures prises ? Dégrèvement de la taxe foncière sur les propriétés non bâties ; prise en charge des prêts de trésorerie et des intérêts sur les prêts professionnels ; prise en charge des cotisations sociales de la Mutualité sociale agricole (MSA). Concernant ce dernier point, le syndicat des vignerons s'inquiète. L'enveloppe a certes été portée de 15 à 23 millions, mais certains propos tenus au niveau régional ont tempéré l'espoir naissant.
Le monde viticole vous fait confiance, monsieur le ministre, comme il vous fait confiance sur d'autres dossiers, les exonérations de cotisations salariales, les mesures en faveur des exploitants agricoles qui s'engagent à souscrire une assurance climatique ou encore le rétablissement souhaité de l'aide aux moûts concentrés. Il s'inquiète aussi de la réforme du forfait agricole.
M. Stéphane Le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement . - Je ne peux pas accepter qu'on casse une MSA dans l'Aude. Non, la MSA ne coûte pas trop cher ! Là où elle n'existe pas, elle est remplacée par un système assurantiel : la facture est plus élevée et les prestations sont moindres.
Des mesures fortes ont été décidées : augmentation de l'enveloppe à 23 millions, ce qui permettra de traiter les besoins des exploitations les plus en difficulté ; les négociations sur les prêts bancaires sont en cours... Les annonces se concrétisent petit à petit ; elles le seront toutes. Ces aides sont nécessaires et légitimes. Sur la question des moûts concentrés, je me suis engagé à reprendre les discussions avec la nouvelle commission. Je serai mobilisé sur ce sujet comme je l'ai été sur les droits de plantation -je chercherai des alliances...
Le contrat « vendange » a été supprimé à la suite de la décision du Conseil constitutionnel de censurer la disposition relative aux exonérations de cotisations salariales. S'y substitue la suppression de la première tranche de l'impôt sur le revenu. Pour faire face aux aléas climatiques, nous négocions avec les grandes banques l'élaboration d'un système assurantiel ; nous voulons aussi une mutualisation pour les plus fragiles. Des propositions seront faites d'ici la fin de l'année.
Tous les parlementaires recevront prochainement un document présentant le CICE filière par filière ; pour l'ensemble de la viticulture française, il représente une baisse du coût du travail de près de 344 millions. C'est un potentiel supplémentaire pour aller vers la qualité et l'exportation. Le grand Languedoc-Roussillon a montré l'exemple ces dernières années.
M. Roland Courteau. - Je savais qu'on pouvait faire confiance à notre ministre !
Lutte contre la désertification médicale en Seine-Saint-Denis
M. Gilbert Roger . - De nombreuses maisons médicales s'ouvrent en Seine-Saint-Denis, dont un grand nombre en zone franche urbaine (ZFU). Ces structures bénéficient, pour la plupart, d'un soutien des communes, du conseil général et de l'agence régionale de santé.
Pour les centres médicaux de Seine-Saint-Denis qui ne sont pas implantés en ZFU, il est impossible de résister à une telle concurrence. Le centre médical de Bondy, situé en centre-ville, est délaissé par les médecins libéraux, qui rejoignent la nouvelle structure médicale de Clichy-sous-Bois. Le seul dermatologue du cabinet rejoindra en octobre la maison médicale clichoise. Son non-remplacement fragilise l'équilibre du centre médical bondynois, qui reçoit en moyenne 1 200 patients par semaine. La disparition du centre mettrait en péril l'offre de soins à Bondy. Que compte faire le Gouvernement ?
Mme Laurence Rossignol, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, chargée de la famille, des personnes âgées et de l'autonomie . - Mme Touraine, retenue ce matin, rappelle que les maisons médicales, dans le cadre du pacte Territoire Santé qu'elle a lancé, sont un outil pour enrayer les déserts médicaux, qui ne riment pas forcément avec faible densité de population. Elles sont passées de 174 à 370 entre 2012 et 2013 ; elles seront 600 à la fin de cette année. Elles répondent tant à l'attente des médecins que des patients. Une seule maison médicale en Seine-Saint-Denis est implantée en ZFU. L'ARS est à la disposition des professionnels et des structures pour envisager des solutions adaptées localement et prévenir d'éventuels effets de relocalisation des professionnels de santé. L'ARS d'Ile-de-France a été alertée de la situation que vous évoquez.
