Grenelle de l'environnement (Suite)
Discussion des articles (Suite)
M. le président. - L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi de programme, adopté par l'Assemblée nationale, relatif à la mise en oeuvre du Grenelle de l'environnement. Dans la discussion des articles, nous en étions parvenus au sein de l'article 28.
Article 28 (Suite)
M. le président. - Amendement n°678, présenté par MM. Bizet, Deneux, Doublet, Laurent, Pointereau et Revet.
Dans la deuxième phrase du septième alinéa (c) de cet article, remplacer les mots :
et de leur dangerosité pour l'homme
par les mots :
telle que définie sur décision communautaire
M. Charles Revet. - Je présente cet amendement au nom de M. Bizet, dont chacun connaît l'expérience dans le domaine qui nous occupe et qui estime que le retrait des produits phytopharmaceutiques devrait être réalisé sur le fondement d'une évaluation des risques pour la santé publique et l'environnement telle que définie au niveau communautaire et non au regard d'une approche subjective et arbitraire fondée sur des critères de danger. C'est le bon sens.
M. Bruno Sido, rapporteur de la commission des affaires économiques. - L'adoption de cet amendement supprimerait toute référence à la dangerosité des molécules actives. Ce serait pour le Sénat donner un mauvais signal...
Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État chargée de l'écologie. - Je vous rassure, la notion de dangerosité pour l'homme, loin d'être subjective, est parfaitement encadrée scientifiquement. Elle est définie tant au niveau communautaire que par l'OMS. Retrait ?
M. Charles Revet. - Sous le bénéfice de ces précisions, je retire l'amendement.
L'amendement n°678 est retiré.
M. le président. - Amendement n°229, présenté par Mme Didier et les membres du groupe CRC-SPG.
I. - Dans la troisième phrase du septième alinéa (c) de cet article, supprimer les mots :
sous réserve de leur mise au point
II. - Après la même phrase, insérer une phrase ainsi rédigée :
Un programme de recherche publique visant à recenser l'ensemble des méthodes alternatives reconnues, notamment celles de lutte intégrée, à mettre au point de nouvelles méthodes, à valoriser et à diffuser largement ces méthodes sera lancé au plus tard en 2009.
M. Jean-Claude Danglot. - Dans un souci d'efficacité, il convient de réunir l'ensemble des connaissances relatives aux pratiques culturales permettant de réduire la dépendance aux produits de synthèse, nombreuses mais dispersées et peu accessibles, et d'en produire de nouvelles afin de les valoriser et de les diffuser le plus largement possible.
Les organismes de recherche publique français, et tout particulièrement l'Inra, pourraient être chargés de coordonner un tel programme de recherche prospectif.
M. Bruno Sido, rapporteur. - Défavorable. Il n'y a pas de raison de faire sauter ce critère de sécurité que constitue la conditionnalité liée à l'existence de méthodes alternatives. J'ajoute qu'existent déjà des dispositions relatives à l'effort de recherche et de formation en vue de leur émergence.
Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État. - Même avis. La conditionnalité prévue par l'article est le fruit d'un compromis auquel sont parvenus les acteurs du Grenelle. Préservons l'équilibre. Je précise en outre que l'Inra a déjà produit, en juin 2007, une étude sur l'écophyto-recherche et développement.
L'amendement n°229 n'est pas adopté.
M. le président. - Amendement n°294 rectifié bis, présenté par Mme Laborde et MM. Charasse, Collin, Baylet, Fortassin et Plancade.
Compléter la troisième phrase du septième alinéa (c) de cet article par les mots :
et en facilitant les procédures d'autorisation de mise sur le marché des préparations naturelles peu préoccupantes
Mme Françoise Laborde. - Alors que le Gouvernement s'est fixé un objectif de réduction de 50 % de l'usage des pesticides, ce texte ne prévoit pas l'usage d'alternatives naturelles. Cet amendement vise à favoriser l'introduction sur le marché des préparations naturelles peu préoccupantes comme alternative aux produits phytopharmaceutiques, ainsi que cela se pratique chez nombre de nos voisins.
M. le président. - Amendement identique n°554 rectifié, présenté par Mme Blandin et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
Mme Marie-Christine Blandin. - Chacun se souvient de ce triste et presque cocasse incident qui avait vu un paysagiste de l'Ain, spécialiste du traitement biologique des arbres et qui avait eu le malheur de publier un ouvrage intitulé Purin d'ortie et compagnie, mis en cause devant la justice. Ses malheurs avaient mobilisé les Français et tous les chroniqueurs, jusqu'aux plus modestes, avaient manifesté leur solidarité en publiant cette fameuse recette de la purée d'ortie qui pouvait conduire en prison...
Les sénateurs et les députés avaient voté un amendement à la loi sur l'eau de décembre 2006 pour lever l'interdiction globale des préparations naturelles non préoccupantes qui se laissait déduire de la loi d'orientation agricole de janvier 2006. Deux ans plus tard, à la différence des autres pays européens, le vide juridique demeure par défaut de publication du décret sur les conditions de commercialisation. Lorsque l'on pose la question, on nous renvoie à une procédure européenne longue, coûteuse et inappropriée. L'occasion nous est ici donnée de permettre que soit transmise simplement la recette de la poudre de craie pour les arbres fruitiers ou toute autre préparation... Ne la manquons pas au moment où notre objectif est de réduire le recours aux pesticides de moitié.
M. Bruno Sido, rapporteur. - Si je n'écoutais que mon humeur, je serais tenté de donner un avis défavorable à un amendement qui m'a valu d'être submergé de dizaines de milliers de mails identiques... (Sourires) Mais j'ai compris le problème qu'évoquaient les auteurs de ce message et c'est pourquoi j'ai proposé à la commission d'émettre un avis favorable.
Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État. - Favorable à cet amendement comme au suivant, bien dans l'esprit du Grenelle. Quant au décret, je puis vous rassurer, il est devant le Conseil d'État depuis quelques jours.
M. Alain Vasselle. - Je suis prêt à voter cet amendement mais je regrette que Mme la ministre, par sa réponse, ait l'air de souscrire à la totalité de l'argumentaire défendu par Mme Blandin dans son exposé des motifs.
Il ne faut pas laisser penser que la procédure est trop légère pour les produits phytosanitaires et trop lourde pour les préparations naturelles ; la même rigueur doit s'appliquer aux deux, à ceci près évidemment que l'instruction des dossiers concernant les seconds sera plus rapide eu égard au nombre de critères sur lesquels portera l'évaluation. Ce n'est pas parce que des produits sont naturels qu'ils ne posent pas de problème.
Je ne sais si la commission a eu connaissance du décret (on le nie au banc de celle-ci) ; en tout cas, surtout avec la révision constitutionnelle, le Gouvernement doit prendre l'habitude d'informer le Parlement sur les textes d'application au moment où il présente ses projets. Viendra ensuite le temps du contrôle, heureusement augmenté. Veillons à ce que la loi s'applique de façon satisfaisante, sauf à donner le sentiment à nos concitoyens que nous légiférons n'importe comment. (Marques d'approbation sur divers bancs)
Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État. - Le décret prévoit bien une procédure d'évaluation de ces produits. Quant à soumettre tous les textes d'application au Parlement... Je crains que vous ne soyez submergés... Mais vous serez seuls juges...
Les amendements identiques 554 rectifié et 294 rectifié bis sont adoptés.
M. le président. - J'appelle chacun à ne pas engager le débat sur la loi organique, ce qui nous retarderait... et me contraindrait à quitter la présidence pour y participer... (Sourires)
Amendement n°490 rectifié bis, présenté par M. Soulage et les membres du groupe UC.
Après la troisième phrase du septième alinéa (c) de cet article, insérer une phrase ainsi rédigée :
Cette réduction ne doit cependant pas mettre en danger des productions, notamment les cultures dites mineures.
M. Daniel Soulage. - Les retraits successifs de substances actives ces dernières années ont fortement fragilisé les systèmes de production classiques ; le plan Ecophyto et le paquet Pesticides adopté la semaine dernière par le Parlement européen risquent d'accentuer cette évolution. Le risque existe surtout pour les cultures qui ne représentent qu'une partie limitée des volumes de production. Leur faible enjeu économique fait que peu de produits de traitement adaptés ont été développés pour elles.
Selon certaines projections, le durcissement des conditions de mise sur le marché des produits phytosanitaires aboutirait, pour l'arboriculture fruitière, à un retrait de 20 à 43 % des substances actives autorisées, suivant les propositions de la Commission, et de 69 à 87 %, selon celles du Parlement européen. L'incidence sur les autres usages arboricoles serait tout aussi alarmante : jusqu'à 45 % d'entre eux seraient vides en application du projet de la Commission et jusqu'à 75 % en suivant celui du Parlement. Or ces petites productions font vivre nos territoires ; il est indispensable d'assouplir le dispositif.
