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Table des matières
Hôpital (Dépôt d'un rapport et du texte de la commission)
Développement économique des outre-mer (Conclusions de la CMP)
Hôpital (Dépôt d'un rapport et du texte de la commission)
SÉANCE
du mercredi 6 mai 2009
96e séance de la session ordinaire 2008-2009
présidence de M. Jean-Léonce Dupont,vice-président
Secrétaires : Mme Michelle Demessine, M. François Fortassin.
La séance est ouverte à 14 h 35.
Le procès-verbal de la précédente séance, constitué par le compte rendu analytique, est adopté sous les réserves d'usage.
Rappel au Règlement
M. Guy Fischer. - La révision constitutionnelle a des conséquences désastreuses sur nos conditions de travail et sur la démocratie parlementaire elle-même. Loin de renforcer les droits du Parlement, elle nourrit la confusion, l'éparpillement et le renforcement du fait majoritaire. Elle détourne le Parlement de sa mission première : faire la loi. L'inflation législative perdure, la précipitation devient la règle. Le travail en commission permet à la majorité de s'ajuster mais ne favorise ni la transparence, ni l'expression de l'opposition.
Ainsi, le projet de loi sur l'hôpital a été examiné quatre jours et deux nuits durant, en catimini, sans public ni journalistes. Rendons publics les travaux de la commission, dira-t-on, mais à quel titre celle-ci remplacerait-elle la séance plénière ? En commission, la majorité s'impose. Les travaux sur l'hôpital ont duré jusqu'à 2 h 45 du matin, avec l'omniprésence du Gouvernement. L'oeil de M. Sarkozy était dans la salle...
M. Jean-René Lecerf. - L'oeil de Moscou ? (Sourires)
M. Guy Fischer. - Les amendements au texte de la commission, qui remanie profondément le projet de loi, doivent être déposés avant demain 16 heures, ce qui interdit tout débat avec les partenaires sociaux sur le nouveau texte, toute concertation de groupe ! L'exposé des motifs de la proposition de résolution du président Larcher modifiant le Règlement précise pourtant que l'adoption du rapport amendé doit intervenir « en principe, sauf dérogation accordée expressément par la Conférence des Présidents en fonction des contraintes de calendrier, au moins deux semaines avant le jour de la séance plénière. » Or on laisse 24 heures aux groupes pour amender le texte de la commission, alors que nous disposons du texte de l'Assemblée depuis deux mois !
Je demande que le délai de dépôt des amendements sur le texte de la commission soit reporté au lundi 11 mai à 17 heures. Le Gouvernement doit également lever l'urgence afin que les députés se prononcent sur un texte qui aura été profondément modifié. Le principe même de la navette, le respect du Parlement l'exigent.
M. le président. - Je vous donne acte de votre intervention.
Hôpital (Dépôt d'un rapport et du texte de la commission)
M. le président. - La commission des affaires sociales a déposé le rapport et le texte qu'elle a élaborés sur le projet de loi portant réforme de l'hôpital et relatif aux patients, à la santé et aux territoires. La commission, qui a effectué un énorme travail avec l'examen de quelque 1 400 amendements, a tenu à publier et à communiquer aux groupes le texte adopté, titre par titre, au fur et à mesure de ses délibérations.
Dépôt d'un rapport
M. le président. - Le président du Sénat a reçu de M. André-Claude Lacoste, président du collège de l'Autorité de sûreté nucléaire, le rapport sur l'état de la sûreté nucléaire et la radioprotection en France en 2008.
Acte est donné du dépôt de ce rapport, qui a été présenté, le 7 avril 2009, aux membres de l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques et sera transmis à la commission des affaires économiques.
Asile
M. le président. - L'ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi relative au transfert du contentieux des décisions de refus d'entrée sur le territoire français au titre de l'asile, présentée par M. François-Noël Buffet.
Discussion générale
M. François-Noël Buffet, auteur de la proposition de loi. - Cette proposition de loi transfère des tribunaux administratifs à la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) le contentieux relatif à l'entrée sur le territoire au titre de l'asile. Créée en 1982, cette procédure a pour but d'autoriser ou de refuser l'admission sur le territoire des étrangers qui sollicitent l'asile à la frontière.
Précédemment prise par le ministre de l'intérieur, la décision d'admission relève aujourd'hui du ministre de l'immigration, qui se prononce sur la base de l'avis rendu par le directeur général de l'Ofpra sur le caractère manifestement infondé ou non de la demande d'asile, avis qui doit être distingué de l'examen de la demande d'asile, laquelle relève de l'Ofpra.
Avant l'entrée en vigueur de la loi du 20 novembre 2007 relative à la maîtrise de l'immigration, à l'intégration et à l'asile, les recours contre les refus n'étaient pas suspensifs, ce que la Cour européenne des droits de l'homme, dans une décision du 26 avril 2007, a jugé contraire aux articles 3 et 13 de la Convention.
La loi du 20 novembre 2007 a donc prévu un recours en annulation suspensif de 48 heures, le magistrat étant tenu de statuer dans les 72 heures. La Commission des recours des réfugiés a également été renommée Cour nationale du droit d'asile, afin de mieux affirmer son caractère juridictionnel et de renforcer son autonomie budgétaire par rapport à l'Ofpra.
Une clarification s'imposait. La CNDA a été rattachée au Conseil d'État et la Cour dispose de dix magistrats permanents. La présente proposition de loi s'inscrit dans ce mouvement général de réforme. Rapporteur de la loi du 20 novembre 2007, je proposais alors le transfert à la CNDA du contentieux des refus d'entrée au titre du droit d'asile, confié aux tribunaux administratifs. C'était à mes yeux une simplification et une rationalisation souhaitables, la CNDA étant une juridiction spécialisée dans les questions d'asile. La commission sur le cadre constitutionnel de la nouvelle politique d'immigration, présidée par M. Pierre Mazeaud, a fait la même recommandation, relevant dans son rapport de juillet 2008 « l'intérêt d'unifier le contentieux des demandeurs d'asile » et de le confier à « un juge spécialisé, plus qualifié en la matière que le juge administratif de droit commun ».
La proposition de loi prévoit ce transfert de compétence. La décision de la CNDA ne serait pas susceptible d'appel, uniquement de cassation devant le Conseil d'État. Les décisions aujourd'hui prises par les tribunaux administratifs sont certes susceptibles d'appel, mais sans caractère suspensif...
Le texte autorise aussi le recours à la visioconférence en cas de nécessité tenant à l'éloignement géographique. Des audiences dites foraines pourront être organisées en zone d'attente. Les demandeurs auront le droit de recourir à un interprète, de se faire assister par un avocat ; le magistrat chargé de statuer pourra le faire par ordonnance.
La commission des lois a repris ces dispositions et notre rapporteur les a améliorées. Les modifications tendent à allonger le délai de recours, simplifier les exigences pesant sur les requêtes et mieux marquer la différence entre le contentieux de l'asile à la frontière et l'examen des demandes au fond. Ces modifications vont dans le bon sens ; elles renforcent les garanties offertes aux demandeurs d'asile. (Applaudissements à droite)
M. Jean-René Lecerf, rapporteur de la commission des lois. - La proposition de loi de M. François-Noël Buffet met en oeuvre d'utiles mesures de simplification et de rationalisation. Cependant, l'extrême sensibilité, dans notre pays, aux questions d'immigration et d'asile ainsi que l'équilibre délicat issu de nos législations successives nous incitent à la vigilance, d'autant que les auditions ont révélé une grande diversité des opinions.
La procédure de l'asile à la frontière, créée en 1982, a pour objet d'autoriser ou non à pénétrer sur le territoire français les étrangers qui se présentent aux frontières démunis des documents requis et demandent à être admis au titre de l'asile. Elle est distincte de la procédure de reconnaissance du statut de réfugié et ne préjuge en aucun cas de l'issue de celle-ci. Le ministre de l'immigration est seul compétent pour prendre la décision d'entrée en France, après avis de l'Ofpra. Le code des étrangers précise que l'étranger peut être maintenu dans une zone d'attente pendant le temps strictement nécessaire à un examen tendant à déterminer si sa demande n'est pas manifestement infondée. Avant 2007, les recours contre les refus d'entrée sur le territoire au titre de l'asile étaient dépourvus d'effet suspensif, ce que la Cour européenne des droits de l'homme a jugé, notre collègue l'a dit, contraire à la Convention européenne des droits de l'homme. Intégrant cette jurisprudence, la loi du 20 novembre 2007 a introduit un recours en annulation suspensif de 48 heures contré le refus d'entrée sur le territoire, le magistrat saisi étant tenu de statuer dans un délai de 72 heures ; et la Commission de recours des réfugiés, juridiction administrative chargée du contrôle des décisions de I'Ofpra, a été renommée Cour nationale du droit d'asile afin de mieux affirmer son caractère juridictionnel et renforcer son autonomie budgétaire -soit dit en passant, il était paradoxal qu'un organisme juridictionnel dépende financièrement d'un établissement public soumis à son contrôle ! La CNDA a été rattachée au Conseil d'État et a pu se doter de magistrats permanents.
M. François-Noël Buffet, lors de l'examen de la loi du 20 novembre 2007, préconisait le transfert du contentieux d'entrée sur le territoire au titre de l'asile du tribunal administratif de Paris à la CNDA. Cette proposition avait été reprise par la commission sur le cadre constitutionnel de la nouvelle politique de l'immigration. La présente proposition de loi vise à mettre en oeuvre ce transfert. Votre rapporteur et la commission des lois se sont penchés sur les avantages et les inconvénients de ce transfert. Trois griefs essentiels ont été exprimés. L'étranger serait privé d'une possibilité d'appel ; mais l'actuel recours devant la Cour administrative d'appel est tout théorique, puisque non suspensif. Autre grief, la CNDA, ultérieurement saisie de la décision de l'Ofpra sur la qualité de réfugié, pourrait se trouver liée par sa décision initiale relative à l'entrée sur le territoire. Les deux contentieux sont cependant bien distincts, l'un portant sur le caractère manifestement infondé de la demande d'entrée, l'autre sur l'appréciation portée au fond par l'Ofpra sur la demande d'asile. Enfin, la CNDA ne serait-elle pas confrontée à une surcharge de tâches, alors que le délai moyen de traitement des recours s'est accru depuis 2003 ? En réalité, 1 000 recours annuels supplémentaires -une base vraisemblable- n'accroîtraient que de 5 % le volume du contentieux. En outre, la Cour a fait, ces dernières années, un effort important pour réduire le « stock » ancien. Enfin, grâce à un amendement de M. Buffet à la loi de simplification et de clarification du droit, la Cour a pu recruter des magistrats administratifs ou judiciaires permanents pour assumer les fonctions de président de section.
Nous estimons donc que les magistrats de la CNDA, du fait de leur expérience et leur spécialisation, seraient plus aptes à juger en urgence du caractère manifestement fondé ou non des demandes d'asile à la frontière. A nos yeux, aucun argument dirimant ne s'y oppose.
La proposition de loi modifie également sur deux points les procédures en vigueur. D'abord, elle maintient la possibilité de visioconférence, en supprimant la possibilité pour l'étranger de s'y opposer mais en posant des conditions plus strictes : seul la justifiera l'éloignement géographique de la zone d'attente. Ainsi, la CNDA siégeant à Montreuil, la visioconférence est exclue s'agissant des étrangers en zone d'attente à Roissy ou Orly, soit dans 97 % des cas. En outre, la salle d'audience dans laquelle se trouverait l'étranger serait la salle d'un tribunal ; il ne pourrait s'agir d'une salle spécialement aménagée dans la zone d'attente. Ensuite, la possibilité est ouverte d'audiences foraines tenues en zone d'attente dans une salle d'audience spécialement aménagée. Mme Martine Denis-Linton, présidente de la CNDA, a indiqué son souhait de pouvoir utiliser la salle située à Roissy.
La commission des lois a voulu, à l'occasion de cette unification du contentieux relatif à l'asile, renforcer les garanties offertes aux demandeurs d'asile. Trois amendements importants ont été adoptés. Le premier porte à 72 heures le délai dans lequel l'étranger peut demander l'annulation de la décision de refus d'entrée : 48 heures ne suffisent pas pour former un recours recevable, en particulier le week-end, car l'association nationale d'assistance aux frontières pour les étrangers n'a pas les moyens d'assurer une permanence. Je rappelle que c'est déjà à l'initiative du Sénat et de sa commission des lois que le délai avait été porté de 24 à 48 heures.
Le deuxième amendement supprime l'exigence d'une requête motivée, lourde pour une procédure en urgence, où l'oralité des débats pourrait tenir une place plus large et éviterait que des requêtes soient écartées par la voie d'ordonnances. Votre commission, dans un troisième amendement, fixe au juge un cadre minimal pour apprécier la notion de « demande manifestement infondée ». Il s'agit de prévenir toute dérive vers un examen plus approfondi, assimilable à celui du bénéfice du statut de réfugié. J'ai finalement renoncé à présenter un autre amendement qui aurait consisté à transférer du ministre au directeur général de l'Ofpra la décision de refus d'entrée en France au titre de l'asile.
Dès lors que le ministre suit systématiquement les avis de l'Ofpra, cette réforme aurait l'avantage d'économiser des moyens humains et de lever l'éventuelle suspicion d'une interférence de l'exécutif ; la compétence du ministre aurait cependant été préservée lorsque la présence de l'étranger présentait une menace pour l'ordre public. Mais ce transfert risque de remettre en cause l'indépendance de jugement de l'Ofpra, la décision de refus d'entrée relevant d'abord du droit au séjour sur le territoire ; se pose aussi la question du champ de compétences du directeur général de l'Ofpra. C'est dire que cette proposition mérite sans doute une réflexion complémentaire.
Au total, la commission des lois propose l'adoption du texte ainsi modifié. (Applaudissements au centre et à droite)
M. Éric Besson, ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire. - Le préambule de la Constitution de 1946 rappelle que « tout homme persécuté en raison de son action en faveur de la liberté a droit d'asile sur les territoires de la République ». Ce principe, au même titre que la convention de Genève de 1951, guide l'action des pouvoirs publics.
La France, fidèle à sa tradition d'accueil, est un refuge pour les femmes, les hommes et les enfants que persécutions ou menaces chassent de leur pays d'origine. N'en déplaise à certains, elle est exemplaire. Qu'on en juge. Notre pays est le premier pays européen en nombre de demandes d'asile, 42 299 en 2008, soit une augmentation de 20 % par rapport à 2007 ; au plan mondial, elle est au troisième rang derrière les États-Unis et le Canada. L'an passé, l'Ofpra a admis sous sa protection 11 141 personnes, soit 36 % des demandes. Peu de pays sont aussi généreux.
Mon ministère consacre plus de la moitié de son budget, soit 300 millions d'euros, à la politique de l'asile ; 196 millions sont versés aux centres d'accueil, dont le nombre de places a augmenté de 30 % entre 2004 et 2008 pour atteindre 20 410, la création de 1 000 nouvelles places étant programmée sur la période 2010-2012. L'hébergement d'urgence est doté de 30 millions d'euros, et les centres provisoires d'hébergement sont financés à hauteur de 12 millions. L'accompagnement des demandeurs d'asile, c'est encore 30 millions pour l'allocation temporaire d'attente, 3 millions pour l'accompagnement social et plus de 1,5 million de subventions aux associations. C'est enfin, au titre du ministère de la santé, le bénéfice de la couverture maladie universelle (CMU) et de l'aide médicale d'État.
La politique de la France se déploie aussi dans le champ communautaire, avec le double objectif, inscrit dans le pacte européen adopté sous présidence française le 16 octobre 2008, d'une plus grande solidarité et d'un plus haut niveau de protection -objectif que la France défend dans les négociations en cours sur ce qu'il est convenu d'appeler le « paquet asile », qui prévoit l'instauration, si possible en 2010 et au plus tard en 2012, d'une procédure unique assortie de garanties et de statuts communs. La création d'un bureau européen d'appui en 2009 est en bonne voie, qui permettra de venir en aide aux migrants et aux États confrontés à une forte pression migratoire. L'harmonisation réalisée en droit devra se traduire sur le terrain.
La politique européenne de la France vise aussi à une meilleure répartition du fardeau. Après avoir accueilli, en liaison avec le HCR, des Irakiens ressortissants de minorités menacées, notre pays s'apprête à accueillir en juillet 80 personnes qui ont obtenu à Malte le statut de réfugié au titre de la protection subsidiaire.
La réforme proposée répond aux mêmes objectifs : à chaque fois que cela est possible, améliorer l'accueil et la protection des demandeurs d'asile. Elle vise à unifier le contentieux de l'asile, aujourd'hui éclaté, au sein de la juridiction administrative, entre le juge administratif et la CNDA. Cette amélioration, qui reprend l'une des recommandations du rapport Pour une politique des migrations transparente, simple et solidaire présenté en 2008 par la commission Mazeaud, avait déjà été identifiée en 2007 par M. François-Noël Buffet, dont je veux saluer ici l'expertise.
Le système actuel n'est en effet pas satisfaisant. Le dépôt d'une demande d'asile est subordonné à la présence du demandeur sur le territoire national ; mais tous les demandeurs d'asile ne disposent pas des documents exigés pour entrer en France. Dans ce cas, le demandeur d'asile est maintenu en zone d'attente le temps de déterminer si sa demande n'est pas « manifestement infondée ». Cet examen, nécessairement succinct, est mené par l'Ofpra qui transmet son avis au ministre chargé de l'immigration, à qui il appartient d'autoriser ou non l'entrée sur le territoire. Dois-je rappeler à ceux qui craignent l'arbitraire que je suis systématiquement cet avis, comme l'a fait mon prédécesseur ? En cas de rejet, la décision ministérielle peut être aujourd'hui contestée devant un président de tribunal administratif. Après la réforme rendant le recours suspensif, le nombre des requêtes formées pour l'essentiel par les étrangers maintenus dans les zones d'attente de Roissy et d'Orly s'est établi en 2008 à 1 048. Mais quand l'Ofpra se prononce sur le fond de la demande d'asile présentée par un étranger admis à séjourner sur notre territoire, les décisions de refus ne peuvent être contestées que devant la CNDA.
La réforme proposée doit permettre à la CNDA, juridiction plus qualifiée que le juge administratif de droit commun, d'examiner l'ensemble des requêtes qui concernent l'asile. Notre dispositif y gagnera en cohérence, en lisibilité et en crédibilité. Comme l'a relevé à juste titre le rapporteur, une compétence renforcée n'entraîne pas nécessairement un examen plus sélectif des demandes ; elle permet, en revanche, un traitement plus sûr.
Les caractéristiques essentielles de la procédure ne sont pas substantiellement modifiées par le texte, à l'exception de l'allongement du délai de recours de 48 à 72 heures, avancée à laquelle je souscris mais qui me paraît ôter sa justification à la suppression de la motivation de la requête. C'est le seul point sur lequel le Gouvernement se démarquera de l'excellent travail du rapporteur : il déposera un amendement à l'article premier et un autre de coordination à l'article 5 pour réintroduire cette règle générale de procédure contentieuse. Le transfert à la CNDA du contentieux de l'asile à la frontière sera effectif au plus tard en 2011, mais l'allongement du délai de recours pourra entrer en vigueur sans tarder.
La réforme s'accompagne d'un renforcement et d'une professionnalisation accrue de la CNDA : la création de dix juges permanents au sein de la Cour a été décidée dans le cadre de l'examen par le Sénat de la proposition de loi de simplification du droit.
J'ai la conviction que le transfert du contentieux apparaîtra rapidement comme une évidence à tous ceux qui participent à l'accueil et à l'accompagnement des demandeurs d'asile. La France doit continuer à bien traiter ceux qui, persécutés ou menacés, ont droit à la protection de la République. (Applaudissements au centre et à droite)
M. Charles Gautier. - L'examen de cette proposition de loi s'inscrit dans un contexte particulier. Depuis 2007, pas moins de cinq textes ont modifié le droit traitant de l'immigration et de l'asile, dont la loi du 20 novembre 2007 qui a créé la CNDA et lui a donné une autonomie institutionnelle ; la professionnalisation de ses juges a par ailleurs été renforcée par la proposition de loi de simplification du droit en cours de navette. Vous avez enfin récemment annoncé à Nantes, monsieur le ministre, une nouvelle procédure de naturalisation confiant davantage de pouvoir aux préfets, ce qui présente à nos yeux un risque de rupture du principe d'égalité devant la loi. Ce morcellement législatif est d'autant plus incompréhensible que devrait se mettre en place une « Europe de l'asile », avec un statut de réfugié harmonisé et une procédure commune d'examen des demandes d'asile et de reconnaissance du statut de réfugié.
Mais l'examen de cette proposition de loi intervient aussi dans un contexte particulier. Des incidents ont perturbé l'inauguration, en mars, de la médiathèque de la Cité de l'immigration, signe d'une détérioration des relations entre le ministre de l'immigration et les associations.
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. - Elles ont toujours été mauvaises.
M. Charles Gautier. - Les manifestations d'avril dans plusieurs villes de France contre la pénalisation de la solidarité envers les étrangers sans papiers, largement couvertes par les médias, ont été un succès.
On ne peut ouvrir ce débat sans évoquer le film Welcome, de Philippe Lioret, et son histoire ; sans évoquer les personnes ou les associations venant en aide aux étrangers en situation irrégulière, qui vivent dans des conditions qui font la honte de notre République.
Les groupes socialistes de l'Assemblée nationale et du Sénat ont déposé une proposition de loi visant à supprimer cette incrimination.
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission. - Elle n'a jamais existé !
M. Charles Gautier. - Le groupe RDSE a, je crois, fait de même.
Nos concitoyens et les parlementaires de tous bords des deux assemblées sont bouleversés par les situations de ces étrangers poussés par la misère, qui viennent ici trouver un Eldorado. Ils n'y trouvent souvent que la misère, la violence et la faim. Vous avez fermé Sangatte sans fournir de solution alternative, ils se retrouvent donc errants dans la zone portuaire de Calais. Ils sont traités comme des délinquants, privés de leurs libertés les plus élémentaires.
Est-il concevable que notre République poursuive ceux qui, émus de ces situations, leur viennent en aide ? Est-il concevable que la législation en vigueur permette d'inquiéter pénalement nos concitoyens qui offrent une couverture ou une assiette de riz (M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission, proteste) parce que votre politique du résultat en matière d'immigration et d'asile a déjà programmé le nombre d'arrestations d'aidants ?
La proposition de loi de M. Buffet appelle quelques observations.
Elle vise le recours offert à l'étranger dont l'entrée en France, au titre de l'asile, a été refusée dès la frontière. Au regard des quelque 42 500 demandes d'asile de 2008, les procédures d'asile à la frontière demeurent certes marginales. Elles n'en concernent pas moins plusieurs milliers d'étrangers chaque année et tendent à se développer : 3 772 avis rendus du 1er janvier au 31 octobre 2008, la hausse des demandes concernant plus particulièrement les mineurs isolés.
La CNDA statue sur les recours formés contre les décisions de l'Ofpra, examine les requêtes qui lui sont adressées par les réfugiés et formule un avis quant au maintien ou à l'annulation de ces mesures. L'existence d'un premier filtre, en amont des demandes d'asile, comme l'urgence liée au maintien des étrangers en zone d'attente justifient l'existence de garanties juridictionnelles.
La demande d'asile à la frontière est déjà une procédure dérogatoire. Par rapport aux demandes déposées sur le territoire, dans une préfecture, elle exige en effet un examen supplémentaire de recevabilité.
Le principe voudrait que l'on autorise les demandeurs à accéder rapidement au territoire pour que leur demande de protection soit examinée au fond. Ce n'est pas la voie choisie dans ce texte, dont l'objectif premier est la réduction des délais de procédure. De plus, la décision d'admissibilité sur le territoire relevant du domaine de la police des étrangers, la décision du juge ne saurait reposer, à ce stade, sur l'appréciation de la situation géopolitique du pays du demandeur d'asile. Dans le droit en vigueur, le juge administratif doit s'en tenir à l'usage ou non du moyen légal du caractère manifestement infondé de la demande, à l'exclusion de toute analyse au fond.
On peut se demander, dans ces conditions, quelle sera la prochaine étape. Une procédure d'asile à la frontière ? Les organisations entendues par le groupe socialiste craignent un tel glissement, et la création d'une procédure rapide d'examen au fond de la demande. La proposition n'est pas nouvelle...
Quelles garanties seraient, dès lors, offertes aux demandeurs d'asile ? Le risque est réel d'une procédure trop rapide pour permettre au demandeur, soumis à la double anxiété d'une fuite récente et du maintien dans un lieu de privation de liberté, d'exposer précisément les menaces qui pèsent sur lui. Permettrait-elle à l'Ofpra de mener un examen approfondi ? Ne serait-il pas conduit à abréger pour tenir les délais ?
Au-delà, transférer à la CNDA le contentieux du refus d'entrée au titre de l'asile étend la compétence de la Cour à un domaine relevant de la police administrative. On passe ainsi subrepticement, au motif que l'on s'est aperçu que parmi les personnes admises à la frontière au titre de l'asile, seule une minorité concrétise leur démarche en présentant une demande en préfecture, de la problématique de l'asile à celle de la lutte contre l'immigration clandestine.
Ne risque-t-on pas de surcroît, comme l'a souligné le rapporteur, de voir la CNDA refuser de se déjuger lorsqu'elle serait amenée à connaître de nouveau du dossier d'un étranger à l'occasion de la reconnaissance du statut de réfugié ?
Il est un autre risque, bien réel, enfin, celui des moyens, dont a fait état le rapporteur.
Cette réforme renferme donc bien des contradictions.
Si, après son passage en commission, la proposition de loi vient renforcer certaines garanties -allongement de 48 heures à 72 heures du délai de recours ; suppression de l'exigence de motivation de la requête ; interdiction de procéder à des investigations pour déterminer le caractère infondé d'une demande d'asile à la frontière ; usage plus restrictif de la visioconférence, ces dernières garanties devant entrer en vigueur dès la promulgation de la loi-, on peut néanmoins regretter que la commission n'ait pas saisi toutes les occasions d'améliorer la procédure. Ainsi, elle n'a pas souhaité réaffirmer le droit d'être assisté d'un avocat et d'une interprète ; elle a rejeté l'obligation, que justifiait pourtant l'urgence, d'une formation collégiale, comme l'exigence de recueillir le consentement de l'étranger à la tenue d'audiences « foraines » et son droit de s'opposer à l'utilisation de la visioconférence. Elle n'a pas suffisamment précisé la notion de demande « manifestement infondée », ni instauré de voie de recours des décisions de la CNDA.
Pour toutes ces raisons, le groupe socialiste a déposé un grand nombre d'amendements à ce texte, qui est bien loin de nous satisfaire en l'état. (Applaudissements à gauche)
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M. François Zocchetto. - Le droit d'asile et plus généralement l'immigration sont des questions sensibles. Notre Haute assemblée a eu à en connaitre en 2007, avec l'examen du projet de loi relatif à la maîtrise de l'immigration, à l'intégration et à l'asile. La semaine passée, un débat sur ce thème était organisé au sein de notre assemblée et une proposition de loi socialiste âprement débattue à l'Assemblée nationale.
Dès 2007, dans son rapport au nom de la commission des lois, M. Buffet souhaitait que la réforme de la CNDA soit l'occasion d'engager une réflexion plus large sur son champ de compétence.
La Cour étant la juridiction spécialisée en matière d'asile, c'est avant tout dans un souci de cohérence qu'il convient de lui confier également les recours contre les décisions de refus d'entrée sur le territoire au titre de l'asile, alors que la loi de 2007 en attribuait la compétence aux tribunaux administratifs. De fait, l'expertise de ces juridictions administratives est moins assurée dans ce domaine que celle la CNDA, juridiction spécialisée.
Cette réforme introduit donc une simplification et une rationalisation nécessaires. Elle constitue une avancée en faveur des droits des demandeurs d'asile, qui verront leurs recours examinés par des magistrats spécialisés. Je salue l'adoption en commission d'un amendement tendant à allonger le délai de recours de 48 à 72 heures, répondant ainsi à une critique récurrente des associations d'aide aux demandeurs d'asile.
Le contentieux de l'asile a connu de fortes évolutions ces dernières années, principalement depuis la réforme de 2007. Malgré la création du référé liberté, en 2000, le nombre des recours était resté très résiduel. A la veille de la réforme, seuls 92 référés liberté avaient été formés. En 2008, après l'adoption du caractère suspensif du recours sous la pression de l'arrêt rendu par la Cour de justice des communautés européennes, une explosion des recours était prévisible. De fait, leur nombre a décuplé. Et le mouvement se poursuit en 2009, puisqu'une centaine de requêtes serait formée chaque mois.
Pour garantir une efficacité maximum dans l'examen des recours, un traitement par des magistrats spécialisés s'impose.
Cela étant, le transfert du contentieux de l'asile à la frontière à la CNDA ne sera bénéfique que sous certaines conditions. La réforme de la CNDA, initiée par la loi de 2007, doit être rapide et approfondie. Or, si la loi de finances initiale pour 2009 prévoit les crédits nécessaires pour augmenter le nombre de magistrats permanents, ce nouveau recrutement a été calibré sans tenir compte des propositions de ce texte. Ainsi, l'obligation de statuer dans un délai de 72 heures impose d'organiser des permanences. Au reste, tout allongement des délais de jugement augmenterait les dépenses liées à la prise en charge des demandeurs -hébergement, allocation temporaire d'attente... Limiter le nombre de magistrats pour des raisons budgétaires ne ferait donc qu'accroître les coûts.
Une observation amicale, enfin, à l'attention de mes collègues socialistes.
Cette proposition de loi a un objet technique précis : unifier le contentieux de l'asile. Je m'interroge dès lors sur le lien avec vos amendements relatifs à la suppression du prétendu « délit de solidarité », d'autant plus qu'ils ont déjà été rejetés par la commission des lois. (Applaudissements à droite)
M. Jean-Pierre Michel. - De quoi je me mêle ?
M. François Zocchetto. - Vous avez le droit de connaître notre position ! (Rires et applaudissements au centre et à droite) De plus, une proposition de loi sur ce sujet a été déposée à l'Assemblée nationale et au Sénat : je souhaite -ce qui vous fera plaisir- que nous puissions en discuter prochainement. (Applaudissements au centre et à droite)
Mme Éliane Assassi. - Cette proposition de loi a une histoire, commencée le 8 janvier 2008 lorsque Nicolas Sarkozy annonce qu'il a demandé au ministre de l'immigration de l'époque, Brice Hortefeux, « de supprimer cette bizarrerie française selon laquelle le droit des étrangers relève de deux ordres de juridiction différents, l'un public, l'un judiciaire, avec des jurisprudences différentes ». Lors de la révision constitutionnelle de 2008, un amendement a été adopté à l'Assemblée nationale prévoyant que la loi fixe les règles relatives « à la répartition des contentieux entre les ordres juridictionnels, sous réserve de l'article 66 ». Cette disposition a heureusement été supprimée par le Sénat même si, en juillet 2008, la commission Mazeaud consacrée au cadre constitutionnel de la nouvelle politique d'immigration, proposait « d'unifier le contentieux des demandeurs d'asile sur un juge spécialisé, plus qualifié en la matière que le juge administratif de droit commun ». Nous nous attendions à ce que la question de la répartition des contentieux, et particulièrement de celui des étrangers et des demandeurs d'asile, réapparaisse un jour...
Le groupe CRC-SPG est opposé à toute juridiction spéciale pour les étrangers. Extraire ce contentieux du droit commun affaiblira inévitablement leurs droits car cela instaurera une justice à deux vitesses avec, à terme, des garanties procédurales au rabais. En témoigne la suppression envisagée par le Gouvernement du rapporteur public dans ce contentieux. Pour le Gouvernement, l'objectif essentiel de l'unification est de rendre toujours plus « efficace » la politique d'expulsion. La justice doit donc être plus expéditive, aux dépens, évidemment, des garanties juridictionnelles qui entourent encore aujourd'hui l'éloignement des étrangers
En outre, cette proposition de loi tend à assimiler le droit applicable aux demandeurs d'asile à celui applicable aux autres étrangers. La confusion est délibérément entretenue par le Gouvernement puisque les questions de l'asile et de l'immigration dépendent indistinctement du ministère de l'immigration, alors qu'auparavant l'asile dépendait des affaires étrangères. Or, le droit d'asile est un droit fondamental, reconnu depuis la Révolution française et aujourd'hui garanti par notre Constitution et par la Convention de Genève de juillet 1951. Il correspond à la protection qu'un État peut offrir à un individu victime de persécutions ou d'une guerre civile et il est donc à distinguer de mouvements migratoires économiques ou familiaux. L'amalgame entre demandeurs d'asile et étrangers économiques conduit à confondre les deux contentieux. En reprenant la préconisation de la commission Mazeaud, cette proposition de loi pose la première pierre d'un édifice plus vaste tendant à sortir l'ensemble du contentieux des étrangers de la juridiction administrative. Elle transfère à la Cour nationale du droit d'asile le contentieux des décisions de refus d'entrée sur le territoire français au titre de l'asile, au motif que le juge administratif serait moins qualifié que les magistrats de cette Cour pour statuer sur ce contentieux. Actuellement, la CNDA est compétente pour statuer sur les décisions de l'Ofpra d'accorder ou non le statut de réfugié. Elle n'est donc compétente que pour l'asile. Si elle devient compétente pour statuer sur l'entrée sur le territoire français, pourquoi ne le deviendrait-elle pas pour la sortie et, enfin, pour le séjour ? Deviendra-t-elle une juridiction spécialisée pour l'ensemble du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ?
Ce serait rompre avec le principe de séparation entre l'asile et le droit des étrangers et risquer de dénaturer le contentieux du refus de l'entrée sur le territoire français au titre de l'asile. Ce refus est une mesure de police administrative, qui ne doit apprécier que le caractère manifestement infondé ou non de la demande et qui ne peut ni ne doit préjuger de l'attribution du statut de réfugié. Le recours exercé est un recours en excès de pouvoir et non un recours de plein contentieux. La CNDA n'est pas plus qualifiée que le juge administratif de droit commun pour statuer sur une mesure de police et donc sur un recours pour excès de pouvoir.
Au contraire, si l'on se fie à « l'intime conviction » du magistrat chargé de statuer, comme nous y invite l'Union syndicale des magistrats administratifs, la tendance naturelle de la CNDA sera de statuer a priori sur la demande d'asile et de préjuger du statut de réfugié du demandeur. Il existe bel et bien un risque qu'à terme, l'examen au fond de la demande d'asile se fasse à la frontière, en même temps que l'examen du caractère fondé ou non de la demande d'asile et par la seule Cour nationale.
Actuellement, les étrangers qui se soumettent à la loi et se présentent à la frontière pour demander l'asile sont soumis à des règles plus sévères que les étrangers en situation irrégulière se rendant en préfecture après un mois, un an, voire plus, passés sur le territoire. Les conditions restrictives de la procédure et la limitation de certaines garanties fondamentales s'appliquent aux étrangers qui demandent l'asile à leur arrivée à la frontière, ce qui privilégie les étrangers qui se manifestent à l'autorité publique en étant déjà en situation irrégulière.
Enfin, et M. Lecerf l'a souligné dans son rapport, ce transfert à la CNDA la déstabilisera. Au tribunal administratif de Paris, le contentieux lié au refus d'entrée sur le territoire français au titre de l'asile, peu important, n'est à l'origine d'aucune difficulté de gestion particulière. L'argument du désengorgement de ce tribunal n'est donc pas valable. C'est au contraire la CNDA qui risque de se retrouver encore plus engorgée qu'aujourd'hui où les délais de traitement des recours sont passés à treize mois. Ce transfert augmentera une pression contentieuse déjà forte, d'autant que, le recours en question aujourd'hui devant être examiné dans un délai très bref de 72 heures, son examen se fera en priorité avant les autres, ce qui rallongera inévitablement les délais d'examen des recours contre les décisions de l'Ofpra. Comme l'écrit notre rapporteur, « alors que la CNDA est déjà sous tension et a un délai moyen de jugement de plus d'un an, comment pourrait-elle absorber sans dommage cette charge de travail supplémentaire ? ».
Cette proposition de loi ne présente donc aucun avantage et les arguments présentés pour la justifier n'ont pas de fondement dans la pratique actuelle, pas plus que dans la comparaison avec d'autres systèmes juridictionnels étrangers. Sauf en Grande-Bretagne et en Belgique, le contentieux des étrangers n'est pas unifié et ne dépend pas de juridictions spécialisées dans les grandes démocraties. Le cas de la Grande-Bretagne s'explique par le fait que c'est un pays de Common law, celui de la Belgique par le fait qu'il n'y existe pas de tribunaux administratifs ni de cours administratives d'appel, le Conseil d'État de Bruxelles demeurant encore aujourd'hui le juge de droit commun du contentieux administratif en première instance. La comparaison avec les pratiques étrangères n'est donc pas possible.
Notre opposition à ce transfert est totale et l'examen des articles nous permettra de développer nos arguments. (Applaudissements à gauche)
Mme Anne-Marie Escoffier. - Cette proposition de loi vise à corriger des dispositions difficilement applicables de la loi de novembre 2007. Je salue cette initiative parlementaire et la qualité du rapport. Lors du débat de la semaine dernière sur l'immigration clandestine, j'avais souhaité une clarification du droit des étrangers. Ce texte y contribue.
Les praticiens du droit tout autant que les étrangers candidats à l'asile se heurtent à trois difficultés. D'abord, au difficile équilibre entre le respect de deux principes : celui de la souveraineté de l'État et celui de non-refoulement et d'immunité pénale. Il faut mettre fin aux controverses nées de la notion de demande d'entrée en France « manifestement infondée ». Ensuite l'actuel délai de recours, limité à 48 heures, est trop court lorsqu'il expire en fin de semaine ou à l'occasion de jours fériés. Enfin, l'exigence d'une requête « motivée » est incompatible avec la situation précaire du demandeur d'asile, confronté, en outre, à la barrière de la langue. Sur ces trois points, la commission a opté pour un texte équilibré prenant en compte les observations du rapporteur et des amendements opportuns.
S'appuyant sur la décision du 25 février 1992 du Conseil constitutionnel, le nouvel article 6 limite le champ des investigations utiles pour qualifier la demande d'entrée en France de « fondée » ou d'« infondée ».
Elle conforte la distinction entre la demande d'entrée sur le territoire -qui a un caractère d'urgence incompatible avec une enquête approfondie- et la demande d'asile, à propos de laquelle toutes enquêtes sont possibles. Dans cette nouvelle rédaction, l'article L 213.10 respecte l'intégrité et la dignité de la personne.
L'expérience a montré qu'un délai de recours de 48 heures était trop bref, en particulier lors de week-ends prolongés. Le porter à 72 heures est donc une bonne chose.
La commission a accepté de retirer la mention de la « requête motivée » qui devait accompagner la demande d'annulation. De fait, les étrangers demandeurs d'asile sont dans une précarité et une fragilité qui amoindrissent leur capacité à rédiger convenablement une requête motivée.
La proposition de loi fixe aussi les conditions dans lesquelles peuvent être tenues les audiences foraines. J'eusse apprécié que la loi précisât les conditions matérielles du déroulement de l'audience mais je concède qu'on est là dans le domaine du règlement. J'insiste donc pour que le décret en Conseil d'État paraisse au plus vite.
Le contentieux des décisions de refus d'entrée sur le territoire au titre de l'asile est transféré du tribunal administratif de Paris à la CNDA. Faut-il vraiment multiplier les juridictions pour régler des procédures administratives ? Admettons toutefois l'existence de cette nouvelle Cour pour la raison que donnait Pierre Mazeaud : cela permettra d'unifier le contentieux sur un juge spécialisé. Encore faut-il que les moyens nécessaires à un tel transfert ne fassent pas défaut ! Il est vrai qu'un amendement sénatorial du 24 mars autorise le recrutement de magistrats au sein de la CNDA et que la loi de finances initiale pour 2009 a prévu les crédits nécessaires au recrutement de dix magistrats permanents.
Cette proposition de loi va dans le bon sens ; puissiez-vous la mettre en oeuvre au plus vite. Je veux rester confiante dans notre volonté commune de respecter les principes essentiels de la République que sont la souveraineté de l'État et le respect de la dignité humaine. (Applaudissements)
Mme Alima Boumediene-Thiery. - Cette proposition de loi a pour objet de parachever l'unification du contentieux de l'asile devant la CNDA, conformément aux préconisations du rapport Mazeaud sur le cadre constitutionnel de votre politique d'immigration. Sous des airs de simplification de la procédure, cette proposition de loi pose un certain nombre de problèmes.
Le contentieux de l'admission sur le territoire au titre de l'asile n'est pas un contentieux sur l'asile. Nous sommes à un moment où l'étranger n'est pas encore entré en France ; il est en zone internationale et peut être refoulé s'il ne possède pas tous les documents exigés à son entrée en France ou si sa demande est jugée infondée. Ce n'est que sous réserve de son entrée en France que l'étranger pourra formuler une demande d'asile : l'admission au séjour conditionne le dépôt d'une demande d'asile. Cette procédure relève de la police administrative des étrangers, c'est pourquoi elle était jusqu'à présent du ressort du juge administratif. Il ne s'agit pas de reconnaître si la demande d'asile de l'étranger est fondée mais seulement de voir si sa demande d'admission sur le territoire est fondée.
Voici le premier problème : en avalisant le transfert de compétence du juge administratif vers la CNDA, on opère un glissement vers l'examen au fond de la demande, au risque d'une confusion des procédures. Lorsque la CNDA devra apprécier si une demande est infondée, elle devra examiner au fond la demande d'asile. En fait d'ajustement, c'est une véritable redéfinition de ses missions ! Si la Cour annule un refus d'admission sur le territoire, elle sera, à nouveau, saisie au fond par l'étranger pour l'octroi du statut de réfugié ou de la protection subsidiaire. Les deux versants de sa compétence convergeront alors vers l'octroi d'une protection. Par contre, si la Cour refuse d'annuler le refus d'admission sur le territoire, elle verrouille la possibilité ultérieure de l'octroi d'un statut à l'étranger. Admettons que le maintien en zone d'attente de l'étranger est annulé : l'étranger sera libéré et aura accès au territoire, il pourra demander l'asile et la Cour sera amenée à examiner cette demande au fond. Elle a jugé infondée sa demande et doit maintenant malgré tout l'examiner au fond : elle sera liée par sa décision initiale !
Le second problème que pose ce transfert de compétence concerne les droits des étrangers. Depuis plusieurs années, je me bats pour la reconnaissance d'un droit à un recours suspensif pour tous les refus d'entrée et pas seulement au titre de l'asile. La loi de novembre 2007, en créant le recours suspensif contre les décisions de refus d'entrée sur le territoire, avait posé la première pierre de l'édifice. Cette proposition de loi signe l'arrêt des travaux en la matière, puisqu'elle enferme définitivement le recours suspensif dans le seul champ du droit d'asile en raison de la spécialisation de la CNDA. En adoptant cette loi, on renoncerait à l'extension de ce recours suspensif à d'autres catégories d'étrangers, comme les mineurs isolés souhaitant rejoindre leur famille en France.
Cette proposition de loi obéit à une inspiration économique indéniable : son objet est avant tout de comprimer les coûts. Faut-il pour autant faire l'impasse sur les droits élémentaires des étrangers ? Certains détails nous font douter que soient bien préservés les droits des étrangers, notamment concernant le droit à un procès équitable. Il en est ainsi de l'assistance d'un interprète et d'un avocat, qui était explicitement visée par l'article 213-9 que nous nous apprêtons à modifier. Ces garanties disparaissent de la proposition de loi. J'entends le rapporteur nous dire qu'elles figurent ailleurs dans le code des étrangers. Pourquoi alors figuraient-elles bien dans la réforme de 2007 ?
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission. - Nous voulons simplifier les textes.
Mme Alima Boumediene-Thiery. - Pourquoi alors une telle garantie est-elle prévue pour chacune des procédures spécifiques du code des étrangers ? Je suis très inquiète des conséquences de la nouvelle procédure sur les droits de la défense des étrangers. Je crains qu'elle ne fasse fi de certaines garanties afin de réaliser son funeste dessein d'une justice expéditive, secrète et partiale.
