Mandat des membres du Conseil économique, social et environnemental (Procédure accélérée)
M. le président. - L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi organique, adopté par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, prorogeant le mandat des membres du Conseil économique, social et environnemental.
Discussion générale
M. Henri de Raincourt, ministre chargé des relations avec le Parlement. - La loi constitutionnelle du 23 juillet 2008 a transformé le «Conseil économique et social » en « Conseil économique, social et environnemental». Avec le Grenelle de l'environnement, c'est une des traductions de la volonté du Président de la République de placer l'écologie et le développement durable au coeur de nos préoccupations.
La revalorisation du Conseil économique et social a également pris la forme d'une modification des conditions de sa saisine. A l'initiative du Sénat, la Constitution donne désormais la possibilité au Parlement de consulter le Conseil, prérogative réservée depuis 1958 au Gouvernement. Les citoyens pourront eux-mêmes le saisir par voie de pétition. Le Conseil fera connaître au Gouvernement et au Parlement les suites qu'il propose de donner à chaque saisine citoyenne.
Cette réforme impose une profonde modification de l'ordonnance du 29 décembre 1958 portant loi organique relative au Conseil économique et social. La procédure de saisine parlementaire devra être précisée et les conditions d'exercice du droit de pétition devront être définies.
Mais la tâche la plus délicate sera d'adapter la composition du Cese, qui n'a connu depuis 1958 que de très faibles ajustements. II est indispensable que les différentes composantes de la société civile contemporaine trouvent aujourd'hui leur place au sein d'un Conseil rénové. Par ailleurs, sa nouvelle compétence environnementale implique l'entrée de représentants des associations de protection de l'environnement.
Cette double modification de la composition du Cese doit être réalisée à effectif constant parce que la révision constitutionnelle a fixé le nombre de ses membres à 233, soit celui actuellement en vigueur. Le principe ainsi posé est le même que celui qui a été retenu pour l'Assemblée nationale et le Sénat. La réforme de la composition du Conseil s'en trouve compliquée. En novembre 2008, le Président de la République a confié à M. Dominique-Jean Chertier, directeur du Pôle-emploi et membre du Conseil économique social et environnemental, un rapport sur la mise en oeuvre des nouvelles missions du Conseil et de la rénovation de sa composition. Ce rapport, remis en janvier 2009, propose plusieurs principes d'évolution de la composition du Conseil.
Quel que soit le choix qui sera fait, toute modification appellera des efforts de la part des groupes actuels. Le nouveau Conseil devrait être constitué autour de trois grands pôles : la vie économique et le dialogue social ; la cohésion sociale et territoriale et la vie associative ; enfin, l'environnement et la protection de la nature. Les associations verront leur présence renforcée ; les secteurs de l'économie solidaire, de la lutte contre l'exclusion, du handicap, du sport, de la science et de la culture devraient être représentés ; le rajeunissement et la féminisation de l'institution seront poursuivis : les jeunes et les étudiants bénéficieront à ce titre, d'une représentation.
La question de la représentativité se posera pour l'ensemble des nouvelles composantes du Conseil, notamment pour les organisations de protection de l'environnement.
Le comité opérationnel du Grenelle de l'environnement dirigé par Bertrand Pancher, et auquel ont participé les sénateurs Pierre Jarlier et Paul Raoult, a déjà réfléchi à la représentativité des acteurs environnementaux. La désignation de ceux-ci devra se faire sur la base de critères très précis qui seront fixés dans le cadre du projet de loi Grenelle Il à la rentrée. M. Vial a eu tout à fait raison de souligner dans son rapport l'importance qu'avait une préservation des équilibres actuels pour que la pratique de la concertation et la recherche du consensus demeurent un atout essentiel du Conseil.
Il faudra prendre le temps de l'analyse et de la concertation pour que réussisse cette réforme de grande envergure qui s'inscrit dans le vaste chantier législatif ouvert par la révision constitutionnelle. Le projet de loi organique relatif au Conseil économique social et environnemental ne pourra en conséquence être adopté définitivement par le Parlement, soumis à l'examen du Conseil constitutionnel et promulgué par le Président de la République avant la fin du mandat des membres actuels du Conseil, en septembre 2009. Les renouveler sur la base des dispositions actuelles conduirait à reporter les effets de la réforme constitutionnelle au prochain renouvellement en 2014. Ce n'est pas plus satisfaisant que d'interrompre le mandat des membres ainsi nommés au mois de septembre lors de l'entrée en vigueur de la loi organique.
