Cumul des mandats (Nouvelle lecture - Procédure accélérée)

M. le président.  - L'ordre du jour appelle l'examen du projet de loi organique, adopté par l'Assemblée nationale en nouvelle lecture, interdisant le cumul de fonctions exécutives locales avec le mandat de député ou de sénateur, et du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale en nouvelle lecture, interdisant le cumul de fonctions exécutives locales avec le mandat de représentant au Parlement européen.

Discussion générale commune

M. Manuel Valls, ministre de l'intérieur .  - La fin du débat concernant le projet de loi sur la ville me rend optimiste sur l'issue de celui-ci... (Sourires)

Le projet de loi organique et le projet de loi, vous le savez, interdisent à tous les parlementaires l'exercice de fonctions exécutives locales. Nos concitoyens sont attachés à ce qui est aussi un renforcement du rôle des parlementaires. Les députés ont voté à une large majorité et les textes entreront bientôt en vigueur. Cette évidence, on peut la nier mais elle finira par s'imposer.

À la suite de décennies de décentralisation, les mandats locaux sont devenus plus exigeants, plus passionnants. Je sais l'implication que cela demande et, au cours de mes déplacements, je rencontre des élus mobilisés. Le lien de confiance doit être entretenu. N'ignorons pas la défiance qui ronge notre société, comme l'a encore révélé un sondage récent de Cevifop. J'attire en particulier votre attention sur la défiance qui s'exprime à l'égard du Parlement. Nous connaissons tous les mauvais procès faits au Sénat et, plus largement, cette petite musique qui veut que la politique ne serve à rien.

La politique donne du sens à l'action des hommes. Si elle est affaiblie, les extrémistes prospèrent. Notre démocratie doit conserver son éclat et son utilité aux yeux des citoyens.

Les élus locaux ont une lourde responsabilité. Je refuse les attaques à leur encontre, comme à l'encontre du Parlement. Légiférer, contrôler le Gouvernement, évaluer les politiques publiques sont des missions essentielles qui demandent un engagement à plein temps, incompatible avec une fonction exécutive locale.

Une large majorité de députés ont voté ce texte qui constitue une évidence et accompagne l'extension de la décentralisation annoncée par le président de la République. Les citoyens attendent de leurs élus de la présence et de l'écoute. Ce texte y répond. Votre assemblée a déjà adopté le principe du non-cumul pour les députés nationaux et européens. Il vous appartient de l'étendre aux sénateurs.

La défiance, l'antiparlementarisme gagnent du terrain. Ne leur donnez pas des arguments. Les sénateurs ne doivent pas être traités différemment, parce qu'ils sont des parlementaire à part entière. Je suis partisan du bicamérisme. Les partisans d'un statut différencié s'appuient sur la fonction de représentation des collectivités territoriales.

Selon l'article 24 de la Constitution, c'est par son mode d'élection que le Sénat représente les collectivités territoriales. Un statut différencié entre Assemblée nationale et Sénat créerait une brèche au sein du Parlement et aboutirait à fragiliser le Sénat, deuxième chambre d'une république décentralisée, et non fédérale comme l'Allemagne. Les sénateurs représentent l'intérêt général, non telle ou telle collectivité territoriale. Le Sénat n'est pas le Bundestag qui n'examine qu'un tiers des lois.

C'est l'évidence : en accordant un statut particulier aux sénateurs, vous courez le risque de donner un statut à part au Sénat. J'entends les critiques. Mais certaines sont infondées. Ayons un débat serein et honnête. Je refuse d'entendre que les parlementaires qui ne cumulent pas seraient des apparatchiks ou des élus « hors sol ».Les parlementaires de demain ne seront pas coupés des réalités. Il est saugrenu de penser que les députés seront coupés de leurs électeurs, les sénateurs des élus locaux et des habitants dont ils partagent l'existence. Ceux qui voudront s'impliquer dans la vie locale le pourront toujours mais n'exerceront pas de responsabilité dans un exécutif.

Nous arrivons au terme d'un processus législatif entamé en juillet dernier et d'un processus politique validé lors de différents rendez-vous démocratiques, notamment la dernière élection présidentielle. Le non-cumul est une évidence, qui répond à un mouvement de fond : 40 % des sénateurs ne cumulent pas et ne sont pas concernés par les incompatibilités. J'espère que le Sénat se rendra à l'évidence pour faire souffler sur nos institutions un vent agréable de modernité. (Applaudissements sur les bancs socialistes et CRC)

M. Simon Sutour, rapporteur de la commission des lois .  - Après l'échec de la CMP le 9 octobre, l'Assemblée nationale a rétabli le texte qu'elle avait adopté, revenant sur les dispositions adoptées à la quasi-unanimité au Sénat. Toutefois, s'agissant des fonctions dérivées locales, elle a limité le champ de l'incompatibilité aux seules fonctions exécutives, dans l'esprit du projet de loi.

Le Sénat avait créé un régime spécifique pour ses membres ; à titre personnel, je le regrette. Mais notre commission a maintenu cette distinction de statut.

La modification adoptée par la commission ne signifie pas le statu quo car elle inclut les EPCI dont le rôle est croissant. Le Sénat avait voté la loi ordinaire mais son application aux parlementaires européens dépendra des dispositions adoptées dans le projet de loi organique.

Le Sénat avait limité le cumul des indemnités au montant de l'indemnité parlementaire en adoptant une proposition du groupe RDSE. L'Assemblée nationale ne l'a pas suivi. La commission des lois a souhaité distinguer cumul des mandats et des indemnités. Le Gouvernement n'a pas déposé d'amendement contraire. Est-ce un signe d'ouverture, et même de soutien ?

La commission des lois s'était également prononcée à l'unanimité en faveur d'une élection partielle obligatoire dans le cas où un parlementaire voit sa mission confiée par le Gouvernement prolongée au-delà de six mois car cela avait donné lieu à des pratiques contestables de remplacement discret. Je déposerai un amendement pour parfaire le dispositif. La nomination d'un parlementaire en mission et son renouvellement relève du pouvoir exécutif ; le remplacement par le suppléant traduit une curieuse conception de la séparation des pouvoirs. J'ajoute que cette disposition, adoptée en 1959 et codifiée en 1964, n'a jamais été soumise au Conseil constitutionnel.

Cette réforme en appelle d'autres : statut de l'élu local, renforcement des pouvoirs des parlementaires. La délégation aux collectivités territoriales du Sénat a d'ailleurs adopté le rapport prémonitoire de M. Peyronnet invitant à tirer les conséquences de cette réforme par l'association des parlementaires aux commissions locales. Le Gouvernement nous a entendus. Le 7 janvier, dans le débat sur l'avenir de l'organisation décentralisée de la République, Mme Lebranchu a indiqué réfléchir au rôle des parlementaires dans leur fonction de contrôle, y compris celle des préfets au plan local, excluant une codécision contraire à la séparation des pouvoirs.

En ce qui concerne l'exercice des mandats locaux, la commission des lois a adopté ce matin la proposition de loi Gourault-Sueur.

La question du cumul horizontal devra également être traitée. À titre personnel, je crois préférable que ce soit dans un autre texte mais la commission est favorable aux amendements déposés en ce sens. En conclusion, même si chacun connaît ma préférence pour le texte du Gouvernement amendé par les députés, je vous invite, comme rapporteur, à adopter le texte de la commission et les amendements que je présente en son nom. (Applaudissements sur divers bancs à gauche)

Mme Hélène Lipietz .  - J'ai quelques minutes pour convaincre cette assemblée de sages de ne pas voter l'impensable... Nous avons longuement discuté, en première lecture, de la prétendue nécessité d'être membre d'un exécutif local lorsqu'on est parlementaire. Plus que le mandat local, ce qui fait un bon parlementaire, c'est son implication dans la vie locale !

D'aucuns prétendent que le cumul est consubstantiel à la fonction de sénateur mais, si le Sénat représente les collectivités territoriales, il n'est pas l'organe des collectivités territoriales.

Notre Constitution n'impose pas le cumul. Depuis 1958, l'article 24 dispose que le Sénat, élu au suffrage indirect, assume la représentation des collectivités territoriales. La grammaire est claire. C'est bien son mode d'élection qui fonde la fonction représentative du Sénat. Les grands électeurs sont libres de voter en faveur de candidats qui ne sont pas élus.