Enfin, je souhaite relier cette proposition de loi aux réformes envisagées au niveau européen. Une refonte du « paquet asile » est en cours au sein de l'Union, ainsi que des directives relatives à Dublin 2, Eurodac et aux conditions d'accueil et de procédures des demandes d'asile. Ici même, au Sénat, nous menons, avec M. Del Picchia, des auditions dans la perspective d'un rapport sur cette question pour juin 2009. J'aimerais donc savoir quel est l'intérêt d'une telle proposition, qui n'entrera pas en vigueur avant 2011, sachant qu'une nouvelle directive viendra bientôt modifier l'architecture du droit d'asile en Europe. La dernière réforme de l'admission au séjour, au titre de l'asile, ne date que de dix-huit mois... Ne pouvions-nous attendre un peu plutôt que de demander à notre collègue Buffet de servir de véhicule législatif ? (On feint de s'offusquer, à droite)
Il y a cependant un article que j'aurais voté des deux mains, s'il avait été le seul de la proposition de loi : l'article 5. Son objet est la mise en place, dès l'entrée en vigueur de cette loi, d'un délai de recours de 72 heures et la suppression de l'exigence de requête motivée sans attendre 2011. Ces deux exigences, souvent présentées par les associations d'assistance aux étrangers, nous les avions soutenues en 2007 ; elles nous avaient été refusées. Les temps changent, les esprits évoluent, gagnent en pragmatisme... Je remercie M. Lecerf pour son courage sur ce point.
Nous défendrons plusieurs amendements visant à rétablir les droits fondamentaux des étrangers tout au long de la procédure de l'asile, notamment le droit à un procès équitable, conformément au droit européen.
M. Éric Besson, ministre. - M. Gautier a centré son intervention sur ce qu'il appelle le contexte. Qu'il me pardonne de lui dire qu'il a énoncé une série de contre-vérités manifestes : il ne suffit pas de les répéter cent fois pour qu'elles deviennent vérités ! L'une de vos formules m'a fait sursauter : vous avez prétendu que l'on traitait les migrants à Calais comme des délinquants. C'est indigne : la France, même si elle cherche à maîtriser ses flux migratoires, est un pays ouvert et généreux, notamment en matière d'asile. Elle est le pays d'Europe qui accueille le plus de réfugiés politiques, et le troisième au monde après les États-Unis et le Canada.
M. Charles Gautier. - Paroles !
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission. - C'est la vérité !
M. Éric Besson, ministre. - Contestez-vous les faits ?
M. Charles Gautier. - Je cherche à les situer dans leur contexte.
M. Éric Besson, ministre. - Les chiffres démentent vos allégations. Est-ce traiter les étrangers en situation irrégulière comme des délinquants que de les héberger et d'aider les associations qui leur apportent une assistance matérielle et juridique ? Vous avez dit qu'il pourrait être considéré comme délictueux de donner à un étranger une couverture ou un plat de riz. Si nous étions dans les couloirs du Sénat, je vous demanderais de m'en apporter la moindre preuve, et si vous y réussissiez, je vous remettrais ma démission. Mais comme nous sommes dans l'hémicycle, je n'en fais rien : d'ailleurs, vous seriez en mauvaise posture si j'exigeais la réciproque... (Applaudissements à droite)
M. Charles Gautier. - Méfiez-vous !
M. Éric Besson, ministre. - Il n'existe pas de délit de solidarité en France. Ce prétendu délit n'est pas une invention récente. Il y a onze ans déjà, M. Mamère et certaines associations reprochaient à M. Chevènement, ministre de l'intérieur, d'avoir créé un « délit d'humanité » : des particuliers et des membres d'associations pouvaient, disaient-ils, être condamnés en vertu de l'article L. 622-1. M. Chevènement leur répondit que leurs soupçons étaient sans fondement et leurs propositions inutiles et dangereuses. Je pourrais vous faire la même démonstration.
En colportant de tels mensonges, vous ternissez l'image de la France à l'étranger. Le problème qui se pose à Calais, c'est que la plupart des migrants ne veulent pas rester en France : ils sont anglophones et anglophiles, ont une partie de leur famille outre-Manche et veulent à toute force passer en Angleterre. S'ils souhaitaient rester, nous pourrions les accueillir dans de meilleures conditions. Mais ils préfèrent bivouaquer près du port, dans la fameuse « jungle », pensant qu'ils augmentent ainsi leurs chances de passer la frontière à bord d'un bateau ou d'un camion. La France n'est pour rien dans cette situation, qu'elle s'efforce de gérer au mieux.
Quant à la réforme de la procédure de naturalisation, elle avait pour objet d'éviter une double instruction par la préfecture et la sous-direction des naturalisations installée à Rezé. Mais je vous le garantis : il n'y aura pas de rupture du principe d'égalité. La décision finale sera toujours prise par l'autorité ministérielle, et le décret de naturalisation signé par le Premier ministre et contresigné par le ministre en charge de l'immigration. La sous-direction des naturalisations sera chargée de l'harmonisation. Pensez-vous qu'il y ait de bons fonctionnaires, soucieux de l'intérêt général et de l'État de droit à Rezé, et de mauvais fonctionnaires dans les préfectures ? La nationalité reste en France la voie d'accès à la citoyenneté, et la procédure de naturalisation n'est nullement remise en cause. La France est le pays le plus généreux d'Europe à cet égard, puisqu'elle n'exige que cinq ans de présence sur le territoire.
D'ailleurs, vos propos tombent mal : depuis lundi, à la demande des associations, une permanence est ouverte à la sous-préfecture de Calais pour permettre aux migrants du Calaisis d'y déposer leurs demandes d'asile au lieu de devoir se rendre à Arras.
M. Zocchetto a fort bien démontré l'utilité de la présente réforme, qui confie à des magistrats spécialistes le contentieux des décisions de refus d'entrée au titre du droit d'asile. Comme Mme Escoffier, il a insisté sur la nécessité de renforcer les moyens de la CNDA : le Parlement a décidé d'affecter à cette Cour dix juges permanents et une partie des effectifs et des moyens des tribunaux administratifs lui seront transférés. La CNDA est d'ailleurs rattachée pour la gestion au Conseil d'État, ce qui montre la cohérence de cette réforme. Il faudra du temps pour opérer ce transfert, mais je souhaite moi aussi que nous devancions l'échéance de 2011.
Je vous reconnais, madame Assassi, le mérite de la constance : vous êtes restée sur les mêmes positions que la semaine dernière, lors du débat organisé à la demande de Mme Escoffier. Votre propos est fondé sur le présupposé selon lequel la France traite mal les étrangers et veut dresser des barrières à ses frontières. Vous nous faites un procès d'intention et refusez d'entendre nos arguments.
Mme Éliane Assassi. - Ils sont démentis par les faits !
M. Éric Besson, ministre. - L'Europe et la France ne sont nullement hostiles à l'immigration légale : chaque année dans notre pays, 200 000 titres de long séjour, deux millions de titres de court séjour et 100 000 naturalisations sont accordés ; la France est aussi, je le répète, le pays le plus généreux d'Europe en matière de droit d'asile. La rétention administrative, d'une durée légale maximale de 32 jours, ne dure en fait qu'une dizaine de jours : c'est le délai le plus court d'Europe. (M. Michel Charasse en convient) Dans six pays européens, la durée de rétention est illimitée ! (Mme Éliane Assassi hausse les bras)
Vous ne critiquez pas les faits mais nos intentions supposées : cela rend le débat certes intéressant, mais compliqué...
Non, nous ne confondons pas immigration et droit d'asile. L'Ofpra, organisme indépendant, continuera de statuer sur le cas des demandeurs de bonne foi, et mon prédécesseur et moi-même avons toujours avalisé ses décisions, sans aucune exception. La CNDA, chargée de statuer sur les recours formés contre les décisions de l'Ofpra, se voit confier par le présent texte une nouvelle mission, ce qui, loin de contribuer à la confusion, clarifie le rôle de chacun.
Mais certains étrangers cherchent à entrer en France pour des raisons économiques, sous couvert du droit d'asile. C'est humainement compréhensible et respectable. Mais nous sommes forcés de les distinguer nettement des autres.
Comme l'a dit Mme Escoffier, le texte proposé par M. Buffet est juste et équilibré. Les améliorations qu'il apporte sont modestes mais réelles. Je n'ai jamais prétendu qu'il s'agissait d'une révolution ! Suivant une proposition de M. le rapporteur, à laquelle le Gouvernement s'est rallié, le délai de recours sera allongé.
Au cours de l'examen des articles, j'aurai l'occasion de m'expliquer sur le concept de requête motivée.
J'en viens enfin à l'intervention de Mme Boumediene-Thiery : la clarification porte sur le caractère manifestement infondé. La Cour nationale du droit d'asile (CNDA) n'est pas liée par la décision initiale, ni dans un sens, ni dans l'autre. Votre suggestion de recours suspensifs aboutirait à une plus grande confusion. En ce qui concerne les mineurs isolés, j'ai mis en place un groupe de travail afin qu'il se penche sur cette question délicate : notre pays est très généreux avec les mineurs mais lorsqu'ils arrivent à majorité, cela pose des difficultés.
La première partie de votre intervention était technique, la deuxième plus polémique en évoquant je ne sais quels noirs desseins de la part du Gouvernement. A vous écouter, nous voudrions mettre en place une justice partiale et expéditive. C'est votre jugement qui l'est !
En revanche, je salue l'hommage que vous avez rendu à l'article 5 : lorsque j'étais jeune, une publicité disait : « ce qui est rare est cher ». Vos compliments étant rares, ils me sont particulièrement chers. (Sourires et applaudissements à droite)
La discussion générale est close.
Discussion des articles
Articles additionnels
M. le président. - Amendement n°1 rectifié bis, présenté par M. Charles Gautier et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
Avant l'article 1er, ajouter un article additionnel ainsi rédigé :
L'article L. 622-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est ainsi modifié :
1° Les quatre premiers alinéas sont ainsi rédigés :
« Sous réserve des exemptions prévues à l'article L. 622-4, toute personne qui aura, par aide directe ou indirecte, facilité ou tenté de faciliter l'entrée ou, à titre onéreux, le séjour irréguliers d'un étranger en France ou le transit irrégulier d'un étranger par la France, sera punie d'un emprisonnement de cinq ans et d'une amende de 30 000 €.
« Sera puni des mêmes peines celui qui, quelle que soit sa nationalité, aura commis le délit défini au premier alinéa du présent article alors qu'il se trouvait sur le territoire d'un État partie à la convention signée à Schengen le 19 juin 1990 autre que la France.
« Sous réserve des exemptions prévues à l'article L. 622-4, sera puni des mêmes peines celui qui aura facilité ou tenté de faciliter l'entrée ou, à titre onéreux, le séjour irréguliers d'un étranger sur le territoire d'un autre État partie à la convention signée à Schengen le 19 juin 1990 ou le transit irrégulier d'un étranger par le territoire d'un tel État.
« Sous réserve des exemptions prévues à l'article L. 622-4, sera puni des mêmes peines celui qui aura facilité ou tenté de faciliter l'entrée, ou, à titre onéreux, le séjour irréguliers d'un étranger sur le territoire d'un État partie au protocole contre le trafic illicite de migrants par terre, air et mer, additionnel à la convention des Nations unies contre la criminalité transnationale organisée, signée à Palerme le 12 décembre 2000, ou le transit irrégulier d'un étranger par le territoire d'un tel État. »
2° Il est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Les dispositions du présent article ne s'appliquent pas lorsque l'acte reproché était, face à un danger actuel ou imminent, nécessaire à la sauvegarde de la vie ou de l'intégrité physique de l'étranger, sauf s'il a donné lieu à une contrepartie directe ou indirecte. »
M. Charles Gautier. - Il convient de modifier l'article L. 622-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qui prévoit des sanctions en cas d'aide à l'entrée, à la circulation ou au séjour irréguliers d'un étranger. Nous proposons donc de dépénaliser toute aide lorsque la sauvegarde de la vie ou l'intégrité physique de l'étranger est en jeu, sauf si cette aide a donné lieu à une contrepartie directe ou indirecte. Il convient aussi de remplacer le terme trop général de « circulation » par celui de « transit » et de ne sanctionner l'aide au séjour irrégulier que lorsqu'elle est proposée à titre onéreux.
M. le président. - Amendement n°26, présenté par Mme Assassi et les membres du groupe CRC-SPG.
Avant l'article 1er, ajouter un article additionnel ainsi rédigé :
L'article L. 622-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est ainsi modifié :
1° Dans les premier, troisième et quatrième alinéas, après le mot : « faciliter », sont insérés les mots : « dans un but lucratif » ;
2° Il est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Les associations régulièrement déclarées depuis au moins cinq ans à la date des faits ayant, en vertu de leurs statuts, vocation, en France, à défendre ou à assister les personnes étrangères sont exclues du champ d'application de cet article. »
Mme Éliane Assassi. - Cela fait maintenant des années que le groupe CRC estime qu'il faut bien distinguer ce qui ressortit aux réseaux criminels de l'action d'hommes de femmes ordinaires qui viennent en aide à des étrangers en situation irrégulière. C'est pourquoi nous présentons cet amendement qui ne fait que reprendre en partie la proposition de loi que nous avons déposée le 18 mars.
Votre politique du chiffre à tout prix ne fait qu'inquiéter les personnes honnêtes et désintéressées qui agissent par pure humanité. Sur ces question de solidarité, vous n'êtes pas très audible, monsieur le ministre : en témoigne le nouvel appel signé par diverses personnalités et qui est paru dans la presse. De toute évidence, les craintes persistent. Vous avez beau invoquer les arguments de M. Chevènement, ça ne passe pas ! Je partage ces inquiétudes, d'autant que nous sommes confrontés à des situations qui frôlent l'absurde. C'est pour mettre fin à l'arrestation de personnes non délinquantes que nous avons déposé cet amendement.
M. Jean-René Lecerf, rapporteur. - L'amendement n°1 rectifié bis reprend les termes de la proposition de loi déposée le 8 avril par le groupe socialiste et qui supprime le délit de solidarité. Une proposition de loi quasiment identique a d'ailleurs été déposée à l'Assemblée nationale, par le même groupe, le 18 mars et elle a été rejetée par les députés jeudi dernier. Il est difficile d'examiner cette question alors que nous traitons du droit d'asile. Il faudrait prévoir une discussion distincte et cette proposition de loi ne doit pas être le prétexte à revenir sur toutes les questions ayant trait à l'immigration. Je souhaite donc le retrait de cet amendement. Mêmes remarques et donc même demande de retrait sur l'amendement n°26.
M. Éric Besson, ministre. - Mme Assassi estime que « ça ne passe pas » et que le Gouvernement n'est pas audible. Ce n'est pas parce que des intellectuels et des artistes signent une pétition que les Français ne partagent pas notre point de vue ! (Exclamations à gauche) En outre, faut-il le rappeler, il ne s'agit pas de la politique de la France mais de celle de l'Europe, élaborée et conduite par tous nos partenaires et par nous-mêmes. Enfin, je n'ai pas entendu par un quelconque gouvernement voisin, et il y en a qui sont de gauche, de propositions pour mener une politique alternative. (Nouvelles exclamations sur les mêmes bancs)
Je veux aussi vous faire remarquer que nous avons la chance immense, dans notre pays, de ne pas être touchés par la vague xénophobe qui frappe le monde en son entier et une partie de l'Europe à l'occasion de la crise économique. En France, Dieu -laïc- merci (sourires), les étrangers qui travaillent ne sont pas pris pour des boucs émissaires. J'y vois l'indice que nos compatriotes approuvent la politique que nous menons, faite de fermeté et d'humanité. Je suis convaincu qu'il existe un lien absolu entre immigration légale et intégration. L'ouverture généreuse des frontières aboutit à des résultats désastreux avec le développement des marchands de sommeil, l'accroissement du racisme et de la xénophobie et le recul de l'intégration. D'ailleurs, tous les mouvements de régularisation massive se sont soldés par des échecs en créant un appel d'air.
Après trois mois de débats intenses, aucune association n'a pu apporter la preuve d'une seule condamnation d'un particulier ayant porté secours à un étranger en situation irrégulière. En soixante trois années d'existence, l'article L. 622-1 n'a donné lieu à aucune condamnation. Il s'agit donc d'un délit mythique, fantasmé et c'est pourquoi il est difficile de supprimer quelque chose qui n'existe pas. Face à cette question, M. Chevènement aboutissait aux mêmes conclusions.
Il n'est pas possible de sanctuariser les associations à but non lucratif qui aident les personnes en situation irrégulière car des passeurs pourraient très facilement créer de telles associations pour couvrir leurs activités et se soustraire automatiquement à toute poursuite ou perquisition.
En 1998, le Parlement avait dit qu'il reviendrait au Gouvernement de fixer par décret la liste des associations protégées. Jean-Pierre Chevènement avait été hostile à cette disposition, qui avait d'ailleurs été censurée par le Conseil constitutionnel.
Je le redis : le délit de solidarité n'existe pas dans notre pays. Nous aurons sans doute l'occasion d'en reparler lorsque nous examinerons les propositions de loi de l'opposition.
M. Michel Charasse. - Juridiquement et sur le fond, M. le ministre a raison. Pourtant, au cours des deux ou trois derniers hivers, avant donc qu'il ne prenne ses fonctions, il arrivait fréquemment que les forces de l'ordre procèdent à des interpellations de personnes qui distribuaient de la soupe le soir. Elles étaient emmenées au commissariat, interrogées puis libérées dans la nuit. Aucune trace de ces interpellations ne figure dans les statistiques des ministères de l'intérieur et de la justice. Pourtant, les associations caritatives ont été très perturbées.
Faut-il un texte législatif pour régler le problème ?
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission. - Non !
M. Michel Charasse. - Il suffirait sans doute de donner aux forces de l'ordre les instructions nécessaires. Il faut cesser ce petit jeu ! Ces bénévoles ne sont pas des complices des passeurs : ils ne font que distribuer de la nourriture à des gens qui ont faim ! (M. Charles Gautier applaudit)
M. Éric Besson, ministre. - Je suis sensible au ton et à la précision de M. Charasse. La police française a reçu des instructions très précises : elle n'interpelle pas les étrangers en situation irrégulière à la préfecture, dans les hôpitaux ou à la sortie des écoles, ni, en théorie, à proximité des lieux où ils reçoivent secours et assistance. Vous m'avez signalé certains cas où il y aurait pu avoir erreur, ou mauvaise manière. Je vous crois sur parole. J'ai demandé à mes services d'étudier l'opportunité d'une circulaire globale, contresignée par les ministres compétents, et/ou d'un nouveau livret d'explication et d'accompagnement, afin de lever toute ambigüité.
Merci d'avoir reconnu qu'il n'y avait pas eu de condamnation. Notre pays a avancé à grands pas ces dernières années ; je suis favorable à toute clarification supplémentaire.
M. Michel Charasse. - Si l'on peut faire simple, c'est mieux !
Mme Alima Boumediene-Thiery. - S'il n'y a pas eu de condamnation, l'association Ban public affirme que plusieurs personnes ont toutefois été convoquées devant le juge, voire mises en examen !
L'Europe est en train de modifier le « paquet asile », des directives -Dublin 2, Eurodac- doivent être transposées... Pourquoi ne pas attendre le rapport prévu pour juin avant de modifier la loi, qui ne sera appliquée qu'en 2011 ?
M. Michel Charasse. - Les amendements de M. Gautier et de Mme Assassi ne règlent pas le problème du placement de bénévoles en garde à vue jusqu'à l'aube ! Soit il faut un texte différent, soit il faut dire aux forces de l'ordre d'arrêter ce petit jeu. On n'a pas à passer la nuit au commissariat pour avoir donné un bol de soupe à quelqu'un qui crevait de faim et de froid !
Mme Alima Boumediene-Thiery. - Nous sommes tous d'accord.
M. Michel Charasse. - C'est le meilleur moyen de décourager les bénévoles ! La réponse du ministre me satisfait. La police n'a pas à accourir parce que des bourgeois se plaignent de voir une camionnette d'Emmaüs ou des Restos du Coeur sous leurs fenêtres !
L'amendement n°1 rectifié bis n'est pas adopté, non plus que l'amendement n°26.
M. le président. - Amendement n°2 rectifié bis, présenté par M. Charles Gautier et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
Avant l'article 1er, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article L. 622-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est ainsi modifié :
1° Le 3° est ainsi rédigé :
« 3° De toute personne physique ou morale qui sera intervenue pour préserver les droits, la dignité ou l'intégrité physique de l'étranger, sauf si cette aide a été réalisée à titre onéreux ; »
2° Après le 3°, il est inséré un 4° ainsi rédigé :
« 4° De tous les établissements et services visés à l'article L. 312-1 du code de l'action sociale et des familles, ainsi que leurs salariés et bénévoles lorsqu'ils agissent dans le cadre de ces établissements et services, ainsi que des agents publics, professions libérales, salariés et bénévoles intervenant au sein de différentes structures qui ont pour mission d'accompagner et d'assurer une prise en charge des personnes en difficulté, dont certaines sont des étrangers en situation irrégulière - que cette prise en charge soit sanitaire, sociale ou juridique. »
M. Charles Gautier. - Il a été défendu.
M. le président. - Amendement n°27, présenté par Mme Assassi et les membres du groupe CRC-SPG.
Avant l'article 1er, ajouter un article additionnel ainsi rédigé :
L'article L. 622-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est ainsi modifié :
1° Le quatrième alinéa (3°) est ainsi rédigé :
« 3° De toute personne physique ou morale qui sera intervenue pour préserver les droits et la dignité ou l'intégrité physique de l'étranger, sauf si cette aide a été réalisée dans un but lucratif. »
2° Après le quatrième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« 4° De tous les établissements et services visés à l'article L. 312-1 du code de l'action sociale et des familles, et de leurs salariés et bénévoles lorsqu'ils agissent dans le cadre de ces établissements et services, ainsi que des agents publics, des professionnels qui aident et aux associations de défense des droits et des associations à but humanitaire. »
Mme Éliane Assassi. - Nous exemptons les établissements et services de santé ainsi que leurs bénévoles et salariés.
M. Jean-René Lecerf, rapporteur. - Mêmes causes, mêmes effets : retrait, sinon rejet.
M. Éric Besson, ministre. - Avis défavorable.
L'amendement n°2 rectifié bis n'est pas adopté, non plus que l'amendement n°27.
M. le président. - Amendement n°28, présenté par Mme Assassi et les membres du groupe CRC-SPG.
Avant l'article 1er, ajouter un article additionnel ainsi rédigé :
L'article L. 213-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est ainsi modifié :
« Cette décision est notifiée à l'intéressé avec mention de son droit d'avertir ou de faire avertir la personne chez laquelle il a indiqué qu'il devait se rendre, son consulat ou le conseil de son choix. La décision mentionne également son droit d'introduire un recours en annulation sur le fondement de l'article L. 213-9 et précise les voies et délais de ce recours. La décision et la notification des droits qui l'accompagne doivent lui être communiquées dans une langue qu'il comprend. » ;
2° Il est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« En aucun cas, le refus d'entrée ne peut donner lieu à une mesure de rapatriement contre le gré de l'intéressé avant l'expiration du délai d'un jour franc. »
Mme Éliane Assassi. - Le recours suspensif introduit par la loi du 20 novembre 2007 est loin d'être effectif. Nous étendons ce droit à tous les étrangers maintenus en zone d'attente et nous rétablissons le délai d'un jour franc systématique avant tout rapatriement.
M. Jean-René Lecerf, rapporteur. - L'arrêt Gebremedhin de la Cour européenne des droits de l'homme ne porte que sur les demandeurs d'asile à la frontière, dont le refoulement, en cas d'erreur d'appréciation de l'administration, aurait des conséquences immédiates sur leur sécurité. Les autres demandeurs ne sont pas exposés au même risque. Avis défavorable.
M. Éric Besson, ministre. - Je rejoins le rapporteur. Cet amendement aurait des conséquences désastreuses sur la lutte contre l'immigration clandestine : il favoriserait les recours dilatoires et conduirait à une saturation des zones d'attente. Il faut distinguer les demandeurs d'asile des étrangers auxquels l'entrée est refusée pour défaut de documents ou de visa, qui ne font l'objet d'aucune menace dans leur pays d'origine.
L'amendement n°28 n'est pas adopté.
Article premier
Les neuf premiers alinéas de l'article L. 213-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile sont remplacés par les trois alinéas ainsi rédigés :
« L'étranger qui a fait l'objet d'un refus d'entrée sur le territoire français au titre de l'asile peut, dans les soixante-douze heures suivant la notification de cette décision, en demander l'annulation au président de la Cour nationale du droit d'asile. Sa requête est examinée par le président de la Cour ou par un président de section délégué à cet effet, dans un délai de soixante-douze heures à compter de sa saisine, dans des conditions prévues par un décret en Conseil d'État.
« La décision de refus d'entrée au titre de l'asile ne peut être exécutée avant l'expiration d'un délai de soixante-douze heures suivant sa notification ou, en cas de saisine du président de la Cour nationale du droit d'asile, avant que ce dernier ou le président de section désigné à cette fin n'ait statué.
« Le décret mentionné au premier alinéa prévoit les conditions dans lesquelles le président de la Cour ou le président de section délégué peut tenir une audience foraine dans une salle ouverte au public spécialement aménagée à cet effet, auprès de la zone d'attente au sein de laquelle l'intéressé est maintenu. Il organise également la possibilité, en cas de nécessité tenant à l'éloignement géographique de ladite zone d'attente, de relier, en direct, par un moyen de communication audiovisuelle qui garantit la confidentialité de la transmission, la salle d'audience de la Cour avec une salle d'audience ouverte au public spécialement aménagée à cet effet, dans des conditions respectant les droits de l'intéressé prévus par l'article L. 733-1. Dans ce cas, le conseil de l'intéressé et, le cas échéant, l'interprète, sont physiquement présents auprès de lui. »
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. - Cette semaine d'initiative parlementaire est certes l'occasion d'examiner des propositions de loi, mais dans quelles conditions : sept minutes pour exposer notre position sur ce texte !
Le transfert du contentieux du refus de l'entrée sur le territoire au titre de l'asile vers la CNDA assurerait-il un recours effectif et suspensif aux demandeurs d'asile ? Je ne le crois pas. La rédaction initiale de la proposition de loi conservait le délai actuel de 48 heures pour présenter un recours et l'exigence d'une requête motivée. Nous avions déposé, en octobre dernier, une proposition de loi tendant à allonger ce délai, beaucoup trop court, surtout lorsqu'il expire un dimanche ou un jour férié ; la commission, à l'initiative du rapporteur et de nos collègues socialistes, l'a porté à 72 heures. C'est une avancée, tout comme la suppression de l'exigence de requête motivée qui constituait un obstacle pour les demandeurs d'asile contraints de rédiger en très peu de temps une requête étayée en français.
L'allongement du délai et la suppression de la motivation sont des avancées, les seules de ce texte, puisque les décisions de la CNDA ne sont pas susceptibles d'appel. L'actuel recours non suspensif, n'est pas satisfaisant non plus : nous présenterons des amendements à ce sujet.
Juge unique, audiences foraines, visioconférences : une justice au rabais est créée pour les étrangers, privés des conditions garanties, dans les procès, aux autres justiciables. L'article premier marque un recul.
M. le président. - Amendement n°29, présenté par Mme Assassi et les membres du groupe CRC-SPG.
Supprimer cet article.
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. - Cette réforme n'est en rien justifiée par la pratique actuelle : en quoi le tribunal administratif serait-il incompétent pour apprécier les décisions de police administrative ? Point n'est besoin pour cela de connaissances géopolitiques ; le juge se prononce sur le caractère fondé ou non du refus d'admission, non sur le fond de la demande d'asile. Nul besoin de spécialisation en droit de l'asile ! La CNDA risque de juger le fond, d'autant que la jurisprudence relative à la notion de « décision manifestement infondée » demeure bien floue. Des distorsions d'interprétations sont inévitables entre magistrats. Or, la formation ne sera pas collégiale et rien ne viendra contrebalancer une tentation du juge unique d'analyser le dossier au fond.
M. Michel Charasse. - Comme en référé.
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. - Enfin, confier à la CNDA ce contentieux enferme celui-ci dans le seul champ du droit d'asile et rend impossible l'extension d'un recours suspensif pour les autres étrangers.
M. le président. - Amendement n°3 rectifié bis, présenté par M. Charles Gautier et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
Rédiger comme suit cet article :
L'article L. 213-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est ainsi rédigé :
« Art. L. 213-9. - L'étranger qui a fait l'objet d'un refus d'entrée sur le territoire français peut, dans les soixante-douze heures suivant la notification de cette décision, en demander l'annulation, par requête motivée, au président du tribunal administratif.
« Le président, ou le magistrat qu'il désigne à cette fin parmi les membres de sa juridiction ou les magistrats honoraires inscrits sur la liste mentionnée à l'article L. 222-2-1 du code de justice administrative, statue dans un délai de soixante-douze heures à compter de sa saisine.
« L'étranger est assisté de son conseil s'il en a un. Il peut demander au président ou au magistrat désigné à cette fin qu'il lui en soit désigné un d'office. L'étranger peut demander au président du tribunal ou au magistrat désigné à cette fin le concours d'un interprète. L'audience se déroule sans conclusions du commissaire du Gouvernement.
« Par dérogation au précédent alinéa, le président du tribunal administratif ou le magistrat désigné à cette fin peut, par ordonnance motivée, donner acte des désistements, constater qu'il n'y a pas lieu de statuer sur un recours et rejeter les recours ne relevant manifestement pas de la compétence de la juridiction administrative.
« L'audience se tient dans les locaux du tribunal administratif compétent.
« La décision de refus d'entrée au titre de l'asile ne peut être exécutée avant l'expiration d'un délai de soixante-douze heures suivant sa notification ou, en cas de saisine du président du tribunal administratif, avant que ce dernier ou le magistrat désigné à cette fin n'ait statué.
« Les dispositions du titre II du présent livre sont applicables.
« Le jugement du président du tribunal administratif ou du magistrat désigné par lui est susceptible d'appel dans un délai d'un mois devant le président de la cour administrative d'appel territorialement compétente ou un magistrat désigné par ce dernier. Cet appel n'est pas suspensif.
« Si le refus d'entrée au titre de l'asile est annulé, il est immédiatement mis fin au maintien en zone d'attente de l'étranger, qui est autorisé à entrer en France muni d'un visa de régularisation de huit jours. Dans ce délai, l'autorité administrative compétente lui délivre, à sa demande, une autorisation provisoire de séjour lui permettant de déposer sa demande d'asile auprès de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides.
« La décision de refus d'entrée au titre de l'asile qui n'a pas été contestée dans le délai prévu au premier alinéa ou qui n'a pas fait l'objet d'une annulation dans les conditions prévues au présent article peut être exécutée d'office par l'administration. »
M. Charles Gautier. - Notre amendement rejoint l'amendement de suppression dans la mesure où le groupe socialiste refuse de s'inscrire dans la logique de votre texte, dont l'objectif premier est de réduire les délais de procédure. Il renvoie en outre à un décret le soin de modifier ultérieurement les modalités relatives à l'organisation des audiences foraines et de la visioconférence ; il exclut toute formation collégiale ; et nous craignons finalement le glissement vers une procédure de la demande d'asile à la frontière, autrement dit un examen à la hâte du fond.
Nous avions dénoncé le recours introduit par la loi du 20 novembre 2007, suspensif uniquement au bénéfice des demandeurs d'admission sur le territoire au titre de l'asile. Les associations nous alertent sur le grand nombre de mineurs isolés menacés de refoulement à la frontière alors qu'ils invoquent des liens familiaux sur le territoire français. Le recours doit être suspensif, conformément à l'exigence posée par la Cour européenne des droits de l'homme.
Enfin, comme l'a dit notre collègue CRC-SPG, la spécialisation de la CNDA n'est pas un avantage, elle peut être un inconvénient. Et plutôt que d'enfermer cette procédure dans le seul champ du droit d'asile, il faut viser à étendre le recours suspensif au profit de tous les étrangers faisant l'objet d'une décision de refus d'entrée sur le territoire.
M. le président. - Amendement n°40, présenté par le Gouvernement.
Dans la première phrase du deuxième alinéa de cet article, après les mots :
en demander l'annulation
insérer les mots :
, par requête motivée,
Supprimer le troisième alinéa (2°) de cet article.
M. Éric Besson, ministre. - Le Gouvernement propose une seule modification de votre texte, elle vise à réintroduire la notion de requête motivée, car la règle générale veut que toute requête devant un juge administratif résume les faits et les moyens et s'achève par des conclusions. C'est l'article R. 411 du code de justice administrative, rappelé dans le code relatif à l'entrée et au séjour en France des étrangers.
Ainsi le juge peut-il se concentrer sur l'aspect de la décision qui pose problème. Les indications fournies par le requérant peuvent être sommaires, le juge administratif est bienveillant, il ne verse pas dans un formalisme excessif. Mais il gère mieux le temps disponible pour la préparation de l'audience s'il sait pourquoi la décision est contestée. N'allez pas créer un précédent fâcheux qui pourrait s'étendre à d'autres procédures, notamment celles en urgence.
En outre, l'allongement du délai de recours fait tomber l'objection du manque de temps. Porter le délai à 72 heures, oui, mais accompagner cette mesure d'une suppression de la motivation, cela est excessif. Le HCR a, dans son avis sur la proposition de loi, estimé positif l'allongement du délai, les conditions de préparation de l'audience étant ainsi améliorées ; mais il ajoute que la suppression de la motivation, dès lors, « pourrait paraître superflue ».
M. le président. - Amendement n°4 rectifié bis, présenté par Mme Boumediene-Thiery et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
Après la première phrase du deuxième alinéa de cet article, insérer une phrase ainsi rédigée :
Lorsque ce délai expire un samedi, un dimanche ou un jour férié ou chômé, il y a lieu d'admettre la recevabilité du recours présenté le premier jour ouvrable suivant.
Mme Alima Boumediene-Thiery. - Je me réjouis que le délai soit porté à 72 heures mais il reste un problème pratique à régler. Les délais demeurent très brefs si le refus d'admission sur le territoire français est décidé un vendredi ou la veille d'un jour férié. Nous avons proposé en conséquence de préciser que seuls les jours ouvrés étaient décomptés. On nous répond que cela crée une inégalité entre les demandeurs, selon le jour où la décision est notifiée. Mais vous avez créé une inégalité selon le jour du refus ! Nous préférons un minimum de 72 heures, auxquelles s'ajoutent les jours chômés, à un maximum de 72 heures réduites à 24 si la décision intervient un vendredi.
Entre deux inégalités, nous choisissons la plus favorable aux demandeurs d'asile. C'est faire fausse route de penser que le simple allongement des délais règle le problème. Nous entendons assurer le caractère effectif du recours, en conformité avec l'article 13 de la Convention européenne des droits de l'homme.
M. le président. - Amendement n°7 rectifié bis, présenté par M. Charles Gautier et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
I. - Dans la seconde phrase du deuxième alinéa de cet article, remplacer les mots :
le président de la Cour ou par un président de section délégué à cet effet, dans un délai de soixante-douze heures à compter de sa saisine,
par les mots :
la Cour siégeant en formation collégiale, dans un délai de soixante-douze heures à compter de la saisine,
II. - En conséquence, dans le troisième alinéa de cet article, remplacer les mots :
ce dernier ou le président de section désigné à cette fin
par les mots :
la Cour siégeant en formation collégiale
M. Charles Gautier. - L'article L. 213-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose que le tribunal administratif peut, par ordonnance motivée, donner acte des désistements, constater qu'il n'y a pas lieu de statuer sur un recours et rejeter les recours ne relevant manifestement pas de la compétence de la juridiction administrative. L'article premier de la proposition de loi n'a pas repris ce dispositif, mais le rapporteur l'a réintroduit par article additionnel pour compléter l'actuel article L. 733-2, qui prévoit que le président de la CNDA et les présidents de section peuvent, par ordonnance, régler les affaires dont la nature ne justifie pas l'intervention d'une formation collégiale. L'article 3 de la proposition de loi étend le recours à l'ordonnance au contentieux de l'asile à la frontière.
Présentée comme une simple coordination, la réintroduction des ordonnances dites de « tri » rendra possible, comme avant 2007, le rejet de nombreux recours par simple ordonnance, sans audience, sans débat, sans que les personnes concernées aient pu être entendues. Le rapport de M. Lecerf précise que 20 % des recours ont fait l'objet d'une ordonnance en 2008. A nos yeux, les dispenses d'audiences devraient être exclusivement réservées aux désistements et au constat de l'incompétence de la CNDA. En second lieu, dès lors que seuls le président de la Cour et les présidents de section seront appelés à examiner les recours, et en l'absence d'autres précisions, l'article 3 permettra de renvoyer aux ordonnances la totalité du règlement du contentieux des décisions de refus d'entrée sur le territoire au titre de l'asile. Est-ce véritablement le souhait de la présidente de la CNDA qui, lors de son audition, a expliqué que la Cour pourrait recourir aux ordonnances pour le nouveau contentieux de l'asile à la frontière ?
Bien que la demande d'entrée sur le territoire au titre de l'asile ne puisse être assimilée à la demande d'asile elle-même, nous craignons que le transfert de compétence ne débouche à terme sur un examen au fond de la demande. En commission, le rapporteur s'est opposé à notre amendement au motif que la requête devait être examinée dans des délais très courts et qu'il ne s'agissait que de statuer sur le caractère manifestement infondé ou non de la demande d'entrée sur le territoire. Si c'est le cas, la spécificité de la CNDA n'est plus nécessaire et la réforme n'est plus justifiée... J'ajoute que les réticences du HCR à participer à la prise d'une décision relative à l'entrée des étrangers sur le territoire national sont légitimes : nous en sommes, à ce stade de la procédure, à un contentieux portant sur une décision de police administrative.
Dans ces conditions, et au regard des incertitudes qui demeurent, le recours à la formation collégiale est une garantie.
M. le président. - Amendement n°30, présenté par Mme Assassi et les membres du groupe CRC-SPG.
Dans la seconde phrase du deuxième alinéa de cet article, remplacer les mots :
le président de la Cour ou par un président de section délégué à cet effet
par les mots :
la Cour siégeant en formation collégiale
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. - L'attribution du contentieux à la CNDA est justifiée, nous dit-on, par la volonté de confier celui-ci à des magistrats que leur expérience et leur spécialisation rendent plus aptes à juger du caractère manifestement infondé d'une demande d'asile. C'est faire fi d'un problème majeur, celui de l'encombrement de la Cour. En cinq ans, le délai de traitement des recours est passé de huit à treize mois. Comme l'a relevé le rapport Richard, la charge de travail du président de la CNDA et des présidents de section est déjà lourde. Il est évident que le transfert du contentieux va se faire au détriment de la collégialité, qui est pourtant la garantie d'un bon fonctionnement de la Cour. D'où notre amendement.
M. le président. - Amendement n°32, présenté par Mme Assassi et les membres du groupe CRC-SPG.
Dans le troisième alinéa de cet article, remplacer les mots :
ce dernier ou le président de section désigné à cette fin
par les mots :
la Cour siégeant en formation collégiale
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. - Amendement de cohérence : le juge unique laisse une plus grande place à l'arbitraire.
M. le président. - Amendement n°31, présenté par Mme Assassi et les membres du groupe CRC-SPG.
Compléter le deuxième alinéa de cet article par une phrase ainsi rédigée :
Dans le cadre du contrôle que la Cour exerce sur les décisions de refus d'entrée sur le territoire, ce contrôle se limite à un contrôle de l'excès de pouvoir.
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. - Depuis de nombreuses années, l'examen des demandes d'asile des personnes en zone d'attente va bien au-delà de l'appréciation de leur caractère manifestement infondé. Aujourd'hui, la CNDA n'est pas juge de la légalité et n'a pas compétence pour statuer en excès de pouvoir. Si transfert il y a, il doit être entouré des plus grandes garanties, notamment pour éviter que l'examen du recours contre un refus d'entrée sur le territoire français au titre de l'asile ne conduise la Cour à statuer sur l'éligibilité de l'étranger au statut de réfugié. D'où cet amendement de repli.
M. le président. - Amendement n°5 rectifié bis, présenté par Mme Boumediene-Thiery et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
Après le deuxième alinéa de cet article, insérer un alinéa ainsi rédigé :
« L'article L. 733-2 n'est pas applicable à la procédure mentionnée à l'alinéa précédent.
Mme Alima Boumediene-Thiery. - Selon le rapporteur, la simplicité de l'examen des requêtes justifie qu'on n'impose pas à la Cour de siéger en formation collégiale. La collégialité est un principe en voie de disparition dans notre droit, que la raison en soit budgétaire ou la rapidité de traitement des affaires. Elle devient l'exception tandis que le juge unique devient la règle alors qu'elle apporte une garantie d'impartialité et d'indépendance. Dans le cas qui nous occupe, le recours à la visioconférence ou à des audiences foraines au motif de faire des économies nous éloigne peu à peu de l'équité. Raison de plus pour exiger la collégialité, qui évitera l'examen sommaire et partial des recours sans nécessairement ralentir les procédures. Collégialité n'est pas pluralité d'examens.
M. le président. - Amendement n°6 rectifié bis, présenté par Mme Boumediene-Thiery et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
Après le deuxième alinéa de cet article, insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Le recours est considéré comme recevable dès lors que l'étranger a fait l'objet d'une décision de refus d'entrée sur le territoire français au titre de l'asile, sans qu'il puisse être considéré comme ne relevant manifestement pas de la compétence de la Cour nationale du droit d'asile, entaché d'une irrecevabilité manifeste non susceptible d'être couverte en cours d'instance ou manifestement mal fondé.
Mme Alima Boumediene-Thiery. - Nous entendons réduire le champ des ordonnances aux seuls cas de désistement et de non-lieu à statuer. La suppression de l'exigence de requête motivée, que nous avons proposée en commission, apporte certes une garantie mais elle n'a pas cet effet. Nous proposons d'exclure du champ des ordonnances plusieurs moyens qui -à l'exception, je peux en convenir, de l'irrecevabilité manifeste du recours- nous semblent des obstacles à l'examen au fond de la demande par le juge. L'enjeu, c'est l'octroi à l'étranger du statut de réfugié ; or sa demande d'asile ne sera examinée qu'une fois qu'il sera admis sur le territoire et qu'il l'aura formulée. Admettre qu'elle puisse être rejetée à ce stade, c'est en réalité s'assurer d'une plus grande fluidité de la procédure ultérieure d'octroi de l'asile ; c'est instituer un nouveau filtre, sans que l'étranger puisse se justifier.
Les économies et le gain de temps attendus du recours à la visioconférence, aux audiences délocalisées et au juge unique doivent conduire à plus de souplesse dans l'examen de la recevabilité des requêtes. La procédure du rejet au tri est une injustice, ne la maintenons pas de manière détournée en laissant le soin à un décret de fixer les conditions de cette recevabilité.
M. le président. - Amendement n°8 rectifié bis, présenté par Mme Boumediene-Thiery et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
Après le deuxième alinéa de cet article, insérer un alinéa ainsi rédigé :
« L'étranger est assisté de son conseil s'il en a un. Il peut demander au président de la Cour ou au président de section délégué qu'il lui en soit désigné un d'office. Il peut, le cas échéant, demander au président de la Cour ou au président de section délégué le concours d'un interprète.
Mme Alima Boumediene-Thiery. - La commission nous objecte que les garanties que nous réclamons découlent déjà du code des étrangers. Mais l'article L. 221-4, qu'elle invoque, ne concerne que les modalités de notification à l'étranger de ses droits lors du placement en zone d'attente, ou d'une décision de prolongation du placement, nullement la contestation d'un refus d'admission sur le territoire au titre de l'asile.
L'article L. 213-9, qui regroupe les dispositions relatives au refus d'entrée sur le territoire au titre de l'asile, mentionne bien la possibilité d'être assisté d'un avocat et d'un interprète. Si cette mention est superflue, pourquoi ne l'avoir pas supprimée lors de la réforme de la procédure, en 2007 ? Cette mention, qui ne semblait pas superflue en 2007, le serait donc aujourd'hui ?
Et pourquoi préciser, dans le cas de la visioconférence, que l'avocat et l'interprète sont présents auprès de l'étranger ? C'est qu'il s'agit d'une procédure spécifique, avec des règles spécifiques. Il en va de même pour la procédure d'admission à la frontière au titre de l'asile. Si cette précision disparaît, l'étranger ne pourra plus déposer de recours pour non-respect du droit à l'assistance d'un avocat, puisqu'il n'y sera plus fait référence.
