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Table des matières
Répartition de la taxe sur les éoliennes en mer
Traduction des brevets européens
Sanctions pénales à Saint-Barthélemy
Traitement des déchets d'activités de soins à risques infectieux (DASRI)
Unité de cardiologie interventionnelle à Mantes-la-Jolie
Bonification indiciaire des enseignants référents
Schéma directeur de la région Île-de-France
Réintroduction des farines animales dans les élevages
ZAC « Carmes Madeleine » à Orléans
Modification à l'ordre du jour
Dispositifs « amiante » (Question orale avec débat)
Ordre du jour (Espace réservé au groupe socialiste)
Retraites (Saisines du Conseil constitutionnel)
SÉANCE
du mardi 2 novembre 2010
21e séance de la session ordinaire 2010-2011
présidence de M. Roland du Luart,vice-président
Secrétaires : Mme Michelle Demessine, M. Philippe Nachbar.
La séance est ouverte à 9 h 35.
Le procès-verbal de la précédente séance, constitué par le compte rendu analytique, est adopté sous les réserves d'usage.
Questions orales
M. le président. - L'ordre du jour appelle la réponse à dix-sept questions orales.
Répartition de la taxe sur les éoliennes en mer
M. Raymond Couderc. - Voici un an et demi, j'ai interrogé votre ministère sur le décret du 26 août 2008 relatif à la taxe sur les éoliennes en mer. Ce décret mérite d'être précisé ; tout d'abord pour la prise en compte de la population littorale. Faut-il prendre en compte la population légale, la population DGF ou la population touristique ?
D'autre part, la faible incidence de la distance des communes bénéficiaires induit des distorsions.
Ainsi, les communes d'Agde, de Narbonne pourraient capter l'essentiel de la taxe, au détriment des communes littorales. Narbonne, grâce à la population de Narbonne Plage, percevrait ainsi deux fois et demi plus de taxes que Valras.
Pouvez-vous m'éclairer ?
Mme Anne-Marie Idrac, secrétaire d'État chargée du commerce extérieur. - Des modifications sont intervenues depuis votre question écrite. Le produit de la taxe est affecté au Fonds, modifié par la loi de modernisation de l'agriculture. Désormais, la première moitié est répartie entre les seules communes littorales, et la seconde moitié comme suit : 35 % pour la pêche durable, le reste pour des projets durables sur la façade littorale.
J'en viens au calcul de la taxe. Le décret du 26 août 2008 n'a pas été modifié par la loi de modernisation de l'agriculture. On prend en compte la population totale, établie par le dernier recensement de l'Insee. Le Fonds ne fait que compenser la gêne visuelle et économique dans les communes littorales.
M. Raymond Couderc. - Il existe un problème d'acceptabilité de ces installations par la population dans ces communes entièrement littorales qui s'estimeraient lésées si Agde ou Narbonne, à l'intérieur des terres, en profitaient.
Avenir des missions locales
M. Ronan Kerdraon. - Les missions locales jouent un rôle pivot dans l'accompagnement des jeunes, très touchés par le chômage. Les grandes orientations budgétaires pour 2001-2013 indiquent une réduction de la participation de l'État, hors plan de relance, contrairement à ce qu'avait annoncé M. Wauquiez.
Il ne suffit pas de flatter, comme l'a fait votre collègue ; il faut apporter des garanties. Non contents de supprimer les crédits, vous réduisez les dispositifs d'accompagnement. Vous sonnez ainsi le glas des emplois aidés. Dans la mission que je préside, le nombre de jeunes demandeurs d'emploi s'est accru de 40 %.
Un conseiller finit par gérer 150 jeunes, avec deux ou trois rendez-vous hebdomadaires pour chacun : c'est intenable ! Le fonctionnement de ces structures est menacé. Comment comptez-vous garantir le bon fonctionnement du service public de l'emploi en lui imposant de faire mieux avec moins ?
Mme Anne-Marie Idrac, secrétaire d'État chargée du commerce extérieur. - Je vous prie d'excuser l'absence de M. Wauquiez.
Le rôle des missions locales est effectivement majeur et le soutien de l'État ne faiblira pas, comme M. Wauquiez l'a confirmé le 30 septembre en signant un protocole : les crédits seront maintenus en 2011, ce qui atteste la reconnaissance par l'État du rôle de pivot des missions locales. Les crédits au titre du plan de relance étaient une réponse exceptionnelle à la crise. Les moyens pérennes des missions locales permettent leur bon fonctionnement, ce qu'un récent rapport de l'inspection générale des finances a confirmé.
M. Ronan Kerdraon. - Je ne suis pas convaincu. En Bretagne, 800 postes risquent d'être supprimés. Il y a vraiment un risque de désengagement de l'État. Je souhaiterais que les discours de M. Wauquiez sur les missions locales au coeur de la bataille pour l'emploi soient réellement traduits dans les faits.
Financement des emplois aidés
M. Martial Bourquin. - Une nouvelle illustration du désengagement de l'État ! Par une circulaire du 8 juillet 2010, les associations d'insertion et les collectivités ont appris que le taux de participation de l'État baisserait de 90 % à 80 % au deuxième semestre 2010, alors que le chômage frappe plus de 10 % de la population active. Cela ressemble à une double peine : économique et sociale pour nos concitoyens et les collectivités locales. Je pense aux communes rurales et aux quartiers urbains en difficulté. Le Gouvernement va-t-il cesser de passer aux associations le mistigri de la lutte contre la précarité ?
La crise n'est pas finie et le plan de relance, qui a aidé massivement les banques et les grandes entreprises, doit commencer pour les populations durement frappées.
Mme Anne-Marie Idrac, secrétaire d'État chargée du commerce extérieur. - Je vous prie également d'excuser l'absence de M. Wauquiez.
En 2010, l'État a massivement recouru aux contrats aidés. En 2010, il y a eu 400 000 CAE et 120 000 CEI, au niveau le plus élevé depuis dix ans.
Les contrats aidés ne visent pas à financer des emplois pérennes, mais l'insertion. En 2010, une surconsommation des crédits a eu lieu au cours des trois premiers trimestres, d'où le ralentissement actuel, mais les engagements de l'État pour 2010 seront respectés : Mme Lagarde l'a indiqué aux préfets la semaine dernière.
La priorité sera accordée à certains contrats comme les auxiliaires de vie scolaire. L'an prochain, 340 000 emplois aidés seront financés dans le secteur non marchand et 50 000 dans le secteur marchand, grâce à un pilotage pragmatique qui tient compte de l'effort budgétaire nécessaire.
M. Martial Bourquin. - Le chômage n'a pas baissé durablement, puisqu'on dénombre 28 000 demandeurs d'emploi supplémentaires. La précarité s'étend. Nous traversons la crise la plus grave depuis 1929 ! Tout le monde attend la partie sociale du plan de relance, l'emploi étant le thème déterminant. Quelque 100 000 personnes de plus au travail représentent 1,5 milliard pour la protection sociale : ce désengagement de l'État est dommageable. Le Gouvernement doit revoir sa copie.
Traduction des brevets européens
M. Richard Yung. - Ma question concerne l'accord de Londres et la traduction des brevets européens. Entré en vigueur en 2008, il réduit les coûts de traduction des brevets européens. Auparavant, un impôt frappait l'innovation en Europe, puisqu'aux termes de la convention de Munich, il fallait traduire le brevet en 27 langues.
Désormais, la traduction se limite à l'une des trois langues officielles : français, anglais, allemand. Pouvez-vous dresser le bilan de l'accord de Londres, notamment pour les économies réalisées et sur l'emploi des traducteurs ?
Mme Anne-Marie Idrac, secrétaire d'État chargée du commerce extérieur. - Après deux ans d'application, le ministère de l'industrie a lancé une étude qui n'est pas terminée. Toutefois, ses premiers résultats confirment une économie de 25 à 30 %, permettant aux entreprises d'accroître la couverture géographique des brevets. A ce jour, quinze États sont partie à cet accord, le dernier en date étant la Lituanie, la Hongrie s'apprêtant à le mettre en oeuvre à compter du 1er janvier prochain.
D'autre part, les instances européennes travaillent à la création d'un brevet européen unique, enfin !
Concernant les traducteurs de brevet, il y a eu des mesures de formation et de reconversion, au sein de l'Afnor en particulier, et des mesures sociales et fiscales au cas par cas.
M. Richard Yung. - Les pays non signataires vont se trouver progressivement isolés ce qui les conduira à ratifier l'accord. Pourtant, un point de blocage demeure : l'Espagne.
Initiatrice de l'accord de Londres, la France devrait inciter l'Espagne à rejoindre le dispositif. Je regrette notre timidité. Que le Gouvernement fasse comprendre à l'Espagne l'intérêt de ratifier ou que l'on aille vers des coopérations renforcées.
La séance, suspendue à 10 h 5, reprend à 10 h 15.
Sanctions pénales à Saint-Barthélemy
M. Michel Magras. - Aux termes de l'article L.0. 3214-3, la collectivité de Saint-Barthélemy peut fixer des règles applicables et des sanctions locales dans ses domaines de compétence, pour peu qu'elles soient confirmées par décret, puis ratifiées par la loi. Or, les délais sont longs. Ainsi l'acte fixant les sanctions en matière d'urbanisme reste dans l'attente de sa ratification depuis le 23 décembre 2009. Dans ces conditions quelles règles faut-il appliquer ? Même si le code national est abrogé, les sanctions pénales qu'il contient continuent-elles à s'appliquer ?
M. Jean-Marie Bockel, secrétaire d'État à la justice. - La collectivité de Saint-Barthélemy exerce des compétences d'urbanisme ordinairement réservées à l'État, y compris pour la dimension pénale. Tant que les dispositions locales n'ont pas été substituées aux dispositions nationales abrogées, il revient aux autorités locales d'appliquer les sanctions nationales. Si cela ne paraît pas applicable à chaque cas d'espèce, les autorités locales peuvent appliquer les sanctions de droit commun les plus adaptées, comme celles relevant de la mise en danger d'autrui.
M. Michel Magras. - Votre réponse est claire mais je regrette ces délais qui retardent l'entrée en vigueur des règles locales.
Bilan du contrat d'autonomie
Mme Virginie Klès. - La question écrite que j'avais adressée au ministère sur le contrat d'autonomie n'ayant pas reçu de réponse, je remercie M. Bockel de le faire aujourd'hui oralement.
Nous avons besoin d'un bilan du contrat d'autonomie, indispensable vu le fort taux de chômage des jeunes. Le ministère du travail a annoncé en avril 2010 que 26 486 contrats d'autonomie avaient été signés et que 4 247 jeunes bénéficient désormais d'un emploi stable. Je voudrais connaître le rôle des opérateurs privés, à côté des missions locales, les sommes engagées, le nombre de jeunes bénéficiant d'un emploi durable, les critères qualitatifs et quantitatifs pour apprécier ces sorties.
M. Jean-Marie Bockel, secrétaire d'État à la justice. - Élu local, je suis intéressé par votre question à laquelle M. Wauquiez me prie de vous répondre. En septembre 2010, plus de 36 000 contrats d'autonomie ont été signés depuis septembre 2008, soit 82 % des 45 000 de l'objectif pour 2011. Votre question écrite venait sans doute un peu tôt.
Une évaluation a été réalisée : sur 7 500 jeunes, 63 % ont accédé à un emploi, 35 % à une formation qualifiante. Ces résultats sont encourageants ! D'autant qu'un jeune sur deux en contrat d'autonomie n'a aucune formation au départ. Les 61 millions d'euros engagés par l'État sont donc utiles. La démarche d'évaluation est primordiale. Le dispositif est très apprécié par les jeunes, d'après une enquête de la Dares, même s'il faut encore améliorer la prospection de l'emploi et le partenariat avec les acteurs économiques, et le taux de sortie positive progresse. L'accompagnement des jeunes dans l'emploi est une priorité du Gouvernement.
Mme Virginie Klès. - Merci de cette réponse, mais j'aimerais en savoir plus sur les critères utilisés pour établir l'évaluation et l'affectation précise des sommes aux missions locales, aux organismes privés et aux jeunes. L'accompagnement des jeunes ne doit pas être confié à des organismes privés. Il faudrait placer les missions locales au coeur du dispositif, qui connaissent bien ces jeunes les plus en difficulté, et augmenter les crédits pour les cadets de la République et les écoles de la deuxième chance.
Traitement des déchets d'activités de soins à risques infectieux (DASRI)
M. Claude Biwer, en remplacement de M. Yves Détraigne. - M. Détraigne s'interroge sur les retards pris dans la mise en oeuvre du principe de responsabilité élargie à la filière de traitement des Dasri, prévue par l'article 30 de la loi de finances pour 2009.
Près de 10 % de ces déchets sont encore mélangés aux déchets ménagers. L'Hexagone compte 4 000 à 5 000 centres de collecte, alors qu'il en faudrait 10 000. La loi Engagement national pour l'environnement avait prévu un circuit de collecte et d'élimination.
Quand sera enfin mise en place la filière sécurisée dédiée ?
Mme Rama Yade, secrétaire d'État chargée des sports. - La loi de finances pour 2009 n'avait pas distingué entre Dasri coupants et piquants, et simples compresses, qu'il n'est pas envisageable de faire rapporter en pharmacie. L'article 187 de la loi Grenelle 2 n'est donc pas totalement appliqué, un décret étant en cours de rédaction.
A compter du 1er novembre 2011, des réceptacles spécifiques seront mis à la disposition des pharmaciens pour collecter les déchets coupants, en application du décret du 24 octobre relatif à la mise à disposition de conteneurs pour les patients en auto-traitement.
M. Claude Biwer. - Merci de votre réponse mais c'est encore loin...
Unité de cardiologie interventionnelle à Mantes-la-Jolie
Mme Catherine Tasca. - J'interviens en saluant la présence dans les tribunes du public d'une délégation conduite par le premier adjoint au maire, à propos de la fermeture de l'unité de cardiologie interventionnelle de l'hôpital François Quesnay. L'ARH avait autorisé en 2008 l'hôpital de Mantes à se doter d'une salle de coronarographie, fonctionnant 24 heures sur 24, avec le personnel nécessaire...
Moins de six mois après son ouverture, l'ARS annonce son intention de la fermer. Ce gâchis humain et financier est dû à une application rigoureuse d'un décret fixant un seuil d'insuffisante activité, alors que l'objectif de 350 actes annuels était en vue.
S'ajoute la fermeture -en principe temporaire- du service de soins intensifs de cardiologie, qui menace en réalité la pérennité du service de cardiologie, dans un bassin en pleine expansion démographique où réside de surcroît une population défavorisée.
Mme Rama Yade, secrétaire d'État chargée des sports. - De nouveaux décrets exigent 350 actes de cardiologie interventionnelle, ce que l'ARS d'Ile-de-France a logiquement appliqué.
Le centre hospitalier de Mantes-la-Jolie avait développé son activité, dès 2007, sans autorisation. Conscient de ne pouvoir atteindre le seuil requis, l'établissement a renoncé à cette activité, que l'ARS n'aurait pu accepter, d'autant que le territoire concerné dispose de quatre unités -deux publiques et deux privées.
Une coopération engagée avec l'hôpital d'Evecquemont permet de maintenir les soins. Mme Bachelot demandera à l'ARS d'en demander le renforcement. Pour le reste le centre hospitalier de Mantes-la-Jolie poursuivra ses activités de cardiologie et de soins intensifs.
Mme Catherine Tasca. - Comment croire qu'un tel service ait été créé sans autorisation ? En réalité, les règles ont changé. Nous demandons la suspension de cette décision de fermeture, pour que l'établissement ait une chance d'atteindre les 350 actes.
Le directeur général de l'ARS, M. Évin, a reconnu la constante progression de l'activité. Nous vous demandons de surseoir à la décision de fermeture afin de réaliser une évaluation objective.
Inauguré en grande pompe par M. Chirac, l'hôpital de Mantes-la-Jolie dessert une population défavorisée. De même qu'à Trappes, le Gouvernement privilégie l'offre privée.
La fermeture de l'unité de cardiologie interventionnelle aggraverait les inégalités d'accès aux soins et la fracture territoriale.
Branche sud du TGV Rhin-Rhône
M. Gilbert Barbier. - Le TGV Rhin-Rhône devait être le premier à ne pas partir de Paris. Sa banche sud devait être réalisée simultanément à la branche est, mais sa construction semble compromise.
RFF vient de remettre son projet au préfet coordonnateur ; des études complémentaires sont demandées. Prépare-t-on son enterrement ?
Faute de financement suffisant -notamment régional- il semble que cette branche ne soit plus prioritaire.
Élu du Jura, j'aimerais rester optimiste, mais les rumeurs circulent à grande vitesse.