M. Bruno Sido, rapporteur. - Je rassure M. Soulage : il est bien fait mention de l'usage dans le texte. Avis favorable.
L'amendement n°490 rectifié bis, accepté par le Gouvernement, est adopté.
M. le président. - Amendement n°371, présenté par M. Vasselle.
Après la quatrième phrase du septième alinéa (c) de cet article, insérer une phrase ainsi rédigée :
Des mesures incitatives, ainsi que des compensations, seront mises en oeuvre afin d'assurer la viabilité économique des exploitations qui se seront engagées dans ces nouvelles pratiques ayant un impact sur les coûts de production et la productivité.
M. Alain Vasselle. - La profession agricole n'a pas à souffrir des nouvelles contraintes environnementales qui s'appliqueront à elle. Je propose des mesures incitatives, notamment fiscales, similaires à celles déjà prises pour favoriser l'agriculture biologique. Dès lors qu'elle s'engage à diminuer le volume de ceux des intrants qui peuvent présenter un danger, l'agriculture traditionnelle doit être aidée.
M. le président. - Sous-amendement n°813 à l'amendement n°371 de M. Vasselle, présenté par MM. Muller et Desessard et Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet.
Compléter le second alinéa de l'amendement n°371 par les mots :
en prélevant sur les crédits européens disponibles au titre du premier pilier de la politique agricole commune
M. Jacques Muller. - Produire de façon plus respectueuse de l'environnement peut en effet entraîner des coûts supplémentaires qui ne seront pas toujours répercutés dans les prix. La compensation éventuelle doit être prise en charge par la collectivité, qui bénéficie des nouvelles pratiques. On sait que le premier pilier de la PAC est aujourd'hui déséquilibré ; il faut utiliser cette voie, ce qui permet d'agir à charge financière constante.
M. Bruno Sido, rapporteur. - La réduction du volume des intrants phytosanitaires s'appliquera à tous les agriculteurs ; aucune distorsion de concurrence n'est donc à craindre. J'ajoute qu'en l'absence d'évaluation précise des surcoûts, une compensation spécifique n'est pas nécessaire. Avis défavorable à l'amendement. Et même avis, à titre personnel, au sous-amendement n°813 que la commission n'a pas examiné.
Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État. - Mêmes avis. L'évaluation de l'impact économique fait de toute façon partie du dispositif. J'ajoute, s'agissant du sous-amendement, que les discussions sur l'avenir de la PAC sont toujours en cours...
Le sous-amendement n°813 est retiré.
M. Alain Vasselle. - Je remercie M. Muller de corriger mes amendements ; peut-être pourrions-nous rédiger ensemble nos propositions... (Sourires)
Les propos de Mme la ministre devraient rassurer la profession. L'essentiel est d'assurer la viabilité des exploitations. J'entends bien l'argument de la commission selon lequel le dispositif s'imposera à tout le monde, mais il faudra s'assurer que c'est bien le cas partout dans l'Union européenne, veiller aussi à la traçabilité des produits d'importation et à leur impact éventuel sur les cours. N'oublions pas que l'économie et l'agriculture sont désormais mondialisées. Si j'ai les apaisements nécessaires, je retirerai mon amendement.
Mme Marie-Christine Blandin. - Ce débat a eu lieu lors du Grenelle dans le groupe « biodiversité ». Le surcoût doit être considéré comme un investissement, qui est en partie récupéré par l'exploitant sur le coût des intrants mais surtout par la collectivité en termes de santé et de qualité des nappes phréatiques. C'est un peu comme pour les économies d'énergie : chacun fait un effort, c'est la collectivité qui en profite.
Inciter aux bonnes pratiques pourrait passer par une compensation non pas en argent mais, par exemple, par la prise en charge des retraites complémentaires des exploitants ou des retraites des conjoints non couverts par la MSA. Donnant-donnant : voilà qui serait du vrai développement durable.
M. Paul Raoult. - Aujourd'hui, le cahier des charges en faveur des mesures agro-environnementales est tellement complexe à mettre en oeuvre que les agences de l'eau, dont celle d'Artois-Picardie à laquelle j'appartiens, ne peuvent consommer certaines lignes budgétaires car elles n'ont pas pu négocier avec la profession agricole. Il faut faciliter la mise en oeuvre de ces mesures.
M. Bruno Sido, rapporteur. - M. Vasselle a parfaitement raison : nous ne devons pas édicter de normes qui ne s'appliqueraient pas en Europe car il faut que nous soyons à égalité avec nos partenaires. J'appelle le Gouvernement à y veiller. En revanche, il y aura toujours sur le marché mondial des concurrents qui ne respecteront pas ces règles.
Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État. - Depuis longtemps, la profession agricole réclamait cette harmonisation et c'est pourquoi la présidence française de l'Union a mis la question du paquet Pesticides à l'ordre du jour. Ce paquet a été voté en janvier et il permettra d'harmoniser les conditions de production et d'utilisation des produits phytosanitaires.
M. Alain Vasselle. - L'Europe ne devra pas hésiter à taxer les produits qui viennent d'autres pays, comme le Brésil, et qui ne respecteraient pas les normes harmonisées de l'Union.
L'amendement n°371 est retiré.
M. le président. - Amendement n°372, présenté par M. Vasselle.
Après la quatrième phrase du septième alinéa (c) de cet article, insérer une phrase ainsi rédigée :
Cette généralisation sera précédée d'une étude d'impact économique afin d'en mesurer les conséquences sur la viabilité économique des exploitations.
M. Alain Vasselle. - Amendement de repli : la généralisation dont il est question doit être précédée d'une étude d'impact économique. J'ai cru comprendre qu'elle était désormais prévue à l'article 28.
L'amendement n°372 est retiré.
M. le président. - Amendement n°230, présenté par Mme Didier et les membres du groupe CRC-SPG.
Avant l'avant-dernière phrase du septième alinéa (c) de cet article, insérer une phrase ainsi rédigée :
L'État respectera l'utilisation de semences de ferme en garantissant un cadre règlementaire plus souple pour les agriculteurs choisissant cette pratique qui limite les traitements phytosanitaires.
M. Jean-Claude Danglot. - Les débats que nous avons eus lors de l'examen des textes relatifs aux certificats d'obtention végétale et aux OGM ont démontré que les grands groupes semenciers veulent s'accaparer le domaine du vivant et rendre les agriculteurs dépendants de leurs produits.
L'assouplissement de la réglementation sur les semences de ferme permettrait aux producteurs d'avoir une gestion plus saine et plus économique. Cette tradition ancestrale a fait preuve de son efficacité et elle est aussi une garantie de biodiversité.
M. Bruno Sido, rapporteur. - Les semences de ferme sont également traitées : il n'y a donc pas d'économie de produits phytosanitaires. Elles ne sont pas nécessairement plus respectueuses de l'environnement que les semences classiques. Avis défavorable.
Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État. - Même avis : les semences de ferme ne sont pas systématiquement adaptées à des itinéraires économes en intrants.
L'amendement n°230 n'est pas adopté.
M. le président. - Amendement n°69 rectifié, présenté par M. Sido, au nom de la commission.
I. - Supprimer l'avant-dernière phrase du septième alinéa (c) de cet article.
II. - Après le dixième alinéa (e) de cet article, insérer quatre alinéas ainsi rédigés :
La politique génétique des semences et races domestiques aura pour objectifs :
- de rénover d'ici fin 2009 le dispositif d'évaluation des variétés et d'en étendre les critères aux nouveaux enjeux du développement durable, notamment la réduction progressive des intrants de synthèse et le maintien de la biodiversité, dont la biodiversité domestique. La France s'emploiera à faire prendre en compte ces nouveaux critères au niveau européen ;
- de définir d'ici 2010 un protocole permettant d'évaluer les variétés en conditions d'agriculture biologique ;
- et d'adapter d'ici fin 2009, par un dispositif d'inscription spécifique, le catalogue des semences aux variétés locales anciennes, y compris les variétés population, et aux variétés menacées d'érosion génétique.
III. - Supprimer le dernier alinéa de cet article.
M. Bruno Sido, rapporteur. - Cet amendement réécrit le texte voté par l'Assemblée nationale.
M. le président. - Sous-amendement n°362 rectifié à l'amendement n°69 rectifié de M. Sido, au nom de la commission, présenté par M. Vasselle.
Compléter le dernier alinéa du II de l'amendement n°69 rect. par les mots :
, afin notamment d'en faciliter l'utilisation par les professionnels agricoles
M. Alain Vasselle. - Il convient de reprendre une partie du texte initial qui faisait référence à l'utilisation des semences par la profession agricole. Quand la France présidait l'Europe, la négociation sur les produits phytosanitaires a-t-elle également porté sur l'ensemble des semences ? Il ne semble pas ; or, ce qui vaut pour les produits phytosanitaires devrait aussi valoir pour toutes les semences. C'est pourquoi je n'étais pas totalement opposé à l'amendement de M. Danglot.
