Contractuels dans la fonction publique (Procédure accélérée)
Mme la présidente. - L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi relatif à l'accès à l'emploi titulaire et à l'amélioration des conditions d'emploi des agents contractuels dans la fonction publique, à la lutte contre les discriminations relatives à la fonction publique.
Discussion générale
M. François Sauvadet, ministre de la fonction publique. - Ce projet de loi prolonge un accord syndical visant à réduire la précarité dans la fonction publique. La précarité est d'autant moins acceptable qu'elle prend racine au coeur même des services publics, sur des emplois correspondant à des besoins permanents. Cette situation n'est pas nouvelle.
Demain comme hier, l'État pourra recourir à des agents temporaires pour pallier des absences ponctuelles ou des besoins spécifiques mais il n'est pas question d'accepter le recours à des CDD pendant des dizaines d'années. L'État employeur doit être exemplaire : il ne peut s'exonérer des règles qu'il impose.
Les fonctions publiques sont confrontées à de profondes mutations. Adresser à tous les fonctionnaires un signal de justice et d'équité, conformément aux principes fondateurs de la fonction publique énoncés à l'article VI de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, et repris dans le statut de 1946. Ces principes offrent à tous les citoyens des garanties d'égal accès, dans des conditions de neutralité et d'impartialité. Tous les Français sont attachés à notre modèle de service public.
Dès 1946, le législateur a ouvert la possibilité d'y déroger, pour assurer la continuité du service public. Mais, au lieu de demeurer exceptionnel, le recours aux agents non titulaires s'est accru sans cesse. Ils sont aujourd'hui près de 800 000, soit 17 % des effectifs. Parmi les intéressés, 100 000 sont en CDD renouvelés depuis des années. Le Gouvernement a donc engagé des négociations avec les partenaires sociaux pour faire coïncider le respect du statut de la fonction publique et la lutte contre la précarité. Vous notez, madame le rapporteur, que ce ne fut pas chose facile mais la négociation fut exemplaire, conformément au nouveau dialogue social issu de la loi du 5 juillet 2010.
Cette négociation s'est conclue par un protocole d'accord le 31 mars 2011, signé par six organisations syndicales représentatives sur huit. Je salue leur esprit de responsabilité. Certes, nous ne sommes par d'accord sur tout mais un accord qui propose des avancées satisfaisantes pour chacun doit susciter un engagement. Il nous appartient de le traduire dans la loi.
L'administration sera tenue d'accorder un CDI aux agents en CDD ayant exercé un emploi permanent pendant six des huit dernières années. L'obligation existe dans le secteur privé après dix-huit mois en CDD. Cette mesure devrait concerner encore 100 000 personnes. Ce n'est pas rien ! Rechercher un logement...
Mme Catherine Tasca, rapporteur de la commission des lois. - Un prêt !
M. François Sauvadet, ministre. - ...n'est pas chose facile. C'est dire l'impact de ce projet de loi sur la vie quotidienne.
La validation des acquis de l'expérience est également mise en valeur par ce texte, ouvrant des perspectives professionnelles nouvelles aux agents concernés. Je sais les inquiétudes du personnel de l'éducation nationale, les « dix sur douze », employés en CDD de dix mois par an. Je souhaite mettre un terme à cette situation et étendre le bénéfice de la titularisation à ces professeurs contractuels.
M. Jean-Claude Lenoir. - Très bien !
Mme Nathalie Goulet. - Excellente initiative !
M. François Sauvadet, ministre. - La grande nouveauté de ce texte est de régler dans la durée la question des CDD. La transformation des emplois permanents en CDI sera automatique après six ans. La durée maximale des contrats sera revue, sans compromettre les remplacements limités dans le temps. Les procédures de recrutement des contractuels seront mieux formalisées ; leurs droits seront améliorés. Ils auront accès à la formation professionnelle et à l'entretien d'évaluation annuel. Bref, nous améliorons le management de la ressource humaine.
M. Jean-Claude Lenoir. - C'est heureux !
M. François Sauvadet, ministre. - Des garanties sont apportées lors des élections professionnelles. En octobre dernier, les agents non titulaires ont, pour la première fois, participé à ce grand rendez-vous démocratique social.
J'ai pris bonne note de l'avancée proposée par MM. Portelli et Vial : créer une commission consultative paritaire spécifique pour traiter les situations individuelles. Nous pouvons nous retrouver là-dessus.
Telles sont les grandes lignes de cet accord. Conformément aux engagements du Gouvernement, je souhaite que le débat n'en dénature pas le contenu. Je sais, madame le rapporteur, que vous partagez ce souci.
La fonction publique doit aussi être exemplaire en matière de lutte contre les discriminations, qu'elles soient liées à l'origine sociale ou géographique. Cela vaut aussi pour l'accès des handicapés et pour l'égalité femmes-hommes.
Mme Sylvie Goy-Chavent. - Il ya du travail !
M. François Sauvadet, ministre. - Oui. Un rapport retracera chaque année l'évolution de la situation sur ce plan. Une négociation est en cours avec les syndicats sur l'égalité professionnelle. Je ne déposerai aucun amendement qui ne serait préalablement discuté avec votre rapporteur.
Ce projet de loi modifie la loi du 3 août 2009 relative à la mobilité au sein de la fonction publique. Chaque agent doit pouvoir poursuivre son propre parcours, conformément à ses attentes et aux missions du service public. Nous devons faire progresser la mobilité au sein de chaque fonction publique et entre les fonctions publiques. L'entrée dans cette carrière ne doit pas être un tunnel rectiligne.
Le texte est passé en commission de six articles à quinze, car vous l'avez enrichi. Je ne souhaite pas que les juridictions financières nous fassent perdre de vue l'objet précis du texte que je vous soumets. Ne nous trompons pas : remettons à d'autres occasions ce qui est moins consensuel.
Nous avons débattu avec la commission des lois de la nouvelle procédure d'affectation des élèves sortant de l'ENA. Après avoir réuni hier soir une commission pour rapprocher les points de vue, je ne désespère pas de parvenir à un consensus. J'espère que nous avancerons avant le début de l'examen du texte à l'Assemblée nationale. Les choses ne peuvent rester en l'état.
J'ai souhaité que les droits des moyens syndicaux soient confortés. Dès lors qu'ils sont publics, la transparence s'impose sur leur utilisation. Au terme d'un dialogue nourri, nous sommes parvenus le 28 septembre à un relevé de conclusions : à périmètre constant, moyens constants et transparence. Cette réforme, à laquelle je tenais, sera adoptée par voie réglementaire pour les fonctions publiques d'État et hospitalière, mais nécessite une intervention législative pour la fonction publique territoriale. Je vous la propose aujourd'hui.
En lien avec M. Richert, je vous propose des mesures concernant l'encadrement supérieur de la fonction publique territoriale. Le rapport « Quels cadres dirigeants pour relever le défi de la République de proximité ? » nous a inspirés. Il s'agit aussi de moderniser par voie réglementaire la fonction publique hospitalière.
Ce projet de loi est un texte de responsabilité et de justice sociale, d'exemplarité, qui doit inspirer tous les employeurs publics. Il est attendu par tous ceux qui, fonctionnaires ou non, ont fait le choix de servir l'intérêt général. (Applaudissements au centre et à droite)
Mme Catherine Tasca, rapporteur de la commission des lois. - Le législateur est appelé à valider un accord négocié entre le Gouvernement et les associations syndicales et signé le 31 mars 2011 pour sécuriser les parcours professionnels des agents contractuels dans les trois fonctions publiques. C'est une éclaircie dans un ciel très sombre, obscurci par le dénigrement systématique des fonctionnaires et les réductions drastiques d'effectifs au nom de la RGPP. Sur ce texte essentiellement technique sont greffées des dispositions diverses d'importance inégale.
Ce projet de loi est le dernier train de la présente législature. La commission a décidé de s'en tenir au périmètre fixé, afin de ne pas anticiper des réformes qui nécessiteraient un débat spécifique.
Le recours, commode, aux non-titulaires ne se tarit pas. Beaucoup trop sont maintenus dans la précarité. Ce quinzième plan s'accompagne d'une sécurisation grâce au renforcement de l'accès au CDI. Nous apprécions dans son ensemble le double volet proposé aux contractuels, tout en renforçant les garanties offertes. L'équilibre atteint avec l'accord unanime des syndicats doit être conservé.
Outre des précisions juridiques améliorant la cohérence du texte, la commission a proposé d'intégrer les services accomplis dans le cadre de remplacements ; elle a compté le droit d'accès à l'emploi en fonction des services effectués. Pour prendre en compte la diversité des employeurs territoriaux, la commission leur a ouvert la faculté d'accéder à une commission d'évaluation professionnelle, ce qui devrait faciliter la titularisation dans les petites collectivités ; elle a ouvert le bénéfice de la titularisation aux agents des collectivités parisiennes ainsi qu'aux établissements exclus du bénéfice de la titularisation. Ce texte devrait ainsi écarter à l'avenir les abus les plus criants.
La réaffirmation du principe essentiel de l'emploi titulaire et les rapprochements entre les trois fonctions publiques consolident le statut. Soyons prudents : seule la pratique permettra de mesurer les effets réels de ce texte.