Le Gouvernement propose donc de proroger le mandat des membres actuels du Conseil jusqu'à la mise en oeuvre de la réforme. Une telle solution a déjà été utilisée dans diverses circonstances. Cette prorogation devrait s'appliquer jusqu'au terme d'un délai de quatre mois suivant la publication de la loi organique, délai nécessaire pour modifier les textes réglementaires et permettre aux organisations représentées de désigner de nouveaux membres. Un délai butoir est prévu afin que cette disposition transitoire reste raisonnable : la prorogation ne pourra excéder le 30 septembre 2010.
La réforme du Cese devra donc être adoptée au cours de la session ordinaire 2009-2010. Le projet de loi organique sera déposé au Parlement à la rentrée. (Applaudissements à droite)
M. Jean-Pierre Vial, rapporteur de la commission des lois - L'enjeu de ce projet de loi réside dans la révision constitutionnelle de juillet 2008 qui a largement modifié les attributions, le fonctionnement et la composition du Conseil économique et social. Il s'agit là d'une nouvelle étape dans la vie de cette institution originale que d'aucuns qualifiaient de Troisième chambre tandis que d'autres s'interrogeaient sur son rôle. Créé en 1925 sous le nom de Conseil national économique, ce n'est qu'en 1946 et en 1958 que le Conseil économique, social et environnemental a été confirmé comme une institution à part entière. La présente réforme constitutionnelle s'inscrit dans cette volonté politique de faire du Conseil un acteur à part entière du débat démocratique au côté du Parlement.
Dès la Libération, le général de Gaulle considérait comme nécessaire l'expression de la société civile à travers sa composante économique et sociale ; il a repris cette idée avec son projet d'un Grand Sénat en 1958 et avec le projet référendaire de 1969. Même si elle fut rejetée par trois fois, cette idée a gardé toute son actualité.
Si l'Allemagne ou la Grande-Bretagne sont dépourvues d'une telle institution, l'acceptation des règles sociales y résulte d'un processus d'élaboration bien ancré dans leur culture politique et sociale. Beaucoup de pays ont suivi l'exemple français en se dotant d'une telle institution associant les acteurs de la société civile à l'élaboration des choix politiques. L'enjeu repose donc bien sur les missions, le fonctionnement et la représentation de l'institution dont aujourd'hui les trois quarts de l'activité relèvent de l'auto-saisine.
La réforme constitutionnelle étend le champ de compétences du Conseil aux questions environnementales. Elle élargit la saisine du Conseil au bénéfice du Parlement, conformément à la nouvelle rédaction de l'article 70 adoptée sur proposition du Sénat, ainsi qu'au bénéfice des citoyens par voie de pétition. Enfin, elle rénove l'institution et sa composition, afin d'assurer la représentation la plus large possible de la société.
Certains ont évoqué une éventuelle représentation des cultes. J'ai apprécié que le Gouvernement ait dit devant l'Assemblée nationale y être défavorable ; pouvez-vous me le confirmer ?
Le rapport au Président de la République de Dominique-Jean Chertier montre bien que, faute d'une réforme de la composition du Conseil, un décalage serait apparu, entre l'expression de l'institution et sa représentation, ce qui aurait nui à sa légitimité. Compte tenu de l'objet très limité du texte d'aujourd'hui, iI n'y a pas lieu de se prononcer aujourd'hui sur la composition future du Conseil, mais il me semble utile de souligner dès à présent que la force du Conseil est d'être un lieu d'expertise sociale où s'élaborent des consensus entre les différents acteurs de la société civile et de la vie professionnelle ; iI faudra en tenir compte pour désigner les nouveaux membres intégrés au Conseil.
Il faudra donc prendre le temps nécessaire à la concertation, encore convient-il qu'il s'inscrive dans un délai raisonnable. C'est le cas avec ce qui nous est proposé aujourd'hui. C'est pourquoi la commission des lois souhaite que ce texte soit adopté dans la rédaction de l'Assemblée nationale, qui a apporté les modifications rédactionnelles nécessaires. (Applaudissements)
Mme Anne-Marie Escoffier. - Le Conseil national économique, créé en 1925 à la demande des syndicats ouvriers et des principaux acteurs de la vie économique, supprimé par le Régime de Vichy, rétabli en 1946, est devenu, en 1958, Conseil économique et social et, en 2008, Conseil économique, social et environnemental. Ses appréciations sont toujours marquées du double sceau de la compétence et du sérieux. Nous ne saurions du reste oublier que le Conseil constitue la troisième assemblée constitutionnelle. Il y a 40 ans, le général de Gaulle était même allé jusqu'à suggérer que sénateurs et conseillers économiques et sociaux eussent pu siéger de conserve dans une structure commune... C'est dire l'intérêt avec lequel nous attendons le projet de loi organique modernisant et valorisant le Conseil économique, social et environnemental.
