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Table des matières
Questions prioritaires de constitutionnalité
Accessibilité des personnes handicapées
Défiscalisation en Nouvelle-Calédonie
M. Yves Krattinger, en remplacement de M. André Vallini
Route Centre-Europe Atlantique
Scolarisation des gens du voyage
Ouvriers des parcs et ateliers
Éco-matériaux et filière ouate de cellulose
Certificats d'économie d'énergie
Politique sanitaire et sociale de l'Ugecam d'Alsace
Mme Aurélie Filippetti, ministre de la culture et de la communication
Civilianisation des postes de soutien à la Défense
Mme Aurélie Filippetti, ministre de la culture et de la communication
Scolarisation des enfants handicapés
Mme Aurélie Filippetti, ministre de la culture et de la communication
Hommage à une délégation étrangère
Élection des sénateurs (Suite)
ARTICLES ADDITIONNELS AVANT L'ARTICLE PREMIER
Hommage à une personnalité étrangère
Élection des sénateurs (Suite)
Discussion des articles (Suite)
Mise au point au sujet d'un vote
Discussion des articles (Suite)
SÉANCE
du mardi 18 juin 2013
116e séance de la session ordinaire 2012-2013
présidence de M. Thierry Foucaud,vice-président
Secrétaires : M. Marc Daunis, M. Gérard Le Cam.
La séance est ouverte à 9 h 30.
Le procès-verbal de la précédente séance, constitué par le compte rendu analytique, est adopté sous les réserves d'usage.
Session extraordinaire
M. le président. - M. le président du Sénat a reçu de M. le Premier ministre communication du décret de M. le président de la République en date du 14 juin 2013 portant convocation du Parlement en session extraordinaire à compter du 1er juillet 2013.
Fin de mission temporaire
M. le président. - Par lettre en date du 14 juin 2013, M. le Premier ministre a annoncé la fin de la mission temporaire sur l'ordre public économique et les relations interentreprises, confiée à M. Martial Bourquin, sénateur du Doubs, auprès de M. Pierre Moscovici, ministre de l'économie et des finances, et de M. Arnaud Montebourg, ministre du redressement productif, dans le cadre des dispositions de l'article L.O. 297 du code électoral.
Questions prioritaires de constitutionnalité
M. le président. - M. le président du Conseil constitutionnel a communiqué au Sénat, par courriers en date du 14 juin 2013, quatre décisions du Conseil sur cinq questions prioritaires de constitutionnalité portant sur le quatrième aliéna de l'article 695-46 du code de procédure pénale ; la première phrase du troisième alinéa de l'article 717-3 du code de procédure pénale ; l'article premier de la loi du 5 janvier 2005 relative à la situation des maîtres des établissements d'enseignement privés sous contrat ; les troisième à cinquième alinéas du IV du 1.1 du 1 et du IV du 2.1 du 2 de l'article 78 de la loi du 30 décembre 2009 de finances pour 2010 dans leur rédaction antérieure à la loi du 28 décembre 2011 de finances rectificative pour 2011.
Questions orales
M. le président. - L'ordre du jour appelle vingt questions orales.
Aidants familiaux
M. Michel Boutant . - Les aidants familiaux, qui viennent en aide à une personne âgée ou dépendante de leur entourage à titre non professionnel, vivent une situation difficile en France. Selon le rapport d'activité pour 2011 de la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA), ces aidants, tels que définis à l'article R245-7 du code de l'action sociale et des familles, sont au nombre de 8,3 millions.
Les sacrifices qu'ils consentent sont insuffisamment pris en compte. Prenons le cas d'un couple s'occupant d'un enfant handicapé, qui décède après de nombreuses années de soins. Le couple perd l'Allocation d'éducation de l'enfant handicapé (AEEH) et se trouve dans une situation financière extrêmement difficile. Il apparaît indispensable de garantir à ces aidants acquis professionnels et droit à la formation et, peut-être de prendre en compte, dans le calcul de la retraite, les années passées à s'occuper d'un proche. Comment le Gouvernement entend-il répondre à leur désarroi ?
Mme Dominique Bertinotti, ministre déléguée auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée de la famille . - Le Gouvernement est très sensible à cette question. Une mission a été confiée à la direction générale de la cohésion sociale pour soutenir les aidants familiaux. Le Plan autisme prévoit 350 places d'accueil temporaire pour les enfants autistes. Le président de la République a pris des engagements le 25 janvier dernier pour l'aménagement du temps de travail de ceux qui accompagnent un proche et la création d'un congé spécifique.
Vous faites des propositions supplémentaires que nous étudierons avec soin pour favoriser cette belle idée de solidarité.
M. Michel Boutant. - Merci. Tenir compte du service que ces aidants rendent à la Nation dans le calcul de la retraite et les prendre en compte dans la valorisation des acquis professionnels serait une forme de reconnaissance.
Accessibilité des personnes handicapées
Mme Muguette Dini . - Les normes d'accessibilité aux personnes handicapées, rendues obligatoires à l'article R.111-19-1, sont totalement inadaptées aux maisons d'assistantes maternelles, lesquelles accueillent déjà 8 000 enfants. S'il s'agit d'enfants handicapés, le problème ne se pose pas puisque leur fauteuil roulant ne serait pas plus grand qu'une poussette. Il ne peut s'agir d'une assistante maternelle puisqu'elle ne serait pas agréée. S'il s'agit des parents, il suffit qu'ils puissent accéder à la maison d'assistantes maternelles ; il n'est pas utile de prévoir pour eux une accessibilité à l'intérieur de celle-ci.
Il serait donc justifié de prévoir des exceptions à la règle sur l'accessibilité des handicapés aux établissements accueillant du public. J'avais alerté la ministre en 2012 ; elle m'avait répondu qu'un décret était en cours d'examen au Conseil d'État pour assouplir ces normes. Où en est-on ?
Mme Dominique Bertinotti, ministre déléguée auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée de la famille . - Depuis l'expérimentation en Mayenne, il existe 527 MAM réparties dans 72 départements. Les articles R. 111-7-3, R. 111-19-6 et R. 111-19-10 du code de la construction et de l'habitat prévoient déjà des dérogations pour les cas d'impossibilité technique ou de coût disproportionné. Vous souhaitez qu'un décret harmonise des pratiques hétérogènes entre les départements.
On ne peut pas faire fi des normes d'accessibilité ni entreprendre de simplifier sans garder à l'esprit les conséquences d'une telle mesure sur des établissements analogues comme les micro-crèches. Autant je souhaite une simplification des normes, autant je me soucie des problèmes de jurisprudence qui pourraient se poser. C'est pourquoi j'ai chargé mon administration de mener une réflexion d'ensemble.
Mme Muguette Dini. - J'ai bien entendu que la simplification aurait des répercussions sur d'autres lieux. Pour autant, les maisons d'assistantes maternelles sont dans une situation particulière : une assistante peut choisir de ne plus travailler en équipe et reprendre son activité, seule, chez elle. Elle devra consentir d'importants investissements pour rendre son logement accessible aux adultes handicapés, alors que ce sont des enfants qu'elle accueille.
Dans certains départements, on constate un véritable blocage.
Défiscalisation en Nouvelle-Calédonie
M. Hilarion Vendegou . - Les parlementaires d'outre-mer sont solidaires de l'Hexagone, eu égard à la situation difficile que connaissent tous les Français. Cependant le coup de rabot pour les outre-mer est particulièrement sévère pour notre économie. Nous demandons le maintien de la défiscalisation dans le secteur des travaux publics, si important pour le logement social et l'économie locale. Il faut mettre fin au nomadisme fiscal.
M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué auprès du ministre de l'économie et des finances, chargé du budget . - Le Gouvernement est attaché au développement de tous les territoires de la France en général, et des outre-mer en particulier. Nous connaissons les difficultés de la Nouvelle-Calédonie et ses besoins en matière de logement social.
À la suite de la décision du Conseil constitutionnel sur la loi de finances pour 2013, le Gouvernement a engagé une réflexion pour pérenniser le soutien à l'outre-mer tout en garantissant l'efficacité de chaque euro public dépensé. Nous présenterons cet été un rapport au Parlement.
M. Hilarion Vendegou. - J'entends votre détermination. La Nouvelle-Calédonie ne peut se contenter de promesses, nous serons vigilants.
Pôles de compétitivité
M. Yves Krattinger, en remplacement de M. André Vallini . - Les pôles de compétitivité, qui stimulent l'innovation dans notre pays, sont particulièrement efficaces quand ils portent sur les nouvelles technologies. Ainsi, pour l'Isère, du pôle Minalogic sur les nanotechnologies et du pôle Tennerdis sur les énergies renouvelables.
Un rapport, rendu en juin 2012 à la Direction générale de la compétitivité, de l'industrie et des services et à la Délégation interministérielle à l'aménagement du territoire et à l'attractivité régionale, souligne leur rôle crucial tout en déplorant leur manque d'accompagnement. Comment le Gouvernement compte-t-il accompagner les pôles pour renforcer leur rôle dans l'innovation ?
M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué auprès du ministre de l'économie et des finances, chargé du budget. - La politique des pôles de compétitivité, engagée en 2004 sur le modèle des clusters, a abouti à la formation de 71 pôles, l'engagement de 1 000 projets et la création de 90 start up. Après une évaluation précise en juin 2012, le Gouvernement a décidé de la relancer en maintenant le fonds unique interministériel, en renforçant le rôle de l'État stratège et en mettant l'accent, dans le contrat passé avec les collectivités territoriales et les pôles de compétitivité, sur les retombées économiques. Cette troisième phase témoigne de l'attachement du Gouvernement aux pôles de compétitivité qui font d'ailleurs partie du pacte de croissance.
M. Yves Krattinger. - Je pense que votre réponse va dans le sens souhaité par M. Vallini.
Construction métallique
M. Yves Krattinger . - Les entreprises de construction métallique traversent une période difficile, j'y suis sensible pour être sénateur de Haute-Saône où ce secteur représente plus de 500 emplois. Et, dans le monde rural, chaque emploi compte. Le syndicat de la construction métallique a alerté les pouvoirs publics en novembre 2012 : la crise provoque une baisse des investissements, tandis que ces entreprises sont soumises à une concurrence accrue de nouveaux acteurs européens qui fabriquent à bas coûts, si bien que l'on peut s'attendre à des dépôts de bilan.
Il propose de modifier le régime de l'amortissement applicable aux bâtiments de type industriel et de réaffirmer le principe de l'allotissement dans les marchés publics. Quelle est la position du Gouvernement ? Le secteur emploie plus de 14 000 personnes en France...
M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué auprès du ministre de l'économie et des finances, chargé du budget . - Ce secteur, comme d'autres, connaît une situation extraordinairement difficile. L'article 39-1 du code général des impôts, sur le régime de l'amortissement, ne fait pas obstacle, d'autant que des dérogations sont prévues à l'article L.39 quinquies D du même code. Il n'est pas envisagé de modifier ce dispositif fiscal. Quant à l'allotissement dans les marchés publics, il est réaffirmé clairement dans le guide pratique de l'achat innovant finalisé en juin 2013. Le Gouvernement entend être exemplaire sous le strict contrôle du juge administratif.
M. Yves Krattinger. - La réponse n'est pas simple à apporter. Je prends acte de la bonne volonté du Gouvernement.
CICE
M. André Reichardt . - Le crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (CICE), présenté comme une mesure économique majeure de ce gouvernement, bénéficie à toutes les entreprises à condition toutefois qu'elles versent des salaires. Dans un univers où la concurrence est féroce, les artisans qui travaillent seuls, pour avoir préféré l'indépendance, l'engagement et le risque, en ont aussi besoin. Leur mise à l'écart n'est pas justifiée : ils participent autant que les autres à la production de richesses. Eux aussi seraient soulagés par cette bouffée d'oxygène. Comptez-vous leur étendre le bénéfice du CICE ou, à défaut, prendre des mesures de soutien ?
M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué auprès du ministre de l'économie et des finances, chargé du budget. - Je vous prie d'excuser l'absence du ministre de l'économie, qui rencontre actuellement des chefs d'entreprise. Pour 2013, le CICE équivaut à 4 % de la masse salariale ; il sera porté à 6 % pour 2014.
C'est par construction que le CICE ne bénéficie qu'aux entreprises qui versent des salaires : parce qu'il vise à stimuler la compétitivité des entreprises en diminuant le coût de l'emploi. Il n'y a là aucune injustice, d'autant que ce crédit d'impôt vient financer les efforts en matière de création d'emplois. Enfin, le bénéfice du CICE suppose qu'il soit procédé à un calcul du temps de travail, ce qui est impossible pour des travailleurs indépendants. Pour toutes ces raisons, le Gouvernement n'entend pas revenir sur son assiette.
M. André Reichardt. - Je vous entends. Reste que ces entreprises individuelles, confrontées à d'énormes difficultés, méritent des dispositifs d'aide adaptés. D'autant qu'elles souffrent de la concurrence des autoentrepreneurs. Des mesures d'allègement des charges leur apporteraient un minimum d'oxygène. Conforter ces entreprises souvent jeunes les aiderait à se développer pour, à terme, créer des emplois.
La séance, suspendue à 10 h 15, reprend à 10 h 20.
Finance participative
M. Dominique Bailly . - Le 14 janvier dernier, ont été lancées les assises de l'entreprenariat, à l'occasion desquelles le Gouvernement a annoncé son intention de développer la finance participative. Un groupe de travail a été mis en place. Ce mode de financement, très réglementé en France, apporte des fonds via internet à de très petits entrepreneurs qui peuvent ainsi tester leurs idées.
Quelles sont les préconisations du groupe de travail sur la finance participative, déjà très développée aux États-Unis ?
Mme Fleur Pellerin, ministre déléguée auprès du ministre du redressement productif, chargée des petites et moyennes entreprises, de l'innovation et de l'économie numérique . - La finance participative, qui signe le retour de la finance de proximité et du citoyen dans l'économie locale, vient en complément utile des banques soumises aux nouvelles règles prudentielles de Bâle III et Solvabilité II, au côté du microcrédit solidaire. D'après l'organisation Finance participative France, 5 millions ont été investis dans une trentaine de jeunes entreprises innovantes grâce à ce nouveau mode de financement quand des milliards sont levés ailleurs. D'où notre volonté de supprimer les obstacles à sa croissance, qui sont réglementaires avant d'être fiscaux. Nous envisageons de modifier le code monétaire et financier ainsi que le code du commerce.
Le Gouvernement a bien l'intention d'encourager la finance participative.
M. Dominique Bailly. - Comme vous, je crois à ce mode de financement qui implique nos concitoyens. Grâce à sa souplesse des milliers d'euros sont levés pour alimenter des microprojets qui, à terme, sont créateurs d'emplois.
Route Centre-Europe Atlantique
M. René Beaumont . - Décidément, la Route Centre-Europe Atlantique passionne les élus de Saône-et-Loire : après la question de M. Courtois, de moi-même, puis du nouveau député du Mâconnais, je reviens devant vous, regrettant l'absence du ministre en charge. Il lui a fallu treize mois pour décider unilatéralement que la solution d'une concession autoroutière serait inacceptable ! Le débat est ancien, et aucune interdiction juridique n'a été prononcée. Des compensations existent, qui se traduisent par des gratuités sur certains tronçons. Une étude a été diligentée, dont les conclusions se font toujours attendre. Comment expliquer ce retard ?
Il est urgent de réaliser une deux fois deux voies en Saône-et-Loire, pour éviter les 25 à 35 morts annuelles sur cette voie et faire baisser la densité des poids lourds, qui approche les 50 %. On a bien réalisé une autoroute dans la Nièvre, où l'on voit peu de poids lourds... mais il est vrai que ce n'est pas l'Allier.
Comment trouver les crédits publics nécessaires ? Quand nous présenterez-vous le plan de relance, utopique à mon sens, que vous annoncez ? Ne me dites pas « dans quelques semaines », donnez-moi une date !
Pour conclure, quelques vers de La Fontaine :
« Ne faut-il que délibérer ?
La Cour en conseillers foisonne.
Est-il besoin d'exécuter,
On ne rencontre plus personne ».
M. Guillaume Garot, ministre délégué auprès du ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, chargé de l'agroalimentaire . - Je vous prie d'excuser l'absence du ministre, retenu au salon du Bourget.
Sur l'axe que vous évoquez, se posent de vrais problèmes de sécurité, alors qu'il dessert de nombreux territoires. Aussi le Gouvernement est-il déterminé à le moderniser. Les investissements nécessaires sont évalués à un milliard. Le précédent gouvernement envisageait une mise en concession, ce qui soulevait l'inquiétude des élus locaux inquiets de voir survenir un péage. Les conclusions de l'étude diligentée par le ministre seront très prochainement rendues et une concertation a été engagée sur la question du financement. Le dossier avance. L'objectif est de définir, en partenariat avec les collectivités territoriales, un projet réaliste et donc réalisable. Comptez sur l'engagement du Gouvernement pour faire aboutir ce projet et mettre fin à une situation qui dure depuis trop longtemps.
M. René Beaumont. - Les déclarations du ministre à l'Assemblée nationale ne me satisfont pas, et vous les répétez. Les populations de Saône-et-Loire sont inquiètes à l'idée du péage, pas celles de l'Allier. Peut-être y a-t-il eu quelques agitateurs... J'attends avec impatience des résultats.
Scolarisation des gens du voyage
M. Michel Le Scouarnec . - La refondation de l'école est au coeur de nos récents débats. Tous les enfants n'ont pas été touchés au même degré par les avancées de la loi du 18 décembre 1998 qui n'a pas atteint tous ses objectifs, notamment pour les itinérants. Parallèlement, seuls 52 % des aires d'accueil et 29,9 % des aires de grand passage avaient été réalisés en 2010, d'après la Cour des comptes.
Dans le Morbihan, les communes éprouvent des difficultés telles que le retard est immense. Il faut faire cesser une forme de discrimination inacceptable, pour que les itinérants puissent scolariser en sécurité leurs enfants, et cohabiter en harmonie avec les populations locales. Or, l'école est un fort agent intégrateur. La suppression des postes de Rased n'a pas aidé.
Le droit à l'éducation va de pair avec droit à la santé et au logement. Quand des aires existent, la scolarisation en primaire progresse. Quelles mesures entendez-vous prendre pour favoriser la scolarisation de ces enfants ?
M. Guillaume Garot, ministre délégué auprès du ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, chargé de l'agroalimentaire . - L'obligation de scolarisation dans l'école de la commune d'accueil pour les enfants d'itinérants est un principe républicain, inscrit dans la loi. C'est bien le critère du lieu de résidence qui prévaut, même s'il n'est pas applicable stricto sensu pour les itinérants. Les enfants d'itinérants ne sauraient se voir opposer le refus d'inscription : le préfet, dans un tel cas, peut adresser une injonction au maire. J'ajoute que les familles peuvent prolonger leur séjour sur les aires d'accueil pour besoins scolaires. La loi relative à l'accueil des gens du voyage reste largement inappliquée, c'est pourquoi un travail interministériel est en cours, qui aboutira rapidement.
L'éducation représente, plus que jamais, une priorité de l'action du Gouvernement. Tous les enfants doivent être scolarisés : ce principe républicain n'est pas négociable.