Nos amendements au second volet du texte sont de précision, en portant par exemple de trois à quatre mois la durée d'interruption entre deux contrats, ce qui devrait sécuriser la situation de nombreux contractuels de l'Éducation nationale. Nous approuvons et complétons les possibilités ouvertes aux fonctionnaires de conduire des parcours professionnels diversifiés.
La composition des conseils régionaux d'orientation du CNFPT est modifiée par nos propositions. Nous avons adopté un ensemble d'harmonisations ponctuelles et tirons les conséquences de la réforme des retraites en adoptant des dispositions transitoires pour le congé spécial des fonctionnaires territoriaux. La période durant laquelle les fonctionnaires de la Poste peuvent demander leur intégration est prolongée de trois ans, jusqu'en 2016.
Nous proposons aussi d'élargir le vivier de recrutement des juridictions financières : nous reprenons les dispositions d'un avant-projet de loi de 2008, jamais déposé, et d'un projet de réforme soumis en 2009 à l'Assemblée nationale sans avoir franchi le stade des commissions.
La pérennisation du concours complémentaire des membres des tribunaux administratifs et cours administratives d'appel était devenue indispensable. La proposition de détacher des militaires et des professeurs d'Université dans les chambres régionales des comptes est justifiée. Nous rendons obligatoire la nomination d'un deuxième maître des requêtes au Conseil d'État, parmi les membres des tribunaux administratifs et cours administratives d'appel. Sur proposition de M. Delebarre, nous consacrons le statut de magistrat administratif des membres de tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel.
Le texte qui nous est soumis doit faire l'objet d'un examen serein car il s'agit de concrétiser l'accord du 31 mars 2011. C'est un évènement pour le dialogue social dans la fonction publique. Ce texte améliore la situation de ces milliers d'agents qui contribuent quotidiennement au service public. (Applaudissements sur les bancs socialistes et RDSE)
M. François Sauvadet, ministre. - Très bien !
Mme Corinne Bouchoux. - Ce texte résulte d'un dialogue social trop rare dans notre pays. Il va réduire la précarité dans les fonctions publiques. L'État qui doit être exemplaire ne l'est souvent pas. Autour des 800 000 précaires dans les fonctions publiques vivent quatre millions de personnes qui subissent les effets de leur précarité. Et celle-ci sévit aussi au sein des services de l'État et des collectivités territoriales.
Les fonctions publiques sont malmenées par cette gestion ultralibérale qui chérit les mots de « management » et de « ressources humaines ». Les écologistes sont attachés au statut de la fonction publique.
Pour l'avenir, nous n'approuvons pas la casse aveugle de la fonction publique par la RGPP, qui supprime un emploi sur deux pour recruter des non-titulaires.
En d'autres termes, il faut revoir votre posture dogmatique sur la RGPP : les écologistes veulent arrêter l'hémorragie particulièrement dans l'éducation nationale, où la suppression de postes estsuivie par le recrutement d'enseignants précaires à Pôle emploi.
Nous voulons des services publics et une fonction publique de qualité ; les mesures examinées aujourd'hui ne doivent pas masquer la réalité actuelle.
J'en viens à l'égalité hommes-femmes : l'État est loin d'être exemplaire, les collectivités territoriales non plus. Les CDI de catégorie A sont toujours à temps plein, contrairement à ce qui se passe en catégories B et C.
S'agissant des personnes en situation de handicap, la situation est ubuesque parce qu'on impose des normes qui ne peuvent être respectées. Un mal-voyant ne peut être recruté chez les pompiers.
Nous prenons acte de l'accord signé, mais n'oublions pas que les intéressés auront besoin d'une formation spécifique.
De façon générale, nous souhaitons un autre fonctionnement de la société : ne traitons plus jamais les personnes précaires comme elles l'ont été ces dernières années.
M. François Sauvadet, ministre. - Depuis des décennies !
Mme Corinne Bouchoux. - Nous ne pouvons que prendre acte de l'accord signé. Nous connaissons la situation budgétaire, mais il faudra choisir entre certaines priorités pour obtenir des services publics et une fonction publique de qualité, sans emploi précaire. (Applaudissements à gauche et sur les bancs écologistes)
M. Jean-Paul Amoudry. - Ce projet de loi fait suite à une intense concertation avec les partenaires sociaux, qui a débouché sur un large consensus applicable aux agents contractuels des trois fonctions publiques. La négociation s'est déroulée dans le cadre de la loi rénovant le dialogue social. Elle a débouché sur un protocole signé par six organisations syndicales.
Le processus est exemplaire : concertation, puis législation. La négociation n'a pas été sacrifiée à l'urgence d'agir ; elle permet de ne pas reconstituer le problème posé par l'existence de 900 000 agents contractuels, dont le recrutement s'est accéléré, notamment en raison de la décentralisation.
Le titre premier du texte traite de certains agents ayant acquis une solide expérience professionnelle, mais toujours en CDD. Ceux ayant une ancienneté de six ans se verront proposer un CDI.
Cette approche responsable et juste prend en compte les efforts sans précédent imposés aux fonctionnaires par la RGPP et le gel du point.
Ce texte est issu d'un dialogue fructueux ; les amendements adoptés par la commission sont bienvenus, à l'exception des dispositions relatives au recrutement dans les juridictions administratives ou financières, dont le lien avec le projet n'est pas manifeste.
J'approuve l'approche volontariste et concrète de notre commission quant à l'emploi des personnes en situation de handicap.
La majorité du groupe UCR votera ce projet de loi. (Applaudissements au centre et sur quelques bancs à droite)
M. Christian Favier. - Cette réforme ne peut être l'arbre qui cache la forêt car les agents publics souffrent de la politique suivie depuis des années, les attaques portant autant contre l'idée même de services publics que contre les fonctionnaires.
Le groupe CRC estime qu'il n'y a pas trop de services publics, ni qu'il faudrait les sacrifier au secteur marchand : il faut au contraire conforter leur efficacité.
Selon certains apprentis sorciers, l'éducation nationale pourrait ne plus être un service public mais transférée aux collectivités locales, voire au privé. La majorité présidentielle tend sans cesse à transférer au privé même les fonctions régaliennes : il y a plus d'agents privés de sécurité que de policiers.
M. Roland Courteau. - C'est vrai !
M. Christian Favier. - Les fonctionnaires sont devenus des variables d'ajustement ; d'où la précarité, qui gagne du terrain : on compte 850 000 agents publics précaires, soit 16,5 % du total. Les employeurs publics tendent à se comporter comme des patrons privés : chacun se souvient du cas de cette postière de Haute-Garonne qui a enchaîné 56 CDD. S'il n'est pas mis un terme à cette logique, la précarité devient la norme. A l'UMP, certains veulent mettre fin à la pérennité de l'emploi public.
Pour l'essentiel, les dispositions proposées aujourd'hui au sujet de la précarité dans la fonction publique sont conformes au protocole d'accord de mars 2011. Incontestablement, les agents recrutés en CDD qui bénéficieront d'un CDI verront leur situation professionnelle confortée. Pourtant, la porte ouverte au recrutement en CDI de personnes occupant des postes de titulaires nous inquiète. J'ajoute le recours au temps partiel, qui touchera surtout des femmes. Une autre gestion des emplois et des carrières permettrait pourtant un plus large recrutement temps plein : mon département ne compte que 5 % de contractuels.
Le manque d'ambition du texte est évident, alors que la RGPP a des conséquences désastreuses. La pertinence des services publics impose une titularisation générale : vous considérez les services publics comme des coûts alors qu'ils sont la richesse de notre société.
Nous sommes bien loin des plan Sapin et Le Pors puisque les deux tiers des contractuels concernés ne seront ni titularisés ni cédéisés.
Les obligations du projet de loi ne sont assorties d'aucune sanction. Certains employeurs seront tentés de recruter des personnes différentes en CDD pour pourvoir un même poste permanent.
Ce projet de loi n'est pas pleinement satisfaisant, car il est inspiré par une conception rabougrie de la personne publique. Vous considérez la fonction publique comme un problème.
M. François Sauvadet, ministre. - Non !
M. Christian Favier. - Nous y voyons une chance pour notre pays.
Nous resterons mobilisés aux côtés des organisations syndicales de fonctionnaires, mais pour ne pas priver les bénéficiaires des mesures qu'ils attendent, nous nous abstiendrons. (Applaudissements sur les bancs CRC et écologistes)
M. Christian Bourquin. - Monsieur le ministre, le mandat présidentiel qui s'achève n'a pas bien traité les fonctionnaires.
M. François Sauvadet, ministre. - C'est vous qui le dites.
M. Christian Bourquin. - Il y a eu beaucoup de défiance envers les fonctionnaires...
M. Roland Courteau. - C'est vrai !
M. Christian Bourquin. - ...alors qu'ils font un beau métier au service du public.
Toutefois, le caractère consensuel du texte est avéré. Il aurait mérité une deuxième lecture, puisque le Sénat enrichira le texte notamment en reprenant la proposition de loi de M. Portelli, et en examinant certains amendements tardifs du Gouvernement alors que la DGCL et la DGAP y travaillent depuis longtemps.