Nulle part dans les textes fondateurs de la Ve République, on ne trouve trace d'un Sénat organe des collectivités territoriales. Dans son second discours de Bayeux, en 1946, le général de Gaulle justifiait l'existence à côté de la première chambre élue au suffrage universel et direct d'une deuxième chambre, élue d'une autre manière que la première assemblée, par les conseils municipaux et généraux, pour faire valoir l'ordre administratif qu'un collège purement politique a tendance à négliger. En 1958, Michel Debré considérait qu'une seconde chambre offrait au Gouvernement un secours utile contre la première. Nulle référence à la représentation des collectivités territoriales.

Siéger au Sénat nécessite une pratique de l'exécutif de ces collectivités ? À Rome, le cursus honorum interdisait le cumul, sauf aux dictateurs. La simple connaissance des collectivités ne suffit-elle pas ? À condition que l'information soit bien garantie. Un militant associatif, un chef d'entreprise, un simple citoyen sont-ils hors sol ? Nous ressentons avec chagrin la défiance des citoyens envers les politiques, nous qui nous dévouons pour le bien commun. Cette défiance n'est-elle pas due à notre vision figée de notre rôle ?

En adoptant un statut particulier pour le Sénat, nous tendons le couteau pour sa mise à mort. Quant aux partis politiques, tant vilipendés, ils sont nécessaires. Ne les dénigrons pas mais rétablissons le lien de confiance avec les citoyens.

Les écologistes considèrent que le non-cumul est un moyen d'y parvenir en faisant de l'élu un citoyen investi d'un pouvoir et non un super-citoyen. (Applaudissements sur les bancs écologistes, CRC et sur plusieurs bancs socialistes)

M. Hervé Maurey .  - Le 19 septembre, le Sénat a adopté le projet de loi organique et le projet de loi à une large majorité, ce qui est désormais rare. Il avait amélioré le texte issu de l'Assemblée nationale, corrigeant ses excès tout en améliorant le droit actuel. En effet, la rédaction intègre aux règles du non-cumul les fonctions au sein d'EPCI, de syndicats mixtes et de sociétés d'économie mixte, en n'autorisant les parlementaires à ne conserver qu'une fonction de ce type. De plus, nous avions limité le cumul des indemnités. La presse n'en a jamais fait mention, malheureusement... Elle a préféré relayer vos propos, monsieur le ministre, nous présentant comme une assemblée tournée vers le passé et arc-boutée sur des pratiques obsolètes.

L'interdiction de toute fonction locale est inimaginable. Il est impensable qu'un sénateur ne puisse être adjoint au maire d'une commune. Un sénateur est en contact avec des élus, à la différence d'un député. L'interdiction du cumul le prive de cette possibilité. Monsieur le ministre, vous avez préféré rayer d'un trait de plume nos propositions. Votre refus du dialogue n'est que mépris pour le Sénat. Il est vrai que vous aviez annoncé la couleur en indiquant que, quoi qu'il arrivât, le texte serait voté par l'Assemblée nationale. Quel manque de respect pour le Sénat ! De fait, l'Assemblée nationale a supprimé toutes les dispositions que nous avions adoptées.

Ce texte est excessif et insuffisant, même si vous parlez « d'évidence ». Il ne concerne pas le cumul de fonctions exécutives locales. Il ne crée pas de statut de l'élu. Rien non plus sur le nombre de parlementaires, ni sur la limitation des mandats dans le temps.

Lors de l'examen de la loi du 17 mai 2013, vous nous aviez reproché de refuser le scrutin binominal sans faire de proposition. Ce n'est pas le cas aujourd'hui, et tous les groupes ont déposés des amendements.

En cette période de voeux, j'espère que vous serez plus respectueux du Sénat. Mais j'en doute...

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois.  - M. Valls est un homme ouvert.

M. Hervé Maurey.  - Vous n'avez cessé de lui porter des mauvais coups : scrutin binominal et redécoupage qui affaiblit la représentation du monde rural dans les assemblées départementales, abaissement du seuil de la proportionnelle pour les élections sénatoriales, qui renforce le poids des partis. Vous avez renoncé au Haut conseil des territoires, mais il reviendra par la fenêtre. Aujourd'hui, vous voulez réduire notre légitimité de sénateurs.

Le Sénat n'est pas une assemblée de ringards arc-boutés sur le passé mais une assemblée dont la sagesse est reconnue. Le Sénat peut être rebelle, avez-vous dit, et vous avez raison ! Nous serons rebelles car il y va de la défense de notre Haute assemblée, de l'équilibre des institutions et de la défense de nos territoires. Le groupe UDI-UC votera le texte issu des travaux de la commission. (Applaudissements au centre et à droite)

La séance est suspendue à 18 h 15.

présidence de M. Jean-Léonce Dupont,vice-président

La séance reprend à 21 h 30.

M. Philippe Bas .  - Je tiens à saluer l'objectivité et l'impartialité du rapporteur dans la présentation qu'il a faite du texte adopté par la commission.

Le Sénat n'est pas réfractaire à la limitation du cumul des mandats.

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois.  - Ça commence bien !

M. Philippe Bas.  - Il l'a prouvé par le passé en votant, dans les mêmes termes que l'Assemblée nationale, les lois de 1985 et celle de 2000 dans une configuration politique moins favorable qu'aujourd'hui au Gouvernement. Il ne refuse pas davantage de revoir les règles aujourd'hui. Il a fait le choix de permettre l'exercice d'un mandat exécutif local par les sénateurs et simultanément considérablement élargi la liste des mandats susceptibles d'être pris en compte au titre du non-cumul. Fonctions de président d'intercommunalité, de maire d'une commune peu peuplée, d'adjoint au maire, de vice-président de région ou de département, de président de société d'économie mixte, le Sénat accepte tout cela. Et il a adopté le principe de gratuité de tout mandat local exercé par un sénateur.

Reprenons ce débat de manière globale. Réfléchissons au cumul des mandats locaux, à l'inscription dans la Constitution de l'interdiction du cumul pour les ministres, au statut de l'élu. Le mandat local, le législateur l'estime, n'est pas une profession : il ne permet au mieux de libérer que 25 % de son temps professionnel. Il est piquant de constater, alors que la législation considère -le Gouvernement n'y revient pas- qu'un mandat local prend peu de temps, qu'un parlementaire ne pourrait même pas être adjoint au maire d'une commune de 200 habitants... Où est l'intérêt général dans cette affaire ? Je relève aussi qu'on ne s'est pas intéressé au cumul des fonctions parlementaires avec les fonctions nationales, telle que responsable d'un grand parti politique, président d'un organisme public comme la Caisse des dépôts... Quand on évoque la nécessité, pour un parlementaire, de consacrer 150 % de son temps à son mandat national, on méconnaît la réalité démocratique, et même la réalité tout court.

M. Jacques Mézard.  - Très bien !

M. Philippe Bas.  - Nous espérions, comme en 1985 et en 2000, un accord. Mais notre volonté s'est heurtée à l'intransigeance du Gouvernement qui a décidé, dès l'ouverture des débats, de passer en force ; il a refusé la main que nous lui avons tendue, ce que je regrette profondément.

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois.  - Au Parlement, on ne passe pas en force, on vote !

M. Philippe Bas.  - C'est exactement ce que je dis... On nous propose quelque chose qui ressort davantage du dogme que de considérations respectueuses de l'intérêt général. Monsieur le ministre, vous croyez à la force de l'évidence ; nous croyons plutôt à celle des arguments. Et le moins que l'on puisse dire, c'est que vous ne nous avez pas convaincus.

M. Jacques Mézard.  - C'est le moins qu'on puisse dire !

M. Philippe Bas.  - Vous avez choisi le mandat national unique. Pourquoi interdire à un parlementaire d'être adjoint au maire d'une petite collectivité ? Un artisan qui travaille 70 heures la semaine peut très bien être maire. Cela vaut aussi pour les grandes collectivités. On parle des sondages ; je crois, moi, au suffrage universel : les Français font confiance aux députés-maires, y compris celui d'Évry...

M. Jacques Mézard.  - ...qui exerça ses fonctions avec talent !

M. Philippe Bas.  - Cette interdiction absolue nous prive de l'apport de personnalités qui, si le Parlement ne peut être exclusivement composé d'elles, sont plus que d'autres proches de la population et contribuent utilement à la fabrication de la loi et au bon fonctionnement de nos institutions républicaines.