M. Gilbert Roger. - Je veux bien mais déshabiller un centre pour en habiller un autre à quelques kilomètres n'est pas la solution. La ville de Bondy est déjà fragile.
Hépatites B et C
Mme Aline Archimbaud . - Les hépatites B et C ont fait l'objet, depuis 1999, de trois plans nationaux. Elles représentent un problème majeur de santé publique, avec plus de 500 000 personnes touchées en France et près de 4 000 décès chaque année.
La lutte contre les hépatites connaît une révolution avec l'arrivée de traitements mieux tolérés et autorisant des taux de guérison spectaculaires. Mais les prix annoncés par les laboratoires, en particulier Gilead, sont prohibitifs : 60 000 à 80 000 euros pour une cure de trois mois.
De nombreuses associations s'inquiètent de l'accès équitable à ces traitements. Le Gouvernement est en pleine négociation, je le sais. Pouvez-vous me garantir que tous les malades de l'hépatite C auront accès au traitement -une question qui vaut pour cette maladie mais se posera pour d'autres plus tard ? Quelle place pour les malades dans les discussions avec les laboratoires ?
Mme Laurence Rossignol, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, chargée de la famille, des personnes âgées et de l'autonomie . - Les nouveaux traitements sont plus efficaces, mieux tolérés mais aussi plus coûteux. Notre système de protection sociale remboursant 100 % des frais médicaux dans le cas de ces maladies, les prix pratiqués fragilisent l'assurance maladie. Mme Touraine, très attachée à l'égal accès aux soins comme à l'innovation thérapeutique, cherche, avec ses collègues européens, à faire diminuer les prix. Un mécanisme sera mis en place dans le PLFSS pour 2015, selon lequel les laboratoires, une fois un seuil franchi, devront verser une contribution à l'assurance maladie en fonction de leur chiffre d'affaires. Cette solution, juste et équilibrée, rémunère l'innovation tout en préservant notre sécurité sociale.
Mme Aline Archimbaud. - Un tel mécanisme devra nécessairement être mis en place pour d'autres affections.
Logo Triman
M. Yves Détraigne . - La signalétique commune, dite logo Triman, applicable aux produits recyclables soumis à un dispositif de responsabilité élargie des producteurs doit être mise en place le 1er janvier 2015 ; du retard est à craindre. En mai 2014, le Gouvernement répondait à une question orale que ladite « signalétique commune de tri [suscitant] des interrogations de la part des entreprises (...), le Gouvernement [continuait] son travail sur le projet de décret ».
Ce projet de décret, envoyé récemment pour consultation au Conseil d'État, est totalement vidé de sa substance : une dématérialisation du logo Triman est envisagée. Lors du débat sur le projet de loi d'habilitation, le Gouvernement avait pourtant soutenu le dispositif initial, avec le soutien de la rapporteure pour avis d'alors -vous, madame la ministre.
Ne peut-on pas revoir ce projet de décret ? Le logo Triman ne doit pas pouvoir être dématérialisé, sauf à perdre toute efficacité.
Mme Laurence Rossignol, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, chargée de la famille, des personnes âgées et de l'autonomie . - Je vous prie d'excuser Mme Royal. La signalétique Triman informe le consommateur sur tous les produits à trier, mesure structurante pour améliorer le tri des déchets ménagers, contribuant aux objectifs de la loi pour la transition énergétique et la croissance verte, au progrès vers de meilleurs gestes de tri. Pour autant, les contraintes ne doivent pas être disproportionnées pour les entreprises.
Le ministère de l'écologie a souhaité apporter de la souplesse au dispositif sans le dénaturer. La signalétique restera commune à toutes les filières de recyclage et à tous les produits recyclables. Il est prévu une communication par l'Ademe pour accompagner le lancement du marquage ; pendant le premier semestre 2015, les contrôles seront à visée pédagogique.
M. Yves Détraigne. - Je comprends qu'il y ait des difficultés à apposer le logo sur certains produits. Mais on n'atteindra l'objectif que s'il est clairement visible sur le produit et que si le consommateur est averti qu'il est recyclable. Je souhaite que la dématérialisation ne soit que l'exception.
Difficultés d'emploi des apprentis mineurs
M. le président. - Une question sur l'apprentissage à laquelle répondra encore Mme Rossignol. Il faut quand même que les ministres s'habituent aussi à venir en personne à la Haute assemblée.