M. François Sauvadet, ministre. - Ne me les reprochez pas !
M. Christian Bourquin. - Je ne vous reproche que votre comportement depuis cinq ans !
M. Francis Delattre. - C'est un très bon ministre !
M. Christian Bourquin. - Un de ces amendements confie au CNFPT la charge de traiter la promotion de certains emplois territoriaux supérieurs. C'est le moyen de remédier à une injustice parce que seules les grandes collectivités peuvent assurer cette promotion. Ingénieur territorial depuis 35 ans, administrateur au CNFPT pendant 10 ans, je connais bien le problème.
M. René Garrec. - Félicitations !
M. Christian Bourquin. - Le CNFPT va devoir exposer de nouvelles dépenses lourdes, alors que la majorité gouvernementale a réduit de 10 % ses ressources cet été.
Aimez-vous la fonction publique territoriale, alors que vous réduisez ses moyens de formation ? (M. Roland Courteau approuve) Le CNFPT s'est préparé, mais l'organisation d'un nouveau concours et la formation qui suivra auraient un coût.
Le CNFPT est vent debout contre la baisse de 10 % appliquée à ses recettes.
Mme Nathalie Goulet. - Ils ont acheté un immeuble !
M. Christian Bourquin. - Parlez de ce que vous connaissez ! Le président du CNFPT a sollicité les maires et présidents d'assemblées territoriales ; il a reçu 6 600 délibérations territoriales soutenant le rétablissement du 1 % formation.
Il est exceptionnel que des collectivités territoriales se mobilisent de la sorte hors de tout clivage politique.
M. François Sauvadet, ministre. - Ça !
M. Christian Bourquin. - La voix des élus mérite d'être entendue.
Je vous demande de rétablir la cotisation inscrite à l'article 12-2 de la loi du 26 janvier 1984.
À moins de trois mois d'échéances électorales, je ne puis croire que vous resterez insensible à la mobilisation historique des élus locaux.
Le groupe du RDSE votera ce texte dans la rédaction de la commission.
M. François Sauvadet, ministre. - Très bien !
M. Christian Bourquin. - Monsieur le ministre, entendez aussi ma supplique en faveur du 1 % formation ! (Applaudissements à gauche)
M. André Reichardt. - Le statut général de la fonction publique dispose à l'article 3 que les emplois permanents sont pourvus par des fonctionnaires, mais l'administration y a toujours dérogé pour répondre à des besoins particuliers.
Aujourd'hui la contractualisation n'est nullement négligeable. La loi du 3 août 2009 tendait à favoriser la mobilité entre les fonctions publiques.
Les méthodes issues du monde de l'entreprise doivent enrichir la gestion de la fonction publique. En outre, le rapprochement entre secteurs public et privé sera mutuellement profitable.
Au sein de la fonction publique, le recours aux CDI confortera la situation d'agents précaires. Il fallait donc rendre ses lettres de noblesse au contrat. D'où ce projet de loi, fruit d'une longue concertation avec les partenaires sociaux.
Aujourd'hui, la fonction publique se positionne à armes égales avec le privé. Longtemps synonyme de précarité, le contrat dans la fonction publique a été dévalorisé, mais les abus du passé ne doivent pas être tolérés. Sur ce plan, le projet de loi fait oeuvre de clarification.
Certes, le concours est censé assurer l'égalité républicaine entre candidats, mais l'accès aux très grandes écoles reste limité à une élite sociale.
M. François Sauvadet, ministre. - C'est vrai.
M. André Reichardt. - D'où l'intérêt de valider les acquis de l'expérience acquise en CDD. On nous reproche souvent de ne prendre que des demi-mesures en matière d'emploi ; ce projet de loi en est le contre-exemple, avec des dizaines de milliers de bénéficiaires parmi les trois fonctions publiques.
Le projet de loi garantit une meilleure transparence dans la transformation de CCD en CDI.
Enfin, l'impact en termes d'emplois est globalement neutre, ce qui garantit le respect des plafonds d'emplois, sans la moindre incidence sur les autres voies de recrutement.
Sécuriser l'emploi public n'est pas indifférent. Puis-je m'assurer que la spécificité du droit local d'Alsace-Moselle sera respectée ?
Tout fonctionnaire territorial peut bénéficier d'une disponibilité pour convenance personnelle, ce qui pose de véritables difficultés aux petites communes. Leur remplacement ouvre la porte à une nouvelle précarisation. Ne pourrait-on ramener de dix à trois ans la durée maximale de cette disponibilité ? Ou prévoir un pourcentage maximum de postes mis en disponibilité ?
Le projet de loi concilie sécurité et adaptabilité. C'est pourquoi j'appelle à voter ce texte montrant que notre modèle de fonction publique n'est pas mort et que sa construction est en marche ! (Applaudissements sur quelques bancs à droite)
M. Michel Delebarre. - Tout a été dit, et bien dit, d'abord par Mme Tasca -qui a remarquablement enrichi ce texte véritablement touffu.
Ce projet de loi tend à réduire la précarité existante, et même à prévenir la précarité à venir. Ce deuxième objectif a maintes fois été annoncé, sans succès, au cours des vingt dernières années. Il est bon de mettre fin aux situations inacceptables.
Globalement, le texte n'est pas si mal. Venant de moi, c'est un compliment. (M. François Sauvadet, ministre, sourit)
En matière d'emploi de personnes handicapées et d'égalité hommes-femmes, je voudrais en savoir plus sur les négociations avec les partenaires sociaux.
Divers amendements vous interpellent sur des sujets complémentaires. J'ai déposé un amendement sur le statut de magistrat, qu'il faudrait reconnaître aux membres des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel.
De même que je soutiens l'amendement sur l'organisation interne des juridictions financières, je souhaite qu'on fasse de même pour les chambres régionales des comptes...
Mme Nathalie Goulet. - Très bien !
M. Michel Delebarre. - ...en les dotant d'un vice-président, mais la commission des finances a opposé l'article 40 de la Constitution. Que vient-il faire ici ? Mon amendement ne concernait que les principales cours régionales des comptes, en reprenant une recommandation du président Migaud. Le Gouvernement peut reprendre cette démarche.
Le Gouvernement a entendu les organisations syndicales -enfin !- à quelques mois d'une échéance majeure. Pourquoi ne pas l'avoir fait auparavant ? Je l'ignore. Votre personnalité, monsieur le ministre, y a peut-être contribué...
Toutefois, je peine à donner un blanc-seing au Gouvernement. Ainsi, les crédits pour la mise en oeuvre de cette loi ne sont pas inscrits dans le budget pour 2012. Ce ne serait pas normal que vous ayez signé le protocole en le sachant.
Depuis dix ans, les gouvernements de droite ont dévalorisé la fonction publique, par idéologie. Ainsi, la RGPP, lancée en 2007 à grands coups de trompe, devait réformer l'État mais n'a débouché que sur la réduction aveugle des postes. Selon la Cour des comptes, la RGPP a économisé 1 milliard d'euros par an mais l'allègement de l'ISF, décidé en pleine crise, représente 1,5 milliard ! (Mme Corinne Bouchoux applaudit)
Moins de fonctionnaires : on peine parfois à trouver des représentants de l'État déconcentré. Ce doit être aussi le cas en Bourgogne. Il a été décidé, il y a quinze jours, de recruter 1 000 agents temporaires à court terme à Pôle emploi, preuve qu'on ne lui avait pas donné les moyens en personnel.
La qualité du service public s'est détériorée ; les fonctionnaires ont subi une véritable saignée dans certains ministères : depuis 2007, 66 000 postes d'enseignants ont disparu. Dans la fonction publique, il est prévu de supprimer 30 000 emplois en 2012, comme si l'effort de désendettement ne reposait que sur les fonctionnaires ! Il faut solliciter les plus riches, sachant que les services publics sont d'abord au service des plus pauvres.
Au moment où la perte du triple A nous inquiète, je crois que la France aurait droit à son triple A au titre de la qualité de ses services publics, mais elle pourrait le perdre, au train où vont les choses.
M. Portelli a déposé une proposition de loi sur le fonctionnement des centres de gestion, c'est pourquoi certaines de ces dispositions ont été reprises par la commission sous forme d'amendements.
M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois. - C'était une excellente idée.
M. Michel Delebarre. - Grâce à votre concours. (Sourires) Ainsi, les centres de gestion pourraient rendre de nouveaux services aux collectivités territoriales.
Ainsi, un bouquet de services serait présenté aux collectivités contre une contribution ne dépassant pas 0,2 %. Malheureusement, la commission des finances a invoqué l'article 40. Or, cette mesure serait financée par les collectivités territoriales. J'invite le Gouvernement à y réfléchir...
L'accord est un bon accord. Et cette loi sera utile si elle est complétée par les amendements de notre rapporteur, sur lesquels l'avis du Gouvernement sera attentivement regardé. Nous sommes vraiment ici dans un domaine de coproduction entre Parlement et Gouvernement, entre Gouvernement et organisations syndicales. Je me demande si nous ne sommes pas en train de faire oeuvre de démocratie. (Applaudissements à gauche)
M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois, et M. François Sauvadet, ministre. - Excellent !
Mme Virginie Klès. - Je commence par des remerciements. Vous venez, monsieur le ministre, de démontrer l'aptitude du Gouvernement à aborder l'emploi dans les fonctions publiques sous un autre angle que celui, comptable et mathématique, de la RGPP...