M. le président. - Amendement n°555, présenté par Mme Blandin et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
Dans l'avant-dernière phase du septième alinéa (c) de cet article, après les mots :
enjeux du développement durable
insérer les mots :
, sans provoquer une augmentation du coût de leur inscription au catalogue, ni un resserrement des critères d'évaluation qui engendrerait une érosion supplémentaire de la biodiversité cultivée,
Mme Marie-Christine Blandin. - Il convient d'interdire des surcoûts éventuels de l'inscription au catalogue. Nous voulons diminuer l'utilisation des intrants de synthèse et de l'irrigation mais toute évaluation nécessite une multiplication des essais. Plus il y a de critères, plus le coût est élevé. Pour des raisons d'économies d'échelle, le marché ne retient alors que quelques variétés à très large diffusion nécessitant un recours important aux intrants de synthèses et à l'irrigation pour homogénéiser les terroirs.
Ainsi, plus le coût est élevé, plus il exclut du marché de nombreuses variétés locales à faible diffusion adaptées à tel ou tel terroir et peu exigeantes en traitements et en eau. Ce n'est pas la multiplication de nouveaux critères de résistance mono-géniques à tel ou tel parasite, maladie ou stress réservé à une poignée de variétés qui permettront de s'engager dans la voie du développement durable. Il convient au contraire d'encourager la diversité des variétés qui sont des atouts essentiels face au changement climatique.
M. le président. - Amendement n°556, présenté par Mme Blandin et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
Dans l'avant-dernière phrase du septième alinéa (c) de cet article, remplacer les mots :
aux variétés anciennes, y compris
par les mots :
aux variétés, y compris anciennes et
Mme Marie-Christine Blandin. - Nous ne disposons pas de la traçabilité historique de toutes les variétés locales et certaines pourraient être exclues de la liste à cause de la rédaction de cet article.
M. le président. - Amendement n°661, quasiment identique à l'amendement n°555, présenté par MM. Muller et Desessard et Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet.
Compléter le dernier alinéa de cet article par une phrase ainsi rédigée :
Cette rénovation s'effectue sans provoquer d'augmentation du coût de leur inscription au catalogue ni un resserrement des critères d'évaluation qui engendreraient une érosion supplémentaire de la biodiversité cultivée.
M. Jacques Muller. - Il est défendu.
M. le président. - Amendement n°124 rectifié bis, présenté par MM. César, Bizet, Doublet, Laurent, Cornu, Pointereau, Bailly et B. Fournier, Mme Procaccia et MM. Vasselle, Grignon et Lefèvre.
Compléter le dernier alinéa de cet article par une phrase ainsi rédigée :
Elle se fixe pour objectif l'adoption d'une politique visant l'équivalence des exigences environnementales entre les produits français et les produits importés.
M. Alain Vasselle. - C'est toujours dans l'esprit d'une égalité des conditions de concurrence. Le rapporteur et le président de la commission des affaires économiques semblent partager mon point du vue. Ils seront donc favorables à cet amendement.
L'amendement n°625 n'est pas défendu.
M. Bruno Sido, rapporteur. - Avis favorable sur le sous-amendement n°362 rectifié car il apporte une précision très utile.
Avis défavorable sur les amendements n°555 et n°661 car si le coût de l'inscription sur le catalogue devrait être stable, on ne peut écarter toute augmentation, si minime soit-elle.
On n'a jamais établi que le catalogue provoquait une érosion de la diversité mais l'Inra a démontré qu'il ne favorisait pas une agriculture intensive.
La commission récrit le texte que modifie l'amendement n°556 mais il est tellement technique que nous souhaiterions connaître l'avis du Gouvernement pour en mesurer la portée.
L'amendement n°124 rectifié bis est pris en compte par notre amendement n°74, qui fait référence à la position de la France à l'OMC.
Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État. - L'amendement n°69 rectifié clarifie la rédaction ; le Gouvernement y est favorable, ainsi qu'au sous-amendement n°362 rectifié ; je précise à M. Vasselle que la directive sur l'inscription au catalogue devrait être transposée en novembre.
Avis défavorable à l'amendement n°555 pour les mêmes raisons que la commission : des discussions techniques sont en cours sur le coût de l'inscription. Certes, le catalogue est plus adapté aux semences les plus récentes et les plus utilisées par les agriculteurs. La question se pose donc pour les questions anciennes mais la rédaction de la commission apporte une bonne solution. Même avis sur l'amendement n°661.
Avis favorable à l'amendement n°124 rectifié, qui sera pris en compte par celui de la commission.
Le sous-amendement n°362 rectifié est adopté.
M. le président. - Mme Blandin transforme son amendement n°555 en un sous amendement n°819 à l'amendement n°69 rectifié de M. Sido.
Au dernier alinéa du II de l'amendement n° 69 rect.,
remplacer les mots :
locales anciennes, y compris les variétés population, et aux variétés menacées
par les mots :
locales, y compris anciennes, de population ou menacées
Mme Marie-Christine Blandin. - Même argumentation.
M. Bruno Sido, rapporteur. - Avis défavorable.
L'amendement n°556 est retiré.
Le sous-amendement n°819 n'est pas adopté.
L'amendement n°69 rectifié, sous-amendé, est adopté ; les amendements nos661 et 124 rectifié bis deviennent sans objet.
M. le président. - Amendement n°70, présenté par M. Sido, au nom de la commission.
Supprimer la dernière phrase du septième alinéa (c) de cet article.
M. Bruno Sido, rapporteur. - Amendement de coordination.
M. le président. - Amendement n°679, présenté par MM. Bizet, Deneux, Doublet, Laurent, Pointereau et Revet.
Après les mots :
et s'appuiera notamment sur
rédiger comme suit la fin de la dernière phrase du septième alinéa (c) de cet article :
les évaluations des risques toxicologiques, pour les abeilles, de l'ensemble des substances chimiques pertinentes effectuées par les instances publiques officielles d'évaluation concernées, ainsi que sur les propositions d'amélioration des pratiques apicoles faites par l'institut scientifique et technique de l'abeille tel que visé à l'article 23 ter.
M. Charles Revet. - Le plan d'urgence doit être établi en considérant les substances chimiques pertinentes. L'Afssa conduit en effet des analyses de risque avant la mise sur le marché des produits phytopharmaceutiques et l'Institut technique et scientifique de l'abeille travaille à l'amélioration des pratiques apicoles.
M. le président. - Amendement n°552, présenté par Mme Blandin et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
Compléter la dernière phrase du septième alinéa (c) de cet article par les mots :
en commençant par les neurotoxiques systémiques
Mme Marie-Christine Blandin. - Puisque le rapporteur propose de déménager les dispositions relatives aux abeilles, je devrais peut-être déplacer aussi cet amendement.
M. Bruno Sido, rapporteur. - C'est ce que j'allais proposer, bien que l'avis de la commission sur ces deux amendements soit défavorable.
Mme Marie-Christine Blandin. - C'est que vous n'avez pas encore entendu nos arguments. (Sourires) Je rectifie donc mon amendement.
M. Charles Revet. - Nous aussi.
Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État. - Avis favorable à l'amendement n°70. Il vaut mieux regrouper les éléments de cette question prioritaire.
L'amendement n°70 est adopté.
Mme Marie-Christine Blandin. - Les amendements nos658 rectifié et 659 portent aussi sur les abeilles : nous les rectifions.
M. le président. - Amendement n°231, présenté par Mme Didier et les membres du groupe CRC-SPG.
Après le septième alinéa (c) de cet article, insérer un alinéa ainsi rédigé :
...) De développer fortement les circuits courts et l'incitation directe du consommateur à s'y fournir afin d'encourager les productions agricoles de proximité, de limiter les impacts environnementaux des transports de denrées alimentaires sur de longues distances, et de satisfaire les besoins alimentaires des populations à des prix raisonnables. À cette fin, l'État mettra à l'étude des modalités d'incitations financières pour les consommateurs les plus modestes se fournissant dans ces circuits. L'État et les collectivités territoriales étudieront les différentes formes possibles de soutien aux démarches de mise en place de circuits courts solidaires, et l'installation d'agriculteurs s'intégrant dans ces circuits, notamment dans le secteur du maraîchage.