Une loi n'est jamais trop bavarde lorsqu'il s'agit de protéger des droits fondamentaux.
M. le président. - Amendement n°25, présenté par Mmes Boumediene-Thiery, Blandin, Voynet, MM. Desessard et Muller.
I. Avant le dernier alinéa de cet article, insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsque le président de la Cour ou le président de section délégué annule la décision de refus d'entrée au titre de l'asile, il peut, d'office, et avec l'accord de l'étranger, se prononcer sur la reconnaissance de la qualité de réfugié ou l'octroi de la protection subsidiaire dans des conditions prévues par un décret en Conseil d'État.
II. - En conséquence, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... - L'article L. 713-1 du même code est complété par les mots : « , ou par la Cour nationale du droit d'asile dans les conditions prévues par le troisième alinéa de l'article L. 213-9 ».
Mme Alima Boumediene-Thiery. - Cet amendement en forme de provocation est inspiré par l'ancien président de la CNDA, qui réclamait la possibilité, pour la Cour, de statuer au fond. Le rapporteur objecte que l'on accroîtrait ainsi les risques de confusion dans la procédure. C'est précisément ce que nous reprochons à cette proposition de loi. On confie à la CNDA des pouvoirs qui ne lui appartiennent pas et qui relèvent du domaine de la police des étrangers. La Cour pourrait être amenée à statuer sur une demande d'asile déposée par un étranger auquel elle aurait refusé l'admission. On nous objecte qu'elle ne serait pas liée par son refus initial. Mais voudra-t-elle se déjuger ?
Le titre même de ce texte entretient la confusion : l'admission n'a rien à voir avec l'asile. Un étranger entré sur le territoire peut fort bien déposer une autre demande.
Nous ne pourrons envisager de retirer cet amendement que si nous obtenons réponse sur tous ces points.
M. le président. - Amendement n°9 rectifié bis, présenté par M. Charles Gautier et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
Rédiger comme suit le dernier alinéa de cet article :
« L'audience se tient dans les locaux de la Cour nationale du droit d'asile. Toutefois, après que l'étranger dûment informé dans une langue qu'il comprend et assisté de son conseil a donné son accord, le président de la Cour ou le président de section délégué à cet effet peut tenir une audience foraine dans une salle d'audience de la zone d'attente spécialement aménagée à cet effet. La salle d'audience de la zone d'attente est ouverte au public et l'audience se déroule dans les conditions respectant les droits de l'intéressé prévus à l'article L. 733-1. »
M. Charles Gautier. - Dans la discussion générale, je me suis efforcé de relever les avancées de cette proposition de loi, parmi lesquelles l'allongement du délai de recours. Mais j'ai aussi souligné combien elle fragilise l'application des garanties. Nous proposerons de les conforter sur plusieurs points. Ainsi des conditions matérielles du déroulement de l'audience, qui méritent d'être précisées dans la loi, et non par décret. L'audience doit se tenir dans les locaux de la CNDA. Les audiences foraines, si elles sont dictées par des raisons de bon sens, comme la distance, doivent rester l'exception.
L'étranger, assisté de son conseil et informé dans une langue qu'il comprend doit exprimer son accord à la délocalisation de l'audience. La salle doit être aménagée, ouverte au public, assurer le respect des droits prévus par l'article L. 733-1 du Ceseda.
Au motif de l'urgence et du fait que la Cour a compétence nationale, la commission a maintenu le recours à la visioconférence. Comme en 2007, nous nous y opposons. Si cette technologie s'est largement diffusée, depuis 2003, dans la procédure pénale, elle nous semble inadaptée au cas d'étrangers qui peuvent être traumatisés par les persécutions et ne pas être en mesure de s'exprimer sereinement. Alors que le droit au refus est reconnu par le droit en vigueur, le texte de la commission ne le reprend pas. Notre opposition ne peut en être que plus forte.
M. le président. - Amendement n°33, présenté par Mme Assassi et les membres du groupe CRC-SPG.
Rédiger comme suit le dernier alinéa de cet article :
L'audience se tient dans les locaux de la Cour nationale du droit d'asile.
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. - Les audiences foraines sont contraires à la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme : elles n'assurent pas la publicité de l'audience et mettent en péril l'indépendance et l'impartialité des juges, qui seules garantissent un procès équitable.
Le texte prévoit que la salle d'audience sera ouverte au public et aménagée. Or, dans la zone d'attente de Roissy, cette salle, éloignée de toute habitation, installée dans une zone de fret d'accès difficile aux transports en commun, ne permet pas la publicité. J'ajoute que les zones d'attente sont placées sous contrôle administratif de la police. L'audience aurait donc lieu dans une zone administrée par l'une des parties, plaçant le juge en situation de dépendance incompatible avec son devoir d'impartialité.
Les avocats, les magistrats, ont exprimé leur désaccord sur cette question des audiences délocalisées, que ce soit dans la zone d'attente de Roissy ou dans les centres de rétention administrative, comme ce fut le cas dans celui de Toulouse, en 2007. La Cour de cassation, dans ses décisions du 16 avril 2008, a jugé illégales les audiences délocalisées dans les centres de rétention. Elles sont contraires à l'esprit et à la conception même que nous nous faisons, avec les magistrats et les avocats, de la justice.
Dans le même esprit, prévoir que, sauf opposition de l'étranger, l'audience pourra se tenir par vidéoconférence ne permet pas de garantir le respect des principes de recours effectif et de procès équitable.
Il faut des moyens, nous dit-on, à cette réforme. Il serait bon qu'y figurent les moyens nécessaires pour que les audiences se tiennent dans les locaux de la CNDA.
M. le président. - Amendement n°23, présenté par Mmes Boumediene-Thiery, Blandin, Voynet, MM. Desessard et Muller.
Dans la première phrase du dernier alinéa de cet article, après le mot :
peut
insérer les mots :
, sauf si l'étranger dûment informé dans une langue qu'il comprend s'y oppose,
Mme Alima Boumediene-Thiery. - Nous émettons sur les délocalisations des audiences, nouveauté qui ne figure pas à l'article L. 213-9, les plus grandes réserves. On nous dit que de telles audiences sont déjà possibles. Mais les audiences prévues par les articles L. 221-1 et L. 551-1 du code assurent-elles le droit à un procès équitable ?
La Cour de cassation, dans ses trois arrêts du 16 avril 2008, a procédé à des annulations, jugeant que l'expression « à proximité de la zone d'attente » ne signifiait pas à l'intérieur de la zone d'attente. Or, la salle de Roissy se trouve à l'intérieur de la zone d'attente. Nous demandons qu'elle soit située à l'extérieur et que l'étranger puisse donner son consentement.
M. le président. - Amendement n°34, présenté par Mme Assassi et les membres du groupe CRC-SPG.
Dans la première phrase du dernier alinéa de cet article, après le mot :
peut
insérer les mots :
, avec le consentement de l'étranger, dûment informé dans une langue qu'il comprend,
Mme Éliane Assassi. - Amendement de repli puisque, par principe, nous refusons toute audience au sein de la zone d'attente : la justice doit être rendue dans des lieux qui lui sont dédiés, ce qui n'est pas le cas d'une zone d'attente, bâtiment se situant hors d'un établissement judiciaire, contrôlé par la police et grillagé. C'est pourquoi cette délocalisation des audiences, si elle doit avoir lieu, doit rester exceptionnelle et ne doit être possible qu'avec le consentement de l'étranger qui, informé dans une langue qu'il comprend, devra y donner expressément son accord. L'ordonnance de novembre 1945 prévoyait que ce consentement devait être recueilli pour mettre en oeuvre la visioconférence. L'actuel article L. 231-9 a inversé le principe en prévoyant que « sauf si l'étranger dûment informé dans une langue qu'il comprend s'y oppose », l'audience peut se tenir au sein de la zone d'attente, au moyen de la visioconférence. Encore faut-il que, dans l'urgence et la pression psychologique que constitue un placement en zone d'attente, l'étranger comprenne les enjeux d'une telle délocalisation et pense à s'y opposer. L'article premier de la proposition de loi ne fait même plus référence au consentement de l'étranger, ni pour la délocalisation dans la zone d'attente ni pour l'utilisation de la visioconférence. La tenue de l'audience au sein d'une zone d'attente porte atteinte au droit à un procès équitable et, pour cette raison, des magistrats et des avocats refusent toujours de siéger dans la salle d'audience de la zone d'attente de Roissy.
Nous regrettons que le Gouvernement s'entête. Il faut au minimum que l'étranger soit expressément consentant à toute délocalisation.
M. le président. - Amendement n°10 rectifié bis, présenté par Mme Boumediene-Thiery et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
Supprimer la deuxième phrase du dernier alinéa de cet article.
Mme Alima Boumediene-Thiery. - Nous demandons de supprimer la procédure de délocalisation de l'audience. Le souci d'économie ne doit pas aller contre le droit à un procès équitable.
M. le président. - Amendement n°24, présenté par Mmes Boumediene-Thiery, Blandin, Voynet, MM. Desessard et Muller.
Dans la deuxième phrase du dernier alinéa de cet article, après les mots :
zone d'attente
insérer les mots :
et avec l'accord exprimé par l'étranger, dûment informé de cette possibilité dans une langue qu'il comprend
Mme Alima Boumediene-Thiery. - La disposition proposée par le texte est contraire à la Constitution. Le rapporteur fait une interprétation partiale de la décision du Conseil constitutionnel du 20 novembre 2003 car celle-ci impose bien deux conditions cumulatives au recours à la visioconférence : le consentement de l'étranger et l'ouverture au public des deux salles. Ce n'est pas le principe de l'utilisation de la visioconférence qui est en cause, ce sont les conditions mises à son utilisation. Notre amendement vise à rétablir la conformité du texte avec la décision du Conseil constitutionnel.
M. le président. - Amendement n°35, présenté par Mme Assassi et les membres du groupe CRC-SPG.
Dans la deuxième phrase du dernier alinéa de cet article, après les mots :
zone d'attente
insérer les mots :
et avec le consentement de l'étranger, dûment informé dans une langue qu'il comprend
Mme Éliane Assassi. - Amendement de repli puisqu'il prévoit que la visioconférence ne peut être mise en oeuvre qu'avec le consentement express de l'étranger, qui devra être informé dans une langue qu'il comprend.
M. le président. - Amendement n°21, présenté par Mmes Boumediene-Thiery, Blandin, Voynet, MM. Desessard et Muller.
I. - Dans la deuxième phrase du dernier alinéa de cet article, supprimer les mots :
ouverte au public
II. - Après cette même phrase, insérer une phrase ainsi rédigée :
La salle d'audience de la zone d'attente et celle de la Cour sont ouvertes au public.
Mme Alima Boumediene-Thiery. - Le Conseil constitutionnel avait exigé l'ouverture au public des deux salles. C'est sur cette base que l'article 25 de la loi de simplification du droit a généralisé la possibilité de la visioconférence. Nous ne pouvons pas négliger cette condition sous peine d'être censurés par le Conseil constitutionnel
M. le président. - Amendement n°11 rectifié bis, présenté par M. Charles Gautier et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :
« La décision du président de la Cour ou du président de section délégué à cet effet est susceptible d'appel dans un délai d'un mois devant le Conseil d'État. Cet appel n'est pas suspensif. »
M. Charles Gautier. - La proposition de loi supprime la voie de recours à la décision du président de la CNDA ou à celle du président de section délégué. Nous proposons de la rétablir parce que nous ne sommes pas convaincus par l'argument selon lequel ce recours étant non suspensif, il s'agirait d'une voie de recours théorique pour le requérant. Nous souhaitons que, sur ce point, la réforme se fasse à droit constant.
Actuellement, un recours, non suspensif, à la décision du président du tribunal administratif ou du magistrat désigné par lui est possible devant le président de la cour administrative d'appel dans les quinze jours. Ce qui ne posait aucune difficulté en 2007 ne devrait pas vous gêner en 2009 puisque nous reprenons le caractère non suspensif de l'appel. Dans de très nombreuses procédures, la voie d'appel n'est pas suspensive. Cette situation n'ôte pas l'intérêt à agir. Les arrêts du Conseil forment un corpus jurisprudentiel qui participe à l'élaboration et à l'application de la loi.
Si l'on ne rétablit pas une voie d'appel, les décisions de la CNDA seront seulement susceptibles d'un recours en cassation devant le Conseil d'État. Le pourvoi en cassation contre la décision de rejet de la CNDA est une voie de droit exceptionnelle. Ce n'est pas un appel. Dès lors, le juge de cassation ne rejuge pas l'affaire. II se contente de vérifier le respect des règles de procédure, des règles de forme et la correcte application du droit par la Cour.
La France risquerait à nouveau d'être condamnée par la Cour européenne, comme cela s'est produit par le passé.
M. le président. - Amendement n°36, présenté par Mme Assassi et les membres du groupe CRC-SPG.
Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :
« La décision du président de la Cour est susceptible d'appel dans un délai d'un mois devant le Conseil d'État. Cet appel est suspensif. »
Mme Éliane Assassi. - La proposition de loi prévoit que les décisions de la CNDA ne seraient pas susceptibles d'appel mais seulement d'un recours en cassation devant le Conseil d'État. Actuellement, les décisions du tribunal administratif sont susceptibles d'appel devant la Cour administrative d'appel territorialement compétente, mais ce recours n'est pas suspensif. Le rapporteur estime que cette garantie supplémentaire est très théorique. Avant que la cour administrative d'appel ait statué, soit l'étranger a été admis sur le territoire français, soit il a été éloigné. Reconnaissant le caractère théorique de l'appel, au lieu de le rendre opérant et protecteur pour les étrangers, vous préférez le supprimer ! Dans notre proposition de loi sur un recours effectif, déposée en octobre 2008, nous avons porté ce délai d'appel à un mois et rendu l'appel suspensif. C'est également ce que nous avions défendu lors de l'examen du projet de loi relatif à l'immigration, à l'intégration et à l'asile, en octobre 2007. Beaucoup de sénateurs avaient dénoncé le délai de quinze jours imposé pour faire appel dans le cadre de la nouvelle procédure créant un recours suspensif Ce recours ne sera effectif que si le recours en appel est lui aussi suspensif, sinon, comme le dit très bien le rapporteur, rien n'empêche les autorités d'éloigner l'étranger du territoire avant même que la cour d'appel n'ait statué.
Dans cette proposition de loi, la possibilité de faire appel n'existe plus. Nous proposons de la réintroduire, en l'adaptant à la nouvelle procédure devant la CNDA : puisque celle-ci est une juridiction à compétence nationale, ce n'est plus une cour administrative d'appel qui peut être territorialement compétente. Le Conseil d'État devient la juridiction compétente pour faire appel, ce qu'il est encore dans de rares cas.
M. le président. - Amendement n°20, présenté par Mmes Boumediene-Thiery, Blandin, Voynet, MM. Desessard et Muller.
Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :
« Le décret mentionné au premier alinéa prévoit également les conditions dans lesquelles il est dressé, dans chacune des deux salles d'audience, un procès-verbal des opérations effectuées. »
Mme Alima Boumediene-Thiery. - Il faut permettre la publicité des débats, conformément à l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, car elle protège le justiciable d'une justice secrète échappant au contrôle du public. Les difficultés d'accès aux audiences délocalisées, par exemple à Coquelles et Roissy, l'isolement de ces salles, enclavées dans des lieux clos sous haute surveillance policière, empêchent la publicité effective des audiences : elles sont difficiles d'accès, même pour les avocats.
C'est pourquoi nous proposons que les débats fassent l'objet d'un procès verbal, que chacun pourra consulter.
M. Jean-René Lecerf, rapporteur. - La commission, favorable à cette proposition de loi, ne peut qu'être défavorable aux amendements nos29 et 3 rectifié bis qui s'opposent à l'objet même de cette proposition.
Elle n'a pas pu examiner l'amendement n°40 du Gouvernement qui n'a été déposé qu'en début de séance. Personnellement, je suis sensible à certaines raisons du ministre : la position du HCR et le fait que la requête peut n'être que sommairement motivée. Mais cet amendement étant contraire à la position de la commission, je ne peux qu'y être défavorable
L'amendement n°4 rectifié bis ? Le délai de 72 heures présente un certain nombre d'avantages : sa simplicité le rend aisément compréhensible et il s'applique à tous. Ce que propose Mme Boumediene-Thiery est plus complexe et va contre le principe selon lequel les délais exprimés en heures se décomptent d'heure à heure. Il y a bien les ponts de trois jours du printemps mais les étrangers pourront préparer leurs recours pendant l'attente, avec l'aide des associations. Défavorable donc à l'amendement. Je vous rappelle que c'est le Sénat qui a fait porter le délai de 24 à 48 heures puis maintenant à 72.
La commission est également défavorable à l'amendement n°7 rectifié bis. M. Gautier connaît nos arguments : il a fait les questions et les réponses !
M. Charles Gautier. - Je lis dans vos pensées !
M. Jean-René Lecerf, rapporteur. - Comme dans un livre ouvert !
Il s'agit donc du « manifestement infondé ». L'application de cet amendement susciterait de nombreuses difficultés. Déplacer l'examen au stade de l'entrée en France ne serait pas très favorable à l'étranger... L'amendement n°30 a le même objet ; nous y sommes défavorables pour les mêmes raisons.
Notre collègue a évoqué un risque d'encombrement de la CNDA. Nous ne partageons pas son inquiétude : si les délais ont augmenté depuis 2003, c'est qu'il fallait résorber des stocks importants. C'est désormais en bonne voie : les stocks sont passés de 35 000 à 19 000 dossiers.
Pour les mêmes raisons, nous sommes défavorables à l'amendement n°32 ainsi qu'au n°31. Nous partageons certes l'objectif de celui-ci mais quel sens y a-t-il à parler d'un contrôle de la CNDA qui serait « limité à un contrôle de l'excès de pouvoir » ? Je ne connais ? en droit ? que les contrôles « minimum », portant sur une erreur manifeste, « normaux », touchant au fond juridique, et « maximum », prenant en compte les questions d'opportunité.
L'amendement n°5 rectifié bis est contraire au voeu de la commission, qui a ajouté un article 3 qui confirme l'application de l'article L. 733-2 du Ceseda. Est-ce vraiment un excès de pouvoir que de donner acte d'un désistement ? L'amendement n°6 rectifié bis limite certes le champ du précédent mais il touche encore des domaines dans lesquels il n'est pas exclu que l'on puisse statuer par ordonnance. L'asile économique n'a rien que de respectable mais il n'entre pas dans le champ de ce texte. Nous sommes donc défavorables à cet amendement, ainsi qu'au n°8 rectifié bis, qui est satisfait par l'article L. 733-1 du Ceseda.
Pourquoi accepter certaines répétitions ? De manière générale, je crains fort qu'elles ne marquent davantage une inquiétude sur l'applicabilité d'une règle qu'un renforcement de celle-ci. Une répétition s'imposait toutefois à propos de la visioconférence parce que, en son principe même, celle-ci suppose qu'il y a deux instances, d'un côté la Cour, de l'autre l'étranger ; il fallait donc bien préciser que l'étranger était physiquement assisté d'un conseil. Notre position n'est donc pas incohérente. Pour le cas que vous évoquez, il n'y a aucun doute à éliminer et, à supposer qu'il y en ait un, le compte rendu de nos débats témoignera de l'intention du législateur.
Le président Bernard s'interrogeait sur la possibilité de statuer à la frontière ; l'idée, dont s'inspire l'amendement n°25, est séduisante mais elle pose quelques difficultés. Outre que certains demandeurs d'asile arrivent traumatisés, on créerait ainsi une inégalité entre les demandeurs arrivant et ceux qui sont déjà sur le territoire national, qui n'auraient pas intérêt à s'engager dans une procédure d'urgence. L'amendement de Mme Boumediene-Thiery est plus subtil mais relève des mêmes objections que l'hypothèse du président Bernard. Défavorable, donc.
L'amendement n°9 rectifié bis ? Dans les cas où le Ceseda permet de statuer en audience foraine, le consentement de l'étranger n'est pas requis. S'il est assuré que ces audiences respectent les règles d'équité, le consentement n'a pas lieu d'être demandé.
L'amendement n°33 tend à interdire les audiences foraines et les visioconférences. Mais les premières évitent aux détenus les désagréments d'un transfèrement, et les secondes sont indispensables dans le cas des demandes d'asile déposées outre-mer, étant donné le délai très court dans lequel les audiences doivent avoir lieu. Il est impossible de statuer en 72 heures sans visioconférence sur une demande déposée à Mayotte ou en Nouvelle-Calédonie !
D'ailleurs, l'arbre ne doit pas cacher la forêt. La proposition de loi prévoit que l'on ne pourra recourir à la visioconférence qu'« en cas de nécessité tenant à l'éloignement géographique » ; or 97 % des demandes sont déposées dans les zones d'attentes de Roissy et d'Orly et ne sont donc pas concernées. Avis défavorable.
Avis défavorable aux amendements nos23, 34 et 10 rectifié bis, pour les mêmes raisons.
L'amendement n°24 tend à soumettre le recours à la visioconférence au consentement de l'intéressé. Mais cette technique est déjà fréquemment utilisée depuis 2003 dans la procédure pénale sans que le consentement des justiciables soit requis. Certes, la décision du Conseil constitutionnel m'a fait réfléchir. Mais si le droit à un procès équitable et la publicité des débats sont garantis, je ne vois aucune raison de requérir le consentement du demandeur. Il est toujours possible de saisir le Conseil constitutionnel. Mais je rappelle que la visioconférence ne concerne que 3 % des demandeurs !
Avis défavorable à l'amendement n°35, pour les mêmes raisons.
L'amendement n°21 tend à imposer l'ouverture au public des deux salles d'audience. Il est satisfait : la proposition de loi prévoit explicitement que la salle d'audience foraine sera ouverte au public -c'était le sens d'un amendement de Mme Boumediene-Thiery adopté en commission- et cela va de soi pour la visioconférence et les audiences de la CNDA. Pourquoi enfoncer des portes ouvertes ? Retrait.
L'amendement n°11 rectifié bis tend à rendre les décisions de la CNDA susceptibles d'appel devant le Conseil d'État. Ses auteurs proposaient à l'origine de rendre possible un appel devant une cour administrative d'appel, ce qui était tout de même curieux s'agissant des décisions d'une juridiction nationale. D'une manière générale, les décisions des juridictions à compétence nationale, comme les instances nationales des ordres professionnels, ne peuvent faire l'objet que d'un pourvoi en cassation devant le Conseil d'État et non d'un appel. Le Conseil d'État ne juge en appel que les décisions des tribunaux administratifs. Retrait.
L'amendement n°36 est identique au n°11 rectifié bis. En ouvrant la possibilité d'un appel suspensif dans un délai d'un mois, il obligerait à retenir les demandeurs d'asile dans les zones d'attentes pendant un temps considérable. Est-ce vraiment ce que vous souhaitez ? Retrait.
L'amendement n°20 tend à imposer un procès-verbal dans chacune des deux salles d'audience en cas de visioconférence. Cela alourdirait inutilement la procédure. Contrairement à ce qui vaut pour les audiences devant le juge des libertés et de la détention, le consentement du demandeur à la visioconférence n'est pas requis ici. Or le procès-verbal vise essentiellement à assurer que le justiciable est bien consentant. En cassation, le Conseil d'État se prononcera exclusivement sur la décision de la CNDA et il n'est donc pas nécessaire qu'il dispose du procès-verbal de la première audience. Avis défavorable.
M. Éric Besson, ministre. - Après ces commentaires très précis, pertinents et convaincants de M. le rapporteur, je me contenterai d'émettre sans autre explication un avis défavorable à tous les amendements. S'agissant de l'amendement du Gouvernement, déposé tardivement et qui remet en cause l'avis initial de la commission, je remercie M. le rapporteur de son ouverture d'esprit. Les motifs de la requête pourront être exposés sommairement : aucun formalisme ne sera exigé. En outre ? cet amendement est conforme aux recommandations du HCR, ce qui devrait suffire à dissiper les inquiétudes.
L'amendement n°29 n'est pas adopté, non plus que l'amendement n°3 rectifié bis.
Mme Alima Boumediene-Thiery. - Je regrette que le Gouvernement ait déposé son amendement. Il est parfois difficile pour les demandeurs d'asile de motiver leur requête et un document que j'ai sous les yeux indique que le tribunal administratif de Paris, compétent pour l'ensemble du territoire, a pris la fâcheuse habitude de rejeter tous les recours insuffisamment motivés. Les exigences des juges sont devenues très élevées. La suppression de l'obligation de motiver sa requête aurait mis fin à cette discrimination.
Mme Éliane Assassi. - Nous sommes fermement opposés à cet amendement. Le délai de recours, même porté à 72 heures, reste court et les demandeurs d'asile, fragilisés, confinés dans des zones d'attente et soumis à des pressions psychologiques n'ont pas toujours les moyens de rédiger une requête motivée. En outre, certains d'entre eux ne parlent pas français. Pourquoi, chaque fois que l'on observe un progrès, le Gouvernement se sent-il obligé d'instaurer des garde-fous ?
M. François-Noël Buffet. - La commission des lois n'avait pas prévu initialement d'imposer une requête motivée. Mais comme l'a rappelé M. le ministre, le HCR n'y est pas hostile. En outre, il n'est pas toujours avantageux de pouvoir présenter une requête non motivée car on arrive alors à l'audience avec un dossier vide. Le magistrat doit prendre connaissance des faits au pied levé. S'il disposait à l'avance d'informations même sommaires, il pourrait poser les bonnes questions au cours de l'audience et rendre un jugement plus éclairé. L'objectif est de rendre l'audience plus efficace : c'est pourquoi les membres de mon groupe et moi-même voterons l'amendement.
M. Jean Louis Masson. - A la différence de mon collègue Buffet, je ne pense pas que l'obligation de motiver soit un avantage pour les demandeurs d'asile.
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission. - S'il n'y a pas de motivation, la demande sera rejetée !
M. Jean Louis Masson. - Le plus souvent, on a affaire à des recours fantaisistes déposés pour gagner du temps.
Je voterai donc cet amendement car je suis partisan d'un durcissement du droit d'asile. (Exclamations à gauche) Nous devons en finir avec les recours tous azimuts.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. - Ça a le mérite d'être franc !
L'amendement n°40 est adopté.
Mme Alima Boumediene-Thiery. - La règle des 72 heures ne permet pas de répondre à tous les problèmes. Quand la notification arrive à la veille d'un pont de quatre jours, comme l'a à juste titre fait remarquer notre rapporteur à propos de la Pentecôte, ces 72 heures ne servent à rien. Il faut donc exclure de ce délai les week-ends et les jours fériés.
L'amendement n°4 rectifié bis n'est pas adopté.
L'amendement n°7 rectifié bis n'est pas adopté, non plus que les amendements nos 30, 32, 31, 5 rectifié bis, 6 rectifié bis, 8 rectifié bis, 25, 9 rectifié bis, 33, 23, 34, 10 rectifié bis, 24, 35, 21, 11 rectifié bis, 36 et 20.
M. Jean Louis Masson. - (Exclamations sur les bancs du CRC-SPG) Ce débat a démontré qu'il y a d'un côté les élus de l'opposition qui veulent élargir l'accès au droit d'asile et de l'autre ceux de la majorité qui souhaitent améliorer la réglementation.
Je voterai bien entendu cet article mais j'estime qu'il reste beaucoup à faire en matière de droit d'asile car nous avons perdu de vue les principes qu'il recouvrait à l'origine au XIXe siècle. Aujourd'hui, le droit d'asile fait l'objet d'abus flagrants : les trois quarts des demandeurs ne viennent dans notre pays que pour des raisons économiques. En la matière, notre société est infiniment trop laxiste. (Exclamations à gauche)
Mme Éliane Assassi. - N'allez pas trop loin, quand même !
M. Jean Louis Masson. - Je ne vous ai pas interrompue lorsque vous avez - longuement- parlé. Laissez-moi à mon tour m'exprimer, même si ce que je dis ne vous convient pas : nous sommes en démocratie et chacun à le droit de défendre ses opinions !
Le droit d'asile mériterait d'être traité avec plus de cohérence et de rigueur. Il est inconcevable de voir à Calais de prétendus demandeurs errer dans les rues et squatter des terrains. Comme le disait Michel Rocard, notre pays n'a pas vocation à accueillir toute la misère du monde. Avec la croissance exponentielle du chômage et des dépenses sociales, nous avons mieux à faire que d'élargir le droit d'asile ! (Nouvelles exclamations à gauche)
Enfin, le meilleur service que l'on puisse rendre aux immigrés qui séjournent régulièrement est d'être plus sévère à l'égard des immigrés en situation irrégulière, car ils font beaucoup de mal à l'intégration des premiers.
Mme Alima Boumediene-Thiery. - Notre collègue se trompe de débat : il n'est pas question ici du droit d'asile mais de la recevabilité des demandes de droit d'asile. En outre, ce droit est régi par des règles internationales et des conventions que nous avons signés avec d'autres États.
Je regrette que les avancées que nous avions obtenues concernant les 72 heures fassent l'impasse sur les jours fériés et les week-ends et que la motivation devienne obligatoire.
M. Éric Besson, ministre. - C'était déjà le cas !
Mme Alima Boumediene-Thiery. - Certes, mais la commission l'avait supprimée et vous l'avez réintroduite. Ce que nous avions donné d'une main, vous l'avez repris de l'autre. Enfin, plusieurs dispositions de cet article me semblent inconstitutionnelles, notamment tout ce qui touche au droit de la défense, à la publicité des débats et à la présence d'interprètes. Le Conseil constitutionnel l'avait d'ailleurs rappelé.
Pour toutes ces raisons, nous ne voterons pas cet article.
L'article premier, modifié, est adopté.
Article additionnel
M. le président. - Amendement n°22, présenté par Mmes Boumediene-Thiery, Blandin, Voynet, MM. Desessard et Muller.
Après l'article 1er, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le premier alinéa de l'article L. 742-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est ainsi modifié :
1° La première phrase est complétée par les mots : « , et, le cas échéant, s'il formule un recours devant la Cour nationale du droit d'asile dans le délai mentionné à l'article L. 751-2, jusqu'à la décision de la Cour nationale du droit d'asile » ;
2° La seconde phrase est complétée par les mots : « et, le cas échéant, si un recours est formé devant la Cour nationale du droit d'asile, avant la décision de la Cour ».
Mme Alima Boumediene-Thiery. - Il convient d'instituer un recours suspensif pour les cas de refus d'asile à la frontière autres que celui prévu par ce texte.
En vertu de l'article 39 de la directive du 1er décembre 2005 relative aux normes minimales concernant la procédure d'octroi et de retrait du statut de réfugié dans les États membres, directive qui n'est d'ailleurs toujours pas transcrite en droit interne, les autorités françaises sont tenues d'instituer des recours effectifs contre toutes les décisions relatives aux demandes d'asile. Aujourd'hui, les demandes faites en fonction de la procédure « Dublin 2 » ne bénéficient pas de recours suspensif.
Pourtant, dans son dernier rapport relatif aux conditions du droit d'asile en France, la Commission nationale consultative des droits de l'homme affirmait que « tout refus d'entrée sur le territoire entraînant une mesure de refoulement du demandeur d'asile doit être susceptible de recours suspensif devant la juridiction administrative dans un délai raisonnable ».
En outre, dans une recommandation du 18 septembre 1998, le comité des ministres du Conseil de l'Europe a déclaré : « Tout demandeur d'asile s'étant vu refuser le statut de réfugié et faisant l'objet d'une expulsion vers un pays concernant lequel il fait valoir un grief défendable prétendant qu'il serait soumis à la torture ou à des peines ou traitements inhumains ou dégradants doit pouvoir exercer un recours effectif devant une instance nationale ».
Enfin, la France a été, à diverses reprises, condamnée par la Cour européenne pour ce motif. Voilà pourquoi il convient d'instituer un recours suspensif pour tous les cas de refus d'asile à la frontière.
M. Jean-René Lecerf, rapporteur. - Cet amendement tend à rendre suspensifs les recours formés devant la Cour nationale du droit d'asile contre les décisions de l'Ofpra prises selon la procédure dite prioritaire, qui s'applique aux demandeurs d'asile ayant la nationalité d'un pays d'origine sûre. Supprimer le caractère non suspensif du recours retirerait pratiquement à la procédure prioritaire tout son intérêt. En outre, l'absence de délai suspensif ne prive pas le recours d'effectivité. L'étranger débouté n'est pas dans la même situation que l'étranger à la frontière. La décision d'éloignement est une décision distincte qui est susceptible d'un recours suspensif lorsque l'étranger est en rétention.
Enfin, la proposition de loi ne traite pas de ce sujet. C'est pourquoi je suis défavorable à cet amendement.
M. Éric Besson, ministre. - Avis défavorable pour les mêmes raisons.
L'amendement n°22 n'est pas adopté.
Article 2
L'article L. 731-2 du même code est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« La Cour nationale du droit d'asile statue également sur les recours formés contre les décisions de refus d'entrée sur le territoire français au titre de l'asile dans les conditions prévues par l'article L. 213-9. »
M. le président. - Amendement n°12 rectifié bis, présenté par M. Charles Gautier et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
Supprimer cet article.
M. Charles Gautier. - Il s'agit d'un amendement de conséquence.
M. Jean-René Lecerf, rapporteur. - Par coordination, avis défavorable.
L'amendement n°12 rectifié bis, repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'article 2 est adopté.
Article 3
L'article L. 733-2 du même code est complété par les mots : « ainsi que celles relevant de l'article L. 213-9 ».
M. le président. - Amendement n°13 rectifié bis, présenté par M. Charles Gautier et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
Supprimer cet article.
M. Charles Gautier. - Amendement de conséquence.
M. le président. - Amendement identique n°37, présenté par Mme Assassi et les membres du groupe CRC-SPG
Mme Éliane Assassi. - Même chose : nous sommes opposés au recours aux ordonnances.
L'amendement n°13 rectifié bis, identique à l'amendement n°37, repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'article 3 est adopté.
Article 4
Le chapitre 7 du titre VII du livre VII du code de justice administrative est abrogé.
M. le président. - Amendement n°14 rectifié bis, présenté par M. Charles Gautier et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
Supprimer cet article.
M. Charles Gautier. - Amendement de conséquence.
L'amendement n°14 rectifié bis, repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'article 4 est adopté.
Article 5
L'article L. 213-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est ainsi modifié :
1° Dans le premier alinéa, les mots : « quarante-huit » sont remplacés par les mots : « soixante-douze » ;
2° Dans le même alinéa, les mots : « , par requête motivée, » sont supprimés ;
3° Dans le septième alinéa, les mots : « quarante-huit » sont remplacés par les mots : « soixante-douze ».
M. le président. - Amendement n°41, présenté par le Gouvernement.
Supprimer le troisième alinéa (2°) de cet article.
M. Éric Besson, ministre. - Amendement de coordination, qui tire les conséquences de l'adoption à l'article premier de l'amendement n°40.
M. Jean-René Lecerf, rapporteur. - Amendement de coordination indispensable, mais la commission reste défavorable sur le fond...
L'amendement n°41 est adopté.
L'article 5, modifié, est adopté.
Article 6
Après l'article L. 213-9 du même code, il est inséré un article L. 213-10 ainsi rédigé :
« Art. L. 213-10. - L'examen tendant à déterminer si une demande d'entrée en France afin de bénéficier du droit d'asile n'est pas manifestement infondée ne peut donner lieu à investigation. »
M. le président. - Amendement n°15 rectifié ter, présenté par M. Charles Gautier et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
Rédiger comme suit le texte proposé par cet article pour l'article L. 213-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile :
« Art. L. 213-10. - L'instruction de la requête présentée en application de l'article L. 213-9 tendant à déterminer si une demande d'entrée en France afin de bénéficier du droit d'asile n'est pas manifestement infondée ne peut donner lieu à d'autres mesures que la communication des pièces et des mémoires entre les deux parties et l'audition de l'intéressé. »
M. Charles Gautier. - L'article 6, adopté par la commission sur proposition du rapporteur, s'inspire d'une réserve d'interprétation du Conseil constitutionnel du 25 février 1992, qui esquisse les contours de la notion de « demande manifestement infondée ». Nous proposons d'être plus précis encore. Selon la jurisprudence du Conseil d'État et du Conseil constitutionnel, cet examen doit se limiter à écarter les demandes ne relevant manifestement pas du droit d'asile et laisser le pouvoir d'appréciation et de vérification à l'Ofpra. Nous n'y voyons pas, comme certains, un risque de détournement massif de la procédure d'asile à la frontière dans le seul but d'entrer et de séjourner illégalement en France...
Nous aurions souhaité préciser encore cette notion mais, à la demande du rapporteur et dans un esprit constructif, nous avons rectifié notre amendement. Sur un sujet aussi délicat, l'important est d'avancer, même à petits pas !
M. Jean-René Lecerf, rapporteur. - Cette proposition va dans le sens de la commission mais est formulée de manière plus habile. Avis favorable.
M. Éric Besson, ministre. - Voyez dans mon avis favorable la preuve que le Gouvernement partage votre esprit constructif !
L'amendement n°15 rectifié ter est adopté.
M. René Garrec. - Unanimité ! Bravo !
L'article n°6, modifié, est adopté.
Article 7
Au deuxième alinéa de l'article L. 222-2 du même code, le mot : « six » est remplacé par le mot : « sept ».
M. le président. - Amendement n°38, présenté par Mme Assassi et les membres du groupe CRC-SPG
Rédiger comme suit cet article :
Le deuxième alinéa de l'article L. 222-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est supprimé.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. - Loin d'être une simple coordination, cet alinéa sanctionne les demandeurs d'asile soupçonnés d'être malhonnêtes et de vouloir à tout prix retarder leur éloignement. C'est ignorer la réalité des zones d'attente, zones de non-droit où les pressions psychologiques, les intimidations, voire les injures et les violences, ne sont pas rares. Les personnes dont l'intégrité physique et mentale a été atteinte sont pourtant celles qui ont le plus de mal à parler, et qui déposent donc tardivement leur demande d'asile... Qui plus est, les conditions de rétention sont inadmissibles : manque d'information sur les droits, refus répétés d'enregistrer des demandes d'asile, obstacles à l'accès des associations, etc.
La France enregistre certes beaucoup de demandes, mais accorde de moins en moins l'asile. Le droit « personnel » à l'asile de jadis n'existe plus ; seul le pays d'origine est désormais pris en compte. La France, comme les autres pays riches, a nourri la misère ; aujourd'hui, l'Europe cherche à gérer les flux migratoires, quitte à aligner sa politique d'asile sur sa politique restrictive d'immigration. A trop vouloir lutter contre la fraude, on finit par sanctionner ceux-là mêmes dont les droits devraient au contraire être protégés !
M. Jean-René Lecerf, rapporteur. - Sans la prorogation automatique du maintien en zone d'attente au-delà du délai de vingt jours -validée par le Conseil constitutionnel et sous le contrôle du juge-, il suffirait de déposer une demande d'asile tardive pour être assuré de n'être pas éloigné du territoire. Si un tel procédé se comprend sur le plan humain, il n'en reste pas moins un détournement de procédure évident. Avis défavorable.
M. Éric Besson, ministre. - Je ne peux vous laisser dire que le droit d'asile n'existe plus.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. - Je n'ai pas dit cela ! Vous avez mal entendu !
M. Éric Besson, ministre. - J'ai rappelé les chiffres.
Votre rapporteur a raison de parler d'un risque de détournement de procédure. Celle qui est en vigueur assure un équilibre entre examen des demandes et lutte contre les manoeuvres dilatoires. Environ 5 800 demandes d'asile sont formulées par des personnes en zone d'attente, mais seulement 3 400 sont immédiates et spontanées, 2 400 tardives. Ne facilitons pas le détournement de procédure. Et si nous portons la prorogation d'office à sept jours au lieu de six actuellement, c'est simplement pour tirer les conséquences de l'allongement du délai de recours de 48 à 72 heures.
L'amendement n°38 n'est pas adopté.
L'article 7 est adopté.
Articles additionnels
M. le président. - Amendement n°16 rectifié bis, présenté par Mme Boumediene-Thiery et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
Après l'article 7, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans le c de l'article L. 712-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, les mots : « , directe et » sont supprimés.
Mme Alima Boumediene-Thiery. - Il convient de mieux définir les conditions d'octroi des protections subsidiaires. La directive de 2004 exige une menace « grave » et « individuelle » mais ne mentionne pas son caractère « direct ». Pourquoi poser une condition supplémentaire dans la loi ? Nous sommes tous d'accord sur la nature de la menace et ce qualificatif est superflu.
M. Jean-René Lecerf, rapporteur. - Le législateur a introduit ce terme en 2003, en transposant la directive par anticipation. Il a entendu écarter les menaces générales, évanescentes. Défavorable.
M. Éric Besson, ministre. - Même avis.
L'amendement n°16 rectifié bis n'est pas adopté.
M. le président. - Amendement n°17 rectifié bis, présenté par Mme Boumediene-Thiery et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
Après l'article 7, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article L. 713-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est abrogé.
Mme Alima Boumediene-Thiery. - Nous voulons supprimer la notion d'asile interne. Aujourd'hui, l'asile peut être refusé si le demandeur peut être en sécurité sur une partie du territoire de son pays d'origine. Certes, la notion existe en droit européen, mais elle n'est jamais invoquée. Ne nous défaussons pas de notre responsabilité d'accueillir des personnes menacées dans leur pays. On refuserait l'asile aux Tamouls au prétexte que le sud du pays est calme ! Les Kurdes seraient également refoulés.
M. Jean-René Lecerf, rapporteur. - Je ne suis pas enthousiasmé par cette notion. Mais elle existe et elle est reconnue dans les textes européens : qu'y pouvons-nous ? La juridiction nationale, je le rappelle, n'a jamais, dans une affaire, estimé que les conditions de l'asile interne étaient remplies.
M. Éric Besson, ministre. - Même avis.
Mme Alima Boumediene-Thiery. - L'interprétation de la marge de manoeuvre par rapport aux directives européennes est à géométrie variable... Et c'est la première fois que j'entends dire qu'il est possible de transposer les directives par anticipation !
L'amendement n°17 rectifié bis n'est pas adopté.
M. le président. - Amendement n°19 rectifié bis, présenté par Mme Boumediene-Thiery et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
Après l'article 7, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans la première phrase du deuxième alinéa de l'article L. 722-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, les mots : « ainsi que, dans les conditions prévues par les » sont remplacés par les mots : « et établit tous les deux ans, conformément aux ».
Mme Alima Boumediene-Thiery. - La liste des pays sûrs doit être réévaluée périodiquement. L'article 30 de la directive du 1er décembre 2005 préconise « d'évaluer à intervalles réguliers de deux ans au maximum la mise en oeuvre de la présente directive ». Or la dernière modification de la liste, en France, remonte au 16 mai 2006. Fixons une règle de réactualisation.
La procédure donne lieu à un contrôle par le Conseil d'État ; celui-ci vérifie que l'inscription sur la liste est justifiée par la réalité politique et sociale du pays. Il a par exemple annulé partiellement la décision du 16 mai 2006 du conseil d'administration de l'Ofpra et refusé l'inscription de la République d'Albanie et de la République du Niger. Imposons une révision au moins tous les deux ans.
M. Jean-René Lecerf, rapporteur. - Je représente le Sénat au conseil d'administration de l'Ofpra, qui se réunit deux ou trois fois par an. Une révision chaque année, c'est-à-dire lors d'un conseil sur deux, serait excessive ; une fois tous les deux ans paraît plus raisonnable. L'amendement poursuit un objectif distinct de l'objet de la proposition : mais qu'en pense le Gouvernement ? Nous nous en remettrons à son avis.
M. Éric Besson, ministre. - Je comprends votre préoccupation sur le fond. Nous veillerons avec l'Ofpra à assurer une réactualisation régulière ; mais il ne serait pas de bonne politique de fixer une périodicité automatique car tout dépend des évolutions dans les pays concernés. Retrait ou rejet.
Mme Alima Boumediene-Thiery. - La situation est compliquée. Nous pourrions prévoir une réévaluation par l'Ofpra au coup par coup, selon l'évolution politique et sociale des pays. Mais cela ne se fera pas ; il faut imposer un calendrier, avec un couperet.
L'amendement n°19rectifié bis n'est pas adopté.