Mme Nathalie Goulet. - Un angle mort !
Mme Virginie Klès. - Les chiffres sont parlants, mais il faut imaginer aussi ce que la précarité représente humainement.
En travaillant sur le RSA, j'ai été surprise du nombre d'agents à temps partiel dans la fonction publique ou victimes de précarité. Aujourd'hui, on veut résorber la précarité. Cela, j'en suis certaine, n'a rien à voir avec la période électorale... (On se récrie ironiquement à gauche) Mais nous prendrons ce qu'il y a à prendre... Et nous poursuivrons le travail dans quelques semaines...
Le Gouvernement ne peut pas ici se montrer moins ouvert au dialogue qu'avec les organisations syndicales. Quand on travaille dans la transparence, on arrive à un consensus...
M. David Assouline. - Relatif !
Mme Virginie Klès. - En effet ! Je partage les inquiétudes qui se sont exprimées sur la parité hommes-femmes dans les fonctions publiques. Souvent, les emplois les moins qualifiés, sur les horaires les plus morcelés, échoient aux femmes qui assurent un travail indispensable dans les cantines ou au service de personnes âgées, par exemple.
Oui, la mobilité entre les fonctions publiques est une bonne chose, mais il reste beaucoup à faire. Elle ne doit pas être à sens unique, de la fonction publique d'État vers la territoriale...
M. Michel Delebarre. - Très bien !
Mme Virginie Klès. - ...d'autant que le comportement d'un cadre supérieur dans nos collectivités et l'écoute qu'il doit aux élus et aux citoyens ne sont pas les mêmes que dans les services de l'État.
Quelques mots des centres de gestion. Le niveau de formation et de compétences des fonctionnaires territoriaux a beaucoup progressé ces dernières années. Nous le devons en grande partie à ces centres, y compris pour l'accompagnement des carrières, la fonction, la mutualisation des postes. Nous soutenons les amendements proposés par la commission des lois, à l'initiative de MM. Portelli et Delebarre, tendant à régler des problèmes immédiats. J'ai bien noté les engagements du Gouvernement sur ce point. Mais il reste à conduire un travail de fond avec les centres de gestion, faire un bilan de la loi de 2007, des dysfonctionnements et des bonnes pratiques ...
M. Michel Delebarre. - Très bien !
Mme Virginie Klès. - Une large concertation préalable a été menée sur ce texte. Sans donner un blanc-seing à la politique du Gouvernement en matière d'emploi, nous voterons ce texte très attendu et très nécessaire. (« Très bien ! » et applaudissements à gauche)
M. Paul Vergès. - Ce texte pose la question de la cohésion et de l'unité de la fonction publique : en sortiront-elles renforcées ou diminuées par la création d'une nouvelle catégorie d'agent ?
Elle se pose de façon aigüe outre-mer. Dans moins de deux mois, nous allons célébrer le 66e anniversaire de la loi du 19 mars 1946, censée régler la situation des agents non titulaire avant... le 1er janvier 1947 !
A La Réunion, la situation est anarchique. Les deux tiers des agents territoriaux sont contractuels. Les agents titulaires bénéficient outre-mer d'une sur-rémunération qui atteint 53 % à La Réunion et trouve son origine dans le coût de la vie et une indexation sur le franc CFA. Décidée par l'État, elle a été maintenue par tous les gouvernements successifs. Elle induit une forte inégalité entre agents titulaires et non titulaires. Qui est responsable du refus de la cohésion dans la fonction publique, donc de la cohésion sociale, depuis soixante-six ans ? Et je ne parle pas des salariés sous contrat précaire dans l'enseignement ou des contrats aidés...
Certaines entreprises appliquent un coefficient de majoration, souvent compris entre 30 et 40 %, en faveur de leurs cadres mais pas de leurs autres salariés. Les cadres de la radio et de la télévision publique sont encore mieux traités. Or le coût de la vie est identique pour tous. Cela explique un taux de pauvreté qui avoisine 50 %.
Cette inégalité institutionnelle s'aggrave constamment. Tout fonctionnaire est en droit de prétendre au même traitement à qualification, grade et échelon équivalents. Or, si les communes d'outre-mer devaient verser à tous leurs agents la sur-rémunération décidée par l'État depuis soixante-six ans, leur budget de fonctionnement n'y suffirait pas !
L'application d'un coefficient de majoration a été décidée par l'État pour tous les fonctionnaires, qu'ils relèvent de l'État ou des collectivités, ce qui impose à celles-ci des charges supplémentaires, alors même qu'elles doivent faire face à des obligations excédant celles des collectivités métropolitaines. Le potentiel fiscal est moins important, le retard d'équipement est substantiel. Et il y a la démographie : la Réunion comptera plus d'un million d'habitants dans quinze ans, contre 850 000 aujourd'hui. Il appartient à l'État, et à lui seul, de prendre en charge la sur-rémunération des fonctionnaires territoriaux outre-mer. Des milliers d'agents ont déjà trop attendu. Celle loi doit permettre leur titularisation. Sachez-le, la situation devient explosive ! Cette loi visant à résorber la précarité crée au Gouvernement l'obligation morale de régler cette année même la question lancinante de l'égalité sociale outre-mer. Le sort de 100 000 travailleurs est en jeu. J'espère avoir été entendu. (Applaudissements sur plusieurs bancs à gauche)
Mme Anne-Marie Escoffier. - Il n'est pas si fréquent qu'un texte de consensus nous soit présenté dans le contexte actuel. Je rends hommage à l'écoute et au dialogue qui ont présidé à son élaboration.
Exercice redoutable que de vouloir faire prévaloir des règles communes dans des fonctions publiques dont les institutions, les besoins, les modes de fonctionnement et de gestion sont différents, mais qui doivent se retrouver sur des fondamentaux partagés. Exercice largement réussi dès lors que chacun des acteurs principaux a écouté et entendu dans l'intérêt des premiers concernés : les agents fragilisés de la fonction publique. Réussi aussi grâce à la vigilance de notre excellente rapporteure. Il fallait mettre fin à l'enchaînement insupportable des CDD et valoriser les acquis. Le mérite en est d'autant plus grand que la RGPP appliquée au couperet ne crée pas un contexte porteur.
La RGPP s'applique, chacun le sait, aux collectivités locales autant qu'à l'État. Mais elle ne doit pas avoir objectif de réduire les effectifs, mais de rationaliser le fonctionnement : la réduction des effectifs ne peut qu'être une conséquence. Rien d'étonnant à ce que les collectivités aient recruté sur des métiers nouveaux ou pour faire face à leurs nouvelles compétences, et beaucoup sur contrat. La fonction publique hospitalière a fait de même en raison de l'évolution de la politique médicosociale. Il était grand temps de rendre de la cohérence à cet ensemble.
Parmi les dysfonctionnements que ce texte vise à corriger, je relève la précarisation injustifiée au regard des conditions normales de recrutement, le cloisonnement excessif entre fonctions publiques d'État et territoriale, les rigidités du fractionnement du temps de travail, l'absence de lieu de dialogue pour le suivi de la situation des non-titulaires. Le texte propose des améliorations, clarifie les règles d'emploi, les harmonise, facilite la mobilité et crée des instances consultatives. J'émets le voeu que ces mesures soient réellement mises en oeuvre à tous les niveaux, qu'aucune frilosité, qu'aucun corporatisme ne les freine.
L'amélioration du fonctionnement des juridictions administratives et financières répond à l'impatience de celles-ci à voir venir la réforme qu'on leur promet depuis trop longtemps.
Le groupe du RDSE reconnaît le bien-fondé des dispositions que vous proposez, en souhaitant que vous mettrez toute votre énergie pour qu'elles soient appliquées vite et bien. (Applaudissements sur les bancs du RDSE et à gauche)
M. Hugues Portelli. - L'objectif premier de ce texte est de mettre en forme législative un accord collectif. C'est une bonne chose. Il serait utile que le dialogue soit prolongé au sein de la fonction publique territoriale : il n'est pas sain que l'État se substitue aux collectivités territoriales...
M. Michel Delebarre. - Très bien !
M. Hugues Portelli. - Ce texte ressemble aux projets de loi « portant diverses dispositions d'ordre... » que nous examinions il y a quelques années, qu'on appelle maintenant « de simplification du droit »...
M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois. - Ils s'appellent « Warsmann » !
M. Hugues Portelli. - Rien d'étonnant à ce que nous ayons saisi l'occasion pour introduire des dispositions dont nous avons pris soin qu'elles ne fussent pas des cavaliers...
Au sein de la fonction publique territoriale, les centres de gestion jouent un rôle essentiel pour gérer les ressources humaines.
M. François Sauvadet, ministre. - Bien sûr !
M. Hugues Portelli. - Ce sont des outils indispensables -et pas seulement aux collectivités territoriales dont l'affiliation est obligatoire. Les dispositions que nous proposons à cet égard n'ont pas pour but d'accroître les charges publiques mais d'introduire plus de transparence et de rapprocher les centres de gestion des collectivités.
