Débat sur les dispositifs médicaux implantables
M. le président. - L'ordre du jour appelle un débat sur les dispositifs médicaux implantables et les interventions à visée esthétique.
Mme Chantal Jouanno, présidente de la mission commune d'information portant sur les dispositifs médicaux implantables et les interventions à visée esthétique. - Le rapport a été adopté à l'unanimité des membres de la mission, et soutenu pleinement par la commission des affaires sociales. Notre mission commune d'information est née du drame des prothèses PIP. On ne peut que saluer la décision du précédent gouvernement de proposer l'explantation préventive de ces prothèses. Une mission de l'Igas doit dresser le bilan de cette crise sanitaire. Où en est-on, madame la ministre ?
Le champ de notre mission a toutefois été élargi à l'ensemble des interventions à visée esthétique, qui vont du travail des esthéticiennes aux opérations chirurgicales. Il y a un véritable enjeu de santé publique : entre 160 000 et 800 000 références recensées ; un marché de 21 milliards d'euros selon l'Igas ; 300 000 actes de chirurgie et de médecine esthétique par an ; 16 % de la population française fréquente les cabines de bronzage... Il s'agit bien d'un phénomène de société et non d'un choix individuel de prise de risque. Nous avons mené une cinquantaine d'auditions, nous nous sommes rendus aux États-Unis et au Danemark, nous avons correspondu avec l'Australie, interrogé des psychologues, des sociologues, des historiens, pour éclairer les enjeux sociétaux du débat. L'apparence physique est aujourd'hui une norme -qui a même un impact sur le taux d'embauche !
Les règles européennes sont en cours de révision. Le calendrier est donc opportun. Nous pouvons proposer une voie médiane entre le système européen, parfois trop libre-échangiste, et le système américain, qui fait davantage primer la sécurité sur l'innovation.
Les perturbateurs endocriniens, sujet qui me tient à coeur, ont fait l'objet d'un rapport de M. Barbier, éloquemment intitulé Le temps de la précaution. En la matière, les dispositifs médicaux ne sont pas mieux encadrés que les jouets ! L'impact sanitaire du bisphénol A est catastrophique sur le foetus et le jeune enfant. J'y reviendrai lors de l'examen de la proposition de loi sur le bisphénol A, pour proposer de l'interdire.
Un mot sur l'esthétique. Ce que nous avons découvert est assez inquiétant, effrayant même. En la matière, toute moralisation est inutile, injuste. La volonté de modifier le corps a existé de tout temps et se développera inévitablement avec le vieillissement de la population. Mais nous devons éclairer l'opinion, clarifier les frontières entre esthétique et médecine, ne pas hésiter à interdire quand la sécurité est en cause.
Je vous invite à un débat ouvert autour des propositions audacieuses et pragmatiques du rapporteur. Une fois de plus, le Sénat va montrer qu'il a un temps d'avance. (Applaudissements)
M. Bernard Cazeau, rapporteur de la mission commune d'information portant sur les dispositifs médicaux implantables et les interventions à visée esthétique . - À l'origine de cette mission commune d'information, il y a le scandale des prothèses PIP : plus qu'une simple fraude, c'est un désastre sanitaire. Fin juillet, plus de 12 000 Françaises avaient fait retirer leurs prothèses ; des anomalies ont été relevées dans 22 % des cas, bien plus qu'annoncé. Lors de la discussion de la loi sur le médicament, plusieurs de nos collègues avaient prédit que le dispositif médical serait au coeur du prochain scandale sanitaire. Les faits leur ont donné raison.
L'ampleur inédite de l'affaire PIP a montré combien l'apparence et la beauté, même artificielles, devenaient une préoccupation importante de nos concitoyens -ce qui nous a conduit à nous interroger sur la réglementation des interventions à visée esthétique. Nous nous sommes attachés à formuler des propositions concrètes, avec la sécurité pour mot d'ordre dès lors qu'il était question de santé publique.
Un mot des cabines de bronzage, que nous proposons d'interdire : elles sont reconnues comme facteurs de pathologies cutanées, jusqu'au mélanome. On nous dit qu'elles sont moins mortelles que la chasse, la baignade ou le tabac. Mais leur interdiction est légitime -et d'ailleurs toujours en vigueur au Brésil.