M. Michel Le Scouarnec. - La situation des Roms est parmi les plus préoccupantes. Le Gouvernement ne pourrait-il établir un bilan ? Le règlement relatif aux aires d'accueil ne devrait-il pas évoluer pour favoriser la scolarisation des enfants des gens du voyage ? L'école pour tous suppose que tous les enfants aient le même accès au savoir. L'égalité est indivisible.
Ouvriers des parcs et ateliers
M. Daniel Laurent . - À quand les décrets d'intégration des Ouvriers des parcs et ateliers (OPA) ? Voici trois fois que je pose cette question depuis 2010. L'intégration de ces personnels dans les cadres de la fonction publique territoriale est prévue par la loi du 26 octobre 2009, qui a transféré les parcs de l'équipement aux départements. Les personnels concernés, et les services des départements, sont préoccupés. Le 9 mars dernier, en réponse à une question écrite de M. Lamy, la ministre indiquait que les deux décrets attendus - condition d'intégration et droit à pension - étaient indissociables, donc en suspens, et que la réforme des retraites de 2010 ne devait pas pénaliser les personnels concernés.
M. Pascal Canfin, ministre délégué auprès du ministre des affaires étrangères, chargé du développement . - Je vous prie d'excuser Mme Batho, retenue par un Conseil européen des ministres de l'environnement.
Ce gouvernement a hérité d'une situation qui est restée sans règlement depuis 2009. Le ministre de l'environnement de l'époque avait annoncé la publication des deux décrets pour 2010 : l'engagement n'a pas été tenu. Mme Batho, dès son arrivée au ministère, a pris ce problème à bras-le-corps. Elle a lancé une concertation à l'automne 2012. Parmi les solutions possibles en matière de régime de retraite, la meilleure semble de revoir l'article 11 de la loi de 2009 ; ce sera fait lors du prochain projet de loi de financement de la sécurité sociale.
La publication des deux décrets est prévue avant la fin de cette année. La concertation est en cours sur celui relatif à l'intégration. Un examen des besoins opérationnels des services, pour ce qui est du recrutement, est également engagé. Une révision du décret statutaire de 1965 est prévue. Dans cette attente, 88 OPA ont été recrutés par VNF, la DGAC et Météo France.
M. Daniel Laurent. - C'est en effet une question de justice sociale. Vous annoncez un règlement pour la fin de l'année, je m'en réjouis, tant pour les personnels que pour les collectivités.
Éco-matériaux et filière ouate de cellulose
M. Jean-Luc Fichet . - Le redressement de l'économie française passe aussi par les PME. Quand une entreprise innovante nous alerte, comme c'est le cas de la Société Cellaouate à Morlaix, les élus la prennent au sérieux.
La filière de la ouate de cellulose est capitale pour la réussite du plan de rénovation énergétique des bâtiments ; elle représente un marché de 45 000 tonnes - dont 15 000 sont importées - et 3 à 4 % du marché des isolants.
Les règlements sur l'usage de cette matière sont incohérents. Les sels de bore ont été interdits au profit des sels d'aluminium puis à nouveau autorisés à la suite de signalements de dégagements d'ammoniac sur des chantiers. Pourtant, les ouates contenant à la fois des sels de bore et une proportion minime de sels d'ammonium sont stables et utilisées dans d'autres pays européens ; il ne doit pas y avoir de distorsion de concurrence. Certes, la protection des consommateurs doit prévaloir, mais le système de certification des éco-matériaux doit rester neutre et impartial. Comment le Gouvernement entend-il agir pour résoudre ce problème ?
M. Pascal Canfin, ministre délégué auprès du ministre des affaires étrangères, chargé du développement . - La priorité du Gouvernement va au développement de filières vertes, d'où son souci de les structurer, de les soutenir et de les accompagner pour réussir leur implantation durable sur tout le territoire.
Mais notre devoir est aussi de protéger le consommateur. La directive biocide a interdit, en 2011, l'utilisation du sel de bore. Le sel d'aluminium, alternatif, a donné lieu à 150 signalements. D'où la demande de tests en laboratoire, qui ont montré que, dans tous les cas, des vapeurs d'ammoniaque sont dégagées. Le règlement Reach a permis de revenir à l'utilisation de sels de bore jusqu'à des concentrations de 5,5 %. Un groupe de suivi a été mis en place pour encourager les démarches de substitution aux substances dangereuses et trouver des solutions pérennes.
M. Jean-Luc Fichet. - Merci de ces précisions, mais huit entreprises sont concernées et les consommateurs sont dans le doute. Si rien n'est fait, ces entreprises risquent de fermer. Il peut être long de trouver des substituts.
L'après-mines
M. Dominique Watrin . - La gestion de l'après-mines est une question sensible dans le Nord-Pas-de-Calais, en particulier le captage du grisou, assuré par la Société Gazonor. La loi du 7 décembre 2006 autorise la valorisation du grisou sous forme d'électricité, comme en Allemagne. Pourtant, six ans plus tard, les dispositions réglementaires d'application ne sont toujours pas publiées. Or la perte d'étanchéité progressive des puits rend la situation périlleuse. Ce retard n'est plus admissible, d'autant que l'effort pour la CSPE sera minime et que la valorisation du grisou apportera des recettes à l'État, qui aideront à gérer l'après-mines. Où en est-on ?
M. Pascal Canfin, ministre délégué auprès du ministre des affaires étrangères, chargé du développement . - Ce dossier retient toute l'attention de Mme Batho. La valorisation du grisou par Gazonor n'est plus possible pour l'entreprise, du fait de la détérioration de la qualité du gaz. Mme Batho souhaite que se poursuive l'activité d'exploitation et examine la possibilité technique et financière de mettre en place un tarif de rachat de l'électricité produite.
M. Dominique Watrin. - Votre réponse est satisfaisante, après six ans d'attente... J'espère que l'arrêté sera rapidement pris. Vous connaissez comme moi les séquelles de l'activité minière dans le Nord ; notre territoire a besoin de volontarisme et de raisons d'espérer.
Certificats d'économie d'énergie
M. Roland Courteau . - Mme Batho a récemment annoncé, à l'Assemblée nationale et au Sénat, que le dispositif des Certificats d'économie d'énergie (CEE) serait prolongé dans le cadre d'une période transitoire. Ce dispositif est un succès : les objectifs de la seconde période ont été dépassés sept mois avant terme. Selon quelles modalités se déroulera la période transitoire ? La rénovation de 15 millions de logements et 150 000 à 200 000 emplois sont en jeu. Tout atermoiement serait malvenu : les CEE en pâtiraient, ce qui ralentirait l'effort en faveur des économies d'énergie.
Le taux d'effort des obligés sera-t-il maintenu ? 115 térawattheures Cumac ou 200 ? Pour le fioul domestique, prendrez-vous en compte les demandes des acteurs qui souhaitent que le comité professionnel obligé unique soit facultatif ? Enfin, quelle part de l'objectif pour les carburants ?
M. Pascal Canfin, ministre délégué auprès du ministre des affaires étrangères, chargé du développement . - Les CEE sont un dispositif efficace pour agir dans les secteurs diffus. Mais le dispositif actuel mérite d'être refondu en vue du lancement de la troisième période ; des réformes structurelles le rendront plus efficace, plus simple et mieux ciblé. La concertation est désormais achevée, l'évaluation de ses résultats est en cours. Mme Batho attend aussi les résultats de la mission confiée à CDC Climat sur le financement de l'efficacité énergétique.
L'objectif de la deuxième période est atteint, mais il faut encore monter en puissance. D'où le lancement d'une période intermédiaire, qui doit assurer la continuité avec la troisième période. Le taux d'effort actuel doit être maintenu : les modalités retenues pour la période transitoire seront identiques à celles de la deuxième période : 10 térawattheures Cumac par mois, pour atteindre au moins 200 térawattheures Cumac par an, conformément aux exigences de la directive.
Le comité professionnel du fioul simplifiera, pour la troisième période, le dispositif - c'est une proposition issue de la concertation. Il devra être opérationnel en 2015, sur le fondement d'une adhésion obligatoire.
M. Roland Courteau. - Merci de ces réponses. Les nombreuses sociétés engagées doivent avoir de la visibilité afin de poursuivre leurs efforts. Notre pays en a besoin pour relever le défi de la transition énergétique.
La séance, suspendue à 11 h 15, reprend à 11 h 20.
Réseaux de soins
M. Yves Détraigne . - La proposition de loi, adoptée en première lecture le 28 novembre dernier par l'Assemblée nationale et visant à permettre aux mutuelles de mettre en place des réseaux de soins, reprend un article de la loi Fourcade contre lequel le Sénat s'était élevé. Il s'agissait d'autoriser les mutuelles à mieux rembourser leurs adhérents qui faisaient appel à un membre de leur réseau de soins. Cet article, dont nombre d'amendements au Sénat demandaient la suppression, avait finalement été réintégré en CMP avant d'être censuré par le Conseil constitutionnel. Suite au dépôt de cette proposition de loi, il était prévu que le Haut conseil pour l'avenir de l'assurance maladie engage une réflexion sur ce dossier. Où en est-on ?
Mme Yamina Benguigui, ministre déléguée auprès du ministre des affaires étrangères, chargée de la francophonie . - La priorité est d'assurer l'accès aux soins de tous les Français. Cela suppose de généraliser l'assurance complémentaire, qui prend en charge l'essentiel des dépenses d'optique, de prothèses dentaires et auditives. Les réseaux de soins y contribuent. Le décret relevant le plafond de la CMU a été publié ce matin au Journal officiel, qui ouvre l'accès à la complémentaire à 750 000 de nos concitoyens. Mais les mutuelles doivent être placées dans une situation identique à celles des autres complémentaires : c'est à quoi vise la proposition de loi à laquelle vous faites allusion, qui encadre les réseaux de soins, lesquels devront respecter des principes transparents et non discriminatoires ; la liberté de choix du professionnel de santé par les patients est garantie. Une information complète devra être offerte aux assurés. Les réseaux ne pourront pas conduire à modifier les tarifs des professionnels dont les tarifs sont fixés par la convention ; les réseaux pourront en revanche concerner l'optique et les prothèses dentaires ou auditives. Quant aux travaux du Haut conseil, ils seront rendus publics prochainement.
M. Yves Détraigne. - L'encadrement est bienvenu et la liberté de choix du médecin est préservée. Je m'en réjouis.
Hôpital Beaujon
Mme Brigitte Gonthier-Maurin . - L'hôpital Beaujon n'est pas menacé de fermeture, déclarait Mme Delaunay il y a deux semaines dans cet hémicycle. Mais le fait est que le rapprochement de Beaujon et Bichat, dans la logique mortifère de la loi HPST, est déjà engagé : conseil de surveillance installé, lits supprimés, fermeture de la maternité envisagée.
Personnels, élus et usagers refusent la disparition de Beaujon. Une manifestation est prévue samedi, et une pétition a déjà été signée par 8 000 personnes. Cette mobilisation est parfaitement justifiée. Pour les communes du nord des Hauts-de-Seine, Beaujon assure une offre de soins publique de proximité indispensable - sans compter ses activités spécialisées et ses liens avec l'université Paris VII.
Ces trois missions font de Beaujon un hôpital à part entière ; le projet de regroupement doit être, comme le demandent les élus, abandonné.
Mme Yamina Benguigui, ministre déléguée auprès du ministre des affaires étrangères, chargée de la francophonie . - Ouvert en 1935, l'hôpital Beaujon, de renommée internationale, est emblématique de l'architecture hospitalière d'avant-guerre. Il est confronté à des défis techniques et architecturaux majeurs, de même que l'hôpital Bichat, qui appartient également à l'AP-HP. Les réflexions en sont au stade préliminaire : l'articulation avec les missions universitaires et le rôle de la maternité seront, entre autres, pris en compte. Tous les scénarios seront étudiés, qui incluront un projet de soins de territoire et une stratégie en lien avec l'université. Une concertation approfondie sera menée avec tous les acteurs, dont les collectivités territoriales.
Les transferts du service de cardiologie et d'ORL s'expliquent par la volonté de mieux organiser les soins pour le premier, de constituer un centre de référence pour le second. Les patients de Beaujon continueront de bénéficier d'une offre de soins de proximité.
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. - Nous n'en sommes plus au stade de la réflexion : les deux hôpitaux comptaient 1 400 lits, il en resterait de 800 à 1 000. Sachant que Bichat ne compte que 464 lits, on sait où auront lieu les fermetures... De plus, la notion de service public a disparu du nouveau projet. Au vrai, l'AP-HP veut regrouper ses 37 établissements au sein de douze unités. Bichat et Beaujon doivent rester deux hôpitaux publics à part entière, nous le dirons samedi prochain devant le ministère de la santé.
Politique sanitaire et sociale de l'Ugecam d'Alsace
M. Roland Ries . - Les établissements thermaux de Niederbronn-les-Bains et de Morsbronn-les-Bains, gérés par l'Union pour la gestion des établissements des caisses d'assurance maladie (Ugecam), accueillent des patients à revenus modestes - j'y insiste. Ils emploient 25 titulaires et 42 travailleurs saisonniers. Le conseil de l'Ugecam a voté, en octobre 2012, leur concession à un opérateur privé, après avoir déjà cédé le centre de traumatologie et d'orthopédie de Strasbourg et fermé deux services de court séjour à Lalance et à Saâles, ainsi que les établissements sanitaires de l'Altenberg, de Salem et de Hantz. Ce mouvement traduit un désengagement de l'assurance maladie dans un territoire qui comporte pourtant de nombreux déserts médicaux. Les personnels, qui craignent pour leur emploi, sont inquiets, comme les collectivités territoriales : ces établissements sont souvent les seules perspectives d'emploi dans ces zones rurales.
Mme Yamina Benguigui, ministre déléguée auprès du ministre des affaires étrangères, chargée de la francophonie . - Les deux établissements thermaux de Niederbronn-les-Bains et de Morsbronn-les-Bains sont les seuls en France gérés par l'assurance maladie. L'assurance maladie a fait le choix de les céder à un opérateur mieux averti. Les collectivités et les personnels peuvent être rassurés : le maintien des emplois, le développement de l'activité et la capacité d'investissement sont les conditions de la reprise.
En outre, la pérennité de l'implantation de l'Ugecam en Alsace est assurée ; l'Union a conservé l'intégralité de sa dotation pour développer de nouveaux services de proximité en agglomération, notamment à Strasbourg. Elle est engagée dans une démarche d'amélioration et de développement de l'offre de soins - j'en veux pour preuve la création en 2012 de l'Institut universitaire régional Clémenceau.
M. Roland Ries. - Je serai vigilant sur les conditions faites aux personnels lors de la reprise. En attendant, merci de votre réponse.
Médicaments génériques
M. Philippe Leroy . - Dès l'an dernier, j'interrogeais le Gouvernement sur les conditions de remplacement du médicament prescrit par un générique. Le pharmacien, dont « l'effort de substitution » est évalué par l'assurance maladie, est sanctionné ou récompensé selon ses résultats. En outre, la multiplication des étiquettes et des marques complique l'affaire. La notion de bioéquivalence n'est pas très claire. Il serait bon de faire la transparence sur le business du générique et de garantir une réelle similitude entre générique et princeps - ce qui n'est pas toujours le cas, la substance active et les excipients pouvant varier. Ce serait le seul moyen de conforter la politique d'économies que nous souhaitons tous.
Mme Yamina Benguigui, ministre déléguée auprès du ministre des affaires étrangères, chargée de la francophonie . - Les génériques sont, comme les spécialités, contrôlés par l'Agence nationale du médicament. Aux termes de l'article L. 5121-1 du code de la santé publique, les exigences de sécurité sont strictement identiques pour tous les médicaments, du contrôle qualitatif et quantitatif du principe actif et des excipients jusqu'à l'étiquetage, en passant par les techniques de fabrication et le conditionnement.
Des inspections sont diligentées chaque année. Entre 2007 et 2011, 866 génériques et 199 médicaments princeps ont fait l'objet d'un contrôle de conformité aux spécifications de l'AMM. L'Agence nationale de sécurité du médicament a intitulé son rapport de décembre 2012 Les médicaments génériques, des médicaments à part entière ; elle confirme que la sécurité et l'efficacité des génériques sont assurées.
M. Philippe Leroy. - La question est scientifiquement et économiquement complexe ; elle mérite une analyse plus approfondie. J'irai jusqu?à demander la constitution d'une commission d'enquête...
La séance, suspendue à 11 h 50, reprend à midi.
Manuscrits de Tombouctou
M. Vincent Eblé . - Il était urgent d'intervenir au Mali, le président de la République l'avait compris. À présent, nous devons nous préoccuper de l'avenir de la mosaïque de peuples qui composent le Mali, Bambaras, Bobos, Bozoz, Dogons, Khassonkés, Malinkés, Miniankas, Peuls, Sénoufos, Songhaïs, Soninkés, Toucouleurs.
Demain, ces peuples devront reconstruire la paix, qui passe par une reconnaissance mutuelle de leur identité culturelle. Les patrimoines sont souvent le vecteur de ces identités. Ceux de Tombouctou, carrefour commercial au coeur du Sahara depuis le XIIe siècle et centre prestigieux d'études islamiques au XVe siècle, sont un trésor. De ses manuscrits, témoignages d'un islam tolérant, qui comptent des traités scientifiques, politiques et des oeuvres littéraires de l'Afrique, et dont le nombre est évalué à 200 000, seuls 30 000 sont rassemblés à l'institut Ahmed Baba.
Les exactions des bandits en ont détruit plusieurs milliers. Les réactions ont été à la mesure du drame : l'Unesco, le 28 juin 2012, a classé Tombouctou sur la liste du patrimoine mondial en péril et l'ONU a pris une résolution le 5 juillet 2012. Comment la France peut-elle accompagner les restaurations de manuscrits après une guerre qui a commencé par la négation d'une identité culturelle complexe au Mali ? Que pensez-vous de la mise en place d'un service d'intervention d'urgence sur le patrimoine dans les conflits ?
Mme Aurélie Filippetti, ministre de la culture et de la communication . - À la suite de la conférence du 18 février dernier, l'Unesco a mis en place un plan d'action validé par les autorités maliennes : appui à l'évaluation des destructions, soutien à la conservation et à la valorisation des patrimoines de Tombouctou et de Gao, formation des personnels à la restauration, la numérisation et l'archivage des manuscrits, assistance technique, lutte contre le trafic illicite de biens culturels. La France apporte son soutien aux initiatives de l'Unesco et du Conseil de l'Europe, ainsi qu'aux ONG. Une réunion, qui s'est tenue le 8 juin à Bamako, a fait suite à la mission chargée à Tombouctou de dresser un bilan.
M. Vincent Eblé. - Merci, madame la ministre, pour votre engagement personnel sur ce dossier.
Civilianisation des postes de soutien à la Défense
M. Robert Hue . - Les Livres blancs se succèdent pour adapter notre outil militaire aux réalités du présent dans les meilleures conditions d'économie. Celui de 2008 proposait déjà de confier les postes de soutien à des civils, afin de recentrer les militaires sur leurs fonctions opérationnelles, processus que l'on qualifie de civilianisation. Selon des chiffres probants avancés par certaines organisations syndicales, nous y gagnerions 3 milliards d'euros. L'objectif n'est pas d'opposer civils et militaires, mais de recentrer chacun sur son coeur de métier. Pensez-vous le tenir ?