J'ajoute que vous renforcez la mainmise des groupes politiques sur les parlementaires. Se crée ainsi un déséquilibre entre le besoin d'un élu national d'être en lien avec son parti et celui du parti de pouvoir compter sur de grands élus auprès de la population...

Pour autant, fallait-il différencier les mandats de député et de sénateur ? Ce n'était pas notre solution de premier rang, c'est le refus du Gouvernement d'entrer dans la discussion qui nous a conduits à la dissociation. Depuis 1887, les incompatibilités et inéligibilités sont identiques au Sénat et à l'Assemblée nationale. C'est une construction historique garante de l'indépendance et de la probité des parlementaires. L'incompatibilité de certains mandats locaux avec le mandat de parlementaire n'est ni de même nature, ni de même importance. Un espace est donc ouvert pour envisager une différenciation ponctuelle assortie d'une interdiction de cumul renforcée.

Le Sénat représente les collectivités territoriales de la République. Non, notre mode d'élection n'épuise pas cette caractéristique qui est la nôtre. À preuve, tout texte de décentralisation nous est présenté en premier lieu. Et l'Assemblée nationale, aux termes de l'article 46 de la Constitution, ne peut avoir le dernier mot sur un projet de loi organique intéressant le Sénat. De là, on aboutit à la conclusion que le Gouvernement ne peut pas passer en force.

On nous présente, de fait, un texte qui comporte une disposition relative aux députés s'appliquant, en vertu de l'article L.O. 297 du code électoral, aux sénateurs. Nous le modifions. Il en résulte que si on veut appliquer le projet de loi aux sénateurs, l'Assemblée nationale ne pourra pas trancher seule.

M. Jacques Mézard.  - Subtil raisonnement !

M. Philippe Bas.  - La démonstration vaut aussi pour le remplacement des sénateurs, régi par l'article L.O. 319 du code électoral, que les députés veulent modifier, nous non.

Vous auriez dû, monsieur le ministre, vous rendre à la force de l'évidence ; nous aurions évité d'aller à l'affrontement alors que nous étions d'emblée enclins au compromis.

Depuis quelques mois, nous voyons des modifications de la loi électorale, la baisse des dotations aux collectivités territoriales -et, à en croire la conférence du président de la République, ce n'est qu'un début-, la hausse des délégués non élus dans nos assemblées locales, que sais-je encore. En ces temps, le Sénat, représentant des collectivités territoriales de la République, doit plus que jamais prendre leur défense ! (Applaudissements à droite, au centre et sur les bancs RDSE)

Mme Éliane Assassi .  - Plus que jamais, le Sénat est apparu ces derniers temps comme une assemblée défendant ses avantages... Et certains de s'en donner à coeur joie pour dénigrer les politiques et la politique, brocarder le bicamérisme auquel le groupe CRC est attaché, même s'il souhaite le revisiter.

Malgré les lois de 1985 et 2000, la loi reste permissive et n'interdit pas le cumul des mandats nationaux et locaux. L'enjeu est de mettre fin à une exception française de grande ampleur : 90 % des parlementaires français exercent un mandat local, contre 20 % au maximum dans les autres grandes démocraties. Six Français sur dix sont favorables à l'interdiction du cumul. Celle-ci, ou plutôt la stricte limitation du cumul, constitue non la réponse mais une réponse à la profonde crise de la représentation politique que traverse notre pays depuis des années.

Attaché à une démocratie vivante, le groupe CRC accueille positivement ce projet de loi.

Certains affirment la nécessité d'un ancrage local. Cela s'entend mais je n'en crois rien. Nul besoin de cumuler pour être un élu de terrain. Cette expérience se construit et dire le contraire serait faire injure à nombre de nos collègues. Comment font ceux qui, comme moi, siègent dans l'opposition au sein de nos assemblées locales ? Ou ceux qui, comme moi, décident de ne plus être élue locale ? Sont-ils moins parlementaires que d'autres ? Sont-ils moins capables d'assurer la représentation des collectivités locales ? Défendent-ils moins bien leurs concitoyens ? Je ne le pense pas.

M. Jean-Jacques Hyest.  - Ce n'est pas la question !

Mme Éliane Assassi.  - Vous savez bien que si, arrêtons l'hypocrisie ! Représenter la nation, voter la loi, contrôler l'exécutif ne peut se faire à temps partiel. Mais l'interdiction du cumul ne fera pas reculer à elle seule l'absentéisme parlementaire, lequel est à la fois cause et conséquence de l'affaiblissement du Parlement. Nous étions nombreux à critiquer le déséquilibre institutionnel au profit de l'exécutif et à refuser l'inversion du calendrier électoral.

M. Jacques Mézard.  - Très juste !

Mme Éliane Assassi.  - Nous sommes nombreux aussi à demander le renforcement des pouvoirs du Parlement. Mais rien ne bougera si les parlementaires eux-mêmes de se saisissent pas pleinement de leurs pouvoirs.

En outre, le cumul des mandats fige la représentation. Combien d'ouvriers, combien de jeunes ici ? Et je ne parle pas de la diversité des origines... Sans la parité et une dose de proportionnelle, il y aurait peu de femmes dans cet hémicycle. Nos concitoyens ne s'y trompent pas, ils nous qualifient de caste. En refusant plus d'hétérogénéité, c'est la démocratie qu'on continue de blesser, au mépris du peuple souverain.

Cette réforme est une avancée, même timide. C'est un premier pas vers d'autres mesures nécessaires, la limitation des mandats dans le temps, de nouveaux modes de scrutin, un véritable statut de l'élu... Il faut redonner sens à notre démocratie, aux politiques, à la politique. Malgré ses limites, ce texte peut y contribuer. Le groupe CRC le votera. (Applaudissements sur les bancs CRC, écologistes et sur plusieurs bancs socialistes)

M. Jacques Mézard .  - J'ai l'honneur de présider un exécutif local et un groupe politique au Sénat. J'ai le sentiment de n'être absent ni ici ni là-bas...

Le texte nous revient de l'Assemblée nationale tel que le Gouvernement l'avait voulu. Il a été voté par des députés disciplinés, quels qu'aient été les états d'âme de certains d'entre eux. L'alternance n'a pas changé le système...

Quel que soit votre vote, ce texte sera adopté par le Parlement : vous avez promis, monsieur le ministre, la promesse sera tenue. Un texte qui, selon vos dires, renforcera le Sénat. (Rires à droite) Le ministre Jeanneney avait utilisé le même argument en 1969, vous avez un illustre prédécesseur ! (Sourires à droite) Autrement dit, suicidez-vous ou nous vous exécutons...

Ce qui doit être dit, c'est que le Sénat, dans sa grande majorité, a considéré que l'interdiction de tout cumul entre un mandat exécutif local et un mandat parlementaire était une aberration pour l'équilibre de nos institutions et la représentation de nos territoires.

Ce qui doit être dit, c'est que devant l'acharnement du Gouvernement, le Sénat, dans sa grande majorité, a considéré qu'il lui appartenait de prendre des dispositions relatives aux sénateurs, en application des articles 24 et 46-4 de la Constitution.

Ce qui doit être dit, c'est que vous avez vous-même reconnu en commission qu'un traitement différencié du Sénat ferait de ce texte un projet de loi relatif au Sénat, ce qui impose qu'il soit voté dans les mêmes termes à l'Assemblée nationale et au Sénat. Homme de conviction, vous êtes certainement convaincu des errements de ce projet de loi. Mais voilà, il y avait l'opinion et des militants chauffés à blanc par le communiquant exceptionnel que vous êtes. Pour une fois, ils sont heureux... (Sourires à droite)

Ce qui doit être dit, c'est que le Sénat, vilipendé par l'offensive des médias branchés, a pourtant voté un texte plus réformateur et plus innovant que le vôtre, limitant le cumul pour les sénateurs à un mandat local et, dans tous les cas, des indemnités. C'est cela que souhaitent avant tout nos concitoyens, mais vous avez assez sournoisement entretenu la confusion entre cumul des fonctions et cumul des indemnités.