M. le président. - Amendement n°18 rectifié bis, présenté par Mme Boumediene-Thiery et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
Après l'article 7, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans la deuxième phrase du 2° de l'article L. 741-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, après les mots : « s'il veille », sont insérés les mots : « , dans un contexte politique et social stable, ».
Mme Alima Boumediene-Thiery. - Il s'agit cette fois des critères d'inscription sur la liste des pays d'origine sûrs. J'avais déjà évoqué cette question lors de l'examen de la loi de simplification du droit. Le rapporteur, M. Saugey, avait affirmé souhaiter lui aussi « que la liste des pays d'origine sûrs soit arrêtée avec la plus grande prudence ». Il ajoutait : « C'est non pas tant la procédure prioritaire qui doit retenir notre attention que la manière dont ces pays sont déterminés ». Je propose donc d'affiner les critères permettant de qualifier un pays sûr, en nous inspirant de la jurisprudence du Conseil d'État.
Nous souhaitons en conséquence introduire le critère d'un « contexte politique stable », ce que l'article L. 741-4 ne permet pas de bien appréhender. En annulant la décision de l'Ofpra du 16 mai 2006 d'inscrire l'Albanie et le Niger sur la liste des pays d'origine sûrs, le Conseil d'État a jugé qu'en dépit des progrès accomplis, les républiques d'Albanie et du Niger ne présentaient pas, à la date de la décision attaquée, eu égard à l'instabilité du contexte économique et social, les caractéristiques qui justifiaient leur inscription sur la liste des pays d'origine sûrs au sens du deuxième alinéa de l'article L. 741-4.
M. Jean-René Lecerf, rapporteur. - Selon le texte que nous avons examiné en décembre 2003, et que j'avais l'honneur de rapporter, un pays devait être considéré comme sûr s'il respectait les principes de liberté, de démocratie et d'État de droit. La commission, que le Sénat avait suivie, avait proposé de modifier la définition en écrivant, non plus « s'il respecte » mais « s'il veille au respect », cela pour s'assurer de l'effectivité de ce respect.
La commission ne souhaite pas que cette définition soit modifiée, en conformité d'ailleurs avec la décision du Conseil d'État évoquée par Mme Boumediene-Thiery, un autre contexte que politique et social pouvant être en cause. Retrait, sinon rejet.
M. Éric Besson, ministre. - Même avis, pour les mêmes raisons.
L'amendement n°18 rectifié bis n'est pas adopté.
L'article 8 est adopté.
Vote sur l'ensemble
M. Charles Gautier. - Les petits pas ne font pas un chemin commun. Je retiens de ce débat une certaine déception et une certaine confusion. Déception : on aurait pu penser que les quelques avancées du texte seraient confortées et que d'autres seraient actées lors de nos discussions. Nous n'avons rien vu venir, sinon des retours en arrière. Ceux qui espéraient ont dû revenir à la réalité. Confusion aussi, qu'a bien illustrée l'intervention de M. Masson qui a semblé confondre immigration et droit d'asile et oublié de quels cas très particuliers nous débattions. Souhaitant un durcissement des conditions d'entrée des étrangers en France, il votera des deux mains un texte qui nous est par ailleurs présenté comme apportant de nouvelles garanties aux demandeurs d'asile. Les plus durs sont les plus satisfaits... Nous voterons résolument contre.
Mme Gisèle Gautier. - Le groupe UMP se félicite de la discussion de cette proposition de loi technique mais importante, qui unifie le contentieux des demandes d'asile au sein de la CNDA, juridiction spécialisée. Je salue l'excellent travail du rapporteur, qui a permis de renforcer les garanties offertes aux demandeurs d'asile. Le groupe UMP votera le texte de la commission. (Applaudissements à droite)
M. Jean-René Lecerf, rapporteur. - En transférant le contentieux du juge administratif à la CNDA, le texte apporte des garanties supplémentaires aux étrangers.
C'est en 2004 que l'avis de l'Ofpra a remplacé celui du ministre des affaires étrangères : les chiffres sont éloquents ! Le taux d'admission des demandeurs d'asile est passé de 8 % cette année-là à 22 % en 2005 et 2006, puis s'est établi à 44 % en 2007 et à 32 % en 2008. Renforcer la compétence des intervenants ne se traduit pas par une plus grande sélectivité de l'examen des demandes.
D'autres avancées doivent être citées, l'allongement des délais ou encore l'encadrement de l'expression « manifestement infondé ». Ce ne sont peut-être que de petits pas, mais ils vont dans la bonne direction. (Applaudissements à droite)
L'ensemble de la proposition de loi, modifié, est adopté.
Développement économique des outre-mer (Conclusions de la CMP)
M. le président. - L'ordre du jour appelle la discussion des conclusions de la CMP sur le projet de loi pour le développement économique des outre-mer.
Discussion générale
M. Éric Doligé, rapporteur pour le Sénat de la CMP. - La CMP, qui s'est tenue hier, est parvenue à un texte commun, après l'examen du texte par le Sénat le 12 mars puis par l'Assemblée nationale. Certaines modifications apportées par celle-ci ont été maintenues. C'est le cas notamment de l'application à Saint-Pierre-et-Miquelon, Saint-Martin et Saint-Barthélemy de la possibilité de verser un bonus salarial, exonéré d'impôts, de 1 500 euros ; de l'extension de la défiscalisation du logement social à l'accession sociale ; et du fléchage d'une quote-part de la dotation de développement urbain vers les départements d'outre-mer. La CMP a également confirmé la suppression de la taxe sur les jeux en outre-mer créée par le Sénat.
Deux points innovent notablement l'article 32 bis, qui reconnaît l'appartenance des langues créoles au patrimoine national de la France, et les articles 31 bis B et 31 bis C qui permettent au conseil régional de Guadeloupe d'intervenir dans le domaine de la loi, comme le permet l'article 73 de la Constitution.
D'autres ajouts de l'Assemblée nationale ont été, à l'initiative du Sénat, modifiés ou supprimés en CMP. La CMP a ainsi supprimé les déclarations de principe concernant l'importance du secteur de la pêche et de l'agriculture pour le développement endogène des territoires d'outre-mer, ainsi que la possibilité de cumuler les crédits de la ligne budgétaire unique avec la défiscalisation. Sans effet normatif, elles risquaient de poser davantage de problèmes qu'elles n'en résolvaient. Elle a de même supprimé deux dispositions jugées peu pertinentes, le crédit d'impôt créé en faveur des PME qui adhérent à des structures d'accompagnement de projets et la création d'une conférence quinquennale des observatoires des prix et des revenus outre-mer.
Elle est revenue à une rédaction proche de celle du Sénat à l'article 20 ter : les collectivités territoriales d'outre-mer seront informées des projets de défiscalisation antérieurement à leur réalisation et pourront, s'ils nécessitent un agrément du ministre du budget, rendre un avis simple sur leur opportunité.
Cette nouveauté introduite par le Sénat augure d'une meilleure reconnaissance du rôle des collectivités d'outre-mer dans le développement économique de leurs territoires.
La CMP est parvenue à une rédaction consensuelle sur les missions dévolues à la commission nationale d'évaluation des politiques de l'État outre-mer, qui s'intéressera notamment à l'influence du niveau des rémunérations publiques et privées sur les mécanismes de formation des prix.
Enfin, à l'initiative de l'Assemblée nationale, elle a apporté de nombreuses améliorations rédactionnelles, d'harmonisation et de coordination au texte du projet de loi.
Le texte sur lequel nous avons à nous prononcer aujourd'hui constituera un atout pour le développement économique des outre-mer. Il résulte d'une longue concertation et a été sensiblement amélioré au cours de la procédure législative. Il met en place des outils nouveaux, notamment les zones franches d'activités et la défiscalisation du logement social, à même d'insuffler un nouvel élan aux économies ultramarines. Il nous appartiendra de suivre leur mise en oeuvre et de vérifier leur efficacité.
Mais, on l'a rappelé lors de son examen, ce texte ne résout pas l'ensemble des problèmes que rencontrent les outre-mer français. C'est pourquoi d'autres initiatives ont été lancées pour élargir le débat sur l'avenir de l'outre-mer. Telle est la vocation des états généraux de l'outre-mer, ouverts le 18 avril dernier. Le Sénat, lui aussi, participe à la recherche de solutions. La mission commune d'information sur la situation des départements d'outre-mer, présidée par notre collègue Serge Larcher, et dont j'ai l'honneur d'être le rapporteur, contribuera utilement, je l'espère, à cette réflexion globale. (Applaudissements à droite, au centre et au banc des commissions)
Mme Odette Terrade. - Ce texte, examiné selon une procédure d'urgence toute relative, a connu un certain nombre d'évolutions. Le Gouvernement lui a apporté des modifications sensibles, donnant notamment une certaine forme de reconnaissance législative à ce que l'on a appelé l'accord Jacques Bino, ce protocole de fin de conflit négocié en Guadeloupe. Le reste, pour l'essentiel, demeure dans la ligne de la politique menée outre-mer : la plupart des articles ouvrent de nouvelles voies à l'optimisation fiscale -et le souci de recentrage d'une partie du dispositif Pons-Girardin ne doit pas faire illusion. Nous le regrettons.
L'urgence, telle qu'elle s'est manifestée à l'occasion des puissants mouvements sociaux de l'automne dernier en Guyane et de cet hiver en Guadeloupe, en Martinique et à la Réunion, avait, pour la première fois depuis longtemps, donné un relief tout particulier à la discussion de ce texte. Si nous ne sommes en rien d'accord sur les solutions à appliquer au constat de crise sociale profonde que connaissent nos départements et collectivités ultramarins, le fait est que la première lecture avait été l'occasion d'un examen approfondi de nombre de questions. Dans le débat de première lecture, nous nous sommes tenus au plus loin des clichés, des idées reçues, du conformisme satisfait du passé. Le Sénat prenait l'audace ou le courage de dire les choses comme elles étaient, ou comme elles étaient ressenties.
Hélas, le contenu du texte reste terriblement éloigné des attentes des populations et ne répond qu'à la marge aux questions posées par la situation sociale et économique de l'outre-mer. A quand la publication effective des chiffres du sous-emploi dans les départements d'outre-mer, dont nous devions avoir communication depuis l'adoption de la loi Tepa, promulguée en juillet 2007 ?
Ce texte sophistique les dispositifs de défiscalisation, quand bien même il supprime un certain volume de la dépense fiscale découlant des dispositifs d'aide à la construction de logements. La défiscalisation demeure l'arme principale des politiques publiques, l'engagement direct de l'État sur des priorités est affirmé sans que leur soient attribués de moyens, et la régulation budgétaire, pour finir, frappe, comme c'est le cas pour la continuité territoriale. De quoi laisser circonspects.
Notre position de fond n'a pas varié. D'autant moins que, depuis plusieurs semaines, les médias se répandent en reportages apocalyptiques sur les mouvements sociaux qui auraient « écorné » l'image des territoires d'outre-mer : la saison touristique aux Antilles serait quasiment perdue, l'économie de l'ensemble des îles sera gravement touchée...
Mais les faits sont têtus. Alors même que se déroulent des états généraux dont sont absents nombre des acteurs du mouvement social, syndical et culturel ultramarin, c'est l'État lui-même qui peine à faire honneur à ses engagements. Voilà sans doute l'origine de la poursuite, sous des formes diverses, du mouvement social outre-mer.
Nous sommes arrivés à la fin d'un cycle, a-t-on dit. « Nous n'apporterons pas de réponses appropriées si nous nous contentons d'accumuler des annonces financières et techniques. » C'est à l'aune de cette appréciation qu'il conviendrait de concevoir un texte prenant mieux en compte les réalités ultramarines, les blocages et les handicaps, les potentiels et les capacités. Nous ne sommes pas au bout du travail. Nous espérons donc beaucoup de la mission d'information. Pour l'heure, en cohérence avec l'expression des mouvements sociaux, avec l'affirmation grandissante de la personnalité de chacun de nos territoires ultramarins, nous ne pouvons donc que confirmer notre rejet du texte en votant contre les conclusions de la commission mixte paritaire.
M. Daniel Marsin. - Ce texte va enfin connaître son aboutissement. Pendant deux longues années, il a été maintes fois remanié, repensé, et restructuré.
Lors de sa première lecture devant notre Haute assemblée, au mois de mars, la Guadeloupe était plongée dans une crise profonde, qui s'est étendue ensuite à la Martinique et à La Réunion. Cette crise, qui a certes perturbé le fonctionnement de nos sociétés ultramarines, a eu le mérite de révéler à toute la communauté nationale le malaise qui s'est emparé de nos compatriotes en proie aux dysfonctionnements dans tous les compartiments de la vie. Elle a permis aussi de mieux faire comprendre les fondements de nos propositions de parlementaires, dont la justesse n'est pas toujours perçue au sein des institutions nationales...
Nos compatriotes veulent que les choses changent, et je vois que le changement est train de s'opérer ! J'ai le sentiment, monsieur le ministre, que le Gouvernement a entendu ce cri du coeur mais aussi de la raison, appelant à plus de transparence dans les pratiques, plus de lisibilité dans les politiques publiques, plus de visibilité sur l'avenir.
Le texte de la CMP contient les premiers éléments qui vont dans le sens de ce changement. Tout d'abord, sur le pouvoir d'achat. Le Parlement, en particulier notre Haute assemblée, a pour l'essentiel perçu le message des forces sociales antillaises et réunionnaises, en particulier des Guadeloupéens, en enrichissant le texte de dispositions répondant directement à deux revendications du LKP : le prix des produits de première nécessité -un signal fort pour nos compatriotes- et la téléphonie. Deuxièmement, la mise en place en outre-mer d'accords régionaux ou territoriaux professionnels permettant le versement d'un bonus exceptionnel de 1 500 euros par salarié et par an, bonus non soumis à cotisations sociales, a permis de répondre ponctuellement à la revendication et sortir de la crise. Mais, monsieur le ministre, je m'interroge déjà sur la pérennisation de ce bonus avec l'engagement pour un an des collectivités départementale et régionale et la mise en oeuvre du RSA dans les trois ans.
Le travail du Sénat et de l'Assemblée nationale a permis d'enrichir sensiblement le texte sur le développement économique. En effet, les mécanismes, les champs et les taux d'exonération dans le cadre des zones franches d'activités, et notamment les régimes bonifiés, ont été réajustés pour mieux atteindre l'objectif de renforcement du tissu économique et de croissance de l'emploi salarié. Pour m'y être particulièrement investi, comme nombre de mes collègues, je ne peux que m'en féliciter.
Je voudrais mettre l'accent sur quelques points, en premier lieu, le cas des îles du Sud. Je me suis battu pour défendre les intérêts de ces territoires que sont Marie-Galante, Les Saintes, La Désirade. Plusieurs de mes amendements ont été rejetés. Fort heureusement, l'Assemblée nationale a entendu l'appel des îles du Sud. Avec votre aval, nos collègues députés ont introduit, pour trois ans, des dispositions exceptionnelles en matière d'imposition sur les bénéfices, de taxes foncières et de charges sociales. Je m'en réjouis. Les dispositions retenues offrent un réel bol d'air à ces territoires mais je veux souligner, monsieur le ministre, que, pour reprendre confiance et repartir du bon pied, ces îles ont encore besoin de tout votre soutien. J'ai également quelque satisfaction à acter l'extension des taux bonifiés d'exonération en matière d'impôts et de taxes à certaines communes défavorisées de Guadeloupe et de Martinique.
Mais, en raison de certains critères limitatifs, les communes de Basse-Terre et de Saint-Claude, situées au coeur de la Soufrière, ne peuvent bénéficier de ces dispositions attractives. Or, il faut le dire, Basse-Terre, avec son port fermé depuis des années et son dernier cinéma, le Darbeau, qui va s'éteindre, se meurt lentement.
Mes efforts pour corriger le tir en CMP n'ont pas abouti, mais les pouvoirs publics ne pourront pas faire l'économie d'une réflexion sur cette question.
Je me réjouis, en troisième lieu, que l'agriculture n'ait pas été oubliée, avec une exonération partielle de la taxe foncière sur les propriétés non bâties pour les terres agricoles exploitées. Je me réjouis de cet effort en faveur des agriculteurs, même si j'aurais aimé qu'on aille un peu plus loin en exonérant totalement ces terres, et je veux saluer l'initiative de nos collègues députés, imposant le recensement des exploitations mises en friche depuis au moins trois ans en vue de leur remise en culture.
De même, je veux souligner les mesures préventives en matière de pollution des sols ! Il était temps d'encadrer strictement l'utilisation de substances chimiques nocives sur nos sols afin d'éviter une pollution comme celle que nous connaissons avec l'utilisation du chlordécone.
Il est entendu que la valorisation des terres agricoles nécessitera un plan de développement de l'agriculture, avec des moyens adaptés, dont la responsabilité incombe, pour une bonne part, aux acteurs locaux.
Plus généralement, il est indispensable de préserver l'environnement, sa richesse et ses propriétés. C'est un atout touristique et économique pour notre avenir. Et je voudrais saluer la disposition ajoutée par nos collègues députés, intégrant enfin la pharmacopée des outre-mer.
Enfin, les efforts consentis en faveur des petites entreprises, s'agissant des charges sociales, et en direction des petits hôtels sont de nature à stimuler l'activité économique et la croissance de l'emploi.
Je me réjouis d'ailleurs qu'un de mes amendements, non retenu, ait inspiré nos collègues députés pour rehausser le palier du dispositif bonifié d'exonération de charges sociales à 2,5 Smic au lieu de 2,2 Smic.
Chaque année, lors du vote du projet de loi de finances, nous ne cessions de rappeler l'importance du logement social en outre-mer et de son mode de financement par la LBU ! Pour nous, c'est une nécessité ! La demande est forte, les logements manquent, et leur production est trop lente ! II fallait réagir ! D'ailleurs, le collectif a pointé du doigt ce besoin.
On peut espérer qu'avec la défiscalisation en matière de logements sociaux et les nouvelles dispositions en matière de réhabilitation des logements de plus de vingt ans, la situation va nettement s'améliorer.
J'apprécie les nouvelles dispositions en matière de réhabilitation des logements de plus de vingt ans. Mais je regrette que les députés aient avancé d'un an la date d'extinction du dispositif de défiscalisation « Girardin » pour le logement intermédiaire... C'est là une réelle erreur d'appréciation.
Enfin, concernant la continuité territoriale, le dispositif en vigueur a été amélioré pour répondre davantage aux attentes de certaines catégories de nos compatriotes, notamment en faveur des jeunes et de leur mobilité.
Pour autant, malgré les offres promotionnelles relevées de temps à autre, y compris celles annoncées hier par vous-même, et dont je me réjouis pour la relance d'un tourisme mis à mal ces derniers mois, c'est à une véritable continuité territoriale, passant par un tarif résident, qu'il faut arriver. En ce sens, l'article 26 A, introduit par l'Assemblée nationale, délivre un message fort sur la politique nationale de continuité territoriale qui doit, selon les députés, reposer « sur les principes d'égalité des droits, de solidarité nationale et d'unité de la République » !
Dans le même registre, s'il faut saluer les mesures en faveur des intrants, des extrants et de l'importation des biens d'équipements, il est indéniable que le monopole du transport maritime constitue un autre aspect de la « Pwrofitasyon » car il pèse sur le coût d'acheminement des marchandises, et donc sur le pouvoir d'achat. Ces questions de continuité territoriale seront évoquées dans les états généraux. Et il faudra leur trouver des réponses pertinentes. « La route est longue avant de dormir ».
Ce texte contient de nombreuses et réelles avancées qui peuvent donner un véritable coup de fouet à l'économie ultramarine qui en a désespérément besoin. Ce n'était pas facile, compte tenu des a priori mais aussi des contraintes budgétaires mais, monsieur le ministre, vous vous êtes montré disponible, tout comme vos collaborateurs, pour travailler de concert avec les socio-professionnels, avec les élus locaux et avec nous, parlementaires.
Dans ces conditions, le groupe RDSE ne s'opposera pas à l'adoption du texte de la CMP. La plupart de mes collègues s'abstiendront. Pour ma part, et non sans quelques petits pincements au coeur, mais en toute raison et surtout en responsabilité, je voterai ce texte. (M. Jean-Paul Virapoulé applaudit)
La discussion générale est close.
Discussion des articles
M. le président. - En application de l'article 42, alinéa 12, du Règlement, aucun amendement n'est recevable, sauf accord du Gouvernement et, le Sénat se prononçant avant l'Assemblée nationale, il statue d'abord sur les amendements puis, par un seul vote, sur l'ensemble du texte.
Le vote des articles premier A à premier B est réservé.
Article premier C
I. - Dans les départements et régions d'outre-mer et dans les collectivités de Saint-Pierre-et-Miquelon, Saint-Martin et Saint-Barthélemy, un accord régional ou territorial interprofessionnel, conclu selon les modalités prévues à l'article L. 2232-2 du code du travail et applicable dès 2009, peut permettre de verser un bonus exceptionnel d'un montant maximal de 1 500 € par salarié et par an.
L'accord régional ou territorial interprofessionnel peut prévoir de moduler le montant de ce bonus exceptionnel selon les salariés ; cette modulation ne peut s'effectuer qu'en fonction de la taille de l'entreprise, des secteurs d'activité, du salaire, de la qualification, du niveau de classification, de l'ancienneté ou de la durée de présence dans l'entreprise du salarié. Ce bonus ne peut se substituer à des augmentations de rémunération et à des primes conventionnelles prévues par la convention ou l'accord de branche, un accord salarial, antérieurs, ou par le contrat de travail. Il ne peut non plus se substituer à aucun des éléments de rémunération au sens de l'article L. 242-1 du code de la sécurité sociale et de l'article L. 741-10 du code rural versés par l'employeur ou qui deviennent obligatoires en vertu de règles légales ou de clauses conventionnelles ou contractuelles.
L'accord régional ou territorial interprofessionnel peut renvoyer à un accord de branche ou d'entreprise la fixation du montant du bonus exceptionnel, les critères de versement et de modulation, dans le respect des dispositions de l'alinéa précédent.
Le versement des sommes ainsi déterminées doit intervenir au plus tard le 31 décembre de l'année civile au titre de laquelle les sommes sont dues, en application de l'accord régional interprofessionnel ou de l'accord de branche ou d'entreprise auquel il renvoie.
II. - Sous réserve du respect des conditions prévues au présent article, ce bonus exceptionnel est exclu de l'assiette de toutes les cotisations ou contributions d'origine légale ou conventionnelle rendues obligatoires par la loi, à l'exception des contributions définies aux articles L. 136-2 et L. 137-15 du code de la sécurité sociale et 14 de l'ordonnance n°96-50 du 24 janvier 1996 relative au remboursement de la dette sociale dès 2009 et pour une durée maximale de trois ans.
L'employeur notifie au plus tard le 31 décembre de l'année suivant le versement à l'organisme de recouvrement dont il relève le montant des sommes versées aux salariés en précisant le montant par salarié.
III. - Le II est applicable à Saint-Pierre-et-Miquelon, Saint-Martin et Saint-Barthélemy.
IV. - La perte de recettes pour les organismes de sécurité sociale résultant du I est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
M. Yves Jégo, secrétaire d'État chargé de l'outre-mer. - Levée de gage.
L'amendement n°1, accepté par la commission, est adopté.
Le vote de l'article premier C, modifié, est réservé.
Article premier
I. - Après l'article 44 terdecies du code général des impôts, il est inséré un article 44 quaterdecies ainsi rédigé :
« Art. 44 quaterdecies. - I. - Les bénéfices des entreprises provenant d'exploitations situées en Guadeloupe, en Guyane, en Martinique ou à La Réunion peuvent faire l'objet d'un abattement dans les conditions prévues aux II ou III lorsque ces entreprises respectent les conditions suivantes :
« 1° Elles emploient moins de deux cent cinquante salariés et ont réalisé un chiffre d'affaires annuel inférieur à 50 millions d'euros ;
« 2° L'activité principale de l'exploitation relève de l'un des secteurs d'activité éligibles à la réduction d'impôt prévue à l'article 199 undecies B ou correspond à l'une des activités suivantes : comptabilité, conseil aux entreprises, ingénierie ou études techniques à destination des entreprises ;
« 3° Elles sont soumises soit à un régime réel d'imposition soit à l'un des régimes définis aux articles 50-0 et 102 ter.
« Les conditions prévues aux 1° et 2° s'apprécient à la clôture de chaque exercice au titre duquel l'abattement prévu au premier alinéa est pratiqué. La condition prévue au 3° doit être satisfaite pour chaque exercice au titre duquel cet abattement est pratiqué.
« II. - Les bénéfices mentionnés au I, réalisés et déclarés selon les modalités prévues aux articles 50-0, 53 A, 72, 74 à 74 B, 96 à 100, 102 ter et 103 par les entreprises répondant aux conditions prévues au I, à l'exception des plus-values constatées lors de la réévaluation des éléments d'actifs, font l'objet, dans la limite de 150 000 €, d'un abattement au titre de chaque exercice ouvert à compter du 1er janvier 2008.
« Le taux de l'abattement est fixé à 50 % au titre des exercices ouverts entre le 1er janvier 2008 et le 31 décembre 2014 et respectivement à 40 %, 35 % et 30 % pour les exercices ouverts en 2015, 2016 et 2017.
« III. - La limite et le taux de l'abattement mentionné au II sont majorés dans les cas suivants :
« 1° Pour les bénéfices provenant d'exploitations situées en Guyane, dans les îles des Saintes, à Marie-Galante et à la Désirade, dans les communes de La Réunion définies par l'article 2 du décret n°78-690 du 23 juin 1978 portant création d'une zone spéciale d'action rurale dans le département de La Réunion ;
« 1° bis Pour les bénéfices provenant d'exploitations situées dans des communes de Guadeloupe ou de Martinique, dont la liste est fixée par décret et qui satisfont cumulativement aux trois critères suivants :
« a) Elles sont classées en zone de montagne au sens de la loi n°85-30 du 9 janvier 1985 relative au développement et à la protection de la montagne ;
« b) Elles sont situées dans un arrondissement dont la densité de population, déterminée sur la base des populations légales en vigueur au 1er janvier 2009, est inférieure à 270 habitants par kilomètre carré ;
« c) Leur population, au sens de l'article L. 2334-2 du code général des collectivités territoriales, était inférieure à 10 000 habitants en 2008 ;
« 2° Pour les bénéfices provenant d'exploitations situées en Guadeloupe, en Martinique ou à La Réunion et qui exercent leur activité principale dans l'un des secteurs suivants :
« a) Recherche et développement ;
« b) Technologies de l'information et de la communication ;
« c) Tourisme, y compris les activités de loisirs s'y rapportant ;
« d) Agro-nutrition ;
« e) Environnement ;
« f) Énergies renouvelables ;
« 3° Pour les bénéfices des entreprises provenant d'exploitations situées en Guadeloupe, en Martinique ou à La Réunion lorsque ces entreprises :
« a) Signent avec un organisme public de recherche ou une université, y compris étrangers, une convention, agréée par l'autorité administrative, portant sur un programme de recherche dans le cadre d'un projet de développement sur l'un ou plusieurs de ces territoires si les dépenses de recherche, définies aux a à g du II de l'article 244 quater B, engagées dans le cadre de cette convention représentent au moins 5 % des charges totales engagées par l'entreprise au titre de l'exercice au cours duquel l'abattement est pratiqué ;
« b) Ou bénéficient du régime de transformation sous douane défini aux articles 130 à 136 du règlement (CEE) n°2913/92 du Conseil, du 12 octobre 1992, établissant le code des douanes communautaire, à la condition qu'au moins un tiers du chiffre d'affaires de l'exploitation, au titre de l'exercice au cours duquel l'abattement est pratiqué, résulte d'opérations mettant en oeuvre des marchandises ayant bénéficié de ce régime.
« La limite de l'abattement est fixée à 300 000 €. Le taux de l'abattement est fixé à 80 % au titre des exercices ouverts entre le 1er janvier 2008 et le 31 décembre 2014 et respectivement à 70 %, 60 % et 50 % au titre des exercices ouverts en 2015, 2016 et 2017.
« III bis. - Par dérogation au III, pour les bénéfices provenant des exploitations situées dans les îles des Saintes, à Marie-Galante et à la Désirade, le taux de l'abattement mentionné au dernier alinéa du III est porté à 100 % pour les exercices ouverts entre le 31 décembre 2008 et le 31 décembre 2011.
« IV. - Le bénéfice des abattements mentionnés aux II et III est subordonné :
« 1° A la réalisation de dépenses de formation professionnelle en faveur du personnel de l'exploitation au titre de l'exercice qui suit celui au cours duquel les bénéfices ont fait l'objet d'un abattement. Elles doivent être exposées en faveur des salariés ou des dirigeants en activité à la date de clôture de l'exercice de leur engagement. Pour les entreprises soumises aux obligations prévues aux articles 235 ter D et 235 ter KA, les dépenses retenues sont celles exposées en sus de ces obligations. Les entreprises peuvent s'acquitter de la présente obligation en réalisant les dépenses prévues à l'article L. 6331-19 du code du travail ;
« 2° Au versement d'une contribution au fonds d'appui aux expérimentations en faveur des jeunes créé par la loi n°2008-1249 du 1er décembre 2008 généralisant le revenu de solidarité active et réformant les politiques d'insertion, au titre de l'exercice qui suit celui au cours duquel les bénéfices ont fait l'objet d'un abattement. Ce versement ne peut être inférieur à 20 % de l'ensemble constitué par les dépenses de formation professionnelle et la contribution au fonds d'appui aux expérimentations en faveur des jeunes.
« A défaut de la réalisation de ces deux conditions, la quote-part exonérée est réintégrée au résultat imposable de l'exercice au cours duquel les dépenses auraient dû être exposées. Ces dépenses ne sont pas prises en compte pour l'application des articles 244 quater M et 244 quater P du présent code.
« Ces deux obligations sont cumulatives. Elles doivent représenter ensemble au moins 5 % de la quote-part des bénéfices exonérée en application des abattements mentionnés aux II et III du présent article.
« Le présent IV n'est pas applicable lorsque la quote-part des bénéfices exonérée est inférieure à 500 €.
« IV bis. - Pour les entreprises soumises à l'impôt sur les sociétés, les abattements prévus aux II et III se cumulent avec celui prévu à l'article 217 bis.
« Les abattements prévus aux II et III s'imputent sur les résultats des exploitations déclarés en application de l'article 53 A avant imputation de celui prévu à l'article 217 bis.
« Le cas échéant, les abattements prévus aux II et III et à l'article 217 bis s'imputent sur les résultats des exploitations déclarés en application de l'article 53 A avant réintégration, en application du quatrième alinéa du IV, de la quote-part des bénéfices exonérée au titre de l'exercice précédent.
« La quote-part des bénéfices exonérée au titre d'un exercice, mentionnée au quatrième alinéa du IV, s'entend du seul montant réel de l'abattement imputé en application du II ou du III au titre de cet exercice.
« V. - Lorsqu'elle répond aux conditions requises pour bénéficier du régime prévu aux articles 44 sexies, 44 septies, 44 octies, 44 octies A, 44 nonies, 44 terdecies ou 73 B et du régime prévu au présent article, l'entreprise peut opter pour ce dernier régime dans les six mois qui suivent la publication de la loi n° du pour le développement économique des outre-mer, si elle exerce déjà son activité ou, dans le cas contraire, dans les six mois suivant celui du début d'activité. L'option est irrévocable et emporte renonciation définitive aux autres régimes. Lorsque l'entreprise n'exerce pas cette option dans ce délai, elle bénéficie de plein droit, au terme de la période d'application de l'un de ces autres régimes dont elle bénéficiait, du régime prévu au présent article pour la période restant à courir jusqu'à son terme et selon les modalités qui la régissent.
« VI. - Les obligations déclaratives des entreprises sont fixées par décret. »
II. - Au septième alinéa du I de l'article 72 D et au septième alinéa du I de l'article 72 D bis du même code, les mots : « de l'abattement prévu à l'article 73 B » sont remplacés par les mots : « des abattements prévus aux articles 44 quaterdecies et 73 B ».
III. - A la première phrase du dernier alinéa du II des articles 154 bis et 163 quatervicies et de l'avant-dernier alinéa du 3° du B du I de l'article 200 sexies du même code, après la référence : « 44 undecies », sont insérées les références : «, 44 terdecies et 44 quaterdecies ».
IV. - A la première phrase du second alinéa du a du I de l'article 154 bis-0 A du même code, les mots : « l'abattement prévu à l'article 73 B » sont remplacés par les mots : « les abattements prévus aux articles 44 quaterdecies et 73 B », et après la référence : « 44 undecies », sont insérés le mot et la référence : « et 44 terdecies ».
V. - Le même code est ainsi modifié :
1° A la première phrase du premier alinéa du I de l'article 244 quater B, le mot et la référence : « et 44 duodecies » sont remplacés par les références : «, 44 duodecies, 44 terdecies et 44 quaterdecies » ;
2° Au dernier alinéa du 1 de l'article 170, au premier alinéa du V de l'article 220 decies, au premier alinéa du I des articles 244 quater K, 244 quater N et 244 quater O et au b du IV de l'article 1417, le mot et la référence : « et 44undecies » sont remplacés par les références : «, 44 undecies, 44 terdecies et 44 quaterdecies ».
V bis. - A la première phrase du premier alinéa du I de l'article 220 quinquies du même code, après la référence : « 44 undecies », sont insérées les références : «, 44 terdecies, 44 quaterdecies ».
VI. - A la première phrase du premier alinéa du I de l'article 244 quater G et au premier alinéa du I de l'article 244 quater H du même code, le mot et la référence : « et 44 decies » sont remplacés par les références : «, 44 decies, 44 terdecies et 44 quaterdecies ».
VII. - L'article 244 quater M du même code est ainsi modifié :
1° Au I, le mot et la référence : « et 44 decies » sont remplacés par les références : «, 44 decies, 44 terdecies et 44 quaterdecies » ;
2° Le II est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Les heures de formation correspondant aux dépenses mentionnées au IV de l'article 44 quaterdecies du présent code ne sont pas prises en compte. »
VIII. - L'article 244 quater P du même code est ainsi modifié :
1° Au I, le mot et la référence : « et 44 undecies » sont remplacés par les références : «, 44 undecies, 44 terdecies et 44 quaterdecies » ;
2° Le premier alinéa du III est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Les dépenses mentionnées au IV de l'article 44 quaterdecies ne sont pas prises en compte. »
IX. - Au premier alinéa du 1 du I de l'article 244 quater Q du même code, le mot et la référence : « ou 44 decies » sont remplacés par les références : «, 44 decies, 44 terdecies ou 44 quaterdecies ».
X. - À l'article 302 nonies du même code, après la référence : « 44 decies, », sont insérées les références : « 44 terdecies, 44 quaterdecies, ».
XI. - À la deuxième phrase du deuxième alinéa de l'article L. 131-6 et à la troisième phrase du troisième alinéa du I de l'article L. 136-4 du code de la sécurité sociale, après la référence : « 44 undecies, », sont insérées les références : « 44 terdecies, 44 quaterdecies, ».
XII. - Le présent article s'applique aux exercices clos à compter du 31 décembre 2008. Il cesse de s'appliquer aux exercices ouverts à compter du 1er janvier 2018.
XIII. - La perte de recettes pour l'État résultant du I est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
M. le président. - Amendement n°2, présenté par le Gouvernement.
Supprimer le XIII de cet article.
M. Yves Jégo, secrétaire d'État. - Levée de gage.
L'amendement n°2, accepté par la commission, est adopté.
Le vote de l'article premier, modifié, est réservé.
Article 2
I. - Après l'article 1466 E du code général des impôts, il est inséré un article 1466 F ainsi rédigé :
« Art. 1466 F. - I. - Sauf délibération contraire de la collectivité territoriale ou de l'établissement public de coopération intercommunale doté d'une fiscalité propre prise dans les conditions prévues au I de l'article 1639 A bis, la base nette imposable à la taxe professionnelle des établissements existant au 1er janvier 2009 en Guadeloupe, en Guyane, en Martinique ou à La Réunion ou faisant l'objet d'une création ou d'une extension à compter du 1er janvier 2009 dans ces départements et exploités par des entreprises répondant, au cours de la période de référence mentionnée à l'article 1467 A, aux conditions fixées au I de l'article 44 quaterdecies fait l'objet d'un abattement dans la limite d'un montant de 150 000 € par année d'imposition.
« II. - Le taux de l'abattement mentionné au I est égal à 80 % de la base nette imposable pour la taxe professionnelle due au titre de chacune des années 2009 à 2015 et respectivement à 70 %, 65 % et 60 % de la base nette imposable pour les années d'imposition 2016, 2017 et 2018.
« III. - Le taux de l'abattement mentionné au II est majoré dans les cas suivants :
« 1° Pour les établissements situés en Guyane, dans les îles des Saintes, à Marie-Galante et à la Désirade, dans les communes de La Réunion définies par l'article 2 du décret n° 78-690 du 23 juin 1978 portant création d'une zone spéciale d'action rurale dans le département de La Réunion ;
« 1° bis Pour les établissements situés dans des communes de Guadeloupe ou de Martinique, dont la liste est fixée par décret et qui satisfont cumulativement aux trois critères suivants :
« a) Elles sont classées en zone de montagne au sens de la loi n° 85-30 du 9 janvier 1985 relative au développement et à la protection de la montagne ;
« b) Elles sont situées dans un arrondissement dont la densité de population, déterminée sur la base des populations légales en vigueur au 1er janvier 2009, est inférieure à 270 habitants par kilomètre carré ;
« c) Leur population, au sens de l'article L. 2334-2 du code général des collectivités territoriales, était inférieure à 10 000 habitants en 2008 ;
« 2° Pour les établissements d'entreprises qui exercent leur activité principale dans l'un des secteurs mentionnés au 2° du III de l'article 44 quaterdecies ;
« 3° Pour les établissements relevant d'entreprises mentionnées au 3° du III de l'article 44 quaterdecies.
« Le montant de cet abattement est égal à 100 % de la base nette imposable pour la taxe professionnelle due au titre de chacune des années 2009 à 2015 et respectivement à 90 %, 80 % et 70 % de la base nette imposable pour les années d'imposition 2016, 2017 et 2018.
« IV. - La délibération mentionnée au I porte sur la totalité de la part revenant à chaque collectivité territoriale ou établissement public de coopération intercommunale.
« V. - Pour bénéficier de l'abattement, les contribuables déclarent, chaque année, dans les conditions prévues à l'article 1477, les éléments entrant dans le champ d'application de l'abattement. Cette demande doit être adressée, pour chaque établissement exonéré, au service des impôts dont relève l'établissement.
« VI. - Lorsqu'un établissement réunit les conditions requises pour bénéficier de l'une des exonérations prévues aux articles 1464 A, 1464 B, 1464 D, 1464 I, 1465, 1465 A, 1465 B, 1466 A, 1466 D ou 1466 E et de l'abattement prévu au présent article, le contribuable peut opter pour ce dernier régime. L'option, qui est irrévocable, vaut pour l'ensemble des collectivités territoriales et de leurs établissements publics de coopération intercommunale et doit être exercée dans le délai prévu pour le dépôt, selon le cas, de la déclaration annuelle ou de la déclaration provisoire de taxe professionnelle mentionnées à l'article 1477.
« Lorsqu'un établissement bénéficie au 1er janvier 2009 de l'une des exonérations prévues aux articles 1464 A, 1464 B, 1464 D, 1464 I, 1465, 1465 A, 1465 B, 1466 A, 1466 D ou 1466 E et réunit à cette date les conditions pour bénéficier de l'abattement prévu au présent article, le contribuable peut opter pour ce dernier régime au plus tard dans un délai de deux mois à compter de la promulgation de la loi n° du pour le développement économique des outre-mer. L'option, qui est irrévocable, vaut pour l'ensemble des collectivités territoriales et de leurs établissements publics de coopération intercommunale. À défaut d'option, le contribuable bénéficiera, au terme de l'application de celui de ces régimes dont il bénéficie au 1er janvier 2009, de l'abattement prévu par le présent article, pour la période restant à courir et dans les conditions prévues au II ou au III pour les années concernées.
« VII. - L'abattement ne s'applique pas aux bases d'imposition afférentes aux biens d'équipements mobiliers transférés par une entreprise à partir d'un établissement qui, au titre d'une ou plusieurs des cinq années précédant le transfert :
« a) A donné lieu au versement de la prime d'aménagement du territoire ;
« b) Ou a bénéficié, pour l'imposition des bases afférentes aux biens transférés, de l'exonération prévue, selon le cas, aux articles 1465, 1465 A, 1465 B ou 1466 A, ou de l'abattement prévu au présent article. »
II. - L'article 1466 A du même code est ainsi modifié :
1° Le dernier alinéa du I quater est complété par les mots : « ou de l'abattement prévu à l'article 1466 F » ;
2° Le b du I quinquies A est complété par les mots : « ou de l'abattement prévu à l'article 1466 F ».
III. - À la première phrase du a du 2 du IV de l'article 1639 A ter du même code, la référence : « et 1466 C » est remplacée par les références : «, 1466 C et 1466 F ».
IV. - Au second alinéa du II de l'article 1647 C quinquies du même code, la référence : « 1466 E » est remplacée par la référence : « 1466 F ».
V. - Les entreprises souhaitant bénéficier des dispositions de l'article 1466 F du code général des impôts au titre de l'année 2009 doivent en faire la demande pour chacun de leurs établissements au plus tard dans un délai de deux mois à compter de la promulgation de la présente loi.
VI. - Pour l'application du même article 1466 F aux impositions établies au titre de l'année 2009, les délibérations contraires des collectivités territoriales ou de leurs établissements publics de coopération intercommunale dotés d'une fiscalité propre doivent intervenir au plus tard dans un délai de deux mois à compter de la publication de la présente loi.
VII. - L'État compense, chaque année, les pertes de recettes résultant, pour les collectivités territoriales et les établissements publics de coopération intercommunale dotés d'une fiscalité propre, de l'abattement de taxe professionnelle accordé en application du même article 1466 F.
La compensation est égale au produit obtenu en multipliant la perte de bases résultant, chaque année et pour chaque collectivité territoriale ou établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre, de l'abattement par le taux de la taxe professionnelle appliqué en 2009 dans la collectivité territoriale ou l'établissement public de coopération intercommunale.
Pour les communes qui, au 1er janvier 2009, étaient membres d'un établissement public de coopération intercommunale sans fiscalité propre, le taux voté par la commune au titre de cette année est majoré du taux appliqué au profit de l'établissement public de coopération intercommunale pour 2009.
Pour les établissements publics de coopération intercommunale qui perçoivent pour la première fois à compter du 1er janvier 2009 la taxe professionnelle en lieu et place des communes membres en application de l'article 1609 nonies C ou du II de l'article 1609 quinquies C du même code, la compensation est égale au produit du montant des bases faisant l'objet de l'abattement prévu à l'article 1466 F du code général des impôts par le taux voté par l'établissement public de coopération intercommunale au titre de l'année 2009.
VIII. - À la fin du premier alinéa du 2° du A du II et du premier alinéa du B du II de l'article 154 de la loi n° 2004-809 du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales, les mots : « ainsi que le IV de l'article 26 quater de la loi n° 2007-1824 du 25 décembre 2007 de finances rectificative pour 2007 » sont remplacés par les mots : « , le IV de l'article 70 de la loi n° 2007-1824 du 25 décembre 2007 de finances rectificative pour 2007 ainsi que le VII de l'article 2 de la loi n° du pour le développement économique des outre-mer ».
IX. - Les pertes de recettes pour les collectivités territoriales résultant du I sont compensées à due concurrence par une majoration de la dotation globale de fonctionnement.
X. - Les pertes de recettes pour l'État résultant du IX sont compensées à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
M. le président. - Amendement n°3, présenté par le Gouvernement.
Supprimer les IX et X de cet article.
M. Yves Jégo, secrétaire d'État. - Levée de gage.
L'amendement n°3, accepté par la commission, est adopté.
Le vote de l'article 2, modifié, est réservé.