Mme Aurélie Filippetti, ministre de la culture et de la communication . - M. Le Drian, dont je vous prie d'excuser l'absence, assiste à une cérémonie au Mont Valérien en commémoration de l'appel du 18 juin. Si le taux de civils est resté stable, depuis 2008, à 23 %, l'armée a perdu 40 000 ETP. De plus, l'arrêt de recrutement des ouvriers d'État masque la progression des recrutements civils de 34 % entre 2008 et 2012 et de 30 % pour les cadres de catégorie A.
Malgré tout, des marges de progression demeurent. Dès la fin 2013, des règles d'affectation précises seront définies pour chaque poste - opérationnel, civil ou indifférencié - afin que chacun trouve sa place. Le coût comparé des civils et militaires est très variable selon le statut ou l'employeur.
M. Robert Hue. - Merci de cette réponse que je transmettrai aux syndicats de personnels qui m'ont sollicité. Le diagnostic territorial ne concerne que 3 000 postes, on est encore loin des 100 000 dont parlent certains. Il serait utile de lancer un audit sur les emplois et l'organisation du ministère de la défense. Il faut mieux utiliser cet outil de rationalisation, même si le seul objectif financier ne doit pas prévaloir.
Scolarisation des enfants handicapés
M. Michel Teston . - Faute de moyens suffisants, 6 000 enfants en situation de handicap ne bénéficient que d'une scolarisation partielle et, parfois, sans accompagnement individuel. Les demandes d'accompagnement progressent : + 15 % en Ardèche en quatre ans. Le Gouvernement, prenant la mesure du problème, a créé 1 500 postes supplémentaires d'auxiliaires de vie scolaire (AVS) pour l'aide individuelle et 2 300 postes d'AVS pour l'aide mutualisée ; il a également installé un groupe de travail chargé de faire des propositions quant à la formation de ces personnels.
Comment le Gouvernement compte-t-il donner pleine application à l'article L. 112-1 du code de l'éducation ?
Mme Aurélie Filippetti, ministre de la culture et de la communication . - M. Peillon, parti aujourd'hui pour l'Algérie, est très attaché à ce que l'école soit le lieu d'épanouissement de tous les élèves, y compris et surtout pour les enfants en situation de handicap.
Le gouvernement précédent n'avait pas tenu ses engagements ni les objectifs de la loi du 11 février 2005. De là les mesures d'urgence prises à la rentrée 2012 ; 1 500 postes supplémentaires d'AVS destinés à l'accompagnement individuel et 2 300 postes pour l'aide mutualisée ont été créés. L'effort sera poursuivi et même accru pendant le quinquennat.
Pour cela il faut du temps et des moyens. Un groupe de travail sur la professionnalisation du métier d'AVS a été installé en octobre. Les enseignants eux-mêmes doivent être mieux formés - les ESPE y pourvoiront. Il faut dans le même temps mieux adapter l'école aux différentes formes de handicap, ce qui impose de dialoguer avec tous les acteurs.
Dans le projet de loi pour la refondation de l'école, dont votre assemblée sera bientôt saisie en deuxième lecture, il est écrit « l'école veille à l'inclusion scolaire de tous les enfants ». N'y voyez pas une déclaration de principe, c'est le signe de la détermination du Gouvernement.
M. Michel Teston. - Le Gouvernement a consenti d'importants efforts financiers, que vous avez rappelés. Nous attendons désormais les conclusions du groupe de travail qui, je l'espère, seront publiées rapidement. La scolarisation des enfants en situation de handicap est l'affaire de la solidarité nationale.
La séance est suspendue à midi quinze.
présidence de M. Jean-Claude Carle,vice-président
La séance reprend à 14 h 30.
Hommage à une délégation étrangère
M. le président. - (Mmes et MM. les sénateurs se lèvent) Il m'est particulièrement agréable de saluer la présence, dans notre tribune d'honneur, d'une délégation de députés de la XIIe Assemblée nationale populaire de la République populaire de Chine conduite par M. Chi Wanshun, membre du comité permanent de l'Assemblée nationale populaire, vice-président de la commission des affaires étrangères et président du groupe d'amitié Chine-France.
Notre groupe d'amitié France-Chine, animé par notre collègue Jean Besson, reçoit cette délégation aujourd'hui et demain au Sénat. La délégation est en France depuis lundi. Cette visite se déroule à Paris puis dans le sud-est de la France autour des thèmes de la coopération entre les PME et l'urbanisation.
Elle s'achève vendredi prochain.
Chers collègues chinois, nous vous souhaitons la plus cordiale bienvenue au Sénat français. (Applaudissements)
Élection des sénateurs (Suite)
M. le président. - L'ordre du jour appelle la suite du projet de loi relatif à l'élection des sénateurs. Nous abordons la discussion des articles.
Discussion des articles
ARTICLES ADDITIONNELS AVANT L'ARTICLE PREMIER
L'amendement n°8 rectifié ter n'est pas défendu.
M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois. - Je supplée notre rapporteur. La commission des lois avait donné un avis favorable à cet amendement : je le reprends.
M. le président. - Ce sera l'amendement n°61
Amendement n°61, présenté par M. Sueur, au nom de la commission.
Avant l'article 1er
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le premier alinéa de l'article L. 280 du code électoral est remplacé par deux alinéas ainsi rédigés :
« La composition du collège électoral appelé à élire les sénateurs assure, dans chaque département, la représentation des différentes catégories de collectivités territoriales et de la diversité des communes, en tenant compte de la population qui y réside.
« Ce collège électoral est composé : »
M. le président. - Amendement n°57 rectifié, présenté par MM. de Montgolfier, Billard et Cornu.
Avant l'article 1er
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le premier alinéa de l'article L. 280 du code électoral est remplacé par deux alinéas ainsi rédigés :
« La composition du collège électoral appelé à élire les sénatrices et les sénateurs reflète la population et les territoires qui composent le département.
« Ce collège électoral est composé : »
M. Albéric de Montgolfier. - Cet amendement tend à rappeler, conformément à l'article 24 de la Constitution, que le collège qui élit les sénateurs doit assurer la représentation des collectivités territoriales. On ne peut s'en tenir à un critère purement démographique.
M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois. - Cet amendement est très proche de celui que la commission vient de reprendre. Son auteur ne pourrait-il pas le rectifier, pour le rendre identique ?
M. Albéric de Montgolfier. - Dans ce cas, je me rallie à l'amendement de la commission.
M. Manuel Valls, ministre de l'intérieur. - Devant un tel consensus, le Gouvernement ne peut que s'incliner : avis favorable.
M. Gérard Cornu. - M. de Montgolfier a bien fait de se rallier, démontrant par là le consensus qui nous rassemble, au Sénat, véritable défenseur des territoires.
M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois. - Espérons que le consensus durera.
M. Christian Favier. - On ne peut opposer représentation des territoires et des populations. Je crains, en outre, que l'amendement ne bloque les évolutions futures nécessaires pour tenir compte des variations de la population. Nous nous abstiendrons.
M. René-Paul Savary. - Si l'on ne prend que le critère de la population, on va au devant de problèmes avec les grands cantons à venir. J'espère que vous aurez le souci, monsieur le ministre, de procéder à un découpage équitable et tenant compte des territoires. Il existe une carte de l'intercommunalité, respectons-la.
M. Christian Cointat. - Je préfère la rédaction de M. Mézard. Il y a au Sénat des représentants des Français établis hors de France qui ne sont pas attachés à un département.
M. Albéric de Montgolfier. - J'ai rectifié mon amendement.
Les amendements identiques nos61 et 57 rectifié bis sont adoptés, et deviennent un article additionnel.
M. le président. - Amendement n°27, présenté par M. Gorce.
Avant l'article 1er :
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le 1° de l'article L. 280 du code électoral est abrogé.
M. Gaëtan Gorce. - Défendu.
M. le président. - Amendement n°40 rectifié, présenté par MM. Cornu, de Montgolfier et Billard.
Avant l'article 1er
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le 1° de l'article L. 280 du code électoral est complété par les mots : « et des sénateurs ».
M. Gérard Cornu. - La discussion commune des amendements nos27 et 40 rectifié me gêne : si l'amendement de M. Gorce était adopté, le mien tomberait. Or M. Gorce veut rayer les députés du nombre des grands électeurs, quand je veux y ajouter les sénateurs. C'est pour moi la moindre des choses, dès lors que l'on ne pourra plus cumuler mandat local et mandat national. Si l'amendement de M. Gorce était adopté, je proposerai une rectification de mon amendement pour ne pas viser le même alinéa.
M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois. - La commission des lois a émis un avis défavorable à l'amendement n°27 que M. Gorce a défendu avec une grande économie de moyens. Les députés élisent les sénateurs depuis 1875, et, vu nos bonnes relations, nous n'entendons pas nous brouiller avec eux... (Sourires)
Certains ont une conception très restrictive de l'article 24 de la Constitution. Notre bicamérisme donne aux deux chambres vocation à légiférer sur tous les textes. Que les députés aient leur mot à dire dans l'élection des sénateurs n'est donc pas choquant.
La commission, en revanche, a émis un avis favorable à l'amendement de M. Cornu. Les sénateurs, au moment du vote, sont encore sénateurs : il est logique qu'ils puissent voter au même titre que les députés. Voilà notre argumentation ...
M. Pierre-Yves Collombat. - Un peu sophistiquée !
M. Manuel Valls, ministre. - Le Gouvernement est également défavorable à l'amendement de M. Gorce, pour les mêmes raisons que votre commission.
Si la loi relative au cumul des mandats est adoptée, les sénateurs pourront, comme les députés, conserver un mandat local, qui leur permettra de participer à l'élection sénatoriale : le Gouvernement est donc défavorable à l'amendement de M. Cornu.
M. Jean-Pierre Michel. - Le groupe socialiste, dans sa grande majorité, suivra la commission. Il n'y a pas de raisons de faire de l'élection sénatoriale une exception, sachant que nous participons à toutes les élections. J'ajoute que les sénateurs sont élus par un territoire : ils doivent pouvoir voter à ce titre.
M. Pierre-Yves Collombat. - Je suis de ceux qui croient qu'il ne faut toucher aux modes de scrutin qu'avec une main tremblante : je ne voterai aucun de ces amendements.
M. Albéric de Montgolfier. - Ce serait, en effet, la seule élection où un candidat ne pourrait pas voter. L'amendement que j'ai cosigné avec M. Cornu répare donc une anomalie.
Mme Nathalie Goulet. - Sénatrice sans mandat local, je ne peux pas voter aux élections sénatoriales. Je soutiendrai donc l'amendement de M. Cornu.
M. Jean-Pierre Michel. - Nous sommes d'accord.
M. Hervé Maurey. - L'Histoire doit-elle guider le droit, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission ? Faut-il donc revenir au temps où chaque collectivité territoriale avait un grand électeur ? (M. le ministre s'exclame) Je voterai contre l'amendement de M. Gorce, et pour celui de M. Cornu, car tous les conseillers municipaux ne sont pas grands électeurs.
M. Gérard Cornu. - Comme le président Sueur, je considère que les députés doivent participer aux sénatoriales. Je ne voterai donc pas l'amendement Gorce et ne changerai rien à mon amendement. Il y a des communes rurales où tous les conseillers municipaux ne sont pas grands électeurs...
M. Alain Richard. - La référence historique n'est pas forcément pertinente car une tradition peut être changée. Mais en 1871, dans l'Assemblée où régnait une grande incertitude constitutionnelle, l'existence du Sénat était une exigence des royalistes. Les républicains, sous l'impulsion de Gambetta, se sont ralliés à l'idée, pour peu que l'élection sénatoriale se fasse selon des garanties démocratiques, avec en particulier la participation des députés.
M. Manuel Valls, ministre. - J'ai été l'élu d'une circonscription qui comptait nombre de communes rurales. Je n'ai pas de leçons à recevoir sur la ruralité. Je vous renvoie à votre vote de naguère sur les conseillers départementaux, avec des justifications, que n'a pas retenues le Conseil constitutionnel. En revanche, au vu des arguments développés avec talent par Mme Goulet, le Gouvernement donne un avis de sagesse.
L'amendement n°27 n'est pas adopté.
L'amendement n°40 rectifié est adopté et devient un article additionnel.
M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois. - Je présente par conséquent un amendement de coordination rédactionnelle.
M. le président. - Amendement n°62, présenté par M. Sueur, au nom de la commission.
Avant l'article1er
Ajouter un article additionnel ainsi rédigé :
A la première phrase de l'article L. 281 du code électoral, après le mot : "députés,", sont insérés les mots : "les sénateurs,".
M. Manuel Valls, ministre. - Favorable.
L'amendement de coordination n°62 est adopté.
M. Charles Revet. - Belle unanimité !
M. le président. - Amendement n°7 rectifié, présenté par MM. Bertrand, Mézard, Baylet, C. Bourquin, Collin et Fortassin, Mme Laborde et MM. Mazars, Plancade, Requier, Tropeano, Vall et Vendasi.
Avant l'article 1er
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le code électoral est ainsi modifié :
1° Les deux dernières phrases de l'article L. 281 sont supprimées ;
2° Après l'article L. 281, il est inséré un article L. 281-... ainsi rédigé :
« Art. L. 281-... - En cas d'empêchement majeur, les membres du collège électoral sénatorial peuvent exercer, sur leur demande écrite, leur droit de vote par procuration. Le mandataire doit être membre du collège électoral et ne peut disposer de plus d'une procuration. »
M. Jean-Claude Requier. - Cet amendement étend le vote par procuration aux délégués des conseils municipaux, dans les mêmes conditions que pour les autres électeurs. Les dispositions actuelles ont conduit le Conseil constitutionnel à annuler les scrutins en Lozère en 2011 et en Haute-Saône en 2012.
M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois. - La commission a émis un avis favorable à cette disposition opportune. Toutefois, elle insiste sur le fait que l'empêchement doit être majeur, et non de simple confort.
M. Manuel Valls, ministre. - Votre amendement entraînerait la suppression des suppléants, que vous proposez par un autre amendement. Ce qui soulève certaines difficultés : en cas de décès, de démission, de perte des droits civiques, le délégué ne pourrait être remplacé. De même en cas d'annulation d'élections. C'est pourquoi je suis défavorable à cet amendement.
M. Albéric de Montgolfier. - Je ne voterai pas l'amendement. Le vote est obligatoire, faut-il le rappeler ! Cela assure un taux de participation très élevé, qui fait rêver nombre de démocraties.
M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois. - C'est pourquoi nous insistions sur le caractère majeur de l'empêchement.
M. Jean-Jacques Hyest. - Le vote est obligatoire, en effet. Être grand électeur est un engagement. En cas de problème, on peut compter sur son suppléant. Les seuls cas d'empêchement majeur, dites-vous ? Mais comment les apprécier ? Ne banalisons pas ce vote solennel. Je ne voterai pas l'amendement.
M. Gérard Cornu. - Et moi de même. L'élection des sénateurs représente un moment important. Le président Sueur a parlé d'empêchement majeur ; mais on risque des contestations sans fin. Restons-en au statu quo.
M. François Rebsamen. - Le vote obligatoire fait la spécificité de l'élection sénatoriale. Je comprends les réserves posées par le président Sueur...
M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois. - Comme rapporteur !
M. François Rebsamen. - ... mais cela ne me satisfait pas. Mon groupe ne votera pas cet amendement.
M. François Zocchetto. - Le vote aux élections sénatoriales est très personnel : l'électeur se décide intuitu personae. Tout ce qui peut encourager la participation physique du grand électeur doit l'être : je ne voterai pas l'amendement.
M. Jacques Mézard. - Je comprends les raisons de M. Bertrand, en raison des problèmes qu'il a rencontrés aux élections de 2011. Mais je suis sensible aux arguments qui ont été échangés et retire l'amendement.
L'amendement n°7 rectifié est retiré.
M. le président. - Amendement n°26, présenté par M. Gorce.
Avant l'article 1er
Insérer un nouvel article ainsi rédigé :
Le 4° de l'article L. 280 du code électoral est ainsi rédigé :
4° Des délégués sénatoriaux élus en même temps que les conseillers municipaux dans les conditions fixées à l'article L. 284. »
M. Gaëtan Gorce. - Membre récent du Sénat, je suis surpris de constater que la représentativité de l'institution soit construite sur une base si étroite et si archaïque (Protestations à droite)
M. Christian Cambon. - Pourquoi archaïque ?
M. Gaëtan Gorce. - Les citoyens ne sont pas suffisamment associés. On ne peut tout à la fois refuser d'exclure les députés et d'élargir la base électorale, ainsi que je le propose ici.
M. Christian Cambon. - Que n'êtes-vous resté à l'Assemblée nationale !
L'amendement n°6 rectifié n'est pas défendu.
M. le président. - Amendement n°13 rectifié ter, présenté par M. Détraigne, Mmes Férat, Morin-Desailly et Goy-Chavent et MM. J.L. Dupont, Deneux, Bockel, Capo-Canellas, Tandonnet, Amoudry, Maurey, J. Boyer, Guerriau, Jarlier et Mercier.
Avant l'article 1er
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le quatrième alinéa de l'article L. 288 du code électoral est supprimé.
M. Yves Détraigne. - Dans un certain nombre de cas, ce n'est pas le premier suppléant dans l'ordre du tableau qui est allé voter à la place du titulaire. Je propose donc que l'on supprime l'ordre imposé.
M. le président. - Amendement n°20 rectifié bis, présenté par Mmes Cohen et Gonthier-Maurin.
Avant l'article 1er
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le premier alinéa de l'article L. 289 du code électoral est complété par deux phrases ainsi rédigées :
« Sur chacune des listes, l'écart entre le nombre de candidats et de suppléants de chaque sexe ne peut être supérieur à un. Chaque liste est composée alternativement d'un candidat de chaque sexe et d'un suppléant de chaque sexe. »
Mme Laurence Cohen, rapporteure de la délégation aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes. - Rien dans ce projet ne favorise la parité !
Le présent amendement, qui apporte une traduction législative à la recommandation n°7 de la Délégation aux droits des femmes, remédie à cette lacune pour garantir une représentation plus équilibrée des femmes et des hommes au sein du collège sénatorial. Cela aidera peut-être à faire élire plus de sénatrices et dissuadera de déposer des listes dissidentes pour contourner la parité.
M. Philippe Kaltenbach, rapporteur de la commission des lois. - L'amendement de M. Gorce révolutionnerait le système de désignation d'une partie des grands électeurs et pourrait être sanctionné par le Conseil constitutionnel. Défavorable.
M. Gaëtan Gorce. - Le changement, c'est pour quand ?
M. Philippe Kaltenbach, rapporteur. - L'amendement de M. Détraigne vise à supprimer une règle certes contraignante, qui peut poser des difficultés pratiques, mais reviendrait à donner au maire la faculté de choisir le suppléant qui lui convient le mieux.
Quant à l'amendement n°20 rectifié bis, il soulève une objection constitutionnelle : l'article premier de la Constitution, étant une dérogation au principe d'égalité, est d'interprétation stricte - et une objection d'ordre pratique : la règle pourrait être contournée par le jeu des candidatures isolées.
M. Manuel Valls, ministre. - Le Gouvernement a plusieurs objections à l'amendement n°26 : le Sénat assure la représentation des collectivités locales ; ...