Ce qui doit être dit, c'est que vous avez renvoyé aux calendes l'interdiction du cumul des mandats locaux que proposait notre groupe, pulvérisé tous les amendements sur le cumul d'une fonction exécutive locale avec, par exemple, une fonction au sein d'un cabinet ministériel, reculé sur les incompatibilités professionnelles -on peut toujours être parlementaire et avocat d'affaires ou dirigeant d'une grande société, même d'armement...

Le RDSE considère que ce texte est contraire à l'équilibre de nos institutions comme à la lettre et à l'esprit de la Constitution ; qu'il prépare sinon la suppression au moins la disparition du Sénat en qualité d'assemblée parlementaire. Vous atteindrez, monsieur le ministre, ce que d'autres n'ont pas pu atteindre. Vous resterez dans l'histoire comme le ministre qui a mis en place le binôme et fait du Sénat une chambre de seconde zone. « Anomalie démocratique », « triangle des Bermudes », « assemblée d'hommes blancs » : depuis dix-huit mois, le Sénat fait face à une offensive -il a pourtant été utile pour préparer une alternance que 18 des 19 sénateurs de mon groupe ont favorisée... Il n'a pas été défendu par ceux dont c'était le devoir. Jusqu'à Public Sénat qui a eu une attitude indigne... Vous qui voulez chausser les bottes de Clemenceau, souvenez-vous de son discours de Saverne, vous avez remplacez les chéquards par des cumulards... Le bicamérisme est une question récurrente ; même Clémenceau a heureusement changé d'avis à son sujet.

Où, dans quelle démocratie change-t-on à chaque alternance de système électoral et d'architecture institutionnelle ? L'hyper-présidence, qui n'est plus le fait d'un homme mais des institutions de notre Ve République, veut des parlementaires soumis à des partis dominants. C'est contre cela que le Sénat s'est toujours battu ; et c'est pour cela qu'on veut le briser, le vider de sa substance, le transformer en copie émasculée de l'Assemblée nationale, avec des sénateurs choisis par les partis et ne représentant plus les territoires. Il est de mon devoir de le dire : à quand un Sénat sans un seul maire ni président de département ?

Vous attentez à notre mission constitutionnelle de représentation des collectivités locales. La preuve ? Ce Haut conseil des territoires, que nous avons combattu, une provocation ! Comme le dit le rapporteur à l'Assemblée nationale de la loi Métropoles, « les sénateurs parlent d'un Sénat bis, ils n'intègrent pas les perspectives du non-cumul. Mais le jour où le non-cumul sera appliqué, il faudra un lieu de concertation entre le Gouvernement et les responsables des principaux exécutifs »... C'est dire qu'aujourd'hui, c'est le Sénat seul qui assure cette concertation... Dans le rapport de notre excellent collègue Peyronnet, dont nous savons la probité, intitulé « Tirer les conséquences des règles de non-cumul », on peut lire ceci : « les nouvelles règles de non-cumul (...) vont littéralement couper les parlementaires de toute la vie locale. (Ils) vont se retrouver hors sol », avec pour seule satisfaction celle « de couper des rubans et de déposer des chrysanthèmes ». Et de proposer de les répartir dans les commissions régaliennes locales... C'est ubuesque !

Ce texte serait une révolution, selon vous, monsieur le ministre. Il est des révolutions qui ont des effets positifs, d'autres qui ont des effets dévastateurs... Sans reprendre le mot qu'avait eu le président Monnerville en 1968, disons que c'est l'avenir du bicamérisme qui est en jeu avec un texte qui viole l'article 46-4 de la Constitution, lequel doit se lire avec l'article 24. Fabriquer des textes applicables aux deux chambres et supprimer toute disposition spécifique au Sénat, c'est faire du Sénat un ersatz soumis, ce que certains députés disent ouvertement. Comme M. Bas, je me réfère à l'article L.O. 297 du code électoral et à l'article 46 de la Constitution, lequel dispose que tout texte intéressant le Sénat doit être voté dans les mêmes termes par les deux assemblées. Nombre de constitutionnalistes ont lancé l'alerte ces derniers mois.

Le courage, c'est de ne pas transiger sur les convictions. Nous défendons notre vision de la République, des institutions et du bicamérisme ; nous avons mené le combat avec vous, nous le menons aujourd'hui contre vous. En 1962, Gaston Monnerville lançait au président de la République : « Non, vous n'avez pas le droit, vous le prenez ». Nous ne sommes, vous et moi, ni l'un ni l'autre, encore que vous puissiez avoir cette ambition respectable. Pour autant, cette phrase illustre très exactement la situation que nous vivons. Méditez-la !

Au nom de tout cela, pour le Sénat, pour la République, je vous demande, mes chers collègues, de tenir bon ! (Applaudissements sur les bancs RDSE, au centre et à droite)

M. Michel Teston .  - Le Sénat doit voter le texte du Gouvernement pour restaurer la confiance de nos concitoyens dans ses représentants. En deuxième lecture, comme je l'ai fait en première, je voterai contre celui qu'une majorité UMP-RDSE-UDI a amendé.

Pour certains, l'article 24 de la Constitution justifierait le cumul des mandats. Que faut-il en penser ? Le régime des incompatibilités et des inéligibilités est identique pour les sénateurs et les députés. L'article 3 de la Constitution dispose : « La souveraineté nationale appartient au peuple qui l'exerce par ses représentants ». Députés et sénateurs jouissent de la même légitimité. Surtout, ce texte n'instaure pas, loin de là, le mandat unique.

Mme Cécile Cukierman.  - Très bien !

M. Michel Teston.  - On peut douter que le Conseil constitutionnel donne de l'article 24 une interprétation reconnaissant un traitement différencié pour les sénateurs. Et quand bien même, ce serait la voie ouverte à un affaissement du rôle de notre assemblée, qui serait cantonnée à l'examen des projets de loi relatifs aux collectivités territoriales.

M. Simon Sutour, rapporteur.  - C'est vrai !

M. Michel Teston.  - On oublie que l'Assemblée nationale a davantage de parlementaires cumulant des fonctions locales. Le Sénat, avec cette loi, perdrait de grands élus qui font sa force. Mais au fait, qu'est-ce qu'un grand élu ? Des élus, il en faut, des grands, des moyens et des petits. Le grand élu n'est pas nécessairement celui qui cumule, c'est celui qui s'investit dans la fonction ou le mandat que le peuple lui a confiés. Le non-cumul rendra les choses plus lisibles pour nos concitoyens.

Après les lois du 30 décembre 1985 et du 5 avril 2000, l'exigence démocratique impose d'adopter le non-cumul tel que le propose le Gouvernement. Chaque chose en son temps, nous en viendrons ensuite, comme je l'avais proposé il y a quelques années, à l'interdiction du cumul dans le temps. Il y va du pacte républicain. Le texte du Gouvernement, tel qu'amendé par l'Assemblée nationale, devrait y contribuer. (Applaudissements sur la plupart des bancs socialistes, CRC et écologistes)

M. Jean-Jacques Hyest .  - Passer de la limitation à l'interdiction totale du cumul des mandats, est-ce une révolution ? Certains ont construit toute leur carrière sur le cumul avant de se repentir... Certains farouches adversaires du cumul des mandats ont même été à la fois Premier ministre, maire et président de communauté urbaine !

Jusqu'à présent, toutes les incompatibilités concernant les sénateurs ont été acceptées par le Sénat. En 1985 et 2000, le Gouvernement a cherché un compromis parce qu'il y avait un risque constitutionnel. La jurisprudence du Conseil constitutionnel aurait-elle évolué ? Nous verrons, mais les arguments de M. Bas sur le remplacement des sénateurs sont imparables.

Cette fois-ci encore, des évolutions étaient envisageables. Les propositions du Sénat sont raisonnables. En quoi être maire d'un village nuit-il à l'exercice d'un mandat parlementaire ? J'ai considéré, pour ma part, que la présidence d'une très grande collectivité était incompatible avec un mandat parlementaire ; cela ne vous a pas suffi.

N'oublions pas que nos concitoyens élisent volontiers au Parlement leurs élus locaux !

Je n'ai jamais dit que tous les parlementaires devaient être des élus locaux ; certains, qui ne le sont pas, ont beaucoup apporté au Sénat et s'intéressaient d'ailleurs fort peu aux collectivités territoriales. D'autres connaissent bien la vie locale pour avoir été dans l'administration territoriale...