Article 3
I. - Après l'article 1388 quater du code général des impôts, il est inséré un article 1388 quinquies ainsi rédigé :
« Art. 1388 quinquies. - I. - Sauf délibération contraire de la collectivité territoriale ou de l'établissement public de coopération intercommunale doté d'une fiscalité propre prise dans les conditions prévues au I de l'article 1639 A bis, la base d'imposition à la taxe foncière sur les propriétés bâties des immeubles ou parties d'immeubles rattachés entre le 1er janvier 2009 et le 31 décembre 2018 à un établissement réunissant les conditions requises pour bénéficier de l'abattement prévu à l'article 1466 F fait l'objet d'un abattement dégressif lorsqu'ils sont situés en Guadeloupe, en Guyane, en Martinique ou à La Réunion.
« La délibération porte sur la totalité de la part revenant à chaque collectivité territoriale ou établissement public de coopération intercommunale.
« Cet abattement s'applique aux impositions établies à compter du 1er janvier 2009 ou à compter du 1er janvier de l'année qui suit celle où est intervenu le rattachement à un établissement satisfaisant aux conditions requises, si elle est postérieure.
« Cet abattement cesse de s'appliquer à compter du 1er janvier de l'année suivant celle où les immeubles ou parties d'immeubles ne sont plus rattachés à un établissement réunissant les conditions requises pour bénéficier de l'abattement prévu à l'article 1466 F et au plus tard à compter des impositions établies au titre de 2019.
« II. - Le taux de l'abattement est fixé à 50 % de la base d'imposition à la taxe foncière sur les propriétés bâties due au titre de chacune des années 2009 à 2015 et respectivement à 40 %, 35 % et 30 % de la base d'imposition à la taxe foncière sur les propriétés bâties pour les impositions établies au titre de 2016, 2017 et 2018.
« III. - Le montant de l'abattement mentionné au II est majoré :
« 1° Pour les immeubles ou parties d'immeubles qui remplissent cumulativement les deux conditions suivantes : être rattachés à un établissement satisfaisant aux conditions requises pour bénéficier de l'abattement prévu à l'article 1466 F ; être situés en Guyane, dans les îles des Saintes, à Marie-Galante et à la Désirade, dans les communes de La Réunion définies par l'article 2 du décret n° 78-690 du 23 juin 1978 portant création d'une zone spéciale d'action rurale dans le département de La Réunion ;
« 1° bis Pour les immeubles ou parties d'immeubles situés dans des communes de Guadeloupe ou de Martinique, dont la liste est fixée par décret et qui satisfont cumulativement aux trois critères suivants :
« a) Elles sont classées en zone de montagne au sens de la loi n° 85-30 du 9 janvier 1985 relative au développement et à la protection de la montagne ;
« b) Elles sont situées dans un arrondissement dont la densité de population, déterminée sur la base des populations légales en vigueur au 1er janvier 2009, est inférieure à 270 habitants par kilomètre carré ;
« c) Leur population, au sens de l'article L. 2334-2 du code général des collectivités territoriales, était inférieure à 10 000 habitants en 2008 ;
« 2° Pour ceux situés en Martinique, en Guadeloupe ou à La Réunion et rattachés à un établissement d'une entreprise qui exerce, à titre principal, une activité relevant d'un des secteurs mentionnés au 2° du III de l'article 44 quaterdecies ;
« 3° (Supprimé) ;
« 4° Pour les immeubles situés en Guadeloupe, en Martinique ou à La Réunion et rattachés à un établissement d'une entreprise mentionnée au 3° du III de l'article44 quaterdecies.
« Le taux de cet abattement est fixé à 80 % de la base d'imposition à la taxe foncière sur les propriétés bâties pour les impositions dues au titre de chacune des années 2009 à 2015 et respectivement à 70 %, 60 % et 50 % de la base d'imposition à la taxe foncière sur les propriétés bâties pour les impositions dues au titre de 2016, 2017 et 2018.
« III bis. - Par dérogation au III, pour les immeubles situés dans les îles des Saintes, à Marie-Galante et à la Désirade, le taux de l'abattement mentionné au dernier alinéa du III est porté à 100 % pour les années 2009 à 2011.
« IV. - En cas de changement d'exploitant au cours de la période durant laquelle l'abattement s'applique, le bénéfice de celui-ci est maintenu si le nouvel exploitant réunit les conditions mentionnées au premier alinéa du I.
« V. - Pour bénéficier de cet abattement, le redevable de la taxe adresse avant le 1er janvier de chaque année au titre de laquelle l'abattement est applicable une déclaration au service des impôts du lieu de situation des biens comportant tous les éléments d'identification. Cette déclaration est accompagnée de tous les éléments justifiant de l'affectation de l'immeuble ou de la partie d'immeuble à un établissement réunissant les conditions requises pour bénéficier de l'abattement prévu à l'article 1466 F.
« VI. - Lorsque les conditions requises pour bénéficier de l'une des exonérations prévues aux articles 1383 A, 1383 B, 1383 C, 1383 C bis, 1383 D, 1383 E bis, 1383 F ou 1383 I et de l'abattement prévu au présent article sont réunies, le contribuable peut opter pour l'un ou l'autre de ces régimes. Cette option est irrévocable et vaut pour l'ensemble des collectivités territoriales et des établissements publics de coopération intercommunale.
« L'option pour le présent régime doit être exercée avant le 1er janvier de l'année au titre de laquelle le présent régime prend effet.
« Lorsqu'un contribuable bénéficie au 1er janvier 2009 de l'une des exonérations prévues aux articles 1383 A, 1383 B, 1383 C, 1383 C bis, 1383 D, 1383 E bis, 1383 F ou 1383 I et réunit à cette date les conditions pour bénéficier de l'abattement prévu au présent article, le contribuable peut opter pour ce dernier régime au plus tard dans le délai de deux mois à compter de la promulgation de la loi n° du pour le développement économique des outre-mer. À défaut d'option, le contribuable bénéficie, au terme de l'application de celui de ces régimes dont il bénéficie au 1er janvier 2009, de l'abattement prévu par le présent article, pour la période restant à courir et dans les conditions prévues au II ou au III pour les années concernées. »
II. - Au a du 2 du II de l'article 1639 A quater du même code, après la référence : « 1388 ter, », est insérée la référence : « 1388 quinquies, ».
III. - Pour l'application de l'article 1388 quinquies du même code aux impositions établies au titre de l'année 2009, les délibérations contraires des collectivités territoriales ou de leurs établissements publics de coopération intercommunale dotés d'une fiscalité propre doivent intervenir au plus tard dans un délai de deux mois à compter de la publication de la présente loi.
IV. - L'État compense, chaque année, les pertes de recettes résultant, pour les collectivités territoriales et les établissements publics de coopération intercommunale dotés d'une fiscalité propre, de l'abattement sur la base d'imposition à la taxe foncière sur les propriétés bâties accordé en application de l'article 1388 quinquies du même code.
La compensation versée à chaque collectivité territoriale ou établissement public de coopération intercommunale est égale, chaque année, au produit du montant de l'abattement mentionné au I de l'article 1388 quinquies du même code par le taux de la taxe foncière sur les propriétés bâties voté par la collectivité territoriale ou l'établissement public de coopération intercommunale au titre de 2009.
Pour les communes qui appartiennent à un établissement public de coopération intercommunale sans fiscalité propre, le taux voté par la commune au titre de 2009 est majoré du taux appliqué la même année au profit de l'établissement public de coopération intercommunale.
Pour les communes qui appartiennent à un établissement public de coopération intercommunale soumis aux dispositions du I de l'article 1609 nonies C du même code à compter du 1er janvier 2010, le taux voté par la commune au titre de 2009 est majoré du taux voté au titre de la même année par l'établissement public de coopération intercommunale. Toutefois, pour les établissements publics de coopération intercommunale qui font application des dispositions du II du même article 1609 nonies C à compter du 1er janvier 2010, la compensation est calculée à partir du taux voté au titre de l'année 2009 par l'établissement public de coopération intercommunale.
V. - (Supprimé).
VI. - Dans le cas où la réduction de la taxe foncière sur les propriétés bâties prévue à l'article 1388 quinquies du code général des impôts s'applique sur un immeuble ou une fraction d'immeubles loué, le bailleur déduit le montant de l'avantage fiscal obtenu en application de cet article du montant des loyers, si ce montant de loyers n'intègre pas déjà cette réduction.
VII. - Les pertes de recettes pour les collectivités territoriales résultant du I sont compensées à due concurrence par une majoration de la dotation globale de fonctionnement.
VIII. - Les pertes de recettes pour l'État résultant du VII sont compensées à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
M. le président. - Amendement n°4, présenté par le Gouvernement.
Supprimer les VII et VIII de cet article.
M. Yves Jégo, secrétaire d'État. - Levée de gage.
L'amendement n°4, accepté par la commission, est adopté.
Le vote de l'article 3, modifié, est réservé ainsi que le vote des articles 3bis à 5A.
Article 5
I. - L'article 199 undecies B du code général des impôts est ainsi modifié :
A. - Le I est ainsi modifié :
1° Le d est abrogé ;
2° Le h est ainsi rédigé :
« h) La navigation de croisière, la réparation automobile, les locations sans opérateurs, à l'exception de la location directe de navires de plaisance ou au profit des personnes physiques utilisant pour une durée n'excédant pas deux mois des véhicules automobiles mentionnés au premier alinéa de l'article 1010 ; »
2° bis Le quinzième alinéa est complété par deux phrases ainsi rédigées :
« La réduction d'impôt ne s'applique pas à l'acquisition de véhicules de tourisme qui ne sont pas strictement indispensables à l'activité de l'exploitant. Les conditions d'application de la phrase précédente sont fixées par arrêté du ministre chargé du budget et du ministre chargé de l'outre-mer. » ;
3° Le dix-septième alinéa est ainsi modifié :
a) À la première phrase, les mots : « hors taxes » sont remplacés par les mots : «, hors taxes et hors frais de toute nature, notamment les commissions d'acquisition, à l'exception des frais de transport, d'installation et de mise en service amortissables, » ;
b) Après la première phrase, sont insérées deux phrases ainsi rédigées :
« Les projets d'investissement comportant l'acquisition, l'installation ou l'exploitation d'équipements de production d'énergie renouvelable sont pris en compte dans la limite d'un montant par watt installé fixé par arrêté conjoint des ministres chargés du budget, de l'outre-mer et de l'énergie pour chaque type d'équipement. Ce montant prend en compte les coûts d'acquisition et d'installation directement liés à ces équipements. » ;
b bis) À la deuxième phrase, les mots : « Ce taux » sont remplacés par les mots : « Le taux de la réduction d'impôt » ;
c) La troisième phrase est supprimée ;
4° Le dix-huitième alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Le bénéfice de cette mesure est accordé à l'exploitant lorsqu'il prend en charge ces travaux. » ;
5° Le vingtième alinéa est complété par deux phrases ainsi rédigées :
« Toutefois, en cas d'acquisition d'un immeuble à construire ou de construction d'immeuble, la réduction d'impôt prévue au premier alinéa est pratiquée au titre de l'année au cours de laquelle les fondations sont achevées. Si l'immeuble n'est pas achevé dans les deux ans suivant la date à laquelle les fondations sont achevées, la réduction d'impôt pratiquée fait l'objet d'une reprise au titre de l'année au cours de laquelle intervient le terme de ce délai. » ;
6° Le vingt-deuxième alinéa est complété par deux phrases ainsi rédigées :
« Cette fraction non utilisée constitue au profit de l'entreprise une créance sur l'État d'égal montant. Cette créance est inaliénable et incessible, sauf dans les conditions prévues par les articles L. 313-23 à L. 313-35 du code monétaire et financier. » ;
7° (Supprimé);
8° À la première phrase du vingt-sixième alinéa et au vingt-neuvième alinéa, les mots : « quatorzième à dix-septième » sont remplacés par les mots : « quinzième à dix-huitième » ;
8° bis Le vingt-sixième alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Lorsque l'entreprise locataire cesse son activité dans le délai mentionné à la troisième phrase du présent alinéa, la reprise de la réduction d'impôt est limitée aux trois quarts du montant de cette réduction d'impôt. » ;
8° ter Le vingt-sixième alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Il n'est pas procédé à la reprise mentionnée à la troisième phrase du présent alinéa lorsque, en cas de défaillance de l'entreprise locataire, les biens ayant ouvert droit à la réduction d'impôt sont donnés en location à une nouvelle entreprise, qui s'engage à les maintenir dans l'activité pour laquelle ils ont été acquis ou créés pendant la fraction du délai de cinq ans restant à courir dans les conditions prévues au présent alinéa. » ;
9° Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« Pour les investissements dont la durée normale d'utilisation est égale ou supérieure à sept ans, et qui sont loués dans les conditions prévues au vingt-sixième alinéa du présent I, la réduction d'impôt prévue est applicable lorsque l'entreprise locataire prend l'engagement d'utiliser effectivement pendant sept ans au moins ces investissements dans le cadre de l'activité pour laquelle ils ont été acquis ou créés. » ;
10° À la première phrase du vingt-septième alinéa, après le mot : « s'applique », sont insérés les mots : «, dans les conditions prévues au vingt-sixième alinéa, » ;
11° Le vingt-neuvième alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Les dispositions du dernier alinéa sont applicables ; ».
B. - Le I bis est ainsi modifié :
1° Au 1, les mots : « au dernier alinéa » sont remplacés par les mots : « au vingt-sixième alinéa » ;
2° (Supprimé).
C. - Après le I bis, il est inséré un I ter ainsi rédigé :
« I ter. - Le I s'applique aux équipements et opérations de pose de câbles sous-marins de communication desservant pour la première fois la Guadeloupe, la Guyane, la Martinique, La Réunion, Mayotte, la Polynésie française, Saint-Barthélemy, Saint-Martin, Saint-Pierre-et-Miquelon, les îles Wallis et Futuna, la Nouvelle-Calédonie ou les Terres australes et antarctiques françaises lorsque, parmi les options techniques disponibles pour développer les systèmes de communication outre-mer, le choix de cette technologie apparaît le plus pertinent.
« Le bénéfice de ces dispositions est subordonné au respect des conditions suivantes :
« a) Les investissements mentionnés au premier alinéa du présent I ter doivent avoir reçu l'agrément préalable du ministre chargé du budget et répondre aux conditions prévues aux a à d du 1 du III de l'article 217 undecies ;
« b) Les fournisseurs des investissements éligibles ont été choisis au terme d'une procédure de mise en concurrence préalable au dépôt de la demande d'agrément et ayant fait l'objet d'une publicité ;
« c) À l'occasion de la demande d'agrément mentionnée au a, la société exploitante est tenue d'indiquer à l'administration fiscale les conditions techniques et financières dans lesquelles les opérateurs de communications électroniques déclarés auprès de l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes peuvent, sur leur demande, accéder aux capacités offertes par le câble sous-marin, au départ de la collectivité desservie, ou vers cette collectivité. Le caractère équitable de ces conditions et leur évolution sont appréciés par l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes dans les formes et dans les conditions prévues à l'article L. 36-8 du code des postes et des communications électroniques.
« La réduction d'impôt porte sur la moitié du coût de revient hors taxes et hors frais de toute nature, notamment les commissions d'acquisition, à l'exception des frais de transport de ces équipements et opérations, diminuée du montant des subventions publiques accordées pour leur financement. Le taux de la réduction d'impôt est de 50 %. Pour les équipements et opérations de pose du câble de secours, ce taux est réduit à 25 %. Le montant de l'aide fiscale peut être réduit de moitié au plus, compte tenu du besoin de financement de la société exploitante pour la réalisation de ce projet et de l'impact de l'aide sur les tarifs. » ;
C bis. - Au second alinéa du 1 du II, le montant : « 300 000 € » est remplacé, par deux fois, par le montant : « 250 000 € ».
D. - Le III est ainsi rédigé :
« III. - Les aides octroyées par Mayotte, la Polynésie française, Saint-Barthélemy, Saint-Martin, Saint-Pierre-et-Miquelon, les îles Wallis et Futuna ainsi que la Nouvelle-Calédonie dans le cadre de leur compétence fiscale propre au titre de projets d'investissements sont sans incidence sur la détermination du montant des dépenses éligibles retenues pour l'application des I et I ter. » ;
E. - Au IV, après la référence : « I bis », est insérée la référence : «, I ter » ;
F. - (Supprimé).
II. - Le présent article est applicable aux investissements réalisés entre la date de publication de la présente loi et le 31 décembre 2017.
Restent soumis à l'article 199 undecies B du code général des impôts, dans sa rédaction antérieure à la publication de la présente loi, les investissements pour l'agrément desquels une demande est parvenue à l'administration avant la date de cette publication.
III. - Le C bis du I entre en application à compter du sixième mois suivant la date d'entrée en vigueur de la présente loi.
IV. - La perte de recettes pour l'État résultant du I est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
M. le président. - Amendement n°5, présenté par le Gouvernement.
I. - Rédiger comme suit la première phrase du dernier alinéa du C du I de cet article :
« La base éligible de la réduction d'impôt est égale à la moitié du coût de revient hors taxes et hors frais de toute nature, notamment les commissions d'acquisition, à l'exception des frais de transport de ces équipements et opérations, diminuée du montant des subventions publiques accordées pour leur financement.
II. - Supprimer la troisième phrase du même alinéa.
III. - Compléter ce même alinéa par deux phrases ainsi rédigées :
« Par dérogation aux dispositions du présent I ter, les dispositions du I s'appliquent également aux équipements et opérations de pose des câbles sous-marins de secours, desservant la Guadeloupe, la Guyane, la Martinique, La Réunion, Mayotte, la Polynésie française, Saint-Barthélemy, Saint-Martin, Saint-Pierre-et-Miquelon, les îles Wallis et Futuna, la Nouvelle-Calédonie ou les Terres australes et antarctiques françaises lorsqu'ils respectent les conditions prévues aux troisième, quatrième et cinquième alinéas du présent I ter. La base éligible de la réduction d'impôt est égale au quart du coût de revient hors taxes et hors frais de toute nature, notamment les commissions d'acquisition, à l'exception des frais de transport de ces équipements et opérations, diminué du montant des subventions publiques accordées pour leur financement.
M. Yves Jégo, secrétaire d'État. - Clarifications rédactionnelles.
L'amendement n°5, accepté par la commission, est adopté.
M. le président. - Amendement n°6, présenté par le Gouvernement.
Supprimer le IV de cet article.
M. Yves Jégo, secrétaire d'État. - Levée de gage.
L'amendement n°6, accepté par la commission, est adopté.
Le vote de l'article 5, modifié, est réservé.
Article 6
I. - L'article 217 undecies du code général des impôts est ainsi modifié :
A. - Le I est ainsi modifié :
1° Le premier alinéa est ainsi modifié :
a) À la première phrase, après le mot : « montant », sont insérés les mots : «, hors taxes et hors frais de toute nature, notamment les commissions d'acquisition, à l'exception des frais de transport, d'installation et de mise en service amortissables, » ;
b) Après la première phrase, sont insérées deux phrases ainsi rédigées :
« Pour les projets d'investissement comportant l'acquisition, l'installation ou l'exploitation d'équipements de production d'énergie renouvelable, ce montant est pris en compte dans la limite d'un montant par watt installé fixé par arrêté conjoint des ministres chargés du budget, de l'énergie, de l'outre-mer et de l'industrie pour chaque type d'équipement. Ce montant prend en compte les coûts d'acquisition et d'installation directement liés à ces équipements. » ;
c) Après la deuxième phrase, sont insérées deux phrases ainsi rédigées :
« Toutefois, en cas d'acquisition d'un immeuble à construire ou de construction d'immeuble, la déduction est opérée sur le résultat de l'exercice au cours duquel les fondations sont achevées. Si l'immeuble n'est pas achevé dans les deux ans suivant la date de l'achèvement des fondations, la somme déduite est rapportée au résultat imposable au titre de l'exercice au cours duquel intervient le terme de ce délai. » ;
d) Au début de la troisième phrase, le mot : « Elle » est remplacé par les mots : « La déduction » ;
2° Après le quatrième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« La déduction prévue au premier alinéa s'applique aux investissements mentionnés au I ter de l'article 199 undecies B à hauteur de la moitié de leur coût de revient, hors taxes et hors frais de toute nature, notamment les commissions d'acquisition, à l'exception des frais de transport, diminuée du montant des subventions publiques accordées pour leur financement, lorsque les conditions prévues à ce même I ter sont satisfaites. Pour les équipements et opérations de pose du câble de secours mentionnés à ce même I ter, la déduction s'applique aux investissements à hauteur du quart de leur coût de revient, évalué dans les conditions prévues à la phrase précédente. Le montant de l'aide fiscale peut être réduit de moitié au plus, compte tenu du besoin de financement de la société exploitante pour la réalisation de ce projet et de l'impact de l'aide sur les tarifs. » ;
2° bis Au huitième alinéa, les mots : « sixième et septième » sont remplacés par les mots : « septième et huitième » ;
2° ter À la seconde phrase du douzième alinéa, le mot : « huitième » est remplacé par le mot : « neuvième » ;
3° Au dernier alinéa, les mots : « quatorzième à dix-huitième » sont remplacés par les mots : « quinzième à dix-neuvième » et le mot : « quatorzième » est remplacé par le mot : « quinzième » ;
3° bis Le dernier alinéa est ainsi complété :
« Les sommes déduites ne sont pas rapportées lorsque, en cas de défaillance de l'entreprise locataire, les biens ayant ouvert droit à déduction sont donnés en location à une nouvelle entreprise, qui s'engage à les maintenir dans l'activité pour laquelle ils ont été acquis ou créés pendant la fraction du délai de cinq ans restant à courir, sous réserve que la condition mentionnée au dix-neuvième alinéa demeure vérifiée. » ;
4° Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« Pour les investissements dont la durée normale d'utilisation est au moins égale à sept ans, les quinzième à vingtième alinéas sont applicables lorsque l'entreprise locataire prend l'engagement d'utiliser effectivement pendant sept ans au moins ces investissements dans le cadre de l'activité pour laquelle ils ont été acquis ou créés. » ;
B. - (Supprimé).
B bis. - Au deuxième alinéa du II quater, le montant : « 300 000 € » est remplacé par le montant : « 250 000 € » ;
B ter. - Le 3 du III est ainsi rédigé :
« 3. Toutefois, les investissements mentionnés au I dont le montant total n'excède pas 250 000 € par programme et par exercice sont dispensés de la procédure d'agrément préalable lorsqu'ils sont réalisés par une entreprise qui exerce son activité dans les départements visés au I depuis au moins deux ans, dans l'un des secteurs mentionnés au premier alinéa du 1 du présent III. Il en est de même lorsque ces investissements sont donnés en location à une telle entreprise. L'entreprise propriétaire des biens ou qui les a acquis en crédit-bail joint à sa déclaration de résultat un état récapitulatif des investissements réalisés au cours de l'exercice et au titre desquels la déduction fiscale est pratiquée.
« Les dispositions du premier alinéa ne s'appliquent pas au secteur des transports, à l'exception des véhicules neufs de moins de sept places acquis par les entreprises de transports publics de voyageurs et affectés de façon exclusive à la réalisation desdits transports lorsque les conditions de transport sont conformes à un tarif réglementaire. » ;
C. - Le premier alinéa du IV bis est ainsi rédigé :
« Le montant de la déduction prévue par le présent article n'est pas pris en compte pour le calcul des abattements prévus aux articles 44 quaterdecies et 217 bis. » ;
D. - Au V, la référence : « n° 2003-660 du 21 juillet 2003 de programme pour l'outre-mer » est remplacée par la référence : « n° du pour le développement économique des outre-mer » ;
E. - (Supprimé).
II. - Le présent article est applicable aux investissements réalisés entre la date de publication de la présente loi et le 31 décembre 2017.
Restent soumis à l'article 217 undecies du code général des impôts, dans sa rédaction antérieure à la publication de la présente loi, les investissements pour l'agrément desquels une demande est parvenue à l'administration avant la date de cette publication.
Les B bis et B ter du I entrent en application à compter du sixième mois suivant la date d'entrée en vigueur de la présente loi.
III. - La perte de recettes pour l'État résultant du a) du 1° du A du I est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
IV.- La perte de recettes pour l'État résultant du 3° bis est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
M. le président. - Amendement n°7, présenté par le Gouvernement.
I. - Dans la première phrase du second alinéa du 2° du A du I de cet article, après les mots :
investissements mentionnés au
insérer les mots :
premier alinéa du
II. - Rédiger comme suit la deuxième phrase du même alinéa :
Pour les équipements et opérations de pose du câble de secours mentionnés au dernier alinéa de ce même I ter, la déduction s'applique aux investissements à hauteur du quart de leur coût de revient, sous réserve du respect des conditions prévues à la phrase précédente.
M. Yves Jégo, secrétaire d'État. - Amendement rédactionnel qui tire les conséquences de ceux que nous venons d'adopter.
L'amendement rédactionnel n°7, accepté par la commission, est adopté.
M. le président. - Amendement n°8, présenté par le Gouvernement.
Supprimer les III et IV de cet article.
M. Yves Jégo, secrétaire d'État. - Levée de gages.
L'amendement n°8, accepté par la commission est adopté.
Le vote de l'article 6, modifié, est réservé, ainsi que le vote des articles 7 et 7ter A.
Article 7 ter
I. - Le vingt-sixième alinéa du I de l'article 199 undecies B du code général des impôts est complété par deux phrases ainsi rédigées :
« L'octroi de la réduction d'impôt prévue au premier alinéa est subordonné au respect par les entreprises réalisant l'investissement et, le cas échéant, les entreprises exploitantes, de leurs obligations fiscales et sociales et de l'obligation de dépôt de leurs comptes annuels selon les modalités prévues aux articles L. 232-21 à L. 232-23 du code de commerce à la date de réalisation de l'investissement. Sont considérés comme à jour de leurs obligations fiscales et sociales les employeurs qui, d'une part, ont souscrit et respectent un plan d'apurement des cotisations restant dues et, d'autre part, acquittent les cotisations en cours à leur date normale d'exigibilité. Pour l'application de la première phrase du présent alinéa en Nouvelle-Calédonie et en Polynésie française, les références aux dispositions du code de commerce sont remplacées par les dispositions prévues par la réglementation applicable localement. »
II. - Après le IV bis de l'article 217 undecies du même code, il est ajouté un IV ter ainsi rédigé :
« IV ter. - La déduction prévue aux I, II, II bis ou II ter est subordonnée au respect par les sociétés réalisant l'investissement ou la souscription et, le cas échéant, les entreprises exploitantes, de leurs obligations fiscales et sociales et de l'obligation de dépôt de leurs comptes annuels selon les modalités prévues aux articles L. 232-21 à L. 232-23 du code de commerce à la date de réalisation de l'investissement ou de la souscription.
« Pour l'application du précédent alinéa en Nouvelle-Calédonie et en Polynésie française, les références aux dispositions du code de commerce sont remplacées par les dispositions prévues par la réglementation applicable localement. »
M. le président. - Amendement n°9, présenté par le Gouvernement.
I. - Après le deuxième alinéa du II de cet article, insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Sont considérés comme à jour de leurs obligations fiscales et sociales les employeurs qui, d'une part, ont souscrit et respectent un plan d'apurement des cotisations restant dues et, d'autre part, acquittent les cotisations en cours à leur date normale d'exigibilité.
II. - En conséquence, dans le dernier alinéa du même II, remplacer le mot :
précédent
par le mot :
premier
M. Yves Jégo, secrétaire d'État. - Amendement de précision qui répare un oubli de la commission mixte paritaire.
L'amendement n°9, accepté par la commission, est adopté.
Le vote de l'article 7 ter, modifié, est réservé, ainsi que celui des articles 8 à 19 ter.
Article 20
I. - L'article 199 undecies A du code général des impôts est ainsi modifié :
1° (Supprimé) ;
2° Au début du a du 2, avant les mots : « Au prix de revient », sont insérés les mots : « Dans la limite d'une surface habitable comprise entre 50 et 150 mètres carrés et fixée par décret selon le nombre de personnes destinées à occuper à titre principal le logement, » ;
3° À la première phrase du e du 2, le mot : « quarante » est remplacé par le mot : « vingt » ;
3° bis La première phrase du e du 2 est complétée par les mots : «, ainsi qu'au montant des travaux de confortation de logements contre le risque sismique » ;
4° Après le 3, il est inséré un 3 bis ainsi rédigé :
« 3 bis. La réduction d'impôt n'est applicable au titre des investissements mentionnés au a du 2 que lorsque ceux-ci sont réalisés par des personnes physiques pour l'acquisition ou la construction d'une résidence principale en accession à la première propriété au sens du troisième alinéa du I de l'article 244 quater J ainsi que par des personnes physiques dont la résidence principale est visée par un arrêté, une mise en demeure ou une injonction pris en application de l'article L. 511-1 du code de la construction et de l'habitation ou des articles L. 1331-22 et L. 1331-24 du code de la santé publique. » ;
4° bis Le 4 est ainsi rédigé :
« 4. Lorsque le montant des investissements mentionnés aux b, c, d, f, g et h du 2 est supérieur à deux millions d'euros, le bénéfice de la réduction d'impôt est conditionné à l'obtention d'un agrément préalable délivré par le ministre chargé du budget dans les conditions prévues au III de l'article 217 undecies. » ;
5° Le 6 est ainsi rédigé :
« 6. La réduction d'impôt est effectuée, pour les investissements mentionnés au a du 2, pour le calcul de l'impôt dû au titre de l'année d'achèvement de l'immeuble ou de son acquisition si elle est postérieure, et des neuf années suivantes. Pour les investissements visés aux b, c, d, f, g et h du 2, elle est effectuée pour le calcul de l'impôt dû au titre de l'année d'achèvement de l'immeuble ou de son acquisition si elle est postérieure, ou de la souscription des parts ou actions, et des quatre années suivantes. Pour les investissements visés au e du même 2, elle est effectuée pour le calcul dû au titre de l'année d'achèvement des travaux et des quatre années suivantes. Chaque année, la base de la réduction est égale, pour les investissements mentionnés au a du 2, à 10 % des sommes effectivement payées au 31 décembre de l'année au cours de laquelle le droit à réduction d'impôt est né et, pour les investissements visés aux b, c, d, e, f, g et h du 2, à 20 % des sommes effectivement payées au 31 décembre de l'année au cours de laquelle le droit à réduction d'impôt est né.
« La réduction d'impôt est égale à 25 % de la base définie au premier alinéa du présent 6 pour les investissements mentionnés aux a et e du 2.
« La réduction d'impôt est égale à 40 % de la base définie au premier alinéa du présent 6 pour les investissements mentionnés aux b, c et d du 2 et à 50 % de la même base pour les investissements mentionnés aux f, g et h du 2.
« Pour les investissements mentionnés aux b, c et d du 2, la réduction d'impôt est portée à 50 % si les conditions suivantes sont réunies :
« 1° Le contribuable ou la société s'engage à louer nu l'immeuble dans les six mois de son achèvement ou de son acquisition si elle est postérieure et pendant six ans au moins à des personnes qui en font leur habitation principale. En cas de souscription au capital de sociétés visées aux c et d du 2, le contribuable s'engage à conserver ses parts ou actions pendant au moins six ans à compter de la date d'achèvement des logements ou de leur acquisition si elle est postérieure ;
« 2° Le loyer et les ressources du locataire n'excèdent pas des plafonds fixés par décret.
« Toutefois, pour les investissements réalisés dans les départements d'outre-mer et la collectivité départementale de Mayotte mentionnés aux a, b, c, d et e du 2, les taux prévus aux deuxième à quatrième alinéas du présent 6 sont majorés de dix points lorsque le logement est situé dans une zone urbaine sensible définie au 3 de l'article 42 de la loi n° 95-115 du 4 février 1995 d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire.
« En outre, lorsque des dépenses d'équipement de production d'énergie utilisant une source d'énergie renouvelable sont réalisées dans le logement, les taux de la réduction d'impôt visés aux deuxième à quatrième et septième alinéas du présent 6 sont majorés de quatre points. Un arrêté du ministre chargé du budget fixe la nature des dépenses d'équipement qui ouvrent droit à cette majoration. » ;
6° Après le 6, il est inséré un 6 bis ainsi rédigé :
« 6 bis. La réduction d'impôt ne s'applique pas aux investissements mentionnés aux b, c et d du 2 engagés après le 31 décembre 2010.
« Toutefois, la réduction d'impôt s'applique également :
« 1° Aux investissements mentionnés aux b, c et d du 2 engagés entre le 1er janvier 2011 et le 31 décembre 2011. Par dérogation au 6, le taux de la réduction d'impôt est, pour ces investissements, de 30 %. Ce taux est porté à 45 % pour ceux de ces investissements au titre desquels les conditions mentionnées aux 1° et 2° du 6 sont réunies. Les majorations prévues aux deux derniers alinéas du 6 sont, le cas échéant, applicables à ces taux ;
« 2° Au taux de 35 % aux investissements mentionnés aux b, c et d du 2 engagés entre le 1er janvier 2012 et le 31 décembre 2012 et au titre desquels les conditions mentionnées aux 1° et 2° du 6 sont réunies ;
« Au sens du présent 6 bis, sont considérés comme engagés :
« - les investissements mentionnés au b du 2 au titre de logements que le contribuable fait construire ou acquiert neufs ou en l'état futur d'achèvement, dont les permis de construire ont été délivrés ;
« - les investissements mentionnés au c du même 2 correspondant à des souscriptions de parts ou d'actions de sociétés dont l'objet réel est exclusivement de construire des logements neufs dont les permis de construire ont été délivrés ;
« - les investissements mentionnés au d du même 2 correspondant à des souscriptions dont le produit est affecté à l'acquisition de logements neufs dont les permis de construire ont été délivrés.
« La réduction d'impôt acquise au titre des investissements mentionnés au présent 6 bis est reprise lorsque les logements acquis ou construits ne sont pas loués au plus tard le dernier jour du trente-sixième mois suivant celui de la délivrance du permis de construire. Le cas échéant, cette date est repoussée d'un délai égal à celui durant lequel les travaux sont interrompus par l'effet de la force majeure ou durant lequel la légalité du permis de construire est contestée par la voie contentieuse. »
II. - L'article 199 undecies C du même code est ainsi rédigé :
« Art. 199 undecies C. - I. - Les contribuables domiciliés en France au sens de l'article 4 B peuvent bénéficier d'une réduction d'impôt sur le revenu à raison de l'acquisition ou de la construction de logements neufs dans les départements d'outre-mer, à Saint-Pierre-et-Miquelon, à Mayotte, en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française, à Saint-Martin, à Saint-Barthélemy et dans les îles Wallis et Futuna si les conditions suivantes sont réunies :
« 1° Les logements sont donnés en location nue, dans les six mois de leur achèvement ou de leur acquisition si elle est postérieure et pour une durée au moins égale à cinq ans, à un organisme d'habitations à loyer modéré mentionné à l'article L. 411-2 du code de la construction et de l'habitation, à l'exception des sociétés anonymes coopératives d'intérêt collectif pour l'accession à la propriété, à une société d'économie mixte exerçant une activité immobilière outre-mer, à un organisme mentionné à l'article L. 365-1 du même code ou, dans les collectivités d'outre-mer, à tout organisme de logement social agréé conformément à la réglementation locale par l'autorité publique compétente ;
« 2° Les logements sont donnés en sous-location nue ou meublée par l'organisme mentionné au 1° du présent I et pour une durée au moins égale à cinq ans à des personnes physiques qui en font leur résidence principale et dont les ressources n'excèdent pas des plafonds fixés par décret en fonction du nombre de personnes destinées à occuper à titre principal le logement et de la localisation de celui-ci ;
« 3° Le montant des loyers à la charge des personnes physiques mentionnées au 2° ne peut excéder des limites fixées par décret en fonction notamment de la localisation du logement ;
« 4° Les logements peuvent être spécialement adaptés à l'hébergement de personnes âgées de plus de soixante-cinq ans ou de personnes handicapées auxquelles des prestations de services peuvent être proposées ;
« 5° Une part minimale, définie par décret, de la surface habitable des logements compris dans un ensemble d'investissements portés simultanément à la connaissance du ministre chargé du budget dans les conditions prévues au VII est sous-louée, dans les conditions définies au 2° du présent I, à des personnes physiques dont les ressources sont inférieures aux plafonds mentionnés au 2°, pour des loyers inférieurs aux limites mentionnées au 3°. Un décret précise les plafonds de ressources et de loyers pour l'application du présent 5° ;
« 6° Une fraction, définie par décret, du prix de revient d'un ensemble d'investissements portés simultanément à la connaissance du ministre chargé du budget correspond à des dépenses supportées au titre de l'acquisition d'équipements de production d'énergie renouvelable, d'appareils utilisant une source d'énergie renouvelable ou de matériaux d'isolation. Un arrêté des ministres chargés respectivement du budget, de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'outre-mer fixe la nature des dépenses d'équipements concernées ;
« 7° À l'issue de la période de location mentionnée au 1°, les logements ou les parts ou actions des sociétés qui en sont propriétaires sont cédés, dans des conditions, notamment de prix, définies par une convention conclue entre leur propriétaire et l'organisme locataire au plus tard lors de la conclusion du bail, à l'organisme locataire ou à des personnes physiques choisies par lui et dont les ressources, au titre de l'année précédant celle de la première occupation du logement, n'excèdent pas des plafonds fixés par décret en fonction du nombre de personnes destinées à occuper à titre principal le logement et de la localisation de celui-ci. Pour l'application du présent 7°, et nonobstant le 1° du présent I, la cession des logements et, le cas échéant, des parts ou actions des sociétés mentionnées au IV peut intervenir à l'expiration d'un délai de cinq ans décompté à partir de l'achèvement des fondations. La reprise prévue au 3° du V ne trouve pas à s'appliquer si la location prévue au 1° du présent I prend fin à la suite d'une cession de l'immeuble au profit du preneur conformément au présent 7° ;
« 8° Un montant correspondant au moins à 65 % de la réduction acquise est rétrocédé par le contribuable sous la forme d'une diminution des loyers versés par l'organisme locataire mentionné au 1° et d'une diminution du prix de cession à l'organisme locataire ou, le cas échéant, aux personnes physiques mentionnées au 7°.
« La condition mentionnée au 5° n'est pas applicable aux logements dont la convention mentionnée au 7° prévoit la cession à des personnes physiques à l'issue de la période de location.
« II. - La réduction d'impôt est égale à 50 % d'un montant égal au prix de revient des logements minoré, d'une part, des taxes et des commissions d'acquisition versées et, d'autre part, des subventions publiques reçues. Ce montant est retenu dans la limite de 2 194 € hors taxes par mètre carré de surface habitable et, dans le cas des logements mentionnés au 4° du I, de surface des parties communes dans lesquelles des prestations de services sont proposées. Cette limite est relevée chaque année, au 1er janvier, dans la même proportion que la variation de la moyenne sur quatre trimestres du coût de la construction dans chaque département ou collectivité.
« Un décret peut préciser, en tant que de besoin, la nature des sommes retenues pour l'appréciation du prix de revient mentionné au premier alinéa du présent II.
« Le III de l'article 199 undecies B est applicable aux investissements ouvrant droit à la réduction d'impôt prévue au présent article.
« III. - La réduction d'impôt est accordée au titre de l'année d'achèvement du logement ou de son acquisition si elle est postérieure.
« Lorsque le montant de la réduction d'impôt excède l'impôt dû par le contribuable ayant réalisé l'investissement, le solde peut être reporté, dans les mêmes conditions, sur l'impôt sur le revenu des années suivantes jusqu'à la cinquième inclusivement.
« IV. - La réduction d'impôt est également acquise au titre des investissements réalisés par une société civile de placement immobilier régie par les articles L. 214-50 et suivants du code monétaire et financier ou par toute autre société mentionnée à l'article 8 du présent code dont les parts ou les actions sont détenues, directement ou par l'intermédiaire d'une entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée, par des contribuables domiciliés en France au sens de l'article 4 B, dont la quote-part du revenu de la société est soumise en leur nom à l'impôt sur le revenu. Dans ce cas, la réduction d'impôt est pratiquée par les associés ou membres dans une proportion correspondant à leurs droits dans la société au titre de l'année au cours de laquelle les parts ou actions sont souscrites.
« La réduction d'impôt est acquise, dans les mêmes conditions, au titre des investissements réalisés par une société soumise de plein droit à l'impôt sur les sociétés dont les actions sont détenues intégralement et directement par des contribuables, personnes physiques, domiciliés en France au sens de l'article 4 B. En ce cas, la réduction d'impôt est pratiquée par les associés dans une proportion correspondant à leurs droits dans la société. L'application de cette disposition est subordonnée au respect des conditions suivantes :
« 1° Les investissements ont reçu un agrément préalable du ministre chargé du budget dans les conditions prévues au III de l'article 217 undecies ;
« 2° La société réalisant l'investissement a pour objet exclusif l'acquisition, la construction et la location des logements mentionnés au I du présent article.
« Les associés personnes physiques mentionnés au deuxième alinéa du présent IV ne peuvent bénéficier, pour la souscription au capital de la société mentionnée au même alinéa, des réductions d'impôt prévues aux articles 199 terdecies-0 A et 885-0 V bis et la société mentionnée ne peut bénéficier des dispositions prévues aux articles 217 bis et 217 undecies.
« Le 11 de l'article 150-0 D n'est pas applicable aux moins-values constatées par les associés lors de la cession des titres des sociétés. Le 2° du 3 de l'article 158 ne s'applique pas aux revenus distribués par ces sociétés.
« La réduction d'impôt, qui n'est pas applicable aux parts ou actions dont le droit de propriété est démembré, est subordonnée à la condition que 95 % de la souscription serve exclusivement à financer un investissement pour lequel les conditions d'application du présent article sont réunies. L'associé doit s'engager à conserver la totalité de ses parts ou actions jusqu'au terme de la location prévue au 1° du I du présent article. Le produit de la souscription doit être intégralement investi dans les dix-huit mois qui suivent la clôture de celle-ci.
« V. - La réduction d'impôt fait l'objet d'une reprise au titre de l'année au cours de laquelle :
« 1° Les conditions mentionnées au I ou, le cas échéant, au IV ne sont pas respectées ;
« 2° L'engagement prévu au IV n'est pas respecté ;
« 3° Avant l'expiration de la durée mentionnée au 1° du I, les logements mentionnés au I ou les parts ou actions mentionnées au IV sont cédés ou leur droit de propriété est démembré. Toutefois, aucune remise en cause n'est effectuée lorsque le démembrement de ce droit ou le transfert de la propriété du bien résulte du décès du contribuable ou de l'un des membres du couple soumis à imposition commune et que l'attributaire du bien ou le titulaire de son usufruit s'engage à respecter les engagements prévus, dans les mêmes conditions et selon les mêmes modalités, pour la période restant à courir à la date du décès.
« VI. - La réduction d'impôt prévue au présent article est également ouverte au titre de l'acquisition de logements achevés depuis plus de vingt ans faisant l'objet de travaux de réhabilitation définis par décret permettant aux logements d'acquérir des performances techniques voisines de celles des logements neufs. Dans ce cas, la réduction d'impôt est assise sur le prix de revient des logements majoré du coût des travaux de réhabilitation et minoré, d'une part, des taxes et des commissions d'acquisition versées et, d'autre part, des subventions publiques reçues. La limite mentionnée au II est applicable.
« VII. - Lorsque le montant par programme des investissements est supérieur à deux millions d'euros, le bénéfice de la réduction d'impôt prévue au présent article est conditionnée à l'obtention d'un agrément préalable délivré par le ministre chargé du budget dans les conditions prévues au III de l'article 217 undecies.
« VIII. - Un contribuable ne peut, pour un même logement ou une même souscription de parts ou d'actions, bénéficier à la fois de l'une des réductions d'impôt prévues aux articles 199 undecies A, 199 tervicies ou 199 septvicies et des dispositions du présent article.
« Les dépenses de travaux retenues pour le calcul de la réduction d'impôt prévue au présent article ne peuvent faire l'objet d'une déduction pour la détermination des revenus fonciers.