M. Jacques Mézard. - Très bien ! (M. Charles Revet renchérit)
M. Manuel Valls, ministre. - ... il n'est donc pas nécessaire que les membres du collège soient élus au suffrage universel direct. (M. Jacques Mézard approuve) Cet amendement, comme l'amendement n°30, prévoit des modalités pratiques qui soulèvent des difficultés au regard de la loi de mai 2013, laquelle institue déjà une double liste, de conseillers municipaux et communautaires : on en viendrait à une triple liste, au risque de perdre en lisibilité.
Même avis défavorable que la commission sur l'amendement de M. Détraigne.
Le Gouvernement, enfin, est favorable à l'amendement n°20 rectifié bis sous réserve de l'adoption d'un sous-amendement du Gouvernement. Dès 2014, les communes devront présenter des listes paritaires pour l'élection des conseillers municipaux et communautaires. Votre amendement se justifie donc mais il faut tenir compte des prescriptions du code électoral.
M. Gaëtan Gorce. - Je connais le sort réservé à mon amendement. Mais on ne peut admettre que le Sénat intervienne dans d'autres domaines que les collectivités, par exemple sur les libertés individuelles, et refuser d'élargir la participation des citoyens. Je sais que le Sénat ne fera pas cette révolution, mais qu'il engage au moins la réflexion, pour éviter d'encourir à nouveau les critiques de naguère.
M. Christian Cointat. - Il faut être cohérent. Il y a peu, vous avez tous voté à l'unanimité l'élection des représentants des Français de l'étranger par les citoyens, directement. Il y a donc un précédent.
M. Pierre-Yves Collombat. - Il n'y a pas de collectivités !
M. Christian Cointat. - Le Conseil constitutionnel estime qu'il ne doit pas y avoir plus de délégués non élus que de représentants élus. Voyez ce qui se passe à Paris ! M. Gorce a donc raison : il faut réfléchir à la question, sans tabou. Les collectivités territoriales ne sont pas des bouts de papier, elles sont constituées d'hommes et de femmes. Il serait utile d'engager la réflexion, ainsi que nous y appelle M. Gorce. Sa demande n'est pas anormale mais prématurée.
M. Philippe Bas. - On n'est pas là dans une querelle des anciens et des modernes, des archaïques et des réformateurs. Il n'y a pas de corps électoral mais un collège électoral. Les grands électeurs n'ont pas le droit de vote mais l'obligation de voter : ils remplissent un devoir, en élisant les sénateurs au suffrage universel, à travers les élus des collectivités territoriales. Cette fonction est remplie par des personnalités qui ont l'expérience de la gestion locale publique, ce qui leur donne leur légitimité. Seuls les membres des assemblées élus doivent faire partie de ce collège, sauf exception - mais veillons à ne pas élargir les exceptions. L'amendement de M. Gorce n'est pas moderne : il tourne le dos au sens profond de notre institution. Je voterai contre.
M. Gérard Cornu. - Moi de même, et j'approuve les explications de M. le ministre. Les élections doivent rester simples : ajouter des strates, c'est décourager l'électeur. Un mode de scrutin archaïque ? Ce propos, monsieur Gorce, est déplaisant. Que n'êtes-vous resté à l'Assemblée nationale ? Moi aussi j'ai été député, et j'estime, comme sénateur, que le travail de la Haute assemblée est complémentaire, il est différent, il est moins exposé aux entraînements et aux effets de mode, il a plus de profondeur dans la réflexion.
M. Gaëtan Gorce. - Vous n'en donnez pas l'exemple !
M. Gérard Cornu. - Nous sommes des élus locaux, qui savent de quoi ils parlent.
Les deux assemblées sont complémentaires, le mode de scrutin du Sénat n'a rien d'archaïque.
M. Pierre-Yves Collombat. - Trois points. Certains archaïsmes valent bien des évolutions dont on se passerait volontiers. Tous les lendemains ne chantent pas...
Quel est l'intérêt du Sénat, au juste ? Son mode de scrutin le met plus à l'abri des émotions médiatiques que l'autre chambre.
M. Yannick Vaugrenard. - Quoique...
M. Pierre-Yves Collombat. - L'exemple de la Grande-Bretagne le montre : il n'est pas rare que la Chambre des Lords prenne des positions plus progressistes que les Communes. Si d'aventure le Sénat était élu selon des modalités comparables à l'Assemblée nationale, à quoi bon une deuxième chambre ?
Enfin, le Sénat représente des collectivités et non des individus. Une collectivité, cela a une réalité sociale, affective et politique. Avec M. Gélard, nous sommes allés voir ce qui se faisait à l'étranger. Nous en avons conclu que, comme le disait Talleyrand, lorsque l'on se regarde, on s'interroge, mais quand on se compare, on se rassure. (Applaudissements)
M. René-Paul Savary. - Notre mode de scrutin garantit la représentation de la ruralité ; le renouvellement par moitié assure une certaine permanence. Raison pour laquelle je voterai contre l'amendement n°26 et l'abaissement du seuil de la proportionnelle.
M. Albéric de Montgolfier. - Les comparaisons internationales montrent qu'il n'y a pas lieu de remettre en cause la légitimité de notre mode d'élection. Nous sommes élus principalement par les délégués des conseils municipaux, or les élections municipales sont celles pour lesquelles l'abstention est la plus faible. Je voterai contre l'amendement.
M. Jean Louis Masson. - Le Gouvernement se montre modéré. C'est heureux, même si je suis surpris que des membres de la majorité fassent des propositions aussi radicales et extravagantes quand on connaît la réalité sénatoriale.
M. Jean-Pierre Michel. - Nous discutons du mode de notre élection. Restons calmes. M. Gorce n'a pas critiqué le Sénat, au contraire ; il veut en renforcer la légitimité, voilà tout. M. Cointat a dit à juste titre que le mode actuel d'élection des sénateurs posait problème. Cela appelle la réflexion, pas l'invective. Cela dit, je ne voterai pas non plus l'amendement Gorce.
L'amendement n°26 n'est pas adopté, non plus que l'amendement n°13 rectifié ter.
M. le président. - Que pense la commission du sous-amendement n°63 du Gouvernement à l'amendement n°20 rectifié bis ?
M. Philippe Kaltenbach, rapporteur. - À titre personnel, favorable.
Le sous-amendement n°63 est adopté.
L'amendement n°20 rectifié bis, modifié, est adopté et devient un article additionnel.
L'amendement n°28 n'a plus d'objet, tout comme l'amendement n°29.
M. le président. - Amendement n°41 rectifié, présenté par MM. Cornu, de Montgolfier et Billard.
Avant l'article 1er
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article L. 282 du code électoral est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa, après le mot : « député, », il est inséré le mot : « sénateur, » ;
2° Au second alinéa, après le mot : « député », sont insérés les mots : « ou sénateur ».
M. Gérard Cornu. - Amendement de conséquence.
L'amendement n°41 rectifié, accepté par la commission et le Gouvernement, est adopté et devient un article additionnel.
M. le président. - Amendement n°11 rectifié ter, présenté par M. Détraigne, Mmes Férat, Morin-Desailly et Goy-Chavent et MM. J.L. Dupont, Merceron, Deneux, Bockel, Capo-Canellas, Tandonnet, Amoudry, Maurey, J. Boyer, Guené, Jarlier, Mercier et Dubois.
Avant l'article 1er
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
À la première phrase de l'article L. 283 du code électoral, les mots : « le jour auquel » sont remplacés par les mots : « la semaine au cours de laquelle ».
M. Yves Détraigne. - Pourquoi vouloir à toute force imposer la même date à tous les conseils municipaux ? Laissons une semaine. Cela apporterait de la souplesse.
M. le président. - Sous-amendement n°60 à l'amendement n°11 rectifié ter de M. Détraigne, présenté par Mme Lipietz.
Amendement n°11 rect. ter, alinéa 3
Remplacer les mots :
la semaine au cours de laquelle
par les mots :
les trois jours au cours desquels
Mme Hélène Lipietz. - Une semaine, c'est peut-être trop. Je propose un compromis.
M. Philippe Kaltenbach, rapporteur. - Cette souplesse pourrait favoriser les manoeuvres. Défavorable à l'amendement comme au sous-amendement.
M. Christophe Béchu. - Entendre parler de manipulation au motif que la désignation des délégués s'étalerait sur plusieurs jours me choque. Si l'on craint des manoeuvres, ce n'est pas seulement la date qu'il faut fixer, mais l'heure !
M. Marc Daunis. - C'est irréaliste !
M. Christophe Béchu. - Est-ce digne d'une assemblée qui clame sa confiance dans l'intelligence des territoires ? Cela frise l'hérésie... Laissons un peu de souplesse, alors que le président de la République appelle à un choc de simplification.
M. Patrice Gélard. - Je suis en total désaccord avec M. Béchu. Il est de tradition républicaine de procéder à cette désignation le dimanche à 10 heures. (On le conteste sur divers bancs)
M. Francis Delattre. - C'est la messe ! (Sourires)
M. Patrice Gélard. - Cela donne de la solennité à ce moment. Si l'on change cela, ce ne sont pas tant des manipulations internes qu'il faut craindre, que celles de la presse, qui jouera au jeu des pronostics.
Mme Nathalie Goulet. - La manipulation, je n'y crois pas dans les communes rurales : on n'y a pas l'habitude que les gens déclinent leurs opinions politiques. En revanche, je connais les difficultés des préfectures à collationner les données. Je ne voterai pas cet amendement.
M. Gérard Cornu. - Les arguments de M. Béchu sont excellents. Monsieur Gélard, les réunions des conseils municipaux ont actuellement lieu le même jour, non à la même heure. Laissons un peu de souplesse...
M. Francis Delattre. - ... et luttons contre les archaïsmes.
M. René-Paul Savary. - Franchement, votons cet amendement qui remonte du terrain. M. Détraigne le sait bien, lui qui est élu de la Marne comme moi. Les manipulations de la dernière heure échouent toujours.
M. Jean Louis Masson. - L'argument des pressions ne tient pas. En revanche, nous sommes tous confrontés au problème de l'accès aux listes de grands électeurs. Si l'on étale la procédure sur plusieurs jours, ce sera le bazar. Mettons-nous à la place des préfectures ! Si nous compliquons leur travail, nous n'aurons plus notre mot à dire quand nous trouvons à les critiquer.
M. Christian Cointat. - Soyons cohérents. Qu'on le veuille ou non, les premiers résultats connus donnent la température politique du scrutin. Raison d'ailleurs pour laquelle nous avons prévu que les élections en Polynésie française auraient lieu le samedi afin que les électeurs n'y soient pas influencés par les résultats de l'Hexagone. La cohérence républicaine, c'est même jour, même heure.
Le sous-amendement n°60 n'est pas adopté, non plus que l'amendement n°11 rectifié ter.
L'amendement n°30 n'est pas défendu.
M. le président. - Amendement n°58, présenté par M. Favier et les membres du groupe CRC.
Avant l'article 1er
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Les premier à sixième alinéas de l'article L. 284 du code électoral sont remplacés par un alinéa ainsi rédigé :
« Les conseils municipaux élisent un nombre de délégués déterminé en fonction de la population des communes à raison d'un délégué pour 500 habitants ou une fraction de ce nombre. »
M. Christian Favier. - En 1999, le gouvernement Jospin avait proposé qu'il y ait un électeur par tranche de 500 habitants ; au cours de la navette, on était descendu à 300. C'est cela que le Conseil constitutionnel avait censuré le 6 juillet 2000. Cet amendement-ci est donc acceptable par le Conseil.
M. le président. - Amendement n°31 rectifié, présenté par Mme Klès.
Avant l'article 1er
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article L. 284 du code électoral est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa, le nombre : « 9 000 » est remplacé par le nombre : « 10 000 » ;
2° Au sixième alinéa, les mots : « et vingt-neuf » sont supprimés ;
3° Après le sixième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« - vingt-cinq délégués pour les conseils municipaux de vingt-neuf membres. »
Mme Virginie Klès. - Sans prétendre résoudre tous les problèmes, je demande la suppression de la tranche artificielle de 9 000 à 9 999 habitants, qui n'existe pas dans le code général des collectivités territoriales. Cela ne perturberait pas la logique voulue par le législateur.
M. Philippe Kaltenbach, rapporteur. - Retrait de l'amendement n°58 au nom de la décision du Conseil constitutionnel de 2000 : les grands électeurs non élus ne doivent pas dépasser la moitié du collège dans un département, sauf à Paris. Défavorable à l'amendement n°31 rectifié ter qui n'a pas été corrigé dans le sens demandé.
M. Manuel Valls, ministre. - L'amendement n°58 réduirait fortement la représentation des petites communes : leur nombre de délégués serait divisé par trois. Ne multiplions pas les strates : rejet de l'amendement n°31 rectifié ter.
M. Alain Richard. - Le Conseil constitutionnel a évoqué un correctif démographique. Or quand on regarde le tableau, le problème saute aux yeux : les communes de 3 501 habitants ont quinze délégués contre sept dans les communes de 3 500 habitants. Même effet de seuil, mais inverse, à partir de 9 001 habitants. Il faudra mieux articuler correctif démographique et représentation des territoires au sein du collège. Ce problème, justement soulevé par Mme Klès, doit être examiné au cours de la navette.
M. Richard Tuheiava. - Mme Klès propose de supprimer une strate, non d'en créer une. Je soutiens son amendement car beaucoup de communes de Polynésie, comme d'ailleurs de Nouvelle-Calédonie, sont concernées.
Mme Virginie Klès. - Je suis dubitative : je propose de supprimer une strate, M. Richard semble préconiser d'en créer d'autres... Je maintiens mon amendement pour lancer la réflexion.
M. Éric Doligé. - La réflexion de M. Richard est intéressante : un tel rééquilibrage apporterait de la vigueur au monde rural. Ce n'est certainement pas le but de ce nouveau texte ruralicide. Le Sénat représente tous les territoires, par seulement les grandes communes.
M. Manuel Valls, ministre. - L'amendement de Mme Klès poserait peut-être des problèmes au monde rural, étudions-le de près comme le suggère M. Richard pour corriger ces effets de seuil. En attendant, mieux vaut le retirer pour ne pas rompre les équilibres auxquels vous êtes tous ici attachés.
Mme Virginie Klès. - Devant cet engagement du ministre, je m'incline.
L'amendement n°31rectifié est retiré.
L'amendement n°58 n'est pas adopté.
M. le président. - Amendement n°42 rectifié ter, présenté par MM. Cornu, de Montgolfier et Billard.
Avant l'article 1er
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article L. 287 du code électoral est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa, après le mot : « députés, » sont insérés les mots : « les sénateurs, » ;
2° Au second alinéa, après le mot : « député, » sont insérés les mots : « un sénateur, ».
M. Albéric de Montgolfier. - Amendement de conséquence, peut-être satisfait par l'amendement de la commission présenté tout à l'heure.
M. Philippe Kaltenbach, rapporteur. - Favorable.
M. Manuel Valls, ministre. - Sagesse.
L'amendement n°42 rectifié ter est adopté et devient un article additionnel.
ARTICLE PREMIER
M. Jean Louis Masson . - Autant je suis favorable à l'article 2, autant je suis hostile à un procédé qui, après le redécoupage des cantons, donnerait encore plus de poids aux villes. Le Sénat doit rester le défenseur des territoires.
M. le président. - Amendement n°2, présenté par M. J.C. Gaudin et les membres du groupe UMP.
Supprimer cet article.
M. Albéric de Montgolfier. - Nous en arrivons à l'essentiel : cet article diminuerait le poids de la ruralité. Supprimons-le d'autant que le nombre de cantons a été divisé par deux. Sur la forme, les élections sénatoriales auront lieu en septembre 2014, il n'est pas de tradition de procéder à de tels changements dans l'année qui précède l'échéance. Or, vu le calendrier extrêmement chargé de la session extraordinaire, il est clair que nous ne pourrons pas régler cette question sereinement cet été.
M. le président. - Amendement identique n°23, présenté par M. Masson.
M. Jean Louis Masson. - Préservons la représentation du monde rural.
M. le président. - Amendement identique n°32, présenté par M. Collombat.
M. Pierre-Yves Collombat. - En discussion générale, j'ai dit mon opposition à cet article, même si sa portée est réduite. Pour moi, c'est une question de principe.
M. le président. - Amendement identique n°39, présenté par M. Zocchetto et les membres du groupe UDI-UC.
M. Yves Détraigne. - Nous sommes résolument opposés à cette disposition qui survient après le binôme. L'étude d'impact est très insuffisante : nous avons besoin des chiffres par département. Si cet article était adopté, un certain nombre de sénateurs seraient élus par des délégués, qui ne seraient pas des élus de terrain. C'est contraire à la mission confiée au Sénat par l'article 24 de la Constitution.
M. Philippe Kaltenbach, rapporteur. - Le monde rural restera privilégié malgré la correction : il ne s'agit que de 3 000 délégués supplémentaires sur 151 000. La tradition qu'a évoquée M. de Montgolfier sur les délais de modification d'une loi électorale n'est qu'un usage. En tout état de cause, nous sommes encore à quinze mois des prochaines élections sénatoriales.
La décision du Conseil constitutionnel de 2000 sera respectée. Dans les Bouches-du-Rhône, le département qui subit l'impact le plus fort, la part des délégués non élus passerait de 32 à 36 %. On a encore de la marge avant d'arriver à 50 % !
Cessons d'opposer monde urbain et monde rural : l'un a besoin de l'autre et vice versa.
M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois. - Je m'étonne de ces réactions : le Gouvernement s'est montré très modéré face à des injustices criantes, par respect pour les petites communes...
M. Jean-Jacques Hyest. - ... et pour le Conseil constitutionnel !
M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois. - Le Gouvernement a fait preuve d'une modération que je tiens à saluer, alors qu'il aurait pu prévoir des changements plus amples. Ne nous instruisez pas un procès qui n'a pas lieu d'être.
M. Manuel Valls, ministre. - Au vrai, nous opérons un rééquilibrage très prudent qui assure la prépondérance du monde rural dans le collège électoral des sénateurs, dans le respect de l'article 24 de la Constitution et de la décision du Conseil constitutionnel de 2000. Cela ne mérite pas de critiques virulentes.
Hommage à une personnalité étrangère
M. le président. - (Mmes et MM. les sénateurs se lèvent) Je suis heureux de saluer la présence dans la tribune officielle de Mme Miapetra Kumpula-Natri, présidente de la Grande commission de l'Eduskunta finlandaise.
Mme Miapetra Kumpula-Natri est en visite en France pour une série d'entretiens sur les questions européennes. Elle s'est entretenue au Sénat avec notre collègue Simon Sutour, président de la commission des affaires européennes.
En notre nom à tous, je lui souhaite la plus cordiale bienvenue et un bon séjour en France. (Applaudissements)
Élection des sénateurs (Suite)
M. le président. - Nous reprenons la suite de la discussion des articles du projet de loi relatif à l'élection des sénateurs.
Discussion des articles (Suite)
ARTICLE PREMIER (Suite)
M. Alain Chatillon. - Pourquoi modifier les choses pour le monde urbain sans le faire pour le monde rural ? Cela n'est pas équilibré.