La branche ne serait pas rentable ? Qu'on le dise, sans pratiquer la langue de bois, au lieu de demander des compléments. Pouvez-vous faire un point sur ce dossier ?
Mme Rama Yade, secrétaire d'État chargée des sports. - Cette branche doit relier la branche est, pour réduire les temps de trajet vers la méditerranée et accroître le fret ferroviaire.
Une consultation très large a été conduite par le préfet coordonnateur, qui remettra bientôt ses conclusions à M. Borloo. Le Gouvernement pourra donc se prononcer. Je précise que ce projet figure parmi les 2 000 kilomètres de lignes à grande vitesse mentionnées par la loi Grenelle 1. Elle fait bien partie de l'axe prioritaire européen reliant Lyon à Rotterdam et Anvers, via Paris.
M. Gilbert Barbier. - Je sais qu'une ligne mixte est envisagée. C'est très différent d'une ligne à grande vitesse!
A Bruxelles, le son de cloche est différent : le projet ne figure plus dans les priorités.
Je ne peux me satisfaire de votre réponse.
Fiscalité du Floc de Gascogne
M. Aymeri de Montesquiou. - Malgré des caractéristiques comparables à celles du Floc de Gascogne, les vins doux naturels et les vins aromatisés, comme le Martini, sont incomparablement moins taxés : 1,63 euro de taxes pour la bouteille de Floc, contre 40 centimes pour les vins doux naturels et 3 centimes pour les vins aromatisés industriels.
Certes, le moindre euro compte, mais dans un proche avenir, la recette disparaitra avec les producteurs ! Ils ont donc engagé, avec les producteurs de Pineau, une grève fiscale pour protester contre la discrimination dont ils sont victimes.
En décembre 2002, le ministre délégué au budget avait mis en place un plan quinquennal de soutien en faveur des vins de liqueur AOC. Comptez-vous reconduire ce plan ? Comptez-vous prendre d'autres mesures ? Quand allez-vous mettre fin à cette injustice en taxant de la même façon des produits similaires ?
M. Gilbert Barbier. - Très bien !
Mme Rama Yade, secrétaire d'État chargée des sports. - Cette fiscalité est issue de la directive européenne du 19 octobre 1992, qui concerne les seuls produits intermédiaires, issus en partie ou entièrement de la fermentation.
Les produits assimilés au vin ont adapté leur processus de fabrication pour bénéficier d'une fiscalité réduite.
Consciente des conséquences préjudiciables du régime, la France a saisi les autorités européennes.
Il reste que les produits dits « intermédiaires » seront nécessairement plus lourdement taxés. Il est à noter cependant que toute modification brutale de la structure de taxation nationale risquerait de provoquer des déséquilibres préjudiciables à l'ensemble du secteur des boissons alcooliques.
Dans ces conditions, les évolutions de fiscalité sur ces produits ne peuvent intervenir sans une concertation interministérielle associant notamment les ministères de l'agriculture et de la santé.
M. Aymeri de Montesquiou. - Je ne comprends pas cette différence de taxation, au détriment des vins de liqueur, qu'aucun ministre n'a pu justifier à ce jour. Au lieu d'ajustements à la marge, il faudrait repartir à zéro et taxer de la même façon des produits similaires.
Formation des enseignants
M. Philippe Madrelle. - Il est temps de rendre un rôle prioritaire au service public de l'éducation. On en est loin !
La loi Fillon a précisé le rôle des IUFM dans la formation des maîtres. Le dispositif donnait satisfaction. Pourquoi l'avoir changé pour mettre fin, par la circulaire du 25 février 2010, à la préparation pratique des jeunes enseignants débutants ?
Pour le master 2, ils devront assimiler un programme très lourd.
Cette prolongation des études aggrave la sélection sociale, ce qui est pour le moins paradoxal aujourd'hui.
Les étudiants doivent se contenter de compagnonnages aux modalités floues. Chaque académie interprètera les textes à sa guise !
Cette réforme, qui accentuera les inégalités entre les régions, prépare de futurs précaires de l'éducation nationale, non des enseignants, car enseignant est un métier qui s'apprend.
La politique de l'éducation est loin des ambitions affichées. Elle n'échappe pas à l'idéologie de l'ultra-libéralisme ! Quand comprendrez-vous, comme l'a dit Philippe Claudel, qu'une société qui ne reconnaît pas le rôle essentiel de l'éducation marche sur la tête ?
M. Luc Chatel, ministre de l'éducation nationale, porte-parole du Gouvernement. - Le recrutement et la formation des enseignants jouent un rôle crucial pour l'école. Nous avons donc aligné ce qui se passe en France sur les systèmes appliqués dans la plupart des pays développés.
Le recrutement est fondé sur l'excellence académique, mais aussi sur l'aptitude à transmettre le savoir.
L'apprentissage du métier passe par la pratique. D'où les 108 heures de stage d'observation en master 1 et les 108 heures de stage de mise en situation organisées en master 2.
Après la réussite au concours, un tutorat -rémunéré- est organisé : les tuteurs sont en doublon jusqu'aux vacances d'automne. Par la suite, des séquences de formation sont organisées tout au long de l'année.
M. Philippe Madrelle. - Merci pour cette réponse.
Toutefois, je crains que la réforme ne conduise à terme à la disparition des IUFM et à la disparition des concours, l'État faisant des économies en recrutant des vacataires ! Cette réforme fait l'unanimité contre elle, car le métier d'enseignant ne s'improvise pas.
Bonification indiciaire des enseignants référents
Mme Gélita Hoarau. - Le décret du 17 août 2006 a institué l'enseignant référent pour contribuer à la scolarisation des enfants handicapés, mais ceux-ci ne peuvent prétendre bénéficier de la bonification indiciaire, fixée par décret du 6 décembre 1991. Cette situation explique peut-être la désaffection des enseignants spécialisés pour cette formation.
M. Luc Chatel, ministre de l'éducation nationale, porte-parole du Gouvernement. - En effet, ces enseignants sont la cheville ouvrière de notre politique volontariste : depuis la loi de 2005, le nombre d'élèves handicapés scolarisés s'est accru de 40 %. Plus de 13 000 enseignants spécialisés sont en formation.
L'an prochain, l'effort budgétaire consacré aux élèves handicapés augmentera de 13 %.
Les enseignants référents assurent la liaison entre les parents et les équipes pédagogiques : on en comptait 1 214 en 2007-2008 et 1 478 à la dernière rentrée.
Vous avez rappelé que la nouvelle bonification indiciaire n'était pas applicable à leur formation. C'est pourquoi le décret du 24 août 2010 a créé une indemnité annuelle de 929 euros, applicable dès le 1er septembre 2010, éventuellement cumulable avec la bonification indiciaire de quinze points prévue pour les instituteurs ; cette indemnité consacre leur rôle indispensable.
Bien-être animal
M. Gérard Bailly. - Il y a quelques mois, l'Union européenne a diffusé une brochure consacrée au bien-être animal dans les exploitations d'élevage, en insistant sur la rentabilité procurée par ces efforts. Hélas, les éleveurs n'ont rien vu venir !
Ensuite, les règles régissant l'abattage imposent cinq règles applicables, notamment l'absence de douleur, de blessure et de maladie.
Dans ces conditions, comment peut-on donc tolérer les blessures infligées à 3 133 agneaux par les prédateurs -loup, ours et lynx- volontairement réintroduits ? Et je ne parle pas des autres animaux ! L'Europe et le Gouvernement vont-ils longtemps tolérer cette situation ?
M. Luc Chatel, ministre de l'éducation nationale, porte-parole du Gouvernement. - Je vous prie d'excuser M. Borloo.
En signant la convention de Berne, la France s'est engagée à protéger les grands prédateurs. Une directive européenne de 1992 concourt en outre à cet objectif. Des dérogations existent, notamment pour protéger l'élevage, mais elles ne peuvent conduire à une limitation générale des effectifs.
Le plan loup 2008-2012 organise des gestions différenciées, avec des dérogations préfectorales autorisant à détruire les loups.
Enfin, la directive de 1998 sur la protection des animaux d'élevage impose de les protéger contre les intempéries, la maladie et les prédateurs. C'est pourquoi le Gouvernement finance, dans les Alpes et les Pyrénées, des actions de protection des troupeaux, actions qui représentent la part la plus importante des fonds alloués à la conservation des grands prédateurs.
M. Gérard Bailly. - Les éleveurs ne comprennent pas qu'on leur demande des efforts considérables pour le bien-être d'animaux laissés à la merci de prédateurs !
On compte toujours plus d'attaques de loups : 810 en 2008, 992 en 2009... La première dans mon département a eu lieu il y a un an. Résultat, l'éleveur a vendu son troupeau ovin et est parti ! La France a déjà perdu 3 millions d'ovins, dont la présence est pourtant indispensable sur nos alpages.
Je suis d'accord pour réintroduire les prédateurs, mais leur nombre doit être limité : on compte déjà 200 loups dans l'arc alpin ! Est-ce normal de voir un loup aux portes de Gap ou près de Grenoble ?
Comme la Suisse, la France devrait demander une renégociation de la Convention de Berne.
M. le président. - Il faudrait aussi réguler d'autres prédateurs, comme la buse...
Schéma directeur de la région Île-de-France
M. Michel Houel. - La région capitale occupe une place à part. Son schéma directeur est un document de référence pour les départements et les communes franciliennes. Adopté en septembre 2009, il n'est toujours pas entré en vigueur. Comment va-t-il s'articuler avec le Grand Paris ?
Les maires franciliens attendent des réponses.
M. Michel Mercier, ministre de l'espace rural et de l'aménagement du territoire. - Le schéma directeur actuel de l'Île-de-France remonte à 1994. Il est donc obsolète.
Sa révision a été lancée en 2004, pour aboutir fin 2008 à un nouveau projet dont le Gouvernement a regretté le manque d'ambition. Les négociations ont abouti à un protocole en juillet 2009. Le conseil régional ne s'étant pas prononcé, ce protocole est devenu caduc.
Un accord a été trouvé après le vote de la loi sur le Grand Paris ; le 8 juin 2010, le Gouvernement a transmis au Conseil d'État un projet de décret portant approbation du Sdrif. L'assemblée générale l'a examiné le 28 octobre. Nous ignorons encore l'avis, qui semble devoir être négatif, notamment pour des raisons de procédure et de compétence.
Dès que le Gouvernement disposera de l'avis du Conseil d'État, il en tirera les conséquences. J'ai indiqué au président du conseil régional que l'État était prêt à examiner avec lui toutes les solutions possibles.
M. Michel Houel. - J'ai lu aujourd'hui dans la presse que le Conseil d'État s'orientait vers un avis négatif.
Soit, mais comme maire, je suis lié par le schéma directeur. J'ai prévu d'engager 3 millions d'euros, mais je suis obligé d'attendre ; au moins le tiers des 514 communes de mon département sont dans la même situation.
Pourrait-on publier un schéma simplifié, en attendant d'intégrer le Grand Paris et le Grenelle de l'environnement ?
Congés des agriculteurs
M. Yannick Botrel, en remplacement de Mme Alquier. - Quelque 20 000 agriculteurs, principalement des éleveurs, peuvent bénéficier d'un crédit d'impôt pour assurer une présence sur l'exploitation pendant qu'ils sont en vacances. Ce n'est pas un privilège, mais une mesure de justice sociale élémentaire !
Un médecin ou un pharmacien, qui se fait remplacer, obtient des revenus. Les agriculteurs, eux, doivent nourrir leurs bêtes chaque jour, mais cette continuité ne leur procure aucun revenu. La solidarité doit jouer. Ce dispositif coûte 10 millions par an, soit un quart d'un centième de l'ISF. Pourquoi ce crédit d'impôt devrait-il disparaître ? Ce dispositif représente 160 000 heures de remplacements au niveau national, soit 800 ETP dans le domaine agricole, ce qui n'est pas négligeable en période de crise. Ce dispositif doit être conservé et renforcé. Qu'en est-il de l'enquête annoncée ?
M. Michel Mercier, ministre de l'espace rural et de l'aménagement du territoire. - Je vous prie d'excuser l'absence de M. le ministre de l'agriculture.
Le crédit a été institué par la loi de 2006, pour un coût de 10 millions, car les agriculteurs, aussi, ont besoin de repos.
Le crédit d'impôt remplacement est appréciable, mais certains parlementaires se sont interrogés sur cette dépense fiscale : d'où l'amendement du Sénat qui a prolongé il y a un an ce dispositif jusqu'au 31 décembre 2010, une évaluation devant être établie. Une enquête a été réalisée. Sur la base de ces travaux, le Gouvernement souhaite proroger cette mesure de justice envers les exploitants. Elle figurera dans la loi de finances rectificative pour 2010, mais le Gouvernement n'est pas opposé à son inscription dans la loi de finances pour 2011.
M. Yannick Botrel. - Merci pour cette réponse compléte et circonstanciée. La préoccupation de Mme Alquier et M. Chastan, partagée sur tous les bancs, est satisfaite.
Réintroduction des farines animales dans les élevages
M. Alain Fauconnier. - Le spectre des farines animales refait surface au niveau européen, après l'interdiction énoncée en 1994. D'où une certaine émotion et bien des interrogations !
Avec 190 000 cas d'ESB, des milliers de troupeaux sacrifiés et des centaines de personnes victimes de la maladie de Creutzfeldt-Jacob, la crise a marqué les esprits. Ce projet doit permettre à l'Union de réduire sa dépendance en protéines et d'accroître sa compétitivité. Pour autant, faut-il soigner le mal par le mal ? Les éleveurs se demandent si cette mesure ne consiste pas à ouvrir de nouveau la boîte de Pandore.
D'autres voies sont possibles en attribuant plus de terres aux cultures protéiques et en améliorant la qualité d'une filière que les cogitations des docteurs Folamour conduiraient au désastre !
M. Michel Mercier, ministre de l'espace rural et de l'aménagement du territoire. - Je vous prie d'excuser l'absence de M. le ministre de l'agriculture. La Commission européenne a adopté une feuille de route pour la lutte contre l'ESB au cours des cinq années à venir. Ce document comporte le réexamen de l'interdiction totale des farines animales dans les élevages.
Je précise qu'il ne remet pas en cause le principe du non-cannibalisme, ni l'interdiction d'alimenter les ruminants avec des farines d'origine animale. Pour autant, la question soulève des inquiétudes. Sans attendre, le ministre a saisi l'Agence de sécurité sanitaire ; le Conseil national de l'alimentation rendra un avis en juin 2011 sur l'acceptabilité sociétale de la mesure.
Le Gouvernement examinera les propositions de la Commission à la lumière de tous ces éléments.
M. Alain Fauconnier. - Je vous donne acte des précautions prises par le ministère de l'agriculture. En quelques jours, la crise de l'ESB avait provoqué un effondrement des ventes de viande ; les consommateurs ne font guère la différence entre ruminants et non-ruminants. La consommation baisse de 3 à 4 % par an. L'État français doit engager un grand plan protéines pour assurer notre autonomie en protéines végétales.
ZAC « Carmes Madeleine » à Orléans
M. Jean-Pierre Sueur. - Ma question concerne la zone dite « Carmes Madeleine » à Orléans, secteur classé par l'Unesco au patrimoine de l'humanité. Elle doit être aménagée pour laisser passer la future ligne de tramway. Le projet de déclaration d'utilité publique prévoit la destruction d'immeubles du XVIIe et de caves du XIIIe pour laisser passer également les voitures. La solution serait de rendre piétonne la rue des Carmes, comme le font tant d'autres villes européennes, ce qui permettrait au tramway de rouler en site propre. La procédure habituelle concernant l'enquête publique n'a pas été respectée, puisque le ministre de la culture a envoyé au préfet une lettre comportant des instructions quant à la déclaration d'utilité publique, avant même le début de celle-ci !
Quelles dispositions le Gouvernement compte prendre pour restaurer le respect des lois ?
M. Michel Mercier, ministre de l'espace rural et de l'aménagement du territoire. - Je vous prie d'excuser l'absence de M. Mitterrand. La politique affirmée de conservation du patrimoine pose parfois problème au niveau local. Je vous renvoie aux débats au Sénat sur le rôle des architectes des Bâtiments de France. Le ministre de la culture veille au respect du patrimoine ; c'est son rôle. Ce n'est pas en infligeant des blessures aux bâtiments anciens que l'on réparera les maux de la société !
Concernant la zone « Carmes Madeleine », le projet comportait une enquête publique sur la destruction de bâtiments anciens. Le ministre a préféré que l'enquête ait lieu dans un dialogue constructif avec le député-maire d'Orléans ; cela ne préjuge en rien des résultats de l'enquête. Je m'associe à l'hommage implicite que vous semblez adresser, par votre question, aux agents des services déconcentrés de la Culture.