En matière de dispositif implantable, dès lors qu'il n'y a pas urgence, la sécurité doit prévaloir. L'affaire PIP a montré que les mécanismes de contrôle étaient défaillants. La réglementation européenne est en cours de révision. La négociation a abouti la semaine dernière... Nous nous étions rendus à Bruxelles ; la Commission va dans notre sens -sécurité et innovation- et l'essentiel de nos recommandations sont reprises : surveillance accrue des instances d'évaluation, multiplication des visites inopinées, accroissement des pouvoirs des organismes notifiés, ouverture aux professionnels de santé et au public de la base de données européennes sur les produits, renforcement de la traçabilité par un identifiant unique, intensification des exigences relatives aux preuves cliniques, amélioration de la coordination entre autorités nationales de surveillance, interdiction aux fabricants de changer d'organisme notifié quand bon lui semble -la certification reposerait sur un accord signé par les trois parties.
Mais la réglementation européenne ne sera pas en vigueur avant 2019... Rien en nous empêche d'agir sans attendre ni nous cacher derrière Bruxelles. Nous ne tenons pas de registre exhaustif des dispositifs ; il faut rendre le système de recueil plus simple et rappeler les professionnels de santé à leurs responsabilités. S'il y a des difficultés juridiques, elles peuvent être surmontées. Quelles initiatives comptez-vous prendre, madame la ministre ?
Il faut simplifier la déclaration d'incidents graves et apporter davantage de transparence dans les liens d'intérêt. La loi relative au médicament contient des dispositions intéressantes ; l'affaire récente des sondes de stimulation cardiaque montre que le dispositif fonctionne. À quand le rapport sur les dispositifs médicaux prévu à l'article 41 de la loi ?
En matière de médecine esthétique, c'est la jungle. Le marché est en expansion constante, de nouvelles techniques apparaissent -dernier exemple, la brosse vibrante antirides, censée accroître l'efficacité de la crème de jour...
Mme Nathalie Goulet. - Génial !
M. Bernard Cazeau, rapporteur. - Bel exemple de marketing... Pour renforcer la sécurité, nous préconisons de réserver les actes potentiellement dangereux aux seuls médecins -à l'instar de la dépilation par lumière pulsée au-delà d'une certaine puissance. La médecine esthétique ne doit pas être une spécialité, mais suppose une formation adaptée. Un diplôme d'études spécialisées complémentaire serait bienvenu.
Il faut instituer un marquage CE pour ces produits ; il n'y a aucune raison de disposer, en France, d'une centaine de produits à base d'acide hyaluronique, alors qu'une dizaine seulement est sur le marché aux États-Unis. Il faut aussi établir une base de données des dangers que peuvent présenter ces produits ou actes. Enfin, il faudrait instaurer un carnet de soins recensant les interventions subies, pour éviter que certains n'en abusent. Sans méconnaître la réalité économique du secteur, il faut remettre la sécurité au centre ! Comme dit le vieil adage, primum non nocere. (Applaudissements)
Mme Laurence Cohen . - Je suis satisfaite que nous accordions à ce sujet une place qui correspond à son enjeu, fondamental, pour notre système de santé. Les nombreuses auditions de la mission commune d'information ont été de qualité. Je tiens à remercier la présidente et le rapporteur. Le scandale PIP a mis en lumière les lacunes du système : elles ont permis à l'appétit de lucre de se jouer pendant vingt ans de tout contrôle. Il y a eu trois mille cas de rupture et douze mille retraits de prothèses. Les souffrances physiques et aussi psychologiques endurées par les victimes sont très fortes.
Je suis favorable, comme le préconise le rapport, à ce que l'Igas soit chargée de réaliser un bilan de la gestion de cette crise, dans l'intérêt des victimes comme des futures patientes.
Je suis favorable au renforcement des contrôles sur les dispositifs médicaux dès leur mise sur le marché et pendant toute leur utilisation. Contrairement aux médicaments soumis à l'AMM, les dispositifs médicaux implantables sont exempts de textes. Nous attendons encore la parution des décrets de la loi sur le médicament de décembre 2011, qui concerne ces dispositifs.
Nous notons avec intérêt les propositions de la Commission européenne visant à « renforcer sensiblement les contrôles », selon le commissaire à la santé. On peut regretter qu'il n'y ait pas d'AMM pour les dispositifs à haut risque.
Mme Nathalie Goulet. - C'est vrai.
Mme Laurence Cohen. - Il est de notre responsabilité d'anticiper les nouveaux dangers. C'est un secteur économique florissant. Notre rapport au corps, au vieillissement, à la beauté entraîne un recours croissant à des pratiques que l'on croit encadrées mais qui sont dangereuses. Nous ne pouvons ignorer les risques des cabines de bronzage. Leur interdiction -hors usage médical- sera impopulaire, mais elle est nécessaire.