M. Dominique de Legge. - M. le ministre promet, la main sur le coeur, de ne pas bouleverser les grands équilibres mais tous ses textes vont dans le même sens : une atténuation du poids du monde rural. Après le redécoupage des cantons sur une base essentiellement démographique, voici une modification du collège électoral des sénateurs.
Avec la désignation des grands électeurs, on franchit un pas de plus : je voterai les amendements de suppression. Les territoires ruraux vont faire les frais de votre réforme, qui dissimule peut-être des intentions électoralistes...
M. Manuel Valls, ministre. - Pas de malentendu ni de faux procès. Vous confondez l'élection des délégués au Sénat et l'élection aux conseils départementaux - où s'appliquent des principes constitutionnels, même si nous y avons intégré la représentation des territoires grâce à un amendement du groupe UDI à l'Assemblée nationale, puisque le Sénat n'avait pas voulu du texte. Je suis convaincu que le suffrage cantonal s'en trouvera renforcé.
Pour le Sénat, plus des deux tiers des délégués des conseils municipaux représentent les communes de moins de 10 000 habitants, qui représentent la moitié de la population. Et les délégués des communes de plus de 100 000 habitants ne représentent plus que 7,45 % des délégués en 2010, contre 8,3 % en 1964. Ne nous faites donc pas de procès d'intention : l'article premier rééquilibre les choses pour tenir compte de la croissance démographique dans les plus grandes communes, sans remettre en cause la représentation des plus petites.
Mme Isabelle Debré. - Alors à quoi bon cette modification ?
M. Manuel Valls, ministre. - Nous avons été très raisonnables pour respecter la décision du Conseil constitutionnel et ne pas remettre en cause les équilibres du Sénat. Acceptez la diversité du pays et ne me faites pas de faux procès. (Applaudissements à gauche)
M. Christian Favier. - Le rééquilibrage est modeste et prudent, nous aurions pu aller plus loin. D'autant que l'on ne retire rien aux communes les plus petites. Et comment peut-on voter, dans l'enthousiasme, la loi sur les grandes métropoles il y a quelques jours et se poser ici en défenseur des communes rurales ? Le groupe CRC votera cet article premier.
présidence de M. Didier Guillaume,vice-président
M. René-Paul Savary. - Puisque la modification est minime, raison de plus pour ne pas la faire ! (M. Manuel Valls, ministre, rit) Derrière un redécoupage, il y a toujours des intentions et des arrière-pensées... Vous dites vouloir défendre le monde rural, mais tout ce que vous faites va insidieusement à l'inverse. Les conseillers départementaux, en binôme, ne seront pas au même régime selon qu'ils seront urbains ou ruraux. Rajouter des délégués dans les circonscriptions urbaines, c'est en rajouter encore au suffrage indirect et s'éloigner des électeurs de base. Finalement, cet article premier n'est là que pour faire passer l'article 2 qui réduit le seuil de la proportionnelle.
M. Hervé Maurey. - Je voterai les amendements de suppression pour les raisons évoquées dans l'étude d'impact : assurer une meilleure représentation des zones urbaines et mieux prendre en compte le poids démographique des communes se fait, n'en déplaise au ministre, au détriment du monde rural. Un collègue a tout à l'heure parlé de texte ruralicide. C'est un fait. Et qui vient s'ajouter au texte ruralicide sur les cantonales.
Le poids démographique ? Mais ce sont les élections législatives qui sont là pour le prendre en compte. Les deux tiers des délégués représentent les communes de moins de 10 000 habitants ? Mais les deux tiers des communes ont moins de 500 habitants ! On nous dit que la modification est modeste ; mais dans le Rhône ou le Val-de-Marne, l'impact sera très fort. Les propos provocants de M. Gorce laissent penser qu'il est peut-être en service commandé et exprime tout haut ce que pensent les parlementaires socialistes...
M. Jean-Jacques Mirassou. - Ce n'est pas son genre !
M. Hervé Maurey. - On rogne, peu à peu, sur le rôle du Sénat, « anomalie démocratique » selon un éminent socialiste. Je voterai ces amendements de suppression. (Applaudissements au centre et à droite)
M. Philippe Bas. - Certes, on ne diminue pas en valeur absolue le nombre de représentants de la ruralité, mais en valeur relative si ! Et désigner de plus en plus de grands électeurs non élus, c'est aller sur une voie périlleuse, sachant que le Sénat représente les collectivités territoriales. C'est là l'originalité de notre chambre, composée d'élus locaux, forts d'une vision originale. Que dans certains départements 30 à 35 % des grands électeurs ne soient pas élus mais des militants, c'est dénaturer l'institution sénatoriale. (Applaudissements à droite et au centre)
C'est une goutte d'eau, nous objecte-t-on ? Mais à multiplier les exceptions, on va finir par déroger aux exigences de l'article 24 de la Constitution. Pour toutes ces raisons, je ne voterai pas l'article premier. (Applaudissements sur les mêmes bancs)
M. François Rebsamen. - Tout ce qui est excessif est insignifiant. Un texte « ruralicide » ? Il ne diminue en rien la représentation du monde rural, mais ne fait qu'accroître légèrement celle du monde urbain. (Rires à droite)
Mme Catherine Troendle. - Cela revient au même !
M. François Rebsamen. - Aujourd'hui, une commune de dix habitants a un représentant et une commune de 200 000 habitants, à peine 200. L'inégalité est flagrante. Dans quel monde vivez-vous ? La plupart d'entre vous, j'en suis sûr, habitent en ville... (Exclamations à droite) N'allez pas opposer monde urbain et monde rural. Vous ne voyez pas que la société a changé, ce qui explique nombre de vos échecs électoraux ! (Rires à droite, où on en évoque d'autres) Vous restez sur l'image d'un monde figé - ce qui se comprend de la part de conservateurs. (Vives exclamations à droite)
M. Manuel Valls, ministre. - Voire de réactionnaires !
M. François Rebsamen. - Le texte procède à un léger rééquilibrage ; même s'il est insuffisant à mon goût, je le voterai. (Mêmes mouvements)
Mme Isabelle Debré. - Pas de leçon ! Vous allez à l'échec !
M. André Reichardt. - Tout ce qui est excessif...
M. François Rebsamen. - Le Gouvernement a travaillé dans un souci d'équilibre et le groupe socialiste le soutient. (Applaudissements sur les bancs socialistes)
M. Gérard Cornu. - Je vous reconnais une certaine constance, monsieur le ministre. Au lieu de travailler à réduire le chômage, à améliorer la compétitivité des entreprises et le pouvoir d'achat des citoyens, vous bidouillez, depuis un an, tous les scrutins - municipal, cantonal, et maintenant, sénatorial. (Exclamations sur les bancs socialistes) Vous méprisez le monde rural ! (Mêmes mouvements) Parce que vous voulez rester au pouvoir. Mais les Français ne sont pas dupes !
M. Manuel Valls, ministre. - Vous me faites bien de l'honneur en me donnant la responsabilité de la conduite de la politique économique. Monsieur Bas, vous montrez, au Sénat, la foi du charbonnier.
M. Philippe Bas. - Et vous au Gouvernement...
M. Manuel Valls, ministre. - J'y suis et vous n'y êtes plus, les électeurs sont passés par là... Le Gouvernement avait pris des engagements : il les tient. La réforme que nous proposons est modérée. La ruralité ? Mais qui a supprimé 10 000 postes de gendarmes et de policiers ? C'est vous ! Qui a créé les conditions d'une hémorragie sans précédent dans les effectifs de la gendarmerie et bouleversé l'organisation des brigades ? C'est vous ! Qui, par une politique économique, agricole et de sécurité désastreuse, a mis en cause le monde rural ? C'est vous ! Nous n'avons pas de leçon à recevoir de votre part ! (Applaudissements à gauche)
M. Alain Richard. - Il est sans doute possible de revenir aux conditions d'un dialogue plus courtois et plus amical...
M. François Trucy. - À défaut d'être sincère !
M. Alain Richard. - Dois-je rappeler que les lois électorales de ces 30 dernières années, petites ou grandes, ont toutes été déférées, par vous ou par nous, devant le Conseil constitutionnel ? Et que parfois le râteau nous est revenu dans la figure, chacun à notre tour ?
Pour les élections au suffrage direct, le principe un homme, une voix est incontournable. C'est même sur ce fondement que le Conseil a censuré, en 1995, un texte sur les intercommunalités... Et c'est pourquoi, en 2000, nous avons prévu la représentation proportionnelle dans les intercommunalités.
Sur le département, il y a eu de larges débats pour s'en tenir au tunnel des 30 % assorti de dérogations. Comme je l'avais prévu, le râteau a encore frappé... Sur votre saisine, le Conseil constitutionnel a supprimé de la loi du 17 mai 2013 toute possibilité de dérogation à l'égalité démographique. C'est dire qu'il faut savoir raison garder...
J'en viens à l'élection sénatoriale et fais observer à M. Bas que le Conseil constitutionnel a jugé que la loi de 2000, qui opérait une forte correction démographique en faveur des villes, était conforme. Le présent texte recherche un équilibre entre le principe un homme, une voix et la représentation équilibrée de la diversité des territoires. Enfin, en droit, un élu représente des êtres humains, jamais des territoires. (Applaudissements à gauche)
M. Éric Doligé. - Je vais tenter de garder mon calme, mais que M. Rebsamen s'applique à lui-même l'adage qui veut que tout ce qui est excessif soit insignifiant. J'ai souvenir du tollé qu'a soulevé le conseiller territorial, qui fut un point de focalisation. On a déjà transféré de nombreuses compétences aux intercommunalités, si bien que les communes, qui craignent de perdre leur compétence urbanisme, se demandent ce qui va leur rester. Je ne reviens pas sur ce qui a été dit sur le département...
Pour les sénatoriales, vous n'ajouterez, dites-vous, qu'une petite touche, mais qui, ajoutée à toutes les autres, fait beaucoup. Sans compter que vous allez peut-être vous attaquer au scrutin législatif... La seule élection à laquelle vous n'ayez pas touché, ce sont les régionales - cherchez l'erreur ! (« Ah ! » à droite). Pourquoi ne pas y mettre du binôme ? M. Rebsamen s'est indigné de l'écart de représentation. Je lui réplique que l'écart de travail, pour les conseillers départementaux, sera plus important encore. (Marques d'approbation à droite) Sans parler des délégués non élus, qui seront plus nombreux que les élus dès 70 000 habitants - au lieu de 80 000 aujourd'hui.
M. Charles Guené. - Ce n'est pas ici le lieu de faire l'exégèse des décisions du Conseil constitutionnel, mais je rappelle qu'il ne s'est pas prononcé sur l'écart de plus ou moins 30 % ni sur le strict respect du principe un homme, une voix, pour se contenter de juger que l'on retenait des formules si alambiquées qu'elles pouvaient permettre qu'on y dérogeât. Il n'y a pas lieu de s'appuyer sur ses décisions pour justifier ce texte.
À la demande du groupe UMP et du groupe socialiste, les amendements identiques nos2, 23, 32 et 39 sont mis aux voix par scrutin public.
M. le président. - Voici les résultats du scrutin :
Nombre de votants | 347 |
Nombre de suffrages exprimés | 347 |
Pour l'adoption | 171 |
Contre | 176 |
Le Sénat n'a pas adopté.
L'amendement n°53 rectifié devient sans objet.
L'amendement n°59 n'est pas défendu.
M. le président. - Amendement n°44 rectifié, présenté par MM. Cornu, de Montgolfier, Billard et Pointereau.
Remplacer le nombre :
800
par le nombre :
1 500
M. Gérard Cornu. - Puisque l'on veut défendre, plus que les territoires, les habitants du monde rural, mon amendement a ici toute sa place...
M. le président. - Amendement n°45 rectifié, présenté par MM. Cornu, de Montgolfier, Billard et Pointereau.
Remplacer le nombre :
800
par le nombre :
1200
M. Gérard Cornu. - Amendement de repli.
M. le président. - Amendement n°54 rectifié, présenté par MM. de Montgolfier, Billard et Cornu.
Remplacer le nombre :
800
par le nombre :
950
M. Albéric de Montgolfier. - Il s'agit d'éviter une augmentation trop importante du nombre de délégués sénatoriaux supplémentaires dans les communes concernées.
L'amendement n°22 n'est pas défendu.
M. Philippe Kaltenbach, rapporteur. - La commission est défavorable à ces amendements. J'indique que la tranche visée par M. Cornu existe, au reste, depuis les débuts de la Ve République, à laquelle, si j'en crois vos exclamations au mot de conservateur prononcé par M. Rebsamen, vous êtes très attachés.
M. Manuel Valls, ministre. - Même avis.
À la demande du groupe socialiste, l'amendement n°44 rectifié est mis aux voix par scrutin public.
M. le président. - Voici les résultats du scrutin :
Nombre de votants | 340 |
Nombre de suffrages exprimés | 340 |
Pour l'adoption | 163 |
Contre | 177 |
Le Sénat n'a pas adopté.
À la demande du groupe socialiste, l'amendement n°45 rectifié est mis aux voix par scrutin public. (Marques d'impatience à droite)
M. le président. - Voici les résultats du scrutin :
Nombre de votants | 340 |
Nombre de suffrages exprimés | 340 |
Pour l'adoption | 164 |
Contre | 176 |
Le Sénat n'a pas adopté.
À la demande du groupe socialiste, l'amendement n°54 rectifié est mis aux voix par scrutin public. (Exclamations à droite)
M. le président. - Voici les résultats du scrutin :
Nombre de votants | 339 |
Nombre de suffrages exprimés | 339 |
Pour l'adoption | 163 |
Contre | 176 |
Le Sénat n'a pas adopté.
À la demande du groupe UMP, l'article premier est mis aux voix par scrutin public.
M. le président. - Voici les résultats du scrutin :
Nombre de votants | 347 |
Nombre de suffrages exprimés | 346 |
Pour l'adoption | 177 |
Contre | 169 |
Le Sénat a adopté.
M. Éric Doligé. - Ça a été dur !
ARTICLES ADDITIONNELS
M. le président. - Amendement n°43 rectifié, présenté par MM. Cornu, de Montgolfier et Billard.
Après l'article 1er
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
À la dernière phrase du premier alinéa de l'article L. 288 du code électoral, le mot : « âgé » est remplacé par le mot : « jeune ».
M. Gérard Cornu. - Ce problème revient régulièrement dans les scrutins : en cas d'égalité de suffrages, le candidat le plus jeune doit être élu, non le plus âgé.
M. Philippe Kaltenbach, rapporteur. - Défavorable car ce principe devrait être modifié pour toutes les élections.
M. Manuel Valls, ministre. - Même avis.
L'amendement n°43 rectifié n'est pas adopté.
M. Albéric de Montgolfier. - Conservateurs !
M. le président. - Amendement n°33, présenté par M. Masson.
Après l'article 1er
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
À la deuxième phrase de l'article L. 290-1 du code électoral, après les mots : « la section électorale correspondante ou », sont insérés les mots : « , à défaut, ».
M. Jean Louis Masson. - Il faut quand même que les délégués d'une commune associée soient choisis prioritairement parmi les conseillers municipaux élus dans la section électorale correspondante. C'est logique !
M. Philippe Kaltenbach, rapporteur. - L'avis est favorable : priorité doit être donnée dans la désignation des grands électeurs aux élus de la section concernée.
M. Manuel Valls, ministre. - Je rappelle que la loi du 17 mai 2013 a supprimé les sections dans les communes de moins de 20 000 habitants et que le texte que nous examinerons ensuite abrogera toutes les sections électorales. Retrait, sinon rejet.
M. Jean Louis Masson. - L'argument ne tient pas : on ne peut pas se fonder sur une loi qui n'est pas adoptée. Le président de la commission des lois veut d'ailleurs rétablir toutes les sections ! À moins que le rapporteur et le président ne cherchent à noyer le poisson, mais il se débat encore vivement !
M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois. - Le débat a été vif en commission, nous en reparlerons ce soir.
L'amendement n°33 est adopté et devient un article additionnel.
M. le président. - Amendement n°34, présenté par M. Masson.
Après l'article 1er
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. L'article L. 290-1 du code électoral est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Les communes déléguées qui ont été substituées aux communes associées en application de la loi n° 2013-403 du 17 mai 2013 relative à l'élection des conseillers départementaux, des conseillers municipaux et des conseillers communautaires, et modifiant le calendrier électoral, conservent un nombre de délégués égal à celui auquel elles auraient eu droit en l'absence de fusion. Ces délégués sont désignés par le conseil municipal de la commune issue de la fusion, parmi les conseillers municipaux domiciliés dans le ressort de l'ancienne commune associée ou à défaut parmi les électeurs inscrits sur les listes électorales de la commune dans les conditions fixées au présent titre. »
II. Le I entre en vigueur à la date d'entrée en vigueur de l'article 33 de la loi n°2013-403 du 17 mai 2013 relative à l'élection des conseillers départementaux, des conseillers municipaux et des conseillers communautaires, et modifiant le calendrier électoral.
M. Jean Louis Masson. - Un mauvais coup était porté aux communes associées dans la loi du 17 mai 2013. Le Gouvernement les avait oubliées.
J'avais alerté le Sénat, qui vota mon amendement, mais en deuxième lecture le président de la commission des lois de l'Assemblée nationale a sorti de sa poche un amendement transformant les communes associées en communes déléguées. Nous en reparlerons ce soir mais la commission des lois, logiquement, devrait soutenir mon amendement.
M. Philippe Kaltenbach, rapporteur. - Outre sa complexité, cet amendement, qui propose un bonus de délégués aux communes associées, présente un risque d'inconstitutionnalité : un traitement différent serait réservé aux communes déléguées selon qu'elles procèdent ou non d'une commune associée.
M. Manuel Valls, ministre. - Même avis.
M. Charles Guené. - Regardons-y de plus près, M. Masson veut corriger une disposition sur les communes associées qui rompt le pacte républicain de 1971 et aboutirait, dans mon département, à réduire le corps électoral de 10 %. Nous nous honorerions en votant cet amendement.
M. Jean-René Lecerf. - J'en profite pour vous interroger, monsieur le ministre, sur le cas des communes associées fusionnées, qui bénéficient d'une sorte de vote plural puisqu'elles conservent leurs délégués tout en restant prises en compte dans la somme des habitants. N'y a-t-il pas là un risque d'inconstitutionnalité ?
M. Jacques Mézard. - Je fais miennes les observations de M. Guené : soit on supprimait les communes associées, soit on respectait le pacte librement consenti entre ces communes qui ne voulaient pas aller jusqu'à la fusion. La modification a été faite sans concertation, qui plus est. Je voterai l'amendement n°34.
M. Jean Louis Masson. - Tout le problème vient de ce que la transformation des communes associées en communes déléguées a été décidée à la sauvette en deuxième lecture, dans un texte qui n'avait rien à voir. Les communes concernées - et elles sont nombreuses - n'ont même pas été consultées.
À la demande du groupe UMP, l'amendement n°34 est mis aux voix par scrutin public.
M. le président. - Voici les résultats du scrutin :
Nombre de votants | 347 |
Nombre de suffrages exprimés | 347 |
Pour l'adoption | 188 |
Contre | 159 |
Le Sénat a adopté.
L'amendement n°34 devient un article additionnel.