M. Jean-Claude Danglot. - Le transport des denrées alimentaires contribue au bouleversement climatique. Les importations peuvent se révéler nocives pour les pratiques comme pour l'environnement. Il est urgent de favoriser les circuits courts, qui autorisent en outre des prix raisonnables. On comptait déjà une cinquantaine d'associations de maintien de l'agriculture raisonnable en 2004 ; elles n'ont cessé de se développer depuis sans pouvoir répondre à la demande. Il est de notre devoir de favoriser un type d'organisation qui garantit des aliments sains et un environnement préservé.
M. Bruno Sido, rapporteur. - Encore confidentiels, les circuits courts ont un indéniable apport social et environnemental. Cependant, l'article 28 favorise déjà ce type de pratiques et la rédaction de l'amendement privilégierait les produits les plus proches, ce qui est contraire au principe du libre-échange.
Surtout, un groupe de travail, qui rassemble l'ensemble des acteurs concernés par ce sujet, se réunit jusqu'en mars. Attendons qu'il présente ses propositions et qu'un plan d'action soit arrêté. Retrait ou avis défavorable.
Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État. - Même avis.
L'amendement n°231 n'est pas adopté.
M. le président. - Amendement n°423 rectifié bis, présenté par Mme Herviaux et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
A la fin du huitième alinéa (c bis) de cet article, remplacer les mots :
et notamment les protéagineux et les légumineuses
par les mots :
notamment en relançant la production des cultures de protéagineux et autres légumineuses
Mme Odette Herviaux. - Pour répondre à ses besoins en protéines végétales destinées à l'alimentation du bétail, la France importe chaque année 4,8 millions de tonnes de soja. Cette situation nous place en contradiction avec le développement durable et la nécessaire solidarité vis-à-vis des pays du Sud et émergents, poussés à la déforestation et à la culture intensive. Ces importations massives génèrent une augmentation des transports. La filière manque de traçabilité du fait de la cohabitation avec des OGM. Enfin, ces importations rendent l'élevage français plus vulnérable en cas de rupture des approvisionnements.
Il faut évoluer au-delà du cadre international, défini par des accords datant de 1992, qui limite les cultures d'oléoprotéagineux à 30 % des surfaces. Comme l'a écrit le rapporteur, cette stratégie à long terme vise notre indépendance alimentaire et énergétique, et la réduction de l'empreinte écologique de l'agriculture française.
M. Bruno Sido, rapporteur. - Avis favorable : cette précision est très utile. Nous nous souvenons de l'embargo décrété par les soi-disant ultralibéraux... Pour relancer cette filière, il faudra augmenter les prix de vente afin que les agriculteurs puissent suivre.
Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État. - Même avis : la relance de la production de protéagineux est une priorité absolue du Gouvernement.
L'amendement n°423 rectifié bis est adopté.
M. le président. - Amendement n°182 rectifié ter, présenté par MM. Fortassin, Charasse, Mézard et Milhau.
Après le huitième alinéa (c bis) de cet article, insérer un alinéa ainsi rédigé :
...) De favoriser le maintien et la restauration des prairies et des herbages afin que les producteurs des filières bovines, ovines, équines et caprines puissent nourrir leurs cheptels majoritairement à l'herbe et aux graminées issus des pâturages ;
M. François Fortassin. - Les herbivores doivent manger de l'herbe ! (Sourires) Au-delà de ce lieu commun, je rappelle que la qualité du lait et de la viande dépend en grande partie de la nourriture donnée aux animaux, et que l'herbe et le foin séché sont de loin préférables. Ensuite, la pâture des espaces fragiles, notamment les alpages et les estives, assure l'entretien du paysage en luttant contre l'enfrichement, l'érosion des sols, les incendies et les avalanches. Ainsi, en montagne, les herbes hautes se couchent en hiver, formant une sorte de tapis roulant propice aux avalanches. Au contraire, la neige s'accroche sur les mottes d'herbe des zones pâturées. En outre, les prairies et les pâturages garantissent la qualité de l'eau des nappes phréatiques. Enfin, la maladie de la vache folle n'aurait pas sévi si les animaux avaient mangé de l'herbe, qu'ils préfèrent naturellement à une auge remplie de farines indéfinissables.
Je terminerai par une image bucolique : que seraient les paysages du Pays basque sans moutons blancs, les plateaux de l'Aubrac sans leurs vaches, le Béarn et les Pyrénées sans troupeaux transhumants, les prés salés du Mont-Saint-Michel sans moutons ? (Murmures approbateurs sur plusieurs bancs)
M. le président. - Sous-amendement n°814 à l'amendement n°182 rectifié de M. Fortassin, présenté par MM. Muller et Desessard et Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet.
Compléter le second alinéa de l'amendement n° 182 rectifié ter par une phrase ainsi rédigée :
Cette réorientation de la production de viande de qualité et respectueuse de l'environnement s'appuie sur un prélèvement sur les crédits européens disponibles au titre du premier pilier de la politique agricole commune.
M. Jacques Muller. - J'ajouterai trois arguments à l'excellente démonstration de François Fortassin. Le pâturage assure une meilleure qualité de vie, plus respectueuse, aux animaux. Ensuite, l'alimentation céréalière entraîne un gaspillage : il faut sept calories de céréales pour produire une calorie de viande. Enfin, il faut respecter le principe de souveraineté alimentaire : l'herbe contient de l'amidon et davantage de protéines que les céréales. Elle permet de réduire la facture de protéines importées.
La PAC est responsable de la situation actuelle. A une époque, la prime à l'hectare était de 60 euros pour l'herbe et de 490 pour le maïs. On ne peut jeter la pierre aux éleveurs qui ont changé leurs pratiques. Il faut désormais utiliser les moyens de la PAC pour encourager l'élevage à l'herbe.
M. Bruno Sido, rapporteur. - La démonstration de François Fortassin est excellente : avis favorable à l'amendement n°182 rectifié ter. (Marques d'approbation sur plusieurs bancs)
S'agissant du sous-amendement n°814, cette loi n'est pas le lieu pour traiter des questions de tuyauterie institutionnelle et financière. Je vous signale qu'en Haute-Marne, l'addition des aides des piliers 1 et 2 de la PAC est plus favorable aux productions laitières et animales que céréalières.
Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État. - Avis tout à fait favorable à l'amendement n°182 rectifié ter. L'herbe présente des qualités gustatives excellentes et nos prairies sont des puits de carbone qu'il faut préserver.
J'opposerai à l'amendement n°814 les mêmes arguments qu'aux amendements similaires : nous ne pouvons préjuger des discussions en cours sur la PAC.
Le sous-amendement n°814 n'est pas adopté.
M. Alain Vasselle. - Je voterai cet amendement, mais nous ne pouvons jouer aux enfants de choeur. Ne laissons pas entendre à nos concitoyens que l'alimentation en herbe réglera tous les problèmes et que les producteurs de viande pourront s'en tirer à bon prix. Ce serait faire preuve de naïveté et de crédulité.
La France importe de la viande d'Argentine, du Brésil ; et en Europe même, tous les pays n'ont pas le même degré d'exigence quant à l'alimentation animale. La traçabilité doit être identique pour les produits qui entrent dans notre pays : la proposition de M. Fortassin n'entraînera pas de problèmes si nous avons le courage politique de rejeter ou de taxer lourdement les importations de moindre qualité.
M. François Fortassin. - Je veux rassurer M. Vasselle : je propose que les animaux soient nourris « essentiellement » à l'herbe, non « exclusivement ».
M. Charles Revet. - Je suis tout à fait d'accord avec M. Fortassin. Mais la France n'est pas seule en Europe, ni dans le monde ! Devenir les meilleurs chez nous est très satisfaisant, mais inutile si nous n'avons pas les moyens de contrôler les importations. L'impact de la politique européenne est énorme ! Dans ma verte Normandie, les prairies permanentes ont longtemps garanti des produits de qualité ; et elles nous protégeaient des inondations. Mais la production est deux fois plus élevée lorsque l'on nourrit les bêtes au maïs et l'Europe verse des aides ! Les agriculteurs, qui ont des familles à faire vivre, ont supprimé les prairies permanentes : entre 1995 et 2000, nous avons en conséquence subi inondations, érosion des sols, il y a même eu des morts.
Le Gouvernement doit donc intervenir avec force afin que la politique de l'Union tienne compte de la qualité des productions et des incidences de tel ou tel mode d'élevage sur l'environnement.
J'étais rapporteur du texte sur les anabolisants en 1987. Je n'ai pas voulu que notre Assemblée suive le Gouvernement et abroge la loi Rocard de 1984, efficace. Hélas, il y a eu un décret... Les anabolisants français d'origine naturelle ont été interdits dans notre pays. Mais ils sont utilisés aux États-Unis, qui exportent chez nous la viande produite avec des anabolisants achetés chez nous ! La France ne vit pas dans un bocal.