M. Rachel Mazuir . - J'attire l'attention de M. le ministre du travail sur les difficultés rencontrées par les collectivités territoriales pour recruter et former leurs apprentis.
La loi du 17 juillet 1992 prévoit que des personnes morales de droit public dont le personnel ne relève pas du droit privé peuvent conclure des contrats d'apprentissage et que ces contrats sont des contrats de droit privé. Ainsi, le département de l'Ain emploie des apprentis qui suivent une formation pratique dans les cuisines de restauration collective des collèges.
Les règles d'hygiène et de sécurité sont celles définies par les livres premier à V de la quatrième partie du code du travail et par les décrets d'application. Les apprentis peuvent être amenés à effectuer certaines tâches qui, du fait de leur minorité, leur sont interdites, mais une demande de dérogation peut être présentée à l'inspection du travail. Or, la Direction régionale des entreprises de la concurrence de la consommation du travail et de l'emploi, saisie d'une telle demande pour des apprentis mineurs employés par le département de l'Ain, s'est déclarée incompétente. Or, la loi de 1992 considère bien la collectivité territoriale, dans ses relations avec ses apprentis, comme est un employeur de droit commun : l'inspection du travail devrait donc être habilitée à délivrer les dérogations, sauf à créer une inégalité entre collectivité territoriale et employeurs privés.
La loi du 5 mars 2014 ne met pas fin à ce vide juridique. Quelles mesures entend prendre le Gouvernement pour le combler ? La directive européenne du 22 juin 1994 relative à la protection des jeunes au travail a été évoquée pour autoriser les employeurs à évaluer eux-mêmes les risques encourus par leurs apprentis et mettre en place les mesures nécessaires sous le contrôle de l'inspection du travail. Étonnant, l'Europe est plus souple que la France, on fait plus blanc que blanc ! Qu'en pense le Gouvernement ?
Mme Laurence Rossignol, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, chargée de la famille, des personnes âgées et de l'autonomie . - Le ministre du travail est retenu par une réunion de l'OIT. Ce matin, six ministres se sont succédé au banc du Gouvernement pour répondre à dix-huit questions, ce qui témoigne du respect du Gouvernement pour la Haute assemblée.
Les dispositions de la quatrième partie du code du travail s'appliquent aux Epic et aux EPA mais pas aux collectivités. Elles n'ont donc pas à demander des dérogations, comme la Direccte l'a précisé à bon droit.
Le rapport remis en février par les missions d'inspection sur les freins non financiers au développement de l'apprentissage préconise d'encadrer les conditions d'emploi des apprentis mineurs. Comme annoncé lors de la grande conférence sociale des 7 et 8 juillet, une réflexion sera engagée, qui devra naturellement tenir compte des règles applicables aux employeurs privés.
M. Rachel Mazuir. - Je vous remercie. Je souhaite que cela aille vite.
La séance, suspendue à 10 h 40, reprend à 10 h 50.
Conséquences de l'arrêt du réacteur nucléaire Osiris
M. Michel Berson . - Ma question s'adresse à Mme la secrétaire d'État chargée de l'enseignement supérieur et de la recherche, quand bien même elle concerne également la ministre de la santé.
Le réacteur Osiris, installé à Saclay, devrait être arrêté fin 2015. Il est l'un des huit réacteurs nucléaires au monde à produire un radionucléide utilisé pour des examens médicaux de scintigraphie nécessaires à la détection de tumeurs cancéreuses, de troubles neurologiques ou de pathologies osseuses, cardiaques, rénales ou pulmonaires. Son arrêt programmé risque d'entraîner une pénurie de radio-isotopes indispensables au diagnostic de ces pathologies.
L'Académie des sciences s'en est émue, y voyant un problème majeur de santé publique. Pourquoi le fermer ? Pour des raisons bien compréhensibles de sûreté nucléaire.
En 2008 et 2010, des travaux de rénovation ont été réalisés ; en 2013, le CEA a demandé le report de sa fermeture en 2018, en attendant que le réacteur Jules Horowitz, en cours de construction à Cadarache, prenne le relais. Or les normes de sécurité post-Fukushima risquent de reporter son ouverture à 2020.
Madame la ministre, pouvez-vous confirmer la fermeture fin 2015 du réacteur Osiris ? Comment, alors, satisfaire la demande incontournable de radio-isotopes d'ici à 2018, voire 2020 ? Sur les sept autres réacteurs produisant des radio-isotopes dans le monde, deux seront fermés entre 2014 et 2018. Devant l'inquiétude des professions médicales concernées, quelles est la réponse du Gouvernement ?