M. le président. - Amendement n°21 rectifié bis, présenté par Mmes Cohen et Gonthier-Maurin.
Après l'article 1er
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le premier alinéa de l'article L. 299 du code électoral est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Le candidat et son remplaçant sont de sexe différent. »
Mme Laurence Cohen. - Avec la réforme proposée, 93 sièges continueront d'être pourvus au scrutin majoritaire dans les départements et collectivités d'outre-mer élisant un ou deux sénateurs.
Ceux-ci ne doivent pas être dispensés de toute obligation paritaire, la délégation aux droits des femmes propose, en conséquence, de prévoir, à l'image de ce qu'avait institué la loi du 31 janvier 2007 pour les conseillers généraux, que le candidat et son remplaçant soient de sexe différent.
M. le président. - Amendement identique n°49 rectifié bis, présenté par MM. Maurey, Détraigne, Guerriau, Merceron, Marseille et Deneux et Mme Férat.
Après l'article 1er
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le premier alinéa de l'article L. 299 du code électoral est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Le candidat et son remplaçant sont de sexe différent. »
M. Hervé Maurey. - L'objectif avoué de ce texte est de renforcer la parité. Il ne sera pas rempli en abaissant le seuil de la proportionnelle : les élections sénatoriales de 2011 le démontrent ; de même, davantage de femmes ont été élues au scrutin majoritaire à l'Assemblée nationale. Prenons plutôt une mesure concrète pour renforcer la parité, en nous inspirant de la loi de 2007 sur les conseils généraux.
M. le président. - Amendement n°17 rectifié, présenté par M. Masson.
Après l'article 1er
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le premier alinéa de l'article L. 299 du code électoral, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Le candidat et la personne appelée à le remplacer comme sénateur dans les cas prévus à l'article L. O. 319 sont de sexe différent. »
M. Jean Louis Masson. - Dans mon département de la Moselle, l'introduction de la suppléance paritaire a doublé le nombre de femmes siégeant au conseil général. Cela a fonctionné, il n'y a pas de raisons de ne pas appliquer cette règle au Sénat.
M. Philippe Kaltenbach, rapporteur. - Cette mesure, proposée par M. Antoine Lefèvre en 2009, a fait l'objet de débats âpres...
M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois. - Plutôt approfondis !
M. Philippe Kaltenbach, rapporteur. - ... en commission. Des réticences se sont exprimées. Cet amendement contraindrait la liberté de choix du suppléant, ne s'appliquerait pas aux députés et n'a plus de raison d'être avec le scrutin binominal départemental. La commission, partagée, s'en remet à la sagesse de notre assemblée.
M. Manuel Valls, ministre. - Pour défendre ces amendements, vous avez cité l'exemple des cantonales, qui n'est guère probant - je l'ai dit en discussion générale : nous avons constaté une régression en 2011. D'où la modification du mode de scrutin départemental. Rejet, car le Gouvernement veut plus de sénatrices et non pas seulement plus de suppléantes ! (Exclamations à droite)
M. Hervé Maurey. - Je m'étonne de la position de la commission et de la réaction du Gouvernement face à des amendements favorisant la parité - un impératif constitutionnel - et émanant de tous les bancs. Le titulaire serait contraint, soit. Mais vous ne prévoyez pas autre chose pour le binôme. Étendons la mesure aux députés au cours de la navette puisque ce n'est que cela ! La parité, ce n'est pas que des mots...
Mme Évelyne Didier. - L'amendement est symbolique, mais les symboles sont importants. La Délégation aux droits des femmes accomplit un remarquable travail, que le Gouvernement en tienne compte ! Que les partis politiques présentent une femme en tête de liste pour les sénatoriales ! La vérité, malheureusement, est que nous avons besoin de lois pour faire progresser la parité. Monsieur le ministre, ces amendements n'apportent pas de bouleversement : acceptez-les ! (Mme Laurence Cohen, rapporteure de la Délégation aux droits des femmes, applaudit)
M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois. - M. Kaltenbach a remarquablement fait son travail en rapportant les avis qui ont été présentés : s'il s'en remet à la sagesse, c'est qu'il y avait égalité de vote au sein de la commission.
M. Christophe Béchu. - Je voterai ces amendements. Un peu de cohérence, vous avez imposé le binôme ! Il est vrai que les députés qui l'ont voté se sont bien gardés de proposer d'appliquer un principe paritaire à eux-mêmes. Ne nous comportons pas comme eux : si c'est une bonne réforme, adoptons-la ! (Applaudissements à droite)
M. Jean Louis Masson. - Pourquoi mon amendement passe-t-il en troisième alors que je l'ai déposé en premier ? Puisqu'il en est ainsi, je le rectifie pour le rendre identique aux deux autres, sinon il tombera.
M. le président. - Le classement est opéré par le service de la séance en fonction du texte visé par l'amendement. Votre amendement sera donc le n°17 rectifié bis.
M. Gérard Cornu. - Je ne comprends pas la logique du Gouvernement : le chabada pour les uns, mais pas pour les autres ! Je voterai les trois amendements identiques.
M. Manuel Valls, ministre. - Une séance de rattrapage, qui donnera l'occasion à chacun de témoigner de son attachement à la parité. Je comprends la proposition de la Délégation aux droits des femmes. Les chiffres sont implacables.
Prenons des exemples concrets : il existe un régulateur financier pour les élections législatives qui a coûté cher à la formation politique de M. Béchu, qui le paye encore, dans tous les sens du terme.
L'appariement d'un titulaire et d'une suppléante - disons les choses clairement - ne suffit pas, voyez les élections cantonales. Les suppléantes ne sont pas élues...pour la parité, nous avons introduit le scrutin binominal qui concerne deux élus. La suppléance aux sénatoriales comme forme de parité ? Allons donc !
Si le Sénat veut adopter ces amendements, le Gouvernement ne s'y opposera pas. M. Béchu a certes du talent mais je suis déterminé à ne rien vous céder sur le terrain de la parité. (Exclamations à droite ; applaudissements à gauche) Sagesse.
M. Jean-Pierre Michel. - La position du ministre n'est pas celle de la majorité du groupe socialiste, je demande une suspension de séance.
La séance, suspendue à 18 h 15, reprend à 18 h 30.
Mme Françoise Cartron. - Je suis heureuse...
Mme Marie-Hélène Des Esgaulx. - Mme Cartron est pour les femmes !
Mme Françoise Cartron. - ... de voir tant de membres de l'opposition découvrir la magie de la suppléance. Je voterai, pour ma part, ces amendements sans illusion. Vous restez au milieu du chemin. (On le conteste à droite)
Mme Catherine Troendle. - Vous n'êtes pas si vertueux que cela !
Mme Françoise Cartron. - Encore un effort, messieurs les paritaristes : comme par hasard, les hommes seront titulaires et les femmes suppléantes !
M. Jacques Mézard. - Nous n'avons pas l'habitude de changer d'avis en cours de séance. Il s'agit d'un scrutin uninominal et nous sommes attachés au principe de libre choix du titulaire, un principe de responsabilité et de liberté. Nous ne sommes pas dupes du jeu qui se joue, à droite et au centre. Pour notre part, nous ne modifierons pas notre position même si le message est difficile à faire passer.
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. - Le principe de responsabilité et de liberté exigerait aussi de reconnaître aux femmes, 50 % de l'humanité, leur place en politique. Reconnaître cette place, c'est porter haut et fort cette exigence pour inciter les femmes à revendiquer toute leur place dans la société.
À la demande du groupe UDI-UC, les amendements identiques nos21 rectifié bis, 49 rectifié bis et 17 rectifié bis sont mis aux voix par scrutin public.
M. le président. - Voici les résultats du scrutin :
Nombre de votants | 346 |
Nombre de suffrages exprimés | 345 |
Pour l'adoption | 325 |
Contre | 20 |
Le Sénat a adopté.
(Applaudissements sur plusieurs bancs)
M. le président. - Les amendements deviennent articles additionnels.
M. le président. - Amendement n°9 rectifié bis, présenté par MM. Mézard, Alfonsi, Baylet, Bertrand, C. Bourquin, Chevènement, Collin et Fortassin, Mme Laborde et MM. Mazars, Plancade, Requier, Tropeano, Vall et Vendasi.
Après l'article 1er
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article L. 305 du code électoral est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Nul ne peut être candidat au second tour s'il ne s'est présenté au premier tour. »
M. Jacques Mézard. - Il s'agit ici de supprimer un véritable archaïsme. Comme c'est un vrai problème de fond, cela n'intéressera personne... Il faudra certainement un scrutin public pour que chacun puisse s'exprimer sincèrement sur cet amendement qui met fin à la règle permettant à un candidat, dans les circonscriptions où l'élection des sénateurs a lieu au scrutin majoritaire, de se présenter au second tour sans avoir été candidat au premier tour. D'autant que se pose le problème du compte de campagne. Il faut régler le problème une bonne fois pour toute.
M. le président. - Amendement identique n°55 rectifié bis, présenté par MM. de Montgolfier, Cornu et Billard.
M. Albéric de Montgolfier. - Même objet. Et la question du compte de campagne est essentielle. La meilleure façon de lever la difficulté est de mettre fin à cette règle étrange.
M. le président. - Amendement identique n°25 rectifié ter, présenté par M. Masson.
M. Jean Louis Masson. - Lors du texte sur les municipales et cantonales, j'avais proposé un amendement dans le même sens. Je poursuis.
M. le président. - Amendement n°15 rectifié ter, présenté par M. Détraigne, Mmes Férat, Morin-Desailly et Goy-Chavent et MM. J.L. Dupont, Merceron, Deneux, Bockel, Namy, Capo-Canellas, Tandonnet, Amoudry, Maurey, J. Boyer, Guerriau, Jarlier, Mercier et Dubois.
Après l'article 1er
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article L. 305 du code électoral est complété par trois alinéas ainsi rédigés :
« Nul ne peut être candidat au deuxième tour s'il ne s'est présenté au premier tour et s'il n'a obtenu un nombre de suffrages au moins égal à 12,5 % du nombre des électeurs inscrits.
« Dans le cas où un seul candidat remplit ces conditions, le candidat ayant obtenu après celui-ci le plus grand nombre de suffrages au premier tour peut se maintenir au second.
« Dans le cas où aucun candidat ne remplit ces conditions, les deux candidats ayant obtenu le plus grand nombre de suffrages au premier tour peuvent se maintenir au second. »
M. Yves Détraigne. - Nous allons un peu plus loin en prévoyant aussi qu'il faudra obtenir 12,5 % des suffrages pour se maintenir au second tour.
M. le président. - Amendement n°18 rectifié, présenté par M. Masson.
Après l'article 1er
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Après l'article L. 294 du code électoral, il est inséré un article L. 294-... ainsi rédigé :
« Art. L. 294-... - Dans les départements où les élections ont lieu au scrutin majoritaire, nul ne peut être élu candidat au deuxième tour s'il ne s'est pas présenté au premier tour et s'il n'a obtenu un nombre de suffrages au moins égal à 12,5 % du nombre des électeurs inscrits.
« Dans le cas où un seul candidat remplit ces conditions, le candidat ayant obtenu après celui-ci le plus grand nombre de suffrages au premier tour peut se maintenir au second.
« Dans le cas où aucun candidat ne remplit ces conditions, les deux candidats ayant obtenu le plus grand nombre de suffrages au premier tour peuvent se maintenir au second. »
II. - L'article L. 305 du code électoral est abrogé.
M. Jean Louis Masson. - Il est défendu.
M. Philippe Kaltenbach, rapporteur. - Favorable aux trois premiers amendements, identiques. Je l'avais moi-même proposé avant que la commission ne rejette le texte.
Il n'y avait eu aucun cas en 2008 et 2011 ; un seul en 2001 et 2004. En 1998, il y en avait eu quatre, dont celui qui, à Wallis et Futuna, avait abouti à l'élection de notre collègue Laufoaulu, réélu en 2008.
La Constitution est défavorable à l'instauration d'un tel seuil pour l'élection des sénateurs. Outre que cela irait contre la tradition, cela pourrait nuire au pluralisme.
Avis favorable. En revanche, l'amendement n°15 rectifié ter marquerait une nette rupture et pourrait nuire au pluralisme politique.
M. Manuel Valls, ministre. - Le Gouvernement soutient ces trois amendements identiques, rejoignant M. Mézard dans sa cavalcade contre les archaïsmes. Il est en revanche défavorable à l'introduction d'un seuil pour l'accès au second tour.
Les amendements identiques nos9 rectifié bis, 55 rectifié bis, 25 rectifié ter sont adoptés, et deviennent un article additionnel.
Les amendements nos15 rectifié ter et 18 rectifié deviennent sans objet.
M. Jean Louis Masson. - Mon amendement n°18 rectifié n'aurait pas dû tomber puisqu'il ne concernait que le seuil des 12,5 %, mais je vais le retirer.
Une atteinte au pluralisme, en effet, c'est bien pourquoi je n'avais pas voté le passage de 10 à 12,5 % pour les cantonales... À la législative partielle d'avant-hier, le troisième candidat a eu de quoi se plaindre de ce seuil.
L'amendement n°18 rectifié est retiré.
M. le président. - Amendement n°24, présenté par M. Masson.
Après l'article 1er
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article L. 312 du code électoral est ainsi modifié :
1° Après le mot : « départements », sont insérés les mots : « où l'élection a lieu au scrutin majoritaire à deux tours ».
2° Il est complété par une phrase ainsi rédigée : « Dans les autres départements, les électeurs sont convoqués au chef-lieu de leur arrondissement. »
M. Jean Louis Masson. - Dans les départements où le scrutin a lieu à la proportionnelle il n'y a pas de raison de faire déplacer les grands électeurs au chef-lieu, ce qui oblige certains à faire plus de 100 km. Et l'État économiserait des frais de déplacement.
M. Philippe Kaltenbach, rapporteur. - Avis défavorable. Cette mesure compliquerait l'organisation de l'élection dont le préfet a la charge. Cette élection qui a lieu tous les six ans seulement est l'occasion de rassembler les grands électeurs, qui y sont attachés.
M. Manuel Valls, ministre. - Il y a des archaïsmes, mais il y a aussi des traditions. C'en est une, conservons-la.
M. Patrice Gélard. - Un sénateur est l'élu d'un département et pas d'un chef-lieu d'arrondissement. Le point de vue du rapporteur et du ministre est le bon.
L'amendement n°24 n'est pas adopté.
ARTICLE 2
M. Jean Louis Masson . - Je suis très favorable à cet article, pas seulement pour la parité : le scrutin proportionnel évite les coalitions, qui gèlent le pluralisme. On l'a vu en 2003, pour l'élection sénatoriale : le scrutin proportionnel exprime mieux la réalité du terrain. Il n'est pas normal qu'un parti qui dépasse juste les 50 % monopolise les trois sièges.
M. le président. - Amendement n°3, présenté par M. J.C. Gaudin et les membres du groupe UMP.
Supprimer cet article.
M. Jean-Jacques Hyest. - Avoir un scrutin majoritaire pour trois sièges n'empêche pas des membres de l'opposition d'être élus. Ce fut le cas pour le président Sueur. (Murmures ironiques) Qui a été très bien élu.
Que s'est-il donc passé, monsieur Mézard, en commission ? Le texte avait initialement été rejeté parce que vous étiez contre. Qu'est-ce qui vous a fait changer d'avis ? Je le dis d'emblée : si nous retrouvons la majorité, nous reviendrons sur cette disposition que vous ne proposez que pour tenter de gagner un siège dans les départements où vous êtes minoritaires. Mais attention au retour de bâton : les résultats ne sont pas toujours ceux que l'on espérait. Ils seront sanglants dans certains départements... Certains sénateurs qui n'ont pas démérité présenteront des listes dissidentes, faute d'être investis par leur parti.
M. le président. - Amendement identique n°37, présenté par M. Zocchetto et les membres du groupe UDI-UC.
M. Yves Détraigne. - Nous sommes toujours sur les mêmes positions.
M. Philippe Kaltenbach, rapporteur. - Avis défavorable : supprimer cet article, c'est faire perdre l'essentiel de son intérêt à ce texte.
M. Gérard Cornu. - Je voterai ces amendements. La parité est ici un prétexte. Une proportionnelle dans les départements à trois sièges n'aboutira qu'à faire élire les têtes de listes. La vérité, c'est que vous tripatouillez le scrutin pour conserver la majorité. (Exclamations à gauche)
M. Alain Bertrand. - N'est pas Pasqua qui veut...
M. Albéric de Montgolfier. - On évoque la parité. La proportionnelle à trois sièges ne la favorise pourtant en rien, M. Cornu l'a montré. Autre argument, le pluralisme, mais le scrutin majoritaire ne l'empêche en rien. Vous poursuivez une visée électoraliste. Et vous rompez, encore une fois, avec la tradition républicaine qui veut que l'on ne modifie pas un mode de scrutin dans l'année précédant l'élection.
M. Hervé Maurey. - Je voterai ces amendements car nous sommes très attachés au scrutin majoritaire dans les départements à trois sièges. C'est un scrutin de liberté, qui laisse les grands électeurs libres de panacher leurs suffrages. Les élus locaux, il faut en avoir conscience, y tiennent beaucoup. La parité a bon dos. Elle ne fonctionnera qu'à la marge, l'exemple de 2001 le montre. Le pluralisme existe déjà avec le scrutin majoritaire.
M. Valls nous a dit que le président de la République avait pris l'engagement de revenir sur le conseiller territorial, soit. Mais le mode d'élection du Sénat n'a fait l'objet d'aucun engagement de la sorte. Ce texte est sorti de votre chapeau pour tenter de vous éviter de perdre votre courte majorité à la Haute assemblée.
Pourquoi vos arguments sont-ils différents selon le mode de scrutin ? Pour les cantonales en « binôme », vous avez fait l'apologie du scrutin majoritaire. Pourquoi le faire reculer dans l'assemblée où la proportionnelle est la plus forte ? Avec ce texte, 75 % des sénateurs seraient élus de la sorte. Je comprends mal vos contradictions. (Applaudissements sur les bancs UMP)
Mme Évelyne Didier. - Notre groupe s'en tient à sa position de fond : la proportionnelle toujours et partout. C'est une question de démocratie.
M. Éric Doligé. - Je rappelle que les départements à trois sièges sont de petits départements, donc souvent des départements ruraux. Le président de la commission des lois est l'exemple vivant du fait que les électeurs ne veulent pas mettre tous les oeufs dans le même panier, ils donnent un signe politique, mais veulent aussi saluer la qualité d'une personnalité. C'est la réalité du milieu rural, qui est tout autre que celle des grandes villes. (Applaudissements sur les bancs UMP)
M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois. - Je n'ai pas l'habitude qu'on me cite tant en exemple...
M. René-Paul Savary. - Mon département a connu les deux modes de scrutin. Dans l'un et l'autre cas, quand on veut se présenter, on arrive à convaincre les électeurs. Ceux-ci vont-ils comprendre ces changements incessants ? Ils préféreraient que l'on s'attache à leurs préoccupations qui sont vives, dans le monde rural, avec la baisse des dotations. Ne changeons pas de pied sans cesse et restons-en au scrutin majoritaire dans les départements moyens.
À la demande des groupes socialiste et UMP, les amendements identiques n°s3 et 37 sont mis aux voix par scrutin public.