M. Alain Vasselle. - Très bien.
M. Charles Revet. - Je souscris à l'amendement mais n'oublions pas de prendre en compte les tenants et aboutissants.
M. Paul Raoult. - Il faut tendre vers un équilibre entre environnement et agriculture, mais respect de l'environnement et agriculture intensive entrent naturellement en contradiction. Dans le parc de l'Avesnois comme dans le bocage normand, le maïs nourrit plus...
M. Charles Revet. - Et paie mieux !
M. Paul Raoult. - ...mais cause une perte de la biodiversité. Il faut donc mettre en place des labels pour les consommateurs et compenser par une prime le manque à gagner sur les unités fourragères, qui préservent la diversité.
Comment contrôler la qualité des produits importés ? J'ai voulu hier faire quelques emplettes en sortant du Sénat : l'épicerie, près de la place du Panthéon, ne vend que des produits chiliens. Comment savoir quelle dose de pesticides a été pulvérisée sur ces fraises et ces prunes ? Les autres font peut-être moins bien, ce n'est pas une raison pour les imiter !
Mme Odette Herviaux. - Chacun d'entre nous est attaché à telle ou telle pratique culturale, selon les caractéristiques du territoire dont il est originaire. Mais la richesse de notre pays, c'est la variété des paysages et des modes de culture. La Bretagne est souvent critiquée parce qu'elle reçoit beaucoup d'argent de la PAC : notre région se situe effectivement au cinquième ou sixième rang au titre du premier pilier, mais elle est avant-dernière lorsque l'on rapporte les sommes reçues au nombre d'exploitations ou au nombre de salariés. Le maintien des hommes sur le terroir compte. Chez nous, la manne du second pilier est faible, pourtant le volet social relève aussi du développement durable.
Quand nous serons parvenus à la fin du cycle de Doha, de nouvelles négociations commerciales s'ouvriront : l'Europe devra être très forte, pour réussir à imposer les critères de respect de l'environnement, de traçabilité, de respect de normes sociales. Ce sera un autre sport !
M. Jacques Muller. - Je me réjouis de ce consensus car les politiques agricoles, je le répète, orientent largement nos pratiques.
L'amendement n°182 rectifié ter est adopté.
M. le président. - Amendement n°183 rectifié ter, présenté par MM. Fortassin, Mézard et Charasse, Mme Escoffier et M. Milhau.
Après le huitième alinéa (c bis) de cet article, insérer un alinéa ainsi rédigé :
...) De soutenir au plan européen, la mise en oeuvre progressive de dispositions relatives aux espaces d'exploitation agricole permettant une croissance harmonieuse des animaux et en particulier dans les filières avicoles et porcines ;
M. François Fortassin. - De nombreux élevages porcins ou avicoles s'effectuent dans des espaces contraints. Le confort des animaux en pâtit, mais aussi le développement harmonieux de leur musculature. Je sais qu'il existe une réglementation européenne mais les animaux ont droit à des espaces plus vastes.
M. Bruno Sido, rapporteur. - Le concept de « croissance harmonieuse des animaux » est une novation... (Sourires) On ne peut retenir un tel objectif général et proclamatoire alors que chaque filière a ses contraintes et qu'il existe une réglementation européenne, filière par filière et très précise -telle surface pour une poule, telle autre pour un porc...
Maintien du plus grand nombre possible d'agriculteurs et intensification de la production, ou agriculture extensive et exode rural, il faut choisir... Retrait ou rejet.
Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État. - Après le Grenelle, il y a eu une table ronde Animal et société. De fait, la directive prévoit des dispositions sur l'espace nécessaire aux animaux. Le sujet est important. Sagesse.
M. François Fortassin. - Le Gouvernement est plus qu'à moitié favorable... (Sourires) Je maintiens cet amendement d'appel, nos collègues se laisseront peut-être fléchir.
Mme Odette Herviaux. - Je ne vous suis pas. Il ne suffit pas de donner plus d'espace aux animaux pour que leur développement soit plus harmonieux. Imaginez-vous un élevage de porcs en plein air ? Ce ne serait pas une sinécure ! Si vous donnez trop d'espace aux animaux, leur agressivité sera moins contenue, ils vont se battre. Le mieux peut être l'ennemi du bien. Méfions-nous de l'anthropomorphisme !
Mme Marie-Christine Blandin. - Il y a quelques années, nous avons fait pour l'Office un rapport sur le risque épidémique. Il a été démontré qu'une croissance harmonieuse favorisait les défenses immunitaires des animaux et évitait qu'ils se transforment en photocopieuses à H5N1.
M. Adrien Giraud. - Lors d'une mission conduite par le président Emorine, nous avons visité une ferme de Kyoto dans laquelle les bovins sont élevés en box. Cette viande de Kobé est succulente ; pourquoi ne parvenons-nous pas, en France, à pratiquer un tel élevage de qualité ?
L'amendement n°183 rectifié ter est retiré.
M. le président. - Amendement n°497, présenté par M. Dubois et les membres du groupe UC.
Après le huitième alinéa (c bis) de cet article, insérer un alinéa ainsi rédigé :
...) De favoriser la valorisation des effluents organiques d'élevage comme engrais naturel.
M. Daniel Soulage. - Un recours adapté aux engrais de ferme permet de les valoriser, de limiter le recours aux engrais minéraux issus de l'industrie chimique et pétrolière, d'éliminer les pollutions induites par la commercialisation et le transport de ces engrais chimiques. Ces engrais complets sont d'excellents amendements pour les sols. Non seulement la valeur fertilisante des engrais de ferme est équivalente à celle des engrais minéraux pour la plupart des éléments nutritifs mais leur apport régulier améliore sensiblement le taux de matières organiques des sols en une dizaine d'années. Contrairement à certains préjugés, le remplacement total ou partiel des engrais minéraux par des engrais de ferme n'accroît pas l'acidification des sols cultivés : il en permet même l'alcalinisation.
Notre amendement explicite l'intérêt pour l'État de favoriser la valorisation des effluents organiques d'élevage comme engrais naturel.
M. le président. - Sous-amendement n°815 rectifié à l'amendement n°497 de M. Dubois et les membres du groupe UC, présenté par MM. Muller et Desessard et Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet.
Compléter le second alinéa de l'amendement n°497 par une phrase ainsi rédigée :
A cet égard, les élevages sur paille en alternative à ceux sur caillebotis seront favorisés.
M. Jacques Muller. - Je soutiens cet amendement car l'usage de l'engrais de ferme est au coeur de l'agriculture durable. Il favorise l'autonomie des exploitations sans recours à des dérivés du pétrole comme les produits phytosanitaires ; il est économique et limite la production de gaz à effet de serre.
Mon sous-amendement tend à favoriser l'élevage sur paille par rapport à l'élevage sur caillebotis afin de limiter les risques liés à l'azote minéralisé. Reste que l'élevage sur paille demande plus de travail aux agriculteurs, il faut donc leur donner un avantage comparatif.
M. Bruno Sido, rapporteur. - Avez-vous déjà vu des effluents d'élevage qui ne serviraient pas à fertiliser les champs ? L'amendement n°497 est donc inutile, et d'ailleurs satisfait par l'amendement de la commission portant sur le même objet, dont la rédaction nous paraît meilleure car elle ne se limite pas à la valorisation des effluents organiques d'élevage « comme engrais naturel », ce qui exclut la méthanisation.
M. Muller vise les élevages bretons. (M. Jacques Muller le conteste) Que doivent faire les éleveurs s'ils n'ont pas de paille ? M. Muller doit être professeur, il ne sait pas ce que c'est que ramasser la paille, il croit peut-être que cela se fait encore à la main. Mais aujourd'hui, on se sert de machines, qui consomment du carburant. Si l'on compte aussi le transport de la paille, l'usage des caillebotis pose moins de problèmes environnementaux que celui de la paille. La pollution des sols ? Tout dépend du dosage. Les agriculteurs ne peuvent faire n'importe quoi, ils ne peuvent épandre le lisier n'importe où, ils ont des plans d'épandage très précis. (On loue l'excellence du rapporteur sur les bancs UMP)
Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État. - La méthanisation est effectivement un sujet sur lequel beaucoup de progrès restent à faire. Retrait de l'amendement n°497. Défavorable au sous-amendement n°815 rectifié, qui n'est pas de niveau législatif.
M. René Garrec. - On aurait pu y penser avant !
M. Daniel Soulage. - Le rapporteur est vraiment très hostile à mon amendement, ce qui ne l'empêche pas d'en déposer un lui-même... Évitons d'ouvrir la guerre de l'épandage !
L'amendement n°497 est retiré.
Le sous-amendement n°815 rectifié devient sans objet.
M. le président. - Amendement n°71, présenté par M. Sido, au nom de la commission.
Compléter le neuvième alinéa (d) de cet article par une phrase ainsi rédigée :
A cet effet, l'État mettre en place un crédit d'impôt pour la réalisation d'un diagnostic énergétique de l'exploitation agricole ;
M. Bruno Sido, rapporteur. - Nous déplaçons un alinéa.
Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État. - Favorable.