On a agité la question du cumul des indemnités. Il a déjà été considérablement réduit et nous en avons voté l'interdiction.

Le cumul expliquerait l'absentéisme ? Je ne ferai pas de démonstration ad hominem mais je connais bien un parlementaire, qui l'est depuis 1986 et a toujours eu d'éminentes fonctions locales tout en étant assidu au Parlement. En fait, tout dépend de chacun. Certains ont besoin de loisirs, pas moi ; l'important est de faire son travail. Certains d'entre nous n'exercent pas de mandats locaux et on les voit peu. (Mme Éliane Assassi se sent visée) Ce n'est certainement pas à vous que je pense, madame la présidente ; d'ailleurs, l'absentéisme n'est pas le fait des présents. (Sourires)

La fonction du Sénat de représentation des collectivités territoriales implique l'autorisation d'exercer un mandat local. Cette expérience est irremplaçable. C'est la patte du Sénat. On la voit dans l'excellent rapport de M. Peyronnet.

Ce projet de loi pose un problème constitutionnel : le fait que l'Assemblée nationale puisse avoir le dernier mot pour le régime d'incompatibilités concernant le Sénat n'est pas conforme aux règles qui ont toujours été respectées jusqu'à présent. Je suivrai la position de la commission des lois. Je ne voudrais pas que, dans quinze ou vingt ans, le Parlement ne soit plus constitué que de gens devant leur mandat non à la reconnaissance des électeurs mais aux partis.

Ce qui mine les institutions de la Ve République, qui étaient équilibrées, c'est la volonté de faire moderne, à quoi on doit le quinquennat, le raccourcissement du mandat des sénateurs, l'inversion du calendrier électoral. Et maintenant, l'interdiction de tout cumul. Tout cela n'augure rien de bon pour la démocratie. (Applaudissements à droite, au centre et sur certains bancs à gauche)

M. Yves Détraigne .  - Une dépêche de l'AFP, hier, parlait d'un « combat d'arrière-garde » du Sénat à propos du cumul des mandats. (Exclamations) Il est difficile, dans ce contexte, de vous convaincre, monsieur le ministre, que le Sénat ne doit pas être un clone de l'Assemblée nationale.

Veut-on un Parlement à la botte de l'exécutif ? C'est bien de cela qu'il s'agit. Outre la différence du mode d'élection, les sénateurs ont bien souvent, contrairement aux députés, une légitimité propre, liée à leur ancrage territorial et pas seulement à l'investiture d'un parti. Avec ce texte, ce ne sera plus le cas. Adieu l'apport propre du Sénat, notamment lorsqu'il s'agit des collectivités territoriales. On s'interrogera bientôt sur l'intérêt d'une deuxième chambre...

Derrière ces projets de loi se cache la volonté d'abaisser le Parlement, de changer profondément notre régime parlementaire en faisant deux assemblées jumelles et en réduisant le Parlement à une chambre d'enregistrement. Quand on se souvient des discours tenus naguère par certains membres de la majorité actuelle, il y a de quoi s'étonner.

Certes, il faut mettre de l'ordre, et c'est pourquoi nous proposons de limiter le cumul à un seul autre mandat et d'interdire tout cumul des indemnités. Nous ne pourrons donc suivre le Gouvernement. (Applaudissements au centre, à droite et sur les bancs RDSE)

M. Yannick Vaugrenard .  - L'atmosphère de nos débats est meilleure que la dernière fois : nous avons évité les attaques ad hominem...

M. Jacques Mézard.  - Pas sur Public Sénat !

M. Yannick Vaugrenard.  - L'interdiction du cumul est un engagement du président de la République.

M. Jacques Mézard.  - Il y en a d'autres...

M. Yannick Vaugrenard.  - Et les engagements doivent être tenus. Pour cela, il faut des soutiens qui ne soient pas à géométrie variable. Surtout, nous sommes placés face à nos responsabilités. Ce sens des responsabilités a manqué à certains des membres du Bureau la semaine dernière et un nouveau vote inique du Sénat ce soir nuirait à l'image de notre Assemblée.

M. Gérard Larcher.  - Nous ne sommes pas là pour soigner notre image.

M. Yannick Vaugrenard.  - Un récent sondage du Cevipof a montré l'étendue de la défiance des Français vis-à-vis des élus.

M. Pierre-Yves Collombat.  - Pas du maire !

M. Yannick Vaugrenard.  - Les règles votées sous les gouvernements Fabius et Jospin -toujours des gouvernements de gauche- n'ont jamais été remises en cause. Les présents textes en sont l'aboutissement, alors que la tâche des élus a beaucoup évolué. (M. Simon Sutour, rapporteur, le confirme)

Les réalités techniques, juridiques, administratives exigent beaucoup d'assiduité. Le cumul, c'est la porte ouverte à la technocratie car les élus n'ont pas le temps de s'occuper de tout. L'administration territoriale, de haut niveau, doit rester ce qu'elle est : un outil d'aide à la décision.

Le cumul est majoritaire en France, marginal ailleurs : il concerne 80 % des parlementaires en France contre 24 % en Allemagne, 20 % en Espagne, 13 % en Italie, 6 % aux Pays-Bas, 3 % en Grande-Bretagne.

M. Jacques Mézard.  - Leur système politique est différent.

M. Yannick Vaugrenard.  - Un mandat local serait un gage de compétence ? L'expérience prouve le contraire. Voyez Robert Badinter ou Victor Hugo, qui siégeait juste à côté de Mme Assassi.

Mme Éliane Assassi.  - Restons humbles. (Sourires)...

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois.  - Victor Hugo ne s'était pas présenté à Guernesey.

M. Yannick Vaugrenard.  - La défense du bicamérisme n'est pas celle du conservatisme. Il faut adapter nos modes de travail aux besoins du temps. Voter cette loi, c'est renforcer le Sénat et non l'affaiblir. (Applaudissements sur les bancs CRC et sur de nombreux bancs socialistes)

M. Gilbert Roger .  - La crise de confiance entre élus et citoyens est patente. Le non-cumul est un moyen de moderniser nos institutions et de revitaliser notre démocratie. Le cumul est une exception française ; cela a été montré, chiffres à l'appui. Ses défenseurs arguent de la nécessité d'un ancrage local. Pourtant, simple conseiller général, je ne me sens pas plus exclu de la gouvernance locale que quand j'étais maire ou premier vice-président du conseil général.

En outre, un parlementaire représente la Nation tout entière. N'est-il pas choquant qu'il ferraille plus pour son territoire que pour les autres ? Comment alors défendre une réforme juste de la fiscalité locale ? Il est temps de mettre fin aux baronnies.

M. Jacques Mézard.  - Parlons de Lille !

M. Gilbert Roger.  - Notre Parlement est l'un des plus monochromes d'Occident. Le non-cumul permettra à d'autres catégories de la population d'être représentées. Le monde a changé, il est devenu plus complexe et distendu. Le cumul nuit au travail parlementaire autant qu'au travail local. Certains parlementaires abandonnent leurs collectivités territoriales à la gestion des technocrates, qui font le travail d'élus... Après trente ans de décentralisation, le mandat local est à temps plein !

Pour être opérant, le projet de loi devra être accompagné d'un renforcement des pouvoirs du Parlement, notamment de contrôle et d'évaluation. Le Sénat pourrait ainsi prendre toute sa place dans l'équilibre des pouvoirs.

J'entends l'argument selon lequel un parlementaire exerçant un mandat local aurait davantage les moyens d'expertiser les textes et de faire remonter les demandes de son territoire. Cela pose la question des moyens mis à disposition des parlementaires pour exercer leur mission.

Je vous invite à ne pas voter le texte de la commission, du moins à ne pas prendre part au vote ou à vous abstenir.

M. Alain Richard .  - Je ne me reconnais ni dans la position du gouvernement ni dans celle de la commission. La réflexion n'est pas aboutie car l'enjeu, c'est le rôle du Parlement dans les décennies à venir.

Je ne suis aucunement convaincu qu'il faille distinguer entre l'Assemblée nationale et le Sénat. Depuis Sieyès, le bicamérisme français est fondé sur l'idée d'une double représentation du peuple français, le Sénat ne se distinguant que par la modalité du suffrage indirect. La représentation des collectivités territoriales n'épuise pas la fonction constitutionnelle du Sénat.