L'autorité de contrôle doit jouer son rôle de gendarme sanitaire ; il faut assurer la formation des professionnels et s'efforcer de faire le partage entre médical et esthétique.
Il est impératif de mettre fin aux conflits d'intérêts et de renforcer les contrôles et les inspections. Les organismes qui en sont chargés doivent avoir les moyens de remplir leurs missions.
Enfin, il est primordial de protéger les lanceurs d'alerte des attaques virulentes dont ils peuvent être la cible. (Applaudissements)
Mme Nathalie Goulet . - Je regrette que notre débat n'ait pas attiré plus de monde -ma confession en sera plus discrète ! Vieillir m'insupporte. Botox, liposuccion, lifting, comblement de rides : toutes ces techniques esthétiques ont trouvé en moi une consommatrice assidue ! Je suis en outre végétarienne et pratique le sport quotidiennement : c'est dire si mon apparence m'importe et on comprend mon appétence pour cette mission !
La chirurgie peut réparer des lésions sérieuses, au-delà du souci de l'apparence qui domine notre société de consommation, avec un marché considérable. Sous le diktat de la mode de l'éternelle jeunesse, la notion de patient s'efface devant celle de consommateur. Nous sommes passés de Faust à l'incroyable famille Kardashian !
En France, en 2009, 300 000 actes de chirurgie esthétique ont été réalisés. La France arrive au quatorzième rang des pays les plus consommateurs en la matière. Les actes de médecine esthétique et ceux des esthéticiennes sont en croissance constante, sans parler des cabines de bronzage dans certains clubs de gym. Je me suis rangée à l'avis du rapporteur quant à leur interdiction. Il est vrai que je ne les utilise pas !
Ce marché se banalise, avec sa loi de l'offre et de la demande, les publicités notamment sur internet, où il y aurait beaucoup à faire. Les bars de blanchiment des dents pourraient réserver de mauvaises surprises à l'avenir.
Vice-présidente de la commission sur le Mediator, j'ai regretté l'absence totale d'attention à des propositions avancées dix ans auparavant, à propos du Vioxx, qui auraient évité des conséquences fâcheuses.
Madame la ministre, une cellule de suivi, pas forcément institutionnelle, des mesures préconisées par ce rapport devrait être créée. L'information doit être complète et cohérente. Une communication à l'égard des médecins et du public est nécessaire, à l'image de la campagne « Les antibiotiques, ce n'est pas automatique ».
Le législateur a confié au pouvoir réglementaire les règles relatives à la formation des personnes habilitées à dispenser des soins esthétiques. Vous avez dans vos cartons un projet de décret relatif à l'article 61 de la loi HPST qui soumet la pratique des actes esthétiques, si elle présente des risques pour la santé, à réglementation : il suffit de supprimer l'incise pour marquer une volonté politique et signifier que les actes esthétiques ne doivent pas être banalisés.
Les comblements par injections, ou rayonnements ou ultrasons sont des mesures assez lourdes, qui nécessitent une vigilance. Ce ne sont pas des procédés banaux. La formation est aussi une préoccupation importante. L'appétence pour la médecine esthétique, dans un contexte d'aggravation du déséquilibre de la démographie médicale, augmente les risques de désertification médicale.
L'acceptation du risque par un patient n'est pas la même selon qu'il subit un acte à visée esthétique ou à visée réparatrice. Je pense aux rhinoplasties de confort, qui passent ici ou là pour un déplacement de cloison... aux frais de la sécurité sociale.
Le tourisme esthétique à l'étranger entraîne 20 % de soins sur le territoire national, à la charge de la collectivité nationale. C'est anormal. Pourquoi notre système de santé paierait-il les suites d'une intervention malheureuse réalisée au Brésil ou en Thaïlande ?
Sur ce thème, l'introduction dans notre ordre juridique de class actions à la française me paraît indispensable. Vous ne pouvez pas laisser les gens seuls face à des entreprises qui ont beaucoup plus de moyens qu'eux pour se défendre.
Cette mission fut passionnante. Vous savez que je dis ce que je pense. Merci, madame la présidente, pour l'avoir menée à bon port, en espérant que ce ne sera qu'une escale provisoire. (Applaudissements)
M. Gilbert Barbier . - Pour ma part, je ne suis pas utilisateur...
Mme Chantal Jouanno, présidente de la mission commune d'information. - Cela viendra !