Beaucoup de collectivités utilisent les centres de gestion en quelque sorte comme des passagers clandestins, sans rémunérer les prestations qui leur sont servies. D'où le bouquet et la contribution que nous proposons. Il ne s'agit pas de porter ombrage au CNFPT ni de créer des problèmes aux collectivités qui souhaitent s'organiser elles-mêmes.
La situation des fonctionnaires territoriaux connaîtra une diversification croissante. On ne peut laisser les différences se creuser entre les agents selon le département qui les emploie. D'où l'introduction d'un peu plus de cohérence et d'homogénéité, rien d'autre. Je remercie tous les collègues de gauche et de droite qui ont préparé ensemble les mesures adoptées par la commission des lois, qui sont des mesures de bon sens ! (Applaudissements sur la plupart des bancs)
M. Jean-Yves Leconte. - Sous l'impulsion de Mme Tasca, la commission des lois a amélioré ce texte très attendu. Quelle place accorde le Gouvernement au débat parlementaire ? Des dispositions figurant dans le protocole ont été supprimées ; nous avons tenté de les rétablir... mais elles sont tombées sous le coup de l'article 40. C'est dire que le Gouvernement n'avait pas pris les moyens de respecter ses engagements -d'où les inquiétudes croissantes dans certains ministères.
Au 31 décembre 2009, on recensait plus de 890 000 agents contractuels dans les trois fonctions publiques ; ils sont des variables d'ajustement pour faire fonctionner nos services publics. Par une loi d'avril 2000, le gouvernement Jospin avait voulu sécuriser la situation des agents en fonction à la date de la publication de la loi et recrutés sur un contrat de droit privé.
Je présenterai un amendement conforme à la version initialement validée du protocole d'accord, s'agissant des conditions mises à la titularisation.
La loi n'est pas encore votée que certaines administrations -enseignement supérieur ou affaires étrangères par exemple- ne recrutent plus de CDD, par crainte qu'ils ne soient cdéisés. C'est un véritable détournement de l'esprit de la loi. Je compte sur vous, monsieur le ministre, pour résoudre les cas qui vous seraient signalés.
Le CDD-kleenex n'est pas acceptable. Les universités emploient de très nombreux contractuels, nécessitant des qualifications particulières que souvent ne détiennent pas les enseignants titulaires. CDD de six mois, à temps plein ou partiel, postes de vacataires s'y sont multipliés. Leur utilité est reconnue mais on ne leur propose pas de statut stable. Ils n'ont donc ni perspective de carrière ni droit à la retraite. Ils surveillent les examens et rendent bien d'autres services, notamment pédagogiques, sans être rémunérés pour cela. Ce texte n'en dit rien, alors que l'administration est tétanisée par la RGPP. En voulant combattre la précarité, on incite à ne pas renouveler les contrats. Et que dire des recrutés locaux du ministère des affaires étrangères qui participent à l'influence et au rayonnement de la France ? Des volontaires internationaux et des stagiaires qui se retrouvent sans emploi ni protection sociale à l'issue de leur expérience ?
Cette loi est profilée pour conserver cette gestion de la fonction publique à la petite semaine. L'administration est un mauvais employeur. La lutte contre la précarité est pourtant essentielle, affaire de dignité et d'efficacité. Maintenir les intéressés dans la précarité, c'est leur dénier un accès autonome au crédit ou au logement et un investissement dans leur travail. Pourquoi l'État s'affranchit-il des règles qu'il impose au privé ?
Ce texte se présente comme une solution de facilité pour éviter de traiter les problèmes de fond. Malgré ces réserves et par respect pour les organisations syndicales, nous le voterons. (Applaudissements sur les bancs socialistes)
M. François Sauvadet, ministre. - Je remercie Mme Tasca pour son engagement et son pragmatisme, ainsi que pour la tonalité de son intervention. Je veux d'abord lui donner deux assurances : la transformation de CDD en CDI concernera environ 100 000 agents, la titularisation, de 40 000 à 50 000.
L'objectif est de faciliter le déroulement des carrières et de valider les acquis de l'expérience professionnelle, dans le cadre de véritables parcours professionnels, favorisés par la mobilité.
Je souhaite que les décrets d'application interviennent le plus rapidement possible. Pour cela, la loi devrait être votée avant la fin du printemps, c'est-à-dire avant le 6 mai... (Murmures amusés) Ce texte est la transcription d'un accord qui a donné lieu à de longues discussions avec les syndicats et qui a été validé par six organisations sur huit.
Madame Bouchoux, je note votre attachement au statut de la fonction publique. Mais il y avait un équilibre à trouver entre titularisation et cédéisation, qui est une réponse à la précarité.
Certes, le dispositif n'est pas satisfaisant pour l'égalité hommes-femmes. Alors que 60 % des fonctionnaires sont des femmes, elles sont moins de 10 % à accéder aux hauts postes de responsabilité. Au-delà des dispositions législatives, il y a toutes sortes de dispositifs pratiques à mettre en place : les horaires de réunion, par exemple, doivent être rendus compatibles avec la vie de famille. C'est le cas au sein de mon cabinet. Nous avons inscrit dans la loi l'obligation, chaque année, d'un rapport rendu public sur l'état des lieux en cette matière ; les syndicats ne considèrent pas que ce rendez-vous soit mineur. Je n'exclus pas des avancées à l'Assemblée nationale. Ne doutez pas de ma détermination.
Le développement durable... Les mesures en matière de formation notamment y participent. Les pratiques évoluent, comme la société ; c'est dire que nos agents doivent évoluer : le management des ressources humaines est un enjeu essentiel. La feuille de route de la Direction générale de l'administration et de la fonction publique tient compte de la dimension « développement durable ».
Je remercie le groupe UCR pour son soutien. Attention à ne pas trop charger la barque de ce texte.
L'urgence ? Regardez le calendrier ! Ce texte n'a rien d'électoraliste, il n?est que l'effet du dialogue social. Depuis mars dernier, nous n'avons pas chômé ! Nous avons consulté les fonctions publiques, saisi le Conseil d'État. Il ne s'est vraiment pas agi de contraindre le Parlement, auquel vous connaissez mon attachement.
Nous pouvons constater des désaccords, monsieur Favier, mais aussi que ce texte est une avancée. Vous parlez de « brutalité » mais n'oubliez pas que la règle du non-remplacement d'un fonctionnaire sur deux partant à la retraite ne s'est appliquée que dans la fonction publique d'État. Regardez ce qui s'est passé dans les pays qui n'ont pas fait cet effort : ils subissent aujourd'hui des mesures autrement plus drastiques avec la baisse des traitements et pensions décidée en Espagne, en Italie et au Royaume-Uni -où l'on a même licencié 300 000 fonctionnaires. Le budget de l'État consacre 130 milliards d'euros au traitement et pensions de retraite des fonctionnaires. Nous avons joué gagnant-gagnant, et pu augmenter le traitement des fonctionnaires.
Le problème de la dette se pose à tous et amène à s'interroger sur le périmètre d'un État moderne. Comme président de conseil général, je sais devoir faire moi aussi des efforts et une sorte de RGPP. Il ne nous sera pas toujours possible de nous tourner vers l'État.
Nous avons besoin de fonctionnaires reconnus et bien rémunérés. Je souhaite aussi qu'ils aient une plus grande mobilité, entre les trois fonctions publiques et aussi avec des allers-retours dans le privé. Je salue la position du groupe CRC, qui a décidé de s'abstenir, mais je ne désespère pas de le ramener dans la communauté que nous formons pour réduire la précarité.
Non, monsieur Bourquin, le Gouvernement ne méprise pas ses fonctionnaires !
M. Alain Gournac. - C'est grotesque !
M. François Sauvadet, ministre. - Promettre des créations de postes, c'est mentir aux Français. Comment créer 60 000 postes dans l'enseignement sans en retirer ailleurs ? Là, il faudra supprimer au moins quatre postes sur cinq fonctionnaires partant à la retraite. Le Gouvernement envisage l'avenir en responsabilité. Aucun n'a jamais fait autant que le nôtre en faveur du dialogue social, à en juger par les accords collectifs signés.
M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois. - Nous en avons signé beaucoup, des accords, avec les 35 heures, avec Pierre Mauroy, avec les lois Auroux. Vous ne pouvez pas soutenir une chose pareille !
M. François Sauvadet, ministre. - Ainsi, celui consacrant la création du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) est prolongé par un travail sur le risque social. Pour la première fois, les organisations syndicales ont unanimement approuvé le budget du dialogue social. La cotisation au CNFPT ? Le sujet n'est pas nouveau... Le Gouvernement ne peut ignorer les observations de la Cour des comptes.
Merci, monsieur Reichardt, pour votre soutien. La fonction publique n'a de sens que pour le service rendu. Reconnaissons tous ceux qui servent nos compatriotes. Oui, les enseignants de religion d'Alsace-Moselle qui ont été recrutés selon les conditions générales pourront bénéficier du « concours réservé ».
Je suis prudent quant aux mises en disponibilité car il faut rester cohérent. Au demeurant, il n'y a là aucun facteur de précarité.
Monsieur Delebarre, j'ai apprécié votre intervention et partage vos observations sur l'égalité professionnelle. Ne sous-estimez pas l'intérêt du débat annuel sur la place des femmes dans les fonctions publiques. Je souhaite qu'on avance ; soyez convaincu de ma détermination. Le coût budgétaire ? Transformer un CDD en CDI ne coûtera rien. Idem pour la titularisation. Si la fonction publique cessait d'être ouverte, elle se priverait de compétences.