L'exercice conjoint d'un mandat parlementaire et d'une fonction exécutive locale a produit deux avantages cruciaux. Le premier, c'est une source constante de formation et d'information, utile au vote de la loi et au contrôle du Gouvernement. Tous les parlementaires n'acquièrent pas la compréhension des conséquences de la législation par la voie académique. Le mandat local y pourvoit ou les fonctions nationales que j'eus l'honneur d'exercer avant que d'être élu au Sénat. Le Gouvernement propose que les parlementaires puissent conserver un mandat non exécutif. Un autre compromis était possible : la limitation du cumul à une fonction exécutive locale, et sans doute son interdiction pour les collectivités les plus importantes, assortie du non-cumul des indemnités.

Deuxième avantage, l'exercice d'un mandat exécutif local améliore la représentativité du Parlement. Le Parlement français est territorialisé, mais ce qui motive le choix des candidats à l'investiture d'un parti est la parole tacticienne ou l'action. Désormais, on ne pourra plus tirer sa légitimité de l'action. De leur expérience locale, les parlementaires tiraient une forme d'autonomie. Ce ne sera plus le cas.

Les parlementaires seront donc de moins en moins en phase avec les réalités locales, et de plus en plus soumis à la surenchère partisane. Le travail législatif en sera détérioré, au moment même où l'on cherche à évaluer notre législation.

Le non-cumul serait un moyen de lutter contre l'absentéisme ? C'est une illusion car le parlementaire devra faire double dose de travail local pour s'attirer la reconnaissance du public, par le verbe plutôt que par l'action. Pas une minute de plus ne sera passée en séance ou en commission. À Paris, on cherchera à se distinguer et les éclats, qui ne seront pas toujours subtils, se multiplieront. (M. Manuel Valls, ministre, sourit)

Maires de communes importantes, présidents et vice-présidents de conseils généraux et régionaux, si l'on ajoute les fonctions locales les unes aux autres, la France doit en compter 4 000 à 5 000. Pas plus de 15 % d'entre elles sont exercées par des parlementaires. Les autres sont-ils plus assidus, plus disponibles ? Non car beaucoup ont aussi une activité professionnelle.

L'interdiction du cumul, le slogan fait recette. À l'arrière-plan, il y a l'antiparlementarisme et le rejet de la classe politique. Ce texte affaiblira le Parlement et l'orientera encore davantage vers la politique spectacle. Bien que je sois, sur ce point, en profond désaccord avec le Gouvernement que je soutiens, je préfère m'abstenir, avec l'espoir que nous ayons à l'avenir une réflexion plus constructive sur les voies et moyens de restaurer l'autorité du Parlement. (Applaudissements sur les bancs RDSE, UDI-UC et UMP, Mme Virginie Klès applaudit aussi)

M. Manuel Valls, ministre .  - Je n'ai jamais exprimé aucun mépris envers le Sénat. Le temps passé ici à étudier les projets de loi sur le terrorisme ou les étrangers en témoigne. Je n'ai pas, non plus, cherché à entretenir la confusion entre cumul des mandats et cumul des indemnités.

Le non-cumul est un engagement pris par le président de la République, après un long débat au sein de notre formation politique. Je m'étonne d'ailleurs des critiques exprimées à l'égard des partis par ceux-là même qui appartiennent à l'un des plus anciens que connaisse la France... La question du non-cumul est posée depuis longtemps, il fallait y répondre. Voilà six mois que le Parlement en débat.

Le changement de mode de scrutin départemental, l'élection au suffrage direct des élus intercommunaux, le non-cumul vont profondément changer la physionomie de nos assemblées. Il faudra sans doute en faire le bilan dans quelques années. À cela s'ajoutent les lois de décentralisation. Le rôle des collectivités territoriales et celui du Parlement en seront modifiés. Ne prononçons pas de condamnation hâtive ! Moi, je suis convaincu que l'on ne reviendra pas sur le non-cumul.

M. Bas prétend que le texte constitue une loi organique relative au Sénat. Le Conseil constitutionnel tranchera mais sa jurisprudence nous donne raison. Je vous renvoie à la décision du 12 avril 2011 : une loi organique relative au Sénat est une loi qui lui est propre, pas une loi qui concerne également les deux Assemblées. Voilà pourquoi, si le Sénat ne vote pas le texte de l'Assemblée nationale, j'inviterai celle-ci à se prononcer en dernière lecture.

Ceux d'entre vous qui ne détiennent pas de mandat local sont-ils moins sénateurs que les autres ? Rien n'empêchera un ancien maire de mettre son expérience au service du Parlement.

Le Gouvernement s'honore de faire avancer chaque jour un peu plus notre démocratie. (Applaudissements sur la plupart des bancs socialistes)

La discussion générale est close.

Discussion des articles du projet de loi organique

ARTICLE PREMIER

M. Pierre-Yves Collombat .  - Le non-cumul des mandats, ce serait aller dans le sens de l'histoire, aller vers une démocratie radieuse. En un mot, on vivifierait la démocratie. Voilà la version pour enfants.

Dans ce cas, pourquoi le Gouvernement s'est-il opposé à la publication de l'activité des parlementaires ? Il autorise bien la publication du patrimoine des élus.

La version pour adultes est moins riante, croyez-moi ! Pour soigner la maladie de langueur dont souffre notre démocratie, il faudrait remplacer les cumulards par des parachutistes, dépendant de firmes, comme l'ont décrit certains, au fonctionnement non démocratique. Et les mandataires de l'oligarchie financière et médiatique s'empresseront de les rejoindre comme dans l'Italie de Berlusconi. Il y a un siècle déjà, Robert Michels dénonçait la maladie oligarchique des partis démocratiques... avant de succomber à l'appel du chef. Dans la Ve République finissante, cette oligarchie est tempérée par des luttes de clans. Pour soigner la maladie de langueur du système politique, il faudrait rapprocher les élus des citoyens au lieu de les en éloigner. Aux élections européennes, on trouve moins de candidats cumulards que de recalés du suffrage universel. Pour soigner la maladie de langueur, on s'efforcerait d'établir une véritable séparation des pouvoirs. Depuis l'inversion du calendrier électoral voulue par Chirac et Jospin, le parlementarisme rationalisé a cédé la place à un régime où tout le pouvoir est concentré à l'Élysée. Les parlementaires auront plus de temps pour faire la loi ? Ils n'ont, dans la majorité, qu'à enregistrer et, dans l'opposition, qu'à se battre pendant trois heures pour faire passer un sous-amendement.

Avec cet article, le Sénat, parce qu'il s'y manifeste le plus d'indépendance, sera vidé de son sens ! Voilà pourquoi le RDSE ne veut pas de cet article premier. (M. Jacques Mézard approuve)

M. le président.  - Amendement n°5 rectifié, présenté par Mme Lipietz, M. Placé, Mmes Aïchi, Ango Ela, Archimbaud, Benbassa et Blandin, MM. Dantec, Desessard, Gattolin et Labbé et Mme Bouchoux.

I. - Alinéa 2

Compléter cet alinéa par les mots :

tout autre fonction ou mandat électifs, à l'exception du mandat de conseiller municipal. Il est incompatible avec

II. - Alinéas 5 à 14

Supprimer ces alinéas.

Mme Hélène Lipietz.  - Moi, je fais partie d'une oligarchie, d'une firme ? J'estime tenir mon mandat du travail que j'effectue en Seine-et-Marne depuis vingt ans.

Être conseillère régionale ou départementale et exercer une autre fonction est difficilement compatible, je le sais pour l'avoir vécu. En bref, nous vous proposons d'aller plus loin.

M. Simon Sutour, rapporteur.  - Cet amendement instaure le mandat unique, avis défavorable.

M. Manuel Valls, ministre.  - Même avis.

L'amendement n°5 rectifié n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°2, présenté par le Gouvernement.

Alinéas 18 à 34

Supprimer ces alinéas.

M. Manuel Valls, ministre.  - Cet amendement rétablit les mêmes incompatibilités pour les députés et les sénateurs, c'est le coeur du texte et permettez que le Gouvernement le défende.