M. Jean-Pierre Sueur. - Il s'agit de la première application du rapport Tuot. Ce projet a donc valeur de test ! Depuis Malraux, le ministère de la culture est garant de la politique du patrimoine. Pourquoi détruire des immeubles anciens quand il suffit de rendre la rue piétonne pour l'éviter ? Les garanties apportées à la mairie d'Orléans portent sur des bâtiments respectables, mais extérieurs au périmètre de la ZAC.
D'après votre réponse, le préfet prendra sa décision en toute indépendance ; voilà qui me rassure !
La séance est suspendue à midi.
présidence de M. Gérard Larcher
La séance reprend à 14 h 30.
Décès d'un ancien sénateur
M. le président. - J'ai le regret de vous faire part du décès de notre ancien collègue Michel d'Aillières, qui fut sénateur de la Sarthe de 1977 à 1995, et président du conseil général de ce département.
Modification à l'ordre du jour
M. le président. - A la demande du groupe socialiste du Sénat, la Conférence des Présidents, lors de sa dernière réunion du 27 octobre, a prévu l'organisation d'un débat d'orientation sur la défense anti-missile dans le cadre de l'Otan le lundi 15 novembre sans en préciser l'heure, liée à l'emploi du temps de M. le ministre de la défense.
Le ministre chargé des relations avec le Parlement vient de me faire savoir que M. Hervé Morin, ministre de la défense, se rendait disponible le lundi 15 novembre à 21 heures 30 pour participer à ce débat.
Ce débat commencerait par les interventions d'un membre du groupe socialiste et d'un représentant de la commission des affaires étrangères. Conformément au droit commun, la discussion générale serait organisée sur deux heures avec un délai limite pour les inscriptions de parole fixé au lundi 15 novembre à 11 heures.
L'ordre du jour de la séance du lundi 15 novembre est ainsi complété. Je remercie le Gouvernement, notamment M. le ministre de la défense, d'avoir su organiser son emploi du temps de manière à pouvoir répondre à nos questions.
Accession à la propriété
M. le président. - L'ordre du jour appelle un débat sur l'accession à la propriété.
M. Jean-François Mayet, pour le groupe UMP. - Mon intervention ne doit surtout pas être prise pour une charge à l'endroit du Gouvernement. Je voterai les mesures qu'il propose, même si elles ne traitent pas le problème dans sa totalité.
L'accession à la propriété est décisive : on ne peut rester locataire !
M. Jean-Pierre Plancade. - Très bien !
M. Jean-François Mayet. - La proportion des Français à être propriétaires n'est que de 57 %, bien moins que celle de nos voisins, et baissera encore si nous ne faisons rien ; ils sont 83 % à juger difficile, voire impossible de le devenir.
Le monde HLM s'est installé dans le métier de loueur qu'il maîtrise depuis soixante ans. Depuis vingt-cinq ans, toutes les initiatives pour développer l'accession, tant publique que privée, ont échoué, dans le silence général -hormis des parlementaires. (M. Thierry Repentin s'exclame)
Comment justifier qu'un grand nombre de Français soient encore locataires à l'âge de la retraite et ne puissent ainsi rien léguer à leurs enfants ?
M. Yvon Collin. - Non !
M. Jean-François Mayet. - La solution passe par les bailleurs sociaux. Tandis que jusqu'à la guerre ils permettaient à 80 % de leurs résidents d'accéder à la propriété, ils ont depuis changé de métier et sont devenus des loueurs. C'est une spécificité française. Si ce levier est activé, le secteur privé suivra ; cela implique d'ici 2025 de construire 7 millions de logements. Un parcours résidentiel doit être proposé aux entrants chez les bailleurs sociaux, afin qu'ils puissent finir par accéder à la propriété. Il faudrait pour cela que la proportion des constructions s'inverse : que l'on passe de 80 % de logements destinés à la location à 80 % destinés à l'accession à la propriété.
Nous avons privilégié la location en y engageant 45 milliards par an. Des dispositifs, comme le Robien ou le Scellier favorisent la location.
M. Thierry Repentin. - De manière trop coûteuse !
M. Jean-Pierre Plancade. - Et, à terme, on a des propriétés dégradées.
M. Jean-François Mayet. - Il faudrait donc mettre en place, aussi systématiquement que possible, des contrats de locations-ventes. Je vais déposer une proposition de loi en ce sens -non pour faire une « loi Mayet » ! Des bailleurs sociaux sont prêts à expérimenter, en particulier dans ma ville de Châteauroux. (Applaudissements à droite)
M. Benoist Apparu, secrétaire d'État chargé du logement et de l'urbanisme. - Ce serait bien !
M. Thierry Repentin. - Je regrette que l'initiative de notre collègue ait si peu d'échos, un mardi après-midi... « Quand on devient propriétaire, on devient conservateur » est-il convenu de dire. Le Gouvernement nous parle d'un nouveau projet de société. Quels sont les pays européens « vertueux » de ce point de vue ? Roumanie, Estonie, Lituanie... et l'Espagne qui vient de plonger dans la crise immobilière et d'adopter un dispositif imposant une proportion de 50 % de logements sociaux dans tous les programmes de construction -deux fois plus qu'avec la loi SRU. Les moins « vertueux » sont l'Allemagne, les Pays-Bas ou l'Autriche. Encore moins « vertueux », la Suisse -qui sans doute loge ainsi des exils fiscaux... (Sourires au banc du Gouvernement)
Regardons les choses autrement : le taux de chômage. Les statistiques montrent que toutes choses égales d'ailleurs, les pays où le taux de propriétaires est élevé est aussi celui où le taux de chômage est élevé.
Il ne faut donc pas ériger une idée en dogme. « Tous propriétaires », ce ne peut être un modèle de société.
M. Benoist Apparu, secrétaire d'État. - Quelle erreur !
M. Thierry Repentin. - L'accession à la propriété n'est qu'un des éléments d'une politique du logement. Du fait de la crise et du niveau des prix, elle marque le pas. La proportion des propriétaires diminue chez les plus modestes tandis qu'elle s'accroît chez les plus aisés. Nous vous avions dit que la loi Tepa ne créerait pas un propriétaire de plus alors qu'elle coûterait cher. Avec les économies ainsi réalisées, on pourrait donner davantage de solvabilité au PTZ.
Supprimer le pass foncier et le crédit d'impôt vous ferait économiser 4,5 milliards, alors que la modification du PTZ en coûterait 3. L'élargissement de celui-ci aux deux derniers déciles -qui n'en ont pas besoin- coûtera néanmoins 400 millions...
Il est urgent de donner la priorité aux plus modestes. L'endettement moyen est passé de 14 à 19 ans ; les prix immobiliers ont été multipliés par 2,5 depuis 1996 -aucun revenu n'a suivi. C'est lorsque la société sécurise le moins que le désir de propriété est le plus fort.
Autant dire qu'il faut agir sur les prix : réguler celui du terrain, taxer la rétention foncière, plafonner les loyers, séparer les marchés de primo-accession et d'accession secondaire. Comment ferez-vous pour ne pas échouer comme la maison à 100 000 euros de votre prédécesseur ?
M. Benoist Apparu, secrétaire d'État. - Le pass foncier a formidablement bien fonctionné ! L'objectif de 30 000 a été atteint !
M. Jean-Pierre Plancade. - La possession d'un logement comme assurance face à la retraite, le goût des Français pour la maison individuelle, l'exigence de transmettre -voila un vieux mythe réactionnaire ! (M. Benoist Apparu, ministre s'exclame)
La maison individuelle, c'est le mitage avec les coûts qui en résultent pour les collectivités et les ménages. Si l'on veut favoriser l'accession à la propriété il faut d'abord maîtriser le foncier. C'est la logique des ZAD, (M. Yvon Collin approuve) de la taxation obligatoire des terrains rendus constructibles à la suite d'une décision publique...
L'accession à la propriété est de plus en plus difficile pour les revenus modestes. En quinze ans, les prix de l'immobilier ont été multipliés par 2,5 -sans que les revenus suivent, évidemment.
Une réforme des aides à l'accession -une de plus... Voilà le PTZ +... qui sera accessible sans condition de ressources et ne favorisera pas les plus pauvres. Le centrer sur les zones les plus tendues ? Tant mieux pour celles-ci. Mais les autres...
Les offices HLM devraient accepter de vendre des appartements, et ne plus voir là une privatisation rampante. Dans les propriétés HLM, il n'y a pas que des logements dégradés dans des immeubles dégradés, dans des zones dégradées ! J'en connais, j'y ai vécu ! S'il y a vente d'appartements HLM à des particuliers, l'office resterait naturellement syndic de copropriété, et veillerait à ce que celle-ci ne se dégrade pas.
Le problème est moins celui de l'accession que celui de l'accès au logement. Les offices HLM sont un outil d'aménagement. Ils n'ont pas à se constituer un trésor de guerre -leur trésorerie est estimée à 7 milliards d'euros- ni à devenir une technobureaucratie qui perd de vue sa raison d'être. Leur lobby est hélas efficace ici, auprès de nos collègues de toutes tendances.
En cette période de crise et de désengagement de l'État, la clé est la volonté politique locale -dont je regrette qu'elle soit si atone. Notre politique trop décentralisée prive nos élus locaux des moyens de résister à la pression de ceux de leurs administrés qui redoutent frileusement de voir arriver des pauvres... Dans nos agglomérations, ce n'est pas l'architecture, ce n'est pas la concentration urbaine qui crée le mal, mais le chômage et la crise.
Comment parler de politique d'accession à la propriété quand on diminue de moitié les aides à la pierre ? Il est temps que l'État reprenne la main. (Applaudissements sur les bancs du RDSE et certains bancs UMP)
Mme Odette Terrade. - Le Président de la République avait fait de l'accession à la propriété un de ses slogans. On a vu ce qu'il en est allé de cette promesse. Ce débat donne l'impression d'être utilisé par le groupe majoritaire pour détourner l'attention de l'urgence, le mal logement qui concerne aujourd'hui 3,5 millions de personnes. Dire que l'accession à la propriété est une exigence pour se constituer un capital en vue de la retraite, c'est avouer que les pensions vont baisser...
Considérer l'accession à la propriété indépendamment des questions de pouvoir d'achat, c'est aller à des catastrophes humaines ; déjà 770 000 personnes sont en situation de surendettement. On ne devient pas propriétaire sans avoir une certaine stabilité professionnelle, tandis que le libéralisme favorise la précarité. Si le travail doit être aussi précaire que l'amour ou la santé, comme aime à dire Mme Parisot, pourquoi l'accession à la propriété y échapperait-elle ? En onze ans, le nombre de jugements pour impayés de loyers a progressé de 25 %. On ne peut plus accéder à la propriété sans avoir un revenu supérieur à la médiane ! Nous ne pourrons pas éviter la définition d'une politique sociale ambitieuse ? En trente ans, le prix du foncier s'est accru de 574 % ! Les revenus de nos concitoyens sont loin d'avoir suivi...
Vous diminuez les aides à la pierre alors que manquent 900 000 logements. Résultat du désengagement de l'État, en 2008, 368 000 logements ont été mis en chantier.
M. Benoist Apparu, secrétaire d'État chargé du logement et de l'urbanisme. - Rien à voir !
Mme Odette Terrade. - Les dispositifs Robien et Scellier n'ont servi qu'à entretenir la spéculation immobilière et foncière.
Le 14 septembre dernier, M. Sarkozy et vous-même, monsieur le ministre, avez annoncé de nouvelles mesures. Vous supprimez le PTZ et créez un « PTZ + » qui vous ferait économiser 1,6 milliard par an. Selon une économiste de HSBC, l'argent injecté dans l'accession risque fort de ne favoriser que la hausse des prix... Quelle lucidité !
L'urgence logement n'est pas tant l'accession à la propriété que les 1,3 million de demandeurs de logement et les 770 000 ménages surendettés. Mais la casse du logement social se confirme... Le logement devrait faire l'objet d'une politique publique, avec un meilleur équilibre entre aide à la pierre et aide à la personne. C'est d'un pôle public de l'habitat dont notre pays a besoin, pour que soit vraiment garanti un droit opposable au logement digne d'une société du XXIe siècle. (Applaudissements à gauche)
Mme Colette Giudicelli. - L'accession à la propriété est un puissant vecteur de promotion sociale, ainsi qu'une garantie patrimoniale pour sécuriser la retraite. Depuis 2003, 5 millions de Français ont pu accéder à la propriété. Mais trop de nos concitoyens restent exclus du parcours résidentiel auquel ils aspirent. Les classes moyennes ont subi fortement les effets de la crise. Le logement représente en moyenne plus de 20 % du budget des familles ; c'est énorme.
Vous réformez le PTZ. A juste titre. Je salue votre travail et les mesures que nous discuterons dans le cadre du projet de loi de finances. Le PTZ + doit remplacer au 1er janvier les trois dispositifs existants ; il soutiendra la solvabilité de la demande. Pourriez-vous préciser les conditions dans lesquelles seront maintenues les aides telles que les APL accession ou les PEL ? Il faut que la nouvelle aide soit supérieure pour les ménages modestes.
Sans doute n'y a-t-il guère de solutions miracle. Mais on peut agir localement avec les bailleurs sociaux. Certains offices entretiennent bien leurs bâtiments, d'autres non ; certains construisent, d'autres non. Il faut nous aider à régler certains problèmes ; le futur retraité qui acquiert pour le louer un petit appartement quatre ou cinq ans avant son départ en retraite se sent spolié si son locataire accumule les arriérés, sans qu'il puisse le faire expulser.
En la matière, les collectivités locales doivent intervenir plus activement. Elles peuvent par exemple prévoir une sanction à l'encontre des promoteurs privés qui ne respectent pas l'obligation qu'elles leur fixent de construire des logements sociaux en plus dans leurs programmes. C'est ce que nous faisons dans ma ville, et ça marche...
Nous sommes avec vous, monsieur le ministre : comptez sur notre soutien. La France ne doit plus être à la traîne. (Applaudissements sur les bancs UMP)
M. Claude Jeannerot. - Vous voulez donc une France de propriétaires. Votre nouveau PTZ apporte une simplification bienvenue ; il concentre l'aide là où elle est le plus nécessaire et dans une perspective de respect de l'environnement. Nous nous réjouissons de la suppression du crédit d'impôt sur les intérêts d'emprunt, qui risquait de coûter 3 milliards en 2013 -sans le moindre effet sur la décision d'achat ni pour ceux qui en auraient besoin.
Favoriser l'accession à la propriété ? Nous ne pouvons qu'être d'accord ! C'est d'ailleurs conforme à l'article 2 de la Déclaration des droits de l'homme, et à l'aspiration majoritaire des ménages, notamment les plus modestes.
Jamais pourtant la situation n'a été aussi mauvaise, avec l'envolée des prix qui risque de jouer comme facteur de paupérisation des classes moyennes hantées par la peur du déclassement. Je doute de l'effet dynamique d'un chiffre comme celui que vous affichez de 70 % de propriétaires. C'est d'un grand plan Marshall dont le logement a besoin !
Tel Janus, votre projet a un visage négatif : rendre le PTZ universel le rend inopportun, inefficace, injuste. Mme Lagarde parle de réduire les dépenses et vous ouvrez le bénéfice du PTZ à des personnes dont le revenu ne le justifie pas ! La perte de recettes fiscales pour l'État est évaluée à 400 millions, sans impact sur la décision d'achat des plus aisés ! Vous créez ainsi un effet d'aubaine -il est vrai cohérent avec votre politique en faveur des plus prospères...
Enfin, cette proposition est injuste pour ceux à qui leur revenu interdit de devenir propriétaire. Vous allez effectuer un prélèvement sur les HLM par l'article 99 du projet de loi de finances ; la même économie aurait été réalisée sans le cadeau que vous faites aux plus aisés. Ce pied de nez aux locataires HLM est choquant.
L'accès facilité au crédit ne risque-t-il pas de multiplier mécaniquement les cas de surendettement ? Où sont les garde-fous ? Quelle sera l'efficacité de vos propositions sur la mobilité résidentielle ? Le Centre d'analyse stratégique a formulé diverses propositions. Quelles suites allez-vous leur donner ?
Le secteur du logement a besoin d'une grande politique de relance, d'un grand plan Marshall pour éviter que la crise ne devienne durable. M. Raffarin l'évoquait ces derniers jours : il y a deux priorités : l'emploi et le logement ! (Applaudissements à gauche et au centre)
M. Adrien Gouteyron. - La feuille de route du Président de la République est ambitieuse. Il s'agit d'un vrai projet de société, d'un objectif mobilisateur. Il faut d'abord redonner confiance aux ménages en des temps difficiles et diversifier l'offre de logements.