Alors que le Gouvernement a mis en oeuvre, il y a tout juste un an, cette réforme constitutionnelle, en sachant qu'elle allait inévitablement entraîner la réforme du Cese, on peut s'interroger sur les raisons du retard apporté à ce projet de loi. Pourquoi un tel silence sur un texte dont on ne sait toujours pas à quelle date il sera présenté au Parlement, même s'il semble qu'il soit actuellement soumis à l'examen du Conseil d'État ?
Attendre l'urgence pour agir et multiplier les dispositifs transitoires plutôt qu'honorer les rendez-vous législatifs sont des façons critiquables de gouverner. Cette remarque ne s'adresse pas à vous, monsieur le ministre, mais je sais que l'ancien sénateur que vous êtes en mesurerez l'intérêt ; je ne doute pas que vous vous en ferez l'écho en haut lieu...
Ce texte propose donc, afin de préserver le fonctionnement du Conseil et dans l'attente de la future loi organique, de proroger d'une année le mandat de ses membres, avec une date butoir fixée au 30 septembre 2010. Le RDSE approuve ce texte consensuel ; il eût en effet été dommage que le Conseil interrompît ses travaux.
La future loi organique doit valoriser l'institution sans la dénaturer, une institution qui a vocation à favoriser le dialogue, la coopération et l'échange d'expériences avec les CES régionaux, le CES européen et les organismes étrangers similaires. L'intégration du qualificatif « environnemental » illustre la légitimité de la lutte contre toutes les pollutions et de la recherche des équilibres indispensables à la survie de la planète. Il reviendra au Grenelle II de définir les critères de représentativité du tiers secteur, au côté des représentants des organisations syndicales et patronales, l'essentiel étant de ne pas remettre en cause les grands équilibres actuels et de ne pas casser ce lieu de démocratie participative qu'est le Cese. Je mesure la difficulté de l'exercice, sachant que le nombre de membres est limité à 233 et que chaque secteur entend préserver ses prérogatives... La représentation des entreprises publiques doit-elle descendre sous les dix ou celle des professions libérales portée au-delà de deux ? Faut-il imposer des quotas de femmes, qui ne représentent aujourd'hui qu'un cinquième des membres du Conseil, ou de jeunes -la moyenne d'âge tend vers 60 ans ? Ne faut-il pas envisager de limiter le nombre de mandats à deux ? Autant de questions à côté des nouveautés que sont la saisine par le Parlement et celle sur pétition citoyenne -le seuil de signatures doit encore être défini.
Nous souhaitons un Cese performant et plus démocratique. Appelé à devenir, non une assemblée des experts de la société civile, mais des organisations la composant, il pourra pleinement assumer sa vocation d'assemblée consultative, favorisant la collaboration entre catégories professionnelles, suggérant les adaptations nécessaires et contribuant à l'information du Parlement.
Le RDSE votera ce texte et sera attentif au contenu de la future loi organique. (Applaudissements)
M. Richard Yung. - En élargissant le champ de compétences du CES aux questions environnementales, la loi constitutionnelle de juillet 2008 a répondu à une demande du Grenelle de l'environnement reprise par le comité Balladur. Cet élargissement impose que la composition du Conseil soit modifiée pour refléter davantage les réalités de la société française d'aujourd'hui ; les femmes, crime suprême, y sont largement minoritaires, les agriculteurs classiquement surreprésentés et les personnalités nommées par le Premier ministre très, très nombreuses... Comme la loi constitutionnelle a plafonné le nombre de membres du Conseil à 233, l'élargissement de son champ d'action imposera une recomposition des dix-huit groupes actuels. La tâche ne sera pas aisée, comme le référendum de 1969 nous l'a appris ; et nous savons que modifier la composition d'une assemblée à effectif constant est toujours délicat et douloureux.