Madame Klès, il faut en effet une fonction publique moderne et développer la mobilité, y compris avec le secteur privé. Il faut également améliorer la mobilité inter-fonctions publiques, et pas toujours dans le même sens. On aura l'occasion d'en parler devant le Conseil commun.
Monsieur Vergès, vous avez évoqué la situation singulière des contractuels territoriaux outre-mer. A plus de 90 %, ils ont été recrutés hors des procédures normales. La plupart peuvent être recrutés comme titulaires par la voie sans concours. Il n'est donc pas utile d'ouvrir une nouvelle voie de titularisation.
Madame Escoffier, j'espère promouvoir la considération due aux agents publics mais nous ne pourrons échapper à une réflexion sur les effectifs des collectivités territoriales. C'est une question de responsabilité. Il faut rechercher l'efficience partout et s?interroger sur le meilleur équilibre entre le coût et le service rendu au public.
Monsieur Portelli, merci pour votre engagement. Je suis allé au CNFPT pour échanger avec les syndicats et les employeurs territoriaux associés à toutes les étapes de la négociation. J'installerai bientôt le Conseil commun, qui n'a pas vocation à gommer les spécificités des fonctions publiques mais à rechercher des voies de convergence au service de nos compatriotes et de nos agents. La composition de ce Conseil a, elle aussi, fait l'objet d'un accord. Votre amendement, cosigné par M. Vial, a été entièrement soutenu par la commission. Je soutiendrai la réforme du conseil d'administration de l'École polytechnique pour accroître son rayonnement. Il va falloir arbitrer entre vos commissions des lois et des finances...
Je crois avoir déjà répondu aux questions de M. Leconte.
L'accord du 31 mars 2011 a été examiné par les conseils supérieurs des trois fonctions publiques, avant d'être soumis au Conseil d'État dont M. Alain Richard était alors le rapporteur. J'ai été sensible à la tonalité des interventions car je pense aux quelque 100 000 personnes à qui nous adressons aujourd'hui un signe de considération.
M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois. - Cette discussion a été très positive. Notre commission a beaucoup travaillé la proposition de loi de M. Portelli, ainsi que les amendements tendant à mettre en musique l'accord auquel nous sommes arrivés grâce à Mme Klès et à MM. Portelli, Vial, Delebarre, Reichardt.
Nous avons été surpris que la commission des finances ait opposé l'article 40 car nous n'entendons aucunement accroître les charges des collectivités territoriales mais seulement financer de façon équitable le CNFPT.
Nos amendements n'augmentent pas d'un euro le montant total des dépenses publiques. Or, la commission des finances a fait preuve d'une particulière vigilance -pour être bienveillant, madame Troendle. (Sourires)
Nous faisons donc appel à vous, monsieur le ministre, pour sauver la réforme en cause. Nous pourrions arriver ensemble à satisfaire notre souci de réforme, dans l'intérêt des collectivités territoriales, des fonctionnaires et des centres de gestion.
Mme Catherine Troendle. - Très bien !
La discussion générale est close.
Discussion des articles
Article premier
M. Christian Favier. - Cet article déroge à la loi de 1984 qui organise le recrutement au sein de la fonction publique, reconstruite au sortir de la deuxième guerre mondiale sur les principes d'indépendance dans la défense de l'intérêt général. C'est pourquoi la loi de 1984 dispose que les fonctionnaires sont dans une situation statutaire et réglementaire. Nous sommes attachés à ce statut et opposés aux contrats, même en CDI. Le recrutement par concours est conforme à l'article 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 qui fonde l'égalité d'accès aux emplois publics sur les vertus et les talents. Il évite aussi l'arbitraire. Nous ne voulons pas, pour autant, enfermer les contractuels dans la précarité. Il nous faut donc arbitrer entre deux atteintes au statut. Nous choisissons la moins grave et la plus juste socialement : la titularisation d'agents contractuels.
Nous voterons donc l'article premier et, compte tenu de ce qui s'est dit ce matin en commission, retirons l'amendement n°36.
L'amendement n°36 est retiré.
L'article premier est adopté.
Article 2
M. Christian Favier. - Cet article délimite le périmètre du dispositif de titularisation, selon la formule de notre rapporteur. Nous comprenons la reprise du protocole, mais rien ne nous interdit de souhaiter une titularisation plus large, puisque le projet de loi laisse aux employeurs le soin de déterminer les emplois ouverts à la titularisation. Il y aura beaucoup de déceptions, d'autant que la règle de quatre ans aura un effet très limitatif.
On pouvait aller plus loin. Je regrette en particulier le manque d'ambition pour les agents à temps très incomplet. Ceux qui accomplissent un service à moins de 50 % sont particulièrement pénalisés. Il faudrait leur proposer un CDI à temps plein. D'autre part, certains employeurs dissimulent le caractère permanent d'emplois pourvus par des CDD à répétition.
Nous nous abstiendrons sur cet article.
Mme la présidente. - Amendement n°14, présenté par M. Leconte, Mmes Conway Mouret et Lepage et M. Yung.
Alinéa 1
Après les mots :
droit public
insérer les mots :
ou de contractuel recruté sur place, sur un contrat de droit local et exerçant dans un établissement d'enseignement visé aux articles L. 452-3 et L. 452-4 du code de l'éducation portant création de l'Agence pour l'enseignement français à l'étranger
M. Jean-Yves Leconte. - Il convient d'élargir le champ des bénéficiaires aux agents contractuels des établissements d'enseignement français à l'étranger recrutés pour répondre à un besoin permanent de l'État, qui ont basculé sur le droit local. La loi Sapin était limitée dans le temps, mais le plafond d'emplois imposé à l'Agence pour l'enseignement français à l'étranger est insuffisant pour accompagner sa croissance. Il faut donc ouvrir un dispositif analogue à celui de la loi Sapin.
Mme Catherine Tasca, rapporteur. - La titularisation dans la fonction publique d'État est conditionnée par le recours préalable à un contrat public. La commission est donc défavorable.
M. François Sauvadet, ministre. - Même avis défavorable.
L'amendement n°14 n'est pas adopté.
Mme la présidente. - Amendement n°15, présenté par M. Leconte, Mmes Conway Mouret et Lepage et M. Yung.
Alinéas 2 et 3
Remplacer ces alinéas par un alinéa ainsi rédigé :
...°Un emploi régi par le dernier alinéa de l'article 3, de l'article 4 et de l'article 6 de la loi n°84-16 du 11 janvier 1984 précitée dans sa rédaction antérieure à celle résultant de la présente loi, pour une quotité de temps de travail au moins égale à 70 % d'un temps complet ;
M. Jean-Yves Leconte. - Ne pas ouvrir la titularisation aux agents relevant des articles 3, dernier alinéa, et 6, deuxième alinéa, et ayant une réelle ancienneté revient à ne leur offrir aucune sécurisation puisqu'ils n'ont pas accès aux CDI, voire à ouvrir la porte à des fins de contrat anticipées, ce qui n'est pas l'objectif du protocole.
Mme Catherine Tasca, rapporteur. - L'amendement est satisfait par l'article 2, qui concilie la règle de l'emploi titulaire et la sécurisation des contractuels. Retrait ou rejet.
M. François Sauvadet, ministre. - Même avis. Le Gouvernement est parvenu à un accord avec les syndicats sur les « 10-12 ». Je défendrai un amendement en ce sens, qui vous donne satisfaction.
L'amendement n°15 est retiré.
Mme la présidente. - Amendement n°84, présenté par le Gouvernement.
I. - Alinéas 5 et 6
Remplacer ces alinéas par quatre alinéas ainsi rédigés :
II. - L'accès à la fonction publique de l'État prévu à l'article 1er de la présente loi est en outre ouvert aux agents occupant, à la date du 31 mars 2011, en qualité d'agent contractuel de droit public de l'État, de l'un de ses établissements publics ou d'un établissement public local d'enseignement, un emploi mentionné au dernier alinéa de l'article 3 ou au deuxième alinéa de l'article 6 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 précitée dans sa version antérieure à la date de publication de la présente loi, à temps complet ou incomplet pour une quotité de temps de travail au moins égale à 70 % d'un temps complet, et justifiant d'une durée de services publics effectifs au moins égale à quatre années en équivalent temps plein au cours des cinq années précédant le 31 mars 2011.
Les dispositions des trois premiers alinéas de l'article 3 ne leur sont pas applicables.
III. - Les agents employés dans les conditions prévues aux I et II du présent article doivent, au 31 mars 2011, être en fonction ou bénéficier d'un des congés prévus par le décret pris en application de l'article 7 de la loi n°84-16 du 11 janvier 1984 précitée.
Toutefois, les agents dont le contrat a cessé entre le 1er janvier et le 31 mars 2011 peuvent bénéficier de l'accès à la fonction publique prévu à l'article 1er de la présente loi, dès lors qu'ils remplissent la condition de durée de services publics effectifs définie respectivement au II du présent article ou à l'article 3 de la présente loi.