D'où la réforme des aides dans le cadre du projet de loi de finances pour 2011.
Le marché de l'ancien et les zones rurales ne doivent pas être les parents pauvres de la réforme. (Mme Nathalie Goulet marque son intérêt) Dans nos bourgs, des immeubles sont désaffectés, les HLM ne peuvent financer la réhabilitation de ces logements. Pourtant des occupants souhaiteraient en devenir propriétaires et des propriétaires seraient prêts à vendre.
M. Benoist Apparu, secrétaire d'État. - Exactement. C'est notre objectif !
M. Adrien Gouteyron. - Vers qui se tourner ? Donnons à ceux qui le veulent la possibilité de devenir propriétaires. (« Très bien ! » à droite) Le PTZ + mérite d'être plébiscité. D'ailleurs, sur son principe, il n'y a pas de critiques fondamentales. Depuis sa création en 1995, le prêt à taux zéro a donné de bons résultats, surtout dans le marché de l'ancien.
Pour garantir la justice sociale, le prêt doit être modulé selon la taille des ménages et la zone géographique. Monsieur Jeannerot, vous avez tenu des propos équilibrés mais je dois vous dire que les ménages relativement aisés ont également besoin d'aide dans les zones tendues.
Les mesures prises depuis deux ans ont heureusement permis aux entreprises de préserver leur outil de production pour un redémarrage après la crise. Celles de mon département ont bien tenu le coup.
Je salue cette réforme du PTZ que je soutiendrai lors de l'examen de la loi de finances ! (Applaudissements à droite)
Mme Marie-Hélène Des Esgaulx. - L'article 55 de la loi SRU fixe une obligation de 20 % de logements sociaux dans chaque commune. Depuis 2006, les logements en accession à la propriété sont comptabilisés dans ces 20 % pour cinq ans.
Je souhaite qu'on distingue les logements construits dans le seul but d'une accession sociale à la propriété des logements HLM acquis par leurs occupants. Ce second cas est un objectif noble qui répond à l'attente des locataires et au souhait du Président de la République. Or les communes qui acceptent les demandes des locataires sont pénalisées après cinq ans. Est-ce normal ? Tout le monde trouve son compte à cet achat : le locataire et l'organisme HLM.
On ne va quand même pas contraindre les communes à refuser aux locataires de devenir propriétaires. C'est absurde !
Donc, il faut revoir la prise en compte de ces logements dans les 20 % de logements sociaux. Un peu plus de souplesse, dans ce cas particulier, ne remettrait nullement en cause le sacro-saint article 55 !
Certes, il y a les cas, rares, de revente de l'appartement, par exemple après un décès. Ce serait une raison justifiée de les sortir des 20 %. Cela ne me choquerait pas. Mais, dans le cas de l'achat de son logement par un locataire, on pourrait supprimer le délai de cinq ans ou alors le porter à dix ans.
Merci de prendre en compte cette demande importante. (Applaudissements à droite)
M. Raymond Couderc. - L'aspiration d'accéder à la propriété est légitime. D'où le voeu du Président de la République de bâtir « une France de propriétaires », ce qui permet de surcroît de maintenir l'activité du BTP dans les territoires. Depuis la loi du 13 juillet 2006 d'engagement national pour le logement, une douzaine de dispositifs aident les ménages. Les collectivités ont appuyé l'État dans ces actions, ma communauté d'agglomération a apporté quelque 450 000 euros en sus. Les résultats ont été positifs ces dix-huit derniers mois, avec 139 ménages aidés. En revanche, avec l'instauration du plafond de 20 000 euros et la fin du doublement du PTZ on observe une diminution des demandes d'aides ces derniers temps. A partir du 1er janvier 2011, le PTZ +, plus simple, plus utile, entrera en vigueur.
Reste qu'il existe une trop forte différence entre les aides prévues pour les zones A -celles où le marché immobilier est tendu et les zones B, c'est-à-dire, principalement, les villes-moyennes.
Pour celles-ci, comme la mienne, le PTZ + représentera une perte de pouvoir d'achat par rapport aux multiples dispositifs existant actuellement. Est-ce que cela ne sera pas dissuasif, avec les conséquences sur l'activité du BTP ? (Applaudissements sur les bancs UMP)
présidence de M. Guy Fischer,vice-président
M. Benoist Apparu, secrétaire d'État chargé du logement et de l'urbanisme. - Merci, Monsieur Mayet, d'avoir suscité ce débat sur cette question majeure pour notre pays.
La réforme annoncée le 14 septembre dernier par le Président de la République a pour objectif de bâtir un système plus simple, plus efficace ; qui soutienne la construction et qui soit écologique ; un dispositif qui épouse la réalité des différences de prix sur notre territoire.
Je réponds à M. Couderc sur ce point.
Nous investissons 2,6 milliards dans le PTZ +, maintenons certaines aides dont la TVA à 5,5 % dans les zones Anru. Nous allons également agir sur la politique foncière, sinon nous pousserons à la hausse des prix. C'est pourquoi, je suis absolument contre la généralisation de la TVA à 5,5 %.
M. Thierry Repentin. - Ce n'est pas ce que j'ai proposé.
M. Benoist Apparu, secrétaire d'État. - Reste que PTZ + peut alimenter la hausse des prix, d'où l'importance de notre action aux plans du foncier et de l'urbanisme. La réforme est nécessaire : depuis 1995, les prix de l'immobilier ont été multipliés par 2,5, alors que les salaires n'ont augmenté que de 1,6. Résultat, une désolvabilisation des classes moyennes.
Le PTZ + vise à leur redonner les moyens de devenir propriétaires. Ce n'est pas un projet « conservateur », mais un élément de sécurité, de préparation de la retraite et de constitution d'un patrimoine.
La France des propriétaires, voulue par le Président de la République, est un projet de société. L'objectif est d'atteindre la moyenne européenne de 66 % : nous n'avons jamais souhaité aller vers les 80 % et plus des pays de l'Est ou de l'Espagne. Ce serait une erreur en termes de mobilité, comme l'a relevé le Centre d'analyse stratégique.
Un taux de propriétaires à 85 % freine la mobilité sociale et, donc, la diminution du chômage en temps de crise. Évitons les procès d'intention !
Monsieur Mayet, les HLM doivent effectivement contribuer à l'accession à la propriété.
Un locataire HLM qui achète son logement pourra bénéficier, en sus du PTZ +, de 5 % de plus d'aide et d'une décote du logement allant jusqu'à 35 %. Le monde HLM partage cette analyse : il vient de signer une convention avec l'État. Reste encore du chemin à parcourir pour atteindre les objectifs fixés. Je suis convaincu que le monde HLM respectera sa signature.
Monsieur Repentin, votre démonstration me laisse songeur. Vous vous appuyez sur l'exemple de pays de l'Europe de l'est, comme la Roumanie ou la Lituanie où le taux de chômage est très élevé.
Je souscris à votre plaidoyer pour la mobilité, mais celle-ci doit se faire aussi dans le parc HLM ! Vous présidez l'Union sociale de l'habitat : je compte sur vous ! Pour l'heure, la mobilité y est seulement de 10 %.
M. Thierry Repentin. - C'est plus que dans le privé !
M. Benoist Apparu, secrétaire d'État. - Si elle passait à 15 %, cela signifierait 200 000 logements en plus avec un coût nul !
M. Thierry Repentin. - Il faut aussi construire davantage.
M. Benoist Apparu, secrétaire d'État. - Depuis 2004, nous avons consenti un effort massif pour le logement avec les collectivités et les bailleurs sociaux.
Messieurs Repentin et Jeannerot s'interrogent sur l'universalité du PTZ +.
Parlons de Chambéry, commune en zone B 1: la tranche 9 commence à 2 400 euros de revenus mensuels dans le neuf ; la tranche 10 à 2 800 euros. Gagner 2 400 euros par mois, est-ce être un couple trop riche ? A Paris, la tranche 9 commence à 4 019 euros par mois et la tranche 10 à 5 600 euros. Peut-on devenir propriétaire à Paris avec ce niveau de revenus ? Non ! Il faut une aide.
Le PTZ + est réservé aux primo-accédants. Or les plus riches sont déjà propriétaires de leur résidence principale.
Monsieur Mayet, l'action sur le foncier et l'urbanisme est indispensable pour éviter la spéculation sur les prix.
Monsieur Plancade, la France de propriétaires n'est pas un projet réactionnaire. (On renchérit à droite) En revanche, vous posez la question fondamentale de la répartition des compétences entre l'État et les collectivités. Nous avons une crise de production en Île-de-France, en Aquitaine ; une crise de surproduction dans d'autres territoires. L'État doit réguler. Madame Terrade, oui, je crois au projet d'une France de propriétaires qui n'est en rien le signe de l'échec de la réforme des retraites. Il est sûr en revanche que les pensions sont inférieures aux salaires et qu'avec un taux d'effort de 23 % pour les locataires et les accédants et de 10 % pour les propriétaires, il existe une différence considérable à l'heure de la retraite. Et c'est bien parce que les classes moyennes sont désolvabilisées qu'il faut engager cette réforme.
Oui, madame Giudicelli, l'acquisition d'un logement sécurise effectivement la retraite. La plupart des bailleurs sociaux font un bon travail, vous avez raison.
Nous aurons besoin de tous -bailleurs et collectivités- pour réussir notre politique ambitieuse du logement.
Monsieur Jeannerot, votre intervention était très équilibrée, je vous en remercie. L'universalité du PTZ + est nécessaire si l'on veut aider les classes moyennes, qui ont été désolvabilisées ces dernières années. Je ne crois pas au risque de surendettement.
La comparaison avec la crise des subprimes, que d'aucuns ont fait, est osée. Nous avons voulu conserver l'ALP, qui prend le relais quand il y a une forte baisse de revenus de l'accédant. Nous n'avons pas connu de catastrophes pendant la crise.
Oui, Monsieur Gouteyron, cette réforme doit organiser une reconquête des centres bourgs dans l'ancien en zone rurale. D'où la quotité de 20 %. En milieu rural quand on construit un logement neuf, on vide une maison en centre bourg. Pour trouver un équilibre, il faut mieux aider l'ancien que le neuf, afin de reconquérir les centres. Nous avons donc modulé les aides. Cela ne signifie pas que nous n'aidions pas les villes moyennes comme Béziers. La réalité est que 50 % des opérations se font en zone C, 75 % si l'on y ajoute la zone B2, pour 50 % de la population. Il faut aider en zone A et en zone B1. La France de 70 % de propriétaires existe déjà, mais seulement en zone C, contre 45 % en zone A. L'aide doit avoir un effet solvabilisateur dans toutes les zones.
Madame Des Esgaulx, un équilibre a été trouvé en 2006. Les reventes intervenant plus rapidement que vous le pensiez, la durée de cinq ans est légitime.
Vous suggérez que le produit de la vente finance la construction d'autres logements sociaux. Vendre pour construire, en somme. La durée de cinq ans, pour ce faire, est parfaitement calibrée.
Merci à M. Mayet de nous avoir permis d'engager ce débat. Il faut une France de propriétaires et un monde HLM moins frileux, si nous voulons y parvenir ! (Applaudissements à droite)
Dispositifs « amiante » (Question orale avec débat)
M. le président. - L'ordre du jour appelle la question orale avec débat de M. Godefroy à M. le ministre du travail sur la réforme des dispositifs « amiante ».
M. Jean-Pierre Godefroy, auteur de la question. - Je suis heureux qu'un débat soit enfin consacré aux dispositifs « amiante », souvent abordés de façon parcellaire par le biais des réformes des retraites et des lois de financement.
Le Sénat, l'Assemblée nationale, la Cour des comptes et le Médiateur de la République ont souligné la nécessité d'agir, mais dans le respect des travailleurs de l'amiante.
A l'occasion de la réforme des retraites, au Sénat, nous avons maintenu l'âge légal de la retraite à 60 ans pour les travailleurs de l'amiante. Pour autant, il subsiste des difficultés. Pour bénéficier de ce statut, le travailleur doit avoir été employé sur un site qui fait partie de la liste ouvrant droit à la Caata ou être atteint d'une maladie retenue par le régime dont il dispose... Les associations contestent le sérieux de l'établissement des listes. On mentionne les sièges sociaux, pas les filiales ; des sociétés ont changé de nom, d'adresse, de propriétaire. Les salariés de Thomson-CSF à Cherbourg en savent quelque chose. Les listes sont arrêtées. Un site Moulinex est sur la liste ; un autre, qui produit la même chose, n'y est pas. Des demandes affluent, dont l'une déposée par Mme Goulet et moi-même à propos de l'entreprise Tréfimétaux à Dives-sur-mer. Lorsque vous étiez ministre du budget, monsieur le ministre, vous aviez débloqué quatre dossiers en intervenant auprès de la Cram de Normandie ; au moins six autres dossiers sont encore bloqués.
L'autre problème est la multiplicité des régimes. Le décret du 21 décembre 2001 prévoit un régime pour les ouvriers de l'État, un autre pour les marins, puis un autre encore pour les salariés agricoles.
Or les règles de prise en charge sont très hétérogènes selon les régimes.
Certains régimes spéciaux ne bénéficient pas de la Caata : c'est le cas des fonctionnaires. Pour établir la durée d'exposition à l'amiante, les règles sont variables ; ainsi, les salariés intérimaires dont le contrat est reconduit d'une semaine sur l'autre ne sont pas dans la même situation que les contractuels.
La discordance dans les modalités de prise en charge varie encore d'un régime l'autre : on privilégie l'intérêt interne des régimes sur celui des individus.
Le bénéfice de la Caata devrait être reconnu à toute personne qui a été exposée à l'amiante, quel que soit le régime dont elle relève. Il faudrait aussi que ne soient pas pénalisés ceux qui ont travaillé pour des sous-traitants.
Il est déjà possible de bénéficier de la Caata à titre individuel. Je pense aux femmes de travailleurs de l'amiante, exposées dans le cadre domestique. Cette voie d'accès devrait être institutionnalisée, quitte à se donner les moyens de vérifier ce qu'il en est réellement de la situation de chacun.
Aux termes de l'article 76 de la loi de financement pour 2010, le Gouvernement devait remettre avant le 30 septembre dernier un rapport sur le sujet. Nous l'attendons toujours.
A Saint-Nazaire, le 23 juillet dernier, le Président de la République a fait une distinction entre les personnes « touchées » par l'amiante et celles qui y auraient été seulement « exposées ». Ce serait vider le dispositif de sa substance et nier la logique même de la préretraite, qui est de compenser la diminution d'espérance de vie due à l'exposition à l'amiante.
La mobilité dans les parcours professionnels doit être prise en considération. Un amendement que j'avais déposé en ce sens a été repoussé. Puisse le Gouvernement évoluer là-dessus.
Autre question, le montant même de l'Acaata. Alors que la Cour de cassation préconisait l'élargissement de l'assiette du calcul à tous les éléments de rémunération y compris les indemnités compensatrices, le Gouvernement est passé outre ! Ne faites pas d'économies de bouts de chandelles sur le dos des victimes de l'amiante.
J'en viens au Fiva. Dans l'article 49 du PLFSS pour 2011, vous proposez une évolution importante, très attendue. La règle sur la prescription a été fixée par le conseil d'administration sur le Fiva, de façon différente selon les pathologies. En 2009, le Fiva a refusé 542 demandes d'indemnisation pour des raisons de prescription ; plusieurs arrêts de la Cour de cassation ont fragilisé la position des victimes : je me réjouis donc que le Gouvernement allonge la durée de prescription de quatre à dix ans.
M. Jean-Claude Gaudin. - Tout arrive !
M. Jean-Pierre Godefroy, auteur de la question. - La gouvernance du Fiva a été modifiée conformément aux recommandations de l'Igas et de l'IGF. Très bien, mais le Gouvernement a annoncé une réforme du fonds l'an prochain pour en renforcer le caractère paritaire Qu'en est-il ?
Depuis 2003, les charges du Fcaata sont supérieures aux ressources et, depuis 2005, son déficit ne cesse de se creuser, pour atteindre 284 millions cumulés fin 2009. Un déficit de 14 millions est prévu en 2010 : comment le PLFSS peut-il prévoir le retour à l'équilibre du fonds en 2011 ?
Le Fiva, lui, a pu accumuler d'importantes réserves, mais elles ont fondu. Sa dotation sera-t-elle suffisante ?
J'aurais pu aussi évoquer le suivi médical des victimes, mais le temps me presse. (Applaudissements)
M. Gilbert Barbier. - L'amiante, utilisé depuis un siècle, est à l'origine de 66 % des maladies professionnelles mortelles en 2009 et de 80 % des cancers professionnels en Europe. Le mécanisme du Caata est reconnu comme satisfaisant. Les dépenses d'administration du Fiva ont dépassé 2,4 milliards depuis 2000.