« IX. - Le présent article est applicable aux acquisitions ou constructions de logements réalisées entre la date de promulgation de la loi n° du pour le développement économique des outre-mer et le 31 décembre 2017. »
II bis. - Le même code est ainsi modifié :
1° (Supprimé)
2° Le c du 1 du 7° de l'article 257 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« de logements neufs dans les conditions fixées par l'article 199 undecies C ou par l'article 217 undecies lorsque les logements sont loués en vue de leur sous-location dans les conditions prévues aux 1°, 2° et 3° du I de l'article 199 undecies C, ainsi que de logements neufs dont la construction est financée à l'aide d'un prêt aidé ou d'une subvention de l'État accordé dans les conditions prévues par les articles R. 372-1 et R. 372-20 à R. 372-24 du code de la construction et de l'habitation. » ;
3° Après le b de l'article 296 ter, il est inséré un c ainsi rédigé :
« c) Les livraisons à soi-même mentionnées au seizième alinéa du c du 1 du 7° de l'article 257, ainsi que les ventes et apports de terrains à bâtir et de logements neufs dans les conditions fixées par l'article 199 undecies C ou par l'article 217 undecies lorsque les logements sont loués en vue de leur sous-location dans les conditions prévues aux 1°, 2° et 3° du I de l'article 199 undecies C ou lorsque ces opérations sont financées à l'aide d'un prêt aidé ou d'une subvention de l'État accordé dans les conditions prévues par les articles R. 372-1 et R. 372-20 à R. 372-24 du code de la construction et de l'habitation. »
II ter. - Après l'article 1594 I bis du même code, il est inséré un article 1594 I quater ainsi rédigé :
« Art. 1594 I quater. - Les conseils généraux des départements d'outre-mer peuvent, sur délibération, exonérer de taxe de publicité foncière ou de droits d'enregistrement les cessions de logements visés au 1° du I de l'article 199 undecies C. »
III. - Après le I de l'article 217 undecies du même code, il est inséré un I bis ainsi rédigé :
« I bis. - La déduction prévue au premier alinéa du I s'applique également aux acquisitions ou constructions de logements neufs situés en Guadeloupe, en Guyane, en Martinique ou à La Réunion si les conditions suivantes sont réunies :
« 1° L'entreprise signe avec une personne physique, dans les six mois de l'achèvement de l'immeuble, ou de son acquisition si elle est postérieure, un contrat de location-accession dans les conditions prévues par la loi n° 84-595 du 12 juillet 1984 définissant la location-accession à la propriété immobilière ;
« 2° L'acquisition ou la construction de l'immeuble a été financée au moyen d'un prêt mentionné au I de l'article R. 331-76-5-1 du code de la construction et de l'habitation ;
« 3° Les trois quarts de l'avantage en impôt procuré par la déduction pratiquée au titre de l'acquisition ou la construction de l'immeuble sont rétrocédés à la personne physique signataire du contrat mentionné au 1° sous forme de diminution de la redevance prévue à l'article 5 de la loi n° 84-595 du 12 juillet 1984 précitée et du prix de cession de l'immeuble. »
III bis. - Le I du présent article, à l'exception de son 4° bis, est applicable aux investissements réalisés à compter de la date de la promulgation de la présente loi.
Toutefois, à la condition que les logements acquis ou construits soient achevés au plus tard le 31 décembre de la deuxième année suivant celle de la promulgation de la présente loi, restent soumis à l'article 199 undecies A du code général des impôts dans sa rédaction antérieure à l'entrée en vigueur de la présente loi :
1° Les investissements mentionnés aux a et b du 2 de cet article au titre de logements que le contribuable fait construire, dont le permis de construire a été délivré avant la promulgation de la présente loi ;
2° Les investissements mentionnés aux a et b du même 2 au titre de logements que le contribuable acquiert neufs ou en l'état futur d'achèvement, dont le permis de construire a été délivré avant la promulgation de la présente loi ou pour lesquels une promesse unilatérale d'achat, une promesse synallagmatique ou un acte d'acquisition a été conclu avant la même date ;
3° Les investissements mentionnés au c du même 2 correspondant à des souscriptions de parts ou d'actions de sociétés dont l'objet réel est de construire des logements dont le permis de construire a été délivré avant la promulgation de la présente loi ;
4° Les investissements mentionnés au d du même 2 correspondant à des souscriptions dont le produit est affecté à l'acquisition de logements dont le permis de construire a été délivré avant la promulgation de la présente loi ;
5° Les investissements portés à la connaissance du ministre chargé du budget en application du 4 de l'article 199undecies A du code général des impôts antérieurement à l'entrée en vigueur de la présente loi.
Le cas échéant, la date d'achèvement mentionnée au deuxième alinéa du présent III bis est repoussée d'un délai égal à celui durant lequel les travaux sont interrompus par l'effet de la force majeure ou durant lequel la légalité du permis de construire est contestée par la voie contentieuse.
Le 4° bis du I du présent article est applicable aux investissements engagés au sens du 6 bis de l'article 199 undecies A du code général des impôts à compter du premier jour du sixième mois suivant la promulgation de la présente loi.
IV. - (Supprimé).
V. - Les pertes de recettes pour l'État résultant du II sont compensées à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
M. le président. - Amendement n°10, présenté par le Gouvernement.
Supprimer le V de cet article.
M. Yves Jégo, secrétaire d'État. - Suppression de gage.
L'amendement n°10, accepté par la commission, est adopté.
Le vote de l'article 20, modifié, est réservé, ainsi que celui de l'article 20 bisA
Article 20 bis
I. - Le I de l'article 199 undecies D du code général des impôts est ainsi modifié :
1° Au 1, le mot et la référence : « et 199 undecies B » sont remplacés par les références : «, 199 undecies B et 199 undecies C » ;
2° et 3° (Supprimés)
4° Après le 3, il est inséré un 3 bis ainsi rédigé :
« 3 bis. Pour l'appréciation de la limite mentionnée au 1, la réduction d'impôt acquise au titre des investissements mentionnés à l'article 199 undecies C ainsi que les reports résultant d'une réduction d'impôt au titre des mêmes investissements sont retenus pour 35 % de leur montant. » ;
5° Le 4 est ainsi rédigé :
« 4. Les fractions des réductions d'impôt et des reports qui ne sont pas retenues en application des 2, 3 et 3 bis peuvent être imputées dans la limite annuelle :
« - d'une fois et demie le montant mentionné au 1 pour la fraction non retenue en application du 2 ;
« - de sept fois le treizième du montant mentionné au 1 pour la fraction non retenue en application du 3 bis ;
« - du montant mentionné au 1 pour la fraction non retenue en application du 3. »
II. - Le 3 de l'article 200-0 A du même code est complété par une phrase ainsi rédigée :
« La réduction d'impôt acquise au titre des investissements mentionnés à l'article 199 undecies C est retenue pour l'application du plafonnement mentionné au 1 du présent article pour 35 % de son montant. »
III. - La perte de recettes pour l'État résultant des I et II est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
M. le président. - Amendement n°11, présenté par le Gouvernement.
Supprimer le III de cet article.
M. Yves Jégo, secrétaire d'État. - Suppression de gage.
L'amendement n°11, accepté par la commission, est adopté.
Le vote de l'article20 bis, modifié, est réservé, ainsi que celui des articles 20 ter à 31 bis C.
Article 31 bis
Après l'article 14-1 de la loi n° 99-944 du 15 novembre 1999 relative au pacte civil de solidarité, il est inséré un article 14-2 ainsi rédigé :
« Art. 14-2. - Les articles 515-1 et 515-2 du code civil sont applicables en Nouvelle-Calédonie et dans les îles Wallis et Futuna. »
M. le président. - Amendement n°12, présenté par le Gouvernement.
Dans le second alinéa de cet article, remplacer les références :
Les articles 515-1 et 515-2
par les références :
Les articles 515-1 à 515-7
M. Yves Jégo, secrétaire d'État. - Le changement de références rend le dispositif pleinement applicable.
L'amendement n°12, accepté par la commission, est adopté.
Le vote de l'article 31 bis, modifié, est réservé, ainsi que celui des articles 31ter à 35.
Vote sur l'ensemble
Mme Michèle André. - Je salue l'excellent climat de la CMP. Je me félicite aussi de la reconnaissance des langues créoles comme part du patrimoine culturel français. C'est symbolique mais important.
Ce projet de loi répondra-t-il à toutes les attentes qu'avait énoncées Georges Patient ? Je crains que non. Aux états généraux de l'outre-mer, Serge Larcher mène, tambour battant, la mission d'information dont M. Doligé est le rapporteur. Nous en reparlerons donc, y compris lors de l'examen de la loi de finances, notamment pour vérifier si les engagements pris ont été tenus.
Monsieur le ministre, je vous demande de porter une attention particulière aux moyens accordés à Mayotte pour y régulariser, enfin, l'état civil.
Par cohérence avec ses positions antérieures, le groupe socialiste s'abstiendra, marquant ainsi sa bonne volonté en même temps que son extrême vigilance. (Applaudissements sur les bancs socialistes)
M. Jean-Paul Virapoullé. - Nous avons tous beaucoup travaillé sur ce texte et je rends hommage au labeur de mes collègues, du Gouvernement et du ministre. Au départ, en pleine crise ultramarine, ce texte était mal parti. Mais M. Jégou a eu le courage d'affronter nos critiques et de recourir à de difficiles arbitrages qu'il a remportés. Ce texte fait honneur au travail parlementaire ; en le votant, nous faisons ce soir oeuvre utile car il rompt, enfin, avec une logique de développement ultramarin jusqu'à présent fondé sur la solidarité européenne et nationale, pour faire confiance à l'outre-mer, avec, notamment les zones franches et les défiscalisations. Loin d'être sacrifiée sur l'autel de la rigueur budgétaire, la politique du logement social est renforcée, ainsi que l'agriculture ; l'économie sucrière sera sauvée grâce à la valorisation de la biomasse.
Au total, cette loi marque un changement de logique économique par rapport à l'outre-mer. Nous devons nous doter d'un moteur de développement interne pour rayonner dans la région et exporter des services vers l'Europe et le monde. C'est le défi de cette loi -qui ne va bien sûr pas tout régler d'un coup. Il n'en reste pas moins qu'en pleine crise, on donne un milliard à l'outre-mer. Ce n'est donc pas une loi au rabais !
J'ai une prière à vous faire ce soir. Je ne demande pas d'argent mais je vous prie de faire en sorte que le XXIe siècle soit celui de l'exploitation des richesses de la mer. Avec nous, la France est la première puissance maritime mondiale ; croyez en nous ! Nous avons des atouts, ils n'ont pas été exploités, ni même expertisés. Qu'ils soient valorisés et l'outre-mer ne tendra plus la main, mais apportera sa contribution à la richesse de la Nation.
En quarante ans, nous avons fait des progrès, mais pas assez contre l'illettrisme. Il faudra expérimenter de nouvelles méthodes d'enseignement, de coopération, d'ouverture au monde, de valorisation des jeunes. Vous verrez alors que les efforts consentis avec cette loi n'auront pas été sans résultats. Valorisez nos atouts et vous verrez que l'outre-mer est une chance pour la France et pour l'Europe ! (Applaudissements au centre et à droite)
Mme Gisèle Gautier. - Ce texte n'est pas une loi de circonstance. Le Gouvernement n'a pas découvert les problèmes de l'outre-mer à l'occasion du grave conflit qui l'a agité : cette loi avait été déposée sur le bureau de notre assemblée bien auparavant. Néanmoins, la crise que nous traversons a été l'occasion d'améliorer et d'enrichir ce texte, dans un sens attendu par nos compatriotes d'outre-mer.
Je tiens à remercier, au nom du groupe UMP, notre rapporteur Éric Doligé, pour la qualité de son travail, très approfondi. Je n'oublie pas le second rapporteur, Marc Massion, ni les rapporteurs pour avis, Anne-Marie Payet, Daniel Marsin et Jean-Paul Virapoullé. Je tiens également à vous féliciter, monsieur le ministre, pour le travail que vous avez accompli à nos côtés et sur le terrain, ainsi que pour la grande écoute dont vous avez fait montre, pour votre sens du dialogue et du compromis. Notre groupe se félicite également de l'esprit constructif et du climat apaisé dans lesquels se sont déroulés nos débats. Grâce à ce travail de fond, la commission mixte paritaire s'est bien déroulée.
Gageons que les solutions apportées permettront d'assurer un meilleur avenir pour les entreprises et les habitants de ces terres éloignées. Les états généraux de l'outre-mer permettront d'aller plus loin encore. La mission commune d'information, que le Sénat a mise en place sur la proposition de l'ensemble de ses groupes politiques, a débuté son travail. Ne serait-ce qu'aujourd'hui, elle a procédé à sept auditions et deux autres sont programmées pour demain. Dans l'attente de ses conclusions, le groupe UMP votera bien évidemment en faveur de ce projet de loi qui va apporter une pierre très importante à l'édifice d'une France d'outre-mer apaisée, à laquelle nous sommes tous très attachés. (Applaudissements sur les bancs UMP)
Mme Odette Terrade. - Le groupe CRC-SPG votera contre mais Mme Hoarau s'abstiendra.
Les conclusions de la CMP sont adoptées.
Prochaine séance, demain, jeudi 7 mai 2009 à 9 heures.
La séance est levée à 19 h 55.
Compte renduanalytique officiel
Mercredi 6 mai 2009
Ici un titre3
Ici un autre titre4
Sommaire
Rappel au Règlement1
Hôpital (Dépôt d'un rapport et du texte de la commission)1
Dépôt d'un rapport1
Asile1
Discussion générale1
Discussion des articles4
Articles additionnels4
Article premier4
SÉANCE
du mercredi 6 mai 2009
96e séance de la session ordinaire 2008-2009
présidence de M. Jean-Léonce Dupont,vice-président
Secrétaires : Mme Michelle Demessine, M. François Fortassin.
La séance est ouverte à 14 h 35.
Le procès-verbal de la précédente séance, constitué par le compte rendu analytique, est adopté sous les réserves d'usage.
Rappel au Règlement
M. Guy Fischer. - La révision constitutionnelle a des conséquences désastreuses sur nos conditions de travail et sur la démocratie parlementaire elle-même. Loin de renforcer les droits du Parlement, elle nourrit la confusion, l'éparpillement et le renforcement du fait majoritaire. Elle détourne le Parlement de sa mission première : faire la loi. L'inflation législative perdure, la précipitation devient la règle. Le travail en commission permet à la majorité de s'ajuster mais ne favorise ni la transparence, ni l'expression de l'opposition.
Ainsi, le projet de loi sur l'hôpital a été examiné quatre jours et deux nuits durant, en catimini, sans public ni journalistes. Rendons publics les travaux de la commission, dira-t-on, mais à quel titre celle-ci remplacerait-elle la séance plénière ? En commission, la majorité s'impose. Les travaux sur l'hôpital ont duré jusqu'à 2 h 45 du matin, avec l'omniprésence du Gouvernement. L'oeil de M. Sarkozy était dans la salle...
M. Jean-René Lecerf. - L'oeil de Moscou ? (Sourires)
M. Guy Fischer. - Les amendements au texte de la commission, qui remanie profondément le projet de loi, doivent être déposés avant demain 16 heures, ce qui interdit tout débat avec les partenaires sociaux sur le nouveau texte, toute concertation de groupe ! L'exposé des motifs de la proposition de résolution du président Larcher modifiant le Règlement précise pourtant que l'adoption du rapport amendé doit intervenir « en principe, sauf dérogation accordée expressément par la Conférence des Présidents en fonction des contraintes de calendrier, au moins deux semaines avant le jour de la séance plénière. » Or on laisse 24 heures aux groupes pour amender le texte de la commission, alors que nous disposons du texte de l'Assemblée depuis deux mois !
Je demande que le délai de dépôt des amendements sur le texte de la commission soit reporté au lundi 11 mai à 17 heures. Le Gouvernement doit également lever l'urgence afin que les députés se prononcent sur un texte qui aura été profondément modifié. Le principe même de la navette, le respect du Parlement l'exigent.
M. le président. - Je vous donne acte de votre intervention.
Hôpital (Dépôt d'un rapport et du texte de la commission)
M. le président. - La commission des affaires sociales a déposé le rapport et le texte qu'elle a élaborés sur le projet de loi portant réforme de l'hôpital et relatif aux patients, à la santé et aux territoires. La commission, qui a effectué un énorme travail avec l'examen de quelque 1 400 amendements, a tenu à publier et à communiquer aux groupes le texte adopté, titre par titre, au fur et à mesure de ses délibérations.
Dépôt d'un rapport
M. le président. - Le président du Sénat a reçu de M. André-Claude Lacoste, président du collège de l'Autorité de sûreté nucléaire, le rapport sur l'état de la sûreté nucléaire et la radioprotection en France en 2008.
Acte est donné du dépôt de ce rapport, qui a été présenté, le 7 avril 2009, aux membres de l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques et sera transmis à la commission des affaires économiques.
Asile
M. le président. - L'ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi relative au transfert du contentieux des décisions de refus d'entrée sur le territoire français au titre de l'asile, présentée par M. François-Noël Buffet.
Discussion générale
M. François-Noël Buffet, auteur de la proposition de loi. - Cette proposition de loi transfère des tribunaux administratifs à la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) le contentieux relatif à l'entrée sur le territoire au titre de l'asile. Créée en 1982, cette procédure a pour but d'autoriser ou de refuser l'admission sur le territoire des étrangers qui sollicitent l'asile à la frontière.
Précédemment prise par le ministre de l'intérieur, la décision d'admission relève aujourd'hui du ministre de l'immigration, qui se prononce sur la base de l'avis rendu par le directeur général de l'Ofpra sur le caractère manifestement infondé ou non de la demande d'asile, avis qui doit être distingué de l'examen de la demande d'asile, laquelle relève de l'Ofpra.
Avant l'entrée en vigueur de la loi du 20 novembre 2007 relative à la maîtrise de l'immigration, à l'intégration et à l'asile, les recours contre les refus n'étaient pas suspensifs, ce que la Cour européenne des droits de l'homme, dans une décision du 26 avril 2007, a jugé contraire aux articles 3 et 13 de la Convention.
La loi du 20 novembre 2007 a donc prévu un recours en annulation suspensif de 48 heures, le magistrat étant tenu de statuer dans les 72 heures. La Commission des recours des réfugiés a également été renommée Cour nationale du droit d'asile, afin de mieux affirmer son caractère juridictionnel et de renforcer son autonomie budgétaire par rapport à l'Ofpra.
Une clarification s'imposait. La CNDA a été rattachée au Conseil d'État et la Cour dispose de dix magistrats permanents. La présente proposition de loi s'inscrit dans ce mouvement général de réforme. Rapporteur de la loi du 20 novembre 2007, je proposais alors le transfert à la CNDA du contentieux des refus d'entrée au titre du droit d'asile, confié aux tribunaux administratifs. C'était à mes yeux une simplification et une rationalisation souhaitables, la CNDA étant une juridiction spécialisée dans les questions d'asile. La commission sur le cadre constitutionnel de la nouvelle politique d'immigration, présidée par M. Pierre Mazeaud, a fait la même recommandation, relevant dans son rapport de juillet 2008 « l'intérêt d'unifier le contentieux des demandeurs d'asile » et de le confier à « un juge spécialisé, plus qualifié en la matière que le juge administratif de droit commun ».
La proposition de loi prévoit ce transfert de compétence. La décision de la CNDA ne serait pas susceptible d'appel, uniquement de cassation devant le Conseil d'État. Les décisions aujourd'hui prises par les tribunaux administratifs sont certes susceptibles d'appel, mais sans caractère suspensif...
Le texte autorise aussi le recours à la visioconférence en cas de nécessité tenant à l'éloignement géographique. Des audiences dites foraines pourront être organisées en zone d'attente. Les demandeurs auront le droit de recourir à un interprète, de se faire assister par un avocat ; le magistrat chargé de statuer pourra le faire par ordonnance.
La commission des lois a repris ces dispositions et notre rapporteur les a améliorées. Les modifications tendent à allonger le délai de recours, simplifier les exigences pesant sur les requêtes et mieux marquer la différence entre le contentieux de l'asile à la frontière et l'examen des demandes au fond. Ces modifications vont dans le bon sens ; elles renforcent les garanties offertes aux demandeurs d'asile. (Applaudissements à droite)
M. Jean-René Lecerf, rapporteur de la commission des lois. - La proposition de loi de M. François-Noël Buffet met en oeuvre d'utiles mesures de simplification et de rationalisation. Cependant, l'extrême sensibilité, dans notre pays, aux questions d'immigration et d'asile ainsi que l'équilibre délicat issu de nos législations successives nous incitent à la vigilance, d'autant que les auditions ont révélé une grande diversité des opinions.
La procédure de l'asile à la frontière, créée en 1982, a pour objet d'autoriser ou non à pénétrer sur le territoire français les étrangers qui se présentent aux frontières démunis des documents requis et demandent à être admis au titre de l'asile. Elle est distincte de la procédure de reconnaissance du statut de réfugié et ne préjuge en aucun cas de l'issue de celle-ci. Le ministre de l'immigration est seul compétent pour prendre la décision d'entrée en France, après avis de l'Ofpra. Le code des étrangers précise que l'étranger peut être maintenu dans une zone d'attente pendant le temps strictement nécessaire à un examen tendant à déterminer si sa demande n'est pas manifestement infondée. Avant 2007, les recours contre les refus d'entrée sur le territoire au titre de l'asile étaient dépourvus d'effet suspensif, ce que la Cour européenne des droits de l'homme a jugé, notre collègue l'a dit, contraire à la Convention européenne des droits de l'homme. Intégrant cette jurisprudence, la loi du 20 novembre 2007 a introduit un recours en annulation suspensif de 48 heures contré le refus d'entrée sur le territoire, le magistrat saisi étant tenu de statuer dans un délai de 72 heures ; et la Commission de recours des réfugiés, juridiction administrative chargée du contrôle des décisions de I'Ofpra, a été renommée Cour nationale du droit d'asile afin de mieux affirmer son caractère juridictionnel et renforcer son autonomie budgétaire -soit dit en passant, il était paradoxal qu'un organisme juridictionnel dépende financièrement d'un établissement public soumis à son contrôle ! La CNDA a été rattachée au Conseil d'État et a pu se doter de magistrats permanents.
M. François-Noël Buffet, lors de l'examen de la loi du 20 novembre 2007, préconisait le transfert du contentieux d'entrée sur le territoire au titre de l'asile du tribunal administratif de Paris à la CNDA. Cette proposition avait été reprise par la commission sur le cadre constitutionnel de la nouvelle politique de l'immigration. La présente proposition de loi vise à mettre en oeuvre ce transfert. Votre rapporteur et la commission des lois se sont penchés sur les avantages et les inconvénients de ce transfert. Trois griefs essentiels ont été exprimés. L'étranger serait privé d'une possibilité d'appel ; mais l'actuel recours devant la Cour administrative d'appel est tout théorique, puisque non suspensif. Autre grief, la CNDA, ultérieurement saisie de la décision de l'Ofpra sur la qualité de réfugié, pourrait se trouver liée par sa décision initiale relative à l'entrée sur le territoire. Les deux contentieux sont cependant bien distincts, l'un portant sur le caractère manifestement infondé de la demande d'entrée, l'autre sur l'appréciation portée au fond par l'Ofpra sur la demande d'asile. Enfin, la CNDA ne serait-elle pas confrontée à une surcharge de tâches, alors que le délai moyen de traitement des recours s'est accru depuis 2003 ? En réalité, 1 000 recours annuels supplémentaires -une base vraisemblable- n'accroîtraient que de 5 % le volume du contentieux. En outre, la Cour a fait, ces dernières années, un effort important pour réduire le « stock » ancien. Enfin, grâce à un amendement de M. Buffet à la loi de simplification et de clarification du droit, la Cour a pu recruter des magistrats administratifs ou judiciaires permanents pour assumer les fonctions de président de section.
Nous estimons donc que les magistrats de la CNDA, du fait de leur expérience et leur spécialisation, seraient plus aptes à juger en urgence du caractère manifestement fondé ou non des demandes d'asile à la frontière. A nos yeux, aucun argument dirimant ne s'y oppose.
La proposition de loi modifie également sur deux points les procédures en vigueur. D'abord, elle maintient la possibilité de visioconférence, en supprimant la possibilité pour l'étranger de s'y opposer mais en posant des conditions plus strictes : seul la justifiera l'éloignement géographique de la zone d'attente. Ainsi, la CNDA siégeant à Montreuil, la visioconférence est exclue s'agissant des étrangers en zone d'attente à Roissy ou Orly, soit dans 97 % des cas. En outre, la salle d'audience dans laquelle se trouverait l'étranger serait la salle d'un tribunal ; il ne pourrait s'agir d'une salle spécialement aménagée dans la zone d'attente. Ensuite, la possibilité est ouverte d'audiences foraines tenues en zone d'attente dans une salle d'audience spécialement aménagée. Mme Martine Denis-Linton, présidente de la CNDA, a indiqué son souhait de pouvoir utiliser la salle située à Roissy.
La commission des lois a voulu, à l'occasion de cette unification du contentieux relatif à l'asile, renforcer les garanties offertes aux demandeurs d'asile. Trois amendements importants ont été adoptés. Le premier porte à 72 heures le délai dans lequel l'étranger peut demander l'annulation de la décision de refus d'entrée : 48 heures ne suffisent pas pour former un recours recevable, en particulier le week-end, car l'association nationale d'assistance aux frontières pour les étrangers n'a pas les moyens d'assurer une permanence. Je rappelle que c'est déjà à l'initiative du Sénat et de sa commission des lois que le délai avait été porté de 24 à 48 heures.
Le deuxième amendement supprime l'exigence d'une requête motivée, lourde pour une procédure en urgence, où l'oralité des débats pourrait tenir une place plus large et éviterait que des requêtes soient écartées par la voie d'ordonnances. Votre commission, dans un troisième amendement, fixe au juge un cadre minimal pour apprécier la notion de « demande manifestement infondée ». Il s'agit de prévenir toute dérive vers un examen plus approfondi, assimilable à celui du bénéfice du statut de réfugié. J'ai finalement renoncé à présenter un autre amendement qui aurait consisté à transférer du ministre au directeur général de l'Ofpra la décision de refus d'entrée en France au titre de l'asile.
Dès lors que le ministre suit systématiquement les avis de l'Ofpra, cette réforme aurait l'avantage d'économiser des moyens humains et de lever l'éventuelle suspicion d'une interférence de l'exécutif ; la compétence du ministre aurait cependant été préservée lorsque la présence de l'étranger présentait une menace pour l'ordre public. Mais ce transfert risque de remettre en cause l'indépendance de jugement de l'Ofpra, la décision de refus d'entrée relevant d'abord du droit au séjour sur le territoire ; se pose aussi la question du champ de compétences du directeur général de l'Ofpra. C'est dire que cette proposition mérite sans doute une réflexion complémentaire.
Au total, la commission des lois propose l'adoption du texte ainsi modifié. (Applaudissements au centre et à droite)
M. Éric Besson, ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire. - Le préambule de la Constitution de 1946 rappelle que « tout homme persécuté en raison de son action en faveur de la liberté a droit d'asile sur les territoires de la République ». Ce principe, au même titre que la convention de Genève de 1951, guide l'action des pouvoirs publics.
La France, fidèle à sa tradition d'accueil, est un refuge pour les femmes, les hommes et les enfants que persécutions ou menaces chassent de leur pays d'origine. N'en déplaise à certains, elle est exemplaire. Qu'on en juge. Notre pays est le premier pays européen en nombre de demandes d'asile, 42 299 en 2008, soit une augmentation de 20 % par rapport à 2007 ; au plan mondial, elle est au troisième rang derrière les États-Unis et le Canada. L'an passé, l'Ofpra a admis sous sa protection 11 141 personnes, soit 36 % des demandes. Peu de pays sont aussi généreux.
Mon ministère consacre plus de la moitié de son budget, soit 300 millions d'euros, à la politique de l'asile ; 196 millions sont versés aux centres d'accueil, dont le nombre de places a augmenté de 30 % entre 2004 et 2008 pour atteindre 20 410, la création de 1 000 nouvelles places étant programmée sur la période 2010-2012. L'hébergement d'urgence est doté de 30 millions d'euros, et les centres provisoires d'hébergement sont financés à hauteur de 12 millions. L'accompagnement des demandeurs d'asile, c'est encore 30 millions pour l'allocation temporaire d'attente, 3 millions pour l'accompagnement social et plus de 1,5 million de subventions aux associations. C'est enfin, au titre du ministère de la santé, le bénéfice de la couverture maladie universelle (CMU) et de l'aide médicale d'État.
La politique de la France se déploie aussi dans le champ communautaire, avec le double objectif, inscrit dans le pacte européen adopté sous présidence française le 16 octobre 2008, d'une plus grande solidarité et d'un plus haut niveau de protection -objectif que la France défend dans les négociations en cours sur ce qu'il est convenu d'appeler le « paquet asile », qui prévoit l'instauration, si possible en 2010 et au plus tard en 2012, d'une procédure unique assortie de garanties et de statuts communs. La création d'un bureau européen d'appui en 2009 est en bonne voie, qui permettra de venir en aide aux migrants et aux États confrontés à une forte pression migratoire. L'harmonisation réalisée en droit devra se traduire sur le terrain.
La politique européenne de la France vise aussi à une meilleure répartition du fardeau. Après avoir accueilli, en liaison avec le HCR, des Irakiens ressortissants de minorités menacées, notre pays s'apprête à accueillir en juillet 80 personnes qui ont obtenu à Malte le statut de réfugié au titre de la protection subsidiaire.
La réforme proposée répond aux mêmes objectifs : à chaque fois que cela est possible, améliorer l'accueil et la protection des demandeurs d'asile. Elle vise à unifier le contentieux de l'asile, aujourd'hui éclaté, au sein de la juridiction administrative, entre le juge administratif et la CNDA. Cette amélioration, qui reprend l'une des recommandations du rapport Pour une politique des migrations transparente, simple et solidaire présenté en 2008 par la commission Mazeaud, avait déjà été identifiée en 2007 par M. François-Noël Buffet, dont je veux saluer ici l'expertise.
Le système actuel n'est en effet pas satisfaisant. Le dépôt d'une demande d'asile est subordonné à la présence du demandeur sur le territoire national ; mais tous les demandeurs d'asile ne disposent pas des documents exigés pour entrer en France. Dans ce cas, le demandeur d'asile est maintenu en zone d'attente le temps de déterminer si sa demande n'est pas « manifestement infondée ». Cet examen, nécessairement succinct, est mené par l'Ofpra qui transmet son avis au ministre chargé de l'immigration, à qui il appartient d'autoriser ou non l'entrée sur le territoire. Dois-je rappeler à ceux qui craignent l'arbitraire que je suis systématiquement cet avis, comme l'a fait mon prédécesseur ? En cas de rejet, la décision ministérielle peut être aujourd'hui contestée devant un président de tribunal administratif. Après la réforme rendant le recours suspensif, le nombre des requêtes formées pour l'essentiel par les étrangers maintenus dans les zones d'attente de Roissy et d'Orly s'est établi en 2008 à 1 048. Mais quand l'Ofpra se prononce sur le fond de la demande d'asile présentée par un étranger admis à séjourner sur notre territoire, les décisions de refus ne peuvent être contestées que devant la CNDA.
La réforme proposée doit permettre à la CNDA, juridiction plus qualifiée que le juge administratif de droit commun, d'examiner l'ensemble des requêtes qui concernent l'asile. Notre dispositif y gagnera en cohérence, en lisibilité et en crédibilité. Comme l'a relevé à juste titre le rapporteur, une compétence renforcée n'entraîne pas nécessairement un examen plus sélectif des demandes ; elle permet, en revanche, un traitement plus sûr.
Les caractéristiques essentielles de la procédure ne sont pas substantiellement modifiées par le texte, à l'exception de l'allongement du délai de recours de 48 à 72 heures, avancée à laquelle je souscris mais qui me paraît ôter sa justification à la suppression de la motivation de la requête. C'est le seul point sur lequel le Gouvernement se démarquera de l'excellent travail du rapporteur : il déposera un amendement à l'article premier et un autre de coordination à l'article 5 pour réintroduire cette règle générale de procédure contentieuse. Le transfert à la CNDA du contentieux de l'asile à la frontière sera effectif au plus tard en 2011, mais l'allongement du délai de recours pourra entrer en vigueur sans tarder.
La réforme s'accompagne d'un renforcement et d'une professionnalisation accrue de la CNDA : la création de dix juges permanents au sein de la Cour a été décidée dans le cadre de l'examen par le Sénat de la proposition de loi de simplification du droit.
J'ai la conviction que le transfert du contentieux apparaîtra rapidement comme une évidence à tous ceux qui participent à l'accueil et à l'accompagnement des demandeurs d'asile. La France doit continuer à bien traiter ceux qui, persécutés ou menacés, ont droit à la protection de la République. (Applaudissements au centre et à droite)
M. Charles Gautier. - L'examen de cette proposition de loi s'inscrit dans un contexte particulier. Depuis 2007, pas moins de cinq textes ont modifié le droit traitant de l'immigration et de l'asile, dont la loi du 20 novembre 2007 qui a créé la CNDA et lui a donné une autonomie institutionnelle ; la professionnalisation de ses juges a par ailleurs été renforcée par la proposition de loi de simplification du droit en cours de navette. Vous avez enfin récemment annoncé à Nantes, monsieur le ministre, une nouvelle procédure de naturalisation confiant davantage de pouvoir aux préfets, ce qui présente à nos yeux un risque de rupture du principe d'égalité devant la loi. Ce morcellement législatif est d'autant plus incompréhensible que devrait se mettre en place une « Europe de l'asile », avec un statut de réfugié harmonisé et une procédure commune d'examen des demandes d'asile et de reconnaissance du statut de réfugié.
Mais l'examen de cette proposition de loi intervient aussi dans un contexte particulier. Des incidents ont perturbé l'inauguration, en mars, de la médiathèque de la Cité de l'immigration, signe d'une détérioration des relations entre le ministre de l'immigration et les associations.
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. - Elles ont toujours été mauvaises.
M. Charles Gautier. - Les manifestations d'avril dans plusieurs villes de France contre la pénalisation de la solidarité envers les étrangers sans papiers, largement couvertes par les médias, ont été un succès.
On ne peut ouvrir ce débat sans évoquer le film Welcome, de Philippe Lioret, et son histoire ; sans évoquer les personnes ou les associations venant en aide aux étrangers en situation irrégulière, qui vivent dans des conditions qui font la honte de notre République.
Les groupes socialistes de l'Assemblée nationale et du Sénat ont déposé une proposition de loi visant à supprimer cette incrimination.
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission. - Elle n'a jamais existé !
M. Charles Gautier. - Le groupe RDSE a, je crois, fait de même.
Nos concitoyens et les parlementaires de tous bords des deux assemblées sont bouleversés par les situations de ces étrangers poussés par la misère, qui viennent ici trouver un Eldorado. Ils n'y trouvent souvent que la misère, la violence et la faim. Vous avez fermé Sangatte sans fournir de solution alternative, ils se retrouvent donc errants dans la zone portuaire de Calais. Ils sont traités comme des délinquants, privés de leurs libertés les plus élémentaires.
Est-il concevable que notre République poursuive ceux qui, émus de ces situations, leur viennent en aide ? Est-il concevable que la législation en vigueur permette d'inquiéter pénalement nos concitoyens qui offrent une couverture ou une assiette de riz (M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission, proteste) parce que votre politique du résultat en matière d'immigration et d'asile a déjà programmé le nombre d'arrestations d'aidants ?
La proposition de loi de M. Buffet appelle quelques observations.
Elle vise le recours offert à l'étranger dont l'entrée en France, au titre de l'asile, a été refusée dès la frontière. Au regard des quelque 42 500 demandes d'asile de 2008, les procédures d'asile à la frontière demeurent certes marginales. Elles n'en concernent pas moins plusieurs milliers d'étrangers chaque année et tendent à se développer : 3 772 avis rendus du 1er janvier au 31 octobre 2008, la hausse des demandes concernant plus particulièrement les mineurs isolés.
La CNDA statue sur les recours formés contre les décisions de l'Ofpra, examine les requêtes qui lui sont adressées par les réfugiés et formule un avis quant au maintien ou à l'annulation de ces mesures. L'existence d'un premier filtre, en amont des demandes d'asile, comme l'urgence liée au maintien des étrangers en zone d'attente justifient l'existence de garanties juridictionnelles.
La demande d'asile à la frontière est déjà une procédure dérogatoire. Par rapport aux demandes déposées sur le territoire, dans une préfecture, elle exige en effet un examen supplémentaire de recevabilité.
Le principe voudrait que l'on autorise les demandeurs à accéder rapidement au territoire pour que leur demande de protection soit examinée au fond. Ce n'est pas la voie choisie dans ce texte, dont l'objectif premier est la réduction des délais de procédure. De plus, la décision d'admissibilité sur le territoire relevant du domaine de la police des étrangers, la décision du juge ne saurait reposer, à ce stade, sur l'appréciation de la situation géopolitique du pays du demandeur d'asile. Dans le droit en vigueur, le juge administratif doit s'en tenir à l'usage ou non du moyen légal du caractère manifestement infondé de la demande, à l'exclusion de toute analyse au fond.
On peut se demander, dans ces conditions, quelle sera la prochaine étape. Une procédure d'asile à la frontière ? Les organisations entendues par le groupe socialiste craignent un tel glissement, et la création d'une procédure rapide d'examen au fond de la demande. La proposition n'est pas nouvelle...
Quelles garanties seraient, dès lors, offertes aux demandeurs d'asile ? Le risque est réel d'une procédure trop rapide pour permettre au demandeur, soumis à la double anxiété d'une fuite récente et du maintien dans un lieu de privation de liberté, d'exposer précisément les menaces qui pèsent sur lui. Permettrait-elle à l'Ofpra de mener un examen approfondi ? Ne serait-il pas conduit à abréger pour tenir les délais ?
Au-delà, transférer à la CNDA le contentieux du refus d'entrée au titre de l'asile étend la compétence de la Cour à un domaine relevant de la police administrative. On passe ainsi subrepticement, au motif que l'on s'est aperçu que parmi les personnes admises à la frontière au titre de l'asile, seule une minorité concrétise leur démarche en présentant une demande en préfecture, de la problématique de l'asile à celle de la lutte contre l'immigration clandestine.
Ne risque-t-on pas de surcroît, comme l'a souligné le rapporteur, de voir la CNDA refuser de se déjuger lorsqu'elle serait amenée à connaître de nouveau du dossier d'un étranger à l'occasion de la reconnaissance du statut de réfugié ?
Il est un autre risque, bien réel, enfin, celui des moyens, dont a fait état le rapporteur.
Cette réforme renferme donc bien des contradictions.
Si, après son passage en commission, la proposition de loi vient renforcer certaines garanties -allongement de 48 heures à 72 heures du délai de recours ; suppression de l'exigence de motivation de la requête ; interdiction de procéder à des investigations pour déterminer le caractère infondé d'une demande d'asile à la frontière ; usage plus restrictif de la visioconférence, ces dernières garanties devant entrer en vigueur dès la promulgation de la loi-, on peut néanmoins regretter que la commission n'ait pas saisi toutes les occasions d'améliorer la procédure. Ainsi, elle n'a pas souhaité réaffirmer le droit d'être assisté d'un avocat et d'une interprète ; elle a rejeté l'obligation, que justifiait pourtant l'urgence, d'une formation collégiale, comme l'exigence de recueillir le consentement de l'étranger à la tenue d'audiences « foraines » et son droit de s'opposer à l'utilisation de la visioconférence. Elle n'a pas suffisamment précisé la notion de demande « manifestement infondée », ni instauré de voie de recours des décisions de la CNDA.
Pour toutes ces raisons, le groupe socialiste a déposé un grand nombre d'amendements à ce texte, qui est bien loin de nous satisfaire en l'état. (Applaudissements à gauche)
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M. François Zocchetto. - Le droit d'asile et plus généralement l'immigration sont des questions sensibles. Notre Haute assemblée a eu à en connaitre en 2007, avec l'examen du projet de loi relatif à la maîtrise de l'immigration, à l'intégration et à l'asile. La semaine passée, un débat sur ce thème était organisé au sein de notre assemblée et une proposition de loi socialiste âprement débattue à l'Assemblée nationale.
Dès 2007, dans son rapport au nom de la commission des lois, M. Buffet souhaitait que la réforme de la CNDA soit l'occasion d'engager une réflexion plus large sur son champ de compétence.
La Cour étant la juridiction spécialisée en matière d'asile, c'est avant tout dans un souci de cohérence qu'il convient de lui confier également les recours contre les décisions de refus d'entrée sur le territoire au titre de l'asile, alors que la loi de 2007 en attribuait la compétence aux tribunaux administratifs. De fait, l'expertise de ces juridictions administratives est moins assurée dans ce domaine que celle la CNDA, juridiction spécialisée.
Cette réforme introduit donc une simplification et une rationalisation nécessaires. Elle constitue une avancée en faveur des droits des demandeurs d'asile, qui verront leurs recours examinés par des magistrats spécialisés. Je salue l'adoption en commission d'un amendement tendant à allonger le délai de recours de 48 à 72 heures, répondant ainsi à une critique récurrente des associations d'aide aux demandeurs d'asile.
Le contentieux de l'asile a connu de fortes évolutions ces dernières années, principalement depuis la réforme de 2007. Malgré la création du référé liberté, en 2000, le nombre des recours était resté très résiduel. A la veille de la réforme, seuls 92 référés liberté avaient été formés. En 2008, après l'adoption du caractère suspensif du recours sous la pression de l'arrêt rendu par la Cour de justice des communautés européennes, une explosion des recours était prévisible. De fait, leur nombre a décuplé. Et le mouvement se poursuit en 2009, puisqu'une centaine de requêtes serait formée chaque mois.
Pour garantir une efficacité maximum dans l'examen des recours, un traitement par des magistrats spécialisés s'impose.
Cela étant, le transfert du contentieux de l'asile à la frontière à la CNDA ne sera bénéfique que sous certaines conditions. La réforme de la CNDA, initiée par la loi de 2007, doit être rapide et approfondie. Or, si la loi de finances initiale pour 2009 prévoit les crédits nécessaires pour augmenter le nombre de magistrats permanents, ce nouveau recrutement a été calibré sans tenir compte des propositions de ce texte. Ainsi, l'obligation de statuer dans un délai de 72 heures impose d'organiser des permanences. Au reste, tout allongement des délais de jugement augmenterait les dépenses liées à la prise en charge des demandeurs -hébergement, allocation temporaire d'attente... Limiter le nombre de magistrats pour des raisons budgétaires ne ferait donc qu'accroître les coûts.
Une observation amicale, enfin, à l'attention de mes collègues socialistes.
Cette proposition de loi a un objet technique précis : unifier le contentieux de l'asile. Je m'interroge dès lors sur le lien avec vos amendements relatifs à la suppression du prétendu « délit de solidarité », d'autant plus qu'ils ont déjà été rejetés par la commission des lois. (Applaudissements à droite)
M. Jean-Pierre Michel. - De quoi je me mêle ?
M. François Zocchetto. - Vous avez le droit de connaître notre position ! (Rires et applaudissements au centre et à droite) De plus, une proposition de loi sur ce sujet a été déposée à l'Assemblée nationale et au Sénat : je souhaite -ce qui vous fera plaisir- que nous puissions en discuter prochainement. (Applaudissements au centre et à droite)
Mme Éliane Assassi. - Cette proposition de loi a une histoire, commencée le 8 janvier 2008 lorsque Nicolas Sarkozy annonce qu'il a demandé au ministre de l'immigration de l'époque, Brice Hortefeux, « de supprimer cette bizarrerie française selon laquelle le droit des étrangers relève de deux ordres de juridiction différents, l'un public, l'un judiciaire, avec des jurisprudences différentes ». Lors de la révision constitutionnelle de 2008, un amendement a été adopté à l'Assemblée nationale prévoyant que la loi fixe les règles relatives « à la répartition des contentieux entre les ordres juridictionnels, sous réserve de l'article 66 ». Cette disposition a heureusement été supprimée par le Sénat même si, en juillet 2008, la commission Mazeaud consacrée au cadre constitutionnel de la nouvelle politique d'immigration, proposait « d'unifier le contentieux des demandeurs d'asile sur un juge spécialisé, plus qualifié en la matière que le juge administratif de droit commun ». Nous nous attendions à ce que la question de la répartition des contentieux, et particulièrement de celui des étrangers et des demandeurs d'asile, réapparaisse un jour...