Mme Geneviève Fioraso, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche, chargée de l'enseignement supérieur et de la recherche . - Le réacteur Osiris est utilisé majoritairement pour la production d'électricité, même s'il participe aussi à la production des radioéléments utilisés à des fins médicales.
Lors de la réunion du 9 décembre 2013 du Comité de l'énergie atomique, la décision de fermeture a été prise et, à ma demande, sous deux réserves. Dans son avis, l'Académie de médecine souligne la nécessité d'une continuité des approvisionnements. La mission de l'Igas et de l'IGAER a rappelé qu'Osiris doit être considéré à sa juste place dans la filière d'approvisionnement. Osiris représente 8 % de la capacité de production médicale du technétium 99m. Il est possible d'augmenter temporairement la production d'autres réacteurs. Ainsi, la production d'un réacteur belge peut être doublée. D'ici 2020, il y aura douze réacteurs dans le monde. Il a été décidé que le maintien d'Osiris n'était pas déterminant. Des recommandations ont été édictées pour substituer 90 % de la production actuelle de technétium. De nouvelles pratiques existent déjà, encore peu utilisées. Une circulaire auprès des prescripteurs aidera à les développer. L'investissement consacré ainsi à l'évolution des pratiques professionnelles apparaît bien plus efficace que celui qui eût été nécessaire pour le maintien de la sécurité d'Osiris.
M. Michel Berson. - Merci pour cette réponse circonstanciée, sur le risque qui est devant nous, d'une pénurie de production de radioéléments indispensables à certains examens médicaux. Votre réponse me rassure, car vous évoquez des solutions de substitution, pour tenir jusqu'en 2018, voire 2020. Cependant, le remplacement du technétium 99m n'est pas possible pour 30 % des examens très pointus réalisés aujourd'hui. Ainsi, pour des examens en tomographie par émission de positons (Tep), on pourra apporter peut- être une certaine réponse, mais à un coût très élevé, alors que le parc français de Tep est très insuffisant.
Si le risque sanitaire était avéré, en raison d'une pénurie de radio-isotopes, l'ASN et le comité de l'énergie atomique pourront prendre des mesures appropriées. Le problème demeure donc. Nous sommes en 2014, bientôt 2015 ; il faut tenir jusqu'en 2020.
Stages hors du temps scolaire
M. Henri Tandonnet . - Les entreprises, institutions et organismes accueillant des élèves en stage le font à la condition que ceux-ci soient conventionnés par le proviseur de leur lycée.
Or certains proviseurs refusent de signer de telles conventions pour les périodes de vacances expliquant que les élèves ne sont alors plus sous leur responsabilité juridique.
Chacun est pourtant conscient de l'importance des stages dans le cursus scolaire. Il est essentiel de faciliter l'accès aux stages, notamment pendant les vacances. Il suffirait que le rectorat établisse une convention-type. Les parents sont tous titulaires d'une assurance responsabilité civile qui pourrait être étendue à ce type d'activité, comme elle peut l'être aux activités extrascolaires.
Quelles sont les intentions du Gouvernement pour faire avancer ce dossier et fournir ce type de stages ?
Mme Geneviève Fioraso, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche, chargée de l'enseignement supérieur et de la recherche . - Je vous prie d'excuser Mme Najat Vallaud-Belkacem, qui s'est rendue ce matin sur le site d'une école sinistrée avec le ministre de l'intérieur. J'ai défendu la loi du 10 juillet 2014 qui renforce la dimension pédagogique des stages. Pendant leur stage, les lycéens sont sous une double responsabilité. Des conventions-type sont disponibles sur le site Eduscol du ministère de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche.
Pour renforcer encore l'accès des jeunes au monde professionnel, chaque élève pourra en 2015 inscrire un stage dans le cadre de son parcours. Il est en effet nécessaire d'améliorer l'accès au stage. L'Onisep a créé une plateforme afin d'informer et d'orienter tous les candidats aux stages. Un pôle stage dans les établissements ou regroupements d'établissements collectera et suivra l'offre de formation dans le bassin d'emploi. Nous avons la ferme volonté de faire en sorte que les stages ne soient pas réservés à ceux dont les parents disposent d'un réseau relationnel. L'État doit constituer le réseau de ceux qui n'en ont pas.