Au Fcaata, en revanche, chacun s'accorde à considérer que les mécanismes ne sont pas satisfaisants. Les victimes exclues ne comprennent pas l'inégalité de traitement qu'elles subissent. Il faut prendre en compte la question de la sous-traitance et uniformiser les normes de prise en compte. L'Assemblée nationale a proposé d'établir une liste de métiers à risque. Un amendement au PLFSS a été adopté ; avec quelles suites ?
S'agissant de la création d'une voie d'accès individuelle à la Caata, l'exemple italien, où un fonds équivalent au Fcaata s'est retrouvé engorgé avec 240 000 demandes, doit nous inciter à la prudence.
Je reconnais que des avancées ont eu lieu depuis un an, notamment pour le Fiva. Les délais de traitement ont une grande importance, face à des pathologies qui évoluent vite.
Le suivi médical des victimes ? La Haute autorité de la santé a prévu un suivi avec un scanner thoracique. Cette recommandation a-t-elle été suivie ? Et quid de l'examen des fibres courtes ? (Applaudissements)
Mme Annie David. - C'est avec satisfaction et humilité que nous abordons ce débat. L'amiante va tuer 107 000 Français par an d'ici 2025. Pendant que l'industrie tire profit de l'utilisation de l'amiante, des travailleurs continuent d'en mourir, alors que le drame de Condé-sur-Noireau avait été signalé dès 1906 par un inspecteur du travail.
Le patronat a traîné les pieds pour reconnaître la nocivité de l'amiante. Ce n'est qu'en 1996 que l'amiante a cessé d'être tenu pour un risque qu'il fallait gérer, pour être traité comme un facteur cancérigène, à interdire.
Un calorifugeur peut être exclu du dispositif du Caata parce que son entreprise ne figure pas sur la liste... Des sites entiers ne sont pas reconnus, comme je le vois dans mon département : le site d'Arkema Jarrie est inscrit sur la liste, celui de Brignoud ne l'est pas. Pourtant, ces deux sites ont réalisé des fabrications communes.
Depuis 1997, l'amiante est certes interdit mais 76 % des chantiers de désamiantage ne sont pas conformes !
En 2009, la Cour de cassation a jugé que la mise en sécurité des travailleurs de l'amiante était obligatoire pour les entreprises. Il reste un vide juridique, entre le crime d'empoisonnement et le délit d'exposition à substance dangereuse. C'est pourquoi nous avons déposé une proposition de loi en octobre 2007, repoussée par la majorité en 2008.
Les fibres d'amiante, inhalées parfois en une seule exposition, sont très difficiles à éliminer. Que faire ? Refuser de travailler quand on sait que l'exposition à l'amiante sera inéluctable ?
Des poisons comparables à l'amiante, telles les substances NRC, doivent aussi être pris en compte, depuis les nanoparticules jusqu'aux éthers de glycol.
L'Acaata doit être revalorisée. Quelles sont vos propositions pour mieux prendre en compte les droits des victimes de l'amiante ? (Applaudissements)
M. Gérard Dériot. - Vous voyez que le sujet de l'amiante est prégnant au Sénat : nombre de nos concitoyens sont morts d'avoir été mis en contact avec ce produit naguère connu pour son efficacité isolante.
Cette question orale nous fait revenir sur un débat que nous avons eu la semaine dernière : notre amendement, accepté par le Gouvernement, a été retenu par la CMP sur les retraites. Il n'était pas équitable d'imposer aux travailleurs de l'amiante de retarder leur départ en retraite.
Notre commission d'enquête a montré les négligences, les erreurs, les dénis qui ont abouti au drame de l'amiante. Je rappelle à mon tour qu'il suffit d'une fibre d'amiante pour provoquer un mésothéliome. D'après l'Inserm, nous pouvons attendre 45 à 57 000 décès dus à cette maladie professionnelle d'ici 2050. Le chiffre ne doit pas être oublié.
Le Fcaata est un dispositif spécifique de préretraite destiné à compenser la diminution d'espérance de vie due à l'amiante. Il n'est pas souhaitable de restreindre ce dispositif, qui devrait atteindre l'équilibre financier en 2017 puis progressivement disparaître.
Si j'avais proposé de supprimer la participation des entreprises, c'était à cause de la quasi impossibilité de récupérer les sommes dues : mieux vaut tirer un trait dessus que perdre du temps... mais la participation des entreprises à ce fonds n'aurait été que justice.
Des adaptations sont toujours possibles. Le Médiateur insiste pour que soit pris le décret promis pour harmoniser la prise en charge de l'Acaata par les différents régimes. Nous comptons sur vous, monsieur le ministre. Je déposerai un amendement en ce sens au projet de loi de financement.
La seule réforme envisageable serait l'ouverture d'un droit d'accès individuel par profession. Cela suppose une étude approfondie. Mais il ne faudrait pas que l'établissement des critères trop stricts n'ait pour effet une limitation des personnes éligibles, comme cela s'est passé en Italie. Il faut donc avancer par étapes afin de donner satisfaction à tous.
Le prochain PLFSS contient une avancée puisqu'il porte à dix ans le délai de prescription. Prudence et pragmatisme sont, dans cette question douloureuse, les meilleurs alliés de la justice. Nous comptons sur vous, monsieur le ministre, pour faire tout ce qui sera possible. (Applaudissements)
M. Jean-Marie Vanlerenberghe. - Je salue l'intervention de M. Godefroy, et l'exhaustivité de son propos.
Notre mission avait dégagé 28 propositions ; plusieurs ont été suivies d'effet. Je constate que la formation des salariés concernés a progressé. Reste le problème du dépistage.
En 2007, le ministre du travail a confié à M. Le Garrec une mission de réflexion sur une réforme du Fcaata puisque la liste établie a conduit à exclure certains travailleurs de l'amiante du bénéfice du dispositif.
Le rapport Le Garrec insiste sur la nécessité de relancer la précaution sur l'usage des produits chimiques au travail. Il constate que le financement du Fcaata provient pour l'essentiel de la branche AT-MP. Ni l'État, ni les employeurs n'assument leur responsabilité. La part de l'État devrait atteindre les 30 % comme nous le proposions en 2007.
On peut espérer gérer dans le cadre financier actuel les 35 000 cas qui risquent encore de se présenter. La gestion du fonds pourrait être retirée à la CDC et confiée directement à la branche AT-MP.
Il a fallu treize ans pour que l'affaire Alstom, le premier procès de l'amiante, soit jugée. Combien de temps faudra-t-il pour les autres ?
Puisse cette affaire, où l'État a une grande part de responsabilité, servir de leçon pour les autres pollutions qui nous menacent. (Applaudissements au centre et à gauche)
M. Yannick Botrel. - Le douloureux problème des victimes de l'amiante ne peut être ignoré par personne. La responsabilité est collective et nous engage sur la durée de la vie des salariés. La nocivité de l'amiante était connue depuis le début des années 60. Dans les Côtes-d'Armor, région peu industrielle, 82 salariés de l'ancienne usine Chaffoteaux sont touchés. Leur colère est légitime !
La prise en considération a été trop tardive, puisqu'elle n'a eu lieu qu'en 1997, alors que les Britanniques l'avaient fait dès 1931 et le Parlement européen en 1978.
Le Conseil d'État a, par quatre décisions de 2004, confirmé la responsabilité de l'État, pour le caractère tardif et insuffisant de la reconnaissance du problème.
Près de 10 % des cancers du poumon sont liés à l'amiante ! Les victimes meurent en moyenne à 64 ans, après 1 an et demi de maladie déclarée. Le Fcaata et le Fiva doivent permettre aux salariés de partir en préretraite, avec une pension suffisante pour vivre dignement.
Le débat sur les retraites a abordé le sujet. Je salue la responsabilité du Sénat et le ministre à cette occasion.
L'amiante n'est pas un problème du passé : il faut en tirer les leçons pour l'avenir et faire en sorte que le précédent n'ait pas de suites : les fibres céramiques réfractaires ne sont pas moins dangereuses...
Les droits des victimes de l'amiante doivent être garantis et n'être pas remis en cause chaque année par le PLFSS. Une prise en charge des frais de santé à 100 % doit être envisagée.
Une prise en charge plus significative est nécessaire.
Trente ans après une contamination, il est parfois difficile de retrouver une entreprise qui a changé de nom, qui a disparu. Résultat, les travailleurs intérimaires et ceux qui ont travaillé pour des entreprises de sous-traitance peinent à faire valoir leurs droits. Monsieur le ministre, que comptez-vous faire pour eux ? Comment protéger les travailleurs de l'exposition à de nouveaux matériaux cancérigènes ? Qu'en est-il d'une prise en charge à 100 % des frais de santé des victimes de l'amiante ? La question de l'amiante est consensuelle au Sénat, merci de l'intérêt que vous y témoignerez.
Mme Nathalie Goulet. - Merci à Mme Dini, présidente de la commission des affaires sociales, de sa présence, qui démontre notre engagement unanime sur ce dossier. Et merci à M. Godefroy d'avoir permis ce débat.
J'ai reçu des collectifs de victimes ; tous disent leur impatience de voir les dossiers traités. Assez de procédures, de questions écrites ou orales, de commissions de toutes sortes !
Vous avez été, monsieur le ministre, l'homme du bouclier fiscal, celui d'une transaction légale mais douteuse avec M. Tapie, celui de la vente de la salle Pleyel...
M. Éric Woerth, ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique. - Pourquoi cette mise en cause personnelle ? Le bouclier fiscal, c'est Mme Lagarde.
Mme Nathalie Goulet. - Vous étiez ministre du budget. Mais attendez : vous pourriez être le ministre qui règle, enfin !, le problème de l'amiante, grâce à une procédure plus rapide, moins humiliante et moins onéreuse. Pourquoi ne pas s'inspirer des pratiques de la commission pour l'indemnisation des spoliations antisémites ? Il faut trouver des solutions plus souples et moins administratives pour la centaine de dossiers en suspens. Que les préfets dressent une liste des salariés non encore indemnisés et vous pourrez traiter la question par voie transactionnelle. Vous en avez le pouvoir, ayez la volonté de faire ce en quoi vous croyez !
M. Éric Woerth, ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique. - Le Fiva et le Fcaata ont été créés pour répondre au problème majeur de l'amiante. M. Godefroy, qui a travaillé dans la construction navale, est particulièrement sensible à cette question ; je le remercie d'avoir lancé ce débat. La France a l'un des systèmes les plus protecteurs d'Europe contre l'amiante. C'est pour tirer les conséquences de l'amiante qu'a été créé l'organisme d'expertise devenu l'Agence nationale de la sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail.
Pour vous répondre précisément, monsieur Godefroy, vous parlez de parcours du combattant pour inscrire une entreprise sur la liste. Vous prenez le cas de Tréfimétaux, à Dives-sur-Mer ; l'entreprise avait été inscrite sur la liste, la cour administrative d'appel de Nantes l'en a retirée en octobre 2008. Depuis, il n'y a plus de base légale ; il faut attendre la décision du Conseil d'État.
La procédure d'inscription respecte le principe du contradictoire, la liste est régulièrement mise à jour dans la transparence. En 2002, le Conseil d'État a accepté sous conditions l'inscription des sous-traitants au Fcaata. La situation est plus compliquée pour les intérimaires.
S'agissant de l'harmonisation des régimes, elle est techniquement difficile, et pas toujours à l'avantage des bénéficiaires. Mieux vaut prévoir une meilleure coordination entre eux. Traitons cette question définitivement dans la loi de financement pour 2012.
La création d'une voie d'accès individuelle à la Caata doit donner lieu à un rapport, qui vous sera remis dans les quinze jours. Cela réglerait le problème des listes, mais risque, hélas, de conduire à troquer une injustice contre une autre.
Cela suppose que le travailleur fasse la preuve de son exposition à l'amiante. Se pose également la question de la traçabilité de l'exposition, nous en avons discuté dans le cadre du débat sur la pénibilité.
Faut-il constituer une liste des métiers, qui serait ensuite croisée avec la liste actuelle ? Le rapport de l'Agence française de sécurité sanitaire de janvier prochain permettra d'y voir plus clair. Évaluer les effectifs concernés est très délicat ; l'Italie avait adopté un système de cette sorte, avant de l'abandonner.
Permettez-moi de lever un malentendu sur les propos du Président de la République à Saint-Nazaire : il n'est pas question de réserver les dispositifs « amiante » aux seuls malades.
Le montant de la Caata serait trop faible... Il est de 1 625 euros net en moyenne et l'allocation minimale a été revalorisée à 1 084 euros par le décret du 29 novembre 2009. La Cour de cassation n'a pas contesté l'exclusion de certains éléments de rémunération, mais le fait que la décision ait été prise par circulaire et non par décret.
J'en viens au Fiva. Le contrat d'objectifs et de moyens signé en février vise à améliorer le service rendu. Les délais de traitement et de paiement s'améliorent : 90 % des victimes sont payées dans les deux mois. La réforme de la gouvernance du Fiva se fera dans un cadre consensuel.
Porter la durée de prescription des actions devant le Fiva de quatre à dix ans, en retenant comme point de départ le premier certificat médical, ne remet pas en cause les dispositions de la loi Hyest de 2008 ; il faut bien distinguer action en responsabilité et indemnisation.
La situation financière du Fcaata devrait se stabiliser en 2010, avec un résultat excédentaire de 14 millions en 2011. Le déficit cumulé depuis 2005, soit 288 millions fin 2010, ne fragilise pas le versement des indemnités, du fait de la solidarité de trésorerie avec la branche AT-MP
Vous souhaitez rétablir la contribution des entreprises au Fcaata, que le Gouvernement a supprimé au 1er janvier 2009. Son rendement était faible et son recouvrement très difficile. En outre, l'existence de cette contribution freinait la reprise d'entreprises en liquidation ou en redressement.
Le Gouvernement propose de fixer la dotation au Fiva de la branche AT-MP à 340 millions, soit 25 millions de plus que l'an passé. La totalité des dépenses 2011 seront couvertes.
Monsieur Barbier, à la suite du rapport de l'Agence française de sécurité sanitaire sur les fibres d'amiante, un décret paraîtra au premier trimestre 2011 qui réduira d'un facteur dix les valeurs limites d'exposition.
Madame David, vous avez évoqué les risques CMR. Cela fait partie du plan de santé au travail (PST2) via des conventions, par exemple, dans la pétrochimie, à travers la recherche de produits de substitution.
Nous serons très attentifs à deux aspects, à commencer par la prévention car le produit est interdit mais l'exposition demeure ; c'est une des priorités du PST2. L'inspection du travail est mobilisée. Autre aspect, la juste réparation des victimes. La branche AT-MP a fait un considérable effort : 5,3 milliards de dotations cumulées au Fcaata, 6,2 milliards au titre de la réparation des maladies professionnelles, 2,3 milliards au Fiva.
Cela ne règle pas tout. Beaucoup reste encore à faire.
M. le président. - Merci, monsieur le ministre, de votre réponse sur cette question très importante.
Traitement des déchets
M. le président. - L'ordre du jour appelle le débat sur les conclusions de la mission commune d'information sur le traitement des déchets.
M. Daniel Soulage, rapporteur de la mission commune d'information. - Notre mission est la première à avoir été constituée en application du droit de tirage accordé à chaque groupe depuis la réforme constitutionnelle. J'ai souhaité que le rapport de la mission soit un guide pour les élus locaux dans le choix des différentes techniques de traitement des déchets. Il n'aborde pas les questions de la prévention et du recyclage, mais rappelle que le meilleur déchet est celui qu'on ne produit pas...
La période est marquée par un engouement pour la valorisation organique des déchets. Le compostage a un intérêt certain, mais quid de la méthanisation ? Le tri mécano-biologique impose de son côté qu'on isole la fraction organique, ce qui n'est pas simple et présente des risques pour les sols. Le taux de rémanence des métaux lourds et des inertes dans le compostage est supérieur en France à la norme européenne. La norme va certainement être durcie dans les prochaines années. En outre, la France est la seule en Europe à autoriser l'épandage de compost non trié à la source. Nous risquons une interdiction à terme. La méthanisation, souvent envisagée devant l'impossibilité de créer de nouveaux sites de stockage ou d'incinération, concerne la seule part fermentescible des déchets. Mais son coût élevé limite son utilisation aux grandes agglomérations. En outre, la collecte sélective est aléatoire et variable dans le temps. Les Suédois en sont revenus.
J'en viens au stockage qui fait désormais l'objet d'une stratégie globale de réduction. Nous ne contestons pas cette politique, mais elle doit être menée avec discernement et réalisme.