II. - Alinéa 7
Au début de cet alinéa
Remplacer la référence :
III
par la référence :
IV
M. François Sauvadet, ministre. - Je ne tarde pas à satisfaire M. Leconte !
Certaines administrations recrutent des agents par contrats à durée déterminée de dix mois sur douze. Ces agents sont réemployés, après une interruption de leur contrat de deux mois, pour exercer des fonctions identiques auprès du même employeur. Ils peuvent finir par avoir une ancienneté de plusieurs années.
Mme la présidente. - Amendement n°78, présenté par M. Delahaye.
Alinéa 6
Supprimer cet alinéa.
M. Vincent Delahaye. - Je n'ai pas bien compris cet alinéa.
Si ces agents ne sont plus en poste, il y a de fortes probabilités pour que le besoin de la collectivité ait disparu, que le poste ait été pourvu ou que l'agent qui était remplacé soit revenu.
Mme Catherine Tasca, rapporteur. - Les explications de M. le ministre sont claires. La commission est favorable à l'amendement n°84, une mesure d'équité attendue, et défavorable à l'amendement n°78, contraire au protocole d'accord.
M. François Sauvadet, ministre. - Je souscris à cette analyse : il faut éviter les effets couperet.
M. Vincent Delahaye. - Ma lanterne n'a pas été éclairée par ces explications : des personnes ayant quitté la collectivité ne doivent pas, à mon sens, être réintégrées.
L'amendement n°84 est adopté.
L'amendement n°78 n'a plus d'objet.
Mme la présidente. - Amendement n°75 rectifié, présenté par MM. Zocchetto, Delahaye et Guerriau.
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... - Les dispositions du présent article s'appliquent aux collaborateurs des groupes parlementaires.
M. Vincent Delahaye. - Les collaborateurs des groupes parlementaires doivent pouvoir accéder à l'emploi titulaire de la fonction publique de l'État dans les mêmes conditions que les agents contractuels. Les collaborateurs jouent un rôle comparable à celui des administrateurs mais sans aucun statut ni même convention collective ! Ils sont dans un no man's land juridique.
Mme Catherine Tasca, rapporteur. - Non, ce n'est pas un no man's land juridique. Et le protocole du 31 mars 2011 est limité aux agents contractuels de droit public, ce qui n'est pas le cas des salariés qui vous préoccupent. Avis défavorable.
M. François Sauvadet, ministre. - Même avis : le projet de loi concerne les agents recrutés sur le fondement de la fonction publique, ce qui n'est pas le cas des personnes recrutées sur la base du droit privé.
Mme Catherine Troendle. - Comme vice-présidente du groupe UMP, je souligne que l'article 51-1 de la Constitution, tel qu'il résulte de la réforme de 2008, fonde les droits des groupes parlementaires. Ceux-ci sont désormais reconnus comme des rouages essentiels de la vie parlementaire. Il importe que nous poursuivions la réflexion sur leur organisation et leur fonctionnement.
L'amendement n°75 rectifié n'est pas adopté.
L'article 2, modifié, est adopté, ainsi que l'article 2 bis.
Article 3
Mme Claudine Lepage. - En 2009, il y avait 890 598 contractuels dans la fonction publique. Le ministère des affaires étrangères et européennes en est particulièrement friand : ils représentent le tiers de ses effectifs, dont 80 % en CDD, aussi bien dans l'administration centrale que dans les postes diplomatiques et consulaires ou dans le réseau culturel.
Seuls 50 d'entre eux bénéficieront d'une titularisation et 150 d'une cédéisation, sans parler des recrutés locaux, véritables prolétaires du ministère, qui n'y auront pas droit. La politique menée par la majorité présidentielle ces dernières années a augmenté le nombre de contractuels et pèse sur le pouvoir d'achat des fonctionnaires.
Contrairement aux plans de titularisation passés, le dispositif prévu aura un effet pervers : le non-renouvellement des CDD. Notre réseau culturel à l'étranger est particulièrement concerné ; les agents contractuels en sont les véritables piliers. Ils ressentent une profonde amertume, car, après s'être joué de la réglementation pendant des années, le ministre rechigne à prendre ses responsabilités.
Mme la présidente. - Amendement n°16, présenté par M. Leconte, Mmes Conway Mouret et Lepage et M. Yung.
Après l'alinéa 3
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« - soit, au plus tard, à la date du premier jour des épreuves du recrutement auquel ils postulent. Dans ce cas, au moins deux des quatre années de services exigées, en équivalent temps plein, doivent avoir été accomplies au cours des quatre années précédant le 31 mars 2011.
M. Jean-Yves Leconte. - Cet amendement ne fait que reprendre le texte du protocole d'accord signé le 31 mars.
Mme Catherine Tasca, rapporteur. - Avis favorable.
M. François Sauvadet, ministre. - Défavorable, pour l'application du droit commun des concours. Il y a un accord avec les syndicats sur ce point.
M. Jean-Yves Leconte. - Je maintiens l'amendement. Mes propositions sont également concertées avec les syndicats.
M. François Sauvadet, ministre. - Vous risquez de retarder le processus de titularisation. Faites confiance au Gouvernement et retirez votre amendement !
M. Jean-Jacques Hyest. - Eh oui !
M. François Sauvadet, ministre. - Il y a une erreur dans la rédaction du protocole !
M. Jean-Yves Leconte. - Soit.
L'amendement n°16 est retiré.
M. François Sauvadet, ministre. - Merci.
Mme la présidente. - Amendement n°37, présenté par M. Favier et les membres du groupe CRC.
Alinéa 4
Rédiger ainsi cet alinéa :
Les quatre années de services publics doivent avoir été accomplies au sein de la fonction publique de l'État, dans l'un ou plusieurs de ses établissements publics ou dans un ou plusieurs établissements publics local d'enseignement. Cette condition est également prise en compte dans les cas prévus au II de l'article 2.
M. Christian Favier. - La rédaction actuelle de l'alinéa 4 pourrait exclure du dispositif des agents non titulaires dont la durée d'ancienneté requise n'est pas suffisante, au sein d'un même ministère, alors que la durée totale de contrat au sein de l'ensemble de la fonction publique de l'État pourrait être atteinte. Le principe d'unicité de la fonction publique d'État est en cause, alors que le Conseil d'État en a rappelé le rôle central dans la conception française de la fonction publique. Nous proposons que l'ancienneté s'analyse au sein de l'ensemble de la fonction publique de l'État, dans l'un ou plusieurs de ses établissements publics et dans les établissements publics locaux d'enseignement.
Ce propos est cohérent avec la mobilité et le dialogue social que le Gouvernement entend encourager !
Mme la présidente. - Amendement n°17, présenté par M. Leconte, Mmes Conway Mouret et Lepage et M. Yung.
Alinéa 4
Remplacer les mots :
auprès du département ministériel
par les mots :
en tant que contractuel de l'État
M. Jean-Yves Leconte. - Le Parlement n'a pas à être le notaire d'un protocole conclu avec le Gouvernement, qui privilégie les départements ministériels à l'unicité de la fonction publique d'État, ouvrant la voie à un véritable ping-pong de contractuels entre ministères.
L'État doit mieux gérer ses ressources humaines.
Mme la présidente. - Amendement n°98, présenté par le Gouvernement.
Alinéa 4
Remplacer les mots :
au II de l'article 2
par les mots :
au deuxième alinéa du III de l'article 2
M. François Sauvadet, ministre. - Amendement de coordination avec l'amendement n°84.
Mme Catherine Tasca, rapporteur. - La notion d'employeur déterminée par le projet de loi a été actée par le protocole d'accord. La titularisation est aussi appréciée sur le fondement de l'expérience acquise auprès de l'employeur. En diluant le lien avec celui-ci, on élargit la population éligible et on risque de faire des déçus. Ce texte nous place sans cesse devant un choix cornélien : faciliter la titularisation des contractuels dans des conditions dérogatoires au statut général de la fonction publique ou préserver le recrutement des fonctionnaires par concours.
La commission est défavorable aux amendements nos37 et 17. Avis favorable à l'amendement de coordination n°98.
M. François Sauvadet, ministre. - Même avis pour les mêmes raisons sur les amendements nos17 et 37.
L'amendement n°37 n'est pas adopté, non plus que l'amendement n°17.
L'amendement n°98 est adopté.
Mme la présidente. - Amendement n°38, présenté par M. Favier et les membres du groupe CRC.
Alinéa 8
Remplacer les mots :
ou de l'article 5
par les mots :
de l'article 5 ou de l'alinéa 2 de l'article 6
M. Christian Favier. - Nous proposons de prendre en compte, dans l'intérêt des agents publics pouvant bénéficier de l'article 7 de ce projet de loi, les périodes de travail réalisées en raison de l'alinéa 2 de l'article 6 de la loi du 13 juillet 1983, c'est-à-dire les périodes correspondant à la satisfaction d'un besoin saisonnier ou occasionnel.
Nous saluons l'initiative de la commission des lois d'autoriser le remplacement temporaire d'un fonctionnaire en congé légal mais nous estimons nécessaire de la compléter.
Mme Catherine Tasca, rapporteur. - L'amendement est satisfait par notre texte. Seuls sont exclus les contrats sur emplois permanents qui, par nature, dérogent aux règlent sur le recours aux non-titulaires.