Selon l'article 71 de la Constitution, la composition du Cese est fixée par une loi organique, texte qui n'a toujours pas été soumis au Parlement. Sans doute d'autres étaient-ils plus urgents, comme celui qui facilite le retour au Parlement des membres du Gouvernement... Souvenons-nous que le rapport Chertier a été remis au Président de la République le 15 janvier dernier. On justifie ce retard par le fait que c'est le Grenelle II qui définira les critères de désignation des conseillers environnementaux. Je prends acte que la loi organique sera déposée dès la rentrée parlementaire ; nous veillerons à ce qu'il en soit bien ainsi. Le Gouvernement a estimé plus efficace de prolonger le mandat des membres actuels que de désigner de nouveaux membres, même provisoirement, sur le fondement des règles en vigueur. J'espère que le délai supplémentaire sera mis à profit pour aller vers un de ces consensus dont notre pays a tant besoin.
Le rapport Chertier propose de faire entrer des représentants des jeunes et des associations oeuvrant dans le domaine de l'écologie et du développement durable. Il suggère trois scénarios : ajuster périodiquement la composition du Conseil, faire de celui-ci une assemblée d'experts de la société civile ou le transformer en assemblée représentant les corps intermédiaires. La troisième solution a un parfum corporatiste qui rappelle un temps heureusement révolu. Quel que soit le schéma retenu, il faudra conserver une représentation substantielle des collèges employeurs et salariés. Le Cese est un des rares endroits où peuvent débattre entre elles ces deux... j'allais dire classes sociales.
Mme Nicole Bricq. - La chose existe !
M. Richard Yung. - Contrairement à ce qui se passe dans d'autres pays, nous avons en France un certain penchant pour l'affrontement et la guérilla... Le Cese apporte beaucoup grâce au dialogue qui s'y déploie.
Il faudra aussi beaucoup de sagesse pour définir des critères de représentativité consensuels et indiscutables pour les représentants des milieux de l'écologie -on sait que les associations qui s'intéressent à ces questions sont extrêmement diverses. Enfin, on permettra à un sénateur représentant les Français de l'étranger de souhaiter que la représentation de ces derniers soit maintenue à deux...
M. Robert del Picchia. - Voire augmentée !
M. Richard Yung. - Je ne dis pas cela par corporatisme, mais je sais que l'existence de députés les représentant fait désormais dire à certains que ce n'est plus nécessaire.
Mme Joëlle Garriaud-Maylam et M. Robert del Picchia. - Au contraire !
M. Richard Yung. - Je proposerai que ces représentants ne soient plus désignés par le Gouvernement mais par les deux organisations représentatives, l'Union des Français de l'étranger (UFE) et l'Association démocratique des Français à l'étranger (ADFE).
M. Robert del Picchia. - Non l'Assemblée...
M. Richard Yung. - Dans une lettre du 19 mai dernier, M. le Premier ministre m'a assuré que la réforme du Cese était en préparation. J'aimerais donc savoir ce que le Gouvernement retient du rapport Chertier. Qu'en est-il de la représentation des cultes au sein du Conseil ? Au nom de la laïcité, M. Chertier et les membres du comité Balladur s'y sont déclarés hostiles, comme le Gouvernement lors du débat à l'Assemblée nationale. Mais le Président de la République avait émis en décembre 2007 le souhait que les « grands courants spirituels » soient désormais représentés au Conseil. L'expression pouvait inclure aussi bien les principales écoles philosophiques, mais quelles sont-elles ? Étant donné la part prise par l'Élysée dans la politique de notre pays, les assurances du Gouvernement ne me tranquillisent guère...
L'armée sera-t-elle représentée en tant que telle ? La future loi organique organisera-t-elle l'élargissement de la saisine du Conseil ? Celui-ci, à l'avenir, ne sera plus seulement le conseil de l'exécutif puisque la révision constitutionnelle de 2008 a permis au Parlement de le consulter, ce dont je me réjouis car nous avons besoin de son expertise, et a donné aux citoyens le droit de le saisir par voie de pétition.
Pour l'heure, nous voterons cette mesure transitoire. (Applaudissements sur les bancs socialistes et sur quelques bancs à droite)
Mme Éliane Assassi. - La réforme du Conseil économique et social fut annoncée dès le mois de juillet 2007 par le Président de la République, qui chargea le comité Balladur de réfléchir à cette question. Il s'agissait d'intégrer le développement durable et l'environnement au domaine de compétence du Conseil, ce dont nous nous réjouissons.