L'impact sanitaire de ces installations est désormais limité, contrairement à ce que pense l'opinion. Il semble abusif de congédier le stockage sans autre forme de procès. Il faut conserver cette politique sous réserve de valoriser la biomasse, particulièrement en milieu rural. M. Pastor, dans le département duquel nous avons visité un centre de stockage bioréacteur, ne me contredira pas. Quel est votre sentiment sur ce sujet, madame la ministre ?
Le rapport de la mission a été adopté à l'unanimité, le but étant d'établir un guide consensuel pour les élus. Merci à M. Braye pour nos échanges francs, à M. Pastor de nous avoir reçus dans son territoire, à Mme Didier d'avoir souligné la qualité de notre travail commun. (Applaudissements)
M. Dominique Braye, président de la mission commune d'information. - Après de nombreuses auditions et des déplacements, nous avons voulu souligner les difficultés que rencontrent, tant en milieu rural qu'urbain, les collectivités locales et les exploitants.
Le Grenelle de l'environnement a conforté plus qu'il ne l'a levé le tabou de l'incinération. Or, dans des pays exemplaires en matière d'environnement, en Allemagne, en Suède, en Belgique, l'acceptation de l'incinération fait consensus. Nous avons voulu montrer que notre réglementation, une des plus sévères d'Europe, était protectrice de la santé comme de l'environnement. Il y a très loin entre le sentiment de risque sanitaire et le risque réel. Les chaudières à bois, par exemple, émettent davantage de particules, tout en bénéficiant d'incitations fiscales... L'incinération ne s'oppose ni au tri, ni au recyclage. Plus on trie, plus on incinère. Notre rapport a voulu remettre l'incinération à sa juste place dans le traitement des déchets. Au Danemark, l'incinération des déchets est considérée comme une source d'énergie renouvelable, qu'on installe souvent en plein centre-ville ; les populations n'y voient qu'une chaufferie. S'il faut développer les réseaux de chaleur, il faut en finir avec un parc de taille trop modeste et des installations dispersées sans pertinence économique.
L'opinion publique doit se réapproprier l'incinération grâce à une information enfin objective et enfin transparente afin de contrer certains experts autoproclamés qui versent dans l'idéologie. Mme le ministre, que comptez-vous faire pour aider les élus à réhabiliter l'incinération ?
La TGAP a fait l'objet d'une réforme mémorable lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2009 -augmentation progressive de la taxe sur le stockage et création d'une fraction spécifique aux incinérateurs. Nous avons la conviction que cette réforme n'a obéi qu'à une logique de rendement et que son élargissement à l'incinération n'est que trop claire. C'était un échange de bons procédés avec certaines ONG. La France a créé une taxe sur l'incinération quand ses voisins européens exemplaires en matière d'environnement la supprimaient.
Nous prônons donc un aménagement de la TGAP. Un rapport est prévu pour 2013 ; nous en avons besoin dès 2011, compte tenu de la crise qui pèse sur les budgets locaux. L'augmentation de la taxe doit être conditionnée à une évaluation. Son produit doit rester stable dans les années à venir (« Très bien ! » à droite) et affecté à la politique des déchets, comme le Gouvernement s'y est engagé.
Entre un vétérinaire et un agriculteur, les discussions ne peuvent être que franches ! Je me réjouis que la mission soit parvenue à un rapport consensuel. En revanche, certaines associations, par refus ont-elles dit de « choisir entre la peste et le choléra » ont fait des gorges chaudes après sa publication. Elles siègent dans des instances essentielles pour l'élaboration de la politique de l'environnement ; leur implication, innovation majeure du Grenelle de l'environnement, n'a de sens que si elles font preuve d'honnêteté, de responsabilité et d'objectivité.
La mission unanime a souhaité que les scientifiques soient davantage associés aux processus décisionnels, dont ils ont été trop longtemps écartés. La mission est impatiente d'entendre l'avis du Gouvernement !
Quid enfin du récent rejet par la Commission consultative d'agrément d'Eco-emballages, de l'enveloppe financière de 640 millions d'euros ? Les élus la contestent.
Elle ne correspond pas aux 80 % des coûts d'un service public optimisé, selon la formule qu'on nous a imposée : quelle est votre position ? (Applaudissements)
M. Jean Milhau. - Je félicite le rapporteur de cette mission, qui a accompli un vrai travail de terrain. Nous avons ainsi un texte de référence pour les élus, dont les décisions doivent pouvoir être prises de façon éclairée. C'est pourquoi nous nous sommes concentrés sur les déchets banals des ménages.
Nous louons tous le Grenelle mais les collectivités peinent à se plier à ces nouvelles exigences. La hiérarchie européenne des modes de traitement serait d'application difficile sur le terrain.
Les différents moyens de traitement on chacun leur valeur, selon les circonstances. Le rapport valorise l'incinération, décriée par certaines associations. Il est vrai qu'elle requiert des équipements lourds qui engagent pour des décennies et que le stockage peut être plus facile à mettre en oeuvre dans certaines collectivités. L'évolution de la législation européenne risque de compromettre les décisions des élus. Et l'amortissement des installations.
On ne peut traiter la campagne comme les villes. La TGAP est parfois injuste pour les collectivités rurales. Il serait bienvenu de faire une pause dans ses augmentations. Je m'inquiète aussi de la pression fiscale qui s'alourdit sur les contribuables. La facturation incitative est une fausse bonne idée : la collecte en bacs collectifs rend l'identification impossible.
La semaine dernière, la commission consultative Eco-emballages a rejeté le financement du recyclable. Collectivités et contribuables sont déjà sous pression : ils paient toujours plus ! La semaine européenne des déchets devrait être l'occasion d'une prise de conscience. Ne décourageons pas les bonnes volontés qui se sont mises au travail pour protéger notre environnement ! (Applaudissements)
Mme Évelyne Didier. - Je commencerai à mon tour par des remerciements. L'ambiance était bonne dans la mission ; les propos étaient francs ; nous avons pu progresser. L'augmentation des déchets, symbole d'un consumérisme irréfléchi, a commencé à ralentir. Il faut continuer en faisant en sorte de mettre sur le marché des produits plus durables. Récupération, recyclage, réemploi, réutilisation à des fins différentes, régénérations : autant de moyens de limiter en amont la quantité des déchets.
Il convient d'avoir une vision intégrée, pour adapter les traitements aux caractéristiques du milieu concerné. La différence de tarifs est très importante entre enfouissement et incinération, sans que l'on voie bien pourquoi l'un devrait absolument être favorisé par rapport à l'autre. Tout doit dépendre des conditions locales.
Un accord avait été trouvé, qui incitait les producteurs à limiter la masse des futurs déchets. Or, les producteurs n'ont pas accompli leur part de l'effort. Hormis pour le verre et l'aluminium, le recyclage coûte plus cher que la production ; on ne peut donc compter sur la pseudo-rationalité du marché.
On ne peut à la fois demander au consommateur de trier et de payer alors qu'il n'est pour rien dans la prolifération des emballages. L'instabilité juridique en matière de gestion des déchets va contre toute perspective à long terme pour l'investissement des collectivités locales. Que cherche-t-on au juste ? Quels sont nos objectifs prioritaires ? Quels moyens donne-t-on aux collectivités ?
J'ai approuvé ce rapport grâce à la transparence de nos débats mais la mission avait pour objet le seul traitement des déchets et pas l'ensemble de la problématique. Faisons en sorte que nos concitoyens ne subissent pas la double peine. (Applaudissements sur la plupart des bancs)
M. Gérard Miquel. - Les objectifs sont ambitieux. Les déchets sont à mes yeux un gisement de matière première. Pourquoi certaines collectivités ont-elles atteint 75 % du recyclage alors que d'autres n'y arrivent pas ? C'est faute d'avoir trouvé le niveau pertinent d'organisation territoriale. Nous n'avons pas harmonisé les systèmes de collecte. Il faut simplifier le message. Les plans élaborés à l'échelle départementale avec retombée infra-départementale sont la bonne solution, la plus conforme à l'esprit de la décentralisation. Le traitement de la part résiduelle appelle des réponses différentes selon les situations. Les systèmes ne s'opposent pas, ils sont complémentaires. Ne rejetons pas le tri mécano-biologique qui a fait ses preuves dans certains endroits et qui permet le recyclage.
M. Didier Guillaume. - Absolument !
M. Gérard Miquel. - La TGAP doit être rendue moins pénalisante. Malgré tous les efforts d'optimisation, les coûts sont différents selon les situations. Les évaluations doivent donc être revues.
La compensation financière n'est pas à la hauteur des enjeux. Nous collectons une grande quantité de journaux et magazines -qui ne cotisent pas !
Dans le Lot, nous avions, il y a vingt ans, une centaine de décharges. Nous les avons fermées et réhabilitées. Avec une tarification incitative, nous retrouverions de petites décharges au coin des bois ! Une telle tarification n'a de sens que dans les villes ou, à la campagne, au deuxième degré.
Les 640 millions : au bout du compte, c'est le contribuable, le consommateur qui paie. A ce prix, nous ne retrouvons pas notre compte. Il ne faudrait pas que les normes nous empêchent d'oeuvrer pour le traitement des déchets. L'objectif de 75 % peut et doit être atteint. Nous avons négocié un barème incitatif et nous nous y sommes tenus. Il est bien meilleur que le précédent. J'espère que nous pourrons continuer à travailler avec. (Applaudissements)
M. René Vestri. - Voici un défi sans précédent dans l'histoire de l'humanité, entre gestion de l'environnement et avenir durable. Des mesures immédiates s'imposent. Nos sociétés occidentales très urbanisées produisent des milliards de tonnes de déchets, dont une bonne part sont nocives. Nos organismes rejettent en moyenne six fois notre poids.
Nous avons un devoir de vigilance : à l'heure de la compétition mondiale, le traitement des déchets est devenu une industrie à part entière.
La prévention de la pollution passe par une implication forte des citoyens dans le tri des déchets. Cela reste à faire !
Notre rapporteur insiste sur la valorisation de l'incinération. Le fait est que la combustion des déchets constitue une énergie renouvelable. Elle est adaptée à nombre de collectivités. En Europe, 27 millions d'habitants sont fournis en électricité par 400 unités d'incinération.
Des installations de stockage aux nouvelles normes doivent être favorisées. Le compostage individuel de la matière organique nécessite peu d'investissement et s'inscrit dans une problématique locale et durable de la valorisation tout en respectant l'environnement.
Il faut favoriser l'interdépartementalité avec un encadrement pour limiter le risque de voir naître des départements poubelles. Nous voyons les déchets transiter du département du Var à celui des Bouches-du-Rhône pour être traités ! Il faudrait pénaliser ces transports de déchets sur de longues distances.
Élu méditerranéen, je ne puis passer sous silence les conséquences sur le milieu maritime : avec 11 millions de kilomètres carrés nous abritons 10 % des récifs coralliens, sources de matière organique de base pour les poissons. Nos collectivités doivent traiter leurs rejets.
Dans l'océan, les métaux lourds mettent en danger la vie marine et stimulent la croissance d'algues nocives. Et je ne parle pas des sacs en plastique -qui mettront 400 ans à disparaître ! Tout ce qui vient de la terre aboutit à la mer. C'est particulièrement vrai sur le rivage méditerranéen, avec la population estivale, et dans les ports. Il faudrait donc généraliser les poubelles flottantes dans les ports de plaisance. Le préfet maritime devrait vérifier que chaque plaisancier dispose des moyens de ne pas polluer le milieu marin.
L'association Grand Bleu, que j'anime, a mobilisé les citoyens sur le problème des macro-déchets qui viennent s'échouer sur les côtes au gré du vent. Le Grenelle de la mer -qu'il faut relancer !- devra trouver les solutions adaptées.
C'est difficile ? Mais ce qui est difficile est bénéfique pour l'avenir ! (Applaudissements)
M. Daniel Dubois. - A mon tour de saluer l'excellent travail de la mission et de me féliciter de l'état d'esprit qui a présidé à ses travaux.
Le Grenelle avait fixé des objectifs très ambitieux en matière de déchets. La France est loin d'être exemplaire. Nos infrastructures atteignent les limites de leur capacité.
L'opinion publique ne veut pas de l'incinération ? Pas non plus de centres d'enfouissement.
J'ai été surpris de la faible capacité de notre parc d'incinération : la moitié du parc allemand.
C'est pourtant un moyen de créer de l'énergie. Il est donc urgent de réhabiliter dans l'opinion publique l'image de l'incinération. Les experts reconnus doivent se saisir de la question. On est englué dans cette idée, il faut en sortir.
Le traitement biologique des déchets nécessite une attention accrue. Il faut être attentif à la qualité du compost. Les élus ont besoin de conseils techniques pour ne pas se lancer dans des investissements coûteux qui ne seraient pas performants.
Ne faisons pas peser sur le contribuable des charges financières trop importantes. J'entends mes administrés, de plus en plus nombreux, s'interroger : « à quoi cela sert-il de trier ? Plus je trie, plus c'est cher ! » En milieu rural, la question revient sans cesse. Le tri ne se décrète pas. Il faut donc une pédagogie. Et si possible favoriser les systèmes qui s'autofinancent.
Il faut différencier entre ménages et entreprises, mais aussi et surtout entre territoires ruraux et urbains. Les premiers trient plutôt bien ; ils sont dans une démarche de tri en amont. Comme ils apportent moins au centre d'enfouissement, ils devraient le retrouver sur leur facture. Mais il y a un élément majeur : le kilomètre !
J'ai dû refaire un appel d'offres. J'avais un centre d'enfouissement proche, à dix kilomètres. J'en ai choisi un qui était à 70 kilomètres. C'est un peu moins cher mais les camions font 140 kilomètres aller-retour : vous imaginez l'empreinte écologique....
M. Roland Courteau. - C'est sûr !
M. Daniel Dubois. - Il faut mesurer ce qui se fait dans un territoire. L'incinération est évidemment plus simple en ville, où on pourra chauffer l'hôpital, les logements...
Si l'on continue, les territoires ruraux perdront en efficacité.
Bref, laissons les départements arrêter leurs plans. Les objectifs doivent être clairs mais les moyens rester souples, et les critères d'évaluation tenir compte de l'efficience du système retenu.
Limiter la production des déchets est incontestablement une voie à emprunter.
M. le président. - Veuillez conclure !
M. Daniel Dubois. - L'éducation pour éviter de produire les emballages est un levier qui doit être actionné ! (Applaudissements)
M. Jean-Marc Pastor. - Le traitement des ordures ménagères est venu au premier rang des priorités. La mission sénatoriale prend tout son sens face à nos collègues élus locaux, qui se familiarisent grâce à elle avec tout un vocabulaire -responsabilité élargie des producteurs, valorisation de la matière ou encore éco-conception. La mission mérite tous les éloges.
L'idée que du produit au déchet il faut avoir une vision globale s'est imposée. Mais on continue à regarder l'aval en négligeant l'amont, alors même que certaines entreprises ignorent leurs devoirs en la matière.
Aucune des techniques de traitement n'est parfaite ni toute mauvaise. Elles ont toutes beaucoup évolué, de manière à limiter la pollution dégagée et à maîtriser les coûts.
Je pense aussi à la recherche scientifique sur l'hydrogène produit par le traitement des résidus, une spécialité française.
Là comme ailleurs, le nerf de la guerre est du côté des finances ! La TGAP devrait peut-être tenir compte de la qualité de la mise en oeuvre, plutôt que de la production effective. La culture bio est soumise à un contrôle pas excessivement sévère. Sur les bioréacteurs, la circulaire est floue, incontrôlable et illégale : si la qualité de biomasse produite est faible mais valorisée à 75 % ou plus, est-il normal que la TGAP soit la même que si le rapport est plus élevé ?
Il faudrait tenir compte des moyens plutôt que du pourcentage de produits !
Le rapport d'analyse sur la TGAP pourra-t-il être diligenté en 2011 ? Nous sommes en mesure de vous faire des propositions ! (Applaudissements)
M. Jacques Muller. - Je salue également le travail de la mission et me réjouis de nos débats francs et ouverts. Nous avons rédigé un document qui est une véritable mine de données chiffrées ; pour autant, je me suis abstenu.
Premièrement, la réhabilitation de l'incinération pose le problème de la dispersion des lixiviats et des mâchefers, qui sera bientôt soumise à des normes européennes plus strictes. Dire que les pays qui trient le plus sont ceux qui recyclent le plus est une affirmation tendancieuse : le lien n'est pas direct. L'incinération reste une facilité, nous en avons l'expérience dans le Haut-Rhin, dirigé par des élus de la majorité. Aujourd'hui, nos résultats dépassent ceux enregistrés en Allemagne. L'incinérateur reste un aspirateur à déchets, s'il n'y a pas volonté forte.