Le groupe CRC-SPG est opposé à toute juridiction spéciale pour les étrangers. Extraire ce contentieux du droit commun affaiblira inévitablement leurs droits car cela instaurera une justice à deux vitesses avec, à terme, des garanties procédurales au rabais. En témoigne la suppression envisagée par le Gouvernement du rapporteur public dans ce contentieux. Pour le Gouvernement, l'objectif essentiel de l'unification est de rendre toujours plus « efficace » la politique d'expulsion. La justice doit donc être plus expéditive, aux dépens, évidemment, des garanties juridictionnelles qui entourent encore aujourd'hui l'éloignement des étrangers
En outre, cette proposition de loi tend à assimiler le droit applicable aux demandeurs d'asile à celui applicable aux autres étrangers. La confusion est délibérément entretenue par le Gouvernement puisque les questions de l'asile et de l'immigration dépendent indistinctement du ministère de l'immigration, alors qu'auparavant l'asile dépendait des affaires étrangères. Or, le droit d'asile est un droit fondamental, reconnu depuis la Révolution française et aujourd'hui garanti par notre Constitution et par la Convention de Genève de juillet 1951. Il correspond à la protection qu'un État peut offrir à un individu victime de persécutions ou d'une guerre civile et il est donc à distinguer de mouvements migratoires économiques ou familiaux. L'amalgame entre demandeurs d'asile et étrangers économiques conduit à confondre les deux contentieux. En reprenant la préconisation de la commission Mazeaud, cette proposition de loi pose la première pierre d'un édifice plus vaste tendant à sortir l'ensemble du contentieux des étrangers de la juridiction administrative. Elle transfère à la Cour nationale du droit d'asile le contentieux des décisions de refus d'entrée sur le territoire français au titre de l'asile, au motif que le juge administratif serait moins qualifié que les magistrats de cette Cour pour statuer sur ce contentieux. Actuellement, la CNDA est compétente pour statuer sur les décisions de l'Ofpra d'accorder ou non le statut de réfugié. Elle n'est donc compétente que pour l'asile. Si elle devient compétente pour statuer sur l'entrée sur le territoire français, pourquoi ne le deviendrait-elle pas pour la sortie et, enfin, pour le séjour ? Deviendra-t-elle une juridiction spécialisée pour l'ensemble du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ?
Ce serait rompre avec le principe de séparation entre l'asile et le droit des étrangers et risquer de dénaturer le contentieux du refus de l'entrée sur le territoire français au titre de l'asile. Ce refus est une mesure de police administrative, qui ne doit apprécier que le caractère manifestement infondé ou non de la demande et qui ne peut ni ne doit préjuger de l'attribution du statut de réfugié. Le recours exercé est un recours en excès de pouvoir et non un recours de plein contentieux. La CNDA n'est pas plus qualifiée que le juge administratif de droit commun pour statuer sur une mesure de police et donc sur un recours pour excès de pouvoir.
Au contraire, si l'on se fie à « l'intime conviction » du magistrat chargé de statuer, comme nous y invite l'Union syndicale des magistrats administratifs, la tendance naturelle de la CNDA sera de statuer a priori sur la demande d'asile et de préjuger du statut de réfugié du demandeur. Il existe bel et bien un risque qu'à terme, l'examen au fond de la demande d'asile se fasse à la frontière, en même temps que l'examen du caractère fondé ou non de la demande d'asile et par la seule Cour nationale.
Actuellement, les étrangers qui se soumettent à la loi et se présentent à la frontière pour demander l'asile sont soumis à des règles plus sévères que les étrangers en situation irrégulière se rendant en préfecture après un mois, un an, voire plus, passés sur le territoire. Les conditions restrictives de la procédure et la limitation de certaines garanties fondamentales s'appliquent aux étrangers qui demandent l'asile à leur arrivée à la frontière, ce qui privilégie les étrangers qui se manifestent à l'autorité publique en étant déjà en situation irrégulière.
Enfin, et M. Lecerf l'a souligné dans son rapport, ce transfert à la CNDA la déstabilisera. Au tribunal administratif de Paris, le contentieux lié au refus d'entrée sur le territoire français au titre de l'asile, peu important, n'est à l'origine d'aucune difficulté de gestion particulière. L'argument du désengorgement de ce tribunal n'est donc pas valable. C'est au contraire la CNDA qui risque de se retrouver encore plus engorgée qu'aujourd'hui où les délais de traitement des recours sont passés à treize mois. Ce transfert augmentera une pression contentieuse déjà forte, d'autant que, le recours en question aujourd'hui devant être examiné dans un délai très bref de 72 heures, son examen se fera en priorité avant les autres, ce qui rallongera inévitablement les délais d'examen des recours contre les décisions de l'Ofpra. Comme l'écrit notre rapporteur, « alors que la CNDA est déjà sous tension et a un délai moyen de jugement de plus d'un an, comment pourrait-elle absorber sans dommage cette charge de travail supplémentaire ? ».
Cette proposition de loi ne présente donc aucun avantage et les arguments présentés pour la justifier n'ont pas de fondement dans la pratique actuelle, pas plus que dans la comparaison avec d'autres systèmes juridictionnels étrangers. Sauf en Grande-Bretagne et en Belgique, le contentieux des étrangers n'est pas unifié et ne dépend pas de juridictions spécialisées dans les grandes démocraties. Le cas de la Grande-Bretagne s'explique par le fait que c'est un pays de Common law, celui de la Belgique par le fait qu'il n'y existe pas de tribunaux administratifs ni de cours administratives d'appel, le Conseil d'État de Bruxelles demeurant encore aujourd'hui le juge de droit commun du contentieux administratif en première instance. La comparaison avec les pratiques étrangères n'est donc pas possible.
Notre opposition à ce transfert est totale et l'examen des articles nous permettra de développer nos arguments. (Applaudissements à gauche)
Mme Anne-Marie Escoffier. - Cette proposition de loi vise à corriger des dispositions difficilement applicables de la loi de novembre 2007. Je salue cette initiative parlementaire et la qualité du rapport. Lors du débat de la semaine dernière sur l'immigration clandestine, j'avais souhaité une clarification du droit des étrangers. Ce texte y contribue.
Les praticiens du droit tout autant que les étrangers candidats à l'asile se heurtent à trois difficultés. D'abord, au difficile équilibre entre le respect de deux principes : celui de la souveraineté de l'État et celui de non-refoulement et d'immunité pénale. Il faut mettre fin aux controverses nées de la notion de demande d'entrée en France « manifestement infondée ». Ensuite l'actuel délai de recours, limité à 48 heures, est trop court lorsqu'il expire en fin de semaine ou à l'occasion de jours fériés. Enfin, l'exigence d'une requête « motivée » est incompatible avec la situation précaire du demandeur d'asile, confronté, en outre, à la barrière de la langue. Sur ces trois points, la commission a opté pour un texte équilibré prenant en compte les observations du rapporteur et des amendements opportuns.
S'appuyant sur la décision du 25 février 1992 du Conseil constitutionnel, le nouvel article 6 limite le champ des investigations utiles pour qualifier la demande d'entrée en France de « fondée » ou d'« infondée ».
Elle conforte la distinction entre la demande d'entrée sur le territoire -qui a un caractère d'urgence incompatible avec une enquête approfondie- et la demande d'asile, à propos de laquelle toutes enquêtes sont possibles. Dans cette nouvelle rédaction, l'article L 213.10 respecte l'intégrité et la dignité de la personne.
L'expérience a montré qu'un délai de recours de 48 heures était trop bref, en particulier lors de week-ends prolongés. Le porter à 72 heures est donc une bonne chose.
La commission a accepté de retirer la mention de la « requête motivée » qui devait accompagner la demande d'annulation. De fait, les étrangers demandeurs d'asile sont dans une précarité et une fragilité qui amoindrissent leur capacité à rédiger convenablement une requête motivée.
La proposition de loi fixe aussi les conditions dans lesquelles peuvent être tenues les audiences foraines. J'eusse apprécié que la loi précisât les conditions matérielles du déroulement de l'audience mais je concède qu'on est là dans le domaine du règlement. J'insiste donc pour que le décret en Conseil d'État paraisse au plus vite.
Le contentieux des décisions de refus d'entrée sur le territoire au titre de l'asile est transféré du tribunal administratif de Paris à la CNDA. Faut-il vraiment multiplier les juridictions pour régler des procédures administratives ? Admettons toutefois l'existence de cette nouvelle Cour pour la raison que donnait Pierre Mazeaud : cela permettra d'unifier le contentieux sur un juge spécialisé. Encore faut-il que les moyens nécessaires à un tel transfert ne fassent pas défaut ! Il est vrai qu'un amendement sénatorial du 24 mars autorise le recrutement de magistrats au sein de la CNDA et que la loi de finances initiale pour 2009 a prévu les crédits nécessaires au recrutement de dix magistrats permanents.
Cette proposition de loi va dans le bon sens ; puissiez-vous la mettre en oeuvre au plus vite. Je veux rester confiante dans notre volonté commune de respecter les principes essentiels de la République que sont la souveraineté de l'État et le respect de la dignité humaine. (Applaudissements)
Mme Alima Boumediene-Thiery. - Cette proposition de loi a pour objet de parachever l'unification du contentieux de l'asile devant la CNDA, conformément aux préconisations du rapport Mazeaud sur le cadre constitutionnel de votre politique d'immigration. Sous des airs de simplification de la procédure, cette proposition de loi pose un certain nombre de problèmes.
Le contentieux de l'admission sur le territoire au titre de l'asile n'est pas un contentieux sur l'asile. Nous sommes à un moment où l'étranger n'est pas encore entré en France ; il est en zone internationale et peut être refoulé s'il ne possède pas tous les documents exigés à son entrée en France ou si sa demande est jugée infondée. Ce n'est que sous réserve de son entrée en France que l'étranger pourra formuler une demande d'asile : l'admission au séjour conditionne le dépôt d'une demande d'asile. Cette procédure relève de la police administrative des étrangers, c'est pourquoi elle était jusqu'à présent du ressort du juge administratif. Il ne s'agit pas de reconnaître si la demande d'asile de l'étranger est fondée mais seulement de voir si sa demande d'admission sur le territoire est fondée.
Voici le premier problème : en avalisant le transfert de compétence du juge administratif vers la CNDA, on opère un glissement vers l'examen au fond de la demande, au risque d'une confusion des procédures. Lorsque la CNDA devra apprécier si une demande est infondée, elle devra examiner au fond la demande d'asile. En fait d'ajustement, c'est une véritable redéfinition de ses missions ! Si la Cour annule un refus d'admission sur le territoire, elle sera, à nouveau, saisie au fond par l'étranger pour l'octroi du statut de réfugié ou de la protection subsidiaire. Les deux versants de sa compétence convergeront alors vers l'octroi d'une protection. Par contre, si la Cour refuse d'annuler le refus d'admission sur le territoire, elle verrouille la possibilité ultérieure de l'octroi d'un statut à l'étranger. Admettons que le maintien en zone d'attente de l'étranger est annulé : l'étranger sera libéré et aura accès au territoire, il pourra demander l'asile et la Cour sera amenée à examiner cette demande au fond. Elle a jugé infondée sa demande et doit maintenant malgré tout l'examiner au fond : elle sera liée par sa décision initiale !
Le second problème que pose ce transfert de compétence concerne les droits des étrangers. Depuis plusieurs années, je me bats pour la reconnaissance d'un droit à un recours suspensif pour tous les refus d'entrée et pas seulement au titre de l'asile. La loi de novembre 2007, en créant le recours suspensif contre les décisions de refus d'entrée sur le territoire, avait posé la première pierre de l'édifice. Cette proposition de loi signe l'arrêt des travaux en la matière, puisqu'elle enferme définitivement le recours suspensif dans le seul champ du droit d'asile en raison de la spécialisation de la CNDA. En adoptant cette loi, on renoncerait à l'extension de ce recours suspensif à d'autres catégories d'étrangers, comme les mineurs isolés souhaitant rejoindre leur famille en France.
Cette proposition de loi obéit à une inspiration économique indéniable : son objet est avant tout de comprimer les coûts. Faut-il pour autant faire l'impasse sur les droits élémentaires des étrangers ? Certains détails nous font douter que soient bien préservés les droits des étrangers, notamment concernant le droit à un procès équitable. Il en est ainsi de l'assistance d'un interprète et d'un avocat, qui était explicitement visée par l'article 213-9 que nous nous apprêtons à modifier. Ces garanties disparaissent de la proposition de loi. J'entends le rapporteur nous dire qu'elles figurent ailleurs dans le code des étrangers. Pourquoi alors figuraient-elles bien dans la réforme de 2007 ?
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission. - Nous voulons simplifier les textes.
Mme Alima Boumediene-Thiery. - Pourquoi alors une telle garantie est-elle prévue pour chacune des procédures spécifiques du code des étrangers ? Je suis très inquiète des conséquences de la nouvelle procédure sur les droits de la défense des étrangers. Je crains qu'elle ne fasse fi de certaines garanties afin de réaliser son funeste dessein d'une justice expéditive, secrète et partiale.
Enfin, je souhaite relier cette proposition de loi aux réformes envisagées au niveau européen. Une refonte du « paquet asile » est en cours au sein de l'Union, ainsi que des directives relatives à Dublin 2, Eurodac et aux conditions d'accueil et de procédures des demandes d'asile. Ici même, au Sénat, nous menons, avec M. Del Picchia, des auditions dans la perspective d'un rapport sur cette question pour juin 2009. J'aimerais donc savoir quel est l'intérêt d'une telle proposition, qui n'entrera pas en vigueur avant 2011, sachant qu'une nouvelle directive viendra bientôt modifier l'architecture du droit d'asile en Europe. La dernière réforme de l'admission au séjour, au titre de l'asile, ne date que de dix-huit mois... Ne pouvions-nous attendre un peu plutôt que de demander à notre collègue Buffet de servir de véhicule législatif ? (On feint de s'offusquer, à droite)
Il y a cependant un article que j'aurais voté des deux mains, s'il avait été le seul de la proposition de loi : l'article 5. Son objet est la mise en place, dès l'entrée en vigueur de cette loi, d'un délai de recours de 72 heures et la suppression de l'exigence de requête motivée sans attendre 2011. Ces deux exigences, souvent présentées par les associations d'assistance aux étrangers, nous les avions soutenues en 2007 ; elles nous avaient été refusées. Les temps changent, les esprits évoluent, gagnent en pragmatisme... Je remercie M. Lecerf pour son courage sur ce point.
Nous défendrons plusieurs amendements visant à rétablir les droits fondamentaux des étrangers tout au long de la procédure de l'asile, notamment le droit à un procès équitable, conformément au droit européen.
M. Éric Besson, ministre. - M. Gautier a centré son intervention sur ce qu'il appelle le contexte. Qu'il me pardonne de lui dire qu'il a énoncé une série de contre-vérités manifestes : il ne suffit pas de les répéter cent fois pour qu'elles deviennent vérités ! L'une de vos formules m'a fait sursauter : vous avez prétendu que l'on traitait les migrants à Calais comme des délinquants. C'est indigne : la France, même si elle cherche à maîtriser ses flux migratoires, est un pays ouvert et généreux, notamment en matière d'asile. Elle est le pays d'Europe qui accueille le plus de réfugiés politiques, et le troisième au monde après les États-Unis et le Canada.
M. Charles Gautier. - Paroles !
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission. - C'est la vérité !
M. Éric Besson, ministre. - Contestez-vous les faits ?
M. Charles Gautier. - Je cherche à les situer dans leur contexte.
M. Éric Besson, ministre. - Les chiffres démentent vos allégations. Est-ce traiter les étrangers en situation irrégulière comme des délinquants que de les héberger et d'aider les associations qui leur apportent une assistance matérielle et juridique ? Vous avez dit qu'il pourrait être considéré comme délictueux de donner à un étranger une couverture ou un plat de riz. Si nous étions dans les couloirs du Sénat, je vous demanderais de m'en apporter la moindre preuve, et si vous y réussissiez, je vous remettrais ma démission. Mais comme nous sommes dans l'hémicycle, je n'en fais rien : d'ailleurs, vous seriez en mauvaise posture si j'exigeais la réciproque... (Applaudissements à droite)
M. Charles Gautier. - Méfiez-vous !
M. Éric Besson, ministre. - Il n'existe pas de délit de solidarité en France. Ce prétendu délit n'est pas une invention récente. Il y a onze ans déjà, M. Mamère et certaines associations reprochaient à M. Chevènement, ministre de l'intérieur, d'avoir créé un « délit d'humanité » : des particuliers et des membres d'associations pouvaient, disaient-ils, être condamnés en vertu de l'article L. 622-1. M. Chevènement leur répondit que leurs soupçons étaient sans fondement et leurs propositions inutiles et dangereuses. Je pourrais vous faire la même démonstration.
En colportant de tels mensonges, vous ternissez l'image de la France à l'étranger. Le problème qui se pose à Calais, c'est que la plupart des migrants ne veulent pas rester en France : ils sont anglophones et anglophiles, ont une partie de leur famille outre-Manche et veulent à toute force passer en Angleterre. S'ils souhaitaient rester, nous pourrions les accueillir dans de meilleures conditions. Mais ils préfèrent bivouaquer près du port, dans la fameuse « jungle », pensant qu'ils augmentent ainsi leurs chances de passer la frontière à bord d'un bateau ou d'un camion. La France n'est pour rien dans cette situation, qu'elle s'efforce de gérer au mieux.
Quant à la réforme de la procédure de naturalisation, elle avait pour objet d'éviter une double instruction par la préfecture et la sous-direction des naturalisations installée à Rezé. Mais je vous le garantis : il n'y aura pas de rupture du principe d'égalité. La décision finale sera toujours prise par l'autorité ministérielle, et le décret de naturalisation signé par le Premier ministre et contresigné par le ministre en charge de l'immigration. La sous-direction des naturalisations sera chargée de l'harmonisation. Pensez-vous qu'il y ait de bons fonctionnaires, soucieux de l'intérêt général et de l'État de droit à Rezé, et de mauvais fonctionnaires dans les préfectures ? La nationalité reste en France la voie d'accès à la citoyenneté, et la procédure de naturalisation n'est nullement remise en cause. La France est le pays le plus généreux d'Europe à cet égard, puisqu'elle n'exige que cinq ans de présence sur le territoire.
D'ailleurs, vos propos tombent mal : depuis lundi, à la demande des associations, une permanence est ouverte à la sous-préfecture de Calais pour permettre aux migrants du Calaisis d'y déposer leurs demandes d'asile au lieu de devoir se rendre à Arras.
M. Zocchetto a fort bien démontré l'utilité de la présente réforme, qui confie à des magistrats spécialistes le contentieux des décisions de refus d'entrée au titre du droit d'asile. Comme Mme Escoffier, il a insisté sur la nécessité de renforcer les moyens de la CNDA : le Parlement a décidé d'affecter à cette Cour dix juges permanents et une partie des effectifs et des moyens des tribunaux administratifs lui seront transférés. La CNDA est d'ailleurs rattachée pour la gestion au Conseil d'État, ce qui montre la cohérence de cette réforme. Il faudra du temps pour opérer ce transfert, mais je souhaite moi aussi que nous devancions l'échéance de 2011.
Je vous reconnais, madame Assassi, le mérite de la constance : vous êtes restée sur les mêmes positions que la semaine dernière, lors du débat organisé à la demande de Mme Escoffier. Votre propos est fondé sur le présupposé selon lequel la France traite mal les étrangers et veut dresser des barrières à ses frontières. Vous nous faites un procès d'intention et refusez d'entendre nos arguments.
Mme Éliane Assassi. - Ils sont démentis par les faits !
M. Éric Besson, ministre. - L'Europe et la France ne sont nullement hostiles à l'immigration légale : chaque année dans notre pays, 200 000 titres de long séjour, deux millions de titres de court séjour et 100 000 naturalisations sont accordés ; la France est aussi, je le répète, le pays le plus généreux d'Europe en matière de droit d'asile. La rétention administrative, d'une durée légale maximale de 32 jours, ne dure en fait qu'une dizaine de jours : c'est le délai le plus court d'Europe. (M. Michel Charasse en convient) Dans six pays européens, la durée de rétention est illimitée ! (Mme Éliane Assassi hausse les bras)
Vous ne critiquez pas les faits mais nos intentions supposées : cela rend le débat certes intéressant, mais compliqué...
Non, nous ne confondons pas immigration et droit d'asile. L'Ofpra, organisme indépendant, continuera de statuer sur le cas des demandeurs de bonne foi, et mon prédécesseur et moi-même avons toujours avalisé ses décisions, sans aucune exception. La CNDA, chargée de statuer sur les recours formés contre les décisions de l'Ofpra, se voit confier par le présent texte une nouvelle mission, ce qui, loin de contribuer à la confusion, clarifie le rôle de chacun.
Mais certains étrangers cherchent à entrer en France pour des raisons économiques, sous couvert du droit d'asile. C'est humainement compréhensible et respectable. Mais nous sommes forcés de les distinguer nettement des autres.
Comme l'a dit Mme Escoffier, le texte proposé par M. Buffet est juste et équilibré. Les améliorations qu'il apporte sont modestes mais réelles. Je n'ai jamais prétendu qu'il s'agissait d'une révolution ! Suivant une proposition de M. le rapporteur, à laquelle le Gouvernement s'est rallié, le délai de recours sera allongé.
Au cours de l'examen des articles, j'aurai l'occasion de m'expliquer sur le concept de requête motivée.
J'en viens enfin à l'intervention de Mme Boumediene-Thiery : la clarification porte sur le caractère manifestement infondé. La Cour nationale du droit d'asile (CNDA) n'est pas liée par la décision initiale, ni dans un sens, ni dans l'autre. Votre suggestion de recours suspensifs aboutirait à une plus grande confusion. En ce qui concerne les mineurs isolés, j'ai mis en place un groupe de travail afin qu'il se penche sur cette question délicate : notre pays est très généreux avec les mineurs mais lorsqu'ils arrivent à majorité, cela pose des difficultés.
La première partie de votre intervention était technique, la deuxième plus polémique en évoquant je ne sais quels noirs desseins de la part du Gouvernement. A vous écouter, nous voudrions mettre en place une justice partiale et expéditive. C'est votre jugement qui l'est !
En revanche, je salue l'hommage que vous avez rendu à l'article 5 : lorsque j'étais jeune, une publicité disait : « ce qui est rare est cher ». Vos compliments étant rares, ils me sont particulièrement chers. (Sourires et applaudissements à droite)
La discussion générale est close.
Discussion des articles
Articles additionnels
M. le président. - Amendement n°1 rectifié bis, présenté par M. Charles Gautier et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
Avant l'article 1er, ajouter un article additionnel ainsi rédigé :
L'article L. 622-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est ainsi modifié :
1° Les quatre premiers alinéas sont ainsi rédigés :
« Sous réserve des exemptions prévues à l'article L. 622-4, toute personne qui aura, par aide directe ou indirecte, facilité ou tenté de faciliter l'entrée ou, à titre onéreux, le séjour irréguliers d'un étranger en France ou le transit irrégulier d'un étranger par la France, sera punie d'un emprisonnement de cinq ans et d'une amende de 30 000 €.
« Sera puni des mêmes peines celui qui, quelle que soit sa nationalité, aura commis le délit défini au premier alinéa du présent article alors qu'il se trouvait sur le territoire d'un État partie à la convention signée à Schengen le 19 juin 1990 autre que la France.
« Sous réserve des exemptions prévues à l'article L. 622-4, sera puni des mêmes peines celui qui aura facilité ou tenté de faciliter l'entrée ou, à titre onéreux, le séjour irréguliers d'un étranger sur le territoire d'un autre État partie à la convention signée à Schengen le 19 juin 1990 ou le transit irrégulier d'un étranger par le territoire d'un tel État.
« Sous réserve des exemptions prévues à l'article L. 622-4, sera puni des mêmes peines celui qui aura facilité ou tenté de faciliter l'entrée, ou, à titre onéreux, le séjour irréguliers d'un étranger sur le territoire d'un État partie au protocole contre le trafic illicite de migrants par terre, air et mer, additionnel à la convention des Nations unies contre la criminalité transnationale organisée, signée à Palerme le 12 décembre 2000, ou le transit irrégulier d'un étranger par le territoire d'un tel État. »
2° Il est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Les dispositions du présent article ne s'appliquent pas lorsque l'acte reproché était, face à un danger actuel ou imminent, nécessaire à la sauvegarde de la vie ou de l'intégrité physique de l'étranger, sauf s'il a donné lieu à une contrepartie directe ou indirecte. »
M. Charles Gautier. - Il convient de modifier l'article L. 622-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qui prévoit des sanctions en cas d'aide à l'entrée, à la circulation ou au séjour irréguliers d'un étranger. Nous proposons donc de dépénaliser toute aide lorsque la sauvegarde de la vie ou l'intégrité physique de l'étranger est en jeu, sauf si cette aide a donné lieu à une contrepartie directe ou indirecte. Il convient aussi de remplacer le terme trop général de « circulation » par celui de « transit » et de ne sanctionner l'aide au séjour irrégulier que lorsqu'elle est proposée à titre onéreux.
M. le président. - Amendement n°26, présenté par Mme Assassi et les membres du groupe CRC-SPG.
Avant l'article 1er, ajouter un article additionnel ainsi rédigé :
L'article L. 622-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est ainsi modifié :
1° Dans les premier, troisième et quatrième alinéas, après le mot : « faciliter », sont insérés les mots : « dans un but lucratif » ;
2° Il est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Les associations régulièrement déclarées depuis au moins cinq ans à la date des faits ayant, en vertu de leurs statuts, vocation, en France, à défendre ou à assister les personnes étrangères sont exclues du champ d'application de cet article. »
Mme Éliane Assassi. - Cela fait maintenant des années que le groupe CRC estime qu'il faut bien distinguer ce qui ressortit aux réseaux criminels de l'action d'hommes de femmes ordinaires qui viennent en aide à des étrangers en situation irrégulière. C'est pourquoi nous présentons cet amendement qui ne fait que reprendre en partie la proposition de loi que nous avons déposée le 18 mars.
Votre politique du chiffre à tout prix ne fait qu'inquiéter les personnes honnêtes et désintéressées qui agissent par pure humanité. Sur ces question de solidarité, vous n'êtes pas très audible, monsieur le ministre : en témoigne le nouvel appel signé par diverses personnalités et qui est paru dans la presse. De toute évidence, les craintes persistent. Vous avez beau invoquer les arguments de M. Chevènement, ça ne passe pas ! Je partage ces inquiétudes, d'autant que nous sommes confrontés à des situations qui frôlent l'absurde. C'est pour mettre fin à l'arrestation de personnes non délinquantes que nous avons déposé cet amendement.
M. Jean-René Lecerf, rapporteur. - L'amendement n°1 rectifié bis reprend les termes de la proposition de loi déposée le 8 avril par le groupe socialiste et qui supprime le délit de solidarité. Une proposition de loi quasiment identique a d'ailleurs été déposée à l'Assemblée nationale, par le même groupe, le 18 mars et elle a été rejetée par les députés jeudi dernier. Il est difficile d'examiner cette question alors que nous traitons du droit d'asile. Il faudrait prévoir une discussion distincte et cette proposition de loi ne doit pas être le prétexte à revenir sur toutes les questions ayant trait à l'immigration. Je souhaite donc le retrait de cet amendement. Mêmes remarques et donc même demande de retrait sur l'amendement n°26.
M. Éric Besson, ministre. - Mme Assassi estime que « ça ne passe pas » et que le Gouvernement n'est pas audible. Ce n'est pas parce que des intellectuels et des artistes signent une pétition que les Français ne partagent pas notre point de vue ! (Exclamations à gauche) En outre, faut-il le rappeler, il ne s'agit pas de la politique de la France mais de celle de l'Europe, élaborée et conduite par tous nos partenaires et par nous-mêmes. Enfin, je n'ai pas entendu par un quelconque gouvernement voisin, et il y en a qui sont de gauche, de propositions pour mener une politique alternative. (Nouvelles exclamations sur les mêmes bancs)
Je veux aussi vous faire remarquer que nous avons la chance immense, dans notre pays, de ne pas être touchés par la vague xénophobe qui frappe le monde en son entier et une partie de l'Europe à l'occasion de la crise économique. En France, Dieu -laïc- merci (sourires), les étrangers qui travaillent ne sont pas pris pour des boucs émissaires. J'y vois l'indice que nos compatriotes approuvent la politique que nous menons, faite de fermeté et d'humanité. Je suis convaincu qu'il existe un lien absolu entre immigration légale et intégration. L'ouverture généreuse des frontières aboutit à des résultats désastreux avec le développement des marchands de sommeil, l'accroissement du racisme et de la xénophobie et le recul de l'intégration. D'ailleurs, tous les mouvements de régularisation massive se sont soldés par des échecs en créant un appel d'air.
Après trois mois de débats intenses, aucune association n'a pu apporter la preuve d'une seule condamnation d'un particulier ayant porté secours à un étranger en situation irrégulière. En soixante trois années d'existence, l'article L. 622-1 n'a donné lieu à aucune condamnation. Il s'agit donc d'un délit mythique, fantasmé et c'est pourquoi il est difficile de supprimer quelque chose qui n'existe pas. Face à cette question, M. Chevènement aboutissait aux mêmes conclusions.
Il n'est pas possible de sanctuariser les associations à but non lucratif qui aident les personnes en situation irrégulière car des passeurs pourraient très facilement créer de telles associations pour couvrir leurs activités et se soustraire automatiquement à toute poursuite ou perquisition.
En 1998, le Parlement avait dit qu'il reviendrait au Gouvernement de fixer par décret la liste des associations protégées. Jean-Pierre Chevènement avait été hostile à cette disposition, qui avait d'ailleurs été censurée par le Conseil constitutionnel.
Je le redis : le délit de solidarité n'existe pas dans notre pays. Nous aurons sans doute l'occasion d'en reparler lorsque nous examinerons les propositions de loi de l'opposition.
M. Michel Charasse. - Juridiquement et sur le fond, M. le ministre a raison. Pourtant, au cours des deux ou trois derniers hivers, avant donc qu'il ne prenne ses fonctions, il arrivait fréquemment que les forces de l'ordre procèdent à des interpellations de personnes qui distribuaient de la soupe le soir. Elles étaient emmenées au commissariat, interrogées puis libérées dans la nuit. Aucune trace de ces interpellations ne figure dans les statistiques des ministères de l'intérieur et de la justice. Pourtant, les associations caritatives ont été très perturbées.
Faut-il un texte législatif pour régler le problème ?
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission. - Non !
M. Michel Charasse. - Il suffirait sans doute de donner aux forces de l'ordre les instructions nécessaires. Il faut cesser ce petit jeu ! Ces bénévoles ne sont pas des complices des passeurs : ils ne font que distribuer de la nourriture à des gens qui ont faim ! (M. Charles Gautier applaudit)
M. Éric Besson, ministre. - Je suis sensible au ton et à la précision de M. Charasse. La police française a reçu des instructions très précises : elle n'interpelle pas les étrangers en situation irrégulière à la préfecture, dans les hôpitaux ou à la sortie des écoles, ni, en théorie, à proximité des lieux où ils reçoivent secours et assistance. Vous m'avez signalé certains cas où il y aurait pu avoir erreur, ou mauvaise manière. Je vous crois sur parole. J'ai demandé à mes services d'étudier l'opportunité d'une circulaire globale, contresignée par les ministres compétents, et/ou d'un nouveau livret d'explication et d'accompagnement, afin de lever toute ambigüité.
Merci d'avoir reconnu qu'il n'y avait pas eu de condamnation. Notre pays a avancé à grands pas ces dernières années ; je suis favorable à toute clarification supplémentaire.
M. Michel Charasse. - Si l'on peut faire simple, c'est mieux !
Mme Alima Boumediene-Thiery. - S'il n'y a pas eu de condamnation, l'association Ban public affirme que plusieurs personnes ont toutefois été convoquées devant le juge, voire mises en examen !
L'Europe est en train de modifier le « paquet asile », des directives -Dublin 2, Eurodac- doivent être transposées... Pourquoi ne pas attendre le rapport prévu pour juin avant de modifier la loi, qui ne sera appliquée qu'en 2011 ?
M. Michel Charasse. - Les amendements de M. Gautier et de Mme Assassi ne règlent pas le problème du placement de bénévoles en garde à vue jusqu'à l'aube ! Soit il faut un texte différent, soit il faut dire aux forces de l'ordre d'arrêter ce petit jeu. On n'a pas à passer la nuit au commissariat pour avoir donné un bol de soupe à quelqu'un qui crevait de faim et de froid !
Mme Alima Boumediene-Thiery. - Nous sommes tous d'accord.
M. Michel Charasse. - C'est le meilleur moyen de décourager les bénévoles ! La réponse du ministre me satisfait. La police n'a pas à accourir parce que des bourgeois se plaignent de voir une camionnette d'Emmaüs ou des Restos du Coeur sous leurs fenêtres !
L'amendement n°1 rectifié bis n'est pas adopté, non plus que l'amendement n°26.
M. le président. - Amendement n°2 rectifié bis, présenté par M. Charles Gautier et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
Avant l'article 1er, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article L. 622-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est ainsi modifié :
1° Le 3° est ainsi rédigé :
« 3° De toute personne physique ou morale qui sera intervenue pour préserver les droits, la dignité ou l'intégrité physique de l'étranger, sauf si cette aide a été réalisée à titre onéreux ; »
2° Après le 3°, il est inséré un 4° ainsi rédigé :
« 4° De tous les établissements et services visés à l'article L. 312-1 du code de l'action sociale et des familles, ainsi que leurs salariés et bénévoles lorsqu'ils agissent dans le cadre de ces établissements et services, ainsi que des agents publics, professions libérales, salariés et bénévoles intervenant au sein de différentes structures qui ont pour mission d'accompagner et d'assurer une prise en charge des personnes en difficulté, dont certaines sont des étrangers en situation irrégulière - que cette prise en charge soit sanitaire, sociale ou juridique. »
M. Charles Gautier. - Il a été défendu.
M. le président. - Amendement n°27, présenté par Mme Assassi et les membres du groupe CRC-SPG.
Avant l'article 1er, ajouter un article additionnel ainsi rédigé :
L'article L. 622-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est ainsi modifié :
1° Le quatrième alinéa (3°) est ainsi rédigé :
« 3° De toute personne physique ou morale qui sera intervenue pour préserver les droits et la dignité ou l'intégrité physique de l'étranger, sauf si cette aide a été réalisée dans un but lucratif. »
2° Après le quatrième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« 4° De tous les établissements et services visés à l'article L. 312-1 du code de l'action sociale et des familles, et de leurs salariés et bénévoles lorsqu'ils agissent dans le cadre de ces établissements et services, ainsi que des agents publics, des professionnels qui aident et aux associations de défense des droits et des associations à but humanitaire. »
Mme Éliane Assassi. - Nous exemptons les établissements et services de santé ainsi que leurs bénévoles et salariés.
M. Jean-René Lecerf, rapporteur. - Mêmes causes, mêmes effets : retrait, sinon rejet.
M. Éric Besson, ministre. - Avis défavorable.
L'amendement n°2 rectifié bis n'est pas adopté, non plus que l'amendement n°27.
M. le président. - Amendement n°28, présenté par Mme Assassi et les membres du groupe CRC-SPG.
Avant l'article 1er, ajouter un article additionnel ainsi rédigé :
L'article L. 213-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est ainsi modifié :
« Cette décision est notifiée à l'intéressé avec mention de son droit d'avertir ou de faire avertir la personne chez laquelle il a indiqué qu'il devait se rendre, son consulat ou le conseil de son choix. La décision mentionne également son droit d'introduire un recours en annulation sur le fondement de l'article L. 213-9 et précise les voies et délais de ce recours. La décision et la notification des droits qui l'accompagne doivent lui être communiquées dans une langue qu'il comprend. » ;
2° Il est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« En aucun cas, le refus d'entrée ne peut donner lieu à une mesure de rapatriement contre le gré de l'intéressé avant l'expiration du délai d'un jour franc. »
Mme Éliane Assassi. - Le recours suspensif introduit par la loi du 20 novembre 2007 est loin d'être effectif. Nous étendons ce droit à tous les étrangers maintenus en zone d'attente et nous rétablissons le délai d'un jour franc systématique avant tout rapatriement.
M. Jean-René Lecerf, rapporteur. - L'arrêt Gebremedhin de la Cour européenne des droits de l'homme ne porte que sur les demandeurs d'asile à la frontière, dont le refoulement, en cas d'erreur d'appréciation de l'administration, aurait des conséquences immédiates sur leur sécurité. Les autres demandeurs ne sont pas exposés au même risque. Avis défavorable.
M. Éric Besson, ministre. - Je rejoins le rapporteur. Cet amendement aurait des conséquences désastreuses sur la lutte contre l'immigration clandestine : il favoriserait les recours dilatoires et conduirait à une saturation des zones d'attente. Il faut distinguer les demandeurs d'asile des étrangers auxquels l'entrée est refusée pour défaut de documents ou de visa, qui ne font l'objet d'aucune menace dans leur pays d'origine.
L'amendement n°28 n'est pas adopté.
Article premier
Les neuf premiers alinéas de l'article L. 213-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile sont remplacés par les trois alinéas ainsi rédigés :
« L'étranger qui a fait l'objet d'un refus d'entrée sur le territoire français au titre de l'asile peut, dans les soixante-douze heures suivant la notification de cette décision, en demander l'annulation au président de la Cour nationale du droit d'asile. Sa requête est examinée par le président de la Cour ou par un président de section délégué à cet effet, dans un délai de soixante-douze heures à compter de sa saisine, dans des conditions prévues par un décret en Conseil d'État.
« La décision de refus d'entrée au titre de l'asile ne peut être exécutée avant l'expiration d'un délai de soixante-douze heures suivant sa notification ou, en cas de saisine du président de la Cour nationale du droit d'asile, avant que ce dernier ou le président de section désigné à cette fin n'ait statué.
« Le décret mentionné au premier alinéa prévoit les conditions dans lesquelles le président de la Cour ou le président de section délégué peut tenir une audience foraine dans une salle ouverte au public spécialement aménagée à cet effet, auprès de la zone d'attente au sein de laquelle l'intéressé est maintenu. Il organise également la possibilité, en cas de nécessité tenant à l'éloignement géographique de ladite zone d'attente, de relier, en direct, par un moyen de communication audiovisuelle qui garantit la confidentialité de la transmission, la salle d'audience de la Cour avec une salle d'audience ouverte au public spécialement aménagée à cet effet, dans des conditions respectant les droits de l'intéressé prévus par l'article L. 733-1. Dans ce cas, le conseil de l'intéressé et, le cas échéant, l'interprète, sont physiquement présents auprès de lui. »
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. - Cette semaine d'initiative parlementaire est certes l'occasion d'examiner des propositions de loi, mais dans quelles conditions : sept minutes pour exposer notre position sur ce texte !
Le transfert du contentieux du refus de l'entrée sur le territoire au titre de l'asile vers la CNDA assurerait-il un recours effectif et suspensif aux demandeurs d'asile ? Je ne le crois pas. La rédaction initiale de la proposition de loi conservait le délai actuel de 48 heures pour présenter un recours et l'exigence d'une requête motivée. Nous avions déposé, en octobre dernier, une proposition de loi tendant à allonger ce délai, beaucoup trop court, surtout lorsqu'il expire un dimanche ou un jour férié ; la commission, à l'initiative du rapporteur et de nos collègues socialistes, l'a porté à 72 heures. C'est une avancée, tout comme la suppression de l'exigence de requête motivée qui constituait un obstacle pour les demandeurs d'asile contraints de rédiger en très peu de temps une requête étayée en français.
L'allongement du délai et la suppression de la motivation sont des avancées, les seules de ce texte, puisque les décisions de la CNDA ne sont pas susceptibles d'appel. L'actuel recours non suspensif, n'est pas satisfaisant non plus : nous présenterons des amendements à ce sujet.
Juge unique, audiences foraines, visioconférences : une justice au rabais est créée pour les étrangers, privés des conditions garanties, dans les procès, aux autres justiciables. L'article premier marque un recul.
M. le président. - Amendement n°29, présenté par Mme Assassi et les membres du groupe CRC-SPG.
Supprimer cet article.
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. - Cette réforme n'est en rien justifiée par la pratique actuelle : en quoi le tribunal administratif serait-il incompétent pour apprécier les décisions de police administrative ? Point n'est besoin pour cela de connaissances géopolitiques ; le juge se prononce sur le caractère fondé ou non du refus d'admission, non sur le fond de la demande d'asile. Nul besoin de spécialisation en droit de l'asile ! La CNDA risque de juger le fond, d'autant que la jurisprudence relative à la notion de « décision manifestement infondée » demeure bien floue. Des distorsions d'interprétations sont inévitables entre magistrats. Or, la formation ne sera pas collégiale et rien ne viendra contrebalancer une tentation du juge unique d'analyser le dossier au fond.
M. Michel Charasse. - Comme en référé.
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. - Enfin, confier à la CNDA ce contentieux enferme celui-ci dans le seul champ du droit d'asile et rend impossible l'extension d'un recours suspensif pour les autres étrangers.
M. le président. - Amendement n°3 rectifié bis, présenté par M. Charles Gautier et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
Rédiger comme suit cet article :
L'article L. 213-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est ainsi rédigé :
« Art. L. 213-9. - L'étranger qui a fait l'objet d'un refus d'entrée sur le territoire français peut, dans les soixante-douze heures suivant la notification de cette décision, en demander l'annulation, par requête motivée, au président du tribunal administratif.
« Le président, ou le magistrat qu'il désigne à cette fin parmi les membres de sa juridiction ou les magistrats honoraires inscrits sur la liste mentionnée à l'article L. 222-2-1 du code de justice administrative, statue dans un délai de soixante-douze heures à compter de sa saisine.
« L'étranger est assisté de son conseil s'il en a un. Il peut demander au président ou au magistrat désigné à cette fin qu'il lui en soit désigné un d'office. L'étranger peut demander au président du tribunal ou au magistrat désigné à cette fin le concours d'un interprète. L'audience se déroule sans conclusions du commissaire du Gouvernement.
« Par dérogation au précédent alinéa, le président du tribunal administratif ou le magistrat désigné à cette fin peut, par ordonnance motivée, donner acte des désistements, constater qu'il n'y a pas lieu de statuer sur un recours et rejeter les recours ne relevant manifestement pas de la compétence de la juridiction administrative.
« L'audience se tient dans les locaux du tribunal administratif compétent.
« La décision de refus d'entrée au titre de l'asile ne peut être exécutée avant l'expiration d'un délai de soixante-douze heures suivant sa notification ou, en cas de saisine du président du tribunal administratif, avant que ce dernier ou le magistrat désigné à cette fin n'ait statué.
« Les dispositions du titre II du présent livre sont applicables.
« Le jugement du président du tribunal administratif ou du magistrat désigné par lui est susceptible d'appel dans un délai d'un mois devant le président de la cour administrative d'appel territorialement compétente ou un magistrat désigné par ce dernier. Cet appel n'est pas suspensif.
« Si le refus d'entrée au titre de l'asile est annulé, il est immédiatement mis fin au maintien en zone d'attente de l'étranger, qui est autorisé à entrer en France muni d'un visa de régularisation de huit jours. Dans ce délai, l'autorité administrative compétente lui délivre, à sa demande, une autorisation provisoire de séjour lui permettant de déposer sa demande d'asile auprès de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides.
« La décision de refus d'entrée au titre de l'asile qui n'a pas été contestée dans le délai prévu au premier alinéa ou qui n'a pas fait l'objet d'une annulation dans les conditions prévues au présent article peut être exécutée d'office par l'administration. »
M. Charles Gautier. - Notre amendement rejoint l'amendement de suppression dans la mesure où le groupe socialiste refuse de s'inscrire dans la logique de votre texte, dont l'objectif premier est de réduire les délais de procédure. Il renvoie en outre à un décret le soin de modifier ultérieurement les modalités relatives à l'organisation des audiences foraines et de la visioconférence ; il exclut toute formation collégiale ; et nous craignons finalement le glissement vers une procédure de la demande d'asile à la frontière, autrement dit un examen à la hâte du fond.
Nous avions dénoncé le recours introduit par la loi du 20 novembre 2007, suspensif uniquement au bénéfice des demandeurs d'admission sur le territoire au titre de l'asile. Les associations nous alertent sur le grand nombre de mineurs isolés menacés de refoulement à la frontière alors qu'ils invoquent des liens familiaux sur le territoire français. Le recours doit être suspensif, conformément à l'exigence posée par la Cour européenne des droits de l'homme.