M. le président. - Voici les résultats du scrutin :
Nombre de votants | 345 |
Nombre de suffrages exprimés | 344 |
Pour l'adoption | 170 |
Contre | 174 |
Le Sénat n'a pas adopté.
L'amendement n°16 n'est pas défendu.
M. le président. - Amendement n°50 rectifié, présenté par Mme Lipietz et les membres du groupe écologiste.
Rédiger ainsi cet article :
I. - Au premier alinéa de l'article L. 294 du code électoral, les mots : « sont élus trois sénateurs ou moins » sont remplacés par les mots : « est élu un sénateur ».
II. - Après l'article L. 294 du même code, il est inséré un article L. 294-... ainsi rédigé :
« Art. L. 294-... - Dans les départements où sont élus deux sénateurs, l'élection a lieu au scrutin majoritaire binominal à deux tours.
« Nul candidat d'un binôme n'est élu sénateur au premier tour de scrutin si son binôme n'a réuni la majorité absolue des suffrages exprimés et un nombre de voix égal au quart des électeurs inscrits.
« Au second tour de scrutin, la majorité relative suffit. Si plusieurs binômes de candidats obtiennent le même nombre de suffrages, l'élection est acquise au binôme qui comporte le candidat le plus jeune. »
III. - Après l'article L. 299 du même code, il est inséré un article L. 299-... ainsi rédigé :
« Art. L. 299-... - Dans les départements où les élections ont lieu au scrutin binominal, les candidats se présentent en binôme de sexe différent. Ils doivent mentionner dans leur déclaration de candidature, pour chaque candidat, les nom, prénoms, date et lieu de naissance, domicile et profession de la personne appelée à les remplacer comme sénateur dans les cas prévus à l'article L. O. 319. Ils doivent y joindre l'acceptation écrite des remplaçants, lesquels doivent remplir les conditions d'éligibilité exigées des candidats.
« Le candidat et la personne appelée à le remplacer comme sénateur dans les cas prévus à l'article L. O. 319 sont de même sexe.
« Nul ne peut figurer en qualité de remplaçant sur plusieurs déclarations de candidature. Nul ne peut être à la fois candidat et remplaçant d'un autre candidat. Nul ne peut désigner pour le second tour de scrutin une personne autre que celle qui figurait sur sa déclaration de candidature lors du premier tour. »
Mme Hélène Lipietz. - On nous a seriné que le meilleur scrutin pour la parité était le scrutin binominal. Dont acte...
M. le président. - Amendement n°46 rectifié, présenté par MM. Cornu, de Montgolfier, Billard et Pointereau.
Alinéa 2
Remplacer les mots :
deux sénateurs
par les mots :
quatre sénateurs
M. Gérard Cornu. - Avec ce seuil pour la proportionnelle, vous allez changer radicalement la nature du Sénat, puisque 75 % des élus le devront à la proportionnelle. Or ce qui fait la force du Sénat, c'est que les sénateurs sont élus à raison de leur personnalité et pas seulement de leur appartenance politique. Au lieu d'élus de terrain, on va se retrouver avec des apparatchiks. Il est dommage que le Sénat soit réduit à cela par vos petits calculs électoraux.
L'amendement n°47 rectifié est retiré.
M. Philippe Kaltenbach, rapporteur. - Défavorable à l'amendement de Mme Lipietz. Son amendement favoriserait certes la parité, et je m'étonne du peu d'allant de MM. Maurey et Cornu à son égard, mais la tradition du scrutin uninominal dans les départements à un ou deux sièges mérite d'être préservée.
M. Cornu, par provocation sans doute, propose de ne retenir la proportionnelle que dans les départements à cinq sièges. Défavorable, bien sûr, à son amendement. Dans les petits départements, la proportionnelle n'interdira pas aux petites listes de recueillir des voix. La gauche est attachée à des règles justes, comme elle l'était en 2000.
M. Manuel Valls, ministre. - Même avis défavorable.
M. Hervé Maurey. - L'amendement de Mme Lipietz a le mérite de la cohérence. Je réitère ma question au ministre : pourquoi se fait-il l'apôtre de modes de scrutin différents selon les élections ? Pourquoi deux poids deux mesures ? On l'a compris, c'est parce qu'il y a le feu au lac, on l'a vu avec les élections partielles.
Mme Odette Herviaux. - J'entends ici des propos surréalistes et contradictoires. Élue en 2001 à la proportionnelle, j'étais la seule femme tête de liste, je le dis à ceux qui pourraient, dans leur propre parti, faire un effort pour laisser plus de femmes dans cette position. J'ai tenu, en 2011, à présenter une liste, alors que la proportionnelle n'avait plus cours. Pour moi, la seule solution qui vaille en démocratie, c'est, comme l'a dit Mme Didier, la proportionnelle le plus souvent possible. J'ajoute qu'un sénateur ne représente pas la ville ou le milieu rural mais l'ensemble de son département. (Applaudissements à gauche)
M. Jean-Pierre Raffarin. - Vous êtes la démonstration vivante, madame, que le scrutin majoritaire, qui nous a élus, est le bon. Prenons de la hauteur et regardons le monde. Croyez-vous qu'Israël, avec une proportionnelle intégrale, fonctionne bien et démocratiquement ? La proportionnelle a des vertus mais elle n'est pas plus démocratique en tant que telle. Pour moi, ce qui compte, dans une démocratie, c'est que l'alternance soit possible. En matière de représentativité, il y a des dizaines de modèles, et aucun n'est parfait.
M. Jean-Pierre Michel. - Très bien !
M. Manuel Valls, ministre. - La particularité de la France est d'avoir des modes de scrutin différents selon les élections, voire au sein d'une même assemblée - voyez le Sénat. Nous avons la proportionnelle intégrale aux européennes, un scrutin mixte aux régionales, le scrutin majoritaire aux municipales... La capacité d'alternance, à laquelle je suis extrêmement attaché, se manifeste à l'Assemblée nationale.
Comment concilier le fait majoritaire et la représentation plurielle des opinions ? Voilà la question qui nous est posée. Les deux candidats en lice au deuxième tour de la présidentielle proposaient tous deux l'instillation d'une certaine dose de proportionnelle... Nous ne nous opposons ici que sur le seuil de la proportionnelle : nous voulons le rétablir dans les départements à trois sièges, constatant notamment le recul de la parité aux dernières élections sénatoriales. C'est la cohérence et c'est la logique. (Applaudissements sur les bancs socialistes)
M. Patrice Gélard. - Il n'est pas de scrutin bon ou mauvais, on l'apprend dès les premières semaines à la faculté de droit. Le législateur fait un choix et s'en mord souvent les doigts ensuite - c'est tout.
L'amendement n°50 rectifié n'est pas adopté.
M. Gérard Cornu. - Je vais retirer mon amendement, qui est effectivement provocateur, en soulignant que parler de proportionnelle pour trois sièges est un abus de langage ; l'élection s'apparentera à un scrutin à un tour où seules les têtes de liste seront élues...
L'amendement n°46 rectifié est retiré.
À la demande du groupe UMP, l'article 2 est mis aux voix par scrutin public.
M. le président. - Voici les résultats du scrutin :
Nombre de votants | 347 |
Nombre de suffrages exprimés | 347 |
Pour l'adoption | 176 |
Contre | 171 |
Le Sénat a adopté.
La séance est suspendue à 19 h 40.
présidence de M. Jean-Léonce Dupont,vice-président
La séance reprend à 21 h 45.
Mise au point au sujet d'un vote
M. Gérard Cornu. - Sur le scrutin 265, MM. Raffarin et Fouché, qui souhaitaient s'abstenir, ont été déclarés votant pour.
Discussion des articles (Suite)
ARTICLE 3
M. Jacques Berthou . - Cet article 3 vise à élargir le scrutin proportionnel pour, dites-vous monsieur le ministre, favoriser la parité et la pluralité politique. Malheureusement, il se trouve que les têtes de liste sont bien souvent des messieurs. Pour renforcer la parité, il ne suffit pas de légiférer : il faut changer les moeurs. Un grand nombre de listes favorisera la pluralité politique, certes. Du même coup, cela ouvrira aussi la porte à des élus extrémistes - je pense au Front national. Les vieux briscards se retrouveront têtes de liste, alors que le scrutin majoritaire permettait l'émergence de candidats reconnus par les électeurs pour leur action locale. Je m'interroge donc. Faut-il systématiquement favoriser l'élection de candidats qui ont pour seul mérite d'appartenir à un parti politique ? (Applaudissements sur quelques bancs socialistes, UDI-UC et UMP)
M. Manuel Valls, ministre. - Je comprends vos interrogations. Sur la parité, j'ai rappelé tout à l'heure que la proportionnelle peut être contournée par la multiplication des listes. Mais songez à ce que le Parlement a voté pour les municipales : cela fera plus de grands électeurs femmes. Songez aussi à la parité du scrutin cantonal, qui, avec des élus ancrés dans les territoires, changera des moeurs que nous n'ignorons pas. Il faut faire le pari de l'intelligence des territoires.
Les partis concourent à l'expression de la vie politique et il y a aussi besoin de personnalités. On a vu, ici, des exemples - Mme Herviaux, M. Sueur - élus quel que soit le mode de scrutin. Mme Herviaux, élue sous deux modes de scrutin, était-elle prisonnière des partis ? Non.
Je suis un élu de l'Essonne. Michel Besson a été élu en se présentant contre sa formation politique. Dans la région parisienne avec des grands électeurs qui sont souvent me dit-on des militants politiques...
La question qui se pose ici est celle des départements à trois sièges. Quelqu'un a pris, tout à l'heure, l'exemple du Loiret, qui compte des villes et des territoires ruraux. La proportionnelle donnera-t-elle la main aux partis ? Nullement. Les grands électeurs seront là, qui choisiront en leur âme et conscience. Je ne crois pas que la proportionnelle coupera l'ancrage des élus avec les grands électeurs. Tandis que la place des femmes gagnera du terrain...
La proportionnelle ne remettra pas en causse ce scrutin particulier qu'est le scrutin sénatorial où des élus de terrain élisent les sénateurs.
M. le président. - Amendement n°4, présenté par M. J.C. Gaudin et les membres du groupe UMP.
Supprimer cet article.
M. Jean-Jacques Hyest. - Parallélisme avec notre demande de suppression de l'article 2. Prétendre que l'ont fait la proportionnelle à trois sièges pour la parité, c'est ne pas manquer d'air quand on affirme dans le même temps que les personnalités pourront présenter leur propre liste... CQFD...
M. le président. - Amendement identique n°38, présenté par M. Zocchetto et les membres du groupe UDI-UC.
M. Yves Détraigne. - On ne va pas favoriser mais réduire le pluralisme. Le scrutin majoritaire permet de panacher, au contraire du scrutin de liste, bloqué.
Et il ne sera plus nécessaire d'avoir un ancrage territorial pour se faire élire : il suffira de se reposer sur l'aura de la tête de liste. C'est faire du Sénat une assemblée politique, comme l'Assemblée nationale, et se priver des avantages du bicamérisme. Au Sénat, le débat, plus serein, enrichit la navette. D'où notre amendement de suppression.
M. Philippe Kaltenbach, rapporteur. - Il n'y aurait donc, sur la liste à la proportionnelle que d'affreux apparatchiks ? Dans mon département, j'ai été élu sur une liste en raison de mon expérience d'élu de terrain. Et M. Jacques Gautier, pour citer un autre exemple, a obtenu, avec sa liste dissidente, presque autant de voix que M. Karoutchi.
Évitons de caricaturer : le monde urbain compte aussi des élus de terrain !
M. Manuel Valls, ministre. - Nous connaissons le risque que comporte le scrutin de liste. Mais le Sénat, entre 2001 et 2004, qui a connu cet épouvantable régime des partis, a-t-il changé de nature ? Non ! Le président Sueur en est un exemple vivant.
M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois. - C'est trop en jeter : trouvez-en quelques autres, il y en a.
M. Manuel Valls, ministre. - Sortons de la caricature. Mme Campion, élue de la partie la plus rurale de l'Essonne, est-elle un apparatchik ?
J'ai entendu l'hymne à la dépolitisation. Je reconnais que les débats ici sont plus calmes, et que la politique n'y prend aucune part, que MM. Pasqua, Karoutchi, Laurent, Rebsamen, ne sont rien d'autre que des élus de terrains, mais enfin...
La proportionnelle dans les départements à trois sénateurs ne changera pas la nature du Sénat.
M. Gérard Cornu. - Compte tenu de la configuration de nos départements à trois sièges, qui sont, globalement, ruraux, on ne va pas ainsi favoriser la parité. L'amendement sur la parité avec les suppléances, qui renforcera davantage la parité que cette disposition, a été voté à la presque unanimité. On cite M. Sueur, Mme Herviaux... Mais ce sont des élus de terrain. M. Sueur a été maire d'Orléans, son action était reconnue. Les électeurs ne s'y trompent pas.
Votre proportionnelle n'en aura que le nom : elle ressemblera davantage à l'élection à un tour car seules les têtes de liste seront élues. La question est finalement celle des têtes de liste ; voyez le cas de Mme Herviaux, qui a été élue au scrutin majoritaire et à la proportionnelle. Ne nous donnez pas de fausses excuses.
M. Christian Favier. - Sortons du manichéisme qui oppose élus de terrain et apparatchiks. Y aurait-il des élus sans militants ? Il n'est donc pas indigne que des militants puissent prétendre à l'élection. Dans mon département, on a su présenter une liste d'élus ayant une longue expérience de terrain, avec d'autres qui en avaient moins, comme Mme Benbassa, dont nul ne contestera qu'elle occupe parfaitement sa fonction. Si nos collègues de l'opposition tiennent tant à la parité, qu'ils déposent un amendement demandant que les têtes de liste soient des femmes. (Mme Laurence Cohen, rapporteure de la Délégation aux droits des femmes applaudit) Nous rejetterons les amendements de suppression de l'article.
M. Hervé Maurey. - Je veux rendre hommage à M. Berthou qui a dit tout haut ce que pensent tout bas nombre de ses collègues.
M. Jean-Jacques Mirassou. - Qu'en sais-tu ?
M. Hervé Maurey. - Plusieurs collègues socialistes m'ont dit qu'ils rejettent ce mode de scrutin, mais qu'ils le voteront, par discipline.
On va passer à une proportion de trois quarts de sénateurs élus à la proportionnelle contre la moitié aujourd'hui : les élus de terrain risquent de manquer cruellement à cette assemblée. La liste proportionnelle fait la part belle à la tête de liste. On ne parle pas ici des Hauts-de-Seine et de l'Essonne, qui élisent quatre à cinq sénateurs. Ce qui nous chiffonne, c'est ce seuil porté à trois sièges.
M. Marc Daunis. - Je suis surpris par l'appréciation que vous portez sur les grands électeurs. Vous semblez les juger incapables de distinguer, derrière la tête de liste, les talents. Ils céderaient, à vous entendre, aux sirènes de la « tête de gondole ». C'est leur faire bien peu d'honneur. Si je prends l'exemple des Alpes-Maritimes, un sénateur socialiste a pu être élu grâce à la proportionnelle qui favorise donc le pluralisme.
M. René-Paul Savary. - Nous n'arriverons pas à nous convaincre mais s'il n'y a pas automatiquement avantage sur le pluralisme ni sur la parité, pourquoi changer la loi ? Je ne referai pas l'article sur les exemples vivants, monsieur Sueur.
M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois. - Merci !
M. René-Paul Savary. - Dans les très gros départements, personne ne conteste la proportionnelle. La question est celle des départements moyens. Nous tenons à l'équilibre actuel. J'ai bien entendu l'argument de M. Favier : dans mon département, si une femme était tête de liste, nous remonterions à la seconde place : nous ne serions pas contre ! (Mouvements divers)
M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois. - Puisqu'il a été fait état, avec excès, de ma situation, je veux dire que j'ai eu le bonheur d'être élu député au scrutin majoritaire avant et après les découpages de M. Pasqua. Mais aussi à la proportionnelle.
M. Alain Néri. - C'est vrai !
M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois. - J'ai été élu sénateur au scrutin majoritaire et à la proportionnelle. Je n'ai cumulé les fonctions de maire et de sénateur qu'une année - mais mieux vaut en rester là pour M. Mézard. François Mitterrand disait qu'il n'y a pas de mode d'élection parfait. Ce qui n'est pas mauvais, c'est d'en changer de loin en loin. Qu'aurait donné la proportionnelle à l'Assemblée nationale si elle avait duré dix ans ? M. Daunis a cité l'exemple des Alpes-Maritimes qui prête à réfléchir : un million d'habitants, cinq sénateurs et aucun de l'opposition ? Dans mon département les huit parlementaires ont été un temps du même bord politique : est-ce une juste représentation de la population ? On pourrait parler des modes de scrutin à perte de vue mais à force les arguments finissent par s'annuler. Relativisons les positions trop absolues.
À la demande du groupe UMP, les amendements de suppression n°s4 et 38 sont mis aux voix par scrutin public.
M. le président. - Voici les résultats du scrutin :
Nombre de votants | 347 |
Nombre de suffrages exprimés | 346 |
Pour l'adoption | 170 |
Contre | 176 |
Le Sénat n'a pas adopté.
M. le président. - Amendement n°52 rectifié, présenté par Mme Lipietz et les membres du groupe écologiste.
Alinéa 2
Remplacer cet alinéa par deux alinéas ainsi rédigés :
« Dans les départements où sont élus trois sénateurs, l'un des sénateurs est élu au scrutin de liste proportionnel suivant la règle de la plus forte moyenne, sans panachage ni vote préférentiel, sur une liste nationale.
« Pour les deux autres sénateurs, l'élection a lieu au scrutin binominal majoritaire à deux tours selon les modalités définies par la loi n° 2013-403 du 17 mai 2013 relative à l'élection des conseillers départementaux, des conseillers municipaux et des délégués communautaires, et modifiant le calendrier électoral. »
Mme Hélène Lipietz. - Scrutin binominal au niveau départemental pour les deux premiers sièges, et proportionnel au niveau national pour le troisième : voilà ce que nous proposons, nous inspirant de l'exemple allemand pour atteindre les objectifs de parité et de pluralisme politique.
M. le président. - Amendement n°48 rectifié, présenté par MM. Cornu, de Montgolfier et Billard.
Alinéa 2
Remplacer le mot :
trois
par le mot :
cinq
M. Gérard Cornu. - Je vais retirer cet amendement, mais je m'étonne que l'on n'entende ici citer que des départements à cinq ou six sénateurs : nous ne sommes pas contre la proportionnelle dans ce cas, nous l'avons même votée. Ce que nous contestons, c'est l'élection de 75 % des sénateurs à la proportionnelle. En fixant le seuil à quatre sièges, nous étions parvenus à un équilibre harmonieux, que vous allez rompre. Ce n'est pas bon pour la démocratie.
L'amendement n°48 rectifié est retiré.
M. Philippe Kaltenbach, rapporteur. - La proposition de Mme Lipietz est baroque...
M. Jacques Mézard. - Excellent !
M. Philippe Kaltenbach, rapporteur. - ... qui propose un système complexe d'élection, de niveau local et national. Elle porte atteinte à l'égalité des sénateurs dans une matière qui relève de la loi organique. Avis défavorable.
M. Manuel Valls, ministre. - Même avis.
L'amendement n°52 rectifié n'est pas adopté.