L'amendement n°71 est adopté.
M. le président. - Amendement n°72, présenté par M. Sido, au nom de la commission.
Supprimer le onzième alinéa de cet article.
M. Bruno Sido, rapporteur. - Cette suppression a pour objet de clarifier le texte. Nous proposons de replacer la première phrase de cet alinéa, qui concerne un crédit d'impôt pour la réalisation d'un diagnostic énergétique, au neuvième alinéa, qui traite déjà de ce sujet. Quant au reste de l'alinéa, il n'apporte rien de nouveau et ne fait que reprendre, à titre d'exemple, certaines mesures énumérées par le comité opérationnel « Plan de performance énergétique des exploitations agricoles » auquel renvoie ledit alinéa.
M. le président. - Amendement n°720, présenté par Mme Hoarau et les membres du groupe CRC-SPG.
Rédiger comme suit la dernière phrase du onzième alinéa de cet article :
L'Etat mettra en place des mesures incitatives pour produire et utiliser des énergies renouvelables et économiser de l'énergie, dans les exploitations agricoles (expérimentation, méthanisation, mobilisation de la biomasse agricole et forestière combustible, équipements solaires, adaptation de la fiscalité sur l'énergie, équipements d'économies d'énergie, certificats d'économie d'énergie).
M. Jean-Claude Danglot. - Il faut favoriser la production et l'utilisation d'énergies renouvelables et les économies d'énergie dans les exploitations agricoles, par des mesures incitatives. A titre d'exemple, le développement particulièrement important de l'énergie solaire à La Réunion et l'objectif de l'agriculture réunionnaise d'atteindre l'autonomie énergétique des exploitations agricoles sont à prendre en considération. L'État doit favoriser ce genre d'orientation via, par exemple, des crédits d'impôt.
M. le président. - Amendement n°474, présenté par M. Courteau et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
A la fin du onzième alinéa de cet article, avant le signe :
)
insérer les mots :
aérogénérateurs de puissance inférieure à 36 kilowatt
M. Roland Courteau. - Dans mon département, les agriculteurs sont incités à produire et à utiliser les énergies renouvelables. Depuis plus de deux ans, on les encourage à établir un diagnostic énergétique sur leurs exploitations. Le bois/énergie, le solaire, le photovoltaïque, la biomasse ont le vent en poupe mais ce n'est pas le cas du petit éolien, sous-utilisé parce que trop strictement encadré.
M. Bruno Sido, rapporteur. - L'amendement n°720 porte sur un alinéa que la commission a décidé de supprimer du fait de son caractère vague et non normatif. Sur le fond, cet amendement alourdit le texte sans rien n'y apporter : il existe déjà, dans le présent projet de loi, aux articles 17, 28 et 29, mais aussi dans d'autres textes, des mesures incitatives pour les économies et productions d'énergie dans les exploitations agricoles. Retrait ou rejet.
Nous partageons l'opinion des auteurs de l'amendement n°474 qu'il convient de favoriser le petit éolien en milieu rural. Encore faut-il qu'il soit bien encadré. L'amendement porte sur un alinéa que la commission a décidé de supprimer parce qu'il est vague et qu'il énumère des exemples. Or, cet amendement rajoute encore un exemple à la liste que nous souhaitons supprimer. Retrait ou rejet.
Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État. - Avis favorable au n°72. Nous sommes d'accord sur le fond avec le n°720 mais il est satisfait car il existe déjà de nombreux encouragements à la performance énergétique et le plan Barnier en envisage encore de nouveaux. Retrait ou rejet du n°474 : les éoliennes de moins de douze mètres ont un faible rendement et leur développement pourrait créer un mitage nuisible à l'essor de cette source d'énergie. Je préfère donc qu'on en reste à l'actuel encadrement.
L'amendement n°72 est adopté.
Les amendements nos720 et 474 deviennent sans objet.
M. le président. - Amendement n°425, présenté par Mme Herviaux et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
Après le onzième alinéa de cet article, insérer un alinéa ainsi rédigé :
L'État réorientera les aides publiques vers les systèmes agricoles les plus respectueux de l'environnement, en utilisant tous les instruments prévus par le bilan de santé de la politique agricole commune.
M. Jean-Jacques Mirassou. - L'État doit réorienter ses aides publiques vers les systèmes agricoles les plus respectueux de l'environnement, en utilisant tous les instruments prévus par le bilan de santé de la politique agricole commune : arrêt des références historiques, utilisation de toutes les possibilités de modulation, fonds de l'article 68. Suite à l'accord européen, chaque État membre doit réorienter ses aides dès 2010 et il est urgent que la France fasse ses choix et produise des objectifs chiffrés dès le Grenelle II. Il en va de la répartition des aides européennes. La demande de produits biologiques, en perpétuelle croissance, est actuellement satisfaite par des produits importés, en général de pays non européens (M. Roland Courteau : « voilà » !), ce qui pose des problèmes de contrôle, d'étiquetage et de transport. La réorientation des aides nationales doit se faire en direction des formes d'agriculture respectueuses de l'environnement dont l'essor aurait, en outre, des conséquences économiques positives. Il faut faire figurer cette ambition dans le texte de loi. (M. Roland Courteau applaudit)
M. Bruno Sido, rapporteur. - Le principe d'éco-conditionnalité existe déjà. Il est vrai que le bilan de la PAC permettra un rééquilibrage entre les premier et deuxième piliers -M. Muller sera content...- mais il ne faut pas se méprendre sur les difficultés des agriculteurs : contrairement aux médecins, ils sont tenus de déclarer précisément, non la substance active mais le nom précis du produit qu'ils utilisent. Ne chargeons pas trop leur barque !
Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État. - Je comprends qu'il s'agit d'un amendement d'appel. Avec Michel Barnier, nous travaillons au bilan de la PAC. Votre appel est entendu. Retrait ou rejet.
M. Jean-Jacques Mirassou. - Je considère qu'il n'est pas encore entendu. Je maintiens l'amendement.
M. Jacques Muller. - Tout à l'heure, nous avons voté l'excellent amendement de M. Fortassin, qui favorise l'élevage sur herbe. Pourquoi mon amendement incitant à l'élevage sur paille n'a-t-il pas connu la même faveur ? Un lisier qui contient de l'azote minéral migre très facilement vers la nappe phréatique, ce qui n'est pas le cas d'un lisier avec azote organique. C'est pourquoi, en Alsace, certains pratiquent l'élevage porcin sur paille... J'aurais été d'accord avec l'argument de la ministre d'après lequel mon amendement relevait du Grenelle II et je l'aurais retiré. J'apprécie à leur juste valeur les remarques du rapporteur sur ma capacité à soulever les bottes de foin et j'aimerais qu'on élève un peu le débat...
Quant au n°425, c'est un excellent amendement. Il n'inscrit pas dans la loi des détails, il prône une réorientation des aides publiques. Les aides actuelles datent d'une époque où l'Europe était déficitaire alors qu'aujourd'hui, conformément à ce qu'édicte le Grenelle, il s'agit de favoriser une « transformation de l'agriculture ». Riverain de l'Allemagne, je rencontre des producteurs de fruits et légumes qui se plaignent de la concurrence allemande qui reçoit des aides dont, eux, ne bénéficient pas.
Si l'on n'apporte pas une réponse aujourd'hui, on ne le fera jamais.
L'amendement n°425 n'est pas adopté.
M. le président. - Amendement n°557, présenté par Mme Blandin et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
Dans la première phrase de l'avant-dernier alinéa de cet article, après les mots :
d'identification
remplacer le mot :
ou
par le mot :
et
Mme Marie-Christine Blandin. - L'alinéa visé traite de la vente et de la prescription des produits phytopharmaceutiques dont je rappelle que la dénomination ne cesse de changer -pesticides puis produits phytosanitaires naguère, produits phytopharmaceutiques aujourd'hui, en viendra-t-on demain à les qualifier de simples tisanes ?
Les conseils dispensés aux agriculteurs ne sauraient être entachés par les intérêts du vendeur. C'est le principe de séparation du conseil et de la vente qui prévaut, par exemple, dans la distinction du médecin et du pharmacien. L'encadrement de la profession, nous en sommes bien d'accord, est indispensable, y compris pour les jardiniers de nos collectivités. Mais pourquoi, après avoir écrit que l'État agira « par une combinaison d'actions » présenter celles-ci comme alternatives ? Elles sont pour nous complémentaires.