Enfin, comme l'a dit notre collègue CRC-SPG, la spécialisation de la CNDA n'est pas un avantage, elle peut être un inconvénient. Et plutôt que d'enfermer cette procédure dans le seul champ du droit d'asile, il faut viser à étendre le recours suspensif au profit de tous les étrangers faisant l'objet d'une décision de refus d'entrée sur le territoire.
M. le président. - Amendement n°40, présenté par le Gouvernement.
Dans la première phrase du deuxième alinéa de cet article, après les mots :
en demander l'annulation
insérer les mots :
, par requête motivée,
Supprimer le troisième alinéa (2°) de cet article.
M. Éric Besson, ministre. - Le Gouvernement propose une seule modification de votre texte, elle vise à réintroduire la notion de requête motivée, car la règle générale veut que toute requête devant un juge administratif résume les faits et les moyens et s'achève par des conclusions. C'est l'article R. 411 du code de justice administrative, rappelé dans le code relatif à l'entrée et au séjour en France des étrangers.
Ainsi le juge peut-il se concentrer sur l'aspect de la décision qui pose problème. Les indications fournies par le requérant peuvent être sommaires, le juge administratif est bienveillant, il ne verse pas dans un formalisme excessif. Mais il gère mieux le temps disponible pour la préparation de l'audience s'il sait pourquoi la décision est contestée. N'allez pas créer un précédent fâcheux qui pourrait s'étendre à d'autres procédures, notamment celles en urgence.
En outre, l'allongement du délai de recours fait tomber l'objection du manque de temps. Porter le délai à 72 heures, oui, mais accompagner cette mesure d'une suppression de la motivation, cela est excessif. Le HCR a, dans son avis sur la proposition de loi, estimé positif l'allongement du délai, les conditions de préparation de l'audience étant ainsi améliorées ; mais il ajoute que la suppression de la motivation, dès lors, « pourrait paraître superflue ».
M. le président. - Amendement n°4 rectifié bis, présenté par Mme Boumediene-Thiery et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
Après la première phrase du deuxième alinéa de cet article, insérer une phrase ainsi rédigée :
Lorsque ce délai expire un samedi, un dimanche ou un jour férié ou chômé, il y a lieu d'admettre la recevabilité du recours présenté le premier jour ouvrable suivant.
Mme Alima Boumediene-Thiery. - Je me réjouis que le délai soit porté à 72 heures mais il reste un problème pratique à régler. Les délais demeurent très brefs si le refus d'admission sur le territoire français est décidé un vendredi ou la veille d'un jour férié. Nous avons proposé en conséquence de préciser que seuls les jours ouvrés étaient décomptés. On nous répond que cela crée une inégalité entre les demandeurs, selon le jour où la décision est notifiée. Mais vous avez créé une inégalité selon le jour du refus ! Nous préférons un minimum de 72 heures, auxquelles s'ajoutent les jours chômés, à un maximum de 72 heures réduites à 24 si la décision intervient un vendredi.
Entre deux inégalités, nous choisissons la plus favorable aux demandeurs d'asile. C'est faire fausse route de penser que le simple allongement des délais règle le problème. Nous entendons assurer le caractère effectif du recours, en conformité avec l'article 13 de la Convention européenne des droits de l'homme.
M. le président. - Amendement n°7 rectifié bis, présenté par M. Charles Gautier et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
I. - Dans la seconde phrase du deuxième alinéa de cet article, remplacer les mots :
le président de la Cour ou par un président de section délégué à cet effet, dans un délai de soixante-douze heures à compter de sa saisine,
par les mots :
la Cour siégeant en formation collégiale, dans un délai de soixante-douze heures à compter de la saisine,
II. - En conséquence, dans le troisième alinéa de cet article, remplacer les mots :
ce dernier ou le président de section désigné à cette fin
par les mots :
la Cour siégeant en formation collégiale
M. Charles Gautier. - L'article L. 213-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose que le tribunal administratif peut, par ordonnance motivée, donner acte des désistements, constater qu'il n'y a pas lieu de statuer sur un recours et rejeter les recours ne relevant manifestement pas de la compétence de la juridiction administrative. L'article premier de la proposition de loi n'a pas repris ce dispositif, mais le rapporteur l'a réintroduit par article additionnel pour compléter l'actuel article L. 733-2, qui prévoit que le président de la CNDA et les présidents de section peuvent, par ordonnance, régler les affaires dont la nature ne justifie pas l'intervention d'une formation collégiale. L'article 3 de la proposition de loi étend le recours à l'ordonnance au contentieux de l'asile à la frontière.
Présentée comme une simple coordination, la réintroduction des ordonnances dites de « tri » rendra possible, comme avant 2007, le rejet de nombreux recours par simple ordonnance, sans audience, sans débat, sans que les personnes concernées aient pu être entendues. Le rapport de M. Lecerf précise que 20 % des recours ont fait l'objet d'une ordonnance en 2008. A nos yeux, les dispenses d'audiences devraient être exclusivement réservées aux désistements et au constat de l'incompétence de la CNDA. En second lieu, dès lors que seuls le président de la Cour et les présidents de section seront appelés à examiner les recours, et en l'absence d'autres précisions, l'article 3 permettra de renvoyer aux ordonnances la totalité du règlement du contentieux des décisions de refus d'entrée sur le territoire au titre de l'asile. Est-ce véritablement le souhait de la présidente de la CNDA qui, lors de son audition, a expliqué que la Cour pourrait recourir aux ordonnances pour le nouveau contentieux de l'asile à la frontière ?
Bien que la demande d'entrée sur le territoire au titre de l'asile ne puisse être assimilée à la demande d'asile elle-même, nous craignons que le transfert de compétence ne débouche à terme sur un examen au fond de la demande. En commission, le rapporteur s'est opposé à notre amendement au motif que la requête devait être examinée dans des délais très courts et qu'il ne s'agissait que de statuer sur le caractère manifestement infondé ou non de la demande d'entrée sur le territoire. Si c'est le cas, la spécificité de la CNDA n'est plus nécessaire et la réforme n'est plus justifiée... J'ajoute que les réticences du HCR à participer à la prise d'une décision relative à l'entrée des étrangers sur le territoire national sont légitimes : nous en sommes, à ce stade de la procédure, à un contentieux portant sur une décision de police administrative.
Dans ces conditions, et au regard des incertitudes qui demeurent, le recours à la formation collégiale est une garantie.
M. le président. - Amendement n°30, présenté par Mme Assassi et les membres du groupe CRC-SPG.
Dans la seconde phrase du deuxième alinéa de cet article, remplacer les mots :
le président de la Cour ou par un président de section délégué à cet effet
par les mots :
la Cour siégeant en formation collégiale
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. - L'attribution du contentieux à la CNDA est justifiée, nous dit-on, par la volonté de confier celui-ci à des magistrats que leur expérience et leur spécialisation rendent plus aptes à juger du caractère manifestement infondé d'une demande d'asile. C'est faire fi d'un problème majeur, celui de l'encombrement de la Cour. En cinq ans, le délai de traitement des recours est passé de huit à treize mois. Comme l'a relevé le rapport Richard, la charge de travail du président de la CNDA et des présidents de section est déjà lourde. Il est évident que le transfert du contentieux va se faire au détriment de la collégialité, qui est pourtant la garantie d'un bon fonctionnement de la Cour. D'où notre amendement.
M. le président. - Amendement n°32, présenté par Mme Assassi et les membres du groupe CRC-SPG.
Dans le troisième alinéa de cet article, remplacer les mots :
ce dernier ou le président de section désigné à cette fin
par les mots :
la Cour siégeant en formation collégiale
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. - Amendement de cohérence : le juge unique laisse une plus grande place à l'arbitraire.
M. le président. - Amendement n°31, présenté par Mme Assassi et les membres du groupe CRC-SPG.
Compléter le deuxième alinéa de cet article par une phrase ainsi rédigée :
Dans le cadre du contrôle que la Cour exerce sur les décisions de refus d'entrée sur le territoire, ce contrôle se limite à un contrôle de l'excès de pouvoir.
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. - Depuis de nombreuses années, l'examen des demandes d'asile des personnes en zone d'attente va bien au-delà de l'appréciation de leur caractère manifestement infondé. Aujourd'hui, la CNDA n'est pas juge de la légalité et n'a pas compétence pour statuer en excès de pouvoir. Si transfert il y a, il doit être entouré des plus grandes garanties, notamment pour éviter que l'examen du recours contre un refus d'entrée sur le territoire français au titre de l'asile ne conduise la Cour à statuer sur l'éligibilité de l'étranger au statut de réfugié. D'où cet amendement de repli.
M. le président. - Amendement n°5 rectifié bis, présenté par Mme Boumediene-Thiery et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
Après le deuxième alinéa de cet article, insérer un alinéa ainsi rédigé :
« L'article L. 733-2 n'est pas applicable à la procédure mentionnée à l'alinéa précédent.
Mme Alima Boumediene-Thiery. - Selon le rapporteur, la simplicité de l'examen des requêtes justifie qu'on n'impose pas à la Cour de siéger en formation collégiale. La collégialité est un principe en voie de disparition dans notre droit, que la raison en soit budgétaire ou la rapidité de traitement des affaires. Elle devient l'exception tandis que le juge unique devient la règle alors qu'elle apporte une garantie d'impartialité et d'indépendance. Dans le cas qui nous occupe, le recours à la visioconférence ou à des audiences foraines au motif de faire des économies nous éloigne peu à peu de l'équité. Raison de plus pour exiger la collégialité, qui évitera l'examen sommaire et partial des recours sans nécessairement ralentir les procédures. Collégialité n'est pas pluralité d'examens.
M. le président. - Amendement n°6 rectifié bis, présenté par Mme Boumediene-Thiery et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
Après le deuxième alinéa de cet article, insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Le recours est considéré comme recevable dès lors que l'étranger a fait l'objet d'une décision de refus d'entrée sur le territoire français au titre de l'asile, sans qu'il puisse être considéré comme ne relevant manifestement pas de la compétence de la Cour nationale du droit d'asile, entaché d'une irrecevabilité manifeste non susceptible d'être couverte en cours d'instance ou manifestement mal fondé.
Mme Alima Boumediene-Thiery. - Nous entendons réduire le champ des ordonnances aux seuls cas de désistement et de non-lieu à statuer. La suppression de l'exigence de requête motivée, que nous avons proposée en commission, apporte certes une garantie mais elle n'a pas cet effet. Nous proposons d'exclure du champ des ordonnances plusieurs moyens qui -à l'exception, je peux en convenir, de l'irrecevabilité manifeste du recours- nous semblent des obstacles à l'examen au fond de la demande par le juge. L'enjeu, c'est l'octroi à l'étranger du statut de réfugié ; or sa demande d'asile ne sera examinée qu'une fois qu'il sera admis sur le territoire et qu'il l'aura formulée. Admettre qu'elle puisse être rejetée à ce stade, c'est en réalité s'assurer d'une plus grande fluidité de la procédure ultérieure d'octroi de l'asile ; c'est instituer un nouveau filtre, sans que l'étranger puisse se justifier.
Les économies et le gain de temps attendus du recours à la visioconférence, aux audiences délocalisées et au juge unique doivent conduire à plus de souplesse dans l'examen de la recevabilité des requêtes. La procédure du rejet au tri est une injustice, ne la maintenons pas de manière détournée en laissant le soin à un décret de fixer les conditions de cette recevabilité.
M. le président. - Amendement n°8 rectifié bis, présenté par Mme Boumediene-Thiery et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
Après le deuxième alinéa de cet article, insérer un alinéa ainsi rédigé :
« L'étranger est assisté de son conseil s'il en a un. Il peut demander au président de la Cour ou au président de section délégué qu'il lui en soit désigné un d'office. Il peut, le cas échéant, demander au président de la Cour ou au président de section délégué le concours d'un interprète.
Mme Alima Boumediene-Thiery. - La commission nous objecte que les garanties que nous réclamons découlent déjà du code des étrangers. Mais l'article L. 221-4, qu'elle invoque, ne concerne que les modalités de notification à l'étranger de ses droits lors du placement en zone d'attente, ou d'une décision de prolongation du placement, nullement la contestation d'un refus d'admission sur le territoire au titre de l'asile.
L'article L. 213-9, qui regroupe les dispositions relatives au refus d'entrée sur le territoire au titre de l'asile, mentionne bien la possibilité d'être assisté d'un avocat et d'un interprète. Si cette mention est superflue, pourquoi ne l'avoir pas supprimée lors de la réforme de la procédure, en 2007 ? Cette mention, qui ne semblait pas superflue en 2007, le serait donc aujourd'hui ?
Et pourquoi préciser, dans le cas de la visioconférence, que l'avocat et l'interprète sont présents auprès de l'étranger ? C'est qu'il s'agit d'une procédure spécifique, avec des règles spécifiques. Il en va de même pour la procédure d'admission à la frontière au titre de l'asile. Si cette précision disparaît, l'étranger ne pourra plus déposer de recours pour non-respect du droit à l'assistance d'un avocat, puisqu'il n'y sera plus fait référence.
Une loi n'est jamais trop bavarde lorsqu'il s'agit de protéger des droits fondamentaux.
M. le président. - Amendement n°25, présenté par Mmes Boumediene-Thiery, Blandin, Voynet, MM. Desessard et Muller.
I. Avant le dernier alinéa de cet article, insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsque le président de la Cour ou le président de section délégué annule la décision de refus d'entrée au titre de l'asile, il peut, d'office, et avec l'accord de l'étranger, se prononcer sur la reconnaissance de la qualité de réfugié ou l'octroi de la protection subsidiaire dans des conditions prévues par un décret en Conseil d'État.
II. - En conséquence, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... - L'article L. 713-1 du même code est complété par les mots : « , ou par la Cour nationale du droit d'asile dans les conditions prévues par le troisième alinéa de l'article L. 213-9 ».
Mme Alima Boumediene-Thiery. - Cet amendement en forme de provocation est inspiré par l'ancien président de la CNDA, qui réclamait la possibilité, pour la Cour, de statuer au fond. Le rapporteur objecte que l'on accroîtrait ainsi les risques de confusion dans la procédure. C'est précisément ce que nous reprochons à cette proposition de loi. On confie à la CNDA des pouvoirs qui ne lui appartiennent pas et qui relèvent du domaine de la police des étrangers. La Cour pourrait être amenée à statuer sur une demande d'asile déposée par un étranger auquel elle aurait refusé l'admission. On nous objecte qu'elle ne serait pas liée par son refus initial. Mais voudra-t-elle se déjuger ?
Le titre même de ce texte entretient la confusion : l'admission n'a rien à voir avec l'asile. Un étranger entré sur le territoire peut fort bien déposer une autre demande.
Nous ne pourrons envisager de retirer cet amendement que si nous obtenons réponse sur tous ces points.
M. le président. - Amendement n°9 rectifié bis, présenté par M. Charles Gautier et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
Rédiger comme suit le dernier alinéa de cet article :
« L'audience se tient dans les locaux de la Cour nationale du droit d'asile. Toutefois, après que l'étranger dûment informé dans une langue qu'il comprend et assisté de son conseil a donné son accord, le président de la Cour ou le président de section délégué à cet effet peut tenir une audience foraine dans une salle d'audience de la zone d'attente spécialement aménagée à cet effet. La salle d'audience de la zone d'attente est ouverte au public et l'audience se déroule dans les conditions respectant les droits de l'intéressé prévus à l'article L. 733-1. »
M. Charles Gautier. - Dans la discussion générale, je me suis efforcé de relever les avancées de cette proposition de loi, parmi lesquelles l'allongement du délai de recours. Mais j'ai aussi souligné combien elle fragilise l'application des garanties. Nous proposerons de les conforter sur plusieurs points. Ainsi des conditions matérielles du déroulement de l'audience, qui méritent d'être précisées dans la loi, et non par décret. L'audience doit se tenir dans les locaux de la CNDA. Les audiences foraines, si elles sont dictées par des raisons de bon sens, comme la distance, doivent rester l'exception.
L'étranger, assisté de son conseil et informé dans une langue qu'il comprend doit exprimer son accord à la délocalisation de l'audience. La salle doit être aménagée, ouverte au public, assurer le respect des droits prévus par l'article L. 733-1 du Ceseda.
Au motif de l'urgence et du fait que la Cour a compétence nationale, la commission a maintenu le recours à la visioconférence. Comme en 2007, nous nous y opposons. Si cette technologie s'est largement diffusée, depuis 2003, dans la procédure pénale, elle nous semble inadaptée au cas d'étrangers qui peuvent être traumatisés par les persécutions et ne pas être en mesure de s'exprimer sereinement. Alors que le droit au refus est reconnu par le droit en vigueur, le texte de la commission ne le reprend pas. Notre opposition ne peut en être que plus forte.
M. le président. - Amendement n°33, présenté par Mme Assassi et les membres du groupe CRC-SPG.
Rédiger comme suit le dernier alinéa de cet article :
L'audience se tient dans les locaux de la Cour nationale du droit d'asile.
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. - Les audiences foraines sont contraires à la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme : elles n'assurent pas la publicité de l'audience et mettent en péril l'indépendance et l'impartialité des juges, qui seules garantissent un procès équitable.
Le texte prévoit que la salle d'audience sera ouverte au public et aménagée. Or, dans la zone d'attente de Roissy, cette salle, éloignée de toute habitation, installée dans une zone de fret d'accès difficile aux transports en commun, ne permet pas la publicité. J'ajoute que les zones d'attente sont placées sous contrôle administratif de la police. L'audience aurait donc lieu dans une zone administrée par l'une des parties, plaçant le juge en situation de dépendance incompatible avec son devoir d'impartialité.
Les avocats, les magistrats, ont exprimé leur désaccord sur cette question des audiences délocalisées, que ce soit dans la zone d'attente de Roissy ou dans les centres de rétention administrative, comme ce fut le cas dans celui de Toulouse, en 2007. La Cour de cassation, dans ses décisions du 16 avril 2008, a jugé illégales les audiences délocalisées dans les centres de rétention. Elles sont contraires à l'esprit et à la conception même que nous nous faisons, avec les magistrats et les avocats, de la justice.
Dans le même esprit, prévoir que, sauf opposition de l'étranger, l'audience pourra se tenir par vidéoconférence ne permet pas de garantir le respect des principes de recours effectif et de procès équitable.
Il faut des moyens, nous dit-on, à cette réforme. Il serait bon qu'y figurent les moyens nécessaires pour que les audiences se tiennent dans les locaux de la CNDA.
M. le président. - Amendement n°23, présenté par Mmes Boumediene-Thiery, Blandin, Voynet, MM. Desessard et Muller.
Dans la première phrase du dernier alinéa de cet article, après le mot :
peut
insérer les mots :
, sauf si l'étranger dûment informé dans une langue qu'il comprend s'y oppose,
Mme Alima Boumediene-Thiery. - Nous émettons sur les délocalisations des audiences, nouveauté qui ne figure pas à l'article L. 213-9, les plus grandes réserves. On nous dit que de telles audiences sont déjà possibles. Mais les audiences prévues par les articles L. 221-1 et L. 551-1 du code assurent-elles le droit à un procès équitable ?
La Cour de cassation, dans ses trois arrêts du 16 avril 2008, a procédé à des annulations, jugeant que l'expression « à proximité de la zone d'attente » ne signifiait pas à l'intérieur de la zone d'attente. Or, la salle de Roissy se trouve à l'intérieur de la zone d'attente. Nous demandons qu'elle soit située à l'extérieur et que l'étranger puisse donner son consentement.
M. le président. - Amendement n°34, présenté par Mme Assassi et les membres du groupe CRC-SPG.
Dans la première phrase du dernier alinéa de cet article, après le mot :
peut
insérer les mots :
, avec le consentement de l'étranger, dûment informé dans une langue qu'il comprend,
Mme Éliane Assassi. - Amendement de repli puisque, par principe, nous refusons toute audience au sein de la zone d'attente : la justice doit être rendue dans des lieux qui lui sont dédiés, ce qui n'est pas le cas d'une zone d'attente, bâtiment se situant hors d'un établissement judiciaire, contrôlé par la police et grillagé. C'est pourquoi cette délocalisation des audiences, si elle doit avoir lieu, doit rester exceptionnelle et ne doit être possible qu'avec le consentement de l'étranger qui, informé dans une langue qu'il comprend, devra y donner expressément son accord. L'ordonnance de novembre 1945 prévoyait que ce consentement devait être recueilli pour mettre en oeuvre la visioconférence. L'actuel article L. 231-9 a inversé le principe en prévoyant que « sauf si l'étranger dûment informé dans une langue qu'il comprend s'y oppose », l'audience peut se tenir au sein de la zone d'attente, au moyen de la visioconférence. Encore faut-il que, dans l'urgence et la pression psychologique que constitue un placement en zone d'attente, l'étranger comprenne les enjeux d'une telle délocalisation et pense à s'y opposer. L'article premier de la proposition de loi ne fait même plus référence au consentement de l'étranger, ni pour la délocalisation dans la zone d'attente ni pour l'utilisation de la visioconférence. La tenue de l'audience au sein d'une zone d'attente porte atteinte au droit à un procès équitable et, pour cette raison, des magistrats et des avocats refusent toujours de siéger dans la salle d'audience de la zone d'attente de Roissy.
Nous regrettons que le Gouvernement s'entête. Il faut au minimum que l'étranger soit expressément consentant à toute délocalisation.
M. le président. - Amendement n°10 rectifié bis, présenté par Mme Boumediene-Thiery et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
Supprimer la deuxième phrase du dernier alinéa de cet article.
Mme Alima Boumediene-Thiery. - Nous demandons de supprimer la procédure de délocalisation de l'audience. Le souci d'économie ne doit pas aller contre le droit à un procès équitable.
M. le président. - Amendement n°24, présenté par Mmes Boumediene-Thiery, Blandin, Voynet, MM. Desessard et Muller.
Dans la deuxième phrase du dernier alinéa de cet article, après les mots :
zone d'attente
insérer les mots :
et avec l'accord exprimé par l'étranger, dûment informé de cette possibilité dans une langue qu'il comprend
Mme Alima Boumediene-Thiery. - La disposition proposée par le texte est contraire à la Constitution. Le rapporteur fait une interprétation partiale de la décision du Conseil constitutionnel du 20 novembre 2003 car celle-ci impose bien deux conditions cumulatives au recours à la visioconférence : le consentement de l'étranger et l'ouverture au public des deux salles. Ce n'est pas le principe de l'utilisation de la visioconférence qui est en cause, ce sont les conditions mises à son utilisation. Notre amendement vise à rétablir la conformité du texte avec la décision du Conseil constitutionnel.
M. le président. - Amendement n°35, présenté par Mme Assassi et les membres du groupe CRC-SPG.
Dans la deuxième phrase du dernier alinéa de cet article, après les mots :
zone d'attente
insérer les mots :
et avec le consentement de l'étranger, dûment informé dans une langue qu'il comprend
Mme Éliane Assassi. - Amendement de repli puisqu'il prévoit que la visioconférence ne peut être mise en oeuvre qu'avec le consentement express de l'étranger, qui devra être informé dans une langue qu'il comprend.
M. le président. - Amendement n°21, présenté par Mmes Boumediene-Thiery, Blandin, Voynet, MM. Desessard et Muller.
I. - Dans la deuxième phrase du dernier alinéa de cet article, supprimer les mots :
ouverte au public
II. - Après cette même phrase, insérer une phrase ainsi rédigée :
La salle d'audience de la zone d'attente et celle de la Cour sont ouvertes au public.
Mme Alima Boumediene-Thiery. - Le Conseil constitutionnel avait exigé l'ouverture au public des deux salles. C'est sur cette base que l'article 25 de la loi de simplification du droit a généralisé la possibilité de la visioconférence. Nous ne pouvons pas négliger cette condition sous peine d'être censurés par le Conseil constitutionnel
M. le président. - Amendement n°11 rectifié bis, présenté par M. Charles Gautier et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :
« La décision du président de la Cour ou du président de section délégué à cet effet est susceptible d'appel dans un délai d'un mois devant le Conseil d'État. Cet appel n'est pas suspensif. »
M. Charles Gautier. - La proposition de loi supprime la voie de recours à la décision du président de la CNDA ou à celle du président de section délégué. Nous proposons de la rétablir parce que nous ne sommes pas convaincus par l'argument selon lequel ce recours étant non suspensif, il s'agirait d'une voie de recours théorique pour le requérant. Nous souhaitons que, sur ce point, la réforme se fasse à droit constant.
Actuellement, un recours, non suspensif, à la décision du président du tribunal administratif ou du magistrat désigné par lui est possible devant le président de la cour administrative d'appel dans les quinze jours. Ce qui ne posait aucune difficulté en 2007 ne devrait pas vous gêner en 2009 puisque nous reprenons le caractère non suspensif de l'appel. Dans de très nombreuses procédures, la voie d'appel n'est pas suspensive. Cette situation n'ôte pas l'intérêt à agir. Les arrêts du Conseil forment un corpus jurisprudentiel qui participe à l'élaboration et à l'application de la loi.
Si l'on ne rétablit pas une voie d'appel, les décisions de la CNDA seront seulement susceptibles d'un recours en cassation devant le Conseil d'État. Le pourvoi en cassation contre la décision de rejet de la CNDA est une voie de droit exceptionnelle. Ce n'est pas un appel. Dès lors, le juge de cassation ne rejuge pas l'affaire. II se contente de vérifier le respect des règles de procédure, des règles de forme et la correcte application du droit par la Cour.
La France risquerait à nouveau d'être condamnée par la Cour européenne, comme cela s'est produit par le passé.
M. le président. - Amendement n°36, présenté par Mme Assassi et les membres du groupe CRC-SPG.
Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :
« La décision du président de la Cour est susceptible d'appel dans un délai d'un mois devant le Conseil d'État. Cet appel est suspensif. »
Mme Éliane Assassi. - La proposition de loi prévoit que les décisions de la CNDA ne seraient pas susceptibles d'appel mais seulement d'un recours en cassation devant le Conseil d'État. Actuellement, les décisions du tribunal administratif sont susceptibles d'appel devant la Cour administrative d'appel territorialement compétente, mais ce recours n'est pas suspensif. Le rapporteur estime que cette garantie supplémentaire est très théorique. Avant que la cour administrative d'appel ait statué, soit l'étranger a été admis sur le territoire français, soit il a été éloigné. Reconnaissant le caractère théorique de l'appel, au lieu de le rendre opérant et protecteur pour les étrangers, vous préférez le supprimer ! Dans notre proposition de loi sur un recours effectif, déposée en octobre 2008, nous avons porté ce délai d'appel à un mois et rendu l'appel suspensif. C'est également ce que nous avions défendu lors de l'examen du projet de loi relatif à l'immigration, à l'intégration et à l'asile, en octobre 2007. Beaucoup de sénateurs avaient dénoncé le délai de quinze jours imposé pour faire appel dans le cadre de la nouvelle procédure créant un recours suspensif Ce recours ne sera effectif que si le recours en appel est lui aussi suspensif, sinon, comme le dit très bien le rapporteur, rien n'empêche les autorités d'éloigner l'étranger du territoire avant même que la cour d'appel n'ait statué.
Dans cette proposition de loi, la possibilité de faire appel n'existe plus. Nous proposons de la réintroduire, en l'adaptant à la nouvelle procédure devant la CNDA : puisque celle-ci est une juridiction à compétence nationale, ce n'est plus une cour administrative d'appel qui peut être territorialement compétente. Le Conseil d'État devient la juridiction compétente pour faire appel, ce qu'il est encore dans de rares cas.
M. le président. - Amendement n°20, présenté par Mmes Boumediene-Thiery, Blandin, Voynet, MM. Desessard et Muller.
Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :
« Le décret mentionné au premier alinéa prévoit également les conditions dans lesquelles il est dressé, dans chacune des deux salles d'audience, un procès-verbal des opérations effectuées. »
Mme Alima Boumediene-Thiery. - Il faut permettre la publicité des débats, conformément à l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, car elle protège le justiciable d'une justice secrète échappant au contrôle du public. Les difficultés d'accès aux audiences délocalisées, par exemple à Coquelles et Roissy, l'isolement de ces salles, enclavées dans des lieux clos sous haute surveillance policière, empêchent la publicité effective des audiences : elles sont difficiles d'accès, même pour les avocats.
C'est pourquoi nous proposons que les débats fassent l'objet d'un procès verbal, que chacun pourra consulter.
M. Jean-René Lecerf, rapporteur. - La commission, favorable à cette proposition de loi, ne peut qu'être défavorable aux amendements nos29 et 3 rectifié bis qui s'opposent à l'objet même de cette proposition.
Elle n'a pas pu examiner l'amendement n°40 du Gouvernement qui n'a été déposé qu'en début de séance. Personnellement, je suis sensible à certaines raisons du ministre : la position du HCR et le fait que la requête peut n'être que sommairement motivée. Mais cet amendement étant contraire à la position de la commission, je ne peux qu'y être défavorable
L'amendement n°4 rectifié bis ? Le délai de 72 heures présente un certain nombre d'avantages : sa simplicité le rend aisément compréhensible et il s'applique à tous. Ce que propose Mme Boumediene-Thiery est plus complexe et va contre le principe selon lequel les délais exprimés en heures se décomptent d'heure à heure. Il y a bien les ponts de trois jours du printemps mais les étrangers pourront préparer leurs recours pendant l'attente, avec l'aide des associations. Défavorable donc à l'amendement. Je vous rappelle que c'est le Sénat qui a fait porter le délai de 24 à 48 heures puis maintenant à 72.
La commission est également défavorable à l'amendement n°7 rectifié bis. M. Gautier connaît nos arguments : il a fait les questions et les réponses !
M. Charles Gautier. - Je lis dans vos pensées !
M. Jean-René Lecerf, rapporteur. - Comme dans un livre ouvert !
Il s'agit donc du « manifestement infondé ». L'application de cet amendement susciterait de nombreuses difficultés. Déplacer l'examen au stade de l'entrée en France ne serait pas très favorable à l'étranger... L'amendement n°30 a le même objet ; nous y sommes défavorables pour les mêmes raisons.
Notre collègue a évoqué un risque d'encombrement de la CNDA. Nous ne partageons pas son inquiétude : si les délais ont augmenté depuis 2003, c'est qu'il fallait résorber des stocks importants. C'est désormais en bonne voie : les stocks sont passés de 35 000 à 19 000 dossiers.
Pour les mêmes raisons, nous sommes défavorables à l'amendement n°32 ainsi qu'au n°31. Nous partageons certes l'objectif de celui-ci mais quel sens y a-t-il à parler d'un contrôle de la CNDA qui serait « limité à un contrôle de l'excès de pouvoir » ? Je ne connais ? en droit ? que les contrôles « minimum », portant sur une erreur manifeste, « normaux », touchant au fond juridique, et « maximum », prenant en compte les questions d'opportunité.
L'amendement n°5 rectifié bis est contraire au voeu de la commission, qui a ajouté un article 3 qui confirme l'application de l'article L. 733-2 du Ceseda. Est-ce vraiment un excès de pouvoir que de donner acte d'un désistement ? L'amendement n°6 rectifié bis limite certes le champ du précédent mais il touche encore des domaines dans lesquels il n'est pas exclu que l'on puisse statuer par ordonnance. L'asile économique n'a rien que de respectable mais il n'entre pas dans le champ de ce texte. Nous sommes donc défavorables à cet amendement, ainsi qu'au n°8 rectifié bis, qui est satisfait par l'article L. 733-1 du Ceseda.
Pourquoi accepter certaines répétitions ? De manière générale, je crains fort qu'elles ne marquent davantage une inquiétude sur l'applicabilité d'une règle qu'un renforcement de celle-ci. Une répétition s'imposait toutefois à propos de la visioconférence parce que, en son principe même, celle-ci suppose qu'il y a deux instances, d'un côté la Cour, de l'autre l'étranger ; il fallait donc bien préciser que l'étranger était physiquement assisté d'un conseil. Notre position n'est donc pas incohérente. Pour le cas que vous évoquez, il n'y a aucun doute à éliminer et, à supposer qu'il y en ait un, le compte rendu de nos débats témoignera de l'intention du législateur.
Le président Bernard s'interrogeait sur la possibilité de statuer à la frontière ; l'idée, dont s'inspire l'amendement n°25, est séduisante mais elle pose quelques difficultés. Outre que certains demandeurs d'asile arrivent traumatisés, on créerait ainsi une inégalité entre les demandeurs arrivant et ceux qui sont déjà sur le territoire national, qui n'auraient pas intérêt à s'engager dans une procédure d'urgence. L'amendement de Mme Boumediene-Thiery est plus subtil mais relève des mêmes objections que l'hypothèse du président Bernard. Défavorable, donc.
L'amendement n°9 rectifié bis ? Dans les cas où le Ceseda permet de statuer en audience foraine, le consentement de l'étranger n'est pas requis. S'il est assuré que ces audiences respectent les règles d'équité, le consentement n'a pas lieu d'être demandé.
L'amendement n°33 tend à interdire les audiences foraines et les visioconférences. Mais les premières évitent aux détenus les désagréments d'un transfèrement, et les secondes sont indispensables dans le cas des demandes d'asile déposées outre-mer, étant donné le délai très court dans lequel les audiences doivent avoir lieu. Il est impossible de statuer en 72 heures sans visioconférence sur une demande déposée à Mayotte ou en Nouvelle-Calédonie !
D'ailleurs, l'arbre ne doit pas cacher la forêt. La proposition de loi prévoit que l'on ne pourra recourir à la visioconférence qu'« en cas de nécessité tenant à l'éloignement géographique » ; or 97 % des demandes sont déposées dans les zones d'attentes de Roissy et d'Orly et ne sont donc pas concernées. Avis défavorable.
Avis défavorable aux amendements nos23, 34 et 10 rectifié bis, pour les mêmes raisons.
L'amendement n°24 tend à soumettre le recours à la visioconférence au consentement de l'intéressé. Mais cette technique est déjà fréquemment utilisée depuis 2003 dans la procédure pénale sans que le consentement des justiciables soit requis. Certes, la décision du Conseil constitutionnel m'a fait réfléchir. Mais si le droit à un procès équitable et la publicité des débats sont garantis, je ne vois aucune raison de requérir le consentement du demandeur. Il est toujours possible de saisir le Conseil constitutionnel. Mais je rappelle que la visioconférence ne concerne que 3 % des demandeurs !
Avis défavorable à l'amendement n°35, pour les mêmes raisons.
L'amendement n°21 tend à imposer l'ouverture au public des deux salles d'audience. Il est satisfait : la proposition de loi prévoit explicitement que la salle d'audience foraine sera ouverte au public -c'était le sens d'un amendement de Mme Boumediene-Thiery adopté en commission- et cela va de soi pour la visioconférence et les audiences de la CNDA. Pourquoi enfoncer des portes ouvertes ? Retrait.
L'amendement n°11 rectifié bis tend à rendre les décisions de la CNDA susceptibles d'appel devant le Conseil d'État. Ses auteurs proposaient à l'origine de rendre possible un appel devant une cour administrative d'appel, ce qui était tout de même curieux s'agissant des décisions d'une juridiction nationale. D'une manière générale, les décisions des juridictions à compétence nationale, comme les instances nationales des ordres professionnels, ne peuvent faire l'objet que d'un pourvoi en cassation devant le Conseil d'État et non d'un appel. Le Conseil d'État ne juge en appel que les décisions des tribunaux administratifs. Retrait.
L'amendement n°36 est identique au n°11 rectifié bis. En ouvrant la possibilité d'un appel suspensif dans un délai d'un mois, il obligerait à retenir les demandeurs d'asile dans les zones d'attentes pendant un temps considérable. Est-ce vraiment ce que vous souhaitez ? Retrait.
L'amendement n°20 tend à imposer un procès-verbal dans chacune des deux salles d'audience en cas de visioconférence. Cela alourdirait inutilement la procédure. Contrairement à ce qui vaut pour les audiences devant le juge des libertés et de la détention, le consentement du demandeur à la visioconférence n'est pas requis ici. Or le procès-verbal vise essentiellement à assurer que le justiciable est bien consentant. En cassation, le Conseil d'État se prononcera exclusivement sur la décision de la CNDA et il n'est donc pas nécessaire qu'il dispose du procès-verbal de la première audience. Avis défavorable.
M. Éric Besson, ministre. - Après ces commentaires très précis, pertinents et convaincants de M. le rapporteur, je me contenterai d'émettre sans autre explication un avis défavorable à tous les amendements. S'agissant de l'amendement du Gouvernement, déposé tardivement et qui remet en cause l'avis initial de la commission, je remercie M. le rapporteur de son ouverture d'esprit. Les motifs de la requête pourront être exposés sommairement : aucun formalisme ne sera exigé. En outre ? cet amendement est conforme aux recommandations du HCR, ce qui devrait suffire à dissiper les inquiétudes.
L'amendement n°29 n'est pas adopté, non plus que l'amendement n°3 rectifié bis.
Mme Alima Boumediene-Thiery. - Je regrette que le Gouvernement ait déposé son amendement. Il est parfois difficile pour les demandeurs d'asile de motiver leur requête et un document que j'ai sous les yeux indique que le tribunal administratif de Paris, compétent pour l'ensemble du territoire, a pris la fâcheuse habitude de rejeter tous les recours insuffisamment motivés. Les exigences des juges sont devenues très élevées. La suppression de l'obligation de motiver sa requête aurait mis fin à cette discrimination.
Mme Éliane Assassi. - Nous sommes fermement opposés à cet amendement. Le délai de recours, même porté à 72 heures, reste court et les demandeurs d'asile, fragilisés, confinés dans des zones d'attente et soumis à des pressions psychologiques n'ont pas toujours les moyens de rédiger une requête motivée. En outre, certains d'entre eux ne parlent pas français. Pourquoi, chaque fois que l'on observe un progrès, le Gouvernement se sent-il obligé d'instaurer des garde-fous ?
M. François-Noël Buffet. - La commission des lois n'avait pas prévu initialement d'imposer une requête motivée. Mais comme l'a rappelé M. le ministre, le HCR n'y est pas hostile. En outre, il n'est pas toujours avantageux de pouvoir présenter une requête non motivée car on arrive alors à l'audience avec un dossier vide. Le magistrat doit prendre connaissance des faits au pied levé. S'il disposait à l'avance d'informations même sommaires, il pourrait poser les bonnes questions au cours de l'audience et rendre un jugement plus éclairé. L'objectif est de rendre l'audience plus efficace : c'est pourquoi les membres de mon groupe et moi-même voterons l'amendement.
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Le Directeur du service du compte rendu analytique :
René-André Fabre
ORDRE DU JOUR
du Jeudi 7 mai 2009
Séance publique
A 9 HEURES, A 15 HEURES ET, ÉVENTUELLEMENT, LE SOIR
1. Question orale avec débat n°30 de M. François Rebsamen à Mme la ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi sur la création d'une contribution exceptionnelle de solidarité des grandes entreprises du secteur de l'énergie.
Le 2 avril 2009 - M. François Rebsamen attire l'attention de Mme la ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi sur la création d'une contribution exceptionnelle de solidarité des grandes entreprises du secteur de l'énergie. En effet, pleinement touchée par la crise financière, économique et sociale, la France est entrée en 2009 dans une période de récession. Le Gouvernement a révisé son hypothèse de croissance pour 2009 à - 1,5 % tandis que l'Insee annonce un acquis de croissance à la fin du deuxième trimestre très nettement négatif (- 2,9 %). Par ailleurs, le deuxième projet de loi de finances rectificative pour 2009 présente une détérioration massive des finances de l'État.
L'emploi et les salariés en sont les premières victimes. Face à cette situation sociale extrêmement difficile, il est fondamental de mettre en oeuvre rapidement des mesures en faveur de nos concitoyens et des entreprises les plus fragiles. Pourtant, face à ce constat, le Gouvernement s'entête à maintenir le bouclier fiscal, malgré son coût pour les finances publiques, tout en se privant de recettes générées par les superprofits des grandes entreprises, particulièrement celles intervenant dans le secteur de l'énergie. En effet, GDF-Suez affiche, pour 2008, un résultat net de 6,5 milliards d'euros quand Total annonce un bénéfice record de 14 milliards d'euros. Non seulement ces profits faramineux ont été obtenus par une politique de prix supportée par les consommateurs (pour lesquels la baisse de 10 % du tarif du gaz intervient trop tard et après la saison hivernale, par exemple) mais pire encore, Total annonce simultanément la suppression de 555 postes.
Pour toutes ces raisons, il l'interroge sur les mesures qu'entend prendre le Gouvernement pour augmenter la contribution de ces grandes entreprises à l'effort national de solidarité.
2. Proposition de loi tendant à assurer une plus grande équité dans notre politique de sécurité routière, notamment en matière de retrait des points du permis de conduire, présentée par MM. Nicolas About et Pierre Jarlier (n°378 rect. bis, 2007-2008).
Rapport de Mme Catherine Troendle, fait au nom de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale (n°331, 2008-2009).
3. Proposition de loi relative à l'évaluation et au contrôle de l'utilisation des aides publiques aux entreprises, aux banques et aux établissements financiers, présentée par M. Robert Hue et ses collègues du groupe CRC-SPG (n°239, 2008-2009).
Rapport de M. Albéric de Montgolfier, fait au nom de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la Nation (n°378, 2008-2009).
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DÉPÔTS
La Présidence a reçu :
- de M. Didier Boulaud un rapport fait au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées sur le projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, autorisant l'approbation de l'accord entre le gouvernement de la République française et le gouvernement de la République de Croatie relatif à la coopération en matière de sécurité intérieure (n°348, 2008-2009) ;
- de M. Raymond Couderc un rapport fait au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées sur le projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, autorisant l'approbation de l'avenant à l'accord de siège du 11 janvier 1965 entre le gouvernement de la République française et le bureau international des expositions relatif au siège du bureau international des expositions et à ses privilèges et immunités sur le territoire français (n°350, 2008-2009) ;
- de M. Jacques Blanc un rapport fait au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées sur le projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, autorisant l'approbation de l'accord sous forme d'échange de lettres relatives à la garantie des investisseurs entre le gouvernement de la République française et le gouvernement de Son Altesse Sérénissime le Prince de Monaco (n°354, 2008-2009) ;
- le texte de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées sur le projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, autorisant l'approbation de l'avenant à l'accord de siège du 11 janvier 1965 entre le gouvernement de la République française et le bureau international des expositions relatif au siège du bureau international des expositions et à ses privilèges et immunités sur le territoire français (n°350, 2008-2009) ;
- le texte de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées sur le projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, autorisant l'approbation de l'accord entre le gouvernement de la République française et le gouvernement de la République de Croatie relatif à la coopération en matière de sécurité intérieure (n°348, 2008-2009) ;
- le texte de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées sur le projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, autorisant l'approbation de l'accord sous forme d'échange de lettres relatives à la garantie des investisseurs entre le gouvernement de la République française et le gouvernement de Son Altesse Sérénissime le Prince de Monaco (n°354, 2008-2009) ;
- de M. le Premier ministre un projet de loi autorisant l'approbation du protocole relatif à la gestion intégrée des zones côtières (GIZC) de la Méditerranée et un projet de loi autorisant l'approbation de l'accord sous forme d'échange de lettres entre le gouvernement de la République française et le gouvernement de la République italienne visant à compléter l'accord relatif à la coopération transfrontalière en matière policière et douanière ;
- de M. Jean-Claude Frécon un rapport d'information fait au nom de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la Nation sur la réforme du Conseil économique, social et environnemental (Cese) ;
- de M. Jean-Jacques Jégou un rapport d'information fait au nom de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la Nation sur la gestion par l'Établissement de préparation et de réponse aux urgences sanitaires (Eprus) des stocks de produits de santé constitués en cas d'attaque terroriste ou de pandémie ;
- de M. Gérard César un rapport fait au nom de la commission des affaires économiques sur la proposition de résolution (n°324, 2008-2009) présentée par MM. Gérard César et Simon Sutour, au nom de la commission des affaires européennes, en application de l'article 73 bis du Règlement, sur le projet de règlement relatif aux catégories de produits de la vigne, aux pratiques oenologiques et aux restrictions qui s'y appliquent ;
- le texte de la commission des affaires économiques sur la proposition de résolution (n°324, 2008-2009) présentée par MM. Gérard César et Simon Sutour, au nom de la commission des affaires européennes, en application de l'article 73 bis du Règlement, sur le projet de règlement relatif aux catégories de produits de la vigne, aux pratiques oenologiques et aux restrictions qui s'y appliquent.