M. Gilbert Barbier. - Je tiens à remercier Mme Jouanno pour cet excellent travail. L'affaire PIP a soulevé de nombreuses interrogations. Pourquoi les pouvoirs publics n'ont-ils pris aucune mesure lorsqu'en 2000 l'autorité fédérale américaine a interdit l'utilisation de ces implants sur son territoire ? Pourquoi l'Afssaps n'a-t-elle pas ordonné le retrait des implants plus tôt ? Peu après l'affaire du Mediator, la polémique sur la sécurité sanitaire dans notre pays a été relancée. Certes, il s'agit d'une fraude manifeste que j'espère isolée et qui ne doit pas jeter l'opprobre sur l'ensemble des dispositifs de santé.
Il y a un an nous étions quelques-uns à demander le renforcement de la sécurité sanitaire qui nous paraissait insuffisante. Nos craintes se sont avérées. Le rapport de la mission comprend 38 recommandations.
Les conditions de mise sur le marché des dispositifs médicaux implantables doivent être revues. Certains organismes sont plus conciliants que d'autres. Il est facile à des entreprises peu scrupuleuses d'y avoir recours. Les critères de sélection de ces organismes notifiés doivent être revus. La création d'une liste positive offrirait un gage de transparence et de sécurité. Les contrôles inopinés doivent être multipliés. La question de l'indépendance de l'Afssaps et de ses experts, en cours de restructuration, doit être posée.
Il existe en Australie et dans certains pays nordiques des registres de traçabilité, qui imposent la participation des praticiens et utilisateurs. La France accuse un retard considérable. Le suivi des dispositifs médicaux implantables à l'hôpital doit être favorisé.
J'espère que les propositions de la Commission européenne seront rapidement validées par le Parlement européen.
En France, il existe plus d'une centaine de produits injectables de comblement des rides, contre six aux États-Unis. Ces produits doivent répondre aux mêmes exigences que les médicaments.
L'interdiction des cabines de bronzage est urgente. Agissons sans tarder, madame la ministre ! (Applaudissements)
Mme Aline Archimbaud . - L'automne dernier, le Sénat menait une belle bataille sur la sécurité sanitaire et les produits de santé. Malheureusement notre texte a été mis en pièces par l'Assemblée nationale..
Notre groupe souscrit entièrement aux 38 propositions du rapport de la mission commune d'information. L'Afssaps a clairement dysfonctionné dans l'affaire PIP, sans que les conséquences en aient été tirées. Il a fallu attendre 2010 pour que l'agence exige la suspension puis le retrait des implants PIP.
Ma collègue Marie-Christine Blandin présentera prochainement une proposition de loi qui renforcera la protection des lanceurs d'alerte, soumis à des pressions.
Certaines victimes de PIP, confrontées à des difficultés financières, ne peuvent financer l'explantation. Certains d'entre elles vivent dans l'angoisse, ne connaissant pas l'état des prothèses qu'elles portent. Notre groupe estime que le scandale continue. Cette barrière sociale fait obstacle à l'accès aux soins.
La proposition n°5 relative à l'interdiction des CMR de catégorie 2 dans les dispositifs médicaux destinés aux nourrissons, jeunes enfants et femmes enceintes a retenu notre attention. Il faudrait aller encore plus loin. Le DEHP est particulièrement dangereux. Des risques particuliers d'intoxication aiguë menacent les nouveau-nés en soins intensifs exposés à de fortes doses de ce produit, qui doit être éliminé au plus vite des hôpitaux et de notre paysage de soins. (Applaudissements)
M. René-Paul Savary . - Ce rapport d'information est de grande qualité. Comme l'a dit Mme Jouanno, c'est un enjeu sociétal.
Notre système d'autorisation et de surveillance n'est plus à la hauteur des enjeux. Certaines règles existent : organismes notifiés, études scientifiques, codage des actes, investigations cliniques, information des praticiens, etc. mais elles ne sont plus adaptées à la situation actuelle.
Il s'agit de prendre en compte les préconisations de la mission commune d'information, sans pénaliser la recherche. Les auditions auxquelles j'ai participé montrent combien l'édifice est défaillant. Des registres existent, mais dans d'autres pays. L'un de nos grands défauts est l'absence de réactivité. Les organismes notifiés n'ont pas l'indépendance qui garantirait la neutralité de leur expertise. Les flux financiers ne semblent pas suffisamment transparents. Des contrôles sont prévus, mais les organismes sont prévenus avant leur passage !