M. Bruno Sido, rapporteur. - Cette question n'a pas soulevé de difficulté lors du colloque. Votre amendement produirait un résultat contraire au but recherché puisqu'il ouvrirait le champ à la vente sauvage et au conseil non encadré. Et comment s'assurer que des conseillers indépendants sont bien couverts par une assurance responsabilité civile ? Retrait ou rejet.
Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État. - A l'issue du Grenelle, des engagements ont été pris. Lors du colloque, un accord s'est dégagé sur l'alternative, ne le remettons pas en cause. L'essentiel est bien que les professionnels adhèrent à ces propositions.
Mme Marie-Christine Blandin. - Il me semblait vraiment que cet « ou», très dommageable, procédait d'une erreur. Je maintiens l'amendement.
L'amendement n°557 n'est pas adopté.
M. le président. - Amendement n°424, présenté par Mme Herviaux et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
Dans la première phrase de l'avant-dernier alinéa de cet article, remplacer les mots :
des aides budgétaires pour aider les agriculteurs à développer l'agriculture biologique
par les mots :
surtout une réorientation des aides budgétaires pour aider à la fois les agriculteurs à développer l'agriculture biologique et les structures qui oeuvrent au développement de l'agriculture biologique et de l'agriculture durable pour assurer pleinement leur mission
M. Roland Courteau. - La France est très en retard sur ses voisins européens en matière d'agriculture écologique. Alors que sa part était, en 2005, de 25 % en Autriche, de 8,4 % en Italie et que la moyenne européenne se situait aux alentours de 4 %, elle est deux fois moindre dans notre pays. Pour répondre à la demande croissante des consommateurs et structurer la filière, il faut aider et les agriculteurs et les structures. La révision de l'article 68 du Règlement sur les régimes de soutien direct aux agriculteurs dans le cadre de la PAC a rendu possible une réorganisation de la filière, tandis que les conclusions du Grenelle vont à « promouvoir une meilleure organisation de l'ensemble des acteurs pour des pratiques agricoles plus durables ».
Aider non seulement la production mais les structures sera gage d'une organisation efficace de la filière et contribuera à la fixation d'un prix rémunérateur pour les agriculteurs et raisonnable pour un grand nombre de consommateurs. Le cinquième baromètre de l'Agence de promotion de l'agriculture biologique fait apparaître que 42 % des Français consomment un produit biologique au moins une fois par mois et que 84 % souhaitent le développement de la filière.
Donnons les moyens à cette agriculture de sortir de la marginalité économique en répondant aux objectifs du Grenelle.
M. Bruno Sido, rapporteur. - Votre amendement est partiellement satisfait puisque le texte prévoit « un soutien accru aux structures et mécanismes de soutien à une agriculture biologique durable ». Retrait ou rejet.
Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État. - Même avis, pour les mêmes raisons. Je rappelle que le plan Bio 2000 comporte 15 millions sur cinq ans pour le développement de la filière, qui s'ajoutent aux 36 millions sur trois ans, aux 2 millions prévus en 2009 pour le soutien à l'innovation et au doublement du crédit d'impôt pour conversion au biologique.
M. Didier Guillaume. - Nous l'avons déjà dit, il faut manifester clairement que c'est bien l'ensemble de la filière que nous entendons prendre en compte. Dans un texte d'orientation, donner un tel signe marquerait la volonté du Gouvernement.
M. Alain Vasselle. - Ces dispositions démontrent la nécessité, reconnue par le Gouvernement, d'utiliser des moyens budgétaires et fiscaux d'accompagnement. Je regrette que l'on ne fasse pas preuve de la même sollicitude à l'égard des agriculteurs de la filière traditionnelle auxquels on demande de réduire l'utilisation des intrants, au risque de créer une agriculture à deux vitesses, l'une biologique, aidée par la collectivité, l'autre traditionnelle, à laquelle on demande des efforts sans se soucier de les accompagner. Et que Mme Blandin ne nous dise pas que la réduction des intrants représente, pour les agriculteurs, une économie qui compense leur perte de revenu ! Quand on économise 10 et que l'on perd 30, on reste perdant ! J'ajoute qu'il serait bon que les études d'impact ne se contentent pas de constater les effets positifs mais recensent aussi les effets négatifs sur les agriculteurs.
M. Jacques Muller. - Au risque de vous surprendre, je partage le point de vue de M. Vasselle quant à la nécessité d'accompagner l'agriculture conventionnelle vers une agriculture intégrée, dont les produits ne peuvent pas, au même titre que ceux de l'agriculture biologique, se valoriser sur le marché.
Cependant, le passage de l'agriculture intégrée au biologique reste un saut technique difficile. J'ai passé 25 ans au lycée agricole de Rouffach et puis vous dire que cela n'a jamais pu se faire à la ferme de la Judematt. Les incidences techniques sont telles qu'il y faut un soutien financier.
La somme des chiffres évoqués par Mme la ministre ne fait que 100 millions d'euros, alors que les agrocarburants seront aidés, au titre de la loi de finances pour 2009, à hauteur d'un milliard. Cherchez l'erreur !
M. Bruno Sido, rapporteur. - Il n'y en a pas !
L'amendement n°424 n'est pas adopté.
M. le président. - Amendement n°427, présenté par Mme Herviaux et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
Dans la première phrase de l'avant-dernier alinéa de cet article, remplacer le taux :
20 %
le taux :
30 %
Mme Odette Herviaux. - La formation initiale et continue de tous les acteurs de la filière, du producteur au consommateur, est de grande importance pour accompagner l'évolution des mentalités et des comportements que l'on constate depuis une quinzaine d'années, dans ma région comme ailleurs. Il suffit de voir le nombre de personnes intéressées, lors du Salon professionnel de l'agriculture et de l'élevage de Rennes, par les espaces consacrés à la recherche appliquée. La demande d'information doit être valorisée.
Le Grenelle a déjà permis des avancées, dont le lancement en 2008 d'un grand programme de recherche appliquée et de formation mobilisant les organismes de recherche et les agriculteurs, prévu par l'engagement 125, et son financement par l'affectation de 9 millions d'euros à un programme spécifique de l'Agence nationale de la recherche. L'engagement 208 prévoit la généralisation rapide des méthodes mises au point de façon expérimentale pour réduire la consommation d'intrants et économiser l'énergie. D'autres pistes de réflexion proposées par le groupe de travail n°4 du Grenelle mériteraient d'êtres étudiées, comme le remplacement des sanctions réglementaires par des formations alternatives, une adaptation des règles européennes de conditionnalité, ou un accompagnement spécifique de l'installation des jeunes.
Je propose de revoir nos ambitions à la hausse, afin d'envoyer un message clair au monde agricole et aux consommateurs.
M. Bruno Sido, rapporteur. - Former un cinquième des agriculteurs d'ici moins de trois ans est déjà ambitieux ; en former un sur trois paraît peu réaliste, étant entendu que l'objectif est un jour de les former tous. Retrait, sinon rejet.
Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État. - Le dispositif de formation est lourd. L'objectif de 20 % n'est qu'une étape. Il ne serait pas réaliste d'aller au-delà.
Mme Odette Herviaux. - On peut convenir de la lourdeur du dispositif. Si l'objectif de 20 % n'est qu'une étape...
L'amendement n°427 est retiré.
M. le président. - Amendement n°373, présenté par M. Vasselle.
Après les mots :
formation en 2012
supprimer la fin de l'avant-dernier alinéa de cet article.
M. Alain Vasselle. - L'éco-conditionnalité exige déjà l'implantation de bandes enherbées. Pourquoi le répéter, d'autant que la largeur de ces bandes est à l'évidence d'ordre règlementaire ? Je considère qu'on aurait pu faire l'économie de nombreuses dispositions redondantes... et de temps de débat.
M. le président. - Amendement n°73, présenté par M. Sido, au nom de la commission.
Dans la première phrase de l'avant-dernier alinéa de cet article, après le mot :
locales ;
insérer les mots :
la valorisation des effluents organiques d'élevage ;
M. Bruno Sido, rapporteur. - Chacun connaît la performance des engrais de ferme. Le recours à ces dérivés de l'élevage permet leur valorisation, la diminution des autres intrants, l'amendement des sols. Outre qu'ils apportent autant d'éléments nutritifs que les engrais minéraux, leur usage régulier entraîne en dix ans une augmentation significative du taux de matière organique des sols. D'où cet amendement, qui satisfera M. Soulage.
M. le président. - Amendement n°660, présenté par MM. Muller et Desessard et Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet.
Après les mots :
l'implantation progressive,
rédiger comme suit la fin de l'avant-dernier alinéa de cet article :
pour améliorer la qualité de l'eau et préserver la biodiversité, de bandes enherbées, zones végétalisées tampons, et productions biologiques éventuellement renforcées par des exigences complémentaires, d'au moins 5 mètres de large le long des cours d'eau et plans d'eau. Ces dispositifs contribuent aux continuités de la trame verte et bleue.