M. le président.  - Amendement identique n°9 rectifié, présenté par Mme Lipietz, M. Placé, Mmes Aïchi, Ango Ela, Archimbaud, Benbassa, Blandin et Bouchoux et MM. Dantec, Desessard, Gattolin et Labbé.

Mme Hélène Lipietz.  - Le cumul des mandats représente un problème de temps mais aussi un problème de genre. De fait, un parlementaire fabrique des normes... Je m'explique : dans le texte sur les métropoles, on a parlé de fusion des collectivités territoriales. Faut-il que ce soit leurs élus qui en décident au risque de faire passer l'intérêt local devant l'intérêt national ?

Et puis, il faut savoir pour qui on vote. Laisse-t-on aux citoyens le choix entre un candidat qui cumule les fonctions et un autre qui ne le fait pas ?

M. Jean-Jacques Hyest.  - C'est le scrutin de liste !

Mme Hélène Lipietz.  - Il n'empêche. Pour une fois, je soutiendrai un amendement du ministre de l'intérieur.

M. Simon Sutour, rapporteur.  - Cet amendement important, auquel j'adhère à titre personnel, contredit la position de la commission en revenant sur la spécificité sénatoriale. Avis défavorable.

À la demande des groupes UMP et RDSE, les amendements identiques nos2 et 9 rectifié sont mis aux voix par scrutin public.

M. le président.  - Voici les résultats du scrutin n°112 :

Nombre de votants 306
Nombre de suffrages exprimés 302
Pour l'adoption 118
Contre 184

Le Sénat n'a pas adopté.

À la demande des groupes UMP et RDSE, l'article premier est mis aux voix par scrutin public.

M. le président.  - Voici les résultats du scrutin n°113 :

Nombre de votants 306
Nombre de suffrages exprimés 302
Pour l'adoption 184
Contre 118

Le Sénat a adopté.

L'article premier ter A est adopté, de même que l'article premier ter B.

ARTICLE PREMIER TER

M. le président.  - Amendement n°6 rectifié, présenté par Mme Lipietz, M. Placé, Mmes Aïchi, Ango Ela, Archimbaud, Benbassa, Blandin et Bouchoux et MM. Dantec, Desessard, Gattolin et Labbé.

Alinéa 2

Rédiger ainsi cet alinéa :

« Art. L.O. 147-1. - Le mandat de député est incompatible avec les fonctions de président, de vice-président et de membre :

Mme Hélène Lipietz.  - Il s'agit de revenir à la rédaction du Sénat en première lecture en réintégrant la qualité de simple membre d'un conseil ou d'un organisme à la liste des incompatibilités mentionnées dans cet article.

M. Simon Sutour, rapporteur.  - Pour vous épargner de longs commentaires, notre collègue souhaite contrecarrer une évolution intervenue à l'Assemblée nationale que la commission considère comme positive. Rejet.

M. Manuel Valls, ministre.  - Même avis.

L'amendement n°6 rectifié n'est pas adopté.

L'article premier ter est adopté, de même que l'article premier quater.

ARTICLE 3

M. le président.  - Amendement n°3, présenté par le Gouvernement.

I. - Alinéa 2

Supprimer les mots :

, la prolongation au-delà du délai de six mois d'une mission temporaire confiée par le Gouvernement en application de l'article L.O. 144

II. - Alinéa 4

Supprimer les mots :

, de prolongation au-delà du délai de six mois d'une mission temporaire confiée par le Gouvernement en application de l'article L.O. 144

M. Manuel Valls, ministre.  - Le Gouvernement veut rétablir les règles de remplacement des parlementaires chargés d'une mission temporaire dépassant le délai de six mois prévu par l'article L.O. 144 du code électoral.

Une mission répond à des objectifs d'intérêt général ; elle n'est pas un moyen, pour le Gouvernement, d'écarter un parlementaire en organisant une élection partielle.

M. Simon Sutour, rapporteur.  - La commission est unanimement défavorable à cette proposition.

M. Jacques Mézard.  - J'entends, avec satisfaction, le ministre dire : jamais, au grand jamais, un gouvernement ne voudrait...

M. Manuel Valls, ministre.  - Je n'ai pas dit « jamais, au grand jamais »...

M. Jacques Mézard.  - Bel aveu ! Et de la transparence, il en faut... (Sourires) La commission, je m'en félicite, a rejoint la position du groupe RDSE.

À la demande du groupe RDSE l'amendement n°3 est mis aux voix par scrutin public. 

M. le président.  - Voici les résultats du scrutin n°114 :

Nombre de votants 306
Nombre de suffrages exprimés 302
Pour l'adoption 118
Contre 184

Le Sénat n'a pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°7 rectifié, présenté par Mme Lipietz, M. Placé, Mmes Aïchi, Ango Ela, Archimbaud, Benbassa, Blandin et Bouchoux et MM. Dantec, Desessard, Gattolin et Labbé.

Après l'alinéa 2

Insérer un paragraphe ainsi rédigé :

... - Le même article est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Les députées ont le droit de bénéficier d'un congé de maternité défini aux articles L. 1225-17 à L. 1225-23 du code du travail dans des conditions prévues par les règlements des assemblées. Les députées qui bénéficient d'un congé de maternité peuvent être remplacées pendant la durée du congé de maternité par les personnes élues en même temps qu'elles à cet effet. Ces suppléants ne bénéficient d'aucune indemnité. »

M. le président.  - Amendement n°8 rectifié, présenté par Mme Lipietz, M. Placé, Mmes Aïchi, Ango Ela, Archimbaud, Benbassa, Blandin et Bouchoux et MM. Dantec, Desessard, Gattolin et Labbé.

Après l'alinéa 2

Insérer un paragraphe ainsi rédigé :

... - Le même article est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Les députés ont le droit de bénéficier d'un congé parental d'éducation défini aux articles L. 1225-47 à L. 1225-53 du code du travail dans des conditions prévues par les règlements des assemblées. Les députés qui bénéficient d'un congé parental d'éducation peuvent être remplacés pendant la durée de ce congé par les personnes élues en même temps qu'eux à cet effet. Ces suppléants ne bénéficient d'aucune indemnité. »

Mme Hélène Lipietz.  - Ces amendements tirent les conséquences d'une évolution prévisible : la féminisation et le rajeunissement de nos assemblées. Les parlementaires doivent bénéficier d'un congé de maternité et d'un congé parental. Ayant attiré l'attention du Gouvernement sur ce point, je retire ces amendements qui ont peu à voir avec ce projet de loi.

Les amendements nos7 rectifié et 8 rectifié sont retirés.

M. le président.  - Amendement n°4, présenté par le Gouvernement.

Alinéa 5

Rétablir ce paragraphe dans la rédaction suivante :

III. - Le premier alinéa de l'article L.O. 319 du même code est ainsi rédigé :

« Sous réserve du second alinéa du présent article, les sénateurs élus au scrutin majoritaire dont le siège devient vacant pour toute autre cause que l'annulation de l'élection, la démission d'office prononcée par le Conseil constitutionnel en application de l'article L.O. 136-1, la démission intervenue pour tout autre motif qu'une incompatibilité prévue aux articles L.O. 137, L.O. 137-1, L.O. 141 ou L.O. 141-1 ou la déchéance constatée par le Conseil constitutionnel en application de l'article L.O. 136 sont remplacés par les personnes élues en même temps qu'eux à cet effet. »

M. Manuel Valls, ministre.  - Amendement de coordination avec l'amendement du Gouvernement déposé à l'article premier.

M. le président.  - Amendement n°14, présenté par M. Sutour, au nom de la commission.

I.  -  Alinéa 5

Rétablir ce paragraphe dans la rédaction suivante :

III.  -  Le premier alinéa de l'article L.O. 319 du code électoral est ainsi modifié :

1° Le mot : « décès, » est remplacé par les mots : « décès ou » ;

2° Les mots : « ou de prolongation au-delà du délai de six mois d'une mission temporaire confiée par le Gouvernement » sont supprimés.

II.  -  Alinéa 6

Supprimer cet alinéa.

M. Simon Sutour, rapporteur.  - Par coordination de cet amendement avec la modification introduite par la commission s'agissant du remplacement des députés, le I supprime le recours au suppléant pour le remplacement du sénateur élu au scrutin majoritaire dont le mandat cesserait à la suite de la prolongation au-delà de six mois d'une mission temporaire confiée par le Gouvernement, conformément à l'article L.O. 144 du code électoral. Et, par coordination avec la suppression de la nouvelle rédaction de l'article L.O. 319, son II supprime la nouvelle rédaction de l'article L.O. 322 proposée par le IV de l'article 3. Avis défavorable sur l'amendement n°4.