M. Henri Tandonnet. - Merci. La loi représente un progrès indéniable. Dans ma circonscription, je me suis cependant heurté au refus du proviseur du lycée d'Agen quand j'ai voulu accueillir un stagiaire en période de vacances scolaires, alors que j'avais pu le faire sans problème avec un jeune de la région parisienne. J'ai toujours vu les effets bénéfiques des stages. J'espère qu'ils se multiplieront dans les années à venir.
Rythmes scolaires et intercommunalité
M. Hervé Maurey . - Une fois de plus, j'attire l'attention sur les difficultés de mise en place de la réforme des rythmes scolaires, espérant aujourd'hui une réponse qui ne m'a été apportée ni par M. Peillon ni par M. Hamon.
Alors que les communes sont ponctionnées comme jamais, les régles du fonds d'amorçage ne leur permettent pas d'apporter leur aide aux EPCI disposant de la compétence « activités périscolaires ».
Le choix du rectorat d'organiser les consultations sur les nouveaux programmes sur le temps scolaire a posé bien des difficultés d'organisation, tant pour les responsables des transports scolaires que pour les parents.
Je demande le réexamen par vos services du refus opposé dans mon département aux adaptations et dérogations ; la pérennisation du fonds d'amorçage ; la clarification des règles pour que les communes puissent enfin verser leurs subventions aux EPCI ; un bilan de la réforme avant la fin de l'année ; la mise en place des consultations hors du temps scolaire.
Mme Geneviève Fioraso, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche, chargée de l'enseignement supérieur et de la recherche . - Le code de l'éducation dispose que l'éducation est un service national. La réforme de l'organisation des temps scolaires est donc bien de la compétence de l'État. Les décrets du 24 janvier 2013 et du 7 mai 2014 ont apporté de la souplesse. L'organisation des activités périscolaires est, elle, une compétence exclusivement communale. Le syndicat intercommunal à vocation scolaire (Sivos) est l'une des modalités d'organisation.
Les EPCI détenteurs de la compétence « activités périscolaires » bénéficient du fonds d'amorçage, pas les Sivos en revanche.
La concertation est permanente entre le ministère et les collectivités territoriales. Il est attentif à la mise en oeuvre souple d'une mesure qui n'a qu'un objectif : la réussite de tous les élèves.
M. Hervé Maurey. - Sur cinq questions, j'ai obtenu une réponse, ce qui n'est pas si mal !
Aujourd'hui, une commune ne peut pas reverser les dotations du fonds d'amorçage à l'EPCI. Vous avez dit que c'est possible, M. Hamon aussi. Les services du ministère de l'intérieur pensent l'inverse. Je souhaite que votre doctrine entre dans les faits.
Sur les autres questions, pas de réponse sur ma demande de réexamen, sur la pérennisation du fonds d'amorçage, sur les consultations hors temps scolaire. Quid d'un vrai bilan de cette mesure supposément si positive pour les élèves ? J'en doute. En tout cas, elle n'est pas supportable par les collectivités.
Avenir des CCI
M. le président. - M. Longuet et moi-même souhaitons la bienvenue à M. Emmanuel Macron. Avec 37 ans de présence parlementaire, nous sommes heureux de vous voir, monsieur le ministre. Nous vous souhaitons une longévité égale à la nôtre ! (Sourires)
M. Daniel Laurent . - Les chambres de commerce et d'industrie (CCI) s'étonnent que le Gouvernement organise un démantèlement de l'économie dans les territoires au moment où il propose aux entreprises un pacte de responsabilité.
Le 24 mai 2014, les présidents des CCI ont pris la décision de suspendre tous leurs travaux en cours avec le Gouvernement. Ils ont décidé de ne plus promouvoir les politiques publiques, en particulier le pacte de responsabilité. Alors que, le 28 mai 2013, le Premier ministre signait, avec le réseau des CCI de France, un pacte de confiance, la baisse des ressources, de l'ordre de 20 % en 2014, l'a érodé.
Ainsi, dans ma région Poitou-Charentes, deux CCI subiraient des prélèvements supplémentaires de plusieurs millions d'euros alors que d'autres demeureraient indemnes.
Le CCI de Rochefort ne pourra plus gérer son centre de formation d'apprentis. L'aéroport de La Rochelle-Ile de Ré, qui accueille 215 000 passagers par an, est menacé. Il en va de même pour les ports de pêche, les palais des congrès, toutes activités qui représentent des emplois, ainsi que pour les services aux entreprises. Les mesures drastiques envisagées en Charente-Maritime entraînent une centaine de suppression d'emplois, 6 000 au niveau national.
Les CCI assurent des missions de service public. Laissez-leur le temps de se réformer. Tout au long de la campagne sénatoriale, nous avons mesuré l'ampleur du désarroi des élus après les baisses de dotations, les réformes, comme celle des rythmes scolaires.
Je ne reviens pas sur les amendements au projet de loi de finances adoptés à l'Assemblée nationale. J'espère qu'une solution satisfaisante sera trouvée pour limiter le déficit budgétaire de l'État tout en permettant aux CCI de mener à bien leur mission déterminante. Quelle est votre vision de l'avenir des CCI ?
M. Emmanuel Macron, ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique . - Merci pour votre message d'accueil.
Les CCI ont des missions importantes. Je l'ai rappelé le 19 septembre devant leur assemblée générale. Elles ont un rôle en matière d'apprentissage, de services aux entreprises, d'aménagement du territoire, de pédagogie de notre action économique et nous nous sommes appuyés sur elles pour mettre en place le CICE ou le pacte de responsabilité. Leur rôle n'est donc pas en cause. Néanmoins, l'esprit de responsabilité qui nous anime face à la situation de nos finances publiques doit aussi concerner les CCI, qui ont touché pendant des années des recettes parafiscales largement supérieures à leurs besoins, alimentant leurs fonds de roulement. Il aurait fallu commencer à y mettre bon ordre bien avant. Les fonds de roulement ont fait l'objet de prélèvements, représentant une baisse de 4 % des recettes. La diminution de la taxe pour frais de chambre représente non pas une recette pour le budget de l'État mais une charge en moins pour les entreprises.
Il n'est pas question de la taxe d'apprentissage, ni de l'action relative aux ports, aéroports, parcs d'exposition ou de l'accompagnement des entreprises, etc. Lorsque j'entends la menace de fermer certains CFA en représailles, je réitère mon appel à la responsabilité. Beaucoup peut encore être fait pour diminuer les dépenses des CCI.
Nous avons tenu compte de la réalité locale. Une trentaine de CCI ne seront donc pas concernées. Le Sénat aura à discuter des modalités. Je regrette que les CCI aient préféré le jeu du pire. Les situations locales sont très différentes. Revenons à la concertation. L'effort global ne peut être diminué car il est nécessaire mais on peut modifier sa répartition. Je le répète, le rôle d'intérêt général des CCI est au coeur de notre économie.
M. Daniel Laurent. - Merci pour votre réponse, qui ne satisfera pas les CCI. La crise économique est majeure mais les ressources que vous avez évoquées ont été utilisées par les CCI à bon escient. Dans les territoires ruraux, il faut maintenir des politiques de qualité, de proximité, pour les entreprises, les petits commerces, les collectivités. Merci de nous écouter et de nous entendre, et d'être efficace dans votre décision.
Alignement des cadres d'emplois de catégorie A de la fonction publique territoriale
M. Gérard Longuet . - Merci, monsieur le président, d'avoir rappelé notre longévité respective. Je ne vous en dois pas moins le respect : les électeurs vous ont fait honneur plus souvent qu'à moi. Je me réjouis de la présence de M. Macron dans notre hémicycle. Vous êtes en charge des professions réglementées et la première d'entre elles, dans notre pays, est la fonction publique de l'État, suivie par la fonction publique territoriale. Un ministre de la décentralisation se justifie pleinement -M. Gaudin le sait à Marseille- ; le mouvement s'accompagne de jeux de taquet entre personnels. Ma question, précise, en est un exemple : où en est-on du rapprochement entre attachés territoriaux de conservation du patrimoine et des bibliothécaires territoriaux et attachés d'administration ?
M. Emmanuel Macron, ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique . - Mme la ministre de la décentralisation, qui est dans le Loir-et-Cher....
M. Gérard Longuet. - C'est une bonne excuse !
M. Emmanuel Macron, ministre. - ...m'a chargé de cette réponse. Je conviens que la complexité des statuts dans les fonctions publiques est de plus en plus difficile à comprendre. Le décret du 17 décembre 2009 prévoit de porter l'indice brut terminal des attachés territoriaux de conservation à 801 points, à parité avec les attachés d'administration, contre 780 auparavant mais n'a pas créé un nouveau grade d'avancement. La décision d'accorder un grade d'avancement n'a pas été prise, par crainte d'appels d'air. Néanmoins, si les effets de bords sont réels entre fonctions publiques, Mme Lebranchu veut poursuivre les discussions.
M. Gérard Longuet. - J'étais rapporteur du budget de la fonction publique en 1978 ; je m'étais attiré les foudres des syndicats car je proposais alors un service public reposant sur des agences et des opérateurs -j'avais un peu d'avance. Il faut du dialogue, et aussi de la souplesse. Il est normal que les collectivités locales aient une approche différente. J'apprécierai que Metz, par exemple, où le centre Pompidou est une réelle réussite, avec une contribution volontaire des collectivités locales, puisse effectuer ses propres choix sans que cela ne soit ressenti comme une dévalorisation de la fonction publique territoriale par rapport à la fonction publique d'État.
Complexité des normes administratives
M. Jean Boyer . - Monsieur le président, vous présidez cette séance pour la première fois de cette mandature. Votre serviteur intervient, lui, pour la dernière fois. Nul ne choisit le berceau de sa naissance ni le lit de sa mort mais l'homme décide comment il mène sa propre vie. Je veux vous rendre hommage, monsieur Gaudin, vous qui avez surmonté les obstacles grâce à vos qualités humaines. Votre compétence, votre sérieux, votre chaleur inspirent naturellement la confiance.
Les normes devraient être sécurisantes, non dissuasives. Ne lavons pas plus blanc que blanc dans la transposition des directives, au risque de fragiliser notre développement économique. L'ancien agriculteur qui vous parle se désole qu'un escabeau, parce qu'il a trois marches, nécessite un agrément pour être utilisé. Je le disais hier, je le répète aujourd'hui : avec ces normes, ces prescriptions, peut-on vraiment rendre la mobilité à des centenaires et à des personnes handicapées ?
Dans une grande ville, un escalier est emprunté par des milliers de gens mais dans une commune de 120 habitants, à peine dix fois l'an. Les normes ne peuvent être identiques. Tous les gouvernements disent « Simplifions ! » mais on ne voit rien venir.
M. Thierry Mandon, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargé de la réforme de l'État et de la simplification . - Dans cette question, qui est la dernière que vous posez, je vois un symbole de votre action de parlementaire. La simplification est une action de long terme, pour réduire le stock, mais aussi le flux de normes.
Le 30 octobre prochain, le Gouvernement présentera une cinquantaine de nouvelles mesures de simplification, après les 114 prises pour les entreprises.
De plus, dès 2015, toute étude d'impact fera l'objet d'une contre-expertise ; il sera prévu un mécanisme automatique de compensation pour les nouvelles charges pesant sur les entreprises. Pour les collectivités, un moratoire est prévu. Concernant les personnes handicapées, Claire-Lise Campion, votre collègue, travaille avec Mme Neuville à simplifier des normes que nous avons héritées du passé. Enfin, nous avons, il est vrai, parfois surtransposé les directives européennes.
Ce travail de simplification est très long. Le Royaume-Uni l'a entamé il y a dix ans. On estime que quinze ans sont nécessaires pour en venir à bout. J'espère que nous irons plus vite !
M. Jean Boyer. - Découvrons nos richesses. Je découvre la vôtre, monsieur le ministre : vous connaissez parfaitement le dossier. Je sais qu'il y a le vouloir et le pouvoir mais vous ne manquez pas de détermination.
Dans notre société tout le monde veut ouvrir un parapluie, même en période de sécheresse : les services de l'État, les maires aussi parfois. Ne faut-il pas une adaptation locale ? C'est encore plus crucial pour les règles européennes.
M. le président. - Monsieur Boyer, vous qui avez pris la décision de nous quitter librement, je veux, à mon tour, vous dire notre respect, notre fidélité et notre reconnaissance. Vous êtes de cette race d'hommes et de femmes politiques, tant décriés aujourd'hui, qui se sont inspirés de cette phrase du philosophe chrétien Etienne Borne : « La politique est partout mais elle n'est pas tout ». Vous avez creusé un sillon, dans la lignée de Marc Sangnier. (Applaudissements)
Déclarations d'intérêts et d'activités des parlementaires
Mme Catherine Procaccia . - La loi organique et la loi du 11 octobre 2013 relatives à la transparence de la vie publique ont introduit l'obligation de publication des déclarations d'intérêts des parlementaires. Ces déclarations ont été rendues publiques le 24 juillet 2014 sur le site internet de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique.
Je suis pour l'open data. En revanche, des formulaires manuscrits simplement scannés sont illisibles et donc inutilisables dans cette perspective. Des milliers de citoyens ont dû effectuer eux-mêmes un travail de saisie dont l'État aurait pu se charger, pour rendre ces données utilisables. Pourquoi en outre faire apparaître les signatures ? Ne doit-on pas protéger les élus, comme les citoyens contre les risques d'usurpation de leur identité ? Flouter les signatures est à la portée d'un gamin de 12 ans !
M. Thierry Mandon, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargé de la réforme de l'État et de la simplification . - Le décret du 23 décembre 2013 impose la signature de la déclaration qui, dans la loi d'octobre 2013, n'a pas été considérée comme devant être soustraite au public. Nul risque d'usurpation d'identité ; de nombreux documents publiés, accessibles, comportent la signature de l'élu, ne serait-ce que la profession de foi. Cela dit, dans une logique d'open data, nous devons, en effet, impérativement améliorer la qualité des documents mis en ligne.
Mme Catherine Procaccia. - On a critiqué les parlementaires. Si, au moins, l'administration nous avait envoyé des documents à remplir en ligne, on aurait abouti à un résultat propre.
M. Thierry Mandon, secrétaire d'État. - C'est sûr !
Mme Catherine Procaccia. - Le problème des signatures doit être regardé de près - on me renvoie à un décret qui, par nature, échappe aux parlementaires. Des documents signés sont déjà publiés sur internet. Certes. Mais là on rend d'un coup plusieurs centaines de signatures accessibles d'un seul clic. Voyez l'incident qui est arrivé à Mme Najat Vallaud-Belkacem. Les parlementaires sont des citoyens comme les autres, ils ont droit à la même protection.
Système « LAPI »
Mme Marie-Hélène Des Esgaulx . - C'est une joie que cette première séance de questions orales présidée par Jean-Claude Gaudin en personne !
La Commission nationale de l'informatique et des libertés (Cnil) s'oppose à l'utilisation du système de lecture automatisée des plaques d'immatriculation (LAPI), par la ville de Gujan-Mestras. Je ne comprends pas...
Aucun agent ne scrute 24h/24h les vidéos. Le système n'est utilisé que sur réquisition de la gendarmerie ou de la police nationale, en présence d'un agent de police municipale dûment habilité par la préfecture. Seules les forces de l'ordre ont la possibilité d'exploiter ces données.
Les griefs de la Cnil, très péremptoire, ne sont pas fondés. Pour nous, c'est aussi une question financière puisqu'il en a coûté 80 000 euros à la commune. Nous allons contester cette décision de la Cnil.
M. Thierry Mandon, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargé de la réforme de l'État et de la simplification . - M. le ministre de l'intérieur vous prie d'excuser son absence. Vous le savez l'article L. 252-1 du code de la sécurité intérieure fixe le cadre. Une communication sera faite aux préfets, aux forces de sécurité et aux communes pour le leur rappeler. Au regard de la loi « informatique et libertés », la Cnil, en toute indépendance, a estimé que le dispositif ne répond pas aux deux exigences de finalité et de proportionnalité. Je comprends votre déception mais cette autorité administrative assume ses missions et le Gouvernement ne peut pas contester ses décisions.
Mme Marie-Hélène Des Esgaulx. - Cette réponse ne me satisfait pas, pas plus qu'elle ne satisfera les forces de l'ordre. Les collectivités territoriales font de gros efforts sur la vidéosurveillance pour protéger les habitants mais aussi pour épauler policiers et gendarmes. Que la police municipale soit visée par la Cnil, c'est énorme : elle ne fait que mettre ses images à la disposition de la police nationale ! Le législateur devra y mettre bon ordre. Permettez-moi de vous le dire, Monsieur le ministre de la réforme de l'État et de la simplification, il faudrait apporter une réponse plus satisfaisante.
La séance est suspendue à 12 heures 10.
présidence de M. Gérard Larcher
La séance reprend à 14 h 30.