M. François Patriat. - C'est avec gravité et tristesse que je m'apprête à voter pour la première fois contre un texte de ma formation politique. Je ne crois pas manquer de courage en politique : député de Beaune, j'ai voté la loi Evin, parce que je pensais qu'elle répondait à un problème de santé publique.
J'ai toujours été hostile à la proportionnelle. C'est au nom de ma conviction que je m'exprime ici, et au nom de la justice, que vous évoquez souvent, monsieur le ministre, comme le président de la République. Mais je vois, dans vos propos de ce soir, un peu de cynisme. Vous avez dit, tout à l'heure, que qui voulait être élu pouvait l'être...
M. Manuel Valls, ministre. - Je n'ai pas dit cela !
M. François Patriat. - ... citant Michel Berson. J'ai vu aussi un parlementaire européen débarqué de nulle part... et y repartir. Paris est une chose, où je vois que mes collègues se soucient d'être en position éligible, les départements ruraux une autre. Il faudra à certains parcourir des centaines de communes pour convaincre. Les grands principes ? Mais même ceux des radicaux s'effacent devant les petits calculs. La proportionnelle, peut-être, mais jamais à deux sièges !
Si le Sénat doit être élu à la proportionnelle, qu'on le dise et qu'on le fasse plutôt que de créer deux catégories de sénateurs. Il y a ceux à qui on donne des têtes de liste et ceux qui gagnent leur élection sur le terrain, voix par voix.
Avec gravité et tristesse, je voterai donc pour la première fois contre un texte présenté par le Gouvernement, contre cet article 3 et contre le projet de loi. (« Bravo ! » et applaudissements au centre et à droite)
M. Manuel Valls, ministre. - Je fais aussi de la politique depuis plusieurs années, je le dis à M. Patriat que j'estime. Alors, oublions le mot de cynisme. La droite a applaudi M. Patriat...
M. Jean-Claude Lenoir. - Nous est-il interdit d'applaudir ?
M. Gérard Cornu. - Avec sincérité !
M. Manuel Valls, ministre. - Je n'en doute pas, cela venait du fond du coeur.
J'ai pris un seul exemple ; mon propos était surtout de dire que nous ne faisons rien de nouveau : nous revenons à la loi de 2000, présentée par le gouvernement Jospin, dans lequel siégeait M. Patriat. Les modes de scrutin ne font pas les élections, je l'ai dit et répété.
M. Jean-Claude Lenoir. - Cela devrait vous inquiéter !
M. Manuel Valls, ministre. - Bien sûr, il y a la liberté de choix, mais reconnaissez, monsieur Patriat, que la gauche est constante et que ses propositions pour le Sénat sont logiques et cohérentes.
M. Jean-Claude Lenoir. - Décidément, M. Jospin reste la référence !
À la demande du groupe UMP, l'article 3 est mis aux voix par scrutin public.
M. le président. - Voici les résultats du scrutin :
Nombre de votants | 347 |
Nombre de suffrages exprimés | 346 |
Pour l'adoption | 176 |
Contre | 170 |
Le Sénat a adopté.
ARTICLES ADDITIONNELS
M. le président. - Amendement n°51 rectifié, présenté par Mme Lipietz et les membres du groupe écologiste.
Après l'article 3
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article L. 300 du code électoral est ainsi modifié :
1° Le premier alinéa est complété par deux phrases ainsi rédigées :
« L'ensemble des listes soutenues par un parti politique au niveau national respectent la parité au niveau de leurs têtes de liste. Si une liste est soutenue par plusieurs partis, c'est l'appartenance partisane du candidat en tête de liste qui est prise en compte. » ;
2° Après le premier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Un décret en Conseil d'État précise les modalités et les sanctions financières relatives au non-respect de la règle de parité des têtes de liste. »
Mme Hélène Lipietz. - Une réelle parité passera, nous avons été plusieurs à le dire, par la parité des têtes de liste au niveau national.
M. Philippe Kaltenbach, rapporteur. - Mme Lipietz est très créative. Néanmoins, son amendement pose de multiples problèmes pratiques : « un parti politique au niveau national » n'est pas une notion juridique ; on renvoie des sanctions financières à un décret, ce qui est contraire à l'article 4 de la Constitution.
M. Manuel Valls, ministre. - Même avis défavorable.
L'amendement n°51 rectifié n'est pas adopté.
M. le président. - Amendement n°14 rectifié bis, présenté par M. Détraigne, Mmes Férat, Morin-Desailly et Goy-Chavent et MM. J.L. Dupont, Merceron, Deneux, Bockel, Capo-Canellas, Tandonnet, Amoudry, Maurey, J. Boyer, Guerriau, Mercier et Dubois.
Après l'article 3
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Au premier alinéa de l'article L. 301 du code électoral, le mot : « deuxième » est remplacé par le mot : « troisième ».
M. Yves Détraigne. - Le délai de deux semaines laissé pour déposer sa candidature est trop proche du scrutin. On l'a vu en septembre 2011. Laissons quinze jours entre le dernier jour de dépôt de candidature et le jour du scrutin, quitte à réduire d'une semaine le temps laissé au dépôt de candidature.
M. Philippe Kaltenbach, rapporteur. - Favorable : la campagne pourra se faire dans de meilleures conditions.
M. Manuel Valls, ministre. - Cela va dans le sens d'une meilleure administration : favorable également.
M. Jean Louis Masson. - Cet amendement est excellent, il faudrait régler aussi la question de la liste définitive des grands électeurs, souvent connue très tardivement.
L'amendement n°14 rectifié bis est adopté et devient un article additionnel.
M. le président. - Amendement n°10 rectifié, présenté par MM. Mézard, Alfonsi, Baylet, Bertrand, C. Bourquin, Chevènement, Collin et Fortassin, Mme Laborde et MM. Mazars, Plancade, Requier, Tropeano, Vall et Vendasi.
Après l'article 3
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans les six mois suivant la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport détaillant par département et par catégorie le nombre d'électeurs composant le collège appelé à élire les sénateurs.
M. Jacques Mézard. - Nous avons déposé cet amendement pour attirer l'attention sur l'insuffisance de l'étude d'impact annexée au projet de loi : elle ne comporte pas, de façon détaillée par département, le nombre supplémentaire de délégués des conseils municipaux.
Vos services, monsieur le ministre, m'ont fourni ces éléments : la progression de délégués est de 0 % dans le Cantal, de 0,7 % en Corrèze et, à Paris, elle est supérieure à 20 %. J'aurais aimé le savoir plus tôt mais mon amendement n'a plus de raison d'être.
L'amendement n°10 rectifié est retiré.
ARTICLE 4
M. le président. - Amendement n°5, présenté par M. J.C. Gaudin et les membres du groupe UMP.
Supprimer cet article.
M. Gérard Cornu. - Amendement de cohérence. Monsieur le ministre, au Sénat, veuillez croire que nous savons être sincères dans nos applaudissements, qui ne sont pas politiciens ni provocateurs, comme vous nous l'avez reproché. (Applaudissements à droite)
M. Philippe Kaltenbach, rapporteur. - Défavorable à cet amendement de suppression.
M. Manuel Valls, ministre. - Même avis.
À la demande du groupe UMP, l'amendement n°5 est mis aux voix par scrutin public.
M. le président. - Voici les résultats du scrutin :
Nombre de votants | 346 |
Nombre de suffrages exprimés | 345 |
Pour l'adoption | 168 |
Contre | 177 |
Le Sénat n'a pas adopté.
À la demande du groupe UMP, l'article 4 est mis aux voix par scrutin public.
M. le président. - Voici les résultats du scrutin :
Nombre de votants | 347 |
Nombre de suffrages exprimés | 346 |
Pour l'adoption | 177 |
Contre | 169 |
Le Sénat a adopté.
ARTICLES ADDITIONNELS
M. le président. - Amendement n°35 rectifié, présenté par MM. Maurey, Détraigne, Merceron, Guerriau, Deneux, Marseille et Capo-Canellas et Mme Férat.
Après l'article 4
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
La présente loi s'applique à compter du premier renouvellement du Sénat suivant le 1er janvier 2017.
M. Hervé Maurey. - Si cet amendement était soutenu par la majorité sénatoriale et le Gouvernement, ce dont je ne doute pas, cela montrerait que ce texte est exempt de toute arrière-pensée politicienne. De plus, 2017 est la date prévue pour le projet de loi sur l'interdiction du cumul des mandats, ce serait cohérent.
M. le président. - Amendement identique n°56 rectifié, présenté par MM. de Montgolfier, Billard et Cornu.
M. Gérard Cornu. - On a beaucoup parlé de cohérence. Or nous avons adopté des mesures lourdes ce soir puisque 75 % des sénateurs seront...
Mme Jacqueline Gourault. - ... des femmes ?
M. Gérard Cornu. - ... élus à la proportionnelle. Mieux vaut repousser l'entrée en vigueur de ce texte à 2017, ce serait un acte de bonne foi.
M. Philippe Kaltenbach, rapporteur. - Rejet, (on feint de s'en étonner à droite) car le texte apporte de simples ajustements, un délai de plusieurs années ne se justifie pas. En outre, la modification intervient plus d'un an avant des élections sénatoriales, ce qui est conforme à la tradition et à l'usage républicain. Enfin, tous les textes modifiant le scrutin sénatorial se sont appliqués aux élections suivantes. Il n'y a pas lieu de faire une exception.
M. Manuel Valls, ministre. - J'ajoute que M. Poncelet et ses collègues avaient déposé leur texte le 22 mai 2003, pour une réforme devant prendre effet aux élections de septembre 2004, soit un délai plus court que celui que nous avons observé.
Quant au cumul des mandats, je serai ravi d'en discuter bientôt avec vous. (Sourires)
M. Jean-Jacques Hyest. - Pendant la session extraordinaire !
Les amendements identiques nos35 rectifié et 56 rectifié ne sont pas adoptés.
INTITULÉ DU PROJET DE LOI
M. le président. - Amendement n°19 rectifié, présenté par Mmes Cohen et Gonthier-Maurin.
Après les mots :
l'élection des
insérer les mots :
sénatrices et des
Mme Laurence Cohen. - Je me réjouis des déclarations en faveur de la parité. On m'objectera qu'il existe des règles de grammaire. Soit, mais la primauté du masculin sur le féminin s'est imposée sous l'impulsion d'un abbé qui, se piquant de grammaire, déclarait en 1675 « Quand les deux genres se rencontrent, il faut que le plus noble l'emporte ». Auparavant, la règle de proximité prévalait, en grec, en latin comme en ancien français, et l'on disait « Les hommes et les femmes sont belles » ou bien « les femmes et les hommes sont beaux ». Un peu d'histoire de la langue ne fait pas de mal à cette heure... (Applaudissements)
M. Philippe Kaltenbach, rapporteur. - La commission a émis un avis défavorable contre l'avis de son président et de son rapporteur.
M. Manuel Valls, ministre. - Sagesse !
M. le président. - Mot qui est du genre féminin, comme chacun sait. (Sourires)
M. Jean-Jacques Hyest. - Franchement, cet amendement ne change rien mais supposerait de réviser la Constitution à Versailles. Partout, on y lit, madame la rapporteure, « les députés » et « les sénateurs », et « le président de la République ». Franchement, faut-il aller à Versailles pour cela ? Sans doute, cet été, si nous nous ennuyons... Je ne m'opposerai pas à cet amendement mais tout de même !
M. Gérard Cornu. - Je le voterai même si je trouve dégradant que la modification se borne à modifier l'intitulé du projet de loi.
M. Yves Détraigne. - Je suis issu des juridictions financières. Des « conseillères-maîtresses » à la Cour des comptes ? Cela sonne ridicule. Revenons à la langue : il n'existe pas de neutre. Les mots sénateur et député ne désignent que des fonctions ; vouloir tout féminiser est un peu excessif.
Mme Catherine Troendle. - Nul besoin de féminiser mon titre de sénateur pour savoir que je suis une femme. J'ajoute que, lorsque paraît un rapport du sénateur Troendle, il est lu sans préjugé parce que, des préjugés contre les femmes, il y en a encore. Je revendique haut et fort le masculin de la fonction !
Après une épreuve à main levée déclarée douteuse, l'amendement n°19 rectifié, mis aux voix par assis et levé, n'est pas adopté.
Interventions sur l'ensemble
M. Christian Favier . - Le groupe CRC votera ce texte avec conviction. Faire progresser la proportionnelle au Sénat renforcera la démocratie, la parité et le pluralisme. Cependant, pour résoudre la crise politique, il faudra donner une tout autre ampleur à la rénovation de nos institutions politiques. Cela passera, entre autres, par l'extension de la proportionnelle à l'Assemblée nationale et par le renforcement du monde urbain dans le collège électoral du Sénat. En attendant, nous voterons ce texte a minima. (Applaudissements sur les bancs CRC)
M. Jean-Jacques Hyest . - Ce texte comporte deux éléments majeurs. Le premier est un délégué supplémentaire par tranche de 800 habitants dans les communes de plus de 30 000 habitants, ce qui bouleversera les choses dans les départements avec des grandes agglomérations. Nous aurions apprécié d'avoir une étude d'impact précise. Le deuxième est l'abaissement du seuil de la proportionnelle aux départements élisant trois sénateurs. Cela provoquera la multiplication des listes et nous avons entendu ce soir des sénateurs qui estiment ne pas avoir démérité et qui seront dans l'impossibilité d'être réélus.
La parité ? À quatre sièges, oui, mais à trois elle n'est pas vraiment assurée. Pour toutes ces raisons, nous voterons contre ce mauvais projet de loi. (Applaudissements sur les bancs UMP)
M. Jacques Mézard . - Cet intéressant débat nous a donné le temps de la réflexion - au-delà de ce qui a eu lieu, à l'arraché, sur la question de la suppléance - n'est-ce pas monsieur Hyest... Mais il ne faut pas se voiler la face. Sous l'excellente IIIe République et la non moins excellente IVe République, puis sous la Ve République que je ne qualifierai pas (sourires), chaque majorité a essayé de préserver ou de conforter son avance. Tout le reste est littérature et cette littérature est parfois fort mauvaise. En 2000, une majorité a réformé le scrutin sénatorial - M. Patriat en faisait partie.
M. François Patriat. - Je n'ai pas voté ce texte !
M. Jacques Mézard. - Mais vous apparteniez à la majorité... En 2004, la nouvelle majorité a considéré qu'il fallait remonter le seuil de la proportionnelle à quatre sièges. Cela ne lui a pas forcément réussi. En 2008, nous avons vu arriver un sénateur de la magnifique île de Saint-Martin et un autre de la non moins magnifique île de Saint-Barthélemy. Le but était toujours le même. Et récemment, on a vu un député des Français de l'étranger élu avec 13 % de votants. C'est la réalité de la République. Tant que les deux partis majoritaires ne se mettront pas d'accord pour ne pas modifier les scrutins, ils seront changés à chaque alternance.
M. Gérard Cornu. - Et le RDSE ?
M. Jacques Mézard. - Il assume. J'assume. Nous sommes là pour voter quand nous l'estimons juste.
Un texte a minima ? Je considère que c'est un texte maximum. Nous avons évité le pire, jusqu'à la proportionnelle dans les départements à deux sièges, monsieur Patriat. Proposition déraisonnable !
M. François Patriat. - Mais juste ! Je défends, comme vous, des principes.
M. Jacques Mézard. - Vous défendez vos intérêts. Chacun ici le fait. Ne faites pas de procès d'intention aux autres. La proportionnelle dans les départements à deux sièges, c'est la mort du pluralisme.
M. Hervé Maurey . - Je salue le courage de M. Patriat qui, avec gravité et solennité, a su trouver des mots justes.
M. Marc Daunis. - Quel hommage sincère !
M. Hervé Maurey. - Tout à fait. Le suspens était à son comble : qu'allait faire le RDSE ? En commission comme en discussion générale, le président Mézard avait été si sévère que nous l'avions applaudi. Mais le mystère n'est plus : le groupe RDSE votera pour. Dont acte. Mais je lui rappelle qu'en droit, nul ne peut se prévaloir des turpitudes d'autrui... Mais peut-être est-ce le progrès dans la parité, accompli avec notre amendement, qui l'a déterminé...
En ramenant le seuil de la proportionnelle à trois sièges, on va amoindrir la liberté des grands électeurs, renforcer le poids des appareils et transformer en profondeur le rôle de notre Haute assemblée. Renforcer la parité, le pluralisme ? Autant de trompe-l'oeil qui n'auront pas d'effet - nous le verrons en 2014. La réalité, c'est l'arrière-pensée électorale. Mais ce n'est pas ce tripatouillage... (Exclamations à droite) Le mot vous gêne ? Ce n'est pas ce tripatouillage qui canalisera la colère des élus qui vont, pour la première fois de leur histoire, subir des baisses de dotations...
M. Manuel Valls, ministre. - C'est faux !
M. Hervé Maurey. - ... quand vous aviez fait campagne contre leur gel ; elles ne sont pas dégelées, elles fondent... Sans parler de la réforme des rythmes scolaires que vous leur avez imposée. La colère des élus gronde. Vous le verrez en 2014 ! (Applaudissements au centre et à droite)
M. François Rebsamen. - Et vous, donc !
À la demande du groupe UMP, l'ensemble du projet de loi est mis aux voix par scrutin public.
M. le président. - Voici les résultats du scrutin :
Nombre de votants | 346 |
Nombre de suffrages exprimés | 345 |
Pour l'adoption | 175 |
Contre | 170 |
Le Sénat a adopté.
Motion d'ordre
M. le président. - Par lettre en date du 18 juin 2013, M. Vidalies, ministre des relations avec le Parlement, a demandé le retrait de l'ordre du jour de la présente séance de la proposition de loi portant diverses dispositions relatives aux collectivités locales.
M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois. - Je rappelle que M. Vidalies a pris devant la Conférence des présidents l'engagement que cette proposition de loi irait à son terme, si le Parlement en décide ainsi, lors de la session extraordinaire. Je comprends donc que ce texte n'est pas « retiré », mais « reporté ».
M. Manuel Valls, ministre. - M. le président Sueur a parfaitement compris l'esprit de la lettre de M. Vidalies. Il ne s'agit que d'un report.
Je remercie le Sénat de la qualité du débat d'aujourd'hui, et du soutien de la majorité à cette réforme importante pour votre assemblée.
Prochaine séance aujourd'hui, mercredi 19 juin 2013, à 14 h 30.
La séance est levée à minuit vingt-cinq.
Jean-Luc Dealberto
Directeur des comptes rendus analytiques
ORDRE DU JOUR
du mercredi 19 juin 2013
Séance publique
À 14 HEURES 30
Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, relatif à l'enseignement supérieur et à la recherche (n° 614, 2012-2013).
Rapport de Mme Dominique Gillot, fait au nom de la commission de la culture, de l'éducation et de la communication (n° 659, 2012-2013).
Texte de la commission (n° 660, 2012-2013).
Avis de Mme Valérie Létard, fait au nom de la commission des affaires économiques (n° 663, 2012-2013).
Rapport d'information de Mme Françoise Laborde, fait au nom de la délégation aux droits des femmes (n° 655, 2012-2013).
À 21 HEURES 30
Débat préalable à la réunion du Conseil européen des 27 et 28 juin 2013