Désignation des conseillers prud'hommes (Procédure accélérée)
M. le président. - L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi relatif à la désignation des conseillers prud'hommes.
Discussion générale
M. François Rebsamen, ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social . - Permettez-moi tout d'abord de saluer les sénateurs nouvellement élus ou plus anciens.
« Affaiblir les prud'hommes serait affaiblir les plus faibles ». Je reprends cette maxime de Pierre Joxe à mon compte. Ce serait aussi aller contre notre modèle social. Les prud'hommes sont une institution singulière, frappée du sceau du paritarisme et pionnière dans la reconnaissance de l'égalité dans l'effort : les femmes sont électrices depuis 1907, éligibles depuis 1908.
Les prud'hommes, institution vivante, doivent pourtant évoluer avec leur temps. Le rapport de M. Lacabarats, ancien président de la chambre sociale de la Cour de cassation, fournit des pistes de réflexion pour améliorer la procédure et la rendre plus efficace. Nous nous y emploierons, dans le dialogue avec les partenaires sociaux.
Le sujet qui nous occupe est plus limité mais aussi fondamental : le passage d'une élection directe à une désignation en fonction de l'audience des organisations syndicales.
Plusieurs raisons à cela. Le taux d'abstention est élevé - 75 % aux dernières élections en 2008 - ce qui mine la légitimité des juges comme de l'institution. Des réformes de la représentativité - syndicale en 2008, patronale en 2014 - ont été entreprises. Il faut en être fiers. Tirons-en les conséquences. Ni le paritarisme, ni le nombre de conseils ou de conseillers, ni la carte ne sont concernés par ce projet.
Celui-ci adosse la légitimité des prud'hommes à la mesure de l'audience des organisations syndicales lors des élections professionnelles. Quoi de plus solide ? Le principe de l'élection demeure. Le Sénat est bien placé pour savoir que le suffrage universel direct n'est pas la seule source de légitimité démocratique...
Si nous connaissons la représentativité des organisations syndicales, celle des organisations patronales ne sera mesurée qu'en 2017 ; c'est pourquoi le Gouvernement a décidé la prorogation des mandats de conseillers actuels pour deux ans.
Ces dispositions ont passé le double contrôle du Conseil d'État et du Conseil constitutionnel, celui-ci ayant été saisi d'une question prioritaire de constitutionnalité au sujet d'une autre juridiction dont les membres élus ne le sont plus.
Un mot sur le recours aux ordonnances. Le Parlement ne les apprécie guère - il a raison. Mais le sujet est très technique. La loi instaure un principe et un cadre, ce qui est essentiel, et la réforme doit être construite avec les partenaires sociaux. Ici, l'ordonnance est le véhicule le plus adapté. Si l'habilitation est votée, et dès la promulgation de la loi, nous mènerons la consultation la plus large possible pour établir le régime définitif, celui qui sera mis en oeuvre en 2017.
L'organisation des élections prud'homales coûte 100 millions d'euros. Il ne s'agit pas ici de supprimer une élection pour faire des économies - la démocratie n'a pas de prix ! (M. Jean Desessard s'exclame) Mais cette somme ne serait-elle pas mieux employée pour financer la démocratie sociale, former les conseillers prud'homaux ? Le fonds paritaire créé par la loi du 5 mars 2014 va être prochainement mis en place.
M. Jean Desessard. - Ah bon ?
M. François Rebsamen, ministre. - Le temps est révolu où les élections prud'homales jouaient par substitution le rôle de mesure de la représentativité. Leur évolution dit quelque chose de notre démocratie sociale : un cap a été franchi, celui de la maturité. Représentativité, financement rationalisé et transparent, concertation très large, sont autant de gages de cette maturité.
Des évolutions ultérieures sont sans doute souhaitables. Personne n'ignore les difficultés de la justice prud'homale, notamment la durée moyenne de traitement d'une affaire - douze mois - qui conduit à de nombreuses procédures engageant la responsabilité de l'État pour méconnaissance des délais raisonnables sur le fondement de l'article 6 de la CEDH. Or 99 % des affaires sont portées par les salariés, qui sont les plus fragiles. Le temps est l'argument des forts et affaiblit les faibles.
Les salariés comme les employeurs ont besoin de prud'hommes qui fonctionnent mieux. La réforme qui nous occupe aujourd'hui n'a pas d'aussi grandes ambitions, mais tout se construit pierre par pierre. (Applaudissements sur les bancs socialistes)
Mme Anne Emery-Dumas, rapporteure de la commission des affaires sociales . - Ce projet de loi modernise le mode de désignation des conseillers prud'hommes. Son objet est circonscrit : il remplace l'élection par une désignation fondée sur l'audience des partenaires sociaux. Je rappelle à nos nouveaux collègues que la commission, sur le rapport de M. Le Menn, auquel je rends hommage, a adopté ce texte sans modification le 23 juillet 2014.