Je regrette que la commission n'ait pas tranché sur les bio-déchets. J'approuve la priorité donnée au traitement de proximité, mais pourquoi ne pas avoir repris le modèle de Freiburg où les bio-déchets sont traités en ville ?
Enfin, la facturation incitative doit porter sur la réduction des emballages en amont. Mes amendements, soutenus pas le ministre, ont été sabotés à l'Assemblée nationale. Je regrette la présentation orientée du rapport qui souligne les risques d'augmentation des coûts en gras tout en signalant, en tout petits caractères, comme dans les contrats d'assurance, que la facturation incitative réduit les déchets et donc la facture dans tous les cas. Changeons notre regard : nos poubelles sont de l'or !
M. Dominique Braye, président de la mission. - J'échange mes déchets contre des lingots ! (Sourires)
M. Jacques Muller. - Il faut encourager les comportements éco-citoyens ! (Applaudissements à gauche)
Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État chargée de l'écologie. - Ce débat est une excellent initiative sur une question qui reste controversée peu de temps après le Grenelle. Elle n'est pas seulement technique, mais engage un projet de société. Les objectifs sont ambitieux mais atteignables. Plusieurs textes ont été adoptés et, dans le cadre du Grand emprunt, 250 millions sont réservés à la filière des déchets.
J'en viens aux conclusions de votre mission. Effectivement, il n'y a pas de solution miracle. Pour que cela fonctionne, il faut d'énormes moyens. En réalité, la solution dépend du territoire et du cycle global de la gestion des déchets
La difficulté réside souvent dans la planification. La directive-cadre prévoit trois documents de planification ; encore faut-il repérer les bons projets... C'est le rôle de l'Ademe, qui donne des avis, mais ne peut pas être partout... Elle a néanmoins augmenté ses aides à la décision locale.
Vous voulez donner plus de place aux scientifiques : ils n'ont pas été marginalisés. Les différents collèges du Grenelle visaient à représenter la société.
Nous avons besoin de solutions de traitement ultime, comme les décharges ou les incinérateurs.
L'Ademe a tiré la sonnette d'alarme : plusieurs départements sont dépourvus d'installations adéquates.
Le Gouvernement n'a pas conclu à l'interdiction des incinérateurs, mais à leur juste dimensionnement. Nous avons autorisé un incinérateur en Guadeloupe car il y a un réel besoin. La qualité du compost laisse à désirer. Nous devons anticiper sur les normes européennes qui seront plus sévères.
Allons droit au but sur la question des installations de stockage.
Une installation est pertinente si la quantité de déchets biodégradables est suffisante. Or l'Europe nous impose de réduire la quantité de déchets biodégradables. Nous devons travailler à résoudre cette contradiction.
Concernant les incinérateurs, il faut améliorer les contrôles et l'information. C'est seulement la transparence absolue de l'information qui rendra la confiance à nos concitoyens.
Monsieur Vestri, sur les macro-déchets flottants, les groupes de travail ad hoc ont permis de tracer une feuille de route. Nous attendons le rapport de l'Ademe à la fin de l'année.
J'en viens à la fiscalité des déchets, qui semble faire consensus. Le Grenelle avait conclu à la mise en place d'une part variable sur la tarification incitative.
Nous travaillons sur la délicate question des critères.
La modulation de la TGAP introduite dans la loi de finances pour 2009 pour promouvoir le recyclage et la valorisation doit, à ce stade, être maintenue. La taxe diffère entre incinération et stockage pour éviter les distorsions de prix à la sortie. Certains disent que cette TGAP constitue une charge insupportable sur les particuliers : elle est de 4 euros la tonne pour aboutir à 10 euros la tonne à terme.
Les collectivités sont les premières bénéficiaires de ces fonds. Un rapport d'analyse dès 2011 ? Cela paraît incontournable. Je ne doute pas que vous aurez de nombreuses propositions à me faire !
Sur les éco-emballages, je ne puis dire si le chiffre sera de 640 ou 680 millions, mais l'Ademe a proposé une formule de calcul : autant s'y fier !
Attention aux filières REP, qui représentent 800 millions et, à terme, 1,2 milliard ; elles peuvent être mal acceptées par le citoyen.
Pour reprendre le propos de M. Dubois, nous avons des objectifs, nous adaptons les moyens.
Soyons pragmatiques : il n'y a pas de solution unique. Cherchons à atteindre des objectifs qui seront évalués par des instances les plus indépendantes possibles ! (Applaudissements)
La séance est suspendue à 20 heures.
présidence de Mme Catherine Tasca,vice-présidente
La séance reprend à 22 heures.
Démission d'un sénateur
Mme la présidente. - M. le président du Sénat a reçu de M. Jean-Claude Etienne une lettre par laquelle celui-ci remet son mandat de sénateur de la Marne, à compter de ce soir, mardi 2 novembre 2010, dans la mesure où ce mandat est incompatible avec la qualité de membre du Conseil économique, social et environnemental. Acte est donné de cette décision qui prendra effet à minuit.
M. le ministre de l'intérieur a fait connaître à M. le président du Sénat qu'en application de l'article L.O.320 du code électoral, Mme Mireille Oudit remplacera, à compter du mercredi 3 novembre 2010, à 0 heure, en qualité de sénatrice de la Marne, M. Jean-Claude Etienne.
Ordre du jour (Espace réservé au groupe socialiste)
Mme la présidente. - Par courrier en date du 2 novembre 2010, M. Jean-Pierre Bel, président du groupe socialiste, a retiré de l'ordre du jour de l'espace réservé à son groupe le 16 novembre 2010 l'examen de la proposition de loi relative à l'aide active à mourir. Il demande, en remplacement, l'inscription à l'ordre du jour de la proposition de résolution relative aux enfants franco-japonais privés de liens avec leur parent français en cas de divorce ou de séparation, déposée le 13 juillet 2010, en application de l'article 34-1 de la Constitution.
Cette demande a été communiquée à M. le Premier ministre, en application de l'article 4 de la loi organique du 15 avril 2009 relative à l'application des articles 34-1 et 44 de la Constitution et de l'article 50 ter de notre Règlement.
Cette proposition de résolution ne pourra être inscrite, au plus tôt, que 48 heures après cette demande.
Retraites (Saisines du Conseil constitutionnel)
Mme la présidente. - M. le président du Sénat a été informé, par lettre en date du 2 novembre 2010, par le président du Conseil constitutionnel que celui-ci a été saisi d'une demande d'examen de la conformité à la Constitution par plus de 60 députés et 60 sénateurs de la loi portant réforme des retraites. Le texte de ces saisines est disponible au bureau de la distribution.
Budget de l'Union européenne
Mme la présidente. - L'ordre du jour appelle un débat sur la participation de la France au budget de l'Union européenne.
M. Denis Badré, rapporteur spécial de la commission des finances. - Dorénavant examinée avant le projet de loi de finances, la contribution de la France au budget de l'Union européenne est d'un niveau stable -en augmentation de 0,5 % par rapport à l'an passé- à environ 6 % de nos recettes fiscales, pour nourrir le budget européen à hauteur d'un sixième, budget dont le montant global est comparable à notre déficit.
Un refus de cette contribution ouvrirait une crise européenne, dont l'Union n'a pas besoin et qui nuirait aux intérêts de la France comme de l'Europe. L'Europe, c'est nous, les Européens, et aussi les Français et donc notre Parlement national. Si le traité de Lisbonne a consacré le rôle des parlements nationaux, ce n'est pas parce qu'ils sont plus proches des citoyens -même si c'est vrai- mais parce que ce sont eux qui décident les budgets et garantissent les dettes souveraines des États -on l'a vu au printemps, au moment de la crise grecque, avec la création du fonds de stabilisation. La question de la solidarité financière a toujours été au coeur des débats européens. Elle l'est encore plus avec la monnaie unique -il est d'ailleurs surprenant qu'il ait fallu attendre quinze ans pour s'en apercevoir...
La négociation du budget 2011 est la première à s'inscrire dans la nouvelle procédure du traité de Lisbonne. Le prélèvement de 18 milliards a été déterminé au printemps dernier sur la base de l'avant-projet de budget de la Commission -qui a été rectifié dans un sens plus rigoureux cet été par le Conseil. Contrairement aux années précédentes, le compromis proposé par la présidence belge n'a pas été voté dans le consensus, sept États représentant 88 voix -la minorité de blocage est de 91- ayant voté contre.
Le Parlement européen est revenu à des propositions proches de celles de la Commission. Le consensus paraît accessible ; encore faut-il que le Conseil accepte la demande des députés de l'ouverture d'une négociation sur les ressources propres. On retrouve là le problème de fond : la structure du budget européen -dépenses arrêtées en co-décision par le Parlement et le Conseil, recettes apportées à 85 % par les parlements nationaux. Comment dans ces conditions mettre en oeuvre le principe du consentement à l'impôt ? Chacun en veut pour son argent, comme disait Mme Thatcher ; mais comment évaluer les gains des uns et des autres ? A qui par exemple profitent les investissements dans un pays financé par les moyens des autres ? La PAC ne sert pas qu'aux agriculteurs ! (M. Jacques Blanc approuve) Lorsqu'on fait le bilan de la construction européenne, faut-il ne considérer que la satisfaction de grands objectifs comme la paix, la liberté, l'État de droit ? Bref, la logique des retours nets n'est pas que détestable, elle est aussi absurde.
Le débat sur les ressources propres interfère avec les perspectives financières de l'après 2013, ce qui n'est pas une mauvaise chose si la cohérence est au rendez-vous. La Commission évoque une taxation des transactions financières, un impôt sur les sociétés ou encore une TVA européenne -sachant que cet impôt est le seul dont l'assiette soit déterminée sur une base communautaire. Mais il ne faudrait pas que les citoyens aient la sensation que l'Union européenne est source de nouveaux impôts. Un impôt européen n'est admissible que s'il est compensé par une diminution de l'impôt national -où l'on retrouve la subsidiarité. Un dialogue doit s'ouvrir entre parlements nationaux et entre parlements nationaux et Parlement européen. La Cosac s'est longuement penchée dessus la semaine dernière.
L'estimation du prélèvement est trop mouvante et opaque, son montant est une année surestimé, une autre sous-estimé -parfois d'un milliard...
La France devrait demeurer le deuxième contributeur net après l'Allemagne. Nous participons pour 1 milliard au chèque britannique de 5 milliards. Certes, nous sommes le premier bénéficiaire de la PAC en valeur absolue, mais loin derrière l'Irlande si l'on évalue par tête d'habitant. Prenons garde aux chiffres !
Un examen méticuleux des politiques communautaires s'impose. L'Europe doit dépenser mieux. Un euro de plus au budget national est-il plus efficace dans tel ou tel domaine qu'un euro de plus au budget européen ? Je pense par exemple à la coordination des politiques de recherche nationale et européenne. En outre, il convient de veiller à une application rigoureuse du principe de subsidiarité.
Autre sujet, la multiplication des agences européennes que nous abordons dans la résolution du Sénat de décembre 2009. Je vais aller visiter l'Agence des droits fondamentaux de Vienne qui dispose d'un budget de 20 millions d'euros, sans qu'on voie bien jusqu'ici ce qu'elle apporte à côté du Conseil de l'Europe.
Comme le dit M. Arthuis, nous ne serons jamais assez vigilants pour éviter d'avoir à payer des amendes.
Hors de solidarités financières durables, l'Union européenne risque de se chercher longtemps. Le Sénat entend assumer sa responsabilité européenne consacrée par le traité de Lisbonne. Le moment venu, je vous recommanderai d'adopter l'article 46 de la loi de finances. (Applaudissements au centre et à droite)
M. Jean Bizet, président de la commission des affaires européennes. - 2010 restera dans les annales comme une année mouvementée mais qui aura vu l'Union européenne accomplir des progrès étonnamment rapides. Avec la crise grecque, l'Europe s'est fait très peur, avant de se ressaisir et de faire prévaloir la solidarité entre les États membres. La crise a paradoxalement créé un contexte favorable à une réforme de la gouvernance économique de l'Union. Nous devons donc nous féliciter des conclusions du Conseil européen des 28 et 29 octobre, qui, influencé par la déclaration de Deauville du 18, a fait sien le rapport Van Rompuy et entériné le principe d'une modification limitée du traité au plus tard en 2013. L'existence du fonds de stabilisation est limitée à trois ans ; la clause de non-renflouement d'un État membre ne sera pas modifiée pour ne pas fâcher la cour de Karlsruhe.
Le débat sur le budget 2011 augure déjà des difficultés à venir. Les positions de chacun sont plus que jamais divergentes, ce qui fait peser une incertitude sur son adoption. Pour la première fois depuis vingt ans, le Parlement européen n'envisage pas de dépasser les plafonds prévus dans les rubriques de dépenses, en contrepartie d'assurances sur le financement futur des politiques européennes, de la révision du cadre financier actuel et de l'ouverture d'un débat sur les ressources propres, sur la base de la communication de la Commission du 19 octobre. Il critique, en effet, la part prépondérante des contributions nationales dans le budget. Dans cette logique, la commission propose divers impôts européens -nos entretiens avec le ministre allemand des finances nous incite à penser qu'une telle idée est jugée inopportune dans les grands pays contributeurs.
Que se passera-t-il si le budget 2011 n'est pas adopté avant la fin de l'année ? L'usage des douzièmes provisoires ne serait pas sans effet, en particulier sur les services de Mme Ashton.
Pouvez-vous nous dire ce qu'il en est ? (Applaudissements à droite et au centre)
M. Simon Sutour. - Ce débat intervient au lendemain d'un conseil européen qui entérine une politique d'austérité attentatoire aux principes fondamentaux qui légitiment le projet européen. Le durcissement du pacte de stabilité n'a pas de sens, à propos de pays déjà surendettés. Quand à la suspension des droits de vote... On sanctionne au lieu de prévenir ! La charrue a été mise avant les boeufs en faisant des sanctions un préalable. Modifier le traité pour les seules sanctions n'a pas de sens si le pacte n'est pas réformé en profondeur.
Le budget européen pour 2011 n'est pas un budget de crise, mais un budget en crise. La seule perspective pour l'après 2013, c'est de déshabiller Pierre pour habiller Paul ! Faut-il croire que les États membres ont perdu toute foi en l'Union ?
Le traité de Lisbonne donne des compétences nouvelles en matière de politique énergétique.
M. Jacques Blanc. - En matière de cohésion territoriale aussi !
M. Simon Sutour. - Le lancement de la stratégie 2020 nécessite de lourds investissements : comment les financer ? L'augmentation de la contribution française dans le cadre des perspectives à venir n'est pas viable, avez-vous dit, monsieur le ministre ; France et Allemagne s'opposent à toute hausse du budget européen, comme à toute taxe à l'échelle de l'Union. Qu'allez-vous proposer ? On ne peut s'en tenir à une telle déclaration ! Il faut sérieusement envisager de nouvelles ressources propres.
Les États membres ne doivent pas s'en tenir à gérer les politiques avec ce dont ils disposent, ils doivent se montrer plus ambitieux. Il faut d'abord définir des objectifs, quitte à prévoir ensuite de nouvelles ressources propres. Nous pouvons toujours débattre, nous parlements nationaux, mais ce sont nos gouvernements qu'il faut convaincre !
Les nouvelles propositions de la Commission nous conviennent plutôt, l'affectation au budget européen de nouvelles taxes serait une bonne chose -dont nous regrettons qu'une majorité des États la refusent. Le Parlement européen ne s'est pas trompé, en faisant porter l'essentiel de son débat sur les recettes.
Le risque est grand de voir la PAC et la politique de cohésion territoriale -auxquelles nous sommes très attachés- sacrifiées à la pseudo-rationalité économique. La position des nouveaux États membres sera déterminante ; ils pourraient d'abord favoriser l'objectif 1. Il est dont essentiel de se montrer ambitieux en la matière, surtout dans la perspective de la stratégie 2020.
La dernière communication de la Commission est ambiguë. Certaines propositions sont intéressantes, mais elle suggère aussi de réserver une partie des fonds de cohésion aux États qui respecteraient les objectifs 2020... Que devient l'objectif de redistribution des richesses ? Que signifie la notion de « concurrence qualitative » ? La politique de cohésion ne doit pas être le vecteur d'une nouvelle concurrence entre États membres ; elle est un symbole de ce que l'Union européenne peut apporter, un enjeu démocratique.
Il ne semble pas qu'aujourd'hui et en l'état l'enveloppe globale de la PAC soit remise en question, mais l'insistance de certains États inquiète et des incertitudes demeurent sur la répartition des aides, les nouvelles conditionnalités ou les mesures de marché. La crise agricole, les viticulteurs du Languedoc en savent quelque chose...
Mme Bernadette Bourzai. - Et les éleveurs !