J'ai beaucoup appris de ces auditions. Je témoigne du travail accompli. Nul ne détient toute la vérité. Ce rapport replace l'usager dans un cadre réglementaire mieux adapté, sans bloquer l'innovation, tout en conciliant des intérêts divergents. L'exercice sera réussi s'il est suivi. Il en va de la crédibilité de nos institutions. (Applaudissements)
Mme Dominique Bertinotti, ministre déléguée auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée de la famille . - Veuillez excuser Mme la ministre de la santé, retenue à Matignon pour le séminaire gouvernemental sur la modernisation de l'État.
Votre rapport est riche d'enseignements et précieux pour l'approfondissement de notre réflexion. Vous avez rappelé le contexte de son déclenchement : la découverte des prothèses mammaires PIP, fabriquées de façon contraire aux procédures d'agrément du produit. Cette affaire est entre les mains de la justice, il ne nous appartient pas de la commenter.
Vous avez élargi votre mission aux interventions à visée esthétique. Comme pour le médicament, la sécurité des personnes doit être au centre du processus de maintien ou de mise sur le marché des dispositifs médicaux implantables. Nous ne pouvons pas traiter de la même manière les bandages et les implants. Les fabricants sont des PME, porteuses d'innovations, il ne faut pas contraindre sans un examen minutieux.
La demande de soins esthétiques est en croissance constante. Madame Goulet, vous en êtes un exemple quasi parfait ! La population concernée est de plus en plus jeune, et les hommes y recourent de plus en plus. Pas moins de 13,4 % des Français entre 15 et 75 ans déclaraient en 2010 avoir fait usage au moins une fois des UV artificiels. La simplicité apparente des procédures et les gains qu'ils rapportent attirent des médecins et d'autres personnes vers les soins esthétiques.
Votre mission attire justement l'attention sur les risques encourus. Vous avez conduit un travail approfondi. Nous sommes face à une réglementation européenne davantage inspirée par le principe de libre circulation des produits que par celui de la sécurité des personnes, qui devrait pourtant être privilégié. Le nivellement par le bas est à craindre. À aucun moment, un regard transparent et indépendant n'est porté par les autorités compétentes, qui n'interviennent bien souvent qu'au stade du remboursement ou lorsqu'une alerte est lancée.
Vous avez formulé 38 recommandations argumentées. Elles imposent des actions à plusieurs niveaux : national et européen ; en amont de la distribution et a posteriori. C'est une palette complète de mesures. La protection des patients et la sécurité des procédures sont les préoccupations constantes de la ministre de la santé. La totalité des textes d'application de la loi du 29 décembre 2011 sont signés et seront prochainement publiés.
La loi institue une autorisation préalable des publicités pour les produits les plus à risque et elle permet des contrôles inopinés. Elle instaure les déclarations d'intérêt et la transparence des liens entre entreprises partenaires de la santé. Un groupe de travail sur la publication des liens et des conventions a été mis en place par la ministre. La réglementation sur les cabines de bronzage sera renforcée. Nous attendons un avis de la HAS, qui sera rendu courant 2013 sur ce sujet.
La France portera sa voix au niveau européen. La ministre s'est entretenue avec ses homologues afin de peser sur les discussions en cours sur le projet de règlement européen sur les dispositifs médicaux, qui corrige certaines déficiences signalées précédemment. Il est nécessaire d'aller plus loin dans le contrôle préalable par les autorités nationales des dispositifs les plus à risque. Les propositions de la commission nous semblent encore insuffisantes à cet égard. Il faut accélérer le partage d'informations entre les autorités compétentes pour qu'elles accomplissent leur mission de police sanitaire.
La confiance de nos concitoyens, entamée par de trop nombreux scandales, doit être reconstruite. Vos propositions seront étudiées avec attention. Nous ne devons pas élaborer un arsenal juridique dans la précipitation, après chaque scandale. Nous souhaitons un dispositif stable, solide, qui responsabilise chaque acteur, comportant un système performant de vigilance, afin de traiter avec célérité les dysfonctionnements.
Votre rapport nous indique le chemin qu'il reste à parcourir. C'est par un travail conjoint que nous y parviendrons. (Applaudissements)
La séance est suspendue à 18 h 25.
présidence de M. Jean-Claude Carle,vice-président
La séance reprend à 21 h 30.