La révision constitutionnelle de juillet 2008 a ouvert la voie à une réforme de grande ampleur, qui requiert la modification de dispositions organiques. Or celle-ci ne pourra avoir lieu avant la fin du mandat des membres actuels du Conseil, en septembre 2009, le Gouvernement n'ayant toujours pas déposé de projet de loi organique. Il a donc fallu trouver une solution.
La révision constitutionnelle a élargi le champ de compétences du Conseil aux questions environnementales ; il devra donc comprendre de nouveaux membres issus des associations de défense de l'environnement, ce qui pose le problème de leur sélection et de leur représentativité. Le Parlement a obtenu le droit, jusqu'ici réservé au Gouvernement, de consulter le Conseil sur toute question d'ordre économique, social ou environnemental. Les citoyens pourront le saisir par voie de pétition. Une loi organique est donc nécessaire pour modifier les attributions, la composition et l'organisation du Conseil, aujourd'hui régies par l'ordonnance du 29 décembre 1958, et pour mettre en oeuvre le nouveau droit de pétition. Il a également été décidé d'inclure dans la future loi organique les modalités de saisine par le Gouvernement.
Or ce projet de loi organique n'a pu être déposé à temps, malgré le travail préparatoire mené par M. Bernard Plancher, président du comité opérationnel chargé de mettre en oeuvre les conclusions du Grenelle de l'environnement, par M. Dominique-Jean Chertier, chargé de réfléchir à la réforme du Cese, et par notre collègue M. Jean-Claude Frécon, auteur d'un rapport d'information sur la question. Nous ne connaissons même pas les grandes lignes de la réforme. (Mme Nicole Borvo Cohen-Seat s'en désole)
Le Gouvernement pouvait choisir de procéder au renouvellement des membres du Conseil en septembre 2009, tout en reportant jusqu'en 2014 l'entrée en vigueur de la réforme, ou en prévoyant de mettre fin à leur mandat et de procéder à un nouveau renouvellement quelques mois plus tard, sur la base du nouveau texte. Il a plutôt décidé de prolonger leur mandat jusqu'à l'entrée en vigueur de la loi organique, tout en fixant la date butoir au 30 septembre 2010. C'est en effet la meilleure solution. (On se félicite de cette approbation à droite. M. Robert del Picchia applaudit)
Mais nous serons attentifs à la teneur du futur projet de loi organique. Il est prévu d'intégrer au Conseil environ 30 ou 40 représentants du secteur environnemental, le nombre total des membres restant constant. M. de Raincourt, à l'Assemblée nationale, a laissé entendre que le nombre de membres issus du secteur agricole ou des entreprises publiques serait revu à la baisse -le nombre d'entreprises publiques ayant, selon lui, considérablement diminué ces dernières années- et que d'autres modifications n'étaient pas à exclure. Nous veillerons à ce que les salariés ne soient pas moins bien représentés dans la future assemblée, à ce que celle-ci comprenne des jeunes et que sa composition respecte la parité hommes-femmes. Nous refusons que les cultes y soient représentés, car la religion relève de la sphère privée ; mais le Président de la République s'y étant déclaré favorable, nous ne serions pas étonnés que le Gouvernement cède sur ce point...
Enfin nous espérons que ce projet de loi organique sera présenté au Parlement dans les meilleurs délais. En attendant, nous voterons le texte qui nous est soumis aujourd'hui. (Applaudissements à gauche ; M. Jacques Gautier applaudit également)
M. Jean-Claude Frécon. - Le projet de loi organique que nous examinons tend à proroger jusqu'au 30 septembre 2010 au plus tard le mandat des membres du Conseil économique, social et environnemental. J'interviens dans ce débat en tant qu'auteur d'un rapport d'information sur la réforme de ce Conseil et rapporteur spécial de la commission des finances de la mission « Conseil et contrôle de l'État », qui comprend les crédits du Cese.
La révision constitutionnelle de juillet 2008 ne s'est pas bornée à changer le nom du Conseil économique et social en y adjoignant le terme « environnemental » : elle nous oblige à repenser la place de ce Conseil au sein de nos institutions et à modifier son organisation. Loin de tout formalisme juridique, la réforme devra façonner le visage du Cese pour les années à venir, en améliorant sa représentativité et son fonctionnement à budget constant.