M. Manuel Valls, ministre.  - Rejet de l'amendement n°14.

À la demande des groupes UMP et RDSE, l'amendement n°4 est mis aux voix par scrutin public.

M. le président.  - Voici les résultats du scrutin n°115 :

Nombre de votants 306
Nombre de suffrages exprimés 290
Pour l'adoption 3
Contre 287

Le Sénat n'a pas adopté.

L'amendement n°14 est adopté.

À la demande des groupes UMP et RDSE, l'article 3 modifié est mis aux voix par scrutin public.

M. le président.  - Voici les résultats du scrutin n°116 :

Nombre de votants 305
Nombre de suffrages exprimés 301
Pour l'adoption 298
Contre 3

Le Sénat a adopté.

L'article 3 ter A est adopté.

INTITULÉ DU PROJET DE LOI

M. le président.  - Amendement n°1, présenté par M. Mézard et les membres du groupe du RDSE.

Remplacer les mots :

ou de sénateur

par les mots :

et limitant à une seule fonction exécutive locale le cumul avec le mandat de sénateur

M. Jacques Mézard.  - Amendement de coordination déjà adopté par le Sénat en première lecture.

M. Simon Sutour, rapporteur.  - Cet amendement tire les conséquences du vote intervenu en commission la semaine dernière : favorable.

M. Manuel Valls, ministre.  - Logiquement, défavorable... mais je ne doute pas que le Sénat l'adoptera. Grâce à quoi, les députés sauront à quel texte ils ont affaire et le changeront dès la semaine prochaine... (Sourires)

L'amendement n°1 n'est pas adopté.

M. le président.  - Je vais mettre aux voix l'ensemble du projet de loi organique.

Le scrutin public est de droit.

M. le président.  - Voici les résultats du scrutin n°117 :

Nombre de votants 303
Nombre de suffrages exprimés 294
Pour l'adoption 177
Contre 117

Le Sénat a adopté.

Discussion des articles du projet de loi

L'article premier A demeure supprimé.

ARTICLE PREMIER B (Suppression maintenue)

M. le président.  - Amendement n°1, présenté par M. Mézard et les membres du groupe RDSE.

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

L'article L. 231 du code électoral est ainsi modifié :

1° Au deuxième alinéa, les mots : « de six mois » sont remplacés par les mots : « d'un an » ;

2° Le 8° est ainsi rédigé :

« 8° Les personnes exerçant, au sein du conseil régional, du conseil départemental, de la collectivité territoriale de Corse, de Guyane ou de Martinique, d'un établissement public de coopération intercommunale ou de leurs établissements publics, les fonctions de directeur général des services, directeur général adjoint des services, directeur des services, directeur adjoint des services ou chef de service, ainsi que les fonctions de membre du cabinet du président, du président de l'assemblée, du président du conseil exécutif, du maire ou du président d'un établissement public de coopération intercommunale ; ».

M. Jacques Mézard.  - Cet amendement rétablit l'article premier B adopté par le Sénat en première lecture. La véritable modernisation de notre démocratie suppose d'assurer l'égalité d'accès aux fonctions électives. Pour ce faire, il faut étendre aux collaborateurs de cabinet des exécutifs locaux les règles d'inéligibilité aux élections locales dans le ressort où ils travaillent ou ont travaillé. C'est fondamental pour assurer l'égalité des candidats devant les électeurs.

M. le président.  - Amendement n°4 rectifié, présenté par Mme Lipietz, M. Placé, Mmes Aïchi, Ango Ela, Archimbaud, Benbassa, Blandin et Bouchoux et MM. Dantec, Desessard, Gattolin et Labbé.

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

Le code général des collectivités territoriales est ainsi modifié :

1° Le premier alinéa de l'article L. 3122-3 est ainsi rédigé :

« Les fonctions de président d'un conseil général et de vice-président d'un conseil général sont incompatibles avec les fonctions suivantes : président d'un conseil régional, vice-président d'un conseil régional, maire d'une commune de plus de 20 000 habitants, président d'un établissement public de coopération intercommunale, vice-président d'un établissement public de coopération intercommunale. » ;

2° Le premier alinéa de l'article L. 4133-3 est ainsi rédigé :

« Les fonctions de président d'un conseil régional ou de vice-président d'un conseil régional sont incompatibles avec les fonctions suivantes : président d'un conseil général, vice-président d'un conseil général, maire d'une commune de plus de 20 000 habitants, président d'un établissement public de coopération intercommunale, vice-président d'un établissement public de coopération intercommunale. »

Mme Hélène Lipietz.  - Je m'en suis expliquée à plusieurs reprises.

M. Simon Sutour, rapporteur.  - Favorable à l'amendement n°1 ; rejet de l'amendement n°4 rectifié qui à la fois renforce et allège le non-cumul des mandats puisqu'il crée un effet de seuil.

M. Manuel Valls, ministre.  - Défavorable aux deux amendements.

Mme Hélène Lipietz.  - Je ne comprends pas les motivations du RDSE, qui veut assurer l'égalité entre les candidats : que dire du maire qui se représente ?

M. Jacques Mézard.  - Belle démonstration de cette classe politique qui se constitue en firme, en caste. Cette dérive démocratique est dangereuse, qui voit la captation des élections par des professionnels de la politique.

L'amendement n°1 est adopté et l'article premier B est rétabli.

L'amendement n°4 rectifié devient sans objet.

ARTICLE PREMIER C (Suppression maintenue)

M. le président.  - Amendement n°3, présenté par MM. Mézard, Alfonsi, Barbier, Baylet, Bertrand, C. Bourquin, Collin, Collombat, Fortassin et Hue, Mme Laborde et MM. Mazars, Plancade, Requier, Tropeano, Vall et Vendasi.

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

Après l'article L. 46 du code électoral, il est inséré un article L. 46-1-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 46-1-1.  -  Les fonctions de membre d'un cabinet ministériel sont incompatibles avec les fonctions exécutives qui font l'objet des titres III et IV du livre Ier. »

M. Jacques Mézard.  - Cet amendement, qui va dans le même sens que le précédent, interdit à tout membre d'un cabinet ministériel d'exercer un mandat électif local, de quelque nature qu'il soit.

M. Simon Sutour, rapporteur.  - Favorable.

M. Manuel Valls, ministre.  - Défavorable.

L'amendement n°3 est adopté et l'article premier C est rétabli.

ARTICLE PREMIER D (Suppression maintenue)

M. le président.  - Amendement n°2 rectifié, présenté par MM. Mézard, Alfonsi, Barbier, Baylet, Bertrand, C. Bourquin, Collin, Collombat, Fortassin et Hue, Mme Laborde et MM. Mazars, Plancade, Requier, Tropeano, Vall et Vendasi.

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

I. - Après l'article L. 46 du code électoral, il est inséré un article L. 46-1-2 ainsi rédigé :

« Art. L. 46-1-2. - Les fonctions de membre du cabinet du Président de la République sont incompatibles avec les fonctions exécutives qui font l'objet des titres III et IV du livre Ier. »

II. - À l'article L. 342 du même code, la référence : « à l'article L. 46 » est remplacée par les références : « aux articles L. 46 à L. 46-1-2 ».

M. Jacques Mézard.  - Jamais deux sans trois... amendements ! Interdisons aux membres du cabinet du président de la République d'exercer un mandat électif local.

N'y voyez aucune attaque ad hominem. Nous allons souvent les voir pour faire avancer des dossiers locaux. Il paraît que certaine commune, gérée par une éminente personne, connait un fort dynamisme.

M. Simon Sutour, rapporteur.  - Favorable.

M. Manuel Valls, ministre.  - Défavorable.

L'amendement n°2 rectifié est adopté et l'article premier D est rétabli.

L'article premier E est adopté.

Le projet de loi, modifié, est adopté.

Prochaine séance aujourd'hui, jeudi 16 janvier 2014, à 15 heures.

La séance est levée à minuit et demi.

Jean-Luc Dealberto

Directeur des comptes rendus analytiques