M. Christian Favier. - J'en prends acte. Si les périodes d'emplois saisonniers sont bien prises en compte, nous le retirons.
Mme Catherine Tasca, rapporteur. - Le ministre pourra le confirmer.
M. François Sauvadet, ministre. - Je le confirme.
Mme Catherine Tasca, rapporteur. - J'en profite pour vous interroger sur la situation des chercheurs, inquiets de la politique de leur administration, par exemple du CNRS.
Malgré le protocole et une circulaire de novembre 2011, un certain nombre d'employeurs mettent un terme à leur contrat pour les empêcher d'acquérir l'ancienneté nécessaire à leur titularisation.
Ces pratiques font peser un doute profond sur la manière dont certains employeurs publics interprètent cette réforme à laquelle nous sommes aussi attachés que vous.
M. François Sauvadet, ministre. - Je demande aussi le retrait de l'amendement n°38, dont la rédaction va à l'encontre de votre objectif. L'amendement du Gouvernement sur l'article 2 prévoit justement l'inclusion de ces périodes.
La situation que vous avez exposée, madame le rapporteur, me préoccupe. M. Wauquiez a pris des mesures. Le Gouvernement est conscient que l'on ne peut accepter ces pratiques et je suis prêt à déposer un amendement en ce sens à l'Assemblée nationale.
L'amendement n°38 est retiré.
Mme la présidente. - Amendement n°39, présenté par M. Favier et les membres du groupe CRC.
Alinéa 9
Remplacer les mots :
à la date de publication de la présente loi
par les mots :
au 31 mars 2011
M. Christian Favier. - Nous proposons de faire référence à la date de signature du protocole que ce projet de loi prétend vouloir transposer.
Mme Catherine Tasca, rapporteur. - Cet amendement fige la population éligible à la titularisation. Il prive les agents qui remplissent la condition d'ancienneté requise entre le 31 mars 2011 et la date de promulgation de la loi. Défavorable, à moins que vous ne le retiriez.
M. François Sauvadet, ministre. - Même avis, pour les mêmes raisons.
M. Christian Favier. - J'en prends acte. La volonté des organisations syndicales était forte.
M. François Sauvadet, ministre. - L'article a été rédigé en accord avec les syndicats.
L'amendement n°39 est retiré.
M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois. - Je souhaite obtenir une réponse précise au sujet des chercheurs qui ont le sentiment que des dispositions sont prises pour réduire le personnel susceptible de bénéficier de la loi avant qu'elle ne soit promulguée. Un dégraissage du personnel précaire est en cours par non-reconduction des contrats, en totale contradiction avec l'esprit de la future loi et avec la circulaire ministérielle. Dans l'amendement que vous avez dit vouloir déposer à l'Assemblée nationale, y aura-t-il des conditions strictes de délai, afin que le personnel en fonction depuis que l'on parle de cette loi ne puisse être écarté de son bénéfice ? Les chercheurs concernés écoutent et prendront connaissance de votre réponse.
Mme Catherine Tasca, rapporteur. - Un des motifs du soupçon pesant sur ces pratiques tient à l'absence de transparence. Il y a des indicateurs de volume, mais pas de liste nominative, ce qui empêche tout contrôle par les organisations syndicales.
M. François Sauvadet, ministre. - Mon collègue Wauquiez a été saisi du problème. Des consignes très strictes ont été données à son initiative pour que soit mis un terme à ces pratiques. Je répète que je proposerai à l'Assemblée nationale les dispositions qui s'imposent pour qu'elles cessent.
J'ai évoqué la situation avec M. Wauquiez et les organisations syndicales. Nous devons avoir effectivement une vision précise des effectifs concernés. Un comité de suivi a été mis en place par mon collègue.
Il faudra néanmoins prendre en compte la spécificité des contrats de recherches, mais il n'est pas question qu'un texte destiné à réduire la précarité aboutisse à l'aggraver.
L'article 3 est adopté, le groupe CRC s'abstenant.
Article 4
Mme la présidente. - Amendement n°40, présenté par M. Favier et les membres du groupe CRC.
Alinéa 3
Rédiger ainsi cet alinéa :
2° Des concours réservés pour des emplois figurant sur une liste établie par décret en Conseil d'État.
M. Christian Favier. - Il y a une certaine contradiction à prévoir l'intégration dans la fonction publique sur la base d'examens professionnels réservés censés valider les compétences acquises pendant la période de contrat de l'agent et l'organisation de concours.
Nous proposons de préciser que les concours réservés ne sont prévus que dans le cadre d'emplois définis par décret en Conseil d'État, afin que les organisations syndicales soient associées à l'établissement de cette liste.
Mme Catherine Tasca, rapporteur. - Les concours réservés sont l'un des modes d'accès à la titularisation prévue par le protocole du 31 mars 2011. L'amendement créerait une fonction publique bis. Défavorable.
M. François Sauvadet, ministre. - Même avis.
L'amendement n°40 n'est pas adopté.
L'article 4 est adopté, le groupe CRC s'abstenant.
Article 5
Mme la présidente. - Amendement n°41, présenté par M. Favier et les membres du groupe CRC.
Alinéa 1, première phrase
Remplacer les mots :
qu'ils ont exercées pendant une durée de quatre ans en équivalent temps plein dans l'administration auprès de laquelle ils sont éligibles
par les mots :
qu'ils exerçaient au 31 mars 2011
M. Christian Favier. - Bien que la commission des lois soit revenue sur la rédaction initiale du projet, il faut aller plus loin car le risque est grand que, pour éviter une perte de responsabilité et de rémunération, l'agent concerné préfère demeurer contractuel.
Mme Catherine Tasca, rapporteur. - Je tiens à vous rassurer. Notre texte sécurise les conditions de la titularisation, qui repose sur les acquis professionnels et la réalité des services accomplis. Pour mieux en tenir compte, la commission distingue selon la nature du contrat et selon la durée des services. De ce fait, si l'agent qui reste contractuel peut être cédéisé, sa titularisation le protège de ce que vous craignez. Avis défavorable.
M. François Sauvadet, ministre. - Même avis. C'est dans la catégorie où l'agent a exercé pendant quatre ans que la titularisation peut intervenir.
L'amendement n°41 n'est pas adopté.
L'article 5 est adopté, le groupe CRC s'abstenant.
Article 6
Mme la présidente. - Amendement n°42, présenté par M. Favier et les membres du groupe CRC.
Alinéa 2
Après les mots :
Des arrêtés ministériels fixent
insérer les mots :
après avis du Conseil supérieur de la fonction publique d'État
M. Christian Favier. - Nous voulons étendre la titularisation mais l'article 40 nous en empêche. Nous voulons renforcer le service public et mettre fin à sa casse. Prenons l'exemple de la perte d'autonomie : reste à charge, accueil en établissement, il faut une prise en charge publique, en faisant appel à la solidarité. La politique conduite par le Gouvernement ne l'autorise pas.
Nous ne voulons pas lui laisser le soin de fixer le nombre d'emplois ouverts à la titularisation.
Une circulaire de novembre 2011 prévoit une concertation avec les partenaires sociaux. C'est un premier pas. Nous proposons que le dispositif visé par cet article demeure législatif.
Nous voterons contre cet article.
Mme Catherine Tasca, rapporteur. - Votre préoccupation quant à la poursuite du dialogue social est légitime mais l'amendement est satisfait par la mise en place du comité de suivi du protocole, dont les syndicats sont partie. Le ministre pourra vous confirmer qu'il va bientôt se réunir.
Je rappelle que le CSFPE peut se saisir de toute question d'intérêt général sur demande du tiers de ses membres. Défavorable à l'amendement si vous ne le retirez pas.
M. François Sauvadet, ministre. - Nous en sommes déjà à la quatrième réunion du comité de suivi, où j'ai souhaité que siègent les organisations signataires. La prochaine réunion se tiendra le 2 février, avant l'examen du texte par l'Assemblée nationale. Le dialogue social est nourri et actif.
Vous pourriez retirer votre amendement pour en encourager la poursuite.
M. Christian Favier. - Je le maintiens.
L'amendement n°42 n'est pas adopté.
L'article 6 est adopté.
Article 7
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. - Cet article pose le principe de la transformation des CDD de la fonction publique en CDI. Dans le contexte de la RGPP, voire de la remise en cause du statut des fonctionnaires, cette cédéisation fragilise le principe du recrutement par concours, qui doit être réaffirmé, et ouvre la voie à la généralisation des contrats. Ce projet exclut de la cédéisation les personnes les plus précaires.
Comment concilier la résorption de la précarité avec les exclusions de l'accès à la titularisation posées dans cet article qui, à l'image de ce projet, ne nous convainc pas ? Nous nous abstiendrons.
Mme la présidente. - Amendement n°106, présenté par Mme Tasca, au nom de la commission.
Alinéa 1
Remplacer les mots :
des articles 3, 4 ou 6
par les mots :
de l'article 3, de l'article 4 ou de l'article 6
Mme Catherine Tasca, rapporteur. - Rectification d'une erreur matérielle.
M. François Sauvadet, ministre. - Très favorable !
L'amendement n°106 est adopté.
L'article 7, modifié, est adopté, le groupe CRC s'abstenant.
L'article 8 est adopté.