M. Simon Sutour. - ...a eu des effets catastrophiques sur nos agriculteurs. La position franco-allemande ne peut nous rassurer en la matière.
Un certain nombre de principes doivent être fermement défendus : la solidarité, le refus de toute renationalisation des politiques européennes, une vision ambitieuse de l'utilité de l'Union, des ressources convenables. Il y va de l'avenir de la construction européenne, de l'efficacité de ses politiques et de la légitimité de la construction européenne auprès des citoyens. (Applaudissements sur la plupart des bancs)
M. Jean Bizet, président de la commission des affaires européennes. - Très bien !
M. Aymeri de Montesquiou. - Le vote sur la contribution de la France intervient dans un contexte dense, entre Deauville et le conseil de la semaine dernière. L'enjeu de la crise grecque n'était pas que la stabilité de la zone euro : sa survie. Ne laissons pas croire que tout endettement serait désormais permis : la non-assistance reste le principe ; le sauvetage, l'exception. Mais comment faire ? A quelles conditions ? Avec quelles ressources ? Faut-il vraiment ouvrir la boîte de Pandore de la révision du traité ?
La France a obtenu que les sanctions ne soient pas automatiques, contrairement à ce que demandaient la Commission et M. Trichet. En a-t-on débattu au Conseil ?
Après le temps de l'urgence, voici celui de la reconstruction ! L'Europe doit relancer et promouvoir, or elle piétine. La stratégie de Lisbonne a été décevante. La stratégie 2020 a tout d'un catalogue de bonnes intentions.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. - C'est vrai.
M. Aymeri de Montesquiou. - Il faut avoir une politique ambitieuse d'investissement public, ce que le budget européen ne peut faire, à preuve les difficultés d'Iter et de Galileo.
Augmenter le budget à 3 % du PIB ? Oui sur le principe, non pour la circonstance. Un grand emprunt européen ? Ce n'est pas le moment. Il faut donc dépenser mieux, éviter les gaspillages reproduits chaque année sans réflexion. La question doit être d'identifier où 1 euro européen sera plus utile qu'1 euro national. Les domaines sont nombreux, où l'on peut atteindre la masse critique. Je pense par exemple à la défense, la recherche et l'innovation, les transports et l'énergie.
Le système actuel exacerbe les égoïsmes nationaux ; ces concurrences étriquées entre États nous affaiblissent. Retrouvons l'esprit des pères fondateurs, qui voulaient une Europe politique !
La Commission propose plusieurs pistes pour les ressources propres. Lesquelles la France privilégie-t-elle ? J'ai toujours souhaité un impôt européen, mais je conçois que ce ne soit pas de circonstance.
Il faudra immanquablement une nette montée en puissance du budget communautaire. Il faudra être vigilant pour la PAC. A ceux qui pensent que l'agriculture appartient au passé, nous répondons aménagement du territoire et souveraineté alimentaire, et aussi que la PAC est la politique communautaire qui a le mieux marché. « Les esprits et les coeurs européens ne seront gagnés que par des projets concrets et ambitieux ». Pierre Messmer avait raison ! (Applaudissements au centre et à droite)
M. Adrien Gouteyron. - L'intérêt d'un débat est de permettre l'expression de « sensibilités » différentes...
Le montant du prélèvement européen est seulement une évaluation. Le débat est ouvert, entre la proposition ambitieuse de la Commission, celle, plus raisonnable, du Conseil, et celle, enfin du Parlement. Il s'inscrit dans le chantier plus vaste de la réforme d'ensemble du système budgétaire communautaire, elle-même suivie par les négociations sur le cadre financier post-2013.
La préparation du budget 2011 a révélé une dissension profonde entre les Vingt-sept. On peut noter pour s'en réjouir la position commune de la France et de l'Allemagne qui a permis qu'une majorité se dégage. Les sept pays défenseurs du « juste retour » ont voté contre les propositions du Conseil, sachant que la position du Parlement européen, à coups de déclarations tonitruantes, est tout à fait décalée par rapport aux réalités économiques. Comment éviter l'impasse, qui conduirait à l'abandon du service diplomatique européen -et je ne parle pas des fonds de cohésion ?
Le dernier conseil a estimé essentiel que le budget 2011 tienne compte des efforts d'assainissement réalisés par les États membres. L'objectif de la France doit être de limiter l'augmentation du budget européen -sans que la PAC en pâtisse. Le confirmez-vous, monsieur le ministre ? L'écart risque d'être plus grand que jamais, pour la France et l'Allemagne, entre le souhaitable et le possible, entre le soutien à la relance et la nécessité pour chacun de limiter sa contribution nationale.
Pour notre pays, l'enjeu est de taille. Les deux sujets importants sont la fin du rabais britannique qui date de 1984 et la poursuite de la PAC. S'il ne fallait retenir qu'un sujet sur la prochaine programmation financière, il faudrait s'en tenir à la PAC.
M. Jacques Blanc. - Tout à fait !
M. Adrien Gouteyron. - Nous avons des intérêts communs avec l'Allemagne. En témoigne le document du 14 septembre dernier. Les agriculteurs ont besoin de stabilité pour investir. Nous avons besoin de ressources à la hauteur de nos ambitions. Le prélèvement de la France, rappelons-le, va croître de 600 millions par an jusqu'en 2013. Cette détérioration du solde net français est inéluctable ; cela exige de nous et des institutions européennes de la rigueur. La construction européenne a un coût ; c'est le prix à payer pour les politiques communes, mais il doit être équitablement partagé.
Le débat sur les ressources propres est nécessaire. Ne créons pas un impôt européen ! Personne n'en veut, personne ne le comprendrait ! (M. Yves Pozzo di Borgo le conteste) Un budget alimenté par les États, n'est-ce pas le moyen le plus sûr d'éviter les dérapages tel le rabais britannique ?
Je suis convaincu que nous devons aborder les prochaines négociations sur la prochaine programmation avec détermination. Le moteur franco-allemand est indispensable. Il y aura un compromis franco-allemand ou rien. Essayons de ne pas l'oublier ! (Applaudissements sur les bancs de la commission)
M. Michel Billout. - La participation de la France au budget européen est loin d'être négligeable. Pour autant, le budget européen n'est pas à la mesure des défis européens. La part des État n'a cessé d'augmenter, au détriment des ressources propres prévues par les pères fondateurs. Malgré quelques propositions de débat, il n'y a pas de volonté politique forte sur les ressources propres, notamment sur la création d'une nouvelle ressource. Nous apprécions la position du Parlement européen sur ce débat. On évoque la taxation des transactions financières, ou d'une taxe bancaire.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. - Ça, c'est une bonne idée ! (Sourires)
M. Michel Billout. - Nous voyons là une piste intéressante. Le projet général du budget de l'Union est soumis à un seul mot d'ordre, l'austérité ! Comme toujours, les élites européennes préfèrent laisser au marché le soin de la régulation. Les dépenses en faveur de la cohésion semblent remises en cause : la Commission suggère de les recentrer sur les régions les plus pauvres. Comme chaque année, les politiques sécuritaires sont renforcées, à défaut de véritables politiques d'intégration. Ces priorités devraient être le respect des droits des migrants. Je salue la position de la Commission sur les Roms, mais le budget l'amoindrit.
La PAC est indispensable : les nombreuses crises ont démontré la nécessité de la régulation. En définitive, le budget européen n'est pas en phase avec la réalité européenne : on manifeste à Paris, à Athènes. Le groupe CRC appelle de ses voeux la construction d'une autre Europe, fondée sur le progrès social.
M. Yves Pozzo di Borgo. - La semaine dernière, le débat préalable au Conseil a permis au Sénat de discuter des mesures à prendre pour que l'Europe puisse faire face à la crise. Aujourd'hui, nous débattons de la contribution de la France. Il s'agit du même débat : celui sur l'avenir économique de l'Union.
Je me réjouis que l'Europe se mette également à la rigueur. Pour autant, le financement de la recherche, parce qu'il est primordial, doit être maintenu. Avec la stratégie pour 2010, nous nous sommes collectivement engagés à investir 3 % du PIB dans la recherche.
Nous devons améliorer l'efficacité de la dépense publique. Attention à l'agenciarisation de l'Europe ! Qu'apporte une Agence des droits fondamentaux à Vienne, par rapport au Conseil de l'Europe ?
Nous voulons financer la recherche tout en maintenant la PAC et la politique de la cohésion sans accroître la contribution de la France. Quelle est la solution ? Mieux dépenser. A terme, se pose la question des ressources propres. Il s'agit de se demander si un euro est mieux dépensé au niveau européen ou au niveau national. (Applaudissements au centre et à droite)
M. Pierre Lellouche, secrétaire d'État chargé des affaires européennes. - J'ai l'honneur de vous soumettre l'examen de l'article 46 du projet de loi de finances pour 2011 qui évalue la contribution de la France au budget de l'Europe.
La maîtrise des dépenses publiques européennes est liée à la discipline budgétaire de chaque État membre, chacun des orateurs l'a souligné. Le Conseil européen y a également insisté.
J'en viens aux trois grandes leçons qu'il faut tirer des conclusions du Conseil européen relatives à la mise en place d'une « gouvernance économique » européenne.
Premièrement, le rôle fondamental du couple franco-allemand. Ce conseil a marqué un véritable tournant. Cela n'était pas gagné d'avance, considérant les déclarations de tel membre -non élu !- de la Commission, qui a osé évoquer un diktat des chefs d'État. La déclaration de Deauville a fait consensus car elle était dans l'intérêt de tous.
Le principe d'une révision du traité -il ne s'agit pas d'ouvrir la boîte de Pandore- vise seulement la mise en place d'un mécanisme de gestion de crise. La modification devra être ratifiée mi-2013 au plus tard sans toucher à l'article 145 du traité.
La participation du FMI au mécanisme sera étudiée attentivement.
La taxation bancaire ? Il n'est pas absurde que ceux qui ont joué contre la dette souveraine d'un État au point de le mener au bord de la faillite participent au financement du mécanisme.
M. Sutour a critiqué les sanctions financières et politiques. Comment faire s'il n'y a aucune sanction ? Le Président Van Rompuy est chargé d'examiner les sanctions éventuelles des États membres contrevenants. C'est une avancée obtenue par la France et l'Allemagne.
Deuxième leçon : le Conseil européen « fait sien » le rapport du groupe de travail Van Rompuy sur la gouvernance économique. Cette reconnaissance ouvre la voie à trois grandes innovations : une meilleure coordination au niveau européen des politiques macroéconomiques, une meilleure coordination des politiques budgétaires, à travers la mise en place, dès 2011, du « semestre européen » et le renforcement du volet préventif et correctif du pacte de stabilité et de croissance. Les chefs d'État et de gouvernement ont demandé un accord d'ici l'été 2011.
Troisième leçon : la question de la réforme des retraites est bien au coeur de la nouvelle gouvernance économique européenne. Ce sujet a été évoqué par le Conseil européen qui a demandé à accélérer les travaux, notamment en Pologne. Dans ce contexte de mise en place d'une gouvernance économique, nous débattons de l'article 46. Pour 2011, le prélèvement est estimé à 18 milliards d'euros. La participation française représente un effort substantiel par rapport aux nouveaux États membres, d'autant que la France est le deuxième contributeur net après l'Allemagne en 2009. En outre, le solde négatif de la France ne va cesser de croître jusqu'en 2013. Cette règle de progression constitue un véritable sacrifice pour les Français, ne le masquons pas ! Pour le Gouvernement, c'est le prix à payer nécessaire pour que l'Europe soit, demain, un multiplicateur de puissance.
Enfin, rappelons l'importance viscérale que nous attachons à la PAC, si vitale pour les petites communes. Mais il faut que nos efforts de rigueur soient partagés par les institutions européennes elles-mêmes.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. - Très bien !
M. Pierre Lellouche, secrétaire d'État. - Il est contradictoire que la Commission, qui parle de sanctionner les États pas assez rigoureux, demande une augmentation de son budget de 6 %.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. - C'est une contradiction insupportable.
M. Pierre Lellouche, secrétaire d'État. - Elle sera seulement de 2,9 % dans un contexte de maîtrise de la dépense. Même observation concernant le Parlement européen, qui demandait une augmentation de 7 %. Personne ne doit s'exonérer des efforts de rigueur !
Les articles 314 et 315 du traité sont clairs : si le budget était rejeté, la procédure des douzièmes provisoires permettrait à l'Europe de fonctionner a minima. Nous n'en sommes pas encore là. L'effort de rigueur s'impose également aux agences européennes. Je me réjouis du travail de M. Badré sur l'agence de Vienne.
Quelle est l'utilité de la dépense publique ? Prenons l'exemple des Roms qui concerne 11 millions de personnes. La France a été vilipendée dans des termes très violents, alors qu'elle ne faisait que respecter le droit d'occupation de son sol. Nous avons les premiers attiré l'attention sur la scandaleuse misère des 11 millions de Roms, dont 9 millions sont des citoyens européens. L'Europe n'a pas pris les mesures qui s'imposaient. On a fait le procès de la France au lieu de celui des pays d'origine. Qu'a fait la Roumanie des 20 milliards d'euros qu'elle a reçus de l'Europe pour les Roms ? Il n'est parvenu à ceux-ci que 85 millions... Devant Mme Reding, M. Georges Soros a dit qu'il donnait plus d'argent aux Roms que l'Union, et sur ses deniers personnels ! Le problème des Roms n'est pas un problème paneuropéen, mais celui des pays d'origine !
Sinon, les Français paieraient deux fois pour les Roms, d'abord dans le cadre des fonds européens, ensuite sur le budget national ! Je parle donc de carence et de scandale au vu des sacrifices financiers que nous consentons. La polémique de cet été a montré l'importance de l'intégration de ces populations dans leur pays d'origine. D'où la volonté de la France de mettre les points sur les « i ».
Le Gouvernement roumain voudrait n'être responsable de sa population que huit mois de l'année ! Nous n'en avons pas fini avec ce dossier.
J'en viens à la prochaine programmation financière 2014-2020. Les grandes manoeuvres ont commencé avec la présentation par la Commission, ce jour, de ses orientations.
Les autorités françaises examinent attentivement ce dossier court, essentiellement qualitatif, qui reste prudent.
Prenons garde aux formulations tendancieuses sur la PAC : elles semblent indiquer un avenir négatif de cette politique commune. Nous attendons deux communications de la Commission en novembre sur la politique de cohésion et la PAC.
Pour le reste, il est nécessaire, en liaison avec la représentation nationale, de conserver un cadre clair : il faut un budget simple et une contribution française stable ; il faut maintenir une PAC forte qui représente les trois quarts des retours à la France et un enjeu sanitaire primordial aujourd'hui.
La stabilité du budget européen est compatible avec des politiques ambitieuses dont il faut améliorer l'efficacité : je pense notamment à la recherche et à l'innovation.
Concernant les ressources, le budget européen est devenu illisible avec des rabais permanents, d'autres temporaires. La France est le premier contributeur au rabais britannique : elle en paie 1,4 milliard sur 5,6 ! Celui-ci, instauré en 1984, n'a plus de raison d'être.
La France est prête à une discussion sur les ressources propres mais celle-ci ne doit pas conduire à la création d'un impôt européen. Ce n'est pas le moment ! J'en veux pour preuve les déclarations de la chancelière Merkel, qui va dans le même sens.
Les négociations seront difficiles. Pour l'actuelle programmation qui courait de 2007 à 2013, les négociations avaient commencé dès 2003 ! La France et l'Allemagne travaillent actuellement à une position commune.
Sur ces bases, j'ai l'honneur de demander au Sénat l'approbation de l'article 46. (Applaudissements au centre et à droite)
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. - Merci à la Conférence des Présidents d'avoir accepté la tenue de ce débat par anticipation lors d'une semaine de contrôle pour réduire la discussion budgétaire, au cours de laquelle nous voterons l'article 46. Considérons que c'est notre contribution à la rénovation du travail parlementaire ! (Applaudissements au centre et à droite)
Prochaine séance demain, mercredi 3 novembre 2010, à 14 heures 30.
La séance est levée à minuit.
Le Directeur du service du compte rendu analytique :
René-André Fabre
ORDRE DU JOUR
du mercredi 3 novembre 2010
Séance publique
À 14 HEURES 30 ET LE SOIR,
1. Débat sur les prélèvements obligatoires et l'endettement et projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, de programmation des finances publiques pour les années 2011 à 2014 (n° 66, 2010-2011).
Rapport de M. Philippe Marini, fait au nom de la commission des finances (n° 78, 2010-2011).
Texte de la commission (n° 79, 2010-2011).
Avis de M. Alain Vasselle, fait au nom de la commission des affaires sociales (n° 69, 2010-2011).
2. Débat sur les effectifs de la fonction publique.