La spécificité du Cese est d'être un lieu d'échanges et de débats entre les différentes composantes de la société française. Sa composition a très peu évolué depuis 1958, ce qui prête à controverse. Le rapport de M. Chertier, publié en janvier, offre des pistes de réflexion : il suggère soit d'ajuster périodiquement la composition du Conseil, soit d'en faire une assemblée des corps intermédiaires, soit d'en faire un conseil des experts de la société civile. Il n'est pas temps de trancher ; d'autres options peuvent encore se présenter.
Quoi qu'il en soit, cette réforme devra être neutre au plan budgétaire. Le nombre des membres du Conseil restera constant ; il est fixé à 233 par la Constitution, comme c'est le cas pour l'Assemblée nationale et le Sénat. Je me réjouis de cette sagesse budgétaire conforme aux vues du président du Cese, M. Jacques Dermagne : il faudra prendre le virage de la réforme sans dérapage financier. (M. Jacques Gautier approuve) Cette politique volontariste visant à « tenir » la dépense s'inscrit d'ailleurs dans la continuité des choix de l'institution depuis cinq ans. (On le confirme au banc des commissions)
Outre les dépenses liées au changement de nom, il faudra absorber les coûts, difficiles à évaluer, induits par la saisine parlementaire et le nouveau droit de pétition citoyenne. Le rajeunissement du Conseil entraînera aussi un coût supplémentaire pour la caisse de retraites. Le rapport Chertier, comme celui du Sénat, esquissent certaines pistes d'économies ; quelles sont les propositions du Gouvernement ?
Le Cese doit saisir cette opportunité d'affermir son statut de troisième assemblée constitutionnelle. La volonté politique, exprimée par le Parlement, sera déterminante. Notre Assemblée a tout intérêt à tirer profit des nouvelles possibilités de consultations du Cese. Le dialogue avec le Conseil a toujours été fructueux ; il ne tient qu'à nous de l'enrichir encore, au bénéfice de nos institutions et, surtout, de l'intérêt général. (Applaudissements)
La discussion générale est close.
Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, secrétaire d'État chargée de la prospective et du développement de l'économie numérique. - Je remercie les orateurs, en espérant retrouver ce climat consensuel lors de l'examen du projet de loi organique, qui sera l'occasion d'apporter des réponses à vos questions.
L'ouverture vers les grands courants de pensée n'implique pas une représentation institutionnelle des cultes ; celle-ci ne sera pas proposée dans la loi organique. Il faudra toutefois recueillir l'avis de l'ensemble des cultes et des mouvements de pensée à l'occasion de saisines les concernant.
Le projet de loi organique devra renforcer la féminisation du Conseil, afin que sa composition soit davantage en adéquation avec la société civile, comme l'a souhaité le Président de la République. Madame Escoffier, d'autres innovations, comme l'abaissement de l'âge minimum pour siéger ou la limitation du nombre de mandats, devront être étudiées.
La réflexion sur la représentation des Français de l'étranger devra être engagée. Le contexte a changé depuis que le Président de la République a souhaité une plus grande représentation de ceux-ci, notamment aux législatives.
Enfin, madame Assassi, les grands équilibres au sein du Cese devront être préservés, à commencer par l'équilibre entre employeurs et salariés. (Applaudissements à droite et au centre)
Vote sur l'ensemble
M. Jacques Blanc. - Le groupe UMP votera ce texte. Je félicite le rapporteur, et je me réjouis du consensus. Il est sage de prendre le temps nécessaire pour réussir une réforme aussi importante. Le Conseil va devoir adapter sa composition aux évolutions sociales et économiques, et ce à moyens constants ! (Applaudissements à droite)
M. Robert del Picchia. - J'apprécie le consensus qui se dégage, mais je suis opposé à la nomination des représentants des Français de l'étranger par les associations, que propose M. Yung : ce rôle revient à l'Assemblée des Français de l'étranger, élue au suffrage universel direct. Nous en reparlerons lors de l'examen de la loi organique.
En application de l'article 59 du Règlement, l'article unique du projet de loi organique est mis aux voix par scrutin public.
M. le président. - Voici les résultats du scrutin :
Nombre de votants | 338 |
Nombre de suffrages exprimés | 338 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 170 |
Pour l'adoption | 338 |
Contre | 0 |
Le Sénat a adopté. (Applaudissements)