M. Jacques Muller. - La définition de la trame verte est à mes yeux trop restrictive. Je souhaite y intégrer les petites exploitations biologiques, quitte à renforcer leurs contraintes environnementales, sinon elles sont nombreuses qui risquent de disparaître.
M. Bruno Sido, rapporteur. - L'amendement n°373 fait disparaître des dispositions qui ont fait l'objet d'engagements très précis lors du Grenelle et dont l'objectif est de rendre notre agriculture plus durable. Retrait, sinon rejet.
Il n'est pas acquis que les productions biologiques ne soient pas sources de pollution, le retournement des terres relâche par exemple des nitrates. Elles ne peuvent être assimilées au couvert végétal. Retrait, sinon rejet de l'amendement n°660.
Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État. - La couverture des sols et la création de bandes enherbées sont des engagements hautement symboliques du Grenelle. Retrait de l'amendement n°373. Avis favorable à l'amendement n°73 et défavorable au 660 : la création de bandes enherbées a aussi un objectif de biodiversité, ce que n'assure pas nécessairement l'agriculture biologique. J'ajoute que la réglementation européenne nous impose la création de telles zones tampon d'ici 2012.
M. Alain Vasselle. - Je ne suis insensible ni à l'appel de la commission ni à la gentillesse de Mme la ministre. Je comprends que nous sommes dans un texte purement déclaratif et que les engagements du Grenelle, même s'ils sont déjà en application, doivent y figurer. Dont acte. Je souhaitais seulement alléger la rédaction.
M. le rapporteur a tout à l'heure demandé à M. Soulage, pour s'opposer à son amendement, s'il connaissait des agriculteurs qui ne valorisent pas leurs effluents d'élevage.
Et puis M. le rapporteur s'est rattrapé en disant que son amendement n°73 était bien meilleur que celui de M. Soulage. Entre le début et la fin de son argumentation, j'ai donc ressenti une petite contradiction. (Sourires) Mais comme je n'ai pas senti de frémissement dans l'hémicycle en faveur de mon amendement, je le retire.
L'amendement n°373 est retiré.
Mme Odette Herviaux. - Concernant la valorisation des effluents organiques, nos agriculteurs font preuve d'inventivité, notamment pour économiser l'énergie. Ainsi, utilisent-ils la chaleur dégagée par le stockage des fientes et du lisier pour chauffer leurs bâtiments d'élevage.
L'amendement n°73 est adopté.
M. Jacques Muller. - La rédaction de mon amendement laisse effectivement planer un doute. Je le retire bien que je sois persuadé que les producteurs bio puissent être pris en compte, moyennant le respect de certains critères.
L'amendement n°660 est retiré.
M. le président. - Amendement n°74 rectifié, présenté par M. Sido, au nom de la commission.
Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :
La France demandera que l'Organisation mondiale du commerce prenne en compte des exigences environnementales afin d'éviter les distorsions de concurrence entre productions nationale et importée en matière agricole.
M. Bruno Sido, rapporteur. - Cet amendement, qui reprend l'un des engagements du Président de la République lors de la conclusion des tables rondes du Grenelle de l'environnement, tend à créer d'égales conditions de concurrence entre les produits agricoles français et ceux qui sont importés.
Les contraintes environnementales imposées aux agriculteurs français se répercutent sur les coûts. Afin que la concurrence ne soit pas faussée avec les produits d'importation, il importe que leurs producteurs soient soumis au même degré d'exigence. Une taxe pourrait ainsi frapper les produits qui y échappent.
M. le président. - Amendement n°234, présenté par Mme Didier et les membres du groupe CRC-SPG.
Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :
Enfin, sur le plan international, la France demandera l'exclusion du secteur agricole des négociations commerciales au sein de l'Organisation mondiale du commerce.
M. Jean-Claude Danglot. - Le Gouvernement doit obtenir l'exclusion du secteur agricole des négociations commerciales au sein de l'OMC.
Nul ne peut se satisfaire aujourd'hui du cycle de Doha. L'ultralibéralisme qui préside à la mondialisation des échanges vient de démontrer qu'il est dangereux d'accorder sa confiance à ceux qui recherchent le profit maximum.
La spéculation se déplace ainsi au gré des rentabilités : après le fiasco de l'immobilier aux États-Unis, les spéculateurs se sont tournés vers les denrées alimentaires. La mise en concurrence, voulue par l'OMC, de toutes les agricultures du monde, ne tient pas compte des différences colossales qui existent d'un pays à l'autre. La puissance alimentaire des nations ne peut être une monnaie d'échange face aux produits manufacturés ou aux services car il s'agit d'un enjeu vital pour plus d'un milliard d'individus.
En attendant qu'une autre conception de l'OMC prévale, ce qui n'est pas pour demain, il faut sortir l'agriculture des négociations de l'OMC.
M. Bruno Sido, rapporteur. - L'OMC est la seule enceinte dans laquelle peuvent être discutées les conditions d'une agriculture durable et respectueuse des différences de développement entre pays. Sortir l'agriculture de cette organisation la livrerait à la jungle, au libre jeu du marché, ce qui accentuerait les inégalités entre pays producteurs. Avis défavorable.
Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État. - Le Gouvernement est favorable à l'amendement n°74 rectifié.
Il est bien évident que la seule approche commerciale pour l'agriculture ne peut suffire. C'est pourquoi le Président de la République a lancé l'idée d'un partenariat mondial pour l'alimentation. Mais il ne servirait à rien de sortir l'agriculture des discussions de l'OMC. Il faut au contraire parvenir à ce que cette dernière évolue. Je suis donc défavorable à l'amendement n°234.
Mme Odette Herviaux. - On nous a dit à plusieurs reprises, -le ministre de l'agriculture, le commissaire de Bruxelles, que l'on ne pourrait faire bouger l'OMC tant que le cycle de Doha n'aurait pas été achevé. Les exigences environnementales et sociales ne seront éventuellement prises en compte que lors d'un prochain cycle. Il ne faudrait donc pas que l'on cherche à tout prix à achever le cycle actuel en sacrifiant l'agriculture.
M. Alain Vasselle. - Lorsque nous avons examiné l'amendement n°124 rectifié bis, M. le rapporteur m'a dit que son amendement n°74 rectifié me donnerait satisfaction. Mais nous ne pouvons en rester aux simples déclarations d'intention ! Le Gouvernement devra convaincre nos partenaires européens pour que notre représentant à l'OMC se batte pour obtenir satisfaction. Or, comme l'a dit à juste titre Mme Herviaux, je n'ai jamais entendu M. Barnier dire que les critères environnementaux devaient être pris en compte à l'OMC ! Des négociations avec le Brésil et sept autres pays qui l'accompagnent sont en cours sur des importations de produits agricoles en échange de l'exportation de produits manufacturés européens.
Je me demande si le Sénat ne ferait pas oeuvre utile en votant une résolution pour marquer son attachement à ces critères éco-environnementaux. Je ne crois pas que ce texte sur le Grenelle pourra véritablement peser sur les négociations internationales.
M. Jacques Muller. - L'amendement de la commission a le mérite d'introduire une hiérarchie dans les normes : il met l'environnement au-dessus du libre-échange. Comme M. Vasselle, je m'interroge sur la capacité de notre pays à entraîner nos voisins européens.
Je suis donc perplexe : la prudence consisterait à dire que l'agriculture est un domaine stratégique qui ne doit pas faire l'objet de marchandage au sein de l'OMC dont le libre échange est le seul et unique credo. Je m'abstiendrai.
L'amendement n°74 rectifié est adopté.
L'amendement n°234 devient sans objet.
M. le président. - Amendement n°75 rectifié, présenté par M. Sido, au nom de la commission.
Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :
Le rapport prévu à l'article 1er comporte une étude spécifiant l'impact des mesures contenues dans la présente loi sur le secteur agricole.
M. Bruno Sido, rapporteur. - Le secteur primaire occupe une place très importante dans le projet de loi et fait l'objet de nombreuses mesures novatrices.
Or, contrairement à ce qui est prévu pour le bâtiment, le transport ou l'énergie, il n'y aura pas d'étude d'impact sur les conséquences de ces mesures pour ce secteur. Nous proposons de remédier à cet oubli.
Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État. - Je suis favorable à cet amendement qui est d'ailleurs dans l'esprit du Grenelle.
Concernant la capacité de la France à entraîner ses collègues européens, je rappelle que le paquet Climat énergie a été adopté sous présidence française, alors que personne n'y croyait.
A l'OMC, M. Barnier défend avec acharnement nos objectifs agricoles et le vote d'une résolution du Parlement permettrait de l'épauler efficacement.
L'amendement n°75 rectifié est adopté, ainsi que l'article 28, modifié.