Pourquoi une telle réforme ? L'élection prud'homale a trois faiblesses, comme l'a montré le rapport Richard-Pascal commandé par le gouvernement Fillon en 2010. L'abstention d'abord : 4,7 millions de salariés seulement ont voté en 2008 ; et son taux ne cesse de croître : 67 % en 2002 et 75 % en 2008, 37,4 % en 1979... Sa complexité ensuite : les élections sont organisées par les communes, qui établissent et vérifient les listes électorales avec les services déconcentrés de l'État. Compte tenu de la lourdeur de cette mission, l'AMF demande régulièrement qu'elles soient déchargées de cette responsabilité. Partenaires sociaux, entreprises et prestataires privés sont également impliqués.
Enfin, le coût de ces élections n'est pas négligeable : 91,6 millions d'euros en 2008, trois fois celui du référendum sur le quinquennat... Certes, ce dernier argument ne justifie pas à lui seul la réforme. Mais une autre élection concurrente existe : en 2013, 5,4 millions de salariés ont voté pour les organisations syndicales de leur choix - 700 000 de plus qu'aux élections professionnelles. La loi du 5 mars 2014 a fixé les critères de représentativité des organisations patronales, mais les résultats ne seront connus qu'en 2017.
Des scénarios alternatifs à la suppression de l'élection étaient possibles, au suffrage direct ou indirect, mais leurs inconvénients dépassaient leurs avantages.
Venons-en au projet de loi proprement dit : l'article premier habilite le Gouvernement à remplacer, par ordonnance, l'élection par un dispositif de désignation fondé sur l'audience des organisations syndicales et patronales. Le périmètre de l'ordonnance est clairement précisé. Le dispositif transitoire pour la période 2015-2017, qui prévoyait notamment la désignation du collège employeurs selon des règles ad hoc, a été abandonné par une lettre rectificative du 16 juillet dernier. Ce qui a pour conséquence, après concertation avec les partenaires sociaux, de proroger de deux ans le mandat des conseillers actuels.
Ce texte pragmatique prévoit que la désignation des conseillers prud'hommes se fondera sur la mesure de l'audience des syndicats selon les règles établies en 2008 et 2014. Le Conseil d'État comme le Conseil constitutionnel, ce dernier statuant sur une QPC relative à la désignation des assesseurs des tribunaux de sécurité sociale, ont estimé que cette prorogation était justifiée.
Quelques difficultés techniques demeurent. Je fais confiance à M. le ministre pour trouver les solutions idoines, en concertation avec les partenaires sociaux.
Il reste indispensable que le Gouvernement réserve une suite au rapport de M. Lacabarats sur l'avenir du système. Les conseils de prud'hommes ont besoin d'efforts budgétaires pour assurer leur mission. Je vous invite à adopter le présent projet de loi. (Applaudissements sur les bancs socialistes)
M. Jean-Baptiste Lemoyne . - Ce premier texte que nous examinons a trait à la question sociale. Faut-il y lire la volonté de faire passer en catimini une réforme importante pour les conseils de prud'hommes, institution très ancienne et qui a donné très précocement le droit de vote aux femmes ? Rappelons que cette institution fondamentale a rassemblé Léon Bourgeois et Albert de Mun...
Certes, elle n'en devait pas moins évoluer. Le groupe UMP partage le constat qu'il faut agir. J'observe toutefois que les précédentes tentatives dans ce sens n'ont pas fait l'objet d'un grand enthousiasme sur tous les bancs : à croire qu'un stagiaire facétieux du ministère des relations avec le Parlement testait toutes les possibilités dilatoires du règlement des assemblées...
Légiférer par ordonnances ? Cela ne me gêne pas. Peut-être y aurons-nous recours nous-mêmes en 2017 ! (Mme Annie David s'amuse) Mais si l'on veut agir vite, encore faut-il savoir où l'on va : au Gouvernement de fournir au Parlement des éléments d'impacts aussi précis que possible.
J'ai rencontré les conseillers prud'hommes de l'Yonne. Le réel doit éclairer nos travaux. Nombreux sont ceux qui pensent qu'il faut adapter les règles. Cooptation, abstention... Tout cela n'est pas neuf : en 1809, la participation n'était que de 22 %. Bref, l'histoire bégaie !
L'AMF a souhaité que les mairies soient déchargées de l'organisation de ces élections : leur coût, c'est vrai, n'est pas nul.
Le taux de conciliation est trop faible, dit-on. Trop de postures demeurent. Les différentes versions du texte n'ont guère fait pour la pédagogie de la réforme et, sur le terrain, les craintes sont nombreuses.
Le suffrage indirect, je le reconnais, est susceptible, nous le savons, de désigner des conseillers engagés et compétents.
Faire passer les mandats des conseillers employeurs actuels de 7 à 9 ans n'ira toutefois pas sans difficultés. L'audience prise en compte sera-t-elle nationale ou locale ? Quid des regroupements de sections qui risquent d'éloigner les partenaires sociaux de leurs juridictions ?
Améliorons la représentativité de notre démocratie sociale, réduisons les délais de traitement, repensons le système dans sa globalité.
Ce projet de loi, présenté à la hussarde, est trop peu ambitieux. Le groupe UMP s'abstiendra. (Applaudissements sur les bancs UMP)
M. Jean Desessard . - Le projet de loi autorise le Gouvernement à supprimer par ordonnance les élections prud'homales. Premier argument : le coût pour la collectivité, 91,6 millions en 2008. Pourtant, les élections européennes de 2009 ont coûté 120 millions d'euros, les présidentielles de 2007 davantage encore.
Les emplois en jeu sont un autre argument, qui devrait compter davantage, tout comme le pouvoir d'achat des employés municipaux...
L'abstention n'est pas un argument plus convaincant : dès lors, pourquoi ne pas supprimer les élections européennes ? Ou, pour reprendre la formulation technocratique du ministre, adosser la désignation des députés européens à la représentativité des partis, constatée lors de l'élection présidentielle ?
L'organisation des élections par les collectivités territoriales aurait pu faire l'objet d'un plus vaste débat - au Sénat par exemple - et de proposition de simplification. Coût, abstention, complexité : les trois arguments sont faibles, vous le voyez.
Le mécanisme proposé pose un problème de légitimité. La tradition prud'homale veut en effet que les juges soient désignés par leurs pairs. Les prud'hommes sont des élections nationales, couvertes médiatiquement, et suscitent des campagnes suivies. Elles n'ont rien à voir avec les élections professionnelles, plus localisées.
Quant aux chômeurs, involontairement privés d'emploi, ils ont la possibilité de voter aux élections prud'homales, mais pas aux élections professionnelles : cette réforme les éloigne donc davantage encore du monde du travail. Idem pour les travailleurs précaires.
Enfin, la place de l'économie sociale et solidaire n'est pas suffisamment prise en compte.
Bref, cette réforme ne correspond pas à notre vision de la démocratie sociale.
Il n'y a plus de tabous, dit le Gouvernement...
M. Alain Néri. - Mais il y a des totems !
M. Jean Desessard. - Y a-t-il encore un projet ? Nous ne voterons pas ce projet de loi. (Applaudissements sur les bancs CRC et écologistes)
M. Dominique Watrin . - M. Rebsamen nous a indiqué en commission vouloir améliorer le fonctionnement des prud'hommes, institution très ancienne et fondatrice de notre modèle social.
Nous partageons cette ambition. La double exigence de parité et de démocratie doit être préservée.
Juridictions anciennes, les prud'hommes sont aussi modernes, cela a été rappelé. C'est ainsi la seule élection au suffrage universel direct sans distinction de nationalité.
Si leurs dysfonctionnements ont été rappelés, leur coût n'est pas un argument valable : il n'est que d'un euro par électeur et par an.
Mais plutôt que de rechercher des solutions aux problèmes, vous préconisez la suppression pure et simple des élections. S'il fallait supprimer toutes les élections où le taux d'abstention est important, il ne resterait plus grand-chose de notre démocratie !
Tous les acteurs n'ont pas été consultés. Certains font pourtant des propositions intéressantes, comme le décloisonnement du vote par section.
Ce projet de loi est un recul pour la démocratie. Les élections prud'homales ne mesurent pas d'audience : il s'agit d'une élection démocratique, irréductible à la représentativité syndicale. Ce projet de loi rapproche les conseils de prud'hommes du système des tribunaux de la sécurité sociale, presque de l'échevinage, avec des juges professionnels : nous ne l'acceptons pas.
En supprimant l'élection, on casse le thermomètre au lieu de chercher à guérir la fièvre !
Mesurer l'audience des syndicats ? Il faut savoir que 36 % des travailleurs ne se syndiquent pas par crainte de représailles de leur employeur !
Ce projet de loi est inefficace et nuisible. La substitution de l'élection par la désignation éloignera davantage les travailleurs de leurs juridictions : c'est un recul des droits des travailleurs. (Applaudissements sur les bancs CRC ; M. Jean Desessard applaudit aussi)
M. Gilbert Barbier . - Enfin ! Ce dossier est en instance depuis près d'un an. Tout le monde dénonce la participation en baisse aux élections prud'homales - 63 % en 1979, 21 % en 2008. Le rapport de 2010 a clairement montré les problèmes soulevés par le système : complexité de son organisation, coût, etc. La participation n'a jamais été aussi faible qu'en 2008.
Les candidats sont méconnus, les électeurs se désintéressent de ses enjeux.
L'abstention menace à terme l'institution. Une réforme est nécessaire. Dans celle proposée, le principe électif demeure. J'en partage l'objectif.
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Par souci de simplicité, vous avez souhaité proroger une nouvelle fois le mandat des conseillers actuels. La durée de neuf ans qui en résulte est bien trop longue (sourires) et risque de conduire à des démissions. Ce qui serait préjudiciable au bon fonctionnement de la justice prud'homale. Compte tenu de cette prorogation du mandat des conseillers actuels, est-il vraiment nécessaire de leur octroyer encore autant de jours de formation ?
Sur la forme, le RDSE est toujours réticent face aux ordonnances. En outre, la procédure accélérée s'imposait-elle ? Pour ma part, je voterai ce texte mais la grande majorité des membres du groupe aura donc une approche diversifiée. (Sourires sur divers bancs ; Mme Françoise Laborde applaudit)
M. Jean-Marie Vanlerenberghe . - Personne ici ne remet en cause le conseil des prud'hommes et surtout pas notre groupe. Nous ne nous opposerons pas à ce projet qui répond à des considérations purement pragmatiques. En revanche, les raisons invoquées à l'appui de la suppression de l'élection prud'homale ne sont pas à nos yeux les meilleures. L'abstention ? Elle est préjudiciable à l'exercice de la démocratie, c'est vrai, mais ne peut à elle seule justifier la suppression de l'élection. La complexité ? Argument tout aussi léger : pourquoi ne pas simplifier, plutôt, quitte à opter pour l'élection électronique ? Le coût n'est pas non plus un argument valable.
La vraie raison de la suppression de cette élection est ailleurs : avec l'amélioration de la représentativité syndicale, elle est tout simplement devenue obsolète. Trois lois ont réformé la représentativité syndicale, qui a été mesurée pour la première fois selon les nouvelles règles en 2013. La loi du 5 mars 2014 a pour sa part démocratisé la représentation patronale. On ne peut donc dire que la suppression de l'élection prud'homale porterait un coup fatal à la démocratie sociale. L'argument ne tient plus que pour les demandeurs d'emplois... qui n'ont pas été plus de 5 % à voter en 2008.
Les modalités techniques sont adaptées, avec un régime transitoire, pour la période 2015-2017. Nous soutenons la prorogation de deux ans du mandat des actuels conseillers - on gagne en simplicité.
Reste l'éternelle question des ordonnances, que nous sommes d'ordinaire prompts à dénoncer. Dans ce cas de figure, le sujet étant technique et largement réglementaire, nous ne nous y opposerons pas. Le groupe UDI-UC soutiendra le présent projet de loi. (Applaudissement sur les bancs UDI-UC ainsi que sur quelques bancs socialistes)
M. Jean-Pierre Caffet . - Je veux rendre hommage à notre premier rapporteur, Jackie Le Menn. Merci à Mme Emery-Dumas, qui a repris le flambeau. Enfin, je félicite M. Milon, nouveau président de la commission des affaires sociales.
L'abstention des salariés ne cesse de croître : de 37 % en 1979 à 75 % en 2008. Pour le collège employeur, elle frise les 70 %. Malgré les mesures de simplification, les campagnes de communication, elle n'a cessé de progresser. L'enjeu n'est pas toujours très clair pour les salariés ; ils ont le sentiment que toutes les candidatures sont équivalentes, puisque le juge est impartial.
Ces élections mobilisent de nombreux acteurs : services de l'État, communes, partenaires sociaux. Enfin, nous ne pouvons pas négliger le coût de ces élections si peu mobilisatrices : 100 millions d'euros tous les cinq ans.
Plusieurs rapports ont été publiés par d'éminents magistrats, proposant diverses solutions. Celle qui a été retenue est pragmatique. Les électeurs prud'homaux ont longtemps été pour les organisations syndicales un moyen détourné de mesurer leur audience.
M. Jean Desessard. - Et alors ?
M. Jean-Pierre Caffet. - Il est désormais caduc.
Le Parlement peut-il régler par la loi des questions aussi techniques que celles énumérées à l'article premier. J'ai quelques doutes...
L'article 2 proroge le mandat des conseillers actuels.
Les organisations syndicales sont légitimes pour représenter aussi bien les salariés que les chômeurs.
M. Roland Courteau. - Très bien !
M. Jean-Pierre Caffet. - D'autant que ces derniers ont vocation à retrouver au plus vite un emploi...
Le système proposé existe déjà dans le cadre des tribunaux des affaires de sécurité sociale. Nous ne sommes donc pas en terre inconnue. En 2010, le Conseil constitutionnel avait d'ailleurs avalisé ce principe. Voilà qui répond aux inquiétudes.
Ce projet de loi respecte le dialogue social. Au-delà, c'est toute la justice prud'homale qui doit être réformée, comme le constate le rapport commandé à M. Lacabarats par Mme Taubira. Le taux d'appel, de 60 %, est énorme. Les dysfonctionnements de la justice prud'homale sont préjudiciables aussi pour l'État, souvent condamné pour cause de délais excessifs... Les greffes doivent être renforcés, les conseillers doivent disposer d'un temps suffisant pour travailler, être indemnisés, être formés. M. Le Menn avait ainsi souhaité que l'argent économisé par la suppression de l'élection prud'homale serve essentiellement à financer la démocratie sociale, et notamment la formation des conseillers prud'hommes. Les moyens et la formation sont deux points fondamentaux. Le contexte social nous fait obligation de renforcer les conseils prud'hommes. Ce projet de loi ne porte pas atteinte à la démocratie - au contraire !
M. Jean Desessard. - Oh !
M. Jean-Pierre Caffet. - Quoi de plus démocratique que d'utiliser les résultats de la représentativité des organisations syndicales ? Cette réforme cohérente est un progrès démocratique : le groupe socialiste votera pour. (Applaudissements sur les bancs socialistes)
M. François Rebsamen, ministre . - À mon tour de saluer le président Milon. J'ai une pensée pour M. Le Menn, qui avait fourni un travail remarquable.
Monsieur Desessard, le coût des élections prud'homales de 2008 se décompose ainsi : 30 millions d'euros d'acheminement. Il y a peu d'emplois derrière, sauf pour les postiers, bien sûr.
Mme Annie David et M. Dominique Watrin. - Ce n'est pas rien !
M. François Rebsamen, ministre. - Plus de 11 millions d'euros pour la communication, 10 millions d'euros pour le remboursement de la propagande aux partenaires sociaux, et 10 millions d'euros pour l'élection proprement dite. La généralisation du vote électronique coûterait 20 millions d'euros.
Les conseillers prud'homaux bénéficient aujourd'hui des mêmes protections que les délégués syndicaux. Cela ne changera pas. Leur indépendance ne sera pas remise en cause. Les organisations syndicales sont légitimes pour représenter les demandeurs d'emploi, rien ne s'oppose à ce que ceux-ci figurent sur leurs listes.
Les ordonnances ? En l'occurrence, il faut une concertation rapide avec les partenaires sociaux. Le degré de détail nécessaire, sur chaque territoire, ne relève pas, à mon sens, de la loi. Enfin, l'échéance de 2017 est proche, et le calendrier est serré. Les ordonnances devront être publiées au deuxième semestre 2015.
Merci aux intervenants, à M. Lemoyne, même si j'aurais préféré un vote favorable. Le caractère paritaire de la juridiction sera bien entendu conservé.
J'ai répondu à M. Desessard sur la dépense. Les chômeurs n'ont pas vocation à le rester toute leur vie ! Le hors-champ sera pris en compte par l'ordonnance. J'ai apprécié le ton de M. Watrin, sa défense de l'institution et qu'il ne m'ait pas fait de procès d'intention.
Mais ses dysfonctionnements pénalisent les salariés. L'indépendance des conseillers sera respectée, je l'ai dit.
Merci à M. Barbier pour son soutien. Nul système n'est parfait, mais la réforme que nous proposons est la plus cohérente. Merci à M. Vanlerenberghe pour son pragmatisme, ainsi qu'à M. Caffet, qui a ouvert le débat sur l'avenir de cette institution fondamentale. La démocratie ne se mesure pas au nombre des élections mais plutôt à leur cohérence.
La discussion générale est close
Discussion des articles
ARTICLE PREMIER
M. Jean Desessard . - Merci à M. le ministre d'avoir détaillé les frais de l'élection prud'homale. Mais toute dépense est un gain pour d'autres, en matière de salaire ou d'activité économique ! Ne vaut-il pas mieux dépenser pour la démocratie sociale que pour des tracts publicitaires ? Le chômage est provisoire, avez-vous dit. Là, vous m'avez soufflé ! Le chômage, la précarité sont là pour longtemps, même si vous nous avez promis leur disparition prochaine ! Les chômeurs voteront plus tard, quand ils auront un emploi ? Les précaires, quand la précarité aura disparu ? Mais le vote d'un chômeur n'est peut-être pas le même que celui d'un cadre ou d'un ouvrier ! La suppression d'une élection serait un progrès démocratique, dit mon collègue de Paris ?
M. Jean-Pierre Caffet. - Ce n'est pas moi qui le dis : lisez le rapport !
M. Jean Desessard. - Incroyable ! La représentation varie selon les élections, selon le message que veulent envoyer les électeurs : ma propre formation ne fait pas le même score aux présidentielles ou aux européennes ! Un rapport de un à dix !
Enfin, vous n'avez pas répondu sur l'économie sociale et solidaire, qui nous est chère.
M. François Rebsamen, ministre. - Si !
M. Jean-Baptiste Lemoyne. - Vous n'avez pas répondu, monsieur le ministre, à la question que j'ai posée : quelle est l'audience prise en considération ? L'audience mesurée au niveau national, ou au niveau de chaque circonscription prud'homale ? Ceci serait plus fin et plus respectueux des territoires ?
Mme la présidente. - Amendement n°1, présenté par M. Desessard et les membres du groupe écologiste.
Supprimer cet article.
M. Jean Desessard. - Les électeurs ne font pas la différence, a dit mon collègue de Paris. Alors, supprimons les élections politiques pendant que nous y sommes, puisque, à ce que l'on dit, beaucoup de gens ne font plus la différence entre la droite et la gauche et se demandent à quoi nous servons. L'objectif devrait plutôt être de revaloriser la politique et le Parlement ! L'élection prud'homale est une élection nationale, comme les élections politiques. Attention aux arguments que vous invoquez !
Mme la présidente. - Amendement identique n°3, présenté par Mme Cohen et les membres du groupe CRC.
Mme Laurence Cohen. - Pour justifier un projet de loi dangereux pour la démocratie sociale, on invoque la faible participation. La participation faiblit à toutes les élections !
Les syndicats font des propositions alternatives intéressantes, pourquoi n'en débattons-nous pas ici ? Vous nous demandez de vous faire confiance. Drôle de façon de procéder ! Pour les chambres de commerce, le taux de participation est de 20 %. Allez-vous les supprimer ? Ce n'est pas en cassant le thermomètre que l'on guérit le malade.
L'existence des élections prud'homales est le résultat d'une bataille, d'une lutte sociale. Quel retour en arrière que ce projet de loi ! D'où notre amendement de suppression. Comme mon camarade Desessard, je m'inquiète de votre argumentation : drôle de conception de la démocratie !
Mme Anne Emery-Dumas, rapporteure. - Notre commission a adopté conforme le projet de loi le 23 juillet dernier. L'article premier en constitue la colonne vertébrale : défavorable aux amendements de suppression.
M. François Rebsamen, ministre. - Avis défavorable. Je suis surpris des arguments de M. Desessard. Je connais une formation politique qui préconisait naguère la suppression de l'élection présidentielle... (Sourires)
L'Association des maires de France a pris position contre le système actuel, qui pèse trop lourdement sur les communes. En 2008, seuls 5 % des demandeurs d'emploi étaient inscrits sur les listes. C'est à ce pourcentage d'inscrits qu'il faut appliquer celui des votants.
La démocratie est sauve, puisque nous avons des mesures précises de l'audience des syndicats ; la réforme renforce la légitimité de la justice prud'homale, son caractère paritaire est préservé comme l'interdiction des mandats impératifs. L'ensemble des employeurs seront pris en compte : l'audience de l'économie sociale et solidaire sera bien mesurée. Enfin, les partenaires sociaux seront consultés au cours du premier semestre 2015.
M. Jean-Baptiste Lemoyne. - L'abstention ne justifie pas la suppression ? L'amendement de suppression, lui, justifie notre abstention.
M. Jean-Pierre Godefroy. - Je n'ai pas eu de réponses satisfaisantes aux questions que je posais déjà à M. Sapin, sur les chômeurs, sur l'économie sociale et solidaire. Les élections professionnelles ont bénéficié d'une campagne de communication bien plus importante que les élections prud'homales et il n'y a pas eu incomparablement plus d'électeurs : 5,4 millions au lieu de 4,8.
D'autre part, je ne suis pas convaincu par l'échelle nationale du vote : la représentativité relative des syndicats varie beaucoup selon les endroits.
Tout cela m'amène, à mon grand regret, à voter les amendements de suppression.
M. Jean Desessard. - Monsieur le ministre, vous m'avez interpellé sur la VIe République que nous appelons de nos voeux. À une époque, le PS était contre le régime présidentiel de la Ve République...
M. Jean-Pierre Caffet. - Hors sujet !
M. Jean Desessard. - Cela a évolué, manifestement, il n'y a plus de tabous... (Sourires)
M. François Rebsamen, ministre. - Il reste des totems !
M. Jean Desessard. - La présidentialisation entraîne l'affaiblissement du Parlement, qu'il faut revaloriser. Nous en reparlerons...
Avec mes camarades communistes, je regrette que le Parlement ne soit pas saisi des modalités de ces élections. Pourquoi seulement 5 % de chômeurs inscrits ? Considérez-vous que c'est de leur faute ?
M. François Rebsamen, ministre. - Démagogie...
M. Jean-Louis Carrère. - Eh oui !
M. Jean Desessard. - Ils sont en situation de détresse ! La vraie question, c'est de les inciter à aller voter. Aux européennes aussi, qui profitent pourtant à notre parti, les chômeurs et les ouvriers votent moins que les cadres. Comment intégrer les chômeurs, les précaires, les salariés de petites entreprises dans la démocratie sociale ? Il manque un vrai projet de cogestion ! (Applaudissements sur les bancs CRC et écologistes)
Les amendements identiques nos1 et 3, ne sont pas adoptés.
Mme Laurence Cohen. - Ce qui se passe ici est très grave. Les élections prud'homales sont en quelque sorte une université des droits. On s'achemine vers une désignation, sans présenter au Sénat des propositions d'amélioration concrètes. Pourquoi n'y a-t-il pas plus d'inscrits sur les listes parmi les plus fragiles ? On va faire reculer la démocratie dans notre pays. Nous voterons contre cet article premier.
L'article premier est adopté.
ARTICLE 2
Mme la présidente. - Amendement n°2, présenté par M. Desessard et les membres du groupe écologiste.
Supprimer cet article.
M. Jean Desessard. - Défendu.
Mme Anne Emery-Dumas, rapporteure. - Cet article important ne doit pas être supprimé. Avis défavorable.
M. François Rebsamen, ministre. - Même avis.
L'amendement n°2 n'est pas adopté.
Mme la présidente. - Amendement n°4, présenté par Mme Cohen et les membres du groupe CRC.
Alinéa 1
Remplacer l'année :
2017
par l'année :
2016
Mme Annie David. - Je réaffirme avec mon groupe que ce texte porte atteinte à la démocratie sociale. Monsieur le ministre, quelles mesures pourraient laisser penser que la suppression de ces élections serait un progrès ?
Les conseillers prud'hommes ont été élus en 2008 pour un mandat de cinq ans, le prolongement jusqu'en 2017 des conseillers ne permet pas un bon fonctionnement de la juridiction.
Il y a des carences, des conseillers prud'hommes s'en vont, épuisés car leur tâche n'est pas facile. Il y a donc des élections partielles qui sont rendues nécessaires. Nous aurions préféré avancer les élections en 2016. Je retire cet amendement qui n'a plus d'objet.
M. Charles Revet. - Sagesse !
L'amendement n°4 est retiré.
Mme la présidente. - Amendement n°5, présenté par Mme Emery-Dumas, au nom de la commission.
Alinéa 5
1° Remplacer les mots :
aux dispositions
par les mots :
à la dernière phrase du premier alinéa
2° Après le mot :
général,
rédiger ainsi la fin de cet alinéa :
les affectations prévues à l'article L. 1423-10 du code du travail en cas de difficulté provisoire de fonctionnement d'une section peuvent être renouvelées au-delà de deux fois.
Mme Anne Emery-Dumas, rapporteure. - Amendement de clarification juridique.
Le premier alinéa de article L. 1423-10 du code du travail dispose que « Lorsque le président du conseil de prud'hommes constate une difficulté provisoire de fonctionnement d'une section, il peut, après avis conforme du vice-président, sous réserve de l'accord des intéressés, affecter temporairement les conseillers prud'hommes d'une section à une autre section pour connaître des litiges relevant de cette dernière. Ces affectations sont prononcées pour une durée de six mois renouvelable deux fois dans les mêmes conditions. »
L'article 2 de cet alinéa assouplit l'une des modalités d'application en prévoyant que les affectations temporaires peuvent être renouvelées au-delà de deux fois jusqu'à la date du prochain renouvellement général des conseils de prud'hommes.
La rédaction actuelle de l'alinéa 5 de l'article 2 peut être source de confusion, car il est indiqué que le projet de loi déroge aux dispositions de l'article L.1423-10 du code du travail, tout en prévoyant explicitement d'appliquer son premier alinéa.
Cet amendement ne modifie aucunement l'intention initiale du Gouvernement et permettra d'appliquer l'ensemble des autres dispositions de droit commun de l'article L.1423-10 du code du travail.
M. François Rebsamen, ministre. - Favorable.
M. Jean-Baptiste Lemoyne. - Cet amendement apporte une réponse concrète à des situations complexes que nous avons constatées sur le terrain. Le groupe UMP le votera.
L'amendement n°5 est adopté.
L'article 2, modifié, est adopté.
Interventions sur l'ensemble
M. Dominique Watrin . - Le groupe CRC prend acte du rejet de ses amendements. Comme nous l'avions annoncé, nous voterons contre ce projet de loi, qui est un rendez-vous manqué.
Les organisations syndicales qui siègent aux conseils de prud'hommes ont formulé des propositions pour rendre ce scrutin plus efficace. Force est de constater qu'elles n'ont pas été entendues. La CGT réclame depuis 2008 la création d'une commission ad hoc destinée à examiner ses propositions alternatives à la suppression d'un droit démocratique.
Les organisations syndicales ont fait des propositions fort intéressantes. Ainsi, la CGT a proposé de tenir le scrutin sur les lieux de travail, dans les mairies pour les chômeurs, tout en simplifiant son organisation.
Ce matin, nous avons tenu une conférence de presse pour donner la parole aux syndicats. La France a été condamnée 71 fois pour ses délais excessifs de jugement. Mais ce sont les gouvernements successifs qui ont réduit le nombre de greffiers et contingenté le temps consacré à chaque dossier. Les conseillers prud'hommes prennent aujourd'hui sur leur temps personnel pour étudier comme il faut les litiges. Ces difficultés seront encore renforcées, les présidents de tribunaux seront dans l'obligation de réfléchir à l'organisation d'élections complémentaires, alors que ce texte supprime l'élection.
Il s'inscrit dans un ensemble de projets qui visent tous à réduire les mécanismes de protection des salariés : décret sur l'inspection du travail, relèvement des seuils sociaux, projet de loi sur la modernisation de la vie des entreprises.
Qui est responsable des délais trop longs ? Les politiques d'austérité ont réduit considérablement les moyens budgétaires. Mme Dati sous la présidence de M. Sarkozy a supprimé 25 % des conseils prud'homaux.
Des solutions existent qui doivent sauvegarder ces tribunaux. (Applaudissements sur les bancs CRC et écologistes)
M. Jean Desessard . - Nous ne voterons pas ce projet de loi. On pourrait discuter longtemps des aspects financiers et par exemple s'interroger sur le CICE. S'agit-il de donner de l'argent aux actionnaires ou de faciliter l'activité locale, en redonnant aux collectivités les moyens d'investir?
Je ne sais si ce projet de loi était dans les cartons du gouvernement précédent. Je conteste que la démocratie sociale, ce soit moins d'élections. Les gens veulent donner leur voix plus souvent, participer. Limiter la consultation à une seule élection, ce n'est pas convenable. La démocratie sociale se construit. Discutons-en des modalités. Comme nos collègues communistes ...
M. Jean-Louis Carrère. - Camarades !
M. Jean Desessard. - ... nous étions prêts à discuter des modalités. On exclut les précaires et les chômeurs, les plus défavorisés, les plus pauvres, ceux qui souffrent le plus.
Les syndicats doivent aussi les représenter. On leur dénie ce droit. C'est très grave ! Ne serait-ce que pour cet argument, l'ensemble des sénatrices et des sénateurs écologistes ne voteront pas ce projet de loi. (Applaudissements sur les bancs écologistes et CRC)
M. Jean-Pierre Caffet . - Je redis solennellement notre attachement aux conseils de prud'hommes. On nous a fait un faux procès. Les conseils sont une conquête sociale, qui plonge ses racines dans la Révolution française, au même titre que l'inspection du travail ou la médecine du travail.
J'ai été le seul à demander au ministre de faire un effort financier sur la formation des conseillers, en y destinant une partie des économies qui seront réalisées.
Trois questions se posent : la légitimité, l'exclusion de certaines catégories, le fonctionnement de la démocratie sociale.
Monsieur Desessard, je rappelle que les organisations syndicales ont vocation à représenter les chômeurs et les précaires. Si vous pensez qu'elles s'en désintéressent, tirez-en les conclusions, mais telle n'est pas ma conception. Quant à la démocratie, nous nous occupons précisément des modalités d'exercer leur mandat par les conseillers de prud'hommes. Il n'a jamais été question de remettre en cause leur légitimité, qu'ils tirent d'un processus électoral.
M. Jean-Louis Carrère. - Les parlementaires aussi sont élus au deuxième degré !
M. Jean-Pierre Caffet. - Consacrons les moyens destinés à l'organisation des élections professionnelles (100 millions d'euros tous les cinq ans) à la formation des conseillers prud'homaux.
Monsieur Desessard, relisez page 45 le rapport de Jacky Le Menn : « Il ne nous paraît pas que l'évolution vers la désignation porte atteinte à la démocratie. La réforme envisagée constitue au contraire un progrès démocratique ». (Mme Laurence Cohen proteste) Ces propos, semblables aux miens à la tribune, ont été tenus par une grande organisation syndicale.
Mmes Annie David et Laurence Cohen. - La CFDT !
M. Jean-Pierre Caffet. - Elle n'est pas représentative ?
M. Jean-Baptiste Lemoyne . - Le groupe UMP s'abstiendra. Nous avons assisté à un débat théologique sur les élections. Dans la vie réelle on est confronté à un problème de candidatures. Si l'on comparaît le nombre de candidats au nombre de postes à pourvoir, on s'approcherait sans doute plus d'une cooptation que d'une élection. S'il y a eu suppression des élections, c'est par la modification du scrutin municipal qui a interdit le panachage dans les communes de plus de 1 000 habitants.
Pour en revenir aux conseils de prudhommes, le système proposé n'est pas parfait. Le CRC s'est référé à la position d'une seule organisation syndicale. Parmi les autres organisations syndicales, un certain consensus règne.
Mmes Annie David et Laurence Cohen. - Non !
M. Jean-Baptiste Lemoyne. - Je regrette que le ministre n'ait pas répondu sur le regroupement de certaines sections et la mesure d'audience.
Je salue les femmes et les hommes qui s'engagent dans ces fonctions exigeantes. Ils sont parfois à bout. Il faut que les conseils prud'homaux puissent examiner au fond chaque dossier.
M. Jean-Marie Vanlerenberghe . - Le groupe UDI-UC votera ce texte. Nous ne remettons pas en cause l'institution du conseil de prud'hommes.
M. François Rebsamen, ministre. - Naturellement.
M. Jean-Marie Vanlerenberghe. - Il s'agit de leur mode d'élection. Démonstration a été faite qu'il était imparfait. Nous serons très attentifs au contenu de ces ordonnances, qui ne seront pas faciles à rédiger. (Exclamations sur les bancs CRC)
Mme Annie David . - Je vous invite à mon tour à lire le rapport de Jacky Le Menn, qui reprend l'ensemble des auditions que nous avons tenues. Sur les cinq organisations syndicales représentatives de salariés, deux seulement ont approuvé la réforme. Une autre en a pris acte, tout en s'interrogeant. Deux autres s'y sont opposées. Les organisations patronales étaient d'accord, certes. Mais les organisations de magistrats et d'avocats y étaient aussi opposées.
On ne peut pas se satisfaire du taux de participation. Le législateur a du travail, pour améliorer ces élections. On ne peut accepter que ces modifications aient lieu par ordonnance. Nous serons nous aussi très attentifs à son contenu. Je rappelle que la représentativité prud'homale est différente, selon nous, de la représentativité professionnelle. Ce texte nie sa spécificité. J'ai retiré en séance le deuxième amendement sur la prorogation des mandats des conseillers prud'homaux en place, c'est que nous espérions un sursaut de nos collègues. Il n'a pas eu lieu, nous le regrettons.
À la demande du groupe CRC, l'ensemble du projet de loi est mis aux voix par scrutin public.
Mme la présidente. - Voici le résultat du scrutin n° 1
Nombre de votants | 342 |
Nombre de suffrages exprimés | 187 |
Pour l'adoption | 155 |
Contre | 32 |
Le Sénat a adopté.
La séance, suspendue à 17 h 5, reprend